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La dynamique du discours nationaliste au Gabon.

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par ADIELA BOUSSOUGOU KASSA
Université Omar Bongo - Master de sociologie 2016
  

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Conclusion générale

Au terme de cette analyse, il convient de réitérer la problématique au centre de notre objet d'étude intitulé « Dynamique du discours nationalitaire ». Il se pose, dans ce travail, le problème de cohésion sociale dont l'expression populaire est consacrée par le tiers symbolique du nationalisme au Gabon : « Gabon d'abord ». Notre intérêt a donc porté sur l'évolution du discours à travers la longue durée historique. Il nous a ainsi été donné de lire les velléités pouvoiristes qui définissent le discours identitaires comme stratégie. Comment saisir la dynamique du discours nationalitaire au Gabon ?

Dans l'optique de saisir l'intelligibilité des représentations nationalitaires des individus, sous le prisme du discours, nous avons formulé, une double hypothèse en une. En effet, l'empirisme d'une archéologie de l'ethnicité met à giorno, l'homo ethnicus, comme réalité universelle alors la notion bourdieusienne d'habitus consacre la dynamique du discours nationalitaire. Notre argumentaire, organisé autour de cette double hypothèse a consisté en une planification binaire. En effet, deux parties principales organisent notre travail.

En quête des propriétés sociohistoriques du discours nationalitaire, il s'est agi dans un premier temps, d'une causalité rétrospective dont l'intérêt majeur se saisit au gré des prémisses structuro-nationalitaires qui ont dessinés les frontières cosmogoniques, idéologiques des peuples africains et outre atlantique. Les formes élémentaires d'organisation politique, dont la nation (ethnos) ou plus précisément l'ethnie constitue la base, consacre une théorie de l'homo ethnicus. L'ethnie se structure d'abord autour d'une communauté de destin. Ensuite, le caractère universel des ethnocentrismes et la fonction classificatoire des ethnonymes consacrent la singularité inhérente à chaque peuple.

Cependant, la dynamique du discours nationalitaire porte aussi sur la période hautement marquante de la colonie et son extrémisme de la différence. Les développements idéologiques introduits par les anthropologues dont les récits évoquent fallacieusement, l'existence d'une race supérieure et d'une autre inférieure, auront des conséquences très prononcées sur les représentations des acteurs sociaux au Gabon.

L'oeuvre de la colonie s'accompagne en effet, de l'idéologie de la race. La légitimation de la conquête coloniale se fonde sur le darwinisme social. La période coloniale va juxtaposer selon la formule d'Albert Memmi, le double portrait colonisé/colonisateur.

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Par ailleurs, une approche géographique met en exergue le passage des frontières naturelles précoloniales à la division coloniale de l'Afrique. Les estimations relatives aux frontières africaines indiquent environ 70 % d'entre elles, telles qu'on les connaît aujourd'hui furent définies sans concertation avec les populations concernées, entre la conférence de Berlin et la fin de la première décennie du XXe siècle. Les liaisons dangereuses entre ce découpage colonial et les problématiques actuelles, relatives à l'ethnicité en l'Afrique, sont tributaires, non seulement du sceau des rivalités et des intérêts des anciennes puissances coloniales, mais aussi de l'arbitraire dans le procès de séparation et de rapprochements, respectivement des peuples amis et des peuples opposés.

Le second grand point de notre travail consiste à ce que nous avons nommé, la métamorphose de l'ethnicité. Il s'organise par une double temporalité qui intègre la postcolonie et la contemporanéité. S'agissant de la postcolonie, une mise en perspective de l'héritage du colonialisme, entant qu'entreprise civilisatrice, envisagée corrélativement avec l'imposition de l'État moderne, nous a donné à juxtaposer le nationalisme au multiculturalisme. La fabrication d'une identité nationale par l'homogénéisation des différences va se poser comme défi majeur des jeunes démocraties africaines. La préexistence et la prééminence de l'ethnicité sur le colonialisme, rendra improbable la construction d'une identité nationale. Les populations y résisteront et opposeront pour cela différentes attitudes face à l'État. Cette réfraction des acteurs est une autodéfinition de ces derniers, en référence à cet héritage qui imbrique, l'essence même de la distinction dans la précolonie et l'expérience coloniale de la hiérarchie des races. L'intelligibilité de cette posture répond à une convocation bourdieusienne de la théorie de l'habitus, dont l'hystérésis explique que la conservation, dans une large mesure, des dispositions, même si elles sont devenues inadaptées suite par exemple à une évolution historique (révolutions, crises, etc.) ayant fait disparaître le monde ambiant originel. Ainsi, la postcolonie africaine et la compétition pour le pouvoir exacerbée, la mobilisation ethnique s'avère être l'instrument privilégié des acteurs engagés dans cette lutte, parce qu'elle fait sens, qu'elle est opérationnelle et facilement manipulable.

La chute de notre travail de recherche problématise, dans un ultime chapitre, la dynamique de la gabonité sous le prisme des identités mondialisées. Bourdieu écrit que les dispositions constitutives de l'habitus sont, non seulement durables, mais aussi transposables. Autrement dit, les dispositions acquises dans une certaine activité sociale sont transposées dans une autre activité. Dans notre cadre, il s'agit d'entrevoir l'actualité de la nationalité par rapport

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à l'historicité de cette catégorie. C'est-à-dire, les dispositions acquises pendant la socialisation et ayant engendrées des habitus ethniques, peuvent être transférées dans une activité sociale différente de celle du champ de leur engendrement.

Ainsi, nous est-il donné, d'observer selon les cas, les déclinaisons d'une gabonité légale et d'une autre légitime. La mise en crise de la gabonité, tel que l'expérience nous démontre, consiste à analyser, à l'épreuve du droit, les logiques sous-jacentes à ce qu'on peut nommer, le doute sur l'identité d'un Président de la république et la pertinence des considérations classiques de l'ethnicité, c'est-à-dire, la territorialité, la consanguinité et l'utérinité, la langue et le patronyme.

L'acquisition de la nationalité gabonaise est régie par la loi n° 37/98 du 20 juillet 1999, portant Code de la nationalité gabonaise, et le décret n° 767/PR/MJGS du 16 octobre 2002 portant application de certaines dispositions du Code de la nationalité. Les dispositions relatives à cette loi sous-tendent le caractère légal de la nationalité gabonaise. Cependant, une revalorisation du discours commun, à travers les questionnements à l'instar de « Qui est Gabonais ? », « Qui est plus Gabonais que qui ? », « Gabonais de naissance », « Gabonais d'origine étrangère », « Gabonais d'adoption », « Gabonais 100% », « il est café au lait », « on n'est tous Gabonais », «...de naissance ou d'adoption » laisse augurer d'un essentialisme, d'une purisme défiant parfois, le cadre juridique.

Notre intérêt pour le sens commun consiste non pas à confirmer ou à infirmer la gabonité de quiconque, mais d'analyser le discours nationalitaire afin d'y lire, les stratégies de pouvoir, qui détourne le débat politique de son champ idéologique habituelle, pour le transposer vers une idéologie de l'identité nationale, reproductrice de l'ethnisme originelle et tributaire aussi, de la raciologie coloniale discriminante. A la manière du Front National en France, le substrat idéologique repose sur un discours nationalitaire, émancipé du Droit et dont l'optique d'inculper, par l'arbitraire, pour fausse identité, fausse gabonité ou nationalité douteuse, ses adversaires politiques.

Enfin, L'essor de la réflexion sur la nation et le nationalisme est sans cesse actualisé depuis les années 1980. Ces débats s'opèrent autour du multiculturalisme, du cosmopolitisme et de la mondialisation qui d'emblée, se pose comme cadre de questionnement par excellence du postnationalisme. Le multiculturalisme est déjà mis à mal par la construction difficile des Etats africains. Les politiques de l'identité et les stratégies identitaires des leaders

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politiques flirtent parfois avec la xénophobie. Un double processus apparemment contradictoire caractérise notre époque : la persistance des nationalismes (y compris les ethnonationalismes) et la croissance du multiculturalisme, du transnationalisme et du cosmopolitisme.

Ainsi, la dernière section de cette recherche consiste en une critique de la « logique métisse » sous le prisme du discours sur la nationalité et les stratégies d'exclusion des binationaux. Aussi, s'est-il s'agit, d'examiner les survivances des nationalismes malgré les redéfinitions des concepts de nation et de territoire opérées par le droit international et la mondialisation.

L'hypothèse binaire, de ce travail de recherche est donc empiriquement vérifiée. A posteriori d'une analyse pertinente du fait ethnique au Gabon, il nous est donné d'observer la dynamique identitaire qui imbrique stratégie de pouvoir et discours nationalitaire dont l'intelligibilité met au centre, la réalité de l'homo ethnicus et la reproduction des habitus ethnicistes durables et transposables, selon les propositions bourdieusiennes.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard