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Du fondement d'atteintes aux droits et libertés fondamentaux en droit positif congolais. Cas du droit d'investissements privés.

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par Nephtaly ABASSA BYENDA
Université Libre des Pays des Grands Lacs - Licence 2013
  

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Chapitre.2. DE LA NECESSITE DE PORTER ATTEINTE AU DROIT D'INVESTISSEMENT PRIVE EN DROIT CONGOLAIS

Le droit d'investissement privé, étant l'un des droits fondamentaux, bénéficie de garanties supra législatives87(*) ; en ce que le Doyen L.FAVOREU note qu'il ne peut être restreint l'étendu et la portée de l'exercice des préceptes constitutionnels ; consistant en garantie de la substance et le respect du contenu essentiel ou de l'essence des droits et libertés fondamentaux88(*). Cependant, le droit d'investissement privé ne figurant pas sur le catalogue des droits intangibles89(*) ; il est alors susceptible de recevoir des limites renvoyant à une conception des atteintes. Lesquelles peuvent découler de la nécessité de faire respecter les objectifs d'intérêt général dont la sureté intérieure de l'Etat ou l'ordre public90(*). Telle constituerait donc la légitimité des mesures de restriction portée à l'exercice du droit d'investissement privé pour la Société Kivu market après le retrait de M23 de la ville de Goma (section 1ère), laquelle légitimité, reste basée sur les soucis de sécurité publique ou mieux la sureté intérieure de l'Etat troublée, peut causer la déclaration d'un régime exceptionnel, tombant ainsi dans le panier des actes de gouvernement; insusceptibles de contrôle juridictionnel ou de recours en contentieux, et qui entraine ainsi par voie de conséquences, l'irresponsabilité de l'Etat congolais, sous le regard passif du juge gardien des droits et libertés fondamentaux (section 2ème).

Section.1. De la légitimité des atteintes portées au droit d'investissement privé

Quelle que soit l'explication choisie, la sévérité ne devra pas être de mise, chaque fois qu'un raisonnement à trois temps en bonne et due forme, n'aurait pas changé la solution de fait. Ce raisonnement part du rétablissement de l'ordre public dans ses trois dimensions, en l'occurrence la sécurité publique, tranquillité publique et la salubrité publique.

En revanche, dans certains cas, le malaise inspiré par une solution (laissant indemne un acte juridique contestable comme nous l'avons ci-haut évoqué), trouvera son explication dans la violation par l'acte du ministère public sur commande du Gouvernement, que le juge aurait dû vérifier. Mais sa saisine, généralisée du fondamental « produit un effet de perte de visibilité au Gouvernement»91(*).

En pratique, il conviendra d'admettre que le juge prenne la liberté de moduler son contrôle selon que l'atteinte lui paraît bénigne, courante et admissible, ou au contraire pernicieuse et condamnable. Il ne s'agit donc pas à ce stade d'étudier l'impact de l'acte sur la liberté considérée, mais bien d'examiner ce qui est susceptible d'absoudre l'atteinte critiquée dans le chapitre précédent.

La recherche d'infraction à l'ordre public, est l'une de la justification du principe même de l'intervention du Ministère public, qui doit reposer sur un intérêt digne de protection de l'ordre public, apte à cautériser l'exercice de la liberté d'entreprendre considérée, par coupure des contacts du m23 avec ses financiers dont le gérant du Kivu market, son arrestation et le scellage de l'entreprise, sa principale source de revenus.

A travers ces explications apparemment anodines, il apparaît que la justification d'une atteinte résultant d'un acte juridique du Gouvernement exécuté par le parquet, passe par la justification d'un intérêt à attenter au droit d'investissement privé. Mais ce droit, bien que fondamental soit-il, l'intérêt supérieur de l'Etat dans un acte quelconque doit être à la fois légitime (§.1) et transcender la volonté des particuliers, même si le dit acte ne sera pas contrôlé (§.2) par le juge.

§. 1. Exigence d'un intérêt légitime

Afin de justifier l'atteinte portée à l'exercice du droit d'investissement privé en tant qu'un droit fondamental, il convient de démontrer que l'on poursuit une fin extrêmement louable, ou au moins respectable, notamment la répression des atteintes à l'ordre public dont les crimes contre la sureté intérieure de l'Etat92(*). L'appréciation de la légitimité de l'intérêt avancé, s'avère cependant délicate car, très objective. Elle implique de porter un jugement de valeur, ce qui peut nourrir des avis divergents. Il y a toujours matière à débats ; par exemple, selon la formule du Doyen WASSO, sur les raisons d'Etat, pour une infraction aussi politique que l'atteinte à la sureté intérieure de l'Etat, il va de soi que le droit d'accès au juge, ne soit pas respecté93(*). Car le régime en place, bien que constitutionnel soit-il, est menacé dans sa souveraineté Etatique94(*). Dans ce cas, une question se pose : comment apprécier si la raison d'Etat est susceptible de justifier des atteintes au droit d'investissement privé comme droit fondamental, s'il ne peut être porté devant le juge afin d'en apprécier la légitimité ?

Il n'est pas rare que pour légitimer la violation de libertés, un intérêt légitime fictif soit mis en avant. On se ménage « un vague alibi », en s'abritant derrière un « motif fondé sur l'ordre public ». C'est sans compter avec la règle (proportionnalité) selon laquelle le motif invoqué doit correspondre au but réel poursuivi95(*). C'est ainsi que dans l'affaire Lawless c. République d'Irlande (Arrêt du 1èr juillet 1961), relative à l'internement administratif pour atteinte à la sureté de l'Etat, il s'était posé la question de savoir sur quoi se fondait le Gouvernement Irlandais, pour maintenir longtemps une personne en détention sans comparution devant un juge. La Cour avait soutenu en premier lieu que le Gouvernement pouvait légitimement déclarer qu'un danger public menaçait la vie de la Nation, pendant la période en cause : il existait sur le territoire de la République d'Irlande, une armée secrète agissant en dehors de l'ordre constitutionnel et usant de la violence pour atteindre ses objectifs ; elle menait également les activités terroristes qui augmentaient de manière alarmante depuis l'automne 1956 et pendant le premier semestre de 195796(*). Ce cas, n'est pas loin de celui de la Société Kivu market dont le gérant est détenu sans comparution et par ricochet, elle-même est scellée sans avoir comparu devant un juge. Cette mesure de scellage étant administrativement préventive, apparait comme une mesure strictement limitée aux exigences de la situation du Nord-Kivu. En effet, l'application des principes d'individualité de responsabilité pénale, du droit d'être entendu par le juge, ne pouvaient permettre de freiner l'accroissement du danger pesant sur la République dans sa partie Est, ou précisément dans le Rutshuru au Nord-Kivu et Ville de Goma en 2013. La Cour a en deuxième lieu, renchéri que même le fonctionnement des institutions de la République, des juridictions pénales ordinaires et Cours militaires spécialisées ou des juridictions militaires, ne pouvait non plus suffire à rétablir la paix et l'ordre public97(*). En particulier, la réunion des preuves suffisantes pour convaincre les personnes mêlées aux affaires du m23 comme Kivu market via son gérant, de s'y désolidariser ne pouvait aboutir ; et surtout que ça se heurtait à des grandes difficultés en raison du caractère militaire, secret et de la crainte qu'ils inspiraient parmi la population. C'est pourquoi la Cour a conclu que, la détention administrative comme la mesure préventive tendant à des atteintes des droits et libertés des personnes soupçonnées de participer à des entreprises terroristes attentant la sureté de l'Etat, parait justifiée. Donc, tout droit violé au motif d'ordre public, comme l'atteinte à la liberté d'entreprendre pour la Société Kivu market, par le truchement de son gérant, soupçonnée d'avoir financé le m23, pour attenter à la sureté intérieure de la République Démocratique du Congo, est justifiée. Ce sont les entreprises qui mettent en oeuvre des moyens qui conduisent à la matérialisation des crimes même si les entreprises ne sont pénalement responsables suivant la théorie selon laquelle : « La société ne peut délinquer », « Societas delinquere non potest »98(*).

Naturellement ce principe ne fait pas l'unanimité dans la doctrine. Certains sont pour et d'autres sont contre. Entre les 2 composantes (pour et contre) il y a ceux qui disent « societas delinquere potest sed puniri non potest » c'est-à-dire « la société peut délinquer mais ne peut être punie ». C'est pourquoi ne partageant pas ces thèses, nous pensons contrairement que via ses organes, l'entreprise agit en fait et en droit. Par voie de conséquences, en matière d'infraction aussi politique que l'atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat, elle peut être condamnée à la fermeture complète, nonobstant tout recours. Et nous fustigeons qu'aucun élément ne nous permet d'estimer que les mesures prises par le gouvernement congolais en dérogation de principes constitutionnels, ont pu être en contradiction avec les obligations découlant pour lui du droit international, car les lois pénales obligent tout le monde qui se trouve sur le territoire de le R.D.C99(*). Cependant, le ministère public ne devrait pas hésiter d'envoyer l'affaire en fixation, s'il s'estime avoir des preuves suffisantes. Car, le juge ne peut se laisser abuser par des justifications apparentes. Ne sera-t-il pas, par exemple dupe des « appétits commerciaux peu scrupuleux, déguisés sous le prétexte plus noble de la liberté d'entreprendre ou de l'exercice du droit d'investissement privé », afin d'échapper au paiement des taxes et des droits de douane réguliers, en se familiarisant avec les rebelles pour faire passer des marchandises sans contrôle douanier, dans la zone occupée par les ennemis de la République? .

En tout état de cause, mettre en évidence la réalité de l'intérêt sur lequel repose la mesure du Gouvernement en réaction contre la germe financière de l'ennemi de la paix publique, appréciée en une atteinte à l'exercice du droit d'investissement privé comme droit fondamental fondé sur le principe de la liberté d'entreprendre pour la Société Kivu market, n'est pas chose facile ; non plus ça ne constitue pas toujours un lourd fardeau. Parce que, du point de vue du sujet de l'atteinte c'est-à-dire l'entreprise, si l'exercice par lui d'une liberté d'entreprendre, risque réellement d'être à l'origine d'une perpétuelle perturbation grave à la sureté intérieure de l'Etat, l'exigence étudiée se retournera contre lui. Elle justifiera par exemple, du moins quant à son principe, en une interdiction formelle et temporaire. Exiger la démonstration du trouble engendré par l'exercice d'un droit fondamental (A) est capital en ce que ça nous permettrait de répondre à cette préoccupation (B).

A. Existence d'un trouble à l'ordre public

A l'instar de ce qui a été vu pour l'exigence d'un risque pour la Société, de fournir encore les ressources financières au m23, sur ordre de décaissement et transfert des fonds, fait par BILAL le gérant, la nécessité de se fonder sur un trouble, présente un caractère ambivalent pour la protection de l'ordre public et la souveraineté de l'Etat congolais. Certes, elle constitue en principe une contrainte dans le processus de justification des atteintes, mais c'est ce qu'il convient d'illustrer. Cependant, arguer d'un trouble, permet en retour de justifier certains actes juridiques, sanctionnant la mise en oeuvre d'un droit fondamental. L'implication qu'il faudra examiner parce que les faits pénaux reprochés au sieur BILAL, constitue un trouble redoutable à l'ordre public dont les éléments constitutifs se présentent comme pour tout fait érigé en infraction, en plus de la légalité du fait, encore faudrait-il la réunion de l'élément moral et de l'élément matériel. L'élément moral de l'atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat consiste dans l'établissement de l'intention coupable requise, qui est le fait pour l'auteur (gérant de Kivu market) d'agir sciemment, c'est-à-dire avec l'intention de provoquer l'attentat dans le but, soit de détruire ou de changer le régime constitutionnel, soit d'exciter les citoyens ou habitants à s'armer contre l'autorité de l'État ou à s'armer les uns contre les autres, soit de porter atteinte à l'intégrité du territoire national100(*).

En ce qui concerne l'élément matériel, signalons que suivant son acception légale, celui-ci consiste dans le fait d'entreprendre, par quelque moyen que ce soit, de porter atteinte à l'intégrité du territoire national101(*), à savoir le soutien financier offert au m23 par le gérant de la Société Kivu market Sprl, afin de parvenir à déloger les positions des Forces armées de la République Démocratique du Congo dans le territoire de Rutshuru et marcher sur la ville de Goma, pour des raisons non communiquées102(*).

Au retrait du m23 de la ville de Goma, quelle attitude a pris le Gouvernement ?

* 87 « C'est le moment de nous souvenir que le droit constitutionnel tout entier est pour la garantie des droits et libertés fondamentaux... », Tel que soutenu par M. Hauriou, in Précis de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 1929, p. 702.

* 88 L.FAVOREU, Droit des libertés fondamentales, Paris, 2ème édition, Dalloz, 2002, p.739.

* 89 Cfr : article 61 de la constitution congolaise du 18 Février 2006 telle que modifiée par l'article 1er de la Loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo.

* 90 L.FAVOREU, Op. Cit, p.750.

* 91 G. DRAGO., Les droits fondamentaux entre juge administratif et juges constitutionnel et européens, Revue mensuelle du JurisClasseur - Droit administratif, juin 2004, p.7.

* 92 Art. 195 du Décret du 30 juin 1940 portant Code pénal, dispose : « L'attentat dont le but aura été soit de détruire ou de changer le régime constitutionnel, soit d'exciter les citoyens ou habitants à s'armer contre l'autorité de l'État ou à s'armer les uns contre les autres, soit de porter atteinte à l'intégrité du territoire national, sera puni de la servitude pénale à perpétuité ».

* 93 J.WASSO MISONA, Contentieux administratif, Goma, U.L.P.G.L, 2014, p.25. (Inédit).

* 94 V.BERGER., Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, Paris, 4ème édit, Dalloz, 1994,p.76.

* 95 Véra MORALES, Protection juridictionnelle des droits fondamentaux : révélation d'une entente conceptuelle, Paris, Montpellier, 2005, p.2.

* 96 V. BERGER, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, Paris, 4ème édit, Dalloz, 1994, p.69.

* 97 V. BERGER, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, Paris, 4ème édit, Dalloz, 1994, p.69.

* 98 S.BASILE., Responsabilité de la personne morale,Paris,P.U.F,2009,p.46.

* 99 Lire l'article 15 du Décret de 1895, portant statut des étrangers, B.O., 1895.

* 100 Lire l'art.195 du Décret du 30 juin 1940, portant code pénal congolais.

* 101 Voir l'art.197 du Décret du 30 janvier 1940.portant code pénal congolais.

* 102 Pour ce qui est des raisons, pour lesquelles Sieur BILAL aurait offert soutien financier au m23, il nous semble que ce serait guidé par les appétits commerciaux excessifs de vouloir gagner plus, en passant par fraude fiscale tout en échappant aux taxes et droits des douanes, lorsque les marchandises de la société qu'il gère, allaient facilement entrer au pays en passant par la zone occupée par le m23.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery