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La protection du droit à la liberté à l'épreuve de la détention préventive en droit positif togolais


par P. Roger KPAKOU
Université de Parakou - Master en droit pénal et sciences criminelles 2020
  

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Paragraphe 2 : L'insuffisance de la prise en charge dans les prisons

En 2012, à l'issue de l'examen des 3e, 4e et 5e rapports périodiques combinés de l'État togolais par la commission africaine des droits de l'Homme et des peuples, la commission avait recommandé au gouvernement de « prendre toutes les mesures nécessaires en vue d'améliorer les conditions de détention et la qualité des repas servis aux prisonniers » et de « respecter les normes minimales acceptables au niveau régional et international en matière de logement des détenus152 ». En effet, il se pose un problème de prise en charge efficiente des détenus dans les prisons. Entre autres, la prise en charge alimentaire est insuffisante (A) et la prise en charge sanitaire lacunaire (B).

A. Une prise en charge alimentaire insuffisante

Au Togo, c'est l'administration pénitentiaire et de la réinsertion qui est la structure chargée de la gestion des prisons. Elle est rattachée au ministère de la justice depuis le décret n°92-40/PMRT du 12 février 1992 portant rattachement de l'Administration pénitentiaire au ministère de la justice. C'est elle qui se charge de la prise en charge alimentaire de tous les détenus. Le droit à une bonne alimentation est reconnu à tout détenu par la règle 22.1 des règles Nelson Mandela : « Tout détenu doit recevoir de l'administration pénitentiaire aux heures habituelles une alimentation de bonne qualité, bien préparée et servie, ayant une valeur nutritive suffisant au maintien de sa santé et de ses forces. Chaque détenu doit pouvoir disposer d'eau potable lorsqu'il en a besoin ». Selon le diagnostic du milieu carcéral togolais en 2019, présenté par madame KODJOLO Koudjoukalo Eugénie, chargée du suivi de la population carcérale, de

151 Observation relevée dans la recommandation 9 du volume 1 du rapport final de la CVJR

152 CADHP, Observations finales et recommandations relatives aux 3e, 4e et 5e rapports périodiques cumulés de la République du Togo, 51e session ordinaire, 18 avril - 2 mai 2012, Banjul, Gambie, § 73(xv)

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l'action sociale et de la réinsertion au Togo ; il apparait que la prise en charge alimentaire des détenus au Togo a connu des fluctuations au fil du temps. Le tableau153 se présente comme suit :

 

Budget annuel alloué à l'alimentation

Effectif moyen des

détenus

Montant quotidien alloué à la restauration de chaque détenu

Avant 2011

300 millions F CFA

4000

208 F CFA

2011

330 millions F CFA

4163

220 F CFA

2012

330 millions F CFA

4053

226 F CFA

2013

380 millions F CFA

3994

260 F CFA

2014

400 millions F CFA

4134

265 F CFA

2015

300 millions F CFA

4300

191 F CFA

Depuis 2015

300 millions

4450 à 5000

166,66 F CFA

À l'analyse, le constat est que le montant quotidien alloué à la restauration de chaque détenu (166 F CFA en 2019) est insuffisant pour offrir deux repas aux détenus par jours. Un seul repas est donc assuré aux détenus154 par jour. En 2016, la CNDH dans son rapport dans le cadre de l'examen périodique universel, soulignait au paragraphe 10 que « Les détenus sont sous alimentés tant sur le plan quantitatif que qualitatif. La ration alimentaire n'est que d'un repas par jour ». Il est évident que l'autorité publique ne fournit pas à l'administration pénitentiaire les moyens suffisants pour une bonne prise en charge alimentaire. L'administration pénitentiaire consciente de cette défaillance autorise les détenus à faire leur propre cuisine à l'intérieur des prisons avec l'aide extérieur de leurs familles. Une épicerie est d'ailleurs gérée par l'administration au sein

153 Informations fournies dans le Diagnostic du milieu carcéral togolais, DAPR, 2019

154 Détenus du genre masculin puisque les détenus du genre féminin font individuellement leur cuisine

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de la prison de Lomé. Il y est vendu des articles tels que du riz, de l'huile, du poisson, des tomates, etc. Quelques personnes de bonne volonté ainsi que des OSC apportent également aux détenus leur aide en ce sens.

Du coté des femmes détenues à la PCL, la prise en charge alimentaire s'effectue autrement. Périodiquement, l'administration leurs partages des denrées alimentaires tels que du haricot, du riz, des petits poissons, de l'huile, du gari, du piment, etc. D'après les informations obtenues auprès d'une détenue155, la prise en charge alimentaire a régressée au fil des années. Au cours des années 2014 à 2016, la répartition de la ration alimentaire aux détenues se faisait chaque quinzaine. Les denrées étaient ensuite reparties par bâtiments quel que soit le nombre de détenues. À partir des années 2017 à 2020, l'administration a réduit la fréquence des répartitions de rations alimentaires et les détenues ne recevaient plus qu'une ration par mois. De façon générale, certains besoins primaires et fondamentales tels que l'accès à l'eau potable ne sont pas garanties dans toutes les prisons. Récemment, avec l'apparition de la pandémie mondiale du COVID-19, la crise sanitaire a démontré une capacité de réaction du gouvernement togolais quant à la prise en charge alimentaire des détenus. En effet, par un communiqué en date 09 avril 2020, le ministre de la justice a annoncé la suspension des visites dans l'ensemble des treize prisons civiles du Togo, au cabanon156 et à la brigade pour mineurs de Lomé à partir du lundi 13 avril 2020157. En guise de mesures d'accompagnement, il a été observé que l'administration pénitentiaire s'est réorganisée afin d'offrir un second repas à tous les détenus dans l'ensemble des lieux de détention touchés par la restriction. Même si ces mesures ont été prises dans un contexte particulier158, c'est bien une preuve que des efforts peuvent être effectués en faveur d'une meilleure prise en charge alimentaire des détenus au Togo.

155 Au cours des visites de monitoring avec le CACIT

156 Le Cabanon est une unité de soins dédiée à la prise en charge des détenus malades de la prison civile de Lomé. Ce centre est situé au sein du Centre hospitalier universitaire Sylvanus Olympio

157 Pour prévenir la propagation du COVID-19 dans les lieux de détention, il était important de limiter les contacts avec le milieu extérieur.

158 Avec l'appui des partenaires techniques et financiers

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