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Le projet géostratégique des à‰tats-Unis d'Amérique dans le golfe de Guinée. Analyse de l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013.

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par François Xavier NOAH EDZIMBI
Yaoundé II Soa - Master II en Sciences politiques 2014
  

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b- Les moyens diplomatiques de l'offensive américaine au Cameroun

Pour mener une politique camerounaise susceptible de lui garantir un fort ancrage et un maximum de succès, les États-Unis font usage du soft et du hard power que des auteurs tels que Joseph NYE et ARMITTAGE224 qualifient de smart power225. Pour eux, à la différence de MACHIAVEL qui pensait qu'il est plus sûr d'être craint qu'aimé, les tenants américains du smart power pensent qu'il est plus sage et intelligent aujourd'hui d'être craint et aimé à la fois226. Dans son ambition de renforcer des liens de solidarité avec le Cameroun, les États-Unis d'Amérique pratiquent une diplomatie à géométrie variable. Elle est, en effet,

222 Cameroon Tribune, no 10267/6468, p.2.

223 Tchetchoua Tchokonté, « Enjeux et jeux pétroliers en Afrique... », pp.49.

224 Joseph NYE et R. ARMITTAGE, « How America can become a smarter power », in Smarter, more secure America, published by the Center for strategic and international studies, commission on smart power, Washington DC, 2007, pp.6-13.

225 Ibid.

226 Nzeugang, « Les États-Unis en Afrique après le 11 septembre 2001... », p.72.

Mémoire en Master II Science Politique François Xavier NOAH EDZIMBI, UY II-SOA 70

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parfois sévère sur les avancées démocratiques ou parfois détendue, amicale et fructueuse en termes de coopération. Les relations diplomatiques entre les deux États sont caractérisées par des visites de responsables gouvernementaux, des relations amicales entre autorités politiques des deux pays de même que des représentations diplomatiques de choix. Le poids de la représentation diplomatique américaine au Cameroun tient à la nouvelle orientation donnée à la stratégie de sécurité nationale américaine par l'ancien Président George W. BUSH, en Septembre 2002.

Celle-ci consistait à quadriller les régions africaines riches en ressources stratégiques. A partir de cette orientation, les États-Unis ont inauguré en février 2006 leur nouvelle chancellerie au Cameroun. Des autorités politiques des deux pays, le président Paul Biya pour le Cameroun et le secrétaire d'État américain aux Affaires africaines, Jendayi E. FRAZER, ont assisté à l'inauguration de cette ambassade. La nouvelle chancellerie, l'une des plus grandes en Afrique subsaharienne, reflète le niveau d'excellence des relations américano-camerounaises, d'après le communiqué de presse du jeudi 16 février 2006. Elle est la preuve d'un engagement clair et ferme des Américains au Cameroun227. L'Ambassadeur en exercice à cette époque, Niels MARQUARDT, soulignait ainsi que les États-Unis ont l'intention d'être au Cameroun pour toujours228.

La nouvelle ambassade américaine est surtout l'expression d'une préservation, par les États-Unis, de leurs intérêts stratégiques vis-à-vis des menaces sécuritaires enregistrées au Cameroun et dans le Golfe de Guinée en général. Selon le général James Clapper, directeur du renseignement national américain : « Toute la zone sahélienne et même au-delà, jusqu'à la RD Congo en passant par la Centrafrique, forme un immense incubateur pour les groupes rebelles, extrémistes et terroristes en 2014229 ». Le général conseille ainsi Washington de mobiliser d'importants moyens financiers et matériels pour protéger leurs intérêts dans cette région de l'Afrique.

Le Cameroun, pays partageant des frontières communes avec le Tchad, le Nigeria et la Centrafrique où se concentrent certaines activités terroristes et des prises d'otages, n'échappe pas à cette stratégie. Par ailleurs, entre le mois de février 2004 et août 2006, on

227 Citation tirée du communiqué de presse publié le jeudi 16 février 2006 sur www.french.cameroon.usembassy.gov

228 Citation tirée du discours prononcé par l'ambassadeur des États-Unis lors de l'inauguration de la nouvelle chancellerie sur www.french.cameroon.usembassy.gov

229 Jeune Afrique, no 2769 du 2 au 8 février 2014, p.6.

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peut dénombrer près d'une dizaine de visites de hauts responsables américains au Cameroun. Il s'agit entre autres de sénateurs, de diplomates, d'officiers supérieurs de l'armée voire des conseillers à la sécurité de l'ancien Président George BUSH. On peut aussi mentionner celle du secrétaire d'État aux Affaires africaines, Jendayi E. FRAZER, en Février 2005, qui prit l'engagement de renforcer les relations entre les deux États au niveau militaire. De celle de monsieur Johnnie CARSON, sous-secrétaire d'État américain aux affaires africaines, émissaire spécial du président OBAMA auprès du président Paul BIYA230.

Ou encore celle de monsieur Carter F. HAM, général d'armée, commandant des forces américaines en Afrique reçu par le président Paul BIYA231, sans oublier celles de potentiels investisseurs et hommes d'affaires. Bien qu'elles montrent l'intérêt des États-Unis à accompagner le Cameroun dans ses projets de développement et de démocratisation, ces visites ont pour but de permettre un accès aux marchés camerounais et d'influencer l'appareil politique et administratif. L'existence de relations amicales, entre différents responsables politiques camerounais et américains, de même que le rôle indéniable qu'ont joué d'anciens ambassadeurs américains, vient renforcer cette idée.

Deux anciens ambassadeurs américains, Niels MARQUARDT et Janet GARVEY, qui se succédèrent à Yaoundé entre 2006 et 2010 (période couverte par les câbles WIKILEAKS), ont eu de rapports étroits avec de responsables politiques camerounais qui se confiaient à eux et leur faisaient part de leurs ambitions politiques. Il s'agit de l'ancien ministre de la Justice, vice-premier ministre, Amadou ALI, et de l'ancien ministre de l'Administration Territoriale et de la Décentralisation, aujourd'hui aux arrêts, Marafa HAMIDOU YAYA. D'après un câble du site WIKILEAKS, datant de début 2007, l'ancien ministre de la Justice aurait confié à l'ancien ambassadeur Niels MARQUARDT, selon une dépêche confidentielle rédigée par ce dernier au gouvernement américain, qu'il apparaissait en bonne place dans la liste des « successeurs possibles du président Biya232 ».

Avant de confier quelques années par la suite, à la veille des élections présidentielles de 2011, toujours selon un câble diplomatique de mars 2009, que le Nord soutient Paul Biya, mais ne soutiendra ni un autre Béti ni un Bamiléké233. Marafa HAMIDOU YAYA, quant à

230 Cameroon Tribune, no 9875/6076, p.2.

231 Ibid., no 10065/6266, p.2.

232 Jeune Afrique, no 2644 du 11 au 17 septembre 2011, p.29.

233 Ibid.

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lui, confiera à Janet GARVEY, d'après un câble diplomatique de 2007, qu'il a des ambitions présidentielles234. Il lui dira par la suite, selon un câble diplomatique publié par le site WIKILEAKS en février 2010, qu'il peut se retrouver en prison235. Ces relations particulières permettent aux américains d'avoir une mainmise sur l'appareil gouvernemental et de se donner la possibilité d'anticiper sur les décisions de responsables politiques camerounais. La lutte contre la corruption par l'engagement de l'ancien ambassadeur, R. Niels MARQUARDT, auprès du chef d'État camerounais a été remarqué.

À la sortie d'une audience que lui avait accordée le Président de la République le 24 février 2006, il déclarait : « J'ai dit au chef de l'État qu'il peut compter sur le soutien moral et matériel des États-Unis dans ce sens »236. Ce soutien sera poursuivi avec l'ancien ambassadeur Janet Elisabeth GARVEY ou encore de Robert P. JACKSON qui, rendu en fin de séjour au Cameroun, s'est félicité des relations cordiales entre les deux États, et a réaffirmé l'engagement de son pays d'accompagner le Cameroun dans son développement avant de soutenir que le Cameroun a fait une grande avancée démocratique237. Les visites des différents membres du gouvernement renforcent les relations entre ces deux États.

Ces visites trouvent leur point d'orgue avec des rencontres entre les chefs d'États des deux pays. La plus importante a eu lieu après les attentats du 11 septembre 2001 lors du passage du Cameroun à la présidence tournante du conseil de sécurité de l'ONU. Au cours de cette rencontre, il y a eu un tête-à-tête entre Georges BUSH et Paul BIYA. L'appui aux institutions démocratiques Camerounaises est un des axes de la diplomatie américaine.

La stratégie des États-Unis pour promouvoir la démocratie et les droits de l'homme est focalisée sur le renforcement des institutions nécessaires à la stabilité démocratique. Cela s'effectue par la transparence et la liberté dans les processus électoraux mais également à travers une presse plurielle et professionnelle238. Ces relations diplomatiques montrent l'engagement américain auprès des responsables politiques camerounais. Elles sont un reflet du projet géostratégique des États-Unis pour le Cameroun. Selon Henry KISSINGER, citant André KAPSI, d'un côté, Bill CLINTON, ancien président américain, était très préoccupé par les droits de l'Homme. De l'autre, il voulait des succès politiques. Aussi, quand les deux

234 Ibid., no 2670 du 11 au 17 mars 2012.

235 Ibid.

236 N. AMAYENA, « Lutte contre la corruption : soutien total des Etats-Unis », Cameroon Tribune, 17 février 2006.

237 Cameroon Tribune, no 10440/6641 du lundi 07 octobre 2013, p.4.

238 Voir sur le site internet www.french.cameroon.usembassy.gov

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objectifs étaient en conflit, il choisissait la politique239. Lorsqu'on se réfère à ces propos, il apparait que la diplomatie américaine au Cameroun n'a pour objectif que la projection de puissance et l'accroissement de l'influence américaine. Pour ce faire, renforcer les liens qui existent entre les deux pays, au détriment de l'ancienne puissance tutrice, est une nécessité. En effet, au sortir de la colonisation, à la fin des années 1950, la France a obtenu du jeune État camerounais des accords de coopération stratégiques qui lui assurent une influence sur ses ex-colonies240. La division idéologique du monde a favorisé cette stratégie française puisque les Super grands ne traitaient généralement avec leurs partenaires africains que par alliés interposés241.

Mais depuis la fin de la guerre froide, au début des années 1990, on assiste à un redéploiement spectaculaire des grandes puissances en Afrique. Cette période marque le repositionnement de la France inquiète du déploiement des autres puissances dont les États-Unis242. A en croire Clara PULIDO ESCANDELL, la France serait en perte d'influence, déclassée au profit des États-Unis dans son pré-carré243 d'Afrique Centrale. Elle serait réduite à une phase essentiellement défensive244 et, d'après un ambassadeur américain, n'est plus capable de s'imposer en Afrique. D'ailleurs, en 2002, les États-Unis ont déclaré le Golfe de Guinée zone d'intérêt vital pour leur sécurité nationale245. L'on ressent une préoccupation française face à la présence américaine au Cameroun qui menace ses intérêts246.

Yves Alexandre CHOUALA247, quant à lui, soutient que la coopération avec le Cameroun permettrait aux États-Unis d'utiliser ce pays comme contre balancier de l'influence Française dans la sous-région. C'est dire la valeur du Cameroun dans le jeu d'influence des États-Unis dans la sous-région. Cette manière de procéder des États-Unis se ressent aussi dans les cadres socio-économiques et militaires.

239 Nzeugang, « Les États-Unis en Afrique après le 11 septembre 2001... », p.149.

240 A. FOGUE T. : « Histoire diplomatique, extraversion étatique et conflits politiques en Afrique noire. Approche stratégique des conflits politiques africains et analyse des enjeux autour de la sécurité en Afrique noire », Thèse de Doctorat, 2002.

241 M. S. AICARDI, La politique Africaine des Etats-Unis, 3e Edition, Paris, Nouveaux horizons, 1989, p.139. ; J. V. NTUDA E., « La politique étrangère des Etats Africains : rupture et continuité d'une diplomatie contestée », in Revue juridique et politique, no 2, 2003, pp.131-154.

242 Voir ESCANDELL, 1997.

243 Un pré-carré est une zone d'influence politico-économique et culturelle, composée d'un ou de plusieurs pays, et généralement acquise à une puissance étrangère.

244 ESCANDELL, Op. Cit.

245 De LESTRANGE, ZELINKO et PAILLARD, Géopolitique du pétrole, un nouveau Marché, de nouveaux risques, de nouveaux Mondes, Paris, Techniq, 2005, p.159.

246 J. F. THOMSON, « L'Afrique occupe une place de premier plan dans la nouvelle stratégie de sécurité nationale » in Foreign Policy, Vol. 7, no 4, 2002, p.30.

247 Y. A. CHOUALA, « La crise diplomatique de Mars 2004 entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale : fondements, enjeux et perspectives », in Polis, 2005.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore