WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Enjeux des nouvelles pratiques religieuses dans l’église catholique romaine à  Cotonou.


par Yaovi Martin CAPO
Université d'Abomey-Calavi - Maîtrise en Sociologie-Anthropologie 2018
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

_

UNIVERSITÉ D'ABOMEY-CALAVI

---------

FACULTE DES SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES

---------

DEPARTEMENT DE SOCIOLOGIE-ANTHROPOLOGIE

---------

LABORATOIRE D'ANALYSE ET DE RECHERCHE RELIGIONS,

ESPACES ET DÉVELOPPEMENT

---------

MEMOIRE DE MAÎTRISE

Sujet

ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'ÉGLISE CATHOLIQUE ROMAINE À COTONOU

Réalisé et soutenu par :

CAPO Yaovi Martin

Co-direction du :

Dr Bruno MONTCHO

Enseignant-Chercheur à l'UAC

Assistant

Sous la direction du :

Dr. Dodji AMOUZOUVI

Professeur Titulaire /CAMES

Président/Rapporteur : Dr. Dodji AMOUZOUVI, Professeur Titulaire du CAMES

Membre : Dr. Charlotte ALE, Assistante

Examinateur : Dr. Bruno MONTCHO, Enseignant-Chercheur à l'UAC, Assistant

Mention : Très Bien

Note : 17/20

Date de soutenance : 23 mai 2018

SOMMAIRE

DEDICACE 2

SIGLES ET ACRONYMES 6

LISTE DES TABLEAUX ET PHOTOS 7

RESUME 8

ABSTRACT 8

INTRODUCTION 9

PREMIERE PARTIE : LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES COMME CHAMP DE RECHERCHE DE LA SOCIOLOGIE DES RELIGIONS 2

CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHE 13

CHAPITRE 2 : CADRE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE 29

DEUXIEME PARTIE : LES ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE 2

CHAPITRE 3 : L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE DANS LA DYNAMIQUE DU MARCHE RELIGIEUX 40

CHAPITRE 4 : LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES 52

CHAPITRE 5 : QUAND LES ENJEUX DETERMINENTLES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE 71

CONCLUSION 84

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 86

REFERENCES WEBOGRAPHIQUES 89

ANNEXES 91

IN MEMORIUM

A mon feu père Awlouvi CAPO

et à ma feue mère Dogbo SAGBO

DEDICACE

A ma chère épouse Alice A. KAKPOSSA ;

A mon fils Elphège Seyram CAPO ;

A mes frères et soeurs Augustin, Yves-Urbain, Eugène, Odette et Pierrette.

REMERCIEMENTS

La réalisation de ce document a été possible grâce aux efforts conjugués de plusieurs personnes à qui nous tenons à exprimer nos sincères reconnaissances. Nous adressons donc nos sentiments de sincère gratitude :

Au Dr. Dodji AMOUZOUVI, Professeur Titulaire / CAMES, pour avoir accepté diriger ce travail et d'apporter tout le soutien nécessaire à sa rédaction ;

Au Dr. Bruno MONTCHO, Enseignant-Chercheur à l'UAC, notre Co-directeur de mémoire pour son accompagnement scientifique ;

À tous les enseignants du Département de Sociologie-Anthropologie pour avoir contribué à notre formation ;

Au Dr. Emile GBEDJANHOUNGBO pour son encouragement et ses conseils pour un travail scientifique ;

À toute l'équipe d'encadrement du Laboratoire d'Analyse et de Recherche : Religions, Espaces et Développement (LARRED) de l'UAC, en particulier Pascal DOHOU ;

Aux amis Marcellin DJANATO, Senyon A. AMEGANVI, Hervé A. MEKOUN, Bertin K. FONTON, Serge ASSOUTOVI et Alfred ADJAKA pour leur soutien moral, intellectuel et matériel ;

À mes collègues de service Charbel O. SABI YABA, Ange H. DEGBOUE et Modeste BOCO pour leur soutien, leurs conseils et leurs accompagnements ;

À mes cousins Sylvain AGOUGNON, Parfait AGBANGLA, Marcus AGOUGNON, Louis AMOUSSOU et Gustave TOHONON pour leur soutien de tout genre ;

Au père Barnabé ZOMAKPE pour son encouragement et ses conseils ;

À tous les frères et soeurs du groupe du Renouveau Charismatique Catholique de Gbodjè pour leurs soutiens moral et spirituel ;

À tous ceux qui de loin ou de près ont contribué d'une quelconque façon à la réalisation de ce mémoire, nous leur témoignons notre sincère reconnaissance.

SIGLES ET ACRONYMES

CEB : Communautés ecclésiales de base

ECR : Eglise Catholique Romaine

FASHS : Faculté des Sciences Humaines et Sociales

INSAE : Institut National de la Statistique et de l'Analyse Economique

LARRED : Laboratoire d'Analyse et de Recherche Religions, Espaces et Développement

NMR : Nouveaux Mouvements Religieux

ONG : Organisation Non Gouvernementale

PDC : Plan de Développement Communal

RCC : Renouveau Charismatique Catholique

RGPH4 : Quatrième Recensement Général de la Population et de L'Habitat

SCEAM : Symposium des Conférences Episcopales d'Afrique et Madagascar

UAC : Université d'Abomey-Calavi

LISTE DES TABLEAUX ET PHOTOS

Liste des tableaux

Tableau 1 : Synthèse de la recherche documentaire 2

Tableau 2 : Constitution de groupes cibles 37

Tableau 3 : Calendrier de la recherche 38

Liste des photos

Photo 1 : Découpage administratif de la Commune de Cotonou 2

Photo 2 : Planche : Objets de piété catholique 53

Photo 3 : Recueillement devant une statue de la vierge Marie 56

Photo 4 : Recueillement devant une statue de Sainte Rita 57

Photo 5 : Prière des fidèles au cours d'un Jéricho 62

Photo 6 : Planche : L'intérieur et la façade de la paroisse Sainte Rita envahis par des fidèles au cours de la messe de guérison 64

Photo 7 : L'intérieur de l'église au cours de la messe de guérison 65

RESUME

De nouvelles pratiques religieuses connaissent un regain d'intérêt de la part des fidèles dans l'Eglise Catholique Romaine, mais ce sont des pratiques qui ont pour spécificité d'évoluer en marge de la liturgie officielle. L'objectif général de cette recherche est d'étudier l'émergence de ces nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise Catholique Romaine. Pour y parvenir, le choix raisonné nous a permis de mobiliser un échantillon de 125 enquêtés sur la base des outils tels que le guide d'entretien, la grille d'observation et le questionnaire semi-structuré. Cette recherche s'est fondée sur la théorie de l'interactionnisme symbolique de Goffman (1967), pour saisir et comprendre les motivations des différents choix opérés par les acteurs ainsi que les interactions entre eux. Il convient de souligner au terme de la recherche que les nouvelles pratiques religieuses satisfont les attentes des fidèles en leur garantissant salut et prospérité. C'est ainsi qu'elles deviennent un instrument de captage de rente, de leadership et de positionnement de l'Eglise sur le marché de la religion pour freiner l'exode des fidèles.

Mots clés : Nouvelles pratiques religieuses, Marché de la religion, Eglise catholique Romaine, Cotonou

ABSTRACT

New religious practices are experiencing a renewed interest on the part of the faithful in the Roman Catholic Church, but they are practices that have the specificity of evolving on the margins of the official liturgy. The general objective of this research is to study the emergence of these new religious practices within the Roman Catholic Church. To achieve this, the reasoned choice enabled us to mobilize a sample of 125 surveyed on the basis of tools such as the interview guide, the observation grid and the semi-structured questionnaire. This research was based on Goffman's (1967) theory of symbolic interactionism, to grasp and understand the motivations of the different choices made by the actors as well as the interactions between them. It should be emphasized at the end of the research that the new religious practices satisfy the expectations of the faithful by guaranteeing them salvation and prosperity. In this way, they become an instrument for capturing income, leadership and positioning the Church on the religion market to curb the exodus of the faithful.

Keywords : New religious practices, Religion market, Roman Catholic Church, Cotonou

INTRODUCTION

Le continent africain apparaît, depuis quelques décennies, comme un terrain favorable au déploiement du christianisme d'autant plus que çà et là se rencontrent plusieurs pratiques religieuses d'obédience chrétienne, se réclamant pour la plupart de l'évangélisme ou du pentecôtisme. En effet, depuis fort longtemps, les Nouveaux Mouvements Religieux (NMR) s'implantent dans nombre de pays africains et rivalisent «de plus en plus avec les Eglises chrétiennes traditionnelles et avec l'Islam » (Perretant-Aubourg, 2011, p. 91). Ces NMR progressent avec un élan de conquête des membres dont la plupart leur viennent d'anciennes institutions religieuses établies ou des religions endogènes. Aux noms évocateurs, ils s'installent avec des programmes alléchants, lisibles sur des pancartes, enseignes ou plaques, et des techniques de propagande novatrices : orchestre, rythme musical adapté au milieu, campagnes d'évangélisation publique, émissions télévisées, prosélytisme, etc. En outre, les NMR usent de la critique, comme moyen de propagande, à l'égard des religions endogènes et des religions chrétiennes historiques, en particulier l'Eglise catholique, et semblent détenir la vérité, comme l'écrit Alladaye (2003, p. 337) : « Chaque secte qui se fonde pense que toutes les autres et les grandes Eglises originelles se sont trompées avant elle (...) Plus encore que la vérité, la secte prétend détenir seule le salut et les rituels pour y parvenir, elle prétend même être le salut. »

Dès lors, la prolifération des NMR est perçue par nombre d'observateurs comme un défi ou une menace, en témoignent plusieurs publications annonçant la régression du catholicisme. Il s'agit entre autres de « L'Eglise catholique et les sectes à la fin du XXe siècle » (Bernos, 2002), « Le phénomène des nouveaux mouvements religieux en Afrique, l'Eglise catholique en déroute » (Cakpo, 2013), L'Eglise catholique face au défi des groupes évangéliques (Gauthier, 2011), etc. Toute cette littérature décrit le climat malaisé dans lequel se trouve l'Eglise catholique romaine en Afrique, concurrencée par les NMR. A ce sujet, le Monseigneur camerounais Patrick Lafon (2005) donne une appréciation objective sur un ton plus qu'incitatif : « Nous considérons ce phénomène comme un véritable défi, dans la mesure où si les gens vont vers les sectes, cela signifie qu'il y a quelque chose qu'ils ne trouvent pas chez nous ».

Ce quelque chose que proposent les NMR est, comme le dit Mbodo (2011), inspiré par « une éthique du présent », c'est-à-dire une offre religieuse qui « contribue ou prétend contribuer à résoudre les problèmes de la vie présente ». Selon toujours Mbodo, il arrive que cette « éthique du présent » prenne « la forme de religions constituées [et] demeure visible au fond de cultures africaines ». C'est ainsi que les pratiques de religiosité populaire observées en plusieurs endroits en Afrique deviennent en général l'apanage des NMR. Au Bénin, le phénomène est identique comme partout ailleurs : « Le champ religieux béninois est travaillé par l'expansion de courants chrétiens évangéliques et pentecôtistes qui, bien que minoritaires, ont acquis une forte visibilité » (Mayrargue C., 2014, p. 91). Et, toujours dans la dynamique de se faire visibles et prégnants, les NMR saisissent l'opportunité de satisfaire hic et nunc les besoins exprimés par l'individu ; ce qui leur permet d'avoir bonne audience, d'attirer beaucoup plus de membres et de pouvoir se maintenir sur le marché de la religion. Ce n'est guère sans susciter d'inquiétudes et de réflexions au sein du clergé catholique jusqu'au plus haut niveau de la hiérarchie.

Cette croissance du nombre des évangéliques et pentecôtistes a amené le pape Benoît XVI (2007) à dire qu'il urge de prendre le phénomène au sérieux : « Aujourd'hui, la présence très consolidée [de l'Eglise] doit tenir compte entre autres choses du prosélytisme des sectes et de l'influence croissante de la sécularisation hédoniste post-moderne. Sur les causes de l'attraction des sectes, nous devons réfléchir sérieusement pour trouver les réponses adéquates. » Etait-ce dans ce souci que les autorités de l'Eglise catholique romaine, dans la période post-conciliaire, c'est-à-dire dans les années 70 du siècle dernier, avaient déjà admis la naissance des mouvements charismatiques, constitués en communautés ou groupes de prière ? Ces mouvements charismatiques qui ont vu le jour au sein de l'Eglise se développent depuis lors sur tous les continents. « Ils proposent une forme de religiosité qui tout en étant insérée et contrôlée par l'institution catholique s'apparente à bien des égards à l'offre pentecôtiste » (Mayrargue, 2015).

Ce travail, consacré aux nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine, se propose de répondre aux interrogations suivantes :

- Qu'est-ce qui caractérise le contexte de l'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine ?

- A quoi est dû le succès de plus en plus grandissant que connaissent les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique ?

- Le bon accueil dont elles font l'objet de la part des populations et leur approbation par les autorités de l'Eglise catholique sont-ils stratégiques pour s'inscrire dans la logique du marché concurrentiel du religieux ?

Dans la perspective des objectifs de cette recherche, la présente recherche articule autour de deux parties.

La première partie, intitulée les nouvelles pratiques religieuses comme champ d'étude de la sociologie des religions, se décline en deux chapitres et s'intéresse aux aspects théorique et méthodologique qui ont structuré la recherche.

La deuxième partie s'intitule les enjeux des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise Catholique Romaine et s'est consacrée à la présentation des résultats de la recherche et leur analyse. Elle se décline donc en deux chapitres: l'Eglise catholique dans la dynamique du marché religieux, les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise Catholique Romaine et les enjeux qui fondent les nouvelles pratiques religieuses.

PREMIERE PARTIE :

LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES COMME CHAMP DE RECHERCHE DE LA SOCIOLOGIE DES RELIGIONS

CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHE

Dans ce chapitre, il sera traité successivement de la problématique, de la délimitation thématique, de la pertinence de la recherche, de la clarification des concepts et enfin de quelques axes actuels de la recherche.

1.1. Problématique

1.1.1. Constats et problème central

Le déclin des grandes institutions religieuses annoncé par la théorie de la sécularisation due à la modernité, et observé dans plusieurs régions du monde et même au-delà d'elles, n'a pas empêché l'expansion du phénomène religieux. Ce qui amène Berger P. (1971) à reconnaître sans ambages le retour galopant du religieux en affirmant que « L'idée selon laquelle nous vivons dans un monde sécularisé est fausse. Le monde d'aujourd'hui est aussi furieusement religieux qu'il l'a toujours été. » Cette soif accrue du religieux pousse plusieurs auteurs, comme Kepel G. (1991), à penser à la revanche de Dieu. C'est ainsi que le monde est, aujourd'hui, traversé par l'effervescence religieuse qui, de plus en plus, retient l'attention de nombre de personnes. En effet, il n'est pas rare d'observer, çà et là, ailleurs comme en Afrique, un engouement sans précédent pour le religieux. De même au Bénin, les populations sont attirées vers une forme de religiosité qui est caractérisée par la quête de la réussite sociale, de la protection contre la sorcellerie, de la guérison, de la prospérité matérielle, du merveilleux, etc. « "Cette religiosité-miracle" a imprégné en grande partie l'imaginaire collectif africain. Elle est devenue un mode de croire et de penser, d'agir et de réagir d'une bonne partie de la population africaine » (Muanda Kienga J., 2015). De ce fait, les différentes formes de religiosité, toujours en croissance permanente, deviennent « un terreau du développement des Eglises évangéliques » (Peloux R. et Pian C., 2010, p. 84).

Le phénomène, planétaire, est soutenu par la mondialisation qui crée un vaste marché économique commun où tout le monde est invité à mener ses activités, avec un point de mire l'homogénéisation, dans différents domaines, de modèles communs provoquant une interdépendance entre différents ensembles géographiques. En accroissant l'interdépendance des hommes, la mondialisation recherche l'uniformisation de la culture, de la consommation, de la religion en vue de bâtir une civilisation nouvelle. Ainsi elle s'est emparée du fait religieux et l'a transformé en une marchandise. Sur ce, Roy O. (2008) affirme que « la mondialisation a créé un marché du religieux. Aujourd'hui, les produits religieux circulent et les religions ne s'arrêtent plus aux frontières. Résultat : alors que traditionnellement les religions se sont connectées aux cultures, voire ont créé du culturel, elles se détachent de leurs territoires et de leur culture d'origine. » Cette déterritorialisation permet donc aux religions de s'adapter au courant culturel mondialement reconnu et peuvent facilement s'exporter à tous les points du monde ; comme le dit Olivier Roy, « pour qu'un produit soit accessible partout et au plus grand nombre, il faut qu'il soit standardisé. S'il est trop identifié à une culture donnée, il ne se vendra pas en dehors de cette culture ». Ce faisant, le monde s'installe peu à peu dans une monoculture selon le mot de Levi-Strauss C. (1955, p. 37). Sur le plan religieux, du point de vue du christianisme, cette monoculture a pour nom le pentecôtisme.

Ce sont, selon Roy O. (2008), toutes les formes d'évangélisme qui s'adaptent le mieux à cette nouvelle réalité dans le christianisme. Elles sont portées par le courant d'air pentecôtiste qui se manifeste au travers des nouvelles pratiques de religiosité axées sur le quotidien des populations. Gadou D. M. (2004, p. 147) dira à cet effet que « C'est... une population en quête de santé spirituelle, biologique et psychologique, de mieux-être, d'identité, de promotion sociale et culturelle, etc., qui a recours à ces prophétismes qui, sous l'influence de la logique économique mondiale du marché, s'organisent comme des sortes de prestataires de services ou de biens symboliques à caractère marchand. »Cela montre, comme le prouve Amouzouvi (2005), qu'il existe un marché pour la religion, un marché autour de la religion et un marché dans la religion. De ce fait, la religion est devenue comme un business. A ce titre, dans ce marché au sens économique du terme, une dure concurrence règne et les religions gagnantes sont celles qui proposent une offre séduisante. Ainsi les mouvements évangéliques et pentecôtistes qui arrivent à calquer le prosélytisme sur les techniques de marketing des entreprises commerciales parviennent à s'imposer sur le marché en arrachant aux Eglises établies des fidèles. Sur ce, Blé G. R. (2013) écrit : « les Eglises établies sont trop prudentes à prendre position sur des problématiques urgentes qui préoccupent les populations et certains, déçus, partent ailleurs à la recherche d'un dérivatif. Les gourous des sectes en profitent pour les récupérer en mettant en place une machine stratégique de recrutement. »

Une telle situation ébranle les intérêts1(*)des tenants des institutions religieuses historiques, protestantes et catholiques, qui dans la foulée se sont ouvertes au courant pentecôtiste, lequel embrase tout le christianisme depuis les années 1970. En effet, l'Eglise catholique romaine a vu émerger en son sein un mouvement qualifié par les spécialistes des sciences sociales de pentecôtisme catholique (Giblet, 1973), mais communément appelé le renouveau charismatique catholique. L'avènement de ce groupe a ouvert la voie à une flopée de mouvements charismatiques de plus en plus dynamiques, observables sur la plupart des paroisses. Et sans cérémonie, ils deviennent dans l'Eglise catholique les canaux de développement de nouvelles pratiques religieuses. Ces pratiques semblent imprimer chez plusieurs chrétiens catholiques des attitudes analogues à celles des fidèles des NMR et constituent de nouvelles manières de vivre la foi qui évoluent à côté d'un catholicisme officiel. Cela a amené nombre de sociologues à parler de la pentecôtisation du catholicisme (Bastian, 2008).

Faudrait-il voir dans une telle démarche le signe d'une crise inavouée de l'institution catholique à pouvoir jouer efficacement son rôle dans l'accompagnement spirituel de ses fidèles dont les attentes réclament d'autres manières de faire ou de pratiquer la foi ? Le fait que l'Eglise catholique en soit venue à admettre ces pratiques ne relevant pas a priori de son orthodoxie stimule notre curiosité. Il n'en demeure donc pas moins pertinent de s'interroger sur les raisons d'une telle souplesse. A cet effet, la question suivante a été formulée : Quels sont les enjeux qui fondent l'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine aujourd'hui ?

Quelques hypothèses serviront de pistes pour répondre à cette préoccupation et permettront de mener la recherche.

1.1.2. Hypothèses :

§ Les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine s'expliquent par la montée des nouveaux mouvements religieux ;

§ Les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine se justifient par les besoins existentiels et spirituels des populations ;

§ L'approbation des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine relève d'une stratégie de positionnement aux enjeux multiples dans le marché religieux.

Afin de vérifier ces hypothèses, des objectifs sont formulés et subdivisés en objectif général et en objectifs spécifiques.

1.1.3. Objectifs de la recherche

Les objectifs sont de deux ordres à savoir l'objectif général et les objectifs spécifiques.

L'objectif général est d'analyser les enjeux qui justifient l'émergence des nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise catholique romaine.

De façon spécifique, il s'agit de :

v Décrire le contexte du regain d'intérêt pour les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine ;

v Identifier les besoins que satisfont les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine ;

v Présenter les enjeux de l'approbation des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine.

1.2. Délimitation thématique

Dans cette recherche, il ne s'agit pas d'aborder toutes les pratiques de religiosité populaire qui existent dans l'Eglise catholique romaine, ni d'appréhender l'institution dans son entièreté. Mais il semble opportun de focaliser essentiellement l'attention sur les nouvelles pratiques religieuse ainsi que certaines pratiques populaires anciennes, qui sont aujourd'hui revitalisées et passent pour la chasse gardée des mouvements charismatiques de l'Eglise. De ce fait, l'intérêt sera porté sur les cultes populaires qui privilégient les expériences spirituelles exceptionnelles, les guérisons miraculeuses, la dévotion personnelle, et toutes sortes de charismes.

A la lumière de tout ce qui précède, le sujet de cette recherche s'inscrit certes dans la sociologie des religions, mais, vu qu'il porte sur le catholicisme dans une approche comparative avec les NMR, il se retrouve dans la sociologie du christianisme.

1.3. Pertinence de la recherche

Elle renferme la justification du choix du sujet, du cadre de la recherche, et la pertinence sociale et scientifique du sujet.

1.3.1. Justification du choix du sujet

L'Eglise catholique romaine a toujours été confrontée aux mouvements schismatiques ou sectaires. Son histoire en est remplie depuis les Apôtres jusqu'à notre époque. Mais elle n'a jamais été aussi mise à l'épreuve du sectarisme qu'elle ne l'est depuis plus de cinq décennies. Dans tous les pays, comme au Bénin, on constate la désaffection des Eglises catholiques locales au profit des NMR dont la prolifération paraît remarquable. Un véritable défi semble lancé à toutes les institutions religieuses historiques. Ainsi le développement de nouvelles pratiques religieuses acceptées par le clergé et qui relèvent souvent de l'initiative des laïcs semble redonner espoir à plus d'un tant du côté des autorités de l'Eglise que du côté des fidèles. C'est la raison fondamentale du choix d'investiguer sur les probables enjeux qui encourageraient une telle ouverture aux pratiques qui parfois dérogent à l'orthodoxie de l'Eglise.

1.3.2. Justification du choix du cadre

Nous avons choisi la ville de Cotonou parce qu'elle est située dans « l'archidiocèse de Cotonou, [qui est] la circonscription ecclésiale la plus ancienne, la plus peuplée, et la plus active du pays » (Alladaye, 2003, p. 299). Aussi faut-il reconnaître que cette ville est le foyer d'émergence de toutes sortes de NMR à l'image des grandes métropoles du monde2(*). Au surplus, les menaces qui secouent l'Eglise catholique locale commencent toujours dans les villes avant de s'étendre vers les zones périurbaines et villageoises.

De même les nouvelles pratiques de religiosité les plus remarquables dans l'Eglise catholique locale ont aussi émergé dans les villes, en l'occurrence Cotonou, dans un contexte de crise sociopolitique et de pauvreté inhérente à la vie citadine. En conséquence, Cotonou offre plus d'opportunités pour observer le phénomène de l'effervescence religieuse et la concurrence que se livrent ostensiblement ou non les différentes Eglises présentes dans le champ religieux. La facilité d'avoir accès aux informations a motivé ce choix.

1.3.3. Pertinence sociale du sujet

Les nouvelles pratiques religieuses semblent gagner du terrain au sein de l'Eglise catholique romaine prouvant ainsi l'augmentation des demandes de bénédiction, d'exorcisme, de prière et de pèlerinage, puis traduisant une satisfaction non assurée par la liturgie officielle. Elles deviennent si fréquentes que des départs vers les NMR sont par moments notés. Alors les mouvements charismatiques ainsi que les autres groupes de prière de dévotion mariale, qui naissent de plus en plus dans l'Eglise, tentent de satisfaire ces multiples demandes soit sous la tutelle d'un clerc soit sous la direction d'un responsable laïc.

La plupart du temps cette soif de religiosité observée chez certains chrétiens catholiques fait l'objet de critiques de la part des autres membres de l'Eglise et même du clergé, et est considérée comme l'expression d'un manque de foi. De ce fait, les mouvements qui sont les instances de déploiement de ces nouvelles pratiques religieuses sont souvent tancés à cause des manifestations émotionnelles et sonores les caractérisant. Ainsi, dans l'aire catholique, les acteurs n'appréhendent pas que ces nouvelles pratiques religieuses jouent un rôle très particulier. Même si elles s'apparentent aux pratiques des NMR, elles demeurent l'expression visible des besoins inassouvis de nombre de fidèles et qui attendent des réponses de la part de l'institution ecclésiale. Alors chercher à mieux comprendre le pourquoi de leur émergence, de leur approbation ainsi que de leur accompagnement par les autorités ecclésiastiques semble tout à fait pertinent.

1.3.4. Pertinence scientifique du sujet

« Si chaque religion est un univers complexe et diversifié qui se déploie dans le temps et dans l'espace, le monde des religions, a fortiori, l'est encore plus » (Willaime, 2012). Cette complexité et cette diversité caractérisant le fait religieux justifient l'analyse plurielle dont il fait l'objet de la part des spécialistes des sciences des religions. A cet effet, historiens, philosophes, sociologues, anthropologues, politistes, juristes, théologiens ont chacun un regard spécifique sur la religion. Voilà ce qui explique la multitude d'études scientifiques sur les NMR et les Eglises historiques.

En sociologie des religions des études sont légion et s'intéressent à l'évolution des faits religieux sur tous les continents et dans le temps. Ainsi, en Afrique, les pratiques de religiosité populaire ont servi de matière à plusieurs travaux tant en sciences sociales qu'en sciences théologico-religieuses. Mais les nouvelles pratiques religieuses au sein de l'institution catholique au Bénin ont fait peu l'objet de recherche. C'est ce qui justifie l'intérêt d'investiguer sur la question en vue de relever les enjeux qui soutiennent leur existence dans l'Eglise catholique romaine, quand l'évidence d'une concurrence entre elle et les NMR sur le marché religieux n'est plus à démontrer. Peut-être les enjeux portent-ils les raisons de sa stabilité dans le champ religieux au sens bourdieusien3(*) du terme. Cette recherche, dans sa modestie, pourra alors apporter un plus à la communauté scientifique.

1.4. Clarification des concepts

Emile Durkheim (1937, p. 34) nous enseigne que « la première démarche du sociologue doit être de définir les choses dont il traite, afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question ». Alors, afin d'éviter tout malentendu au sujet des concepts utilisés dans cette recherche, certains vont être définis. Il s'agit entre autres de : religion, religieux, religiosité pratiques religieuses, église, secte, nouveaux mouvements religieux, marché de la religion et enjeu.

La religion est une notion dont la définition est problématique. « La littérature sur le sujet est immense et indique que l'unanimité est loin d'exister sur une définition de la religion... Les définitions abondent et renvoient en fait à des écoles et des auteurs de référence » (Peloux et Pian, 2010). Néanmoins, l'étymologie latine nous indique que le mot religion vient de religio c'est-à-dire «  attention scrupuleuse  », d'où « respect religieux, vénération  ». Selon Cicéron4(*), le terme religion vient de relegere qui signifie «  recueillir, rassembler  » ou, selon Lucrèce, de religare qui veut dire «  relier  ». Willaime (2012, p. 60) précise qu'une telle étymologie est hésitante, mais soutient que la conception de Cicéron permet de définir la religion comme une « activité symbolique traditionnelle ». Même si cette étymologie n'est pas satisfaisante, elle donne tout de même l'idée d'une activité qui rassemble des personnes autour de quelque chose qui mérite scrupule, respect, vénération. Sur ce, nous abondons dans le même sens que Willaime dont nous adoptons la définition. Selon lui, la religion est « une activité sociale régulière mettant en jeu, en lien avec un pouvoir charismatique se référant à des entités invisibles, des représentations et des pratiques relatives à la vie et à la mort, au bonheur et au malheur. » Cette définition a l'avantage de saisir toute religion et ses effets sociaux sous un triple niveau des acteurs (qui sont en lien avec un monde symbolique et vivent une expérience singulière), des organisations (dispositif qui met en place des procédures de fonctionnement et de pouvoir) et des idéologies (un ensemble de représentations et de pratiques qui sont dites, consignées dans des textes, et constamment commentées). Lorsque nous considérons la religion chrétienne, les trois niveaux sont repérables : les fidèles sont en lien avec Dieu comme entité invisible, une liturgie assure le fonctionnement de tous les cultes ou célébrations et l'idéologie est consignée dans le livre de référence qu'est la Bible. Au cours de cette activité religieuse, à grande portée symbolique, les hommes et les femmes interagissent entre eux et « ont le sentiment d'être rassemblées au nom d'un Autre » (Willaime, 2003). C'est l'intersection des différentes relations qui fait surgir le religieux (Caillé, 2003).

Le religieux est l'ensemble des relations créées et entretenues par la société des humains vivants et visibles avec l'ensemble des entités invisibles (défunts, non-nés, esprits des animaux, des minéraux ou des corps célestes, esprits flottants et non affectés). Ou encore « la relation de la société des humains avec la société universelle des invisibles étendue jusqu'à l'infini et à l'éternité » (Caillé, 2003, p. 318). Le religieux manifeste ainsi la religion dans sa matérialité pour rendre compte des convictions et des croyances sacralisées propres à chaque acteur, autrement dit sa religiosité, selon qu'il appartient à tel ou tel groupe religieux.

D'après le dictionnaire Grand Robert, la religiosité signifie aspect sentimental de la religion chez une personne ou attirance pour la religion en général, avec ou sans adhésion formelle à une religion précise. Autrement dit, la religiosité traduit la soif du religieux chez l'homme. Elle est dite populaire pour désigner les comportements religieux de la masse (Sabuni Kitutu, 2011), qui se déploient et s'extériorisent sous diverses pratiques religieuses.

Alors, les pratiques religieuses désignent l'ensemble des exercices extérieurs de la piété, de la dévotion religieuse propres à une religion. L'expression « nouvelles pratiques religieuses » a été envisagée pour signaler que ces pratiques sont inspirées ou influencées par la mondialisation du religieux. Sous ce vocable, on peut ranger les demandes de bénédiction diverse, les messes de guérison, les campagnes d'évangélisation, les séances d'exorcisme, les prières de protection, les ressourcements spirituels, la quête de l'émotionnel et du sensationnel, etc. Il s'agit des « pratiques collectives de haute intensité émotionnelle, observables dans bien des cultures non-occidentales où, précisément le pentecôtisme rencontre des succès. » (Sabuni Kitutu, 2011, p. 81). Il faut noter que les anciennes pratiques religieuses seront évoquées quand elles sont impliquées dans le processus d'une quête particulière d'autant plus qu'elles sont de plus en plus redynamisées et donc toujours en vogue (les pèlerinages, les processions de Christ roi ou de la Vierge Marie, le chemin de croix, les visites de sanctuaires, le culte des saints, l'utilisation de l'huile sainte et de l'eau bénite, etc.). Ces pratiques religieuses se vivent tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Eglise catholique Romaine.

Le mot « église » vient du latin ecclesia, issu du grec ekklesia, qui signifie assemblée. Pris dans ce sens, le mot désignerait avec Durkheim (2002, p. 48) « une société dont les membres sont unis parce qu'ils se représentent de la même manière le monde sacré et ses rapports avec le monde profane, et parce qu'ils traduisent cette représentation commune dans des pratiques identiques ». Cette définition générale peut s'appliquer à toutes les formes de religion qui existent dans le monde, puisqu'il n'en existe pas sans Eglise. Néanmoins, utilisé dans le contexte du christianisme, le mot « église », signifie une communauté locale et l'institution qui regroupe les chrétiens d'une même confession. De ce fait, l'Église catholique, ou Église catholique, apostolique et romaine, est l'ensemble des Églises locales ou particulières, c'est-à-dire ayant chacune un territoire et un évêque à sa tête. Celles-ci sont chacune pleinement l'Église catholique dans la mesure où elles sont en communion avec le pape, qui est l'évêque de Rome et considéré comme étant le successeur de saint Pierre, et en communion les unes avec les autres. Mais il faut noter que l'harmonie n'a pas toujours régné au sein de cette institution, les groupes dissidents qui y avaient émergé depuis Martin Luther5(*) avaient donné naissance aux sectes ou mouvements sectaires.

D'un point de vue étymologique, le mot secte vient de deux mots latins « secare » qui veut dire séparer ou couper et « sequi » qui signifie suivre. L'aspect « suivre » un nouveau maître est plus fort que l'aspect « se séparer » d'un autre mouvement. Alors la secte est un groupe qui se coupe d'un tronc originel, d'une Eglise établie, pour suivre un nouveau maître inspiré, un prophète, ou un guide spirituel. Le terme a pris une dimension polémique, et désigne de nos jours un groupe ou une organisation, souvent à connotation religieuse, dont les croyances ou le comportement sont jugés obscurs ou malveillants par le reste de la société. A ce sujet, Altglas V. (2008) écrit en note 64 que « pour le sens commun, le terme « secte » a un sens péjoratif et disqualifiant. [Elle est définie] par la déstabilisation mentale, le caractère exorbitant des exigences financières, la rupture induite avec l'environnement d'origine, les atteintes à l'intégrité physique, l'embrigadement des enfants, le discours anti-social, les troubles à l'ordre public... ». Alors, pour éviter de tomber dans ce jugement négatif et dévalorisant, et à l'instar de certains sociologues, nous préférerons employer dans cette recherche l'expression Nouveaux Mouvements Religieux (NMR).

L'expression fut inventée par Eileen Barker dans les années 1970, sociologue britannique, pour désigner aussi bien les groupes réellement nouveaux que les anciens : néo-chrétiens, judéo-chrétiens d'inspiration orientale, para-religieux (mormons, adventistes et témoins de Jéhovah). « L'hétérogénéité de ces groupes est considérable... En effet, par la simultanéité de leur émergence et la dynamique commune de leur développement, ils relèvent d'un même mouvement. », affirme Champion F.(1988). Mais dans cette recherche, seront privilégiés les NMR chrétiens où dominent les Eglises évangéliques et pentecôtistes. Ils sont caractérisés par leur dynamisme et leur aptitude à innover. Malgré leur taille réduite, ils ont une dimension internationale et fonctionnent en réseaux pouvant se répandre d'un pays à l'autre et s'adapter aux circonstances particulières ; ce qui fait leur succès sur le marché de la religion.

Permettant de décrire le nouveau paysage du croire, le marché de la religion, est un espace qui offre à l'individu la possibilité de choisir, en fonction des offres disponibles et des besoins spirituels particuliers, le service religieux désiré. Ainsi le marché de la religion fonctionne exactement comme un marché financier où les différents mouvements religieux cherchent à s'adapter aux réalités des populations. C'est pour cela que Amouzouvi (2005, p. 16) dira qu'il est « l'ensemble des activités économiques (qu'elles soient intentionnelles ou non) et des transactions (production - circulation - consommation) de ressources économiques qui trouvent leur origine et leur développement dans la religion. » Selon lui, « l'une des conséquences de ce marché de la religion est l'individualisation des affaires religieuses et la commercialisation des positions des responsables religieux. » (2005, p. 58). De ce fait, les pratiques de religiosité modernes se caractérisent par des enjeux qui crédibilisent et nourrissent la concurrence entre les différents prestataires de sorte que seules les stratégies bien élaborées parviennent à maintenir les Eglises sur le marché en drainant beaucoup de membres.

Accroître son effectif, déstabiliser les autres, conserver son hégémonie, constituer sa crédibilité sont autant d'enjeux qui font mouvoir tant d'institutions religieuses de nos jours. L'enjeu, c'est donc, d'après le dictionnaire Robert, ce que l'on peut gagner ou perdre (mais que l'on ne veut surtout pas perdre) dans une entreprise ou une compétition. Voilà ce que nous voudrons bien saisir à travers la recherche sur les nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise catholique Romaine.

1.5. Quelques axes actuels de la discussion

Les religiosités populaires, à l'heure actuelle, constituent un élément explicatif du revivalisme religieux, qui met en cause certaines conceptions théoriques comme la sécularisation et en suscite d'autres comme celle du marché de la religion. A cet effet, la littérature en la matière est pléthorique et éclaire davantage notre recherche.

La première partie du mémoire de Bastin (2003) intitulée Sociologie et religion aborde la religion sous ses différentes dimensions dans la société ultramoderne. Elle y démontre que la religion est par nature un fait social. S'il est vrai que traditionnellement le collectif imprègne le religieux, souligne-t-elle, les facteurs individuels sont autant d'indices du religieux dans la postmodernité. Par ailleurs, elle met en relief les besoins structurels de l'être humain et les stratégies de satisfaction des besoins. « Les stratégies de satisfaction sont anthropologiquement sédimentées dans l'espèce et utilisées au cas par cas, par les individus pour construire des systèmes culturels complexes ou des constellations de valeurs socialement diffusées ». En effet, dans la société moderne, les individus tentent de rationaliser leur croyance et cherchent à faire l'expérience religieuse qui, selon Bastin, est « une expérience dé-structurante créatrice d'un nouvel ordre de pensées et de valeurs qui survient à un moment précis de la vie individuelle ».

Bastin montre que bien qu'il soit coercitif, le fait religieux, dans la modernité, offre à chacun la liberté de choisir ses croyances et ses pratiques à cause de sa conformité aux normes de la mondialisation. Elle rejoint Roy O. (2008) qui démontre que, dans le cadre d'un marché mondialisé, les nouvelles pratiques de religiosité et les nouvelles religions sont de plus en plus déterritorialisées, déculturées et formatées pour offrir à tous le libre choix de ses convictions religieuses. Ainsi, le religieux étant déconnecté de la culture, les nouveaux convertis "font leur marché, goûtent et expérimentent..." Ces produits religieux, prêts-à-consommer, selon Roy, sont standardisés et bénéficient d'un marketing qui facilite leur exportation et la concurrence.

En effet, les stratégies utilisées par tels ou tels acteurs, dans le marché de la religion, visent la satisfaction des intérêts personnels et la conquête de positions dominantes, comme l'expliquent Amouzouvi D. (2005) et Gauthier V. (2011).

Avec Amouzouvi, la religion est perçue comme business. En effet, après une analyse approfondie des réalités religieuses, le fonctionnement des différentes religions qui existent dans le champ béninois, il conclut l'existence d'un marché dans la religion. Les biens marchands ainsi que les différents services rendus aux fidèles correspondent à des prestations qui sont payés à travers diverses souscriptions financières comme les tarifs de consultation (chez un devin), les zindo, les quêtes, les demandes de messe (dans les Eglises chrétiennes), etc. Ainsi, Amouzouvi démontre le processus par lequel des représentants des différentes religions utilisent la religion pour devenir riches.

L'autre volet du marché de la religion qui vise le positionnement privilégié des acteurs religieux est décrit par Gauthier. Elle étudie la relation complexe entre Eglise catholique et groupes évangéliques, à Lima, de 1990 à 2010. Elle note la croissance des Eglises évangéliques qui se fait aux dépens de l'Eglise catholique ; ce qui amène la hiérarchie catholique, soumise à ce qu'elle considère comme un « défi pressant », à développer des stratégies pour empêcher l'exode des fidèles catholiques. Dans le domaine pastoral, elle privilégie les dévotions traditionnelles qui s'expriment dans de grandes manifestations populaires à caractère nationaliste, comme le culte au Seigneur des Miracles qui rassemble des centaines de milliers de fidèles dans plusieurs processions, et les services du Renouveau charismatique. Mais au niveau des croyants, la logique est différente. Gauthier souligne que les évangéliques doivent leur succès au fait qu'ils reproduisent des modes de fonctionnement des cultes catholiques d'où la facilité avec laquelle les catholiques transitent vers une dénomination évangélique.

L'exemple de l'Amérique Latine s'observe en Afrique où les institutions traditionnelles (catholicisme, protestantisme, islamisme) connaissent une désaffection au profit des mouvements évangéliques et pentecôtistes qui ventilent partout un nouveau langage religieux. La réalité de l'effervescence religieuse en Afrique amène Muanda Kienga J. (2015) à y voir à la fois crise et vitalité de la foi. La crise, c'est que l'Afrique contemporaine est traversée çà et là par une effervescence religieuse sans précédent, qui s'exprime par la recherche effrénée de biens matériels, du succès, de la guérison, de la protection, des miracles, etc. Selon lui, une telle religiosité est devenue l'exutoire salutaire d'une grande partie des populations africaines, lesquelles n'espèrent que par elle. L'effervescence religieuse pourrait être signe d'une vitalité de la foi, mais encore faudra-t-il qu'elle soit assainie, réorientée et encadrée.

C'est le même souci d'encadrement qui, en vue de préserver les fidèles de l'Eglise catholique et l'homme en général, a inspiré Peloux et Pian (2010). Selon eux, bien que « les repères habituels de la pratique religieuse (messes dominicales, nombre de mariages ou d'enfants en catéchèse) indiquent une baisse importante de l'influence de l'Eglise dans la vie quotidienne », les manifestations de la religiosité requièrent une attention particulière et informent sur l'engouement pour le religieux. C'est ainsi que la confiance aux grandes institutions religieuses s'érode et naît alors chez les acteurs un attachement aux petites communautés où les relations sont plus chaleureuses. Dans ces communautés, les fidèles retrouvent et vivent les pratiques religieuses qui semblent dépassées, mais qui sont revitalisées. Sur la plupart des paroisses, les responsables de la pastorale sont confrontés à des demandes de bénédiction, de guérison, de dévotion ou de pèlerinage, etc. Les auteurs soulignent que ces démarches se situent dans un contexte de mondialisation qui « recomposent les attentes religieuses, de sociétés qui fragilisent les individus et ne favorisent pas leur propre épanouissement ». Devant une telle soif de satisfaction des besoins légitimes des populations, Peloux et Pian cherchent d'abord à les comprendre, ensuite proposent qu'on les accompagne et, enfin, qu'elles soient orientées de sorte qu'elles conduisent à Christ « déjà présent dans leur vie... en vue d'un plein épanouissement de la vie humaine et afin que les hommes réussissent leur vie ».

La plupart des NMR clament haut et fort que leur préoccupation majeure, c'est la réussite tant humaine que spirituelle des hommes, comme l'ont démontré Peloux et Pian en proposant l'encadrement des pratiques religieuses populaires. Mais la tâche s'avère très ardue pour les institutions traditionnelles. Comme Gauthier (2008) l'a démontré, l'exode des fidèles catholiques ne cesse de s'observer. Alors, Perretant-Aubourg (2011) dira que L'Eglise est à l'épreuve du pentecôtisme. Car dans sa thèse, elle aborde le développement des mouvements pentecôtistes-charismatiques à l'île de La Réunion et démontre que leur attraction est due à l'importance particulière qu'ils accordent à l'émotion religieuse. Ces groupes religieux donnent des preuves tangibles que l'agir de Dieu ne dépend pas des dogmes. Ainsi selon l'auteur, « ils concourent à l'imprécision des croyances et à la fluidification des itinéraires religieux, ils contribuent à la poussée des individualismes religieux, ils encouragent la scissiparité ecclésiale ». L'Eglise catholique est, sans ambages, mise à l'épreuve. Alors, Perretant-Aubourg ouvre l'étude au Renouveau charismatique catholique qui, à la différence du pentecôtisme, est vu comme l'expression d'une contestation interne à l'Église d'autant plus que les groupes se réclamant de cette mouvance demeurent rattachés à Rome et « ses pratiques et références empruntées au pentecôtisme ont été ré-acculturées dans le cadre de la tradition catholique ». Néanmoins, cette protestation, en se voulant davantage culturelle et existentielle que socio-économique, dénonce le rationalisme privilégié par l'Église au détriment des besoins émotionnels de ses fidèles.

Parlant des pratiques qui aident et soulagent, Kennedy D. (2004) montre que l'évangélisme est bel et bien une solution. Car selon lui, il trouve un écho favorable auprès des individus et des populations en perdition, dont l'itinéraire est marqué par l'alcool, les crises familiales, la drogue, la solitude. A ceux-là, le discours des prédicateurs apporte plus qu'un réconfort : la conversion des « born-again » correspond bien à une expérience existentielle de renouveau. L'individu est reconnu et accepté par une communauté, Dieu lui propose une voie individuelle de salut par une sorte de ressourcement moral. De ce point de vue, la religion oeuvre pour un développement personnel. Les born-again évangéliques décrits par Kennedy ne demandent pas forcément la vie éternelle. Ils cherchent à redonner du sens à leur existence, ils veulent de l'aide pour combattre tel ou tel démon intérieur : l'alcool ou la sexualité extraconjugale. L'encouragement à changer d'existence, à reprendre sa vie en main, ne relève pas que de la sollicitation verbale. Les communautés apportent une aide concrète par les petits groupes de soutien, par le recours à des actes « miraculeux » de guérisons, des aides matérielles directes, etc.

Kennedy soulève un problème capital de la pastorale, celui de l'accompagnement, de l'écoute et du soutien qui font défaut dans les villes où de plus en plus les individus ont besoin de la disponibilité de quelqu'un à qui ils peuvent se confier. Et il rejoint Mbodo O. (2011) qui affirme que les formes actuelles de la religiosité en Afrique invitent à découvrir des pratiques religieuses inspirées par une éthique du présent, de l'ici et maintenant. Leur succès, selon lui, s'explique par leur capacité réelle ou supposée à fournir des réponses aux problèmes vécus au quotidien. Ainsi, pour les populations africaines, dont la maladie et la misère sont le lot, une offre religieuse est d'autant plus intéressante qu'elle aide à trouver des solutions aux problèmes de la vie présente. Partout donc, devant les vicissitudes de la vie et les épreuves de l'existence, on attend de l'Évangile des remèdes efficaces aux maux du destin et des solutions infaillibles aux problèmes du milieu (Semporé, 1994, p. 21).

Voilà pourquoi les NMR acquièrent de plus en plus de succès et envahissent tous les univers. Depuis plus d'une vingtaine d'années, Mayrargue C. (2014) fait constater que le champ religieux béninois est occupé par plusieurs courants chrétiens évangéliques et pentecôtistes. Bien qu'ils soient minoritaires, écrit Mayrargue, ils sont parvenus à acquérir une forte visibilité depuis les années 1990 où la liberté religieuse est devenue une réalité dans un contexte de libéralisation politique et de démocratisation. Ces dynamiques contemporaines sont l'expression de la pluralisation religieuse. Pour n'en point douter, ces mouvements chrétiens sont à l'origine du processus de fragmentation des paysages religieux et d'éclatement de l'offre et de la pratique. Mais ils nouent de nouvelles interactions avec les autres acteurs religieux avec qui ils se trouvent en situation de compétition. Ces relations se traduisent par un partage nouveau des territoires et des formes inédites de porosité religieuse. Qu'ils soient d'origine nord-américaine ou européenne, ou africaine, voire béninoise, ces groupes de prière, associations, ou mouvements religieux, grands ou petits en termes d'effectifs, utilisent largement les technologies de l'information (émissions radio, programmes télévisés, consultations par téléphone), des théologies produites au sein de l'évangélisme mondial (comme les théologies de la prospérité), des espaces publics et privés, marqués de signes, d'images, de symboles (affiches annonçant des manifestations religieuses, pancartes indiquant la présence d'églises, autocollants apposés sur des véhicules avec des versets bibliques). Ils sont tous mus par l'esprit du prosélytisme et envahissent tous les espaces de la ville : établissements scolaires, centres de santé, marchés, prisons, bâtiments collectifs (Salle de cinéma, Hall des Arts, Palais de Sports), concessions, domiciles privés, etc. En fin de compte l'évangélisme valorise et promet la réussite individuelle, encourage le succès personnel, garantit la délivrance, la prospérité, l'abondance, et le succès.

Un tel contexte d'occupation des espaces urbains et périurbains, voire villageois, par les NMR est l'un des graves problèmes que relève Alladaye C. J. (2003) dans son ouvrage et qui menacent l'Eglise catholique dans sa pureté et sa prédominance. Le second problème se trouve être le syncrétisme religieux. Que ce soit l'un ou l'autre, Alladaye, affirme que « ces phénomènes imposèrent à l'Eglise catholique des efforts d'adaptation qui se traduisirent par des mutations... ». En effet, la manière dont les chrétiens béninois pratiquent la religion catholique ne respecte pas les prescriptions de l'Eglise. Bien qu'ils soient dévoués pour les oeuvres de l'Eglise, plusieurs d'entre eux n'hésitent pas à adopter le syncrétisme, en restant attachés aux rites traditionnels et en recourant au « bo » dans des situations particulières de la vie. En outre, l'auteur présente le panorama des différentes catégories de mouvements religieux qui partagent le pays avec les institutions établies : Christianisme céleste, Chérubins et Séraphins, Témoins de Jéhovah, Baptistes, Pentecôtistes, Assemblées de Dieu, Eglise du Fa, etc.

A la lumière de tout ce qui précède, nous retenons que les nouvelles pratiques de religiosité ne cessent pas d'interpeller nombre de spécialistes tant des sciences sociales et humaines que ceux des sciences théologiques et religieuses. Leurs contributions éclairent davantage le sujet de cette recherche : elles situent bien le contexte de la prolifération des NMR, la nécessité du religieux pour le bien-être des hommes, le développement des stratégies par les acteurs des différentes religions pour se maintenir en bonne place sur le marché de la religion, afin de tirer plus de profits, le déclin des institutions religieuses établies, etc.

Dès lors, le présent travail portera sur les nouvelles pratiques religieuses qui ont cours actuellement dans l'Eglise Catholique Romaine et les enjeux qui justifient leur existence. La manière dont les fidèles vivent le phénomène et l'appréciation qu'ils en font eux-mêmes sera cernée.

CHAPITRE 2 : CADRE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE

Il sera présenté dans ce chapitre le cadre de la recherche et les approches méthodologiques y afférentes.

2.1. Cadre de la recherche

La ville de Cotonou est la commune la plus importante sur presque tous les plans au Bénin. Elle abrite les principaux centres de décision pour l'administration du pays : la Présidence de la République, la quasi-totalité des ministères, la Cour Constitutionnelle, la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication, le Conseil Economique et Social, la Cour Suprême etc. Sont également domiciliées à Cotonou, la totalité des représentations diplomatiques de pays étrangers et d'institutions internationales près le Bénin et la direction de grands projets socio-économiques. De même, on y trouve la nonciature, la mosquée centrale, le siège de plusieurs Eglises évangéliques et des ordres ésotériques. En somme, le Bénin est administré et dirigé depuis la commune de Cotonou.

Photo 1 : Découpage administratif de la Commune de Cotonou

Source : Extrait du PDC de Cotonou, 2008

2.1.1. Les caractéristiques physiques

La ville de Cotonou est érigée en département par le dernier découpage administratif. Il est le plus petit des douze (12) départements du Bénin en termes de superficie. Il s'étend sur 10 km à l'Ouest où il est limité par la commune d'Abomey-Calavi du département de l'Atlantique et sur 6 km à l'Est en côtoyant la commune de Sème-kpodji du département de l'Ouémé. Il est situé au croisement des 6°20 de parallèle Nord et de 2°20 méridien Est. L'océan Atlantique forme la limite sud du département. Au nord, il se trouve limité par le lac Nokoué. Cotonou a une superficie de 79 Km² et compte 13 arrondissements et 144quartiers de ville6(*).

2.1.2. Les caractéristiques démographiques

La population de Cotonou est de 679 012 habitants en 2013 contre 665 100 en 2002, soit une légère hausse, 2,09% sur la période 2002-2013, après un accroissement de 2,17% sur la décennie 1992-2002. Cette situation s'associe à une densité de 8.595,1 habitants au kilomètre carré. Un début probable de saturation de la ville de Cotonou dont les problèmes environnementaux (pollution sonore, atmosphérique et du sol) et la cherté du coût de vie contraignent au jour le jour les populations à s'y retirer pour les communes voisines, Abomey-Calavi, Ouidah et Sèmè-Kpodji, devenues de véritables cités-dortoirs.

Les ethnies les plus significatives rencontrées sont : les Fon et apparentées (56,6%), les Adja et apparentées (17,7%), les Yoruba et apparentées (10,9%), les Dendi et apparentés (1,9%), les Yoa, Lokpa et apparentés (1,6%), les Bariba et apparentés (0,9%). On note une forte présence d'ethnies étrangères (8,9%)7(*).

2.1.3. Les activités économiques

Les activités pratiquées dans le département du Littoral sont multiples. La majorité des industries, les petites et moyennes entreprises et le plus grand nombre d'usines au plan national y sont concentrés. On y pratique la pêche (continentale, maritime artisanale, maritime industrielle), l'élevage, le jardinage et surtout le commerce. Les activités d'artisanat sont aussi assez diversifiées.

Sur le plan commercial, le département abrite beaucoup de marchés d'importance locale, nationale et un marché international. Les activités commerciales sont orientées aussi bien vers la consommation intérieure que vers l'importation et l'exportation. Le département offre d'énormes possibilités touristiques et dispose d'hôtels de luxe et des plages pittoresques.

En dépit de tous ces atouts, à Cotonou, le taux de chômage est peu élevé, il concerne plus d'un actif sur vingt, 5,5%. En prenant en compte les chômeurs découragés ce taux est de 6,8%. Le chômage frappe tant les hommes que les femmes. Cette situation amène les personnes qui n'ont pas d'emploi fixe à évoluer dans le secteur informel ou encore à recourir à tous les moyens pour sortir de la précarité financière, d'où l'engouement pour les nouvelles formes de religiosité qui promettent prospérité, succès, etc.

2.1.4. Les caractéristiques religieuses

Le Bénin étant un Etat laïc, sa Constitution a prévu en son article 23 la liberté de religion et d'autres textes de loi ont contribué à la pratique généralement libre de la religion.

Selon le recensement de la population de 2013, 51,2% de la population du département du Littoral sont des fidèles de l'Eglise catholique romaine, 16,9% sont des musulmans, 12,2% représentent les évangéliques, les pentecôtistes et autres chrétiens comme les membres de l'Eglise de Jésus-Christ et des Saints des derniers Jours (Mormones), les Témoins de Jéhovah, etc.,5,8% sont protestants (toutes catégories confondues), 5,7% pratiquent le Christianisme Céleste, 1,6% sont des pratiquants du culte vodoun et 0,3% d'autres types de religions traditionnelles locales. Les Rosicruciens, les Eckistes, les Baha'is, etc. sont regroupés sous le vocable « Autres religions » et représentent 2,7% de la population. 2,8% affirment n'appartenir à aucune religion.

Les catholiques, les musulmans et les membres des NMR sont les représentants des religions dominantes à Cotonou.

2.2. Considérations méthodologique du travail

2.2.1. Modèle d'analyse

« Dans le contexte de la globalisation et de la mondialisation, l'adepte choisit désormais sa manière de croire parmi des multiples offres dans les "supermarchés du religieux" ; cette possibilité lui permet d'hiérarchiser lui-même ses croyances ou ses pratiques, et souvent de manière provisoire, "jusqu'à ce que ça marche..." » (Sabuni Kitutu, 2011, p. 82). Il ressort de cette assertion que l'acte de croire et les choix opérés en matière de pratiques religieuses relèvent de plus en plus d'une décision individuelle que d'un repliement de l'individu aux systèmes religieux traditionnels de son groupe d'appartenance. Ainsi pour cerner le sens des nouvelles pratiques religieuses pour lesquelles optent les fidèles, il a été jugé pertinent d'inscrire la recherche dans le paradigme de l'interactionnisme symbolique selon Erving Goffman (1967). Cette théorie relève de l'individualisme méthodologique qui se fonde sur l'approche compréhensive de Max Weber. Ce dernier met, en fait, l'individu à la base de sa sociologie, en cherchant à comprendre la relative signification des comportements.

L'engouement des fidèles catholiques pour les nouvelles pratiques religieuses s'inscrit dans la démarche d'une quête personnelle de satisfaction qui a un sens pour eux. Par l'interactionnisme symbolique, il s'agira de saisir et de comprendre les motivations qui fondent leurs différents choix à partir des explications qu'ils en donnent eux-mêmes. De même, l'approbation par le clergé de ces nouvelles pratiques religieuses sera analysée pour mieux en cerner les enjeux.

Etant donné que la vie sociale, pour les interactionnistes comme Goffman, se compose d'actions individuelles, d'analyses des actions d'autrui, puis ensuite d'interactions, alors les interactions entre les acteurs catholiques (fidèles, clergé) et avec le champ religieux ambiant seront analysées. Comme le champ religieux est dominé par la concurrence, il faudra voir comment l'Eglise catholique romaine, en sa qualité d'organisation, parvient à s'y positionner aux côtés des NMR. En somme, il sera question de reproduire le sens de ce que disent les fidèles catholiques de leurs comportements en matière de nouvelles pratiques religieuses et de leurs interactions avec les autres. 

2.2.2. Nature de la recherche

En fonction des objectifs définis, la présente recherche s'avère être à la fois qualitative et quantitative. Ces modes d'investigation se justifient en ce sens qu'ils sont complémentaires. L'approche qualitative permet de récolter des informations relatives aux nouvelles pratiques religieuses en observant les acteurs sociaux dans les Eglises au cours des messes, des séances ou assemblées de prière ou sur des places publiques lors des campagnes d'évangélisation. Elle aide aussi à recueillir des informations par des entretiens (semi-structurés). Cette approche vise à comprendre et non à démontrer, ni à contrôler en fournissant des données de contenu, et non des données chiffrées. Quant à l'approche quantitative, elle sert à recueillir des données observables et quantifiables comme les proportions de ceux qui prennent part aux différentes pratiques religieuses dites populaires. Elle aboutit à des données chiffrées qui permettent de faire des analyses descriptives et statistiques, des tableaux et graphiques, etc. Cette approche mixte aide donc à appréhender les nouvelles pratiques religieuses dans toutes leurs dimensions.

2.2.3. Recherche documentaire

Nul ne peut entreprendre une recherche sérieuse sans franchir l'étape de la recension qui lui permet d'avoir une idée précise sur le sujet. La revue documentaire permet donc de faire un état des lieux sur la question soulevée et de clarifier sa position. Comme outil, il a été fait des fiches de lectures suite à chaque document consulté. Ainsi, afin d'avoir des informations subséquentes, des centres de recherche ont été visités. Le tableau ci-dessous en présente la synthèse.

Tableau 1 : Synthèse de la recherche documentaire 

Centres de documentation

Nature des documents

Informations obtenues

Bibliothèques de l'UAC, FLASH, LARRED

Ouvrages généraux, ouvrages sociologiques, recueils d'articles ; mémoires

Informations relatives au sujet de recherche et à la méthodologie

Bibliothèque personnelle

Ouvrages généraux, ouvrages sociologiques, recueils d'articles, dictionnaires

Informations relatives au sujet de recherche et à la méthodologie

Internet

Articles, revues, thèses, ouvrages de méthodologie, mémoires, lexique de sciences sociales

Informations relatives au sujet de recherche et à la méthodologie

Source : Données de terrain, 2016 et 2017

2.2.4. Sources orales

Elles renvoient aux personnes ressources que nous avions interviewées, compte tenu de leurs spécialités, leurs connaissances du sujet ainsi que leurs expériences en matière de pratiques religieuses.

2.2.5. Enquête préliminaire

Elle a servi à vérifier les hypothèses et à tester les outils élaborés. Au cours de cette étape, nous avons réajusté les outils de collecte de données et avons pris des dispositions en vue de la réussite de l'enquête proprement dite.

2.2.6. Enquête de terrain proprement dite

Cette étape a permis la collecte des données empiriques durant environ trois mois, de février à Avril 2017. Elle s'est déroulée à Cotonou, sur des paroisses, dans des chapelles de l'Eglise Catholique Romaine et parfois à domicile, où des rencontres ont été effectuées avec des prêtres, des responsables des mouvements catholiques et des fidèles. Dans un premier temps, avec les autorités ou responsables, des entretiens ont été faits au sujet de l'effervescence religieuse au Bénin de nos jours, des problèmes auxquels sont confrontés les fidèles, des nouvelles pratiques religieuses qui deviennent récurrentes dans l'Eglise catholique et à propos de leurs itinéraires religieux. Des questions relatives à la désaffection de l'Eglise Catholique Romaine, aux défis des NMR et aux enjeux des nouvelles pratiques religieuses dites populaires ont été aussi abordées avec eux. Dans un second temps les fidèles catholiques ont fait l'objet d'attention particulière : ils ont été soumis à des entretiens pour recueillir leurs points de vue sur le besoin qui les pousse à rechercher des bénédictions, des guérisons, des accompagnements spirituels, des protections..., en allant de paroisse en paroisse où s'organisent des campagnes d'évangélisation ou des messes de guérison sous la houlette des prêtres exorcistes ou des mouvements charismatiques dirigés par des laïcs. Enfin, à titre exceptionnel et par souci de vérification, trois pasteurs des Eglises évangéliques et pentecôtistes ont été interviewés, en vue de saisir la provenance de leurs fidèles, les problèmes qu'ils leur exposent et la nature des solutions qu'ils leur proposent.

2.2.7. Techniques et outils de collecte de données

La collecte des données a été faite grâce à deux techniques. Il s'agit de l'observation participante et l'entretien semi-directif.

2.2.7.1. L'observation directe

La collecte des données a été réalisée grâce à l'observation directe. Cette technique a été privilégiée tout en mettant en application le principe de l'agnosticisme méthodologique8(*) que recommandent les sciences sociales des religions. Il exige donc, dans la rédaction d'un mémoire ou la réalisation d'une étude scientifique, de rester « confessionnellement neutre » en laissant de côté les croyances personnelles. A cet effet, Willaime J.-P. (1992, p. 203) écrivait : « ... nous restons situés à un point de vue méthodologiquement agnostique qui tente de mesurer des effets sociaux indépendamment de la valeur religieuse et éthique que l'on peut reconnaître aux systèmes religieux considérés. Ce point de vue permet de mettre froidement à jour un certain nombre de mécanismes sans faire intervenir ses options personnelles et sans présupposer qu'une religion est meilleure sous prétexte qu'elle est socialement plus efficace. » De même, Sébastien Fath renchérit en ces termes : « Le meilleur travail possible, pour un chercheur, (...) c'est une analyse distanciée, dépassionnée, informée et rigoureuse, utile à la société pour la qualité de sa recherche.»9(*)

L'observation directe implique la présence du chercheur sur son terrain de recherche, autrement dit, dans le cadre de ce travail, sur les lieux de prière, aux messes de guérison, aux assemblées de prières des mouvements charismatiques, tant du côté catholique que du côté des NMR afin d'observer les rites et les pratiques collectifs, de les décrire et d'en faire une analyse.

L'outil associé à cette technique est la grille d'observation. Les éléments privilégiés sont les attitudes des fidèles au cours des messes de guérison, des campagnes d'évangélisation, des séances de prière de délivrance, leurs comportements dévotionnels devant les grottes mariales ou les statues d'un saint, leurs postures devant un prêtre au moment de recevoir une bénédiction, etc.

2.2.7.2. L'entretien

Outre l'observation directe, l'entretien a été pour le travail une technique importante dans la récolte des données. A ce sujet, A. Blanchet et A. Gotman (1992, p. 27) pensent que « l'enquête par entretien est ainsi particulièrement pertinente lorsque l'on veut analyser le sens que les acteurs donnent à leur pratique, aux événements dont ils ont pu être les témoins actifs ; lorsque l'on veut mettre en évidence les systèmes de valeur et les repères normatifs à partir desquels ils s'orientent et se déterminent. Elle aura pour spécificité de rapporter les idées à l'expérience du sujet. Elle donne accès à des idées incarnées, et non pas préfabriquées, à ce qui constitue les idées en croyance et qui, pour cette raison, sera dotée d'une certaine stabilité. » Cette technique s'inscrit dans la logique du modèle d'analyse susmentionné. Alors elle s'explique par le souci de recueillir des informations complémentaires, indispensables, pour comprendre les motivations qui justifient telles ou telles attitudes des acteurs, saisir les raisons qui poussent les uns et les autres à prendre part activement aux séances de prière de tel mouvement charismatique au sein ou hors de l'Eglise ou aux messes de guérison. De même, cette technique a permis de recueillir auprès des autorités de l'Eglise les données qui aident à cerner les enjeux qui fondent l'approbation des nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise Catholique à Cotonou.

Comme outil, le guide d'entretien a été utilisé et il a varié selon que l'entretien s'effectue avec les prêtres, les pasteurs, les responsables de mouvements charismatiques, tandis que le questionnaire semi-structuré a été utilisé pour les fidèles ; sans oublier l'importance accordée aux récits de vie, qui ont permis de saisir la pertinence de leurs multiples quêtes.

2.2.8. Groupes cibles et échantillonnage

Il sera question des différents acteurs stratégiques dont le statut social est en relation avec la problématique des nouvelles pratiques religieuses ainsi que des techniques de leur choix.

2.2.8.1. Groupes cibles

Les groupes cibles sont constitués des catégories de personnes en position de fournir des réponses aux préoccupations de cette recherche. A cet effet, ils sont composés d'acteurs impliqués dans le champ d'action catholique, ou pouvant contribuer à la compréhension du phénomène de l'effervescence religieuse, des enjeux des nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise Catholique Romaine, de la pastorale des malades, à savoir: les clercs catholiques, les responsables des mouvements charismatiques catholiques, les pasteurs évangéliques et pentecôtistes, les fidèles catholiques de la base.

2.2.8.2. Echantillonnage

Les groupes cibles étant identifiés, il va falloir déterminer la taille de l'échantillon, c'est-à-dire le nombre de personnes à enquêter à l'intérieur de chaque groupe cible. Pour ce faire, la technique non probabiliste, telle que le choix raisonné, a été utilisée, à cause de la portée qualitative de la recherche. L'échantillonnage par choix raisonné consiste à sélectionner des acteurs sur la base de certains critères pouvant conduire à l'obtention d'informations susceptibles de satisfaire les attentes du chercheur. Les unités d'échantillonnage qui semblent représentatives sont donc sélectionnées. Ainsi, la gestion spirituelle des fidèles, l'administration de la vie paroissiale sont les critères qui ont déterminé le choix des prêtres, des responsables de mouvements charismatiques et des pasteurs. Tandis que le statut de chrétien catholique a justifié le choix des fidèles laïcs.

Ainsi, nous avons retenu un échantillon de 125 informateurs, détaillés dans le tableau ci-dessous. Mais il est à noter qu'il existe 30 paroisses à Cotonou et sur 15 d'entre elles, les 110 fidèles enquêtés ont été sélectionnés.

Tableau 2 : Constitution de groupes cibles

Catégorie d'acteurs enquêtés

Effectif

Prêtres de l'Eglise catholique romaine

5

Pasteurs d'Eglises évangéliques ou pentecôtistes

3

Responsables de groupes de prière charismatiques

7

Fidèles catholiques baptisés, catéchumènes et autres membres se considérant comme chrétiens ou fidèles de l'Eglise catholique romaine

110

Total

125

Source : Données de terrain, 2017

2.2.9. Dépouillement et traitement des données

Le dépouillement des données empiriques a été fait manuellement : elles ont été triées et organisées par thématique selon qu'elles sont exploitables ou non en rapport avec les objectifs spécifiques. Ensuite, avec les logiciels Word et Excel, nous les avons transcrites et saisies ; ce qui nous a permis de produire des tableaux statistiques ayant servi à l'analyse. En ce qui concerne les données issues des guides d'entretien adressés aux prêtres, pasteurs et responsables de mouvements, nous avons analysé les contenus des propos selon trois axes : les points communs, les points divergents et les points spécifiques.

2.2.10. Calendrier de la recherche

La recherche s'est déroulée pendant neuf (9) mois environ. Le tableau ci-dessous récapitule chaque étape.

Tableau 3 : Calendrier de la recherche

Période

Activités

Lieu

Personnes Impliquées

Du 1er novembre au 31 décembre 2016 (2 mois)

- Documentation

- Entretiens exploratoires

- Rédaction du protocole de recherche

- Centres de documentation

- Bibliothèques

- Laboratoires

- Cybercafés

- Personnes ressources

- Directeur de mémoire

Du 1er janvier au15 janvier 2017 (15 jours)

Elaboration des outils de collecte de données et révision

LARRED (UAC)

Directeur de mémoire

Du 16 janvier au 31 janvier 2017 (15 jours)

Pré-enquête

Commune de Cotonou

- Personnes ressources

- Enquêtés

De 1er février 2017 au 30 avril 2017 (3 mois)

Enquête proprement dite

Commune de Cotonou

-Personnes ressources

-Enquêtés

Du 1er mai 2017 au 14 juillet 2017 (2 mois et demi)

Dépouillement, rédaction, correction et relecture

Gbodjè (Abomey-Calavi)

Directeur de mémoire

Mai 2018

Soutenance

UAC

Membres du jury

Source : Données de terrain, 2017

2.2.11. Difficultés rencontrées

Les difficultés rencontrées dans le cadre de cette recherche sont de deux ordres. La première est l'accès à l'information. En effet, nous nous sommes heurté au refus de collaboration de certains responsables de mouvements et des fidèles qui attendent recevoir de mots d'ordre de leur curé avant de se prêter à nos questions. Pour contourner cette difficulté, nous avons réussi à créer, à chaque entretien, un climat de confiance et d'intérêt pour la collaboration sur ces questions.

La seconde difficulté a été de trouver des prêtres et pasteurs pour l'entretien, compte tenu de la taille de notre guide qui exigeait au moins une heure par entretien. Pour contourner une telle difficulté des rendez-vous à domicile ou à des heures où ils sont plus ou moins libres ont été négociés.

DEUXIEME PARTIE :

LES ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE

CHAPITRE 3 : L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE DANS LA DYNAMIQUE DU MARCHE RELIGIEUX

L'effervescence religieuse a été favorisée au Bénin par des facteurs historiques indéniables et aussi par un cadre juridique légitime grâce à la Constitution du 11 décembre 1990. Avec l'émergence des NMR, les prestations religieuses s'offrent partout d'autant plus que les demandes se font de plus en plus fortes tant en milieu urbain que rural. Alors, il s'agira de voir comment l'institution catholique se positionne sur le marché de la religion, comment elle réagit face au défi que lui lancent les NMR qui tentent de lui arracher des fidèles.

3.1. Effervescence religieuse au Bénin et à Cotonou 

L'effervescence religieuse au Bénin, voire à Cotonou, se justifie par des facteurs historiques mais également par le cadre juridique de la période démocratique.

3.1.1. Les facteurs historiques

L'émergence en grand nombre des mouvements religieux et mystiques était une réalité au Dahomey bien avant l'ère démocratique, comme le souligne Alladaye C. J. (2003). Elle eut des conditions favorables grâce à la « révolution marxiste » qui fut proclamée comme guide philosophique de l'Etat en 1974 et le socialisme scientifique comme voie de développement du pays. L'année suivante, le Dahomey était devenu la République Populaire du Bénin et le Parti de la Révolution Populaire du Bénin (P.R.P.B) a été créé avec pour statut de parti unique. Le 26 août 1977, par la « Loi fondamentale », toutes les institutions du pays furent soumises au P.R.P.B. Dès lors, la répression fut décrétée et fit des ravages dans le pays, puis les opposants, réels ou supposés, furent pourchassés, arrêtés, emprisonnés ou contraints à l'exil.

Le pouvoir révolutionnaire connut un échec sur le plan économique. La plupart des entreprises créées firent faillite. La misère alors s'installe à cause des revenus peu sûrs, du faible pouvoir d'achat, du chômage, de la précarité des soins sanitaires, etc.

Devant l'angoisse existentielle les citoyens béninois, surtout d'obédience catholique, se heurtaient, dans leur religion, à une structure ecclésiale qui manquait de souplesse, de convivialité et d'initiative à même d'assister les miséreux. Quand bien même qu'Alladaye (2003) souligne que « dans ces conditions, la religion devint un refuge », il était constaté que ce sont les Eglises évangéliques et pentecôtistes qui étaient prisées à l'époque, en particulier dans les grandes villes comme Cotonou. A la solitude qui fait souffrir les citadins, « les sectes opposent la convivialité fraternelle de leurs groupements, communautaires ou non. Chacun y est connu et nommé par son nom » (Schlegel, 1995, p. 95). Ces « profonds bouleversements politiques, économiques et sociaux [vont conduire] à la Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation. Laquelle conférence a inauguré à son tour une ère nouvelle de démocratie et de libertés. L'une des caractéristiques majeures de cette période est la forte demande religieuse et l'expression d'une ferveur populaire... » (Amouzouvi, 2005, p. 48)

3.1.2. Le cadre juridique

Le renouveau démocratique au Bénin qui a marqué les années 1990, après la période révolutionnaire, a été déterminant pour la liberté religieuse. Celle-ci trouve un appui favorable dans un cadre juridique qui est garanti par la Constitution béninoise. En effet, l'article 23 stipule que « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion, de culture, d'opinion et d'expression dans le respect de l'ordre public établi par la loi et les règlements. L'exercice du culte et l'expression des croyances s'effectuent dans le respect de la laïcité de l'État ». Il transparaît clairement que chacun est libre de ses opinions religieuses et ne doit en aucun cas s'en inquiéter, sauf si elles empiètent sur les droits des autres et perturbent l'ordre public établi.

Comme bien d'autres Etats de l'Afrique subsaharienne, le Bénin a ainsi ouvert la voie à la création des Eglises qui ne cesseront de naître depuis lors : « Au Bénin, tout groupe religieux qui se fait enregistrer au Ministère de l'Intérieur, est considéré comme Eglise à part entière » Alladaye C. J. (2003, p. 322).Parmi ces Eglises de tendance évangélique et pentecôtiste, certains sont d'origine étrangère, plus particulièrement américaine, et d'autres sont purement d'essence africaine voire béninoise comme le Christianisme Céleste, les Chérubin et Séraphins, l'Eglise du fa, etc. Toutes ces Eglises partagent le paysage béninois avec les institutions religieuses traditionnelles et donnent la preuve de l'intérêt sans cesse croissant qu'a la population pour le religieux.

3.2. Intensification du phénomène religieux

La laïcité de l'Etat béninois promulguée en 1990 a été déterminante dans l'amplification de l'effervescence religieuse et l'émergence des NMR. Cette ébullition religieuse vient étancher une soif de besoins tant fondamentaux que spirituels.

3.2.1. La quête quotidienne des besoins fondamentaux

Cette intensification du phénomène religieux intervient dans la logique de la satisfaction des aspirations auxquelles tiennent nombre d'acteurs, lesquelles aspirations « sont de plusieurs ordres: idéologico-politiques, morales, sociales, identitaires, communautaires, existentielles, matérielles et même thérapeutiques. » Dortier J.-F. et Testot L. (2005). Voilà pourquoi les nouveaux acteurs religieux qui ont émergé depuis la période démocratique ne ménagent aucun effort et ne tarissent pas d'initiatives pour offrir à leurs ouailles tous les moyens pour faire face aux difficultés de la vie. De même, dans l'Eglise catholique, comme engagés dans un combat ultime pour la survie, les responsables à divers niveaux se mobilisent tant bien que mal pour aider les fidèles à trouver la porte de sortie appropriée aux problèmes qui les embarrassent.

Le souci permanent des enquêtés reste, en effet, la résorption des difficultés existentielles. Ainsi reconnaissent-ils tous que les conditions de vie deviennent de plus en plus difficiles de nos jours et soutiennent que cela est dû au manque de débouchés (35,45%), au faible pouvoir d'achat (28,18%) et à la mal gouvernance (10%). En dehors de ces raisons qui semblent plus relever de la gestion du pouvoir politique, les enquêtés ont souligné une raison qui paraît justifier leur quête dans les religiosités chrétiennes : 12,73% précisent que les difficultés de la vie s'expliquent par le fait que les hommes ne respectent pas les lois de Dieu ou de la nature, autrement dit, ils pèchent. Or, il n'y a aucun recours humain susceptible de conjurer le sort dû à une transgression pareille, si ce n'est pas que des doléances soient formulées à l'endroit du Dieu Créateur. Donc, selon ces enquêtés, la solution face aux difficultés de la vie réside dans la prière, surtout la prière assidue, persévérante en faisant beaucoup plus confiance à Dieu.

En dépit des prières, la ville impose son primat de milieu de combat ardu pour la survie, d'autant plus qu'elle traîne toujours les indicateurs de la misère, de la pauvreté, de la violence et de l'insécurité. Le revenu moyen obtenu dans notre échantillon est certes légèrement au-dessus du Smig (40.000f CFA) et s'élève à 58.866 f CFA, mais il convient de signaler que plus de la moitié des personnes enquêtées, c'est-à-dire 68 sur les 110, soit 61,82%, vivent maritalement, mariées coutumièrement ou chrétiennement. Ainsi est-il aisé de comprendre que ces populations éprouvent beaucoup de difficultés à nourrir leurs enfants, à assurer leur scolarité et à affronter la vie citadine. Surtout que l'absence d'un système de sécurité socio-sanitaire adéquat pour tous et à un coût abordable et le manque de garantie d'employabilité à long terme étouffent l'espérance d'une existence paisible à Cotonou. Dès lors, à la question de savoir ce qui fait le plus courir les hommes à Cotonou, les enquêtés ont cité : Pauvreté/Misère (30%), Argent ou Moyens financiers (26,36%), Bien-être familial/social (21,82%), Travail (17,27%), etc. Mais si malgré tous les efforts consentis pour venir à bout de ces maux, l'acteur se voit aux prises avec des forces occultes ou des maux qu'il lui est difficile de comprendre et de vaincre facilement, l'insécurité gagne une autre dimension : il est en insécurité spirituelle. Dans ce cas, sa quête de solution devient encore plus effrénée, qu'il se permet parfois de la pousser jusqu'au seuil de l'irrationnel.

3.2.2. L'insécurité spirituelle

Des situations embarrassantes ont cours dans la vie des citadins ; ce qui relève de l'ordre normal des choses. Mais elles viennent empirer l'existence déjà fragilisée et chargée de malheurs paralysants. C'est ainsi que derrière un problème de santé, des échecs répétés dans les affaires ou à des examens ou concours, la persistance du chômage, une rupture de relation conjugale, une difficulté de conception, etc., chacun appréhende un problème spirituel, soupçonne un esprit malveillant. Sur ce, la quasi-totalité des enquêtés, soit 98,18%, pensent que les problèmes dont souffrent beaucoup de personnes sont à la fois d'ordre matériel et spirituel et 62 enquêtés sur les 110, soit 56,36%, déclarent avoir été confrontés à un problème quelconque de la vie qui, selon eux, aurait eu une source spirituelle. Parmi ces 62 enquêtés, il se dégage 33 femmes contre 29 hommes ; ce qui montre que tous les deux sexes sont sujets à des problèmes spirituels avec un léger écart.

Le phénomène de la confrontation à un problème d'ordre spirituel est ressenti ou vécu différemment selon l'âge, la profession ou le niveau d'études. En effet, la tranche d'âges [25-55[, considérée comme la plus active, est plus touchée par les problèmes spirituels que les autres (72,58%). Cela peut se comprendre dans la mesure où il s'agit des citadins qui donnent l'impression de réussir dans leur famille ou dans leur quartier à cause de leurs activités. Aux yeux de tous, ils remuent ciel et terre en dépit des problèmes liés à la vie en ville, toujours animés par le souci du progrès. La convoitise des uns et des autres peut se muer en haine farouche pouvant conduire à nuire à autrui. C'est ainsi que 77,41% des enquêtés concernés par les problèmes spirituels sont des artisans, des commerçants et des fonctionnaires.

S'agit-il d'une présomption subjective pour justifier la précarité de la situation dans laquelle l'on vit en voulant trouver un bouc émissaire, pour se libérer moralement ? Assurément non, d'autant plus que ces acteurs exposent des problèmes spirituels ou non qui s'inscrivent dans une objectivité sans précédent. Ils sont les seuls à savoir ce qu'ils endurent. C'est ce qui fonde leur détermination à vouloir s'en sortir. Au nombre des problèmes spirituels récurrents dans la vie des enquêtés, on note l'envoûtement, les maladies provoquées ou incurables, la sorcellerie, les possessions démoniaques, etc.

Dès lors, rechercher le sens des infortunes qui se présentent comme sans issues et qui perturbent l'existence, amenuisent les maigres ressources, devient légitime. De même, les problèmes ne sont plus perçus comme susceptibles d'être résorbés avec les seuls moyens habituels. Par exemple, « la protection des attaques de la sorcellerie constitue un impératif. Tous les moyens sont bons pour y parvenir » (Mbodo, 2011, p. 232). Ceci nous conduit donc sur le terrain du marché de la religion.

3.3. Marché de la religion et quête de solution

La dynamique des croyances et des pratiques religieuses rend disponible un vaste marché du religieux où chacun, en fonction de ses aspirations, peut s'offrir les services de tels ou tels acteurs religieux.

3.3.1. Le marché de la religion

La quête de solution aux problèmes de la vie est un fait. L'existence d'une gamme variée de recours en est un autre. Ainsi la liberté religieuse offre à tous les hommes la possibilité de choisir la religion de leur prédilection, religion qui « n'est plus dicté[e] à la naissance ni n'obéit plus à un processus établi par avance » (Amouzouvi, 2005, p. 14). Cette même liberté rend disponible un pluralisme religieux où n'importe qui au nom de la liberté peut créer sa propre religion et offrir ses prestations selon que la demande existe et est grande, et partant une gamme variée de choix est offerte aux fidèles (cf. Amouzouvi, 2005 ; p. 14). La possibilité de choisir ou de ne pas choisir, comme si on était dans une sorte de supermarché, est à la portée de tous. Voilà l'idée que l'on peut se faire du marché de la religion : il « permet aux croyants de prier ici et là, d'être membre de telle organisation ou de telle autre juste pour un certain temps, bref de faire preuve d'une certaine fluctuation : regarder autour de soi et aller là où les choix individuels de chacun s'expriment le mieux » Gerdien (1998 : 56)10(*). Dans ce marché donc, cohabitent toutes les formes de pratiques à savoir les religions endogènes, les groupes ou mouvements ésotériques (Rose-croix, Ekanckar, Franc maçonnerie, etc.) et les institutions religieuses chrétiennes. Les hommes, sans distinction aucune, peuvent consulter les alpha, les marabouts, les visionnaires, les guérisseurs, les bokonon, les tradi-praticiens, les maîtres spirituels, les mystiques, les pasteurs des Eglises évangéliques ou pentecôtistes, les prêtres exorcistes de l'Eglise catholique ou les responsables de groupes de prière charismatiques, etc. Comment les fidèles de l'Eglise catholique font le marché dans cette variété de recours religieux ?

3.3.2. Les fidèles catholiques et la quête de solution aux problèmes spirituels

Le recours aux pratiques religieuses est systématique chez les fidèles enquêtés et traduit de plus en plus un attachement au religieux dans le but surtout de la satisfaction personnelle en fonction des préoccupations des uns et des autres. Cette quête se fait soit au sein de l'Eglise catholique à travers des messes de guérison, des séances d'exorcisme et de délivrance, des prières dites Jéricho11(*), soit ailleurs chez les NMR. Ce qui parfois met en doute leur adhésion formelle à la foi de leur religion, c'est-à-dire le catholicisme. En effet, 80% des enquêtés apprécient positivement les services que rendent les NMR aux populations tandis que 16,36% s'inscrivent en faux contre leurs services et 3,64% demeurent sans avis. Aux yeux de ceux qui paraissent tolérants, les Eglises évangéliques et pentecôtistes connaissent du succès et attirent du monde parce qu'elles font des miracles (26,36%), prient efficacement et opèrent des guérisons et délivrances (20,91%), sont plus fraternelles et solidaires (13,64%) et prêchent bien tout en promettant la prospérité, la réussite dans la vie (10,91%). Pour ceux qui récusent la légitimité des NMR, il est de notoriété de se tenir loin de ces groupes religieux d'autant plus que la plupart instrumentalisent le nom de Dieu ou de Jésus (10,91%) ou font usage des forces occultes (5,45%) pour conduire les hommes à la perdition.

Il s'agit d'un regard plein de subjectivité que les acteurs jettent les uns sur les autres. Un pasteur (P3), par exemple, disait au cours d'un entretien : 

« Il ne faut pas se mettre sous un autre joug si ce n'est celui de Jésus Christ. Je ne collabore pas avec l'Eglise catholique, ni avec le Christianisme céleste, ni avec les religions endogènes. Même avant de collaborer avec une Eglise évangélique, il faut la discerner d'abord et se laisser diriger pas l'Esprit Saint. »

Une manière de se révéler pur aux yeux du monde et de stigmatiser les autres. Aussi un fidèle catholique affirme-t-il sans ambages que :

« Les fidèles catholiques vont dans ces églises pour être possédés; ces églises dépossèdent les gens financièrement. »

Cette assertion rejoint une des visions de l'Eglise catholique qui stipule que « Hors de l'Eglise, point de salut. » Voilà pourquoi même la tolérance dont font preuve certains fidèles catholiques à l'égard des NMR ne les amène cependant pas à vouloir renier leur religion au profit d'eux, ni ne les blanchit d'aucun jugement de valeur. Pour ce faire, ils trouvent que ces mouvements religieux représentent des menaces potentielles pour l'Eglise catholique.

3.4. Défi des NMR et réaction de l'Eglise catholique romaine

La menace se présente comme un défi lancé à l'Eglise catholique romaine. Et sur le marché de la religion, pour son repositionnement, elle prend des initiatives devant venir à bout de l'exode pressenti.

3.4.1. Le défi des NMR

Les nouvelles pratiques de religiosité qui s'observent de nos jours à Cotonou visent à chasser les mauvais esprits, à exorciser, à délivrer, et à guérir. Comme la demande est de plus en plus grande, les prestataires se font inventifs et saisissent l'opportunité. C'est ainsi que les NMR paraissent plus actifs dans le marché religieux.

Le pasteur (P1) dit :

« A un nouveau venu, nous proposons l'Etude biblique, nous lui offrons la communion fraternelle et l'invitons au Baptême du Saint Esprit. Mais s'il est venu présenter un problème - et c'est souvent le cas -, nous lui proposons un seul message : Jésus. Car il est écrit dans Romains 10, 9-10 que quiconque invoquera le nom de Jésus Christ sera sauvé. Parfois les fidèles trouvent cela banal, mais c'est la vérité, Jésus est la solution de tous les problèmes de l'humanité. Maintenant pour opérer une délivrance, nous prions en fonction des problèmes présentés en essayant de diagnostiquer le mal, de rompre les liens contractés avec des esprits et la libération se réalise grâce à la Parole de Dieu. »

Ces propos montrent le soin avec lequel sont entourés ceux qui frappent à la porte des NMR : Parole de Dieu partagée, communion fraternelle, baptême, solution aux problèmes trouvée. C'est-à-dire le salut éternel est proposé et l'obtention de la solution aux problèmes existentiels est garantie par des séances de délivrance. A ce sujet Mbodo (2011, p. 232) dit que « L'offre des nouvelles formes de religiosité paraît mieux adaptée aux situations vécues par l'individu dans le besoin. » Cela éclaire donc l'attitude de certains fidèles catholiques qui n'hésitent pas à tourner dos à leur église pour se retrouver dans un mouvement religieux.

En effet, les trois pasteurs que nous avons interviewés au cours de notre recherche nous ont signalé que la plupart de leurs fidèles viennent de l'Eglise catholique, des religions endogènes et de l'Islam. Pour preuve, deux sur les trois pasteurs étaient d'anciens fidèles catholiques partis à cause de l'incapacité de l'Eglise de les délivrer des problèmes dans lesquels ils étaient. Nous pouvons alors dire que le succès des NMR peut être attribué à quelques traits significatifs : une prédication tranchante avec des messages attractifs comme « Avec Jésus tu connaîtras la prospérité ! », « Venez à Jésus et vous serez sauvés ! », l'importance accordée à la conversion personnelle, le souci d'afficher une singularité chrétienne, l'accent mis sur le témoignage, et enfin des communautés à l'ambiance chaleureuse et fraternelle. Autant de caractéristiques qui permettent de valoriser l'homme. C'est la raison pour laquelle « dans l'anomie régnant dans les immenses mégapoles du Sud, les citadins (...) retrouvent dans les groupes évangéliques une communauté chaleureuse où leur est proposée une expérience de foi, dans des célébrations enthousiastes, animées par de véritables orchestres » (Lecaros, 2011). Ces NMR mettent donc à l'épreuve les instituions religieuses traditionnelles comme l'Eglise catholique. Ils les défient littéralement par leur programme et leur spécificité. De ce fait, 60% des enquêtés perçoivent les NMR comme des menaces potentielles pour l'Eglise catholique et les raisons sont multiples. Selon eux,

« (...), les NMR détournent les fidèles catholiques, ils attirent les fidèles de l'Eglise qui sont dans les difficultés ou qui souffrent, ils remettent en cause une bonne partie de la doctrine de l'Eglise catholique, les pasteurs se rendent plus disponibles que les prêtres catholiques, l'Eglise catholique elle-même n'oeuvre pas pour l'affermissement des chrétiens dans la foi, l'Eglise catholique n'assiste pas les gens, etc. »

Quant à ceux qui n'appréhendent aucune menace (38,18%), ils tiennent des propos à la fois réalistes et valorisants pour leur église :

« (...), le mouvement des adhésions est dans les deux sens, l'Eglise catholique est la racine, Dieu veille sur son Eglise, les fidèles catholiques croissent toujours, l'Eglise catholique est bien assise sur les Apôtres, etc. »

Néanmoins le constat de la désaffection est d'actualité et fait l'objet de réflexion au sein de l'Eglise catholique. Cakpo E. (2013) écrit que « la caractéristique principale des NMR en Afrique est de proposer un christianisme réajusté et réinterprété, un christianisme africain. Ils cherchent avant tout à mieux répondre aux conditions de vie en développant une religion adaptée aux besoins sociaux et religieux des populations. » Cette assertion se vérifie dans la mesure où n'en pouvant plus dans leur quête de solution aux problèmes existentiels dans leur église, certains fidèles catholiques n'hésitent pas à recourir aux services des NMR quel que soit le prix que cela coûte. En effet, les NMR parviennent autant que faire se peut à offrir des solutions adaptées aux problèmes présentés. La satisfaction amène certains fidèles catholiques à devenir membres de ces NMR, tandis que d'autres reviennent au bercail, au grand dam des frères et soeurs ayant été au courant de l'itinéraire thérapeutique emprunté. En général, à leur encontre, fusent des critiques venant des catholiques se disant fidèles à la doctrine de l'Eglise qui trouvent que ces fluctuations dans la foi, selon le mot de Gerdien, couramment qualifiées dans le milieu catholique de prostituions spirituelles, ne sont pas dignes des enfants de Dieu. Ainsi les départs des fidèles de l'Eglise catholique vers les NMR sont différemment appréciés.

Les avis sont divers à propos de l'exode des fidèles catholiques vers les NMR, allant d'un ton critique (65,45%) à un ton objectif ou modéré (33,64%). En effet, 34,54% des enquêtés qualifient l'acte comme l'expression d'un manque de foi, 12,72% pensent que ceux qui partent méconnaissent les richesses de l'Eglise catholique et estiment qu'on peut trouver sur place tout ce qu'on va chercher ailleurs, 11,82% estiment que les fidèles sont à la recherche du merveilleux, des miracles et 6,36% arguent qu'ils sont assoiffés de biens matériels, de la prospérité, etc. Tandis que ceux qui ont adopté un ton plus objectif se réservent le droit de juger: 18,18% affirment que ceux qui vont ailleurs sont libres du choix de culte, car chacun sait ce qu'il endure, ce qu'il attend de son église et qu'il n'obtient pas, et 15,45% soulignent que les sectes proposent des solutions plus adéquates que l'Eglise catholique. Que fait alors l'Eglise catholique face à une telle situation et qu'en est-il de ce qu'elle propose ?

3.4.2. La réaction de l'Eglise catholique

René Luneau (2002, p. 74) disait que « les évêques africains ont conscience du défi à relever. Ils comprennent que la demande de guérison est un enjeu-clé et que, " l'avenir du christianisme en Afrique pourrait bien se jouer sur cette question". » Pour ce faire, des synodes ont été organisés pour plancher sur la question.

Le Secrétariat pour l'unité des chrétiens, le Secrétariat pour les non-croyants et le Conseil pontifical pour la culture ont organisé un synode en 1985, pour réfléchir sur la présence et l'activité des NMR et autres " sectes". Des propositions ont été faites, en guise de réponses pastorales. Elles se déclinent en six points : 1) Développer le sens de la communauté, 2) Renforcer la formation des prêtres et la formation continue des laïcs, 3) Mener une approche personnelle et intégrale de la foi, 4) Travailler l'identité culturelle des Eglises locales (l'inculturation), 5) Revaloriser la prière et le culte en revoyant les modèles classiques de la liturgie, 6) Harmoniser le ministère des prêtres et celui des laïcs en donnant priorité à la promotion des ministères diversifiés. Le rapport souligne également que les orientations du synode sont une réponse aux besoins et aux aspirations que certains fidèles recherchent dans les nouveaux mouvements religieux.

En 1992, toujours pour répondre aux défis que les NMR posent aux Églises traditionnelles, le Comité permanent du Symposium des Conférences Episcopales d'Afrique et Madagascar (SCEAM) a tenté d'apporter des réponses lors de sa réunion. Entre autres propositions, il a été suggéré de créer une Église bien africaine sans tomber dans le syncrétisme, pour donner vie à une Église dans laquelle les Africains s'identifieront plus facilement et d'imaginer des cultes plus participatifs. Pour finir, l'accent était mis sur l'étude de la Bible et sur l'évangélisation des fidèles. Les revendications pour une Eglise typiquement africaine, l'un des atouts majeurs des NMR, vont être relayées par le Synode africain de 1994.

Au Bénin, avec l'accord du Vatican, en juillet 2007, l'Eglise catholique a désigné dans chacun des dix diocèses des prêtres exorcistes pour aider les fidèles à lutter contre "des attaques de sorciers ou de puissances maléfiques" (Cakpo, 2013). Depuis lors, il est facile de remarquer que sur nombre de paroisses sont organisées des messes de guérison à l'intention des malades ou des veillées d'évangélisation centrées sur la délivrance et la libération, sous la houlette des prêtres exorcistes. En outre, des communautés ecclésiales de base (CEB) et des groupes de prière charismatiques foisonnent12(*) sur des paroisses et initient des activités de grande envergure, comme des campagnes d'évangélisation, des pèlerinages, des sessions de formation, des retraites, des journées d'amitié, etc. Toutes les occasions sont opportunes pour les leaders de ces groupes ou mouvements d'évangéliser, de délivrer et d'intercéder pour ceux qui sont sous la domination des forces occultes.

Selon le prêtre (E2), cette autorisation de création de groupes de prière pour animer la vie des paroisses s'inscrit dans l'esprit du Concile Vatican II.

« C'est la réalisation de ce que le Concile Vatican II a anticipé. A savoir qu'il y a des besoins nouveaux dans le monde par rapport à l'Église, les besoins spirituels, sociaux, humains, économiques nouveaux du monde d'aujourd'hui par rapport au monde ancien. L'Église était restée figée dans le monde ancien et c'est ça qui a provoqué le Concile Vatican II. C'est d'adapter le langage de l'Église aux réalités et au langage du monde d'aujourd'hui. Plus on avance, plus le monde catholique commence à découvrir ces nouvelles opportunités données par le Concile Vatican II. Les fidèles commencent à les découvrir. Ce n'est pas seulement à cause des besoins, mais aussi c'est parce que l'Église a ouvert les portes nouvelles. »

Les portes ouvertes par l'Eglise catholique ont permis la naissance de l'un des tous premiers mouvements charismatiques, le Renouveau, en 1967 en Occident et au Bénin en 1977. Ce mouvement charismatique symbolisait à juste titre la réponse aux besoins des fidèles de plus en plus attirés par la vague de l'évangélisme et du pentecôtisme. Dans son sillage, d'autres groupes de prière charismatiques vont émerger en faisant éclore davantage au sein de l'Eglise catholique cette effervescence religieuse axée sur la recherche de guérison, de miracles, de réussite, etc. Il s'agit de Fiat, Communauté Emmanuel, Cité de l'Immaculée, Fifaton, Feu nouveau, Amis de saint Michel, Evangélisation pour tous, etc. Sur ce, le prêtre (E2) dira que

« On n'a plus besoin maintenant pour approfondir sa piété, approfondir sa communion en Jésus Christ et en Dieu, de créer une secte et de sortir de l'Église. Mais de faire comme saint François d'Assise, comme saint Dominique, comme saint Ignace de Loyola, de réformer l'Église de l'intérieur, d'approfondir sa relation à Dieu à l'intérieur de l'Église. Ce n'est pas en sortant de l'Église qu'on a plus de piété, plus d'amour pour Dieu, mais en restant, en creusant les trésors de l'Église laissés par Jésus Christ, qui sont infinis. C'est pourquoi je salue les initiatives spirituelles, communautaires, que prennent de plus en plus les fidèles pour pouvoir vivre leur foi en profondeur et leur piété comme il se doit par rapport à Dieu. Saint Paul avait déjà dit : "N'éteignez pas l'Esprit..." »

De l'avis du prêtre (E5), en paraphrasant le pape Paul VI, ces mouvements charismatiques constituent une chance pour l'Eglise,

« (...), car les groupes sont des indicateurs de vie et de vivacité de la religion... Ils répondent à un besoin de l'Eglise, qui va au-delà de la hiérarchie. Comme la plupart d'entre eux sont de l'ordre charismatique, c'est l'Esprit Saint qui souffle. Et selon le besoin du contexte, ces groupes naissent pour répondre à un besoin immédiat des fidèles. C'est important qu'ils s'expriment, qu'ils aient un lieu d'expression de leur foi... Mais l'Eglise n'admet pas de désordre. Même s'ils sont charismatiques, ils sont toujours suivis d'une certaine manière. Ils ne naissent pas comme des cheveux sur la tête. Les fidèles sont libres de créer, mais il y a une procédure. »

Les besoins que satisfont ces mouvements charismatiques sont en réalité le fondement des pratiques de religiosités de plus en plus nouvelles qui provoquent souvent l'évasion de certains fidèles catholiques vers les NMR. Mais depuis quelque temps, le dynamisme de ces mouvements charismatiques crée en marge de la liturgie officielle des pratiques qui apparaissent comme des réponses au défi des NMR engagés dans une forte concurrence vis-à-vis de l'Eglise catholique et d'autres institutions religieuses traditionnelles. C'est pourquoi Bastian (2008) dira que « La principale force religieuse sectaire, le pentecôtisme, ne se [trouve] plus seulement à l'extérieur, mais aussi à l'intérieur de l'institution [catholique]... » Cette force meut chaque jour les nouvelles pratiques religieuses comme une soif à étancher chez les catholiques.

En définitive, le marché de la religion semble favorable aux églises qui savent tenir compte des besoins exprimés par les populations en difficulté. Pour ne pas voir son hégémonie réduite à néant, à cause des départs de ses fidèles vers d'autres groupes religieux très dynamiques, l'Eglise catholique a su mesurer l'ampleur de la menace et a pu trouver la formule adéquate en promouvant de nouvelles pratiques religieuses et en admettant en son sein des mouvements religieux qui portent le courant pentecôtiste. A n'en point douter, ces pratiques religieuses attirent plusieurs fidèles catholiques ainsi que des croyants d'autres religions. Comment se présentent-elles concrètement, ces nouvelles pratiques religieuses à caractère populaire à côté de la foi catholique officielle ?

CHAPITRE 4 : LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES

Les nouvelles pratiques religieuses dites populaires qui s'observent dans l'Eglise Catholique Romaine sont influencées par les NMR et ne sont pas uniquement spécifiques à une couche sociale particulière. Selon les conditions et les situations de vie, elles peuvent prendre des formes diverses, allant des demandes individuelles aux pratiques communautaires, mobilisant des foules immenses. Après avoir inventorié ces demandes et ces pratiques, les implications que leur engouement suscite chez les fidèles ainsi que leurs influences sur la liturgie officielle seront mises en relief. Enfin une attention sera accordée à l'institutionnalisation des messes de guérison, des veillées d'adoration et d'évangélisation, puis à la montée des mouvements charismatiques catholiques, pionniers dans l'expansion des nouvelles pratiques religieuses à caractère populaire dans l'Eglise catholique.

3.1. Demandes individuelles diversifiées

La plupart des chrétiens aspirent à une vie heureuse, sans aucun embarras lié à un manque ou à une menace d'être invisible nuisible. L'insécurité ambiante qu'ils côtoient au quotidien les conduit, pour la plupart du temps, à se doter d'armures efficaces, lesquelles sont généralement des demandes de bénédiction, des prières de protection, de guérison, de délivrance, etc.

3.1.1. La bénédiction d'objets de piété, de maison, d'oratoire

Très souvent, les fidèles catholiques sollicitent de la part des prêtres à être bénis (39,09%) ou présentent des objets de piété à bénir à des fins d'utilisation personnelle (85,45%). Des croix, des médailles, des crucifix, des statuettes, des chapelets, des gravures ou photos de Jésus, de la Vierge Marie ou des saints, des foulards à l'effigie d'un saint, d'un évêque, du pape, etc. sont bénis (cf. Photo 1 ci-dessous). Ainsi acquièrent-ils une certaine puissance à même de procurer à leur détenteur une immunité efficace contre les maléfices de n'importe quelle nature. C'est pourquoi il est fréquent de voir des chrétiens catholiques portant à leur cou des croix, des médailles ou parfois même des chapelets en lieu et place de chaîne ou de collier.

Photo 2 : Planche : Objets de piété catholique

Source : Compilation d'images faite par CAPO, 2017

Certains fidèles font déplacer des prêtres pour qu'ils aillent bénir leur maison ou leur oratoire. Ce sont parfois des occasions de réunir la famille et de recevoir tous ensemble opportunément la bénédiction du prélat. Tous les coins de la maison sont aspergés d'eau bénite et de sel béni. Et l'homme de Dieu prononce les formules de bénédiction qui conviennent. Cela a pour effet de purifier la demeure de tout esprit malveillant, de protéger la maisonnée et de procurer à tous une santé spirituelle vivifiante. Mais une telle sollicitation n'est pas à la portée de tous les chrétiens : seuls quelques-uns arrivent à faire déplacer un prêtre pour la bénédiction de leur maison (28,18%) et de leur oratoire (6,36%).

La demande de bénédiction est un acte de foi mais qui ne réclame pas forcément au préalable l'adhésion à la religion catholique, puisqu'il y a parfois des croyants d'autres religions qui bénéficient de ces services ou prennent part à des séances de bénédiction, en pensant aux grâces qui, selon les témoignages, en découlent. C'est dans la même logique que l'usage des sacramentaux (sel béni, eau bénite, huile sainte, etc.) est à la portée de tout le monde, surtout pour leur efficacité. Ils sont 93,64% à en recourir en cas de nécessité.

La finalité de toutes ces demandes, selon les enquêtés, c'est de se protéger contre les forces maléfiques ou les attaques des sorciers, purifier son environnement, obtenir la guérison en situation de maladie, etc. Mais lorsque la souffrance persiste beaucoup de chrétiens demandent des prières de délivrance.

3.1.2. Les prières de délivrance, de guérison et de protection

Les sollicitations pour les prières de délivrance, de guérison ou de protection sont souvent adressées aux prêtres exorcistes. Dans l'archidiocèse de Cotonou, ce sont eux qui ont reçu la délégation du pouvoir d'exercer le ministère d'exorcisme de la part de l'archevêque. Officiellement, ils sont au nombre de trois : le père Pamphile Fanou de la paroisse Sainte Rita, le père Pio Hounyèmè de la paroisse Jésus Eucharistie et le père Gilles Nougbodohoué de la paroisse Sainte Marie Mère du Sauveur. Mais en face de la souffrance des fidèles ou de toute personne humaine, bien d'autres prêtres, sans autorisation préalable de l'évêque, pratiquent la prière de délivrance qui est un ministère similaire sur leur paroisse, parfois au coeur des messes de guérison.

L'absence du ministère d'exorcisme dans l'Eglise catholique avait occasionné plusieurs départs vers les NMR, comme en témoigne une jeune femme de 32 ans qui déclare :

« Avant, nous n'avions pas de prêtres pour nous aider quand on a des attaques de sorciers ou des puissances maléfiques. Maintenant que nous en avons la possibilité il est clair que partir ailleurs serait une perte de temps. »

En 2002, cette femme victime d'une paraplégie, s'était détournée de l'Eglise catholique pour "chercher ailleurs", mais a décidé de revenir vers elle cinq ans plus tard13(*), c'est-à-dire en 2007 où est née l'association des prêtres exorcistes du Bénin. Ce ministère d'exorcisme permet donc d'aider certains fidèles à se libérer des maléfices, de faciliter la réinsertion d'autres fidèles dans la communauté chrétienne afin de les amener à vivre pleinement leur foi en Dieu. Ils retrouvent la confiance en Dieu en voyant désormais en lui un Père qui pourvoit à leurs besoins. C'est une occasion qui leur est offerte pour se sentir en famille.

Ainsi les paroisses où se trouvent des prêtres exorcistes ou sur lesquelles se pratiquent l'exorcisme avec ou sans des messes de guérison sont souvent envahies par des personnes, catholiques ou non, en quête de solution à un problème rendant parfois la tâche difficile aux prêtres. De longues files d'attente s'observent. De nombreux malades espèrent tous être reçus par le prêtre, parfois seul. Or le ministère s'avère un travail très exigeant. Il faut que l'exorciste parvienne à identifier ce qui relève d'un problème purement humain et ce qui est spirituel afin de savoir comment venir à bout de la situation présentée par le fidèle. Car nombreux sont ceux qui se disent être possédés alors qu'en réalité leur mal est d'ordre psychique ou même imaginaire. A ce sujet, le prêtre (E4), exorciste, s'explique :

« J'écoute et je prie pour ceux qui viennent vers moi, l'entrevue peut durer plusieurs heures. Elle permet de distinguer entre la possession et l'imagination... Je leur montre que ce qui arrive peut être permis soit pour grandir dans la foi, soit pour soulager un autre dans l'épreuve. Je les amène à cheminer avec Dieu et à être attentifs aux signes, même les plus anodins ».

Donc le travail nécessite non seulement une disponibilité réelle mais aussi une disposition spirituelle afin de faire accepter aux fidèles la réalité de leur mal, qu'il convient parfois de considérer comme nécessaire pour grandir dans la foi. Pour ce faire, beaucoup repartent chez eux insatisfaits, la mort dans l'âme, car ils sont loin d'approuver un tel message : selon eux, Dieu est capable de les guérir et l'homme de Dieu est là pour intercéder pour eux. La déception amplifie la douleur et les fidèles n'hésitent pas à bouder les prêtres, en les traitant d'indisponibles pour les écouter ou d'incapables de les guérir.

En réalité, le problème qui se pose demeure plus celui de disponibilité que d'incapacité des prêtres. Alors certains trouvent la solution dans les prières de protection, des neuvaines, etc. qu'ils reçoivent parfois des prêtres et qu'ils récitent eux-mêmes. Ou bien, d'aucuns recourent aux responsables de groupes de prière charismatiques ou intègrent tout simplement ces mouvements à cause des charismes d'intercession qui leur sont reconnus tout en s'adonnant à d'autres pratiques religieuses.

3.2. Pratiques religieuses révélant le souci de s'épanouir

Les nouvelles pratiques religieuses se caractérisent par leur spécificité à évoluer en marge de la liturgie officielle de l'Eglise catholique. Comme le souligne le Directoire, « les pieux exercices du peuple chrétien, comme aussi les autres formes de dévotion, sont accueillis et recommandés, pourvu qu'ils ne se substituent pas et qu'ils ne se mélangent pas aux célébrations liturgiques ». Ce sont des expressions publiques ou privées de la piété chrétienne ou de diverses pratiques extérieures (prières, chants, visite de lieux particuliers, insignes, médailles, etc.), qui mettent un accent particulier sur la relation entre le fidèle et Dieu ou les saints. Elles visent l'obtention d'une réponse de la part de Dieu et, pour ce faire, varient d'un individu à un autre. Ici, l'attention sera portée sur le culte de Marie, des saints, la visite aux sanctuaires et le pèlerinage, compte tenu de l'importance que leur accordent les fidèles catholiques.

3.2.1. Les dévotions diverses : Marie et les saints

De par leur foi en Jésus et la compréhension qu'ils ont de la mission que Dieu a confiée à Marie, Mère de Jésus de Nazareth, les fidèles catholiques considèrent cette dernière non pas seulement comme la Mère de Jésus, mais aussi comme la Mère de tous les hommes. De ce fait, en sa qualité de celle qui est comblée de grâce, elle est en mesure d'obtenir de Dieu et de Jésus l'exaucement des demandes formulées. Voilà pourquoi les catholiques recourent à Marie dans leurs difficultés en lui vouant un culte très particulier. De toutes les dévotions, celle liée à Marie est de loin celle qui est plus prisée par de nombreux fidèles. Ils sont donc 67 sur les 110 enquêtés, soit 60,91%, à pratiquer le plus cette dévotion dans le but de se libérer des soucis, de se protéger contre les forces du mal, d'avoir la paix intérieure, d'obtenir la solution appropriée à toute situation pénible traversée, etc. Tout cela explique les attroupements qu'on observe dans les Eglises catholiques devant les statues de la Vierge Marie, les bougies allumées, les intentions écrites déposées dans la boîte à lettres au pied des statues de Marie, les méditations de chapelet ou du rosaire faites à longueur de journée, etc. (cf. Photo 2 ci-dessous).

Photo 3 : Recueillement devant une statue de la vierge Marie

Source : Cliché CAPO, 2017

Tellement les catholiques s'accrochent à ce culte qu'il est parfois difficile de distinguer ce qui est une démarche de foi de ce qui est une démarche humaine voire une émanation d'anciennes pratiques traditionnelles de la religion vodoun. C'est aussi l'une des raisons pour lesquelles les NMR ont de la peine à faire la différence entre vénération et adoration en matière du culte de Marie, tout comme celui des saints.

La quête de solution amène aussi les fidèles à tourner leur regard vers les saints de leur église. Peloux et Pian (2010, p. 37) écrivent que : « le culte des saints est une pratique très répandue qui passe par des gestes concrets qui peuvent prendre des apparences de superstition. Ils sont parfois jugés sévèrement du point de vue de la "foi officielle". Mais, quand on prend au sérieux la démarche des personnes ... on se rend compte de la foi qui les anime ». En effet, il n'est pas rare de voir des chrétiens s'accrocher à la statue d'un saint, en la touchant, en l'embrassant, en se cognant la tête contre elle, en couvrant de baisers ses pieds, en multipliant des signes de croix, en faisant des offrandes, en murmurant des prières instantes, parfois en coulant des larmes, etc. Et l'audience varie d'un saint à un autre selon qu'il est spécialiste d'une cause avérée. Selon le martyrologe romain, Sainte Rita est reconnue pour les causes désespérées qu'elle résout (cf. photo 3 ci-dessous), la Sainte Vierge Marie défait les noeuds quelle que soit leur complication, saint Antoine de Padoue permet de retrouver les objets perdus, saint Camille est invoqué pour recouvrer la santé, etc.

Photo 4 : Recueillement devant une statue de Sainte Rita

Source : Cliché CAPO, 2017

Une telle attitude, de l'avis des fidèles enquêtés ou observés, s'inscrit dans une dynamique de parvenir à gagner les faveurs du saint. Aussi convient-il de souligner que les fidèles catholiques, au coeur de certains contextes difficiles de leur vie, ne s'adressent plus directement à Dieu. Ils ne se sentent pas dignes de le faire, mais préfèrent passer par le truchement des saints comme intermédiaires fort bien efficaces à même de rallier à leur cause Dieu. Ainsi 30 enquêtés sur 110, soit 27,27%, pratiquent fréquemment ce culte. Néanmoins l'Église met en garde ses fidèles contre l'exagération de telles pratiques en veillant à ce que ne soient pas vénérées des images indignes, ou qui les inciteraient à s'adonner à des pratiques superstitieuses : « Nous imitions leur exemple pour suivre le Seigneur et parvenir à la plénitude de l'homme parfait, qu'est le Christ » (Directoire n°244).

Ces deux dévotions et bien d'autres encore prennent surtout d'ampleur quand les fidèles se rendent à un pèlerinage ou visitent un sanctuaire.

3.2.2. Le pèlerinage et la visite aux sanctuaires

Selon le dictionnaire Robert, le pèlerinage est un voyage, individuel ou collectif, fait à un lieu saint pour des motifs religieux et dans un esprit de dévotion. C'est dire donc que cette pratique religieuse est inséparable d'un sanctuaire (église par exemple ou tout autre lieu sacré) et est entreprise dans un souci dévotionnel mais elle a des motifs bien personnels qui peuvent être : trouver des réponses à des questions vitales, des solutions à des problèmes particuliers, faire la rencontre de Dieu, etc.

De plus en plus, les nouvelles pratiques religieuses de masse rendent plus vivace la propension à participer aux pèlerinages parmi les fidèles. Car pour les fidèles catholiques, « les sanctuaires sont souvent, à cause de leur origine, la mémoire d'un événement considéré par eux comme extraordinaire, et qui a provoqué l'émergence de manifestations de dévotion durable, ou des témoignages de piété et de reconnaissance de tout un peuple pour les grâces reçues en ce lieu. » (Directoire n°263). Ainsi les sanctuaires d'Allada, de Dassa, la paroisse de Maria-Tokpa à Porto-Novo sont devenus des lieux de pèlerinage pour les catholiques de Cotonou comme ceux du Bénin tout entier. Chacun se rend en ces lieux à cause des nombreux signes miraculeux qui s'y sont produits et qui témoignent de la proximité de Dieu et de sa miséricorde. Ces sanctuaires sont devenus pour les fidèles comme des lieux privilégiés où Dieu vient en aide aux hommes, et où se manifeste l'intercession de Marie ou des saints.

Durant ces pèlerinages, les prières des pèlerins s'adressent très souvent à Marie, aux Anges et aux Saints, qu'ils considèrent comme des intercesseurs auprès de Dieu. Ce sont souvent des prières de supplications dans les besoins, des prières exprimant la douleur de celui qui est affligé, des prières de jubilation et de remerciements de la part de celui qui a obtenu grâces et miséricorde. Et ils assistent aussi à des célébrations de l'Eucharistie, c'est-à-dire des messes. A la fin, chacun retourne chez lui le coeur soulagé, déchargé, rempli d'espoir.

3.3. Quand la liturgie officielle fait une place aux nouvelles pratiques religieuses

La messe est le lieu de rassemblement par excellence des catholiques. Ils y refont le geste que Jésus leur a demandé de faire en mémoire de lui, dans le partage du pain et du vin dans lesquels, selon la foi catholique, son corps et son sang sont donnés. Son déroulement officiel sera présenté et la manière dont elle est vécue par les fidèles sera analysée, selon qu'elle est célébrée ordinairement ou qu'elle est dite dans une logique de pratiques de religiosité populaire.

3.3.1. Le déroulement de la messe catholique

La messe catholique est célébrée chaque jour, partout dans le monde, mais les fidèles sont invités à y participer chaque dimanche, en mémoire du jour de la résurrection de Jésus. Seuls les prêtres et les évêques peuvent la célébrer. Elle crée un lien d'unité entre les fidèles qui sont présents et ceux du monde entier. Deux grandes parties constituent l'ossature de la messe : la liturgie de la Parole et la liturgie eucharistique, c'est-à-dire un temps d'écoute de la Parole de Dieu (lecture des textes tirés de la Bible) et un temps de bénédiction et de partage de la communion.

3.3.1.1. La liturgie de la parole

En franchissant le seuil d'une église, les catholiques font de la main droite le signe de croix. Souvent un chant d'entrée ouvre la célébration. Puis les fidèles sont invités à se reconnaître humblement pécheurs et à accueillir le pardon de Dieu. Le dimanche, est introduit ici le chant de louange du Gloria ou Gloire à Dieu, dans lequel les fidèles reconnaissent la grandeur de Dieu. Une Prière d'ouverture rassemble alors la prière des fidèles, appelant sur eux la grâce de Dieu pour la disponibilité au mystère qu'ils célèbrent. Les textes sont lus par les laïcs et le prêtre (ou le diacre). Celui-ci, dans une homélie, met en relation les textes des Écritures avec la vie quotidienne des fidèles, l'enseignement de l'Église ou le sens de la célébration en cours (mariage ou autre). Il exhorte le peuple en lui faisant voir les merveilles que Dieu lui destine et l'invite à demeurer fidèle à Dieu. La profession de foi (ou le credo) suit, surtout le dimanche et les jours de fête, et signifie l'adhésion des fidèles à la parole de Dieu et à sa présence. La prière universelle vient clore cette partie : les fidèles partagent leurs intentions de prière, celles de l'Église et du monde.

3.3.1.2. La liturgie de l'eucharistie

La seconde partie porte sur les offrandes. Les fidèles sont invités à faire leurs dons (quête) en signe de l'offrande de leur vie, de leur participation à l'offrande du pain et du vin. L'offertoire se conclut par une prière sur les offrandes. Ensuite, dans une longue prière, le célébrant fait mémoire de la Cène, le dernier repas de Jésus, et prie Dieu de faire reposer sur l'assemblée et sur les dons (le pain et le vin) son Esprit, pour qu'ils deviennent corps et sang du Christ. Dès cet instant, les prières montent : les fidèles multiplient les intentions adressées à Jésus afin d'être exaucés. Au terme de ces prières, on récite le Notre Père et les fidèles, sur l'invitation du prêtre, se donnent la paix, en se serrant la main. Vient après le moment d'aller communier. Seuls doivent se lever les fidèles qui sont dans une disposition adaptée, c'est-à-dire avoir fait sa «première communion», ne pas avoir conscience de péchés graves, ne pas afficher ouvertement et publiquement un désaccord avec l'enseignement de l'Église catholique. La messe prend fin avec l'envoi où le célébrant conclut la prière et envoie l'assemblée partager et répandre la Bonne Nouvelle qu'elle vient de célébrer.

Quelle conception les fidèles se font de la messe et comment la vivent-ils ordinairement ?

3.3.2. La Messe ordinaire ou dominicale : une exigence sacramentelle

Les fidèles catholiques conçoivent l'assiduité à la messe dominicale comme une exigence sacramentelle. Car tout baptisé est tenu de prendre part à cette célébration eucharistique comme le recommande le troisième commandement : « Tu sanctifieras le jour du Seigneur ». C'est ainsi que 90% des enquêtés déclarent être à la messe tous les dimanches. Pour eux, elle est obligatoire d'autant plus que nul ne peut être chrétien tout seul en restant chez soi. La nécessité de faire Église exige donc des fidèles qu'ils se réunissent au moins une fois par semaine. C'est une occasion qu'ils ont pour nourrir leur foi et se familiariser. En effet, ils prient ensemble, écoutent les lectures et l'homélie qui les éclairent sur la Parole de Dieu et la manière de la vivre au quotidien.

Dans l'imaginaire de plusieurs chrétiens catholiques, représentés par 71,82% des enquêtés, la messe dominicale telle que présentée plus haut est une occasion d'adoration de Dieu, de reconnaissance de sa souveraineté. Seuls 15,45% des enquêtés estiment que la messe dominicale leur permet de se protéger contre les forces maléfiques et 10,91% recherchent à travers la messe la paix intérieure. Donc la grande masse vient rendre un culte à Dieu, mais comment ? Nos multiples observations nous permettent de souligner que, de plus en plus, les messes sont vécues comme une routinisation qui ne dit pas son nom. Sur ce, le prêtre (E2) affirme que :

« Les messes du matin et du soir où l'Église donne les textes bibliques et l'explique pour la nourriture du fidèle, combien viennent à ces messes ? La plupart ne viennent pas. C'est le dimanche qu'on les trouve. Et même le dimanche, combien vivent réellement la messe ? Ils ont le coeur dans leurs affaires, ils ont la tête dans leurs affaires. On se lève à tout instant durant la messe. On parle, on dort... Combien reçoivent vraiment la Parole de Dieu le dimanche pour en vivre dans la semaine ? L'attention à accorder à la Parole de Dieu, voilà le problème de l'Église catholique. »

On note une certaine banalisation de la messe qui n'est plus trop perçue ni vécue comme une occasion où Dieu est censé venir à la rencontre de son peuple, selon la doctrine catholique, pour lui communiquer sa vie, donc le délivrer de ses lourdes charges, de ses problèmes existentiels. Voilà pourquoi, certaines célébrations eucharistiques sont vides, les chrétiens étant à leurs affaires : services, marché, etc. ou les fidèles, bien que présents à la messe, semblent remplir une formalité. Mais quand il s'agit d'une messe de guérison ou de délivrance, l'attitude paraît autre.

3.3.3. La Messe ouverte aux nouvelles pratiques religieuses : une nécessité du moment

La soif du merveilleux influence nombre de chrétiens catholiques dans leur manière de vivre leur foi à cause des soucis de délivrance, de prospérité, d'épanouissement, etc. qu'ils portent. Cela justifie les choix qu'ils opèrent parmi les diverses pratiques religieuses qu'offrent leur religion ou les NMR, au point que certaines options, très peu recommandables qu'ils font comme la course aux miracles, mettent souvent en doute la crédibilité de leur foi. C'est ce qui explique parfois la désertion des églises certains jours de messe, alors qu'au moment des messes de guérison ou des prières de Jéricho, les églises sont remplies. Le berger (R2) explique la situation :

« Vous allez constater que quand il y a Jéricho ou prière de guérison quelque part, la foule est tellement immense que l'Église se remplit. Si l'Église se remplissait à un tiers avant, quand il y a Jéricho ou prière de guérison, elle se remplit à plus de dix tiers, c'est-à-dire dix fois plus, à telle enseigne qu'il n'y plus de place pour passer : la cour, les alentours, tout cela est envahi. Qu'est-ce qu'ils cherchent ceux-là ? - Le merveilleux. Ils n'ont pas la foi. La foi n'existe pas en eux...Ils viennent remplir l'Église. On fait les sept jours de prière. Il y en a qui sont guéris et d'autres non. Or le Seigneur guérit tout le monde. Mais les prédicateurs qui font des révélations ne peuvent pas révéler les signes opérés par Dieu dans la vie de tout le monde... »

Photo 5 : Prière des fidèles au cours d'un Jéricho

Source : Cliché CAPO, 2017

Il ressort que l'attachement à certains principes de l'Eglise tombe en désuétude parce que les fidèles font plus preuve d'un intérêt personnel selon qu'ils recherchent un avantage particulier. Alors les services de l'Eglise sont asservis pour des buts bien précis, détournés de leurs objectifs premiers. Par exemple, la messe dominicale est desservie au profit des messes de guérison auxquelles assistent 91,82% des enquêtés ; cela est dû au fait qu'ils sont convaincus que les messes ordinaires ne sont pas destinées à produire des miracles contrairement aux prières de Jéricho ou prières de délivrance. En effet, tandis que 15,45% des enquêtés vont à la messe dominicale pour trouver la protection de Dieu, 53,64% pensent qu'on peut l'obtenir en assistant aux messes de guérison ou au Jéricho. Et variablement, il existe d'autres motivations qui poussent les fidèles catholiques à aimer ou à accorder plus d'importance à ces messes : 84,54% recherchent la guérison ou la délivrance, 62,73% attendent des miracles, et 40% espèrent que Dieu leur procure la prospérité.

Il est à noter par là que ces soifs que la liturgie officielle ne satisfait pas totalement rappellent que la doctrine catholique s'inscrit dans une sorte de rigidité contre l'actualité, contre la tendance du moment aux fins de préserver son identité dans la tempête pentecôtiste qui souffle sur le monde. Néanmoins, comme le savent plusieurs autorités ecclésiastiques, les nouvelles pratiques religieuses populaires suggèrent implicitement de revoir les modèles classiques de la liturgie du samedi soir (pour la messe anticipée) et du dimanche (pour la messe dominicale), qui demeurent souvent étrangers à la situation de la vie quotidienne. A ce sujet, le cardinal Danneels (2008, p. 8) paraît encore explicite lorsqu'il signale un enrichissement possible de la liturgie par les nouvelles pratiques de religiosité populaire : « La religion populaire est naturellement proche de la vie. Elle n'a pas à être "rapprochée de la vie" comme c'est le cas de la liturgie, dite "savante". Elle imprègne la vie même, le coeur et le sentiment, les mains et les pieds... Elle résout le problème en refusant de s'engouffrer dans une liturgie ennuyeuse, rugueuse ou "épurée"... »

Alors, le décalage qui se dégage entre l'offre de l'Eglise catholique et la demande des fidèles fait peu ou prou l'objet d'attention particulière des évêques et des prêtres qui tentent à leur manière de concilier les nouvelles pratiques religieuses et la liturgie. Le souci est d'adapter la liturgie officielle aux circonstances de la vie de sorte que les célébrations comblent les attentes des fidèles. A cet effet, le Directoire (n°58) précise que « La liturgie et la piété populaire sont deux expressions authentiques, quoique non équivalentes, du culte chrétien. De fait, la Constitution sur la sainte Liturgie montre bien qu'au lieu de vouloir les opposer ou de considérer qu'ils sont deux éléments interchangeables, il convient plutôt de les harmoniser... La piété populaire, avec ses valeurs symboliques et expressives, est en mesure d'aider la Liturgie à réussir son travail d'inculturation, et elle peut aussi lui procurer des éléments stimulants en vue d'accroître d'une manière efficace son dynamisme et sa créativité. »

Ces mesures vont favoriser, dans l'esprit du Concile Vatican II, d'une part l'institutionnalisation des messes de guérison, des veillées d'évangélisation et d'autre part la promotion des mouvements charismatiques catholiques.

3.4. Messe de guérison et Mouvements charismatiques catholiques

Il n'est plus à démontrer que le peuple a soif de signes merveilleux, de miracles, de guérison, de prospérité pour se sentir à l'abri de l'insécurité spirituelle. La nécessité de valoriser et de pratiquer le ministère de la guérison s'impose donc dans l'Église. C'est la réponse à une telle urgence qui a amené les autorités à instituer sur des paroisses des messes de guérison et des prières de Jéricho, des veillées d'évangélisation et à donner aux mouvements charismatiques l'approbation de s'installer et d'animer la vie paroissiale.

3.4.1. La messe de guérison et les veillées d'évangélisation

Les aspirations des fidèles catholiques recensées font état de plusieurs manquements qu'ils souhaiteraient voir régler par leur Eglise. Entre autres, nous pouvons signaler : la disponibilité de beaucoup de prêtres (surtout de prêtres exorcistes) pour les écouter et les assister tant spirituellement que matériellement, l'organisation des études bibliques pouvant les aider à mieux comprendre la parole de Dieu, la formation des fidèles en vue de mieux vivre leur foi et de ne plus chercher des solutions hors de l'Eglise, la solidarité, etc.

Face à toutes ces préoccupations, les autorités de l'Eglise ne sont pas restées sans initiatives. Seulement, il y a des pesanteurs qui annihilent parfois certaines mesures. Le nombre pléthorique que font les catholiques rend difficile la disponibilité des prêtres pour recevoir et écouter chaque fidèle. Dans cette optique, pour contourner les longues files d'attente de ceux qui cherchent à voir coûte que coûte le prêtre pour une bénédiction ou pour une prière, la coutume s'est établie sur les paroisses de Cotonou de célébrer des messes de guérison et de délivrance, qui mobilisent beaucoup de fidèles comme le montre la photo 5. Ladite image présente d'une part l'intérieur d'une église rempli de fidèles et d'autre part sa façade occupée par ceux qui n'ont trouvé au cours d'une messe de guérison.

Photo 6 : Planche : L'intérieur et la façade de la paroisse Sainte Rita envahis par des fidèles au cours de la messe de guérison

Source : Cliché CAPO, 2017

Ces messes se déroulent dans la journée, le plus souvent, entre 12h45 ou 13h et 14h30, et les jours varient d'une paroisse à une autre. Mais beaucoup choisissent le vendredi en référence au jour de la passion de Jésus Christ. Comme il a été dit plus haut, bien que ces messes suivent la liturgie habituelle, elles sont fusionnées avec les nouvelles pratiques religieuses. En effet, au cours des célébrations, que le prêtre soit exorciste ou non, le peuple de Dieu réuni fait le chemin de croix, loue longuement Dieu, chante et danse, les textes bibliques sont lus, suivis de l'homélie du prêtre célébrant, de la procession du Saint Sacrement et d'intenses prières d'intercession, qui sont assurées soit par le prêtre, soit par un laïc d'un mouvement charismatique. Au grand bonheur des fidèles, des signes se réalisent : transe, délivrance des cas de possession, guérison d'une quelconque infirmité, etc. Ensuite le prêtre procède à la bénédiction de la foule (hommes, femmes, enfants) et des objets de piété (eau, huile, sel, médailles, chapelets, crucifix, images, etc.).

Photo 7 : L'intérieur de l'église au cours de la messe de guérison

Source : Cliché CAPO, 2017

Il y a aussi des veillées d'adoration et d'évangélisation qui se déroulent une fois par mois et ce, le premier vendredi de chaque mois jusqu'à l'aube du samedi. Au cours de ces veillées, le programme prévoit souvent des enseignements, des louanges, des prières et la messe. L'opportunité est offerte aux fidèles de poser des questions sur la thématique de l'enseignement reçu. Cela fonctionne comme si les autorités tentent de répondre aux critiques des NMR à l'endroit de l'Eglise catholique selon lesquelles elle cache aux fidèles des "choses". Alors les prêtres insistent que des questions soient posées de sorte que progressivement nul ne soit ignorant sur un aspect de la doctrine catholique ni sur la Bible. Tous reconnaissent que le temps d'une homélie pendant les messes du dimanche ne suffit pas pour régler certaines grandes questions.

En somme, ces dispositions répondent un tant soit peu aux préoccupations des fidèles qui, au coeur de la tourmente existentielle, n'hésitent pas à exploiter la diversité des recours que leur offre le monde d'aujourd'hui et beaucoup sont satisfaits. Néanmoins, des cas marginaux existent toujours ; ils sont souvent gérés par des groupes de prières ou mouvements charismatiques.

3.4.2. Les mouvements de prière charismatiques

3.4.2.1. Un aperçu sur les mouvements charismatiques paroissiaux

La vie paroissiale dans l'Eglise catholique est animée par des groupes, associations, mouvements et communautés aux multiples fonctions, étant entendu qu'être catholique c'est être membre d'une famille. Au sein donc de cette famille, il est conseillé qu'en fonction de ses aspirations, chacun puisse intégrer un groupe pour vivre et approfondir sa foi, se sentir en famille, partager ses expériences avec les autres chrétiens, dénommés frères ou soeurs, comme les premiers chrétiens aux lendemains de la pentecôte. C'est ainsi que 70% des enquêtés sont membres d'un groupe et 30% sont sans appartenance. Selon la spiritualité reconnue à chaque groupe ou association, quatre catégories se sont dégagés d'après notre enquête : groupe de service (11,82%), groupe d'action catholique (9,09%), groupe de prière (15,45%) et groupe de prière charismatique (33,64%).

Les groupes ou mouvements charismatiques enregistrent plus d'adhésions que les autres groupes. Cette prédilection dont ils jouissent de la part de la population (catholique et autre) découle des charismes qui leur sont reconnus. Les promesses qui ont été faites par Jésus à ses apôtres et à ceux qui auront cru en sa parole ne sont pas inhérentes seulement à une frange de croyants, mais à tous. Ainsi ces mouvements font l'expérience de l'exercice des charismes de guérison, de miracles, promeuvent l'esprit de groupe, de solidarité, de fraternité et cultivent des valeurs qui leur permettent de répondre aux questions quotidiennes des hommes et des femmes.

3.4.2.2. Les caractéristiques des mouvements charismatiques

Les mouvements charismatiques tentent de renouveler l'Église catholique, mais ne sont guère désireux de faire scission, de fonder de nouvelles structures ecclésiales et demeurent fidèles à l'Église. Leurs membres sont caractérisés par une assiduité à la messe et reçoivent les sacrements, puis ils encouragent les membres qui ne sont pas en règle vis-à-vis de l'Eglise à régulariser leur situation (mariage, réadmission aux sacrements). Ce sont en général des membres actifs des communautés paroissiales qui oeuvrent au sein du diocèse et qui sont très impliqués dans la participation active à la vie de leurs paroisses. Ils se réunissent fréquemment de façon hebdomadaire pour les prières, les séances de formation et d'étude biblique, etc. Ils pratiquent une lecture assidue et méditative de la Bible, sont particulièrement attachés à certaines dévotions comme l'Adoration du Saint Sacrement et la prière mariale, etc. Ces mouvements, sur chaque paroisse, sont dirigés par un premier responsable parfois appelé berger et un noyau qui l'entoure dont les membres sont élus. Sur le plan national, on note la même structure : le noyau ou le bureau est composé de membres en provenance des paroisses. Les prêtres ne sont pas membres, mais ils participent parfois aux activités de ces groupes, soit en qualité de formateur, de confesseur, soit pour célébrer l'Eucharistie, au cours d'une réunion ou d'une retraite.

Le déroulement d'une réunion charismatique diffère selon les groupes, mais les moments essentiels, centraux sont les mêmes. Elle peut commencer par la prière de louange initiée par un membre du bureau ou autre et reprise par les membres. Une ou plusieurs lectures bibliques ponctuent la réunion qui aboutit fréquemment à une prière d'intercession. Nonobstant ces éléments fondateurs communs qui constituent comme le canevas des réunions, la caractéristique essentielle de la prière charismatique est sa spontanéité. On intervient quand on le désire, on se sert des paroles de la vie quotidienne, on recourt à des passages bibliques selon son inspiration et son discernement. En plus de la louange et la lecture ou la récitation des textes bibliques, l'assemblée de prière charismatique donne une large place aux dons de l'Esprit Saint qui constituent les signes distinctifs de leur pratique religieuse. Inspirés par l'exemple des apôtres, de nombreux participants de l'assemblée charismatique s'expriment dans des langues qui ne font partie d'aucune de celles connues. La glossolalie ou le don des langues vise l'édification de la communauté. Mais le plus souvent le défaut d'interprétation de ces paroles constitue le point de désaccord entre certains prêtres et les responsables des mouvements charismatiques, parce que cela les assimile aux groupes évangéliques et pentecôtistes.

En substance leur mission consiste à aider à la dévotion à l'Esprit Saint, diffuser la doctrine catholique pour son approfondissement chez les fidèles et le renforcement de la foi, ranimer la ferveur catholique, contrecarrer par la sensibilisation les influences des NMR et des mouvements ésotériques sur les fidèles catholiques, encourager à vivre véritablement la messe au quotidien si possible, inviter les fidèles à la pénitence et au sacrement de réconciliation, encourager les fidèles à utiliser les sacramentaux pour se libérer des pratiques occultes, redonner de nouvelles valeurs à la jeunesse et la sensibiliser contre le vent libertaire qui souffle sur elle, aider les catholiques à ne plus avoir honte de porter leur croix, les médailles, etc. Ces différents objectifs visés s'expriment concrètement à travers diverses activités qu'ils mènent sur les paroisses.

3.4.2.3. Les activités des mouvements charismatiques

Toutes les activités des groupes de prière charismatiques ont pour finalité l'épanouissement tant physique que spirituel du fidèle et de toute autre personne.

- Assemblées de prière

Les mouvements charismatiques sont reconnus pour la fréquence de leur prière en communauté chaque semaine. Ils intercèdent pour eux-mêmes, pour l'Eglise, pour les autorités, pour le monde entier. Souvent les assemblées de prière sont des occasions de l'expérimentation de la miséricorde de Dieu car des signes14(*) se réalisent au sein du peuple : il arrive que des délivrances s'opèrent, des malades guérissent, etc.

- Prière de délivrance

L'un des problèmes majeurs de beaucoup de chrétiens catholiques, c'est la lutte contre les mauvais esprits, les attaques des sorciers, la possession démoniaque, etc. A défaut de trouver un prêtre exorciste, ils sollicitent les groupes de prière charismatiques. C'est ainsi que des séances de prière de délivrance sont organisées par les membres avisés de ces groupes. Et beaucoup de fidèles font l'expérience de la délivrance : ils obtiennent le soulagement de leurs maux physiques et spirituels, parfois de façon spectaculaire.

- Ecoute et Accompagnement spirituel

Lorsque les fidèles n'arrivent pas à rencontrer un prêtre pour lui exposer leurs problèmes, ils s'adressent aux responsables des groupes de prière charismatiques. Ceux-ci les écoutent attentivement, prient avec eux en leur montrant quelques astuces de prière pour mener le combat contre le mal. Mais si le mal nécessite plus de temps et de persévérance dans la prière, un accompagnement spirituel se déclenche et l'accompagnateur et l'accompagné passent plus de temps à prier sur une longue période jusqu'à ce que l'objectif visé ne soit atteint ou le résultat attendu ne soit obtenu. De tels services rendus aux fidèles en difficulté renforcent leur croissance spirituelle, leur sanctification et aussi leur réussite au plan socio-économique.

- Campagne d'évangélisation et Jéricho

Parfois en accord avec le curé de leur paroisse, ou selon leur programme d'activités annuel, les groupes charismatiques organisent des campagnes d'évangélisation, soit sur une paroisse, soit sur une place publique du quartier, soit encore au stade de l'Amitié. Ces campagnes drainent du monde. Il en est de même pour les Jéricho. Les populations viennent certes prier, mais surtout elles espèrent un miracle de Dieu, une guérison, etc.

- Enseignements

A travers des retraites spirituelles15(*), des récollections ou des sessions de formation, les mouvements charismatiques proposent aux fidèles des cheminements qui les aident à approfondir leur foi à travers des enseignements thématiques bien ciblés. Par leur biais, beaucoup de chrétiens redécouvrent mieux la vérité biblique et la doctrine de l'Eglise catholique ; ce qui amène certains chrétiens à changer de vie et d'autres à prendre conscience de leur égarement et à revenir à la foi catholique.

- Solidarité et assistance matérielle

Le manque de soutien matériel ou de solidarité, au coeur des difficultés de la vie, avait poussé nombre de catholiques à quitter l'Eglise. Alors les initiatives des mouvements charismatiques consistent à assister les malades, à faire des dons aux nécessiteux de sorte que nul ne se sente seul et abandonné. A travers les relations qui s'établissent entre différents groupes, ils tentent de s'entraider dans la lutte contre le chômage.

3.4.2.4. Quelques exemples de mouvements charismatiques

Il existe plusieurs groupes ou mouvements de prière charismatiques au sein de l'Eglise catholique. En réalité, ce sont eux les pionniers des nouvelles pratiques religieuses. Il s'agit entre autres de: Renouveau charismatique catholique, Fiat, Cité de l'Immaculée dite Awadjidjè kèdè, Fifaton, Communauté Emmanuel, Feu nouveau, Amis de saint Michel, Communauté Catholique Marie Mère de la foi audacieuse, Evangélisation pour tous, Communauté Saint Augustin, etc.

On les retrouve sur les paroisses de Cotonou, voire du Bénin. Mais leur répartition n'est pas égalitaire d'une paroisse à une autre. Leur présence dépend plutôt du besoin exprimé par les paroissiens, du désir d'expansion du mouvement de la part des responsables ou de l'existence d'anciens membres en nombre sans cesse croissant. Même si chaque groupe paroissial jouit d'une certaine autonomie, les activités de masse s'organisent en synergie pour plus d'efficacité et de résultats. De même les responsables au sommet essaient d'avoir un oeil sur l'évolution de chaque groupe paroissial afin d'apporter des appuis techniques si cela s'avère nécessaire et de prévenir aussi les éventuels dérapages. Car ils sont eux aussi sous la supervision des autorités ecclésiastiques.

Somme toute, les aspirations des fidèles sont énormes et, selon leurs différentes expériences, l'instance de la messe dominicale seule ne suffit pas pour qu'ils obtiennent satisfaction. Cette situation suscite plusieurs pratiques religieuses qui évoluent en marge de la liturgie officielle, mais acceptées par les autorités de l'Eglise catholique. Leur prégnance légitime progressivement la place qui leur est faite dans certaines célébrations eucharistiques, consacrées à la guérison ou à la délivrance. L'indisponibilité en nombre suffisant de prêtres, surtout exorcistes, laisse une marge de manoeuvre aux mouvements charismatiques qui naissent pour accompagner l'Eglise catholique dans sa mission. Leur feuille de route montre qu'ils constituent une réponse à l'affaiblissement d'intensité de la vie religieuse et qu'ils permettent à l'Eglise catholique de se défendre autant que faire se peut contre l'attrait des NMR et des ordres ésotériques. Ceci permet d'entrevoir les différents enjeux qui peuvent sous-tendre les nouvelles pratiques religieuses.

CHAPITRE 5 : QUAND LES ENJEUX DETERMINENTLES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE

La survie dans le champ religieux tient à la capacité d'innovation des groupes religieux dans l'optique de satisfaire les demandes exprimées ou les attentes des fidèles. A cet effet, ils s'inscrivent dans une démarche de concurrence. Cependant certains prêtres nient l'idée de concurrence dans laquelle se serait engagée l'Eglise catholique et la situent plutôt au niveau des NMR qui seraient déterminés à conquérir plus de monde. Or telle n'est pas la position des évêques, car ils se sentent très interpellés par la situation depuis des décennies. C'est pour cela qu'au synode africain de 1994, ils avaient planché avec lucidité sur la question de l'exode des catholiques vers les groupes religieux. « Si aujourd'hui on constate une grande affluence vers les nouveaux mouvements religieux de tous bords ou vers les Églises africaines indépendantes, cela tient en partie au fait que les gens se sentent mieux pris au sérieux jusque dans leur dimension thérapeutique dans ces Églises et nouveaux mouvements religieux. Il n'y a rien de plus évident dans les Évangiles que le ministère de Jésus comme "guérisseur ". Il a guéri les malades et à travers ces guérisons, il a manifesté l'avènement du Règne de Dieu. En outre, la mission qu'il confie à ses disciples, selon Saint Luc, est de "proclamer le Royaume de Dieu et faire des guérisons" (Lc 9, 2). » (Sabuni Kitutu, 2011, p. 239)

Cette prise de conscience montre combien, en Afrique, l'Eglise catholique est soucieuse de sa position dans le marché de la religion et prend, en conséquence, des initiatives pour répondre aux aspirations de ses fidèles. Quels sont alors les enjeux que recèlent les nouvelles pratiques religieuses observables dans l'Eglise catholique à Cotonou ?

4.1. Nouvelles pratiques religieuses comme stratégie de freiner l'exode des fidèles

L'enjeu des nouvelles pratiques religieuses consiste à soulager les fidèles souffrants, les délivrer de toute emprise d'esprits maléfiques et les aider à mieux vivre leur foi afin de ralentir leur exode vers les NMR.

4.1.1. Soulager la souffrance des fidèles

Les nouvelles pratiques religieuses répondent à un besoin fondamental des fidèles : soulager leur souffrance. De ce fait, elles s'imposent comme une nécessité et tant que la douleur ne trouve pas de solution adéquate les personnes souffrantes continuent de multiplier les recours. C'est ainsi que parmi les enquêtés, il y a plusieurs personnes qui recourent aux prêtres avec ou sans charisme d'exorcisme, aux responsables des groupes de prière charismatiques et certains sortent même du cadre de l'Eglise catholique pour consulter des pasteurs, des guérisseurs ou des maîtres spirituels. Ce qui rejoint l'inquiétude du nouvel archevêque de Cotonou, Monseigneur Roger Houngbédji qui dit que « lors du [dernier synode diocésain de Cotonou (1975-2015)], il est apparu que, malgré la grande vitalité de notre Église, qui se manifeste par le nombre important de baptêmes et de vocations, le manque d'approfondissement de la foi demeure. Le syncrétisme religieux est très prononcé. Beaucoup de catholiques croient encore à d'autres divinités ou participent aux cultes d'autres églises. »16(*) 

Alors, l'autorisation des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique apparaît comme un pas décisif pour porter assistance aux fidèles souffrants. Cependant, d'après les propos de l'archevêque, elles ne suffisent pas : il y a un travail capital en amont qui reste à faire, c'est-à-dire l'évangélisation en profondeur. Mais que peut l'homme en face de la douleur, de la misère, de la maladie, etc. ?

La maladie, la possession et toutes sortes de déconvenues survenues dans la vie sont pour les fidèles attribuées aux forces démoniaques, alors que les délivrances, les succès, les guérisons sont l'oeuvre de Dieu tel que la Bible l'établit. Et Jésus est venu confirmer cette thérapie divine par son ministère public pour asseoir chez les fidèles la croyance à cette guérison religieuse léguée à l'Eglise. Alors l'impuissance de la médecine biomédicale à traiter des maladies provoquées, qui sont en général des maladies incurables, aguerrit les fidèles à se tourner vers leur religion, recours idéal pouvant apporter la solution souhaitée. Cette propension qui se généralise révèle en outre que ce recours devient pour certains un palliatif à la précarité financière pour faire face aux coûts des soins médicaux. Ceux dont le niveau financier est relativement faible privilégient les instances des nouvelles pratiques religieuses en vue de recevoir gratuitement la guérison divine et avec l'assurance du non retour desdits maux, car la foi renforce la conviction que la guérison divine est totale et définitive.

Et comme la guérison divine est globale, en touchant toutes les dimensions de l'être humain, de plus en plus les fidèles attendent de Dieu une délivrance totale, qui mettrait fin à tous les déboires de la vie: les problèmes conjugaux, les difficultés affectives, la misère, le chômage, la peur ambiante due à la sorcellerie, à l'envoûtement, à la jalousie, etc. Pour eux, Jésus a fait mieux que tout cela, alors pourquoi l'Eglise catholique ne permettrait-elle pas à ses fidèles de jouir de ces miracles ? Plutôt que d'asseoir toute la doctrine sur la souffrance libératrice en imitation de Jésus Christ comme serviteur souffrant, de mieux en mieux, avec les nouvelles pratiques religieuses et l'obsession galopante de la peur des esprits maléfiques, de la sorcellerie, les fidèles croient en un Jésus guérisseur, libérateur et sauveur qui a vaincu la mort et qui peut les délivrer de toutes formes de possession.

4.1.2. Délivrer les personnes qui sont sous l'emprise des esprits maléfiques

Dans leur quête quotidienne de vaincre la maladie polymorphe, les fidèles s'aperçoivent que la lutte ne se limite pas seulement aux maux physiques et psychologiques. Il y a des puissances sataniques, des forces maléfiques qu'il faut combattre. C'est ainsi que parfois aux guérisons visant à rétablir un équilibre se rajoutent les délivrances d'esprits diaboliques venus posséder l'individu malade. Pour le chrétien, cela n'est possible que grâce à la puissance de Dieu. Dès lors, on comprend pourquoi dans l'Eglise catholique les fidèles s'acharnent sur les prêtres : ils croient au geste de ces derniers qui consiste à leur imposer les mains et à prier sur eux pour faire jaillir cette puissance de Dieu.

Les pratiques de religiosité populaire viennent apaiser la tension chez nombre de fidèles d'autant plus que de nouvelles perspectives de délivrance leur sont offertes, avec plus de disponibilité des officiants car ce ministère est désormais partagé avec des laïcs. En effet, en dehors de l'exorcisme pratiqué par les prêtres mandatés par l'évêque, au cours des assemblées de prière charismatique ou Jéricho, les fidèles vivent des occasions de délivrance. Sous leurs yeux une effervescence grandiose se produit lors des transes qui s'emparent des malades possédés : perte de contrôle de soi, agitation, culbute, paroles arrogantes et impertinentes, etc. Ces manifestions sont souvent interprétées comme signe d'une intervention bénéfique ou maléfique, et selon le cas la suite de la prière détermine le vrai sens à donner. Mais toujours est-il que la fin de telles séances de prière garantit la guérison au possédé. En définitive, les nouvelles pratiques religieuses se présentent comme des opportunités où Dieu fait des clins d'oeil aux hommes en vue de fortifier leur foi.

4.1.3. Aider les fidèles à mieux vivre leur foi

Pour beaucoup de chrétiens catholiques, les nouvelles pratiques religieuses sont nécessaires dans l'Eglise pour aider ceux qui sont faibles dans la foi et qui souffrent. Elles constituent des occasions qu'empruntera Dieu pour faire des miracles afin de soulager les hommes et de les amener à croire davantage en lui. Car les hommes sont de plus en plus gagnés par la tendance à croire plus aux signes qu'aux doctrines ; ce qui les pousse à rechercher partout ces signes-là qui les rassurent d'être dans le vrai, d'être avec un Jésus-qui-sauve. C'est une foi qui devient plus personnelle, remplie de subjectivité et de rationalité, et qui cesse d'être dogmatique. Elle se fonde sur ce que Jésus est cru capable de faire. Et si une église chrétienne enseigne un autre Jésus, pour eux, elle est vite taxée de désuète : elle est perçue comme ne pas se préoccuper des questions vitales des fidèles.

Bien que le christianisme soit définie comme une religion de salut où la guérison n'est pas l'objectif final, les malades ou les éprouvés de l'Eglise catholique font de leur guérison présente comme une fin en soi. C'est pourquoi Rosny E. (1992, p. 42) fait remarquer qu'« Un "ministère de la guérison" proprement dit, avec des rites liturgiques à l'appui, comme il se pratique dans les Églises indépendantes, connaît un regain de faveur... Le christianisme détient, en effet, d'étonnantes promesses de guérison et un réel pouvoir. Il est une religion qui a autant que les autres les capacités d'intégrer la vie totale de ses fidèles... » Ce qui paraît évident ici, c'est que ces nouvelles pratiques religieuses offrent à l'Eglise catholique la possibilité de freiner l'exode de ses fidèles et de ramener certains de ceux qui sont partis.

4.1.4. Freiner l'exode des fidèles catholiques

De l'avis de la quasi-totalité des fidèles, ces nouvelles pratiques viennent à propos pour endiguer les départs vers d'autres Eglises en essayant d'assouvir les soifs des fidèles qui souffrent. Beaucoup de fidèles regagnent espoir, reviennent dans l'Eglise catholique, intègrent des groupes de prière, surtout charismatiques, avec la ferme conviction de bénéficier de la sollicitude de Dieu d'un jour à l'autre. Même si le salut éternel interviendra après le passage dans l'au-delà, celui du monde présent est garanti et consiste en « la satisfaction des besoins fondamentaux, l'élimination des maux du corps, la solidarité et enfin la prospérité » (Monhidé, 2016, p. 200). Ainsi comme nous pouvons le constater, la promotion des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique et l'autorisation des mouvements charismatiques sont des mesures qui prouvent l'option de l'Eglise catholique à valoriser les fidèles et à soutenir qu'il n'y a point d'opposition entre la foi et la quête de la prospérité, du mieux-être spirituel et social. De ce fait, les fidèles peuvent être traités non plus comme de simples participants aux cultes religieux, mais comme des partenaires qu'il faut être en mesure de fidéliser par la qualité des services qu'elle leur rend. Et les retombées peuvent être le maintien de son hégémonie sur le marché de la religion et le captage de rente.

4.2. Nouvelles pratiques religieuses comme source de ressources financières

« Il n'est pas évident de rendre compte d'une évidence », écrivait Amouzouvi D. (2005, p. 9), en parlant du rapport entre la religion et le business qui est si évident que, dans l'entendement des personnes, il serait inutile de lui consacrer une recherche. En un mot, l'évidence de l'enjeu économique des nouvelles pratiques religieuses n'est plus à démontrer. Néanmoins, il sera analysé à travers toutes les composantes des pratiques religieuses comme les demandes de bénédiction, les exorcismes, les messes et les pèlerinages.

4.2.1. Le maintien de l'hégémonie de l'Eglise catholique

Le succès des nouvelles pratiques religieuses sur une paroisse draine du monde, chrétien ou non, vers cette dernière, les fidélise et fait parler du curé ou du groupe de prière responsable de ces activités pastorales. Les témoignages de guérison, de libération ou de prospérité sont de nouveaux indicateurs de la vitalité de l'Eglise catholique en dehors des nombreux baptêmes et de vocations, puisqu'ils redessinent un autre visage de ladite institution. Du coup, elle pourra conserver son statut de religion dominante dans la ville de Cotonou. Une telle hégémonie est favorisée par la visibilité de certaines paroisses dont les activités liées aux nouvelles pratiques religieuses sont très développées. Il s'agit des paroisses comme Saint Jean-Baptiste17(*), saint Michel, sainte Rita, Sacré-Coeur d'Akpakpa, saints Pierre et Paul d'Agla18(*) étiquetée entre temps par les fidèles comme « Chez Jesu agbonnon19(*) », sainte Thérèse de l'Enfant Jésus de Godomey, saint François d'Assise de Fidjrossè. Leur impact est si flagrant que d'autres prêtres s'engagent dans les mêmes initiatives, comme nous l'avons notifié plus haut, parce que ces prestations procurent des ressources insoupçonnées.

4.2.2. Les demandes de bénédiction requièrent des honoraires

Ordinairement les demandes de bénédiction, sous quelque forme que ce soit, ne nécessitent pas de payement de la part du fidèle, ce qui permet à tout chrétien de pouvoir bénéficier de ces services. Mais la multiplicité des demandes de bénédiction visant la purification des habitations et les nouvelles habitudes de la monétarisation des services de tout genre instaurent dans les esprits le poids de rendre le don reçu, la gratitude verbale étant estimée insuffisante. Alors ce contre-don acquiert peu à peu une valeur numéraire. De ce fait, sans que l'homme de Dieu ne réclame d'honoraire, quand il est déplacé de la paroisse pour une demeure, la délicatesse amène les uns et les autres à faire une offrande. Selon la possibilité de chacun, cette offrande peut être en nature ou en espèce : des vivres, des gadgets de valeur, des billets de banque. Dans ce dernier cas, un minimum de 5.000f CFA est requis pour assurer la carburation du prêtre. Dès qu'une messe est associée à cette bénédiction, l'honoraire passe à 10.000f CFA. Une telle sollicitude, voulue exempte de tout frais, sur certaines paroisses, a commencé par se vicier et fait l'objet d'une tarification payable au secrétariat des paroisses. Mais dans le cas général, le soin est souvent laissé au fidèle d'exprimer sa générosité. Alors, les gestes vont souvent au-delà des attentes comme celui d'un nanti qui veut rendre grâce pour une séance d'exorcisme réussi.

4.2.3. Les réussites des délivrances font parfois pleuvoir des billets de banque

Tout comme les demandes de bénédiction, les séances d'exorcisme ou les prières de délivrance ne connaissent pas de facturation. Mais c'est souvent la joie débordante du fidèle délivré après tant de sacrifices consentis ailleurs ou après tant d'années de souffrance endurée qui le pousse à une action de grâce. Il peut donc commander une messe et les frais de cette messe varient du prix habituel, 1.200f CFA, à un seuil où peut aller la capacité de l'intéressé. La même joie peut se manifester par une reconnaissance à témoigner au serviteur de Dieu. Surtout quand il s'agit d'un homme riche, enclin à la générosité, des sommes colossales dans l'ordre de million ou des voitures de luxe sont offertes, ou encore ce sont des activités de la paroisse qui sont financées à coup de millions. Les actes de générosité analogues se posent au cours des messes de guérison et de délivrance où l'animateur principal invite les fidèles à répondre à la miséricorde de Dieu par des quêtes d'action de grâce.

4.2.4. Les messes de grands rassemblements ne se passent pas de quêtes

Les prières de Jéricho, les campagnes d'évangélisation et les assemblées de prière sont des activités propres aux mouvements charismatiques. Quant à la messe de guérison et de délivrance, elle relève plus des initiatives des prêtres charismatiques ou exorcistes. Quelles qu'elles soient, ces pratiques religieuses ont pour spécificité de drainer du monde. A ce titre, en dehors de l'enjeu thérapeutique qui les caractérise, elles deviennent des instruments de captage de rente et, de ce fait, certaines d'entre elles vont faire l'objet d'appropriation par les prêtres et les conseils paroissiaux.

Ce fut le cas des prières de Jéricho qui étaient, il y a encore quelques années, l'arme d'évangélisation et de combat du Renouveau Charismatique Catholique. Vu qu'elles enregistraient une forte participation de la part des membres du groupe, des fidèles de la paroisse et des non catholiques, elles sont récupérées par les autorités paroissiales, qui désormais l'organisent pour toute la communauté.

Il est aisé de noter que les ressources financières constituent le soubassement d'une telle prise en main, étant donné qu'au dire des différents acteurs interrogés, les fonds collectés sont mis à contribution pour les travaux des paroisses. Nul ne s'empêche donc de voir qu'au cours des prières de Jéricho les recettes des paroisses montent considérablement. L'enquêté (R7) déclare :

« Regardez ce qui se passe sur les paroisses. Regardez l'affluence et regardez ceux qui viennent. Il est clair qu'à cette prière, les gens donnent plus parce qu'ils sont plus nombreux, même si ce ne sont que des jetons. Je pourrai même dire qu'il y a une certaine motivation de l'argent derrière ces organisations, il y a un grossissement des recettes paroissiales. Même si nous n'avons pas le point des quêtes, ce que nous observons nous montre qu'il y a quelque chose qui motive ça. Et là, ce sont les ressources financières. »

Cette motivation influe sur les prédications pendant les Jéricho. La thématique des enseignements, les témoignages, la louange, la musique, tout est minutieusement taillé sur mesure: les animateurs insistent davantage sur la bonté de Dieu, sur ses merveilles, sur ses prévenances, sur son amour indéfectible, etc. afin de susciter la générosité des fidèles. L'enquêté (R4) illustre le contexte :

« C'est pour que les gens donnent beaucoup que le prédicateur tient des propos comme : « Si vous avez des billets, apportez-les pour rendre grâce ! Apportez tout ce que vous avez dans votre poche et déposez ça dans le panier ! Qu'avez-vous que vous n'ayez reçu ! » Parfois quand la quête est maigre, le prédicateur insiste encore : « Avec tout ce que Dieu vous a fait, c'est ça là que vous avez donné comme quête ? Complétons encore pour voir la gloire de Dieu. Dieu vous a déjà fait des merveilles, donnez pour le mettre à l'épreuve. » Bon, on se lève et on donne, parfois je crois que c'est pour faire plaisir au curé. »

Outre les prières de Jéricho, les messes de guérison et de délivrance mobilisent aussi les fidèles en quête de solution à leurs problèmes. Leur succès financier amène d'autres prêtres à initier les mêmes pratiques religieuses. Etant donné que les fidèles qui assistent à ces messes et à ces prières, viennent de plusieurs paroisses d'un même doyenné20(*) ou des vicariats voisins, alors en organisant ces messes, chaque prêtre essaie de maintenir ses fidèles. Ce faisant, il capte une partie des recettes qui devraient aller au confrère voisin qui connaît du succès dans ce ministère. Ainsi son attitude cache-t-elle une réaction contre l'exode inter-paroissial des fidèles, dont la conséquence est la désertion des messes dominicales et par ricochet un transfert de ressources financières importantes vers les autres paroisses.

4.2.5. Les pèlerinages offrent des occasions de collecte de fonds

L'organisation des pèlerinages annuels de l'archidiocèse qui se déroulent soit à Allada, soit à Dassa est aussi une source de revenus que voile le sentiment d'aller se ressourcer, prier, rencontrer son Dieu. Chaque pèlerin, comme d'habitude, prend en charge son transport et sa restauration durant son séjour au sanctuaire. Mais une somme de 500f CFA ou 1.000f CFA lui est réclamée pour les frais généraux couvrant la fabrication des badges, la location des chaises et bâches, la sonorisation, l'entretien des toilettes et des cabinets d'aisance, etc. De cette somme est défalquée une partie qui est donnée au recteur ou directeur du centre d'accueil en fonction du nombre de participants. A cela viendront s'ajouter les quêtes faites aux différentes célébrations eucharistiques.

Les sites reçoivent de pèlerins tout au long de l'année et les différents groupes et associations de l'archidiocèse organisent leur voyage selon un calendrier approprié. En outre, il y a un pèlerinage de grande envergure dit national. Il se tient à Dassa et réunit au mois d'août tous les diocèses du territoire national. C'est aussi un pèlerinage de renommée internationale qui enregistre la participation des ressortissants des pays de la sous-région. La liesse emplit le site, l'effervescence se décuple et les actions de grâce sont interminables pour les merveilles accomplies par Dieu pour tel ou tel fidèle.

4.2.6. Le commerce d'objets de piété et la littérature spirituelle fleurissent

Le développement des nouvelles pratiques religieuse sa fait accroître la consommation des biens spirituels chez les fidèles. Sur ce, deux pratiques, aussi vieilles que la religion, connaissent un essor florissant : le commerce d'objets de piété et la littérature spirituelle. Il est devenu fréquent chez le fidèle catholique le port de croix, de médaille, l'usage de chapelet ou d'images pieuses pour la prière, l'érection chez soi d'un oratoire ou d'une petite grotte mariale ou dédiée à un saint, etc. La proximité du Nigeria facilite l'acquisition à des prix raisonnables de ces objets de piété, qui venaient habituellement de l'Europe ou de la Chine. Ce commerce a une portée fortement économique et beaucoup de personnes s'y investissent: des fidèles laïcs, des religieuses ou des structures ecclésiales de l'archidiocèse. A la librairie Notre Dame, dans les boutiques sises sur les paroisses ou dans les rues de Cotonou, la vente des milliers d'articles de prière fait brasser aux promoteurs des liasses de billets de banque. Tout un discours mélioratif accompagne ces objets de piété, le plus souvent recommandés par les prêtres ou les responsables de mouvements charismatiques pour que ceux qui désirent se protéger contre les esprits maléfiques ou chasser le diable en fassent usage.

Le même souci d'aider les fidèles à préserver leur santé tant physiologique que spirituelle favorise une production littéraire très diversifiée. Elle est axée sur une thématique générale dont sont friands les fidèles comme : la sorcellerie, les forces du mal, les oeuvres de Satan, les esprits incubes et succubes, les moyens pour vaincre le Mal, Jésus chemin, vérité et vie, la victoire par le précieux sang de Jésus, les neuvaines de guérison ou de libération, etc. Ces ouvrages, publiés par des prêtres ou des laïcs, sont vivement conseillés aux fidèles et sont souvent à la portée du grand nombre : 500f, 1.000f, 2.000f, 3.000f CFA, etc. Chacun s'en procure selon ses besoins et ses moyens financiers. A titre illustratif, voici quelques ouvrages accompagnés de leurs prix sur le marché : Prier avec Marie dans les moments difficiles (500f), La Neuvaine de protection spirituelle et de libération de Jean Pliya (800f), Apprendre à prier pour la guérison du père Marcus Y. E. SABA (1.500f), Pratique du combat spirituel de l'Abbé Kisito Vodounon (1.500f), Brisons les chaînes du Diable de Maxime Biaou (1.300f), Le chrétien et les attaques occultes d'Augustin M. R. Guèdègbé (2.000f), Ma délivrance des oeuvres des sorciers de Georges Koumadoli (2.500f), Prières pour se libérer de l'Anti-Christ de l'Abbé Rock Aniambossou (3.000f), De la mort spirituelle à la vie abondante en Jésus Christ de Marcel Kakpo (2.500 f),L'exorcisme face au défi de la sorcellerie du père Pamphile Fanou (3.500f), etc.

Somme toute, il convient de dire que les nouvelles pratiques religieuses offrent à beaucoup de personnes l'opportunité de développer une capacité et d'exercer un pouvoir, un charisme en vue du bien de tous.

4.3. Nouvelles pratiques religieuses comme opportunité d'exercice de charisme

L'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique a suscité l'exercice de charisme chez des laïcs en vue de faire face aux aspirations de nombreux fidèles. Pour Weber M. (1971, p. 320), le charisme est « la qualité extraordinaire (...) d'un personnage, qui est, pour ainsi dire, doué de force ou de caractères surnaturels ou surhumains ou tout au moins en dehors de la vie quotidienne, inaccessibles au commun des mortels ; ou encore qui est considéré comme envoyé par Dieu ou comme un exemple, et en conséquence considéré comme un "chef". » En effet, la présence de ces nouveaux « chefs » charismatiques dans le corps de l'Eglise catholique passait pour inhabituelle et soulevait des inquiétudes autour de la question du pouvoir et du leadership. Il ne faut pas s'en douter, les prérogatives propres au ministère du clergé volent en éclat devant la légitimité qu'acquièrent les laïcs dans la mise en oeuvre des multiples charismes dont ils font l'expérience. De même, lorsque sans autorisation, des prêtres exercent des charismes d'exorcisme et de guérison par la prière, ils se trouvent parfois en posture de non obéissance à l'ordinaire des lieux, c'est-à-dire l'évêque. Autant d'interactions qui s'établissent entre plusieurs acteurs de l'Eglise catholique autour des nouvelles pratiques religieuses.

4.3.1. La désobéissance à l'autorité épiscopale

Il est souvent constaté qu'en dehors des trois prêtres exorcistes mandatés par l'archevêque, d'autres prêtres se reconnaissant détenteurs de charismes exceptionnels se mettent à exercer le ministère pour répondre à la demande qui se fait de plus en plus forte. Il est évident que si chaque prêtre devait envoyer ceux qui ont des problèmes ou ceux qui demandent l'assistance de l'Église à ces trois prêtres, il serait vraiment difficile de satisfaire la demande. Alors faut-il se taire devant les souffrances des fidèles et les voir peut-être partir ailleurs, sans avoir l'assurance du salut de leur âme ? Aussi lorsqu'on sait ce que représente financièrement un fidèle gagné pour l'Eglise, il est maladroit de ne vouloir rien tenter pour son maintien. Pour ce faire, l'implication de ces prêtres non autorisés dans le ministère, même pour une noble cause, semble une désobéissance21(*) à l'endroit de l'autorité. C'est ainsi que plusieurs prêtres deviennent des délivreurs pour leur communauté. La modestie de certains succès ne dérange pas l'évêque. Mais lorsque des affluences tumultueuses se dirigent chaque semaine vers la paroisse du délivreur dont la réussite fait écho dans la ville et dans tout l'archidiocèse, la mesure répressive s'applique aussitôt: soit le prêtre est mis en demeure de stopper ses activités, soit il est muté ailleurs sur une autre paroisse avec interdiction formelle d'exercer ou bien encore il est mis sous tutelle d'un doyen. Parfois, cette mesure procure implicitement aux autres confrères une quiétude sans rivalité dans leur fief paroissial.

4.3.2. La concurrence tacite entre les prêtres

Le succès avéré des prêtres qui exercent le charisme de guérison et de délivrance soulève une rivalité mitigée dans le corps presbytéral d'autant plus qu'il leur confère une certaine notoriété qui les suit partout. La quête d'un tel prestige que certains prêtres souhaitent avoir, ne serait-ce qu'auprès de leurs paroissiens, fonde aussi les mêmes initiatives qu'ils prennent, étant donné que ne pas être en mesure de satisfaire les attentes des paroissiens peut se traduire valablement comme une incompétence. Alors chaque prêtre fait tout pour que ses paroissiens l'aiment, que tout le monde voie qu'il remplit aussi son église comme tel ou tel confrère, de sorte qu'il fasse bonne impression auprès du Monseigneur, etc., voilà autant de motivations qui aiguillent la pastorale de plusieurs d'entre eux.

Dans ce même ordre d'idée, l'affectation d'un prêtre sur une paroisse où était curé un prêtre charismatique ou exorciste aimé de tous les fidèles parce qu'il a le pouvoir de chasser le diable, pose aussi problème. Le nouveau curé remue ciel et terre pour se faire un nom, sans quoi il serait l'ombre de lui-même. Les nouvelles pratiques religieuses deviennent un tremplin pour lui afin de rejoindre les paroissiens dans leurs problèmes et leurs attentes. Ainsi pourra-t-il éviter la désertion de la paroisse au profit de celles environnantes. Cette situation va amener beaucoup de prêtres à organiser ces prières, même s'il faut faire venir un prêtre exorciste ou associer les responsables des mouvements charismatiques à cet effet.

4.3.3. La relation complexe entre clergé et laïcat

L'exercice de charismes par les laïcs au coeur des nouvelles pratiques religieuses fragilise sur certaines paroisses les relations entre laïcs et prêtres. Cela est généralement dû à des malentendus relatifs à la liturgie, à la théologie ou au leadership. Sur ce, les prêtres estiment que les laïcs ne sont pas assez outillés pour aborder certaines questions d'ordre dogmatique, théologique, liturgique, etc. et qu'au cours de leurs différentes prédications ils commettent énormément de fautes doctrinaires. Aussi soulignent-ils que les laïcs charismatiques cherchent à imiter les évangéliques ou pentecôtistes. Selon eux, il leur incombe le devoir de discerner et d'orienter le ministère des laïcs qui font malheureusement montre d'orgueil et de suffisance. C'est ainsi qu'« on observe, au fil du temps et des circonstances, des malaises et des tensions qui s'installent de part et d'autre, et qui [débouchent] sur de graves crises ; il arrive même que, face aux injonctions ou à une tentative de mise au pas venant de l'autorité instituée, certains groupes choisissent de s'installer dans la dissidence... » (Sabuni Kitutu, 2011, p. 297). Alors, l'insoumission vaut à ces groupes charismatiques, dirigés par des laïcs, l'interdiction d'activités sur des paroisses, tandis que les mêmes groupes, ailleurs, continuent d'exister et de fonctionner.

Les prêtres déplorent aussi la liberté que prennent certains laïcs charismatiques, pétris d'expériences, qui commencent à officier chez eux ou dans des cabinets hors de la paroisse. Il y en a qui prennent le nom de mystiques et se disent mandatés par l'Esprit Saint ou par la Vierge Marie pour aider ceux qui souffrent dans l'Eglise catholique ou dans le monde. Cela pose un problème de gestion des pratiques de religiosité au sein de l'Eglise catholique. Face à de telles situations, les prêtres rappellent ces fidèles à l'ordre, parfois en vain. Ces genres de dérapages, selon eux, ne sont pas loin de créer des scissions et de provoquer des problèmes d'ordre spirituel difficilement contrôlables. Car ils ne sauraient répondre des déconvenues qui surviendraient au cours de ces activités se déroulant hors du giron de l'Eglise catholique.

Du côté des laïcs, ils pensent souvent que ces malentendus seraient dus au privilège que leur confèrent les charismes qu'ils exercent dans la communauté, que n'ont peut-être pas les prêtres, en dépit de leur sacerdoce. Néanmoins, ils ne marchandent pas leur collaboration aux activités de leurs paroisses. De ce fait, ils sont souvent associés au ministère des prêtres. C'est ainsi que sur certaines paroisses, des mouvements charismatiques prospèrent et la vie paroissiale s'épanouit. Les manifestations collectives sont fréquemment organisées avec une forte participation de la communauté. La variété des groupes charismatiques crée aussi une compétition en leur propre sein.

4.3.4. La compétition entre différents mouvements charismatiques

S'il est vrai que l'exercice de charisme confère une notoriété, il faut reconnaître qu'il engendre une concurrence entre laïcs du même groupe ou des groupes différents. Chacun cherche à prouver aux autres qu'il est plus disposé à servir de canal à l'Esprit Saint, donc à opérer des prodiges au cours des pratiques religieuses. Ces personnes s'efforcent à être partout présentes : on les voit de paroisse en paroisse, pendant les prières de Jéricho ou les messes de guérison en train de prêcher, d'enseigner et de prier pour le peuple de Dieu. Ainsi les fidèles qui ont besoin de soutien spirituel les envahissent, les visitent parfois chez eux. Les groupes charismatiques qui n'ont pas trop de visibilité vilipendent ceux qui progressent ou font des prouesses, les affublent de critiques acerbes. Selon les dires, on les traite d'être trop zélés, trop illuminés, plus saints que les autres, etc., comme l'illustrent les propos du responsable (R6) :

« ... Certains parmi nous exagèrent dans leur manière de faire et mécontentent les curés : ils se croient tout permis, refusent de se soumettre aux curés et croient que sans eux l'Eglise ne va pas fonctionner. On dirait qu'ils veulent modifier les choses dans l'Eglise puisqu'il arrive qu'ils organisent des séances d'écoute ; ce qui ne plaît pas du tout aux prêtres, c'est un peu comme s'ils confessent les gens. C'est toujours eux qu'on voit animer les messes de guérisons ou les nuits d'adoration. »

Il est aussi noté que des personnes déçues dans des groupes, qui n'entrevoient aucune lueur d'être nommées responsables, s'en vont créer leur groupe charismatique. C'est ce qui explique la multiplication des mouvements charismatiques dans l'Eglise catholique : ils annoncent une spiritualité apparemment différente de celle des autres groupes, mais développent des pratiques et activités qui sont très similaires.

Des simples motivations charismatiques viennent s'ajouter des visées pécuniaires, comme le dit l'enquêté (R7) :

« Il y a aussi l'argent. Il faut le dire, ne pas le dire, c'est mentir. Il s'agit certes des groupes de prière, mais beaucoup d'argent circule ... Chacun veut gérer ça pour lui. Donc ce que nous constatons, au niveau par exemple de l'État où on a des guerres de leader par-ci, des dissidents de parti par-là, il y en a aussi dans l'Eglise, même si les choses ne se présentent pas de la même manière que dans le domaine politique. »

En fin de compte, les différents enjeux évoqués indiquent clairement que les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique répondent à des attentes dont la satisfaction ne saurait être différée au risque d'encourager l'exode des fidèles catholiques vers d'autres religions. Aussi justifient-ils les multiples implications des différents acteurs qui promeuvent ces pratiques religieuses.

CONCLUSION

Analyser les enjeux qui justifient l'émergence des nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise catholique, tel était l'objectif principal de cette recherche. Pour y parvenir, nous avions décidé de décrire le contexte du regain d'intérêt pour les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique, d'identifier les besoins qu'elles satisfont avant de pouvoir analyser les enjeux de leur approbation.

Il nous a été donné de constater que la montée en puissance des nouveaux mouvements religieux et de toutes sortes de sectes sur le marché de la religion constitue une menace potentielle pour l'Eglise catholique qui se doit de réajuster ses pratiques religieuses en vue de satisfaire les attentes de ses fidèles. Il s'est avéré que devant les difficultés de la vie à Cotonou, truffée de peur, d'insécurité spirituelle et de misère croissante, les fidèles de l'Eglise catholique n'hésitent pas à s'ouvrir à plusieurs recours, le plus souvent, très peu approuvés par les autorités de leur religion. L'effervescence religieuse qui prévaut offre l'opportunité à tout le monde de pratiquer la religion de son choix pourvu qu'elle satisfasse les intérêts visés. Alors, pour ne pas perdre son statut de religion dominante, à cause de l'exode de ses fidèles vers d'autres religions, l'Eglise catholique entreprend de promouvoir de nouvelles pratiques religieuses qui rejoignent les fidèles dans leur quête et les mouvements charismatiques qui fonctionnent à l'image des églises pentecôtistes.

Rejoindre les fidèles dans leurs aspirations suppose que ce qu'ils vont chercher ailleurs soit disponible dans leur église. En effet, les demandes de bénédiction, de guérison, de délivrance, de protection, d'écoute, d'accompagnement spirituel et d'assistance matérielle sont assurées aux fidèles de diverses manières. L'institutionnalisation des messes de guérison, de délivrance, des prières de Jéricho, des veillées d'adoration et d'évangélisation est une initiative qui permet à l'Eglise catholique non seulement de maintenir ses fidèles, mais aussi d'attirer de nouveaux membres. Aussi la mise à contribution des mouvements charismatiques supplée-t-elle à l'indisponibilité des prêtres. Ces mouvements deviennent des creusets de formation, de soutien spirituel, d'approfondissement de la foi catholique, de solidarité, de revitalisation d'anciennes dévotions, etc. parce qu'ils sont les pionniers de la promotion des nouvelles pratiques religieuses de masse au sein de l'Eglise catholique. Dès lors, ces pratiques religieuses finissent par trouver une place à côté de la liturgie officielle, ce qui change la configuration de certaines messes célébrées au grand bonheur des fidèles qui sont attirés par des cultes enthousiastes, enflammés et pleins d'émotions.

Tout compte fait, ces nouvelles pratiques religieuses se dévoilent fort bien comme des stratégies de repositionnement de l'Eglise catholique sur le marché de la religion. Elles recèlent plusieurs enjeux dont trois ont été principalement retenus. Tout d'abord, elles permettent de freiner l'exode des fidèles catholiques en soulageant leur souffrance, en délivrant les personnes qui sont sous l'emprise des esprits maléfiques et en les aidant à mieux vivre leur foi. Ensuite, les nouvelles pratiques religieuses constituent de véritables sources de rentes. Car toutes les prestations ont une valeur numéraire ou l'acquièrent selon les circonstances : l'augmentation des fidèles induit un accroissement des recettes des paroisses au cours des messes ou des pèlerinages, les demandes de bénédiction requièrent des honoraires, les réussites des délivrances réveillent la générosité des personnes délivrées qui font des dons et les dévotions encouragent le commerce d'objets de piété et la littérature spirituelle. Enfin, les pratiques de religiosité nouvelle sont vues comme une opportunité d'exercice de charisme. Tous les acteurs qui s'y engagent, prêtres ou laïcs, sont souvent animés par l'esprit de concurrence vis-à-vis des autres selon les intérêts poursuivis par chacun. Cela occasionne des tensions, des crises, des malentendus ou des conflits dans l'Eglise et sur des paroisses. Il s'ensuit parfois la désobéissance à l'autorité de tutelle qui applique la sanction de sa convenance : des prêtres sont affectés de leurs paroisses par l'évêque, des groupes de prière charismatiques suspendus par les curés.

Les nouvelles pratiques religieuses à caractère populaire montrent que les fidèles sont de plus en plus intéressés par la religion, non plus comme pratique institutionnelle, mais comme des instances d'échappatoire, où ils viennent se soulager. Ils sont donc prêts à faire des essais pour voir si cela marche, et si un groupe leur procure satisfaction, ils peuvent rester ou non selon leur bon vouloir. Alors, elles s'imposent comme de nouvelles manières de croire que l'Eglise catholique doit essayer de cerner et d'accompagner afin d'éviter des dérapages qui peuvent lui être préjudiciables.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

1- Alladaye C. J., 2003, Le catholicisme au pays du vodun, Les Editions du Flamboyant, Cotonou, 460 pages

2- Amouzouvi H. D. A., 2005, Le marché de la religion au Bénin, Verlag Dr. Köster, Berlin, 291 pages

3- Aubourg V., (dir.), 2011, Religions populaires et nouveaux syncrétismes, Sainte-Clotilde (La Réunion), Surya Éditions, 286 pages

4- Barbier J.C., Dorier-Apprill E. (2002), « Cohabitations et concurrences religieuses dans le golfe de Guinée. Le sud-Bénin, entre vodun, islam et christianismes. », in Pourtier R. (org.), Colloque Géopolitiques africaines, Bulletin de l'association des géographes français, juin 2002, pp. 223-236.

5- Bastin M., 2003, Subjectivité et intersubjectivité dans la conversion individuelle masculine à l'islam au XXIème siècle en France, mémoire, EHESS, Paris

6- Berger P.L. (dir.), 2001, Le Réenchantement du monde, Bayard, Paris, 184 pages

7- Berger P.L., 1971, La Religion dans la conscience moderne, Editions du Centurion, Paris, 287 pages

8- Bertaux D., (1980). « L'approche biographique : sa validité, ses potentialités », Cahiers internationaux de sociologie, vol. 69, pp. 197-225.

9- Blanchet A. et Gotman A. 1992, L'enquête et ses méthodes d'entretien, Editions Nathan, 125 pages

10- Cardinal Godfried Danneels, 2008, La religion populaire, Mechelen, Service de Presse de l'Archevêché (Malines-Bruxelles), cité par Peloux R., Pian Ch. (dir), Les religiosités populaires : archaïsme ou modernité ?, Paris, Éditions de l'Atelier, 144 pages

11- Durkheim E., 1937, Les règles de la méthode sociologique, Quadrige, PUF, 11ème édition, 149 pages

12- Durkheim E., 2002, Les formes élémentaires de la vie religieuse. Le système totémique en Australie, Paris, PUF, Livre I, 94 pages (édition électronique)

13- Gauthier, V., 2011, L'Eglise catholique face au défi des groupes évangéliques, thèse, Strasbourg, 448 pages

14- Giblet J., 1973, « Le mouvement pentecôtiste dans l'église catholique aux U.S.A. » In : Revue théologique de Louvain, 4ème année, fasc. 4. pp. 469-490.

15- Goffman E., 1967, Interaction Ritual : Essays on Face to Face Behavior, Doubleday Anchor, New York

16- Kennedy D., 2004, Au pays de Dieu, Belfond, 2004, 336 pages

17- Kepel G., 1991, La Revanche de Dieu. Chrétiens, juifs et musulmans à la reconquête du monde, Seuil, Paris, 282 pages

18- Lévi-Strauss C., 1955, Tristes Tropiques, éd. Plon, Paris, 255 pages 

19- Luneau, R., 2002, Comprendre l'Afrique. Évangile, modernité, mangeur d'âmes, Paris, Karthala, 211 pages

20- Mary A., 2000, « L'anthropologie au risque des religions mondiales », in Anthropologie et Sociétés, vol. 24, numéro 1, pp.117-135.

21- Mayrargue C., 2014, « Les christianismes contemporains au Bénin au défi de la pluralisation. Dynamiques d'expansion et porosité religieuse », Afrique contemporaine (n° 252), pp. 91-108

22- Mbodo  M. O., 2011, « Les nouvelles formes de la religiosité en Afrique subsaharienne : des pratiques inspirées par une éthique du présent », in Aubourg V., (dir.), 2011, Religions populaires et nouveaux syncrétismes, Sainte-Clotilde (La Réunion), Surya Éditions, 286 pages

23- Gardaz M., Vaillancourt J.-G., Geoffroy M., 2007, La mondialisation du phénomène religieux, Médiaspaul, Canada, 271 pages

24- Monhide M. T., 2016, Les nouvelles formes de religiosité chrétienne à Zagnanado, Flash, UAC, 280 pages

25- Muanda Kienga J., 2015, L'effervescence religieuse en Afrique : crise ou vitalité de la foi ? Pistes pour une « nouvelle évangélisation », L'Harmattan, 310 pages

26- Peloux R., Pian C. (dir), 2010, Les religiosités populaires : archaïsme ou modernité ?, Paris, Éditions de l'Atelier, 144 pages

27- Perretant-Aubourg V., 2011, L'Eglise à l'épreuve du Pentecôtisme, thèse, 821 pages

28- Robert P. (1995), Dictionnaire Le Nouveau Petit Robert, Paris, 2556 pages

29- Rosny E. de, 1992, L'Afrique des guérisons, Les Editions Karthala, Collection les Afriques Paris, 223 pages

30- Roy O., 2008, La Sainte Ignorance : le temps de la religion sans culture, Seuil, Paris, 275 pages

31- Sabuni Kitutu L., 2011, La notion de religion populaire appliquée au catholicisme en Afrique : Regard sur les conditions et les enjeux actuels de la piété populaire dans le champ religieux du continent africain, Thèse de Doctorat en Théologie catholique et Sciences religieuses, Strasbourg, 360 pages

32- Schlegel J.-L., 1995, Religions à la carte, Paris, Hachette, 143 pages

33- Semporé, S., 1994, « Théophile l'Africain. Les chrétiens d'Afrique devant leur avenir », in Études, janvier, pp. 19-30

34- Séraphin G., 2004, « La diversité locale des implantations religieuses chrétiennes dans deux villes d'Afrique subsaharienne (Douala, Nairobi) », in Gilles Séraphin (direction), L'effervescence religieuse en Afrique. La diversité locale des implantations religieuses chrétiennes en Afrique subsaharienne (Cameroun / Kenya), Paris, Karthala, coll. Les Afriques, pp. 197-251

35- Spiro M., 1966, « Religion : Problems of Definition and Explanation », in Michael Banton (ed.), Anthropological Approaches to the Study of Religion, Londres, Tavistock, pp. 85-126

36- Synode des Evêques, 2006, IIème Assemblée spéciale pour l'Afrique, Lineamenta, 71, Cité du Vatican

37- Weber M., 1971, Économie et société, tome 1 : Les catégories de la sociologie, Paris, Plon, 410 pages

38- Willaime J.-P., 1992, La Précarité protestante. Sociologie du protestantisme contemporain, Genève, Labor et Fides, 215 pages

39- Willaime J.-P., 2012, Sociologie des religions, Que sais-je, Puf, Paris, 128 pages

REFERENCES WEBOGRAPHIQUES

1- Altglas V., 2005, « « Les mots brûlent » : sociologie des Nouveaux Mouvements Religieux et déontologie », Archives de sciences sociales des religions, URL : http://assr.revues.org/3264, consulté le 01 octobre 2016 à 12h 45

2- Bastian J.-P, 2008, « Les réponses de l'Église catholique à l'expansion du protestantisme en Amérique latine », L'Ordinaire des Amériques n°210, consulté le 29 novembre 2016 à 17h 53

3- Benoît XVI, Discours adressé aux nonces apostoliques d'Amérique latine, lors d'une réunion organisée en février 2007 pour préparer la Ve Conférence générale de l'épiscopat latino-américain et des Caraïbes, à Aparecida au Brésil, consulté le 24 janvier 2017 à16h20

4- Bernos M., 2002, « L'Eglise catholique et les sectes à la fin du XXe siècle », Rives nord-méditerranéennes, URL : http://rives.revues.org/1 2002, consulté le 04 septembre 2016 à 13h 22

5- Blé R. G., 2013, « La prolifération des sectes en Côte d'Ivoire : l'expression d'une réalité sociale », Revue des sciences religieuses, URL : http://rsr.revues.org/1313, consulté le 11 septembre 2016 à 12h 06

6- Caillé A., 2003, « Nouvelles thèses sur la religion », Revue du MAUSS 2003/2 (n° 22), p. 318-327, http://www.cairn.info/revue-du-mauss-2003-2-page-318.htm, consulté le 22 février 2017 à 16h 46

7- Cakpo E., 2013, « Le phénomène des Nouveaux Mouvements Religieux en Afrique: L'Eglise catholique en déroute », http://www.editions-harmattan.fr/auteurs/article_pop. asp?no=27155&no_art..., consulté 26 janvier 2017 à 22h 27

8- Champion F., 1988, « Nouveaux mouvements religieux et conflits de société (1965-1985) » in Vingtième Siècle, revue d'histoire, n°19. Religion et politique aux États-Unis. pp. 43-53; http://www.persee.fr/doc/xxs_0294-1759_1988_num_19_1_2034, consulté le 23 février 2017 à 12h 35

9- Dakouri M. Gadou, 2004, « Les prophétismes en pays Dida et la logique du marché (Côte d'Ivoire) », Journal des anthropologues, URL : http://jda.revues.org/1700, consulté le 09 novembre 2016 à 10h 27

10- Dianteill E., 2002, « Pierre Bourdieu et la religion. Synthèse critique d'une synthèse critique », Archives de sciences sociales des religions, URL : http://assr.revues. org/1590, consulté le 30 septembre 2016 à 10h 55

11- Dortier J.-F. et TestotL., 2005, « Le retour du religieux, un phénomène mondial », http://www.scienceshumaines.com/le-retour-du-religieux-un-phenomene-mondial_fr_4912 .html, consulté le 26 janvier 2017à 22h 27

12- Lassave P., 2014, « Les sociologues des religions et leur objet » in Sociologie N°2, vol. 5, consulté le 22 février 2017 à 16h 28

13- Lecaros V., 2011, Au défi des évangéliques, l'Eglise en Amérique latine, pp. 13-17, consulté le 24 janvier 2017 à 14h 38

14- Mayrargue C., 2015, « L'Eglise catholique africaine est-elle menacée par l'expansion des évangéliques ? », Interview accordée à Le Monde, propos recueillis par Elise Barthet, http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/11/30/, consulté le 28 novembre 2016 à 11h 00

15- Mgr Lafon P., 2005, « L'Eglise catholique concurrencée par le protestantisme », Interview accordée à RFI, propos recueillis par Valentin  Zinga, http://www1.rfi.fr/actufr /articles/064/article_35284.asp, consulté le 25 novembre 2016 à 12h 27

16- Ministère de l'intérieur, Bénin : Des "exorcistes catholiques" en première ligne contre les évangélistes, http://www.stambroise.org/ds/rb/beninexorcisme.html, consulté le 2 novembre 2016 à 17h31

17- Roy O., 2008, « Les religions à l'épreuve de la mondialisation », Interview accordée à Le Monde, propos recueillis par Stéphanie Le Bars, http://www.lemonde.fr/ international/article/2008/12/21/, consulté le 14 février 2017 à 13h 15

18- Willaime J.-P., 2003, « La religion : un lien social articulé au don », Revue du MAUSS 2003/2 (n° 22), pp. 248-269, http://www.cairn.info/revue-du-mauss-2003-2-page-248.htm, consulté le 17 janvier 2017 à 11h 42

ANNEXES

GRILLE D'OBSERVATION

- Attitudes au cours des messes dominicales

- Attitudes au cours des processions du Saint Sacrement

- Attitudes au cours des séances des messes de guérison, des prières de délivrance, des - campagnes d'évangélisation

- Demande de bénédiction à la sortie des messes

- Rites et pratiques collectifs

- Visite aux grottes de la Vierge Marie ou des statues d'un saint, lors d'un pèlerinage

GUIDE D'ENTRETIEN I

(Adressé aux prêtres et aux responsables des mouvements charismatiques catholiques)

1- Eglise catholique à l'ère de l'effervescence religieuse

2- Explication de la désaffection de l'Eglise : constat, cause, conséquence, solution

3- Réactions de l'Eglise catholique face au pluralisme religieux

4- Produits religieux proposés par les NMR : fondé ou non, justification

5- Explication de l'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique : contexte, justification et regard sur les nouvelles pratiques religieuses

6- Valeurs chrétiennes véhiculées par les mouvements charismatiques nés dans l'Eglise : pratiques à l'échelle des paroisses (messes de guérison, exorcisme, Jéricho, bénédictions diverses, etc.)

7- Pentecôtisation du christianisme ou du catholicisme : satisfaction des aspirations des fidèles, réponse à la concurrence

8- Enjeux des nouvelles pratiques religieuses de masse

GUIDE D'ENTRETIEN II

(Adressé aux Pasteurs des NMR)

1- Justification de l'effervescence religieuse de nos jours

2- Provenance religieuse des membres de l'Eglise

3- Problèmes récurrents des membres

4- Nature des solutions proposées

5- Fondement de l'Eglise : spécificité, structure, programme, etc.

6- Désaffection : départ, retour, reproche, division

7- L'Eglise en question face aux autres NMR : entente, désaccord, concurrence

8- L'Eglise en question face aux institutions établies et autres religions

QUESTIONNAIRE

SECTION I : IDENTIFICATION DES ENQUETES

No

QUESTIONS

MODALITES ET CODES

PASSER A

Q 101

Sexe

Masculin .......... 1  ; Féminin ............ 2

 

Q 102

Quel âge avez-vous ?

/____ / ans(Mettre le nombre d'années)

 

Q 103

Dans quel quartier habitez-vous ?

................................................

 

Q 104

Vous êtes de quelle paroisse ?

................................................

 

Q 105

Quels sacrements avez-vous reçus ?

Baptisé(e) ........ 1 ; Communion ......... 2

Confirmation .......... 3 ; Aucun ......... 4

Catéchuménat ......... 5

 

Q 106

Quelle est votre situation matrimoniale ?

Marié (e) à l'Eglise ... 1 ; Célibataire ...... 2

En concubinage ....... 3 ; Séparé .......... 4

Veuf (ve) ............... 5

 

Q 107

Etes-vous scolarisé(e) ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Q 109

Q 108

Quel est votre niveau d'instruction ?

Primaire ......... 1 ; Secondaire I ......... 2

Secondaire II ...... 3 ; Supérieur ......... 4

 

Q 109

Quelle est la profession que vous exercez actuellement ?

Artisan ............ 1 ; Commerçant ........ 2

Fonctionnaire ..... 3 ; Etudiant ............ 4

Sans emploi ......... 5 ;

Autres (à préciser) ........................... 6

 

Q 110

A combien estimez-vous votre revenu mensuel ?

Moins de 20.000 .................... 1

[20.000 - 40.000[................... 2

[40.000 - 60.000[................... 3

[60.000 - 80.000[................... 4

[80.000 - 100.000[................... 5

[100.000 et + [.......................... 6

 

Q 111

Quelle est la profession que votre conjoint(e) exerce actuellement ?

Artisan ............ 1 ; Commerçant ........ 2

Fonctionnaire ..... 3 ; Etudiant ............ 4

Sans emploi ......... 5 ;

Autres (à préciser) ........................... 6

 

SECTION II : CONTEXTE DE L'EFFERVESCENCE RELIGIEUSE

Q 201

Les conditions de vie deviennent de plus en plus difficiles de nos jours. Etes-vous de cet avis ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si non pourquoi ? .....................................

 

Q 202

A quoi cela peut être dû ?

......................................................

......................................................

 

Q 203

Beaucoup de personnes souffrent et leurs souffrances ne sont pas que d'ordre matériel, mais aussi spirituel. Etes-vous de cet avis ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

 

Q 204

Avez-vous déjà été confronté (e) à un problème quelconque de la vie qui, selon vous, aurait eu une source spirituelle ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si oui lequel .....................................

.....................................................

 

Q 205

Connaissez-vous des personnes ayant eu des problèmes spirituels ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

 

Q 206

Quels sont les problèmes spirituels auxquels les gens sont souvent confrontés dans votre entourage ?

......................................................

......................................................

......................................................

 

Q 207

Citez quelques problèmes autres que spirituels qui font courir les hommes ici à Cotonou.

.....................................................

.....................................................

.....................................................

 

Q 208

De nos jours, il y a beaucoup de personnes, de mouvements religieux ou spirituels, d'Eglises qui promettent des solutions pour soulager les souffrances des hommes. En avez-vous connaissance ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si oui lesquels ? .................................

......................................................

......................................................

 

Q 209

A votre avis, qu'est-ce qui fait que les Eglises évangéliques ou pentecôtistes attirent de plus en plus de monde ?

......................................................

......................................................

.....................................................

 

Q 210

Ces Eglises constituent-elles, selon vous, une menace pour votre Eglise ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Expliquez-vous .................................

.....................................................

 

Q 211

Que pouvez-vous dire du départ des fidèles de l'Eglise catholique vers les Eglises évangéliques ou pentecôtistes (dites sectes) ?

.....................................................

.....................................................

.....................................................

 

Q 212

Votre Eglise possède-t-elle, selon vous, les moyens pour combler les attentes de ceux qui vont ailleurs ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Expliquez-vous .................................

.....................................................

 

Q 213

Dansl'Eglise catholique, on note l'existence de certains mouvements charismatiques qui prient avec des personnes en difficultés, en connaissez-vous ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si oui lesquels ? .................................

......................................................

.....................................................

 

Q 214

Les services qu'ils rendent sont-ils utiles à la communauté ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Expliquez-vous ..................................

......................................................

......................................................

 

SECTION III : LES BESOINS EXISTENTIELS ET SPIRITUELS DES FIDELES

Q 301

A qui vous adressez-vous pour des problèmes que vous n'arrivez pas à résoudre par vous-même ?

Prêtre ......................................... 1

Prêtre exorciste ............................. 2

Responsables de groupe de prière ...... 3

Autres (à préciser) ......................... 4

 

Q 302

Obtenez-vous satisfaction ?

Toujours ......... 1 ; Souvent ........... 2

Parfois ............ 3 ; Rarement ......... 4

Jamais ............. 5

 

Q 303

Avez-vous une fois consulté une autre autorité en dehors de votre Eglise pour un problème ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si non,

Q 306

Q 304

Quel est le titre de cette personne ?

Prêtre ou prêtre exorciste .............. 1

Pasteur ......... 2  ; Médecin ........ 3

Maître spirituel ou gourou ............ 4

Guérisseur ou tradi-praticien .......... 5

Autres (à préciser) ....................... 6

 

Q 305

Avez-vous obtenu satisfaction ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

 

Q 306

Quelles dispositions prenez-vous contre les problèmes de la vie ?

......................................................

.....................................................

......................................................

 

Q 307

Comment pouvez-vous qualifier votre assiduité à la messe dominicale ?

Chaque semaine ......................... 1

Quelques fois par mois ................. 2

Quelque fois dans l'année .............. 3

Rarement ................................. 4

Jamais ..................................... 5

 

Q 308

Quelles sont les raisons qui justifient votre assiduité à la messe ?

Adorer Dieu ................................... 1

Se protéger contre les forces maléfiques .. 2

Rechercher la paix intérieure ................ 3

Autres (à préciser) ............................ 4

 

Q 309

Pour quelle chose avez-vous déjà sollicité la bénédiction d'un prêtre ?

Maison, moto, voiture ... 1  ; Oratoire ... 2

Objets de piété.. 3 ; Soi-même ou enfants. 4

Autres (à préciser) ............................ 5

 

Q 310

Vous est-il déjà arrivé d'utiliser les sacramentaux comme le sel bénit, l'eau bénite, l'huile sainte, les médailles, etc. ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Pourquoi .........................................

.....................................................

 

Q 311

Quelles pratiques dévotionnelles aimez-vous dans l'Eglise ?

Chemin de croix .............................. 1

Processions de Christ roi .................... 2

Pèlerinages ou Visites aux sanctuaires .... 3

Culte de la Vierge Marie .................... 4

Culte des saints .............................. 5

Autres (à préciser) ............................ 6

 

Q 312

Qu'est-ce que vous gagnez dans ses pratiques dévotionnelles ?

......................................................

......................................................

 

Q 313

Assistez-vous aux Jéricho ou aux messes de guérison ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si non

Q 315

Q 314

Que recherchez-vous en assistant à ces messes ?

......................................................

......................................................

 

Q 315

Que recherchent ceux qui assistent souvent aux messes de guérison ou aux assemblées de prière des mouvements charismatiques ?

Miracles ... 1  ; Guérison / délivrance ... 2

Protection ......... 3  ; Prospérité ........... 4

Autres (préciser) .............................. 5

 

SECTION IV : LES ENJEUX DES NOUVELLES DE RELIGIOSITE POPULAIRE

Q 401

Selon vous, pourquoi l'Eglise a-t-elle institué les messes de guérison, les Jéricho, les nuits d'adoration ?

......................................................

......................................................

 

Q 402

Pensez-vous ces différentes sortes de messe ou de dévotion, ainsi que les séances de délivrance permettent-elles à l'Eglise de soulager ceux qui souffrent dans l'Eglise et d'éviter leur départ vers d'autres Eglises ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Expliquez-vous ................................

...................................................

...................................................

 

Q 403

Les prêtres exorcistes vous semblent-ils suffisants face aux sollicitations des fidèles souffrants ?

Oui ................. 1 ; Non .................. 2

 

Q 404

Qu'attendez-vous de votre Eglise pour votre épanouissement social et spirituel ainsi que celui de tous les fidèles catholiques ?

......................................................

.....................................................

.....................................................

 

Q 405

Qu'est-ce que ces nouvelles pratiques autorisées rapportent à l'Eglise ?

.....................................................

.....................................................

 

Q 406

Etes-vous membre d'un groupe sur votre paroisse ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si oui lequel .....................................

Si non

Q 409

Q 407

De quel type de groupe s'agit-il ?

Groupe de service ............................ 1

Groupe de prière charismatique ............ 2

Autres (à préciser) ........................... 3

 

Q 408

Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans ce groupe ?

Solidarité .... 1  ; Miracles/Guérisons ... 2

Formation ...... 3  ; Retraite ........ 4

Autres (précisez-les) .................. 5

 

Q 409

Y a-t-il quelque chose que vous reprochez aux groupes de prière charismatiques ?

Oui .............. 1  ; Non ............... 2

Si oui, quoi ? ....................................

Et pourquoi ? ....................................

 

Q 410

La relation entre ces groupes de prière charismatiques et le clergé est-elle ?

Toujours bonne ... 1 ; Parfois mauvaise ...4

Pas toujours bonne ... 2

Parfois en tension ... 3

Pourquoi ? .......................................

......................................................

 

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE 2

DEDICACE 4

SIGLES ET ACRONYMES 6

LISTE DES TABLEAUX ET PHOTOS 7

RESUME 8

ABSTRACT 8

INTRODUCTION 9

PREMIERE PARTIE : LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES COMME CHAMP DE RECHERCHE DE LA SOCIOLOGIE DES RELIGIONS 12

CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHE 13

1.1. Problématique 13

1.1.1. Constats et problème central 13

1.1.2. Hypothèses : 15

1.1.3. Objectifs de la recherche 16

1.2. Délimitation thématique 16

1.3. Pertinence de la recherche 17

1.3.1. Justification du choix du sujet 17

1.3.2. Justification du choix du cadre 17

1.3.3. Pertinence sociale du sujet 18

1.3.4. Pertinence scientifique du sujet 18

1.4. Clarification des concepts 19

1.5. Quelques axes actuels de la discussion 23

CHAPITRE 2 : CADRE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE 29

2.1. Cadre de la recherche 29

2.1.1. Les caractéristiques physiques 30

2.1.2. Les caractéristiques démographiques 30

2.1.3. Les activités économiques 30

2.1.4. Les caractéristiques religieuses 31

2.2. Considérations méthodologique du travail 31

2.2.1. Modèle d'analyse 31

2.2.2. Nature de la recherche 32

2.2.3. Recherche documentaire 33

2.2.4. Sources orales 33

2.2.5. Enquête préliminaire 34

2.2.6. Enquête de terrain proprement dite 34

2.2.7. Techniques et outils de collecte de données 34

2.2.7.1. L'observation directe 35

2.2.7.2. L'entretien 35

2.2.8. Groupes cibles et échantillonnage 36

2.2.8.1. Groupes cibles 36

2.2.8.2. Echantillonnage 36

2.2.9. Dépouillement et traitement des données 37

2.2.10. Calendrier de la recherche 38

2.2.11. Difficultés rencontrées 38

DEUXIEME PARTIE : LES ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE 39

CHAPITRE 3 : L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE DANS LA DYNAMIQUE DU MARCHE RELIGIEUX 40

3.1. Effervescence religieuse au Bénin et à Cotonou 40

3.1.1. Les facteurs historiques 40

3.1.2. Le cadre juridique 41

3.2. Intensification du phénomène religieux 41

3.2.1. La quête quotidienne des besoins fondamentaux 42

3.2.2. L'insécurité spirituelle 43

3.3. Marché de la religion et quête de solution 44

3.3.1. Le marché de la religion 44

3.3.2. Les fidèles catholiques et la quête de solution aux problèmes spirituels 45

3.4. Défi des NMR et réaction de l'Eglise catholique romaine 46

3.4.1. Le défi des NMR 46

3.4.2. La réaction de l'Eglise catholique 48

CHAPITRE 4 : LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES 52

3.1. Demandes individuelles diversifiées 52

3.1.1. La bénédiction d'objets de piété, de maison, d'oratoire 52

3.1.2. Les prières de délivrance, de guérison et de protection 54

3.2. Pratiques religieuses révélant le souci de s'épanouir 55

3.2.1. Les dévotions diverses : Marie et les saints 56

3.2.2. Le pèlerinage et la visite aux sanctuaires 58

3.3. Quand la liturgie officielle fait une place aux nouvelles pratiques religieuses 59

3.3.1. Le déroulement de la messe catholique 59

3.3.1.1. La liturgie de la parole 59

3.3.1.2. La liturgie de l'eucharistie 60

3.3.2. La Messe ordinaire ou dominicale : une exigence sacramentelle 60

3.3.3. La Messe ouverte aux nouvelles pratiques religieuses : une nécessité du moment 61

3.4. Messe de guérison et Mouvements charismatiques catholiques 63

3.4.1. La messe de guérison et les veillées d'évangélisation 63

3.4.2. Les mouvements de prière charismatiques 66

3.4.2.1. Un aperçu sur les mouvements charismatiques paroissiaux 66

3.4.2.2. Les caractéristiques des mouvements charismatiques 66

3.4.2.3. Les activités des mouvements charismatiques 68

3.4.2.4. Quelques exemples de mouvements charismatiques 69

CHAPITRE 5 : QUAND LES ENJEUX DETERMINENTLES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE 71

4.1. Nouvelles pratiques religieuses comme stratégie de freiner l'exode des fidèles 71

4.1.1. Soulager la souffrance des fidèles 71

4.1.2. Délivrer les personnes qui sont sous l'emprise des esprits maléfiques 73

4.1.3. Aider les fidèles à mieux vivre leur foi 73

4.1.4. Freiner l'exode des fidèles catholiques 74

4.2. Nouvelles pratiques religieuses comme source de ressources financières 75

4.2.1. Le maintien de l'hégémonie de l'Eglise catholique 75

4.2.2. Les demandes de bénédiction requièrent des honoraires 75

4.2.3. Les réussites des délivrances font parfois pleuvoir des billets de banque 76

4.2.4. Les messes de grands rassemblements ne se passent pas de quêtes 76

4.2.5. Les pèlerinages offrent des occasions de collecte de fonds 78

4.2.6. Le commerce d'objets de piété et la littérature spirituelle fleurissent 78

4.3. Nouvelles pratiques religieuses comme opportunité d'exercice de charisme 80

4.3.1. La désobéissance à l'autorité épiscopale 80

4.3.2. La concurrence tacite entre les prêtres 81

4.3.3. La relation complexe entre clergé et laïcat 81

4.3.4. La compétition entre différents mouvements charismatiques 82

CONCLUSION 84

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 86

REFERENCES WEBOGRAPHIQUES 89

ANNEXES 91

* 1 « Ce qui retient désormais l'attention ce sont les nouvelles offres émotionnelles, pentecôtistes, évangélistes, charismatiques, etc., offres dont le succès fait pâlir d'envie les anciennes Églises constituées. » (Mbodo, 2011 ; p. 197)

* 2 « En effet, que ce soit le catholicisme tout d'abord, l'Église adventiste (...), les Assemblées de Dieu (...), puis l'Église évangélique (...) et enfin le Renouveau catholique (...), toutes ces formations religieuses [s'implantent] dans les principales villes, comme les « grains d'un chapelet » » (Perretant-Aubourg 2011, p. 186)

* 3 « Relativement autonome par rapport à la structure sociale, le champ religieux est en effet structuré par des enjeux internes et par des enjeux externes. Les positions de pouvoirs dans le champ résultent de la confrontation de la « demande religieuse (...) et de l'offre religieuse (...). Il apparaît donc que le « fonctionnement » du champ religieux est le produit d'une concurrence interne entre différentes instances (dont les principales sont l'Église, les prophètes, les sectes et les sorciers) en relation avec les lignes de force de la structure sociale.», (Dianteill, 2002)

* 4 Cicéron et Lucrèce sont cités par Willaime J.-P. (2012)

* 5 Martin Luther avait écrit 95 thèses en 1517 contre la « vertu des indulgences » (indulgences censées permettre la remise de peine de certains péchés). Mais il y avait aussi le pouvoir temporel de plus en plus hégémonique de l'Église catholique en Europe qui faisait soulever beaucoup de critiques contre les pesanteurs et les compromissions de l'appareil clérical. Les thèses de Martin Luther ont marqué le début de la Réforme, qui donne naissance aux Églises protestantes. Ce mouvement de contestation aspire à une simplification et à une personnalisation de la religion, en préconisant notamment la lecture directe de la Bible par le croyant.

* 6 Cf. INSAE, 2004, Cahier des villages et quartiers de ville. Département du Littoral

* 7 Cf. INSAE, Principaux indicateurs socio démographiques et économiques du département du littoral (RGPH4, 2013)

* 8 L'expression agnosticisme méthodologique est parfois remplacée par l'athéisme méthodologique. A ce sujet, voir Lassave Pierre « Les sociologues des religions et leur objet » in Sociologie N°2, vol. 5 | 2014, consulté le 22 février 2017 à 16h 28.

* 9 Propos recueillis par Ricardo Matalbert, in Fath, 2006, « Chercheur, citoyen et chrétien dans la cité, Sébastien Fath s'explique », Aleloo magazine [en ligne], Disponible sur : http://www.aleloo.com/journal/index.php/2006/03/17/95-chercheur-citoyen-et-chretien-dans-la-cite-entretienavec-sebastien-fath, consulté le 17 Janvier 2017 à 13h23.

* 10 Cité par Amouzouvi H. D. A., 2005, Le marché de la religion au Bénin, Verlag Dr. Köster, Berlin, 291 pages

* 11 Dans l'Église catholique, les Jéricho sont des prières de sept jours d'affilée intégrées aux messes, mobilisant beaucoup de monde, au cours desquelles les prédicateurs intercèdent pour le peuple et des prodiges se réalisent. Le nom est adopté en souvenir de la victoire remportée par Josué sur la ville de Jéricho dont il a fait le tour en prière avec le peuple juif pendant sept jours avant de la conquérir (cf. le livre de Josué, chapitre 6, dans la Bible).

* 12 Le Code du droit canonique de l'Eglise catholique n°215 stipule que « les fidèles ont la liberté de fonder et de diriger librement des associations ayant pour but la charité ou la piété, ou encore destinées à promouvoir la vocation chrétienne dans le monde, ainsi que de se réunir afin de poursuivre ensemble ces mêmes fins. »

* 13 Cf. http://www.stambroise.org/ds/rb/beninexorcisme.html, consulté le 02-11-2016 à 17h31

* 14 Manifestations extraordinaires de la puissance de Dieu se produisant sous forme de miracles ou de prodiges.

* 15 La retraite est un temps privilégié, d'une durée de quelques jours à plusieurs semaines, au cours duquel on se met en retrait de ses activités ordinaires, dans un monastère, un centre de spiritualité ou dans une maison appropriée, pour se consacrer exclusivement à la réflexion, la méditation et la prière. Mais la récollection est une retraite courte d'une durée d'un ou deux jours.

* 16Propos recueillis par Lucie Sarr (à Abidjan), le 10/01/2017 à 17h09

* 17 Au temps où le père Pamphile Fanou était encore curé de la paroisse saint Jean-Baptiste ; actuellement, il est curé de la paroisse sainte Rita depuis la dernière nomination de 2016.

* 18 Au temps où le père Jean-Eric Tchibozo était curé. A cause des déraillements dus au monde qui se draine vers cette paroisse pour les prodiges accomplis par le curé, les autorités de l'Eglise ont pris des résolutions pour l'affecter ailleurs. Il sert actuellement sur une paroisse du nord.

* 19 « Jesu agbonnon » signifie Jésus le tout puissant.

* 20 Le doyenné est une circonscription ecclésiastique regroupant un certain nombre de paroisses et ayant à sa tête un curé doyen, c'est-à-dire un prêtre qui a la paroisse la plus importante. Le vicariat, quant à lui, est un territoire composé de plusieurs doyennés, sur lequel s'étend la compétence d'un vicaire épiscopal, qui est un auxiliaire de l'évêque.

* 21 Cf. Le Code du droit canonique 1172 §1 de l'Eglise catholique qui stipule que« Personne ne peut légitimement prononcer des exorcismes sur les possédés, à moins d'avoir obtenu de l'Ordinaire du lieu une permission particulière et expresse ».






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery