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Le projet géostratégique des à‰tats-Unis d'Amérique dans le golfe de Guinée. Analyse de l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013.

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par François Xavier NOAH EDZIMBI
Yaoundé II Soa - Master II en Sciences politiques 2014
  

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b- Les moyens militaires

Être une grande puissance implique un rôle subtil, changeant, ambigu et parfois cynique270. Les États-Unis mobilisent d'importants moyens militaires au Cameroun comme instruments au service de la réalisation d'ambitions géopolitiques271. Ils constituent des outils de projection et d'installation concourant à la transformation de l'espace camerounais au mieux de leurs intérêts. Nous ferons part des moyens déployés dans la formation militaire en vue de lutter contre la piraterie et l'insécurité transfrontalière (b-1), et par la suite contre le terrorisme (b-2).

b- 1- L'appui à la lutte contre la piraterie et l'insécurité transfrontalière

Les variables qui figuraient dans l'agenda des États-Unis avant le 11 septembre en 2001, à savoir la démocratie et le pétrole, ont été modifiés. En effet, après les attentats du 11

267 N. CHOMSKY, Dominer le monde ou sauver la planète : l'Amérique en quête d'hégémonie mondiale, Paris, Fayard, 2003.

268 Pascal Boniface, « Les leçons du 11 septembre 2001 » in Pascal Boniface, les leçons du 11 septembre, Paris, PUF, 2001, p.10.

269 J-E. PONDI (dir.), « L'Irak : « pas décisif » vers l'empire ? » in Une lecture africaine de la guerre en Irak, Maisonneuve et Larose/ Afredit, Paris, décembre 2003, pp.17-22.

270 Huntington S. (1997-2000) Le choc des civilisations, Paris, Odile Jacob, Avril, p.345.

271 Ibid.

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septembre en 2001, qui étaient principalement du ressort des forces asymétriques, l'islamisme prendra une place importante dans la diplomatie américaine.

La force militaire, pour eux, demeure le fondement de l'ordre international. Elle n'est ni partout ni en toutes circonstances décisives272, mais nécessaire pour la lutte contre le terrorisme. Incapable de compter uniquement sur ses forces nationales, et n'étant pas assez formées et équipées contre les menaces provenant de forces asymétriques, le Cameroun trouve un soutien auprès des États-Unis d'Amérique. Les officiels américains pour ce faire insistent sur l'importance qu'ils attachent au consentement des dirigeants camerounais quant à leur présence militaire et sur la nature coopérative de leurs structures. L'engagement militaire des États-Unis sur les côtes camerounaises part donc d'une coopération entre les deux États.

Les États-Unis n'ont pas cessé depuis le 11 septembre 2001 de renforcer leur présence militaire au Cameroun par l'United States African Command (US-AFRICOM) qui coordonne, depuis son entrée en vigueur le 1er octobre 2008, l'ensemble des activités militaires et civiles des États-Unis en Afrique. La coopération militaire entre le Cameroun et les États-Unis a commencé par une formation de forces militaires camerounaises pour plus d'efficience. Cette coopération s'applique sur le sol américain dans les domaines terrestre, aérien ou maritime, ou dans la lutte contre le terrorisme, les trafics de tout genre, la piraterie, les prises d'otages et le sabotage des plates-formes pétrolières. Il est nécessaire pour les États-Unis, comme l'a souligné le Général James (2006), d'aider le Cameroun à assurer sa sécurité. Le Cameroun a ainsi honoré l'invitation du Président BUSH, en 2002, en prenant part à la conférence de Naples qui s'est tenue en Italie au mois d'Octobre 2004273.

Cette coopération se manifeste au niveau national par la visite d'officiers de l'armée américaine dans le cadre de la protection des ports, aéroports, côtes274 et la mise en place de programmes d'interventions académiques et militaires en ce qui est des questions de défense. L'on peut mentionner l'exercice militaire multinational Central Accord 13, exercice conjoint annuel mené par le commandement militaire des États-Unis pour l'Afrique (AFRICOM) dans la continuité des exercices Atlas et Med Accord qui se déroulent depuis 1996275. L'exercice a été marqué par un déploiement de trois avions C130, deux hélicoptères (Puma, Bell), un

272 Ibid.

273 Come Damien George Awoumou, « Le Golfe de Guinée face aux convoitises », in Enjeux n° 22, janvier-mars 2005, pp.15-20.

274 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », p.35.

275 Cameroon Tribune no 10287/6488- 38e année, du vendredi 22 février 2013, p.6.

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Antonov, des groupes électrogènes, du matériel de transmission, et une équipe médicale américaine et près de 800 militaires.

L'exercice militaire international « OBANGAME EXPRESS » dont l'édition 2013 visait à élaborer une stratégie commune contre la piraterie maritime, le kidnapping, les trafics d'armes, de drogue et stupéfiants, de détournement de pétrole brut et tous les autres fléaux, organisé sous l'égide de l'USAFRICOM, est une autre illustration de cette coopération américaine au Cameroun276. La collaboration d'experts militaires américains pour la formation d'officiers dans les écoles spécialisées, comme le Cours Supérieur Interarmées de Défense (CSID) formant l'élite des armées régionales rebaptisée École Supérieure Internationale de Guerre de Yaoundé (ESIGY)277, est aussi un exemple de la coopération américano-camerounaise.

La signature de deux accords entre Yaoundé en Washington, portant sur l'équipement et l'acquisition par les forces armées et la gendarmerie camerounaise de matériels de génie civil militaire (36 engins de travaux publics pour le 21e régiment du génie militaire de Douala), est aussi un autre axe de cette coopération278. Étant donné que les États-Unis n'ont pas le droit d'accéder aux eaux territoriales camerounaises, la coopération via la marine nationale permet aux États-Unis de sécuriser l'espace maritime camerounais, et, pour les États-Unis, de bénéficier de l'appui des forces camerounaises dans le Golfe de Guinée. Le Cameroun a pris une part active à la mise en oeuvre en 2004 d'une brigade régionale en attente de l'Afrique Centrale279. Cette initiative vise à maintenir la paix et à prévenir les conflits dans la région.

C'est ce qui ressort des propos du sénateur James INHOFE qui, en visite au Cameroun au mois d'octobre 2005, se confiait à la presse. Le sénateur de l'État américain d'Oklahoma précisait que sa visite rentre dans le cadre d'une mission du comité des services de la marine, services que les États-Unis veulent développer en Afrique en comptant sur le leadership du Cameroun280. Les relations militaires entre le Cameroun et les États-Unis d'Amérique sont ainsi fructueuses. Mais le Cameroun est fortement désavantagé. D'après l'ancien président américain en effet, William Bill CLINTON, il n'existe pas de mission

276 Ibid, n° 10288/6489, p.5.

277 Cameroon Tribune, n° 10329/6530, p.4.

278 Ibid., no 10339/6540, p.28.

279 F. NJAKO, « La coopération militaire : l'ère de la réforme », in Honneur et fidélité, no spécial, 2006, p.32.

280 N. AMAYENA, « Un sénateur américain chez le président Paul Biya » in www.rdpcnrw.org, 10 octobre 2005.

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purement humanitaire dans le déploiement d'une puissance à l'étranger281. Ainsi, la présence américaine au Cameroun a comme principale raison la lutte contre le terrorisme et ses corollaires. Le terrorisme est devenu un problème mondial282. La menace terroriste plane sur tous les continents et sur tous les États du monde283. L'Afrique n'en est pas épargnée. Bien plus, elle connaît un lot quotidien de problèmes qui peuvent faciliter l'implantation des terroristes. Au nombre de ces maux, on peut citer les maladies chroniques, la pauvreté galopante, le fondamentalisme religieux, le dysfonctionnement des États, la corruption, le trafic d'enfants, de femmes, d'organes, de drogue, le blanchiment d'argent, faiblesse du contrôle policier et frontalier, circulation mafieuse des capitaux284. Cette menace est d'autant plus sérieuse que certains pensent que les raisons qui auraient justifié l'installation du terrorisme en Asie sont réunies en Afrique.

b - 2 - Les moyens utilisés pour lutter contre le terrorisme

Al-Qaïda semble avoir déjà implanté une de ses antennes en Afrique. Se revendiquant d'Al-Qaïda du Maghreb, le réseau algérien dit Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) sème depuis quelques années la terreur dans certains pays de la région, notamment au Maroc et en Algérie. L'on peut parler du terrorisme au Nigeria avec la secte Boko Haram, ayant ses répercussions au Cameroun.

D'où le projet de création d'un centre autonome de commandement africain des forces américaines stationnées sur le Continent (US-AFRICOM). La lutte contre le terrorisme au Cameroun s'organise à partir de l'imbrication entre terrorisme, la bonne gouvernance et la pauvreté. La bonne gouvernance suppose la démocratie, le respect des droits et libertés de l'Homme et une gestion saine et transparente des ressources publiques. Alan LARSON mentionne dans la REDEEU285 que les terroristes financent leurs opérations par le biais d'activités criminelles courantes, comme la fraude, l'extorsion, les enlèvements et la corruption286.

281 Nzeugang, « Les États-Unis en Afrique après le 11 septembre 2001... », p.220.

282 Voir REDEEU, 2002.

283 Voir CEREMS, Géopolitique de l'énergie, risques et enjeux pour la défense, juillet 2006.

284 S. MAIR, « Terrorism and Africa, on the danger of further attacks sub-saharan Africa », in African Security Review, Vol. 12, no 1, 2003 ; R. ESPOSTI, « Du terrorisme international en Afrique, de ses manifestations et de ses conséquences », in Défense nationale, Paris, avril 2004, p.139.

285 Voir REDEEU, Décembre 2002, pp.19-23.

286 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », pp.37-38.

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Ainsi compris, la lutte contre la corruption et le détournement des deniers publics tout comme la promotion de la démocratie viserait d'abord à lutter contre le terrorisme et donc à protéger les intérêts américains. Cet idéal n'est pas totalement nouveau ; car quelques années auparavant il avait déjà été soutenu par l'ancien président Bill CLINTON en ces termes: « La défense de la liberté et la promotion de la démocratie dans le monde entier ne sont pas seulement le reflet de nos valeurs les plus profondes, elles sont aussi d'une importance vitale pour nos intérêts nationaux287 ». L'ancien président George BUSH, dans ses propos tenus septembre 2002 dans un rapport gouvernemental, corroborera les affirmations de son prédécesseur en estimant que la pauvreté ne transforme pas les pauvres en terroristes et en meurtriers. Cependant, la pauvreté, la faiblesse des institutions et la corruption peuvent rendre les États faibles vulnérables à l'égard des réseaux terroristes et des Cartels de la drogue se trouvant sur leur territoire288. Blaise Pascal TALLA quant à lui, soutient dans Jeune Afrique Économie289 que c'est la pauvreté qui fait le lit de la désespérance et de la colère fournit des recrues potentielles aux organisations terroristes290. Or, les États-Unis ont fait de la lutte contre le terrorisme leur cheval de bataille. L'on comprend ainsi pourquoi ils s'engagent à lutter contre la pauvreté au Cameroun. C'est dans cette logique qu'en 2002, l'AOPIG propose après étude que les États-Unis oeuvrent en faveur de l'annulation de la dette des pays les plus pauvres291.

Ces arguments témoignent à suffisance de l'intérêt qu'ont les États-Unis à lutter contre la pauvreté au Cameroun. La lutte contre le Sida participe aussi de la stratégie américaine de lutte contre le terrorisme. Dans un article qu'il a consacré à la place de la coopération internationale dans la stratégie de sécurité nationale292 soutient que les États-Unis ont augmenté leur aide dans le cadre de la lutte contre le Sida pour éviter l'impact que ce fléau risque d'avoir sur les pays et leurs populations. Une analyse similaire est faite par le général James JONES293 dans le rapport qu'il présentait devant le comité des services armés du sénat le 07 mars 2006.

287 M. D. Ebolo, 1998, « L'implication des puissances occidentales dans le processus de démocratisation en Afrique : analyse des actions américaines et françaises au Cameroun, 1989-1997 », in Polis, Vol.6, no 2, pp.19-55.

288 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », pp.37-38.

289 Jeune Afrique Économie, Novembre 2004, p.108.

290 Nzeugang, Op. Cit., p.38.

291 J. C. Servant, « Offensive sur l'or noir africain : une priorité géostratégique », in Le Monde Diplomatique, Janvier 2003.

292 Richard ARMITAGE, « La place de la coopération internationale dans la stratégie de sécurité nationale », in REDEEU, Vol. 7, no 4, 2002, p.10.

293 L. J. James, « Déclaration du général James L. Jones, Commandant des forces des Etats-Unis en Europe devant le comité des services armés du Senat », 7 mars 2006.

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Le Sida serait donc d'après cette lecture une cause éventuelle du terrorisme. Blaise Pascal TALLA, dans Jeune Afrique Économie294 leur emboîte le pas lorsqu'il relève le lien qu'il peut avoir entre le Sida et le terrorisme. En fait, La désespérance qui anime le malade du Sida qui s'estime condamné à mort est bien de nature à justifier son adhésion aux organisations de malfaiteurs. Ainsi compris, le Sida serait favorable aux réseaux terroristes dans la mesure où il leur fournit d'éventuelles recrues295. Cette coopération met en exergue la visée hégémonique américaine au Cameroun. Si l'on en croit les propos du professeur Joseph Vincent NTUDA EBODE, la domination est davantage culturelle aujourd'hui. Elle s'inscrit dans la dialectique des intelligences296.

Les programmes militaires des États-Unis au Cameroun visent à moderniser et à adapter aux normes américaines, les forces armées locales. Qui plus est, les États-Unis ont créé à l'école Militaire Inter armées (EMIA) un laboratoire de langue anglaise destiné à améliorer le niveau des officiers camerounais et l'usage des standards américains. Il s'agit au mieux d'enseigner aux officiers camerounais l'Anglais opérationnel tel qu'il est utilisé par les forces américaines. A l'analyse, le Cameroun s'intègre dans ce que Philippe HUGON297 appelle les deux principes guidant l'aide américaine au Cameroun c'est-à-dire le « shaping » et la civilisation (développer les forces démocratiques)298.

Par ailleurs, la formation des officiers camerounais dans les écoles Américaines aurait pour effet l'exportation de la culture stratégique américaine. Ils rentrent nantis d'une façon de voir, de concevoir, de penser et d'agir proprement américain. Cette manière d'importer la culture stratégique américaine peut faire la fierté des États-Unis dans un environnement considéré comme zone d'influence des ex-puissances coloniales. Cette relation permet aux Américains, dans la lutte de leadership qui les oppose aux autres puissances, de gagner au maximum des marchés dans les domaines de l'armement et de la formation d'officiers.

L'engagement militaire américain a pour but d'instrumentaliser l'Etat bien qu'ayant officiellement pout but de sécuriser le Cameroun. Cette stratégie s'observe aussi dans le cadre des relations multilatérales.

294 Jeune Afrique Économie, Novembre 2004, p.109.

295 Nzeugang, Op. Cit., p.39.

296 Ibid., p.42.

297 Philippe HUGON, « L'Afrique subsaharienne : un visage contrasté », in L'année stratégique, Paris, Armand Colin, 2005, p.405.

298 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », p.42.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery