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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise: une étude appliquée aux pme défaillantes du secteur agricole français.

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par Hurssel Hurssel
IAE de Lille, Université de Lille 1  - Master Recherche en Finance et Comptabilité 2017
  

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MEMOIRE DE RECHERCHE

pour l'obtention du Master II

Etudes et Recherche en Finance et Comptabilité

Année universitaire : 2016-2017

Gestion stratégique des résultats, structure de

l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude

appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

français.

Hurssel OSSIBA

Master CGAO parcours M2 MSG-ERFC

Etudes et Recherche en Finance et Comptabilité

Directeur de recherche :

Eric Séverin

Professeur des universités - HDR IAE de Lille

1

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Résumé

Pour l'obtention du Master 2 Recherche en Finance et comptabilité, il nous été demandé de rédiger un mémoire de fin de cycle. Notre sujet s'intitule : "Gestion des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole français".

En utilisant le score de Conan-Holder, les objectifs de notre étude étaient de montrer qu'il y a une gestion des résultats différenciée selon les niveaux de difficulté financière, d'étudier l'impact de la réduction des dettes sur l'ampleur de la gestion des résultats et de tester l'existence d'une complémentarité significative entre la gestion des résultats et les activités exceptionnelles sur opérations de gestion. Par ailleurs, au regard de la littérature, nous avons été conduit à présenter des hypothèses de recherche portant sur l'impact de la détresse financière sur l'association entre la structure de l'actionnariat (actionnariat concentré et familiale) et la gestion des résultats d'une part et sur l'association entre la gouvernance d'entreprise (indépendance des administrateurs) et l'ampleur de la gestion des résultats.

Nous avons trouvé qu'il existe des trajectoires différenciées de gestion des résultats en fonction des niveaux de détresse financière, ce qui traduit que l'impact de la détresse financière n'est pas monotone sur la gestion des résultats, mais qu'il existe des nuances de gestion des résultats en fonction de la gravité de la difficulté. Ensuite, nous avons trouvé que les entreprises réductrices des dettes et celles non-réductrices des dettes ont approximativement les mêmes niveaux de gestion des résultats. Enfin, nous n'avons observé aucune complémentarité entre la gestion des résultats et les activités exceptionnelles sur opérations de gestion aux différents niveaux de la défaillance financière.

Les hypothèses sur la structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et la gestion des résultats n'ont pu être testées en raison de l'absence des données.

Mots-clefs : gestion des résultats, défaillance financière, endettement, activités exceptionnelles sur opérations de gestion, actionnariat et gouvernance d'entreprise

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Abstract

In the context of obtaining the Master 2 Degree, Research in Finance and Accounting from IAE Lille, we were asked to write a memoire. Our topic is "Earnings management, ownership structure and corporate governance : A Study Applied to failing SMEs of french agricultural sector".

Using the Conan-Holder score, the objectives of our study were to show that there is a differentiated earnings management (EM) according to the levels of financial difficulty, to study the impact of the debts'reduction on the magnitude of EM and to test the existence of a significant complementarity between EM and the extraordinary (non-recurring) activities on management operations. Moreover, we were asked in literature, to present research hypotheses concerning the impact of financial distress on the association between the shareholder structure (concentrated and family shareholding) and EM, in one hand, and on the association between corporate governance (independence of directors) and the extent of EM, in other hand.

We found out there are differentiated ways in EM depending on the levels of financial distress, which means that the impact of financial distress is not monotonous on EM, but that there are nuances of EM depending on the severity of the difficulty. Then, we found that debt-reducing and non-debt-reducing companies have roughly the same levels of EM. Finally, we observed no complementarity between EM and the extraordinary activities on management operations at the various levels of the financial failure.

Hypotheses about ownership structure, corporate governance and earnings management could not be tested due to the lack of data.

Key words : earnings management, financial failure, leverage, extraordinary activities on management operations, shareholder, corporate governance.

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Remerciements

Je souhaite remercier tout d'abord l'ensemble du corps professoral de la formation M2 ERFC de l'IAE de Lille, ils m'ont permis de me constituer un bagage intellectuel pour la recherche en comptabilité et en finance. Ensuite, mes remerciements vont à l'endroit de mon Directeur de Mémoire le professeur Éric Séverin pour avoir accepté de suivre ce travail. Ces conseils m'auront été d'une aide importante, tant sur le niveau de la rédaction que sur le plan méthodologique.

Je tiens à remercier l'Agence Nationale des Bourses du Gabon et Campus France pour m'avoir permis de suivre cette formation en France.

Enfin, un grand merci à ma mère qui m'a soutenu et qui n'a ménagé aucun effort pour que je réussisse.

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Liste des sigles et abréviations

GRAR : Gestion des résultats par l'activité réelle

GRA : Gestion des résultats par les accruals

GR : Gestion des résultats

PEX : Produits exceptionnels sur opération de gestion

CEX : Charges exceptionnels sur opération de gestion

TA : Théorie de l'agence

TCA : Théorie comportementale de l'agence

DAC : Discretionary accruals (Accruals discrétionnaires)

ACF : Abnormal cash-flows (Cash-flows anormaux)

APROD : Abnormal production (production anormale)

RN : Résultat Net

TAIL : Taille

CA : Conseil d'administration

CEO : Chief Executive Officer (Directeur Général)

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Liste des figures

Figure 1 : Forme de la distribution des résultats au seuil des variations nulles des résultats. 40

Figure 2 : Grille de lecture de la santé financière de l'entreprise 50

Figure 3 : Processus économique entrainant à la discontinuité financière 51

Figure 4 : Situation et trajectoire des entreprises dans une approche matricielle 53

Figure 5 : Matrice BCG (croissance du marche et part de marché relative) 55

Figure 6 : Représentation des trajectoires des médianes des variables de GR 91

Figure 7 : Représentation des niveaux de GR (les moyennes en valeurs absolues) 92

Figure 8 : Représentation du voisinage de l'ampleur de la GR entre les entreprises défaillantes

réductrices et non-réductrices des dettes. 93
Figure 9 : Représentation de la GR par les accruals sous l'hypothèse de la réduction des dettes

94
Figure 10 : Représentation de la GR par les cash-flows anormaux sous l'hypothèse de la

réduction des dettes 94
Figure 11 : Représentation de la GR par la production anormale sous l'hypothèse de la

réduction des dettes 95
Figure 12 : Histogramme de significativité des coefficients des variables des entreprises

faiblement défaillantes 102
Figure 13 : Histogramme de significativité des coefficients des variables des entreprises

fortement défaillantes 102

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Liste des tableaux

Tableau 1 : Confrontation des hypothèses de la TA et TCA 17

Tableau 2 : Les caractéristiques des deux modalités de gestion des résultats 31

Tableau 3 : Les différentes méthodes d'estimation des accruals discrétionnaires 33

Tableau 4 : Critères comptables de classification des entreprises en détresse financière 60

Tableau 5 : Quelques études relatives à la gestion des résultats et à la défaillance financière 74

Tableau 6 : Les statistiques descriptives des variables de GR en valeurs 89

Tableau 7 : Les statistiques descriptives des variables de GR en valeurs absolues 89

Tableau 8 : Différence de l'ampleur de GR entre les entreprises réductrices et non-réductrices

des dettes (en moyenne) 93

Tableau 9 : Statistiques descriptives des variables des régressions linéaires multiples 100

Tableau 10 : Matrice de corrélation des coefficients des variables indépendantes et

dépendantes du panel des entreprises faiblement défaillantes 101
Tableau 11 : Matrice de corrélation des coefficients des variables indépendantes et

dépendantes du panel des entreprises fortement défaillantes 101
Tableau 12 : Tableau des régressions linéaires du panel des entreprises faiblement défaillantes

103
Tableau 13 : Tableau des régressions linéaires du panel des entreprises fortement défaillantes

104

7

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Sommaire

Sommaire 7

Introduction générale 9

Les questions de recherche 10

Première partie : Cadre théorique 13

Revue de la littérature sur la gestion des résultats et la défaillance financière 14

Chapitre 1 : La gestion stratégique des résultats 14

Section 1 : Les fondements théoriques de la gestion des résultats. 14
Sous-section 1 : La théorie de l'agence, théorie comportementale de l'agence et la théorie de la réglementation :

un cadre explicatif de la gestion des résultats. 15

1. La théorie de l'agence (« standard agency framework ») et la gestion des résultats 15

2. La théorie comportementale de l'agence (« behavioral agency theory »). 16

3. La gestion des résultats au regard de la théorie de l'agence 18

4. La théorie de la réglementation 19

Sous-section 2 : La gestion des résultats à l'aune de la théorie positive de la comptabilité 20

1. La théorie positive de la comptabilité et la gestion des résultats. 20

2. Les principales critiques de la théorie positive de la comptabilité 25

Section 2 : L'approche définitionnelle et les estimations de la gestion stratégique des résultats 26

Sous-section 1 : Approche définitionnelle de la gestion stratégique des résultats 26

1. La gestion des résultats : une pluralité de définitions. 26

2. L'approche managériale de la gestion des résultats 28

3. Conception comptable et financière de la gestion des résultats 29

Sous-section 2 : Approche estimatoire de la gestion des résultats 31

A. La gestion des résultats par les accruals 31

1. La classification des accruals en fonction de leurs natures. 32

2. Les modèles naïfs : l'estimation des accruals normaux par une moyenne des accruals totaux 33

B. La détection des manipulations comptables par la distribution des résultats. 40

C. La gestion des résultats par l'activité réelle : les cash-flows anormaux et la production anormale 41

D. Le lissage des résultats : définition et détection 42

Chapitre 2 : La détresse financière 45

Section 1 : La défaillance financière : une revue des principaux déterminants 45

Sous-section 1 : Introduction au concept de détresse financière 45

1. Conceptions économiques et financières de la défaillance financière 45

2. Conceptions juridiques et traitement des entreprises défaillantes. 47

Sous-section 2 : Les déterminants de la défaillance financière. 49

Section 2 : La relation entre la comptabilité et la défaillance financière et le lien entre la gouvernance

d'entreprise et la détresse financière. 57

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Sous-section 1 : Le lien entre comptabilité et défaillance financière, et les indicateurs comptables et financiers de

la détresse financière. 57

1. Le lien entre la comptabilité et la défaillance financière 57

2. Quelques indicateurs comptables et financiers de la détresse financière 58

Sous-section 2 : La structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et la détresse financière 60

A. La structure de l'actionnariat et la détresse financière 60

B. La gouvernance d'entreprise et la détresse financière 61

1. La mauvaise gouvernance d'entreprise comme déterminant de l'état de la détresse financière. 61

2. Les effets de la détresse financière sur la gouvernance d'entreprise. 62

Chapitre 3 : Discussions et hypothèses de recherche 64

1. Les niveaux de défaillance financière et l'existence des trajectoires de gestion des résultats 64

2. L'ampleur de l'endettement et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes 68

3. La complémentarité entre les opérations exceptionnelles et la GR dans les entreprises en défaillance

financière. 70

a. L'existence d'une complémentarité entre les produits exceptionnels et la gestion des résultats dans les

entreprises défaillantes. 70

b. L'existence d'une complémentarité entre les charges exceptionnelles et la gestion des résultats dans les

entreprises en difficulté financière 70

Deuxième partie : Cadre méthodologique et empirique 83

A. L'Echantillon et méthode de classement des panels 84

B. La mesure des variables de l'étude 84

1. La mesure de la gestion des résultats 84

2. La réduction de l'endettement 85

3. La complémentarité entre les produits et charges exceptionnels et la gestion des résultats dans les

entreprises en difficulté. 85

C. Les résultats, interprétations et limites 85

1. La gestion des résultats différenciée selon les niveaux de difficulté financière. 85

2. Les effets de la réduction de l'endettement sur la gestion des résultats des entreprises défaillantes. 92

3. Les activités exceptionnelles et la gestion des résultats dans les entreprises en difficulté financière. 95

4. Les limites de l'étude 98

Conclusion 105

Table des matières 106

Annexes 110

Bibliographie 119

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Introduction générale

La gestion des résultats est un ensemble de dispositions normatives laissant au dirigeant la « discrétion » d'interférer sur les résultats comptables, traditionnellement au travers de la comptabilité d'engagement. Cette intervention peut s'assortir d'un effet marginal ou haussier sur les bénéfices publiés. La définition la plus courante est celle de Shipper (1989), qui l'interprète comme « une intervention délibérée dans le processus de présentation de l'information financière dans le but de s'approprier des gains personnels ». Ainsi, la gestion des résultats est un instrument au service de la maximisation de l'utilité des parties prenantes, dont les principaux sont les dirigeants et les actionnaires.

Rappelant que la gestion des résultats renvoie couramment à la manipulation de deux variables (qui sont les composantes comptables du résultat définitif). La première a trait aux activités réelles, à savoir les opérations d'exploitation, de financement et d'investissement. La deuxième variable, plus discrète et difficilement mesurable, concerne la gestion délibérée et personnelle du résultat, appelée : gestion du résultat par les choix comptables ou accruals.

Par ailleurs, les scandales financiers, à l'image des crises financières qui ont prévalu au début des années 2000 (Enron, Worldcom et Tyco) ont concerné avant tout la nature de la qualité de l'information financière publiée et la capacité des dirigeants à modifier le sens des résultats comptables et financiers.

Ainsi, les faibles résultats et l'échec pourraient inciter les dirigeants à manipuler les résultats comptables pour maintenir leurs activités et continuer à bénéficier des financements, et ce en dépassant frauduleusement les limites autorisées dans les manipulations comptables (Dechow, 2010). C'est ainsi que nous nous sommes intéressés à la détresse financière, notamment dans sa capacité à modifier les pratiques de gestion des entreprises.

De plus, la gestion de résultat se trouve engager dans ce débat du fait qu'elle explique la manière dont les résultats sont affectés et elle s'articule très bien dans la problématique de la responsabilité des dirigeants dans l'émergence des situations de détresse financière (Salloum et Azoury, 2010).

Plusieurs études ont traité de l'association entre la gestion des résultats et la performance financière. Mard (2004) observe qu'il existe une gestion des résultats différente selon qu'on soit dans les entreprises sous-performantes et dans les entreprises qui ont une variation positive ou lisse de leurs résultats. Il expose les raisons qui expliquent une gestion des résultats à la

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

hausse, en distinguant la volonté d'éviter les pertes aux choix délibérés de gérer les résultats pour « éviter » une baisse.

De manière plus précise, la détresse financière impacte la gestion des résultats des entreprises en difficulté financière par les modes de GR (Campa et Camacho-Minano, 2015), ) et par l'ampleur (Rodriguèz-Pérez et van Hemmen, 2010 ; Filip et Raffournier, 2015). Elle altère également l'éthique indispensable dans les pratiques de gestion des résultats (Perols et Lougee, 2011).

Premièrement, en considérant que la détresse financière est un concept graduel, les études précédentes n'ont pas suffisamment nuancé l'impact des niveaux la détresse financière sur la gestion des résultats. Ainsi, nous nous proposons de montrer que la gestion des résultats suit des trajectoires différentes en fonction des niveaux de défaillance financière.

Deuxièmement, la détresse financière étant susceptible de bouleverser les comportements des principaux acteurs et les politiques financières, nous nous proposons d'étudier l'association entre la gestion des résultats, d'une part, la gouvernance et l'actionnariat pendant cette période, d'autre part.

Plus précisément, l'actionnariat concentré et l'actionnariat familial étant traditionnellement décorrélés de la gestion des résultats, nous supposons qu'en période de détresse financière, le défaut de l'entreprise est susceptible de modifier cette relation.

S'agissant de la gouvernance, nous souhaitons étudier l'association entre l'indépendance du conseil d'administration et l'ampleur de la gestion des résultats aux différents niveaux de détresse financière.

Les questions de recherche

L'ampleur de la gestion des résultats n'est pas la même selon les profils financiers des entreprises. Les faibles performances peuvent influencer l'ampleur de la gestion des résultats. Mard (2003) conclut, à partir des distributions des résultats, que la GR à la hausse vise à éviter des pertes. Par ailleurs, Mard (2004) observe que les basses performances coïncident avec les niveaux les plus élévés d'accruals discrétionnaires. Cependant des études montrent des résultats contradictoires et précisent qu'en période de détresse financière, la gestion des résultats s'amenuise (Filip et Raffournier 2014). Ainsi, nous nous évertuerons à montrer que le niveau de la détresse financière affecte l'ampleur de la gestion des résultats, c'est l'objet de notre

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

première question de recherche. Nous utiliserons les mesures de gestion des résultats par les accruals et par l'activité réelle.

Question 1 : La gestion des résultats des entreprises est-elle différenciée selon les niveaux de difficulté financière ?

Modalité de gestion des résultats : accruals discrétionnaires, cash-flows anormaux et production anormale.

Les principales études se sont intéressées à montrer la relation entre l'ampleur de l'endettement et la GR des entreprises, et notamment des entreprises sous-performantes. Nous nous proposons de voir si la réduction de l'endettement des entreprises faiblement défaillantes conduit inéluctablement à une gestion des résultats différenciée.

Question 2 : En situation de détresse financière, la réduction des dettes modifie-t-elle l'ampleur de la gestion des résultats ?

Modalité de gestion des résultats : accruals discrétionnaires, cash-flows anormaux et production anormale.

La gestion des résultats dans les entreprises en difficulté nous a emmené à étendre notre réflexion sur les charges et produits exceptionnels sur opérations de gestion (créances irrécouvrables et produits de cession d'actifs, ...). Ainsi, sachant que la gestion des résultats se fait également par ces comptes (Mard, 2006), nous nous sommes intéressés à étudier l'existence d'une complémentarité entre ces activités et la GR dans le cas précis des entreprises nouvellement défaillantes. Ainsi, notre question de recherche s'énonce comme suit :

Question 3 : Les entreprises en difficulté financière utilisent-elles les activités exceptionnelles pour compléter la gestion des résultats ? Si cette complémentarité est prouvée, est-elle différenciée selon les niveaux de difficulté financière ?

Enfin, la structure de l'actionnariat et la gouvernance d'entreprise ont des effets mitigés sur les pratiques de gestion des résultats. L'actionnariat familial, la concentration de l'actionnariat et l'indépendance du CA ont traditionnellement des effets réducteurs sur les pratiques de gestion des résultats. C'est fort de cela que nous introduisons la dernière question de recherche :

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Question 4 : La détresse financière modifie-t-elle les effets de la structure de l'actionnariat et de la gouvernance d'entreprise sur l'ampleur de la gestion des résultats comptables ?

Notre mémoire se compose de deux grandes parties. Dans une première partie, nous présenterons la littérature portant sur la gestion des résultats et la défaillance financière. Puis nous résumerons les principales discussions liant gestion des résultats, défaillance financière, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise, dans le but de construire nos hypothèses de recherche. Dans une deuxième partie, nous procéderons à la présentation des méthodologies utilisées, les principaux résultats et leurs interprétations.

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Première partie :

Cadre théorique

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Revue de la littérature sur la gestion des résultats et la défaillance

financière

Dans le but de mieux cerner notre sujet d'étude, nous avons procédé à une revue de la littérature sur les fondements théoriques et les principaux concepts avant de développer les différentes discussions qui préciseront nos hypothèses de recherche.

Chapitre 1 : La gestion stratégique des résultats

La gestion des résultats procède d'un champ d'étude vaste qui est celui de la démarche politico-contractuelle. La théorie de l'agence et la théorie de la réglementation contribuent efficacement à expliquer les rapports entre les parties prenantes, en fournissant des outils de compréhension des mécanismes de gouvernance et des pratiques comptables qui y sont effectuées.

Section 1 : Les fondements théoriques de la gestion des résultats.

La GR procède d'une dimension théorique qui part des prédictions de la théorie de l'agence à celles de la réglementation. Elle est, au sens de la théorie de l'agence, une pratique qui vise avant tout à la maximisation de l'utilité des parties prenantes de l'entreprise (dirigeants et actionnaires). Bien que ses effets aient été vivement critiqués, l'apport de la GR sur la structure financière des entreprises est mitigé du fait que certaines études ont démontré que l'impact de la GR est nul à terme sur la composition des résultats. En effet, la propriété d'auto-dénouement et le principe de non compensation viennent soutenir la complexité existante quant aux effets de la GR sur le les performances comptables (JeanJean, 2001 et Roychowdhury, 2006). Cependant d'autres études tendent à mettre en exergue le caractère opportuniste de la GR et ses effets néfastes, s'agissant des fraudes et des scandales financiers (Dechow et al., 2011).

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Sous-section 1 : La théorie de l'agence, théorie comportementale de l'agence et la théorie de la réglementation : un cadre explicatif de la gestion des

résultats.

1. La théorie de l'agence (« standard agency framework ») et la gestion des

résultats.

La théorie de l'agence conçoit l'entreprise comme une « fiction légale » prise comme une « coquille vide » sensée accueillir « l'ensemble des relations contractuelles entre individus » (Chalayer-Rouchon, 1994). Cette définition cadre avec le postulat de la théorie de l'agence de par Jensen et Meckling (1976). Ces derniers proposent une lecture composite de la firme en déduisant qu'elle est un « lieu de réalisation d'un processus complexe » servant à un « équilibre » entre les différents intérêts des parties dans un cadre purement « contractuel ». Cette théorie conclue également que le système de coordination des activités au sein d'une firme s'appuie sur un lien de « délégation » et sur des relations de « mandat » (Casta, 2009). La firme s'apparenterait à un résultat de compromissions et à un équilibre des différentes parties. Rappelant que les auteurs définissent le principe de mandat par la relation entre un mandant (ou principal) et un mandataire (ou agent). Les nombres comptables ont ipso facto le rôle de garantir le suivi des contrats (Casta, 2009).

La théorie de l'agence présente des hypothèses qui étayent les biais comportementaux des dirigeants, dont l'ultime finalité vise à maximiser leurs profits, d'une part, et allouer de manière efficiente les ressources mises à leurs dispositions, d'autre part.

A cet égard, Chalayer-Rouchon (1994) précise que les individus auront des velléités à « profiter » des insuffisances des contrats pour maximiser leurs « utilités ». Le résultat comptable peut donc être conçu comme le reflet soit d'un compromis d'ensemble soit de l'expression comptable de l'utilité du mandataire.

Manne (1965) et Fama (1980)1 aboutissent unanimement à la conclusion selon laquelle les dirigeants ont un caractère discrétionnaire en interférant sur la structure des résultats. Lesquels résultats déterminent pour les dirigeants des moyens d'éviter une éviction inopportune et de s'assurer une rémunération en fonction des performances comptables et financières. Ces deux moyens contraignent le dirigeant à manipuler les résultats pour maximiser son utilité.

1 Cité par Chalayer-Rouchon (1994) dans `' lissage de résultat et théorie politico-contractuelle».

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Par ailleurs, la maitrise du risque est au centre de la relation d'agence. Pour le principal (actionnaire) le risque est une variable neutre en raison de la diversité d'activités qui fondent son portefeuille. Par contre, pour l'agent (dirigeant) le risque est une variable sensible à prendre en compte dans les décisions engageant l'entreprise (investissement, financement et gestion du BFR). Palliam et Shalboub (2003, p.78) identifient le mécanisme de gestion des résultats en deux principaux point : (a) le jugement (c'est-à-dire la façon dont le dirigeant procède à l'actualisation des flux et des actifs à long terme, les obligations au titre des prestations de retraite et autres avantages postérieurs à l'emploi, les impôts différés et les pertes découlant de créances irrécouvrables et de dépréciations d'actifs, le jugement dans la gestion des niveaux des stocks, le « timing » des expéditions, les méthodes d'inventaires et les politiques relatives aux créances) et (b) les méthodes comptables (e.i les méthodes d'amortissement linéaire ou accéléré, les méthodes d'évaluation des stocks comme le FIFO, LIFO ou CMUP). Palliam et Shalboub (2003, p.75) concluent que « les agents ont une sécurité et un revenu qui sont inextricablement liés à une entreprise ».

L'agent est dépositaire de l'autorité que lui confère le principal dans la gestion courante des activités. C'est fort de cela, que le dirigeant use de cette latitude dans la conception des nombres comptables. Si le cadre conceptuel promeut l'utilisation des « bonnes pratiques comptables », il n'est pas exclu que le cadre conceptuel légal permet aux fournisseurs des états financiers d'altérer le sens exact des performances réalisées. Palliam et Shalboub (2003, p. 78) arguent qu'il est « difficile de tenir la ligne des bonnes pratiques comptables lorsque les agents opèrent dans la `'zone grise» entre `'la légitimité» et `'la fraude pure et simple» ».

2. La théorie comportementale de l'agence (« behavioral agency theory »).

A la suite de la théorie comportementale de la firme (Cyert et March, 1965 et March, 1981 et 1994)2, l'exploration des nouveaux champs de validation des hypothèses classiques de la théorie de l'agence a vu naitre la théorie comportementale de l'agence (notée TCA). Cette nouvelle approche vise essentiellement à approfondir la compréhension des liens qui existent entre le principal et l'agent. Au contrepied de la monotonie des incitations, la TCA vient élaborer des « micro-fondations » sur l'hypothèse de rémunération des dirigeants (Pepper et

2 Cette théorie qui rompt avec la conception classique de la firme et promeut la recherche des heuristiques de décision des principaux acteurs de la firme.

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Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Gore, 2015, p. 1045). Les fondamentaux de la TCA sont présentés comme étant « plus réalistes » que ceux énoncés par la TA. Pepper et Gore (2015, p. 1046) formule que « cette théorie place la performance de l'agent au centre du modèle d'agence » et que « les intérêts des actionnaires et des agents sont plus susceptibles d'être alignés si les cadres sont motivés à effectuer leur travail au mieux de leurs capacités ». La TCA se présente donc comme une grille de lecture plus pertinente des heuristiques de décision des parties prenantes. Par ailleurs, la TCA se propose de « réévaluer » de manière générale les hypothèses comportementales qui sous-tendent la théorie de l'agence. C'est à cet égard que la TCA fournit un « modèle de l'homme économique » fondée sur « la rationalité limitée ». Cette démarche comprend (i) les préférences au risque, (ii) l'actualisation, (iii) l'aversion à l'inégalité et (iv) le compromis entre la motivation intrinsèque et extrinsèque (Pepper et Gore, 2015, p. 1045).

Tableau 1 : Confrontation des hypothèses de la TA et TCA

Hypothèses

Théorie de l'agence

Théorie comportementale de l'agence

Préférence du
risque du
`'principal».

Les dirigeants sont neutres en
termes de risque.

Comme pour la théorie de l'agence.

Fonction d'utilité
du dirigeant

Les agents recherchent les

rentes; L'utilité des agents est

positivement associée aux

incitations pécuniaires et

négativement associée à

l'effort.

comme la théorie des agences, mais

soumise aux contraintes liées à la
rationalité, la motivation, la perte, le risque, l'incertitude et les préférences temporelles

Rationalité de
l'agent

Les agents sont rationnels

Les agents sont limités rationnellement,

c'est-à-dire la rationalité des agents
dépend de leurs pouvoirs à recevoir,

stocker, récupérer et traiter des
informations sans erreurs.

La motivation de
l'agent

Il n'y a pas de motivation de
l'agent sans incitations `'non-
pécuniaires».

La motivation est à la fois intrinsèque et extrinsèque ; Intrinsèque et extrinsèque ne sont ni indépendants ni additifs

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française.

La préférence du
risque de l'agent.

Les agents sont averses au
risque.

Les agents sont averses à la perte en dessous d'un point d'inflexion gain / perte; Autrement, risque aversion.

Les préférences
temporelles de
l'agent

Les préférences temporelles
des agents sont calculées en
fonction d'un facteur
d'actualisation exponentiel.

Les préférences temporelles des agents sont calculées en fonction d'un facteur d'actualisation hyperbolique.

La préférence des
agents pour un
salaire perçu
équitable.

Non défini.

Les agents sont averses à l'inégalité.

Source : Pepper et Gore, Behavioral Agency Theory : New Foundations for Theorizing About Executive Compensation, 2015, p. 1050.

3. La gestion des résultats au regard de la théorie de l'agence : entre opportunisme

et caractère bénéfique

`'La gestion des résultats a-t-elle un caractère strictement opportuniste ou au contraire
est-elle bénéfique ? `'

Depuis les faillites d'Enron et Worldcom, la GR est décriée comme étant à l'origine de nombreux scandales financiers aux Etats-Unis. Plusieurs études ont tenté de mettre en exergue les causes de ces phénomènes. A la différence des marchés boursiers (où les bulles spéculatives sont le reflet d'un ensemble de facteurs endogènes et exogènes), les faillites relatives à la comptabilité financière sont exclusivement liées aux déclarations frauduleuses des nombres comptables (performances comptables et estimations des comptes de régularisation).

S'agissant des effets réels de la GR, il existe deux présupposés, à savoir que la GR peut être bénéfique parce qu'elle améliore l'information des résultats, en transmettant l'information privée aux actionnaires et au public, et un autre présupposé, avec les scandales financiers qui représentent des cas flagrants de gestion opportuniste des résultats. L'idée selon laquelle la GR est une pratique opportuniste a aidé à l'élaboration des réglementations visant à atténuer son influence sur la structuration des déclarations comptables. Le caractère opportuniste de la gestion des résultats vise essentiellement à maximiser l'utilité du dirigeant au détriment des

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actionnaires, Jiraporn et al. (2008, p. 623) étayent qu'un « désalignement des incitations des gestionnaires et des actionnaires pourrait inciter les gestionnaires à utiliser la flexibilité offerte par les principes comptables pour gérer les revenus de façon opportuniste, créant ainsi des distorsions dans les résultats déclarés ».

En outre, des études ont démontré le rôle bénéfique de la GR, en retenant l'argument de « la divulgation de l'information privé » au profit des actionnaires et du public (Arya, Glover et Sunder, 2003, Demski, 1998, Guay, Kothari et Watts, 1996, Healy et Palepu, 1993, Holthausen, 1990, Subramanyam, 1996). La disparité des résultats portant sur l'effet de la GR rend difficile la tentative de compréhension du coût réel de cette pratique sur la structure financière des entreprises. Jiraporn et al. (2008) se propose de « distinguer les utilisations opportunistes et bénéfiques de la gestion des résultats » (p.623). Leur démarche s'articule sur l'étude de l'ampleur des coûts d'agence et l'étendue de la GR.

4. La théorie de la réglementation

La théorie de la réglementation, dans une perspective de gestion des résultats, décrit un cadre explicatif des différentes contraintes qui emmènent les agents à s'aligner sur des directives légales, dans le but de rendre compte de façon objective des opérations comptables et financières effectuées. On peut donc déduire que les normes comptables et les différentes dispositions légales en matière de gestion comptable et financière découlent de la théorie économique de la réglementation.

Partant du constat de l'asymétrie d'information, la théorie de la réglementation adosse aux dirigeants la nécessité d'encadrer l'enregistrement des flux et la reddition des comptes. Les arguments retenus pour justifier l'intérêt de cette théorie, dans la gestion stratégique des résultats, concernent le constat récurrent de la flexibilité des procédures comptables (différentes méthodes comptables) et le manque d'objectivité de la comptabilité (évaluation du montant des créances par exemple) (Chayaler-Rouchon, 1994).

A l'échelle macroéconomique, la théorie de la réglementation établie un équilibre entre les différents intérêts des parties au sein d'une économie3. Partant de ce postulat, la réglementation comptable chez Watts et Zimmerman (1986) se décline comme une procédure comprenant en son sein la maximisation de l'utilité de certains acteurs, dont le pouvoir de pression est le plus

3 De Watts et Zimmerman (1986) cité par Chalayer-Rouchon (1994).

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important. La réglementation comme norme se présente donc sous un angle beaucoup plus arbitraire et partisan et ne saurait donc être objective. Chalayer-Rouchon (1994) poursuit cette assertion en arguant que les procédures comptables sont le résultat de pressions politiques exercées par les différents groupes concernés par les états financiers de la firme.

En insistant sur le caractère politisé du cadre conceptuel, Casta (2009) retient que les nombres comptables, en l'occurrence le résultat comptable et les capitaux propres, sont un « argumentaire technique utilisé par les politiciens auprès des électeurs ».

Par ailleurs, la théorie de la réglementation s'articule sur l'analyse du point saillant qui compose les individus en groupe homogène. Lequel cherche avant tout les modalités les plus opportunistes dans le transfert des richesses. Ce caractère partial de la réglementation fait par exemple que dans l'établissement des normes comptables, le rapport coûts/bénéfices du groupe dont le rapport de force le plus élevé sera l'argument incitateur dans la ratification d'une norme par l'instance régulatrice. La normalisation ou la réglementation parait de ce fait être un ensemble d'instruments politiques détenu par un groupe d'individus aux objectifs bien déterminés au détriment d'autres acteurs.

La gestion des résultats obéit à une double exigence. D'une part, l'exigence de satisfaction des parties prenantes de l'entreprises et, d'autre part, la nécessité de la reddition des comptes la plus objective au regard des opérations contractuelles effectuées par la firme.

Sous-section 2 : La gestion des résultats à l'aune de la théorie positive de la

comptabilité

1. La théorie positive de la comptabilité et la gestion des résultats.

Au départ purement normative, la recherche en comptabilité, au travers de l'école de Rochester, a entrepris une approche dite « positive » afin de justifier , d'une part, la pertinence des modèles d'estimation des phénomènes comptables et d'élargir le champ de cette matière aux réalités sociales, économiques et financières qui la fondent, d'autre part.

Nous pouvons noter que la théorie positive de la comptabilité telle qu'énoncé par Watts et Zimmerman (successivement en 1978, 1979, 1986, 1990) accorde un intérêt majeur à l'explication empirique des pratiques comptables, en superposant à cette réalité des biais

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comportementaux des fournisseurs des nombres comptables. On regroupe cette démarche dans l'évaluation empirique de l'utilité décisionnelle des données comptables (Ball et Brown, 1968)4.

La théorie positive de la comptabilité s'est proposée d'établir une cartographie des comportements empiriquement validées et constitutive d'une théorie générale de l'élaboration des états financiers par les entreprises (Casta, 2009). Les déterminants de cette théorie concernent exclusivement : (a) l'étayement des facteurs associés aux choix comptables, (b) les motivations managériales dans l'élaboration des données comptables et (c) la prévision des choix comptables des dirigeants au regard des caractéristiques des entreprises.

1.1. Les hypothèses de la théorie positive de la comptabilité en matière de gestion de résultat.

La théorie positive de la comptabilité émet trois hypothèses. D'abord, l'argument de la dette, qui précise que l'action du dirigeant en matière de GR est restreinte par des clauses d'endettement. Ensuite, l'argument de la rémunération, qui formule que la rémunération est un outil d'encadrement du caractère discrétionnaire du dirigeant, qui opterait naturellement pour des gains personnels (développé également par Schipper en 1989, en ce qui concerne la définition de la GR). Enfin, l'argument de la taille, qui précise que les grandes entreprises privilégieraient des méthodes comptables minorant le résultat au regard de l'environnement politique restrictif et instable (fiscalité et obligations sociales).

1.2. L'instrumentation des pratiques de gestion des résultats : une méthodologie par validation

empirique

La démarche visant à mesurer les comportements comptables s'articule sur la tentative d'instrumenter des variables susceptibles d'interpréter, de manière objective et non-biaisée, la variation des nombres comptables. De prime abord, ce prisme s'articule sur l'observation des variables comptables et sur l'empiricité de la théorie par des essais portant sur la réplication des modèles en procédant à des analyses économétriques sur des panels d'entreprise.

4 Ball et Brown initie les études d'événement dans une perspective de compréhension de la formation des rendements anormaux à la publication des résultats comptables.

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Casta (2009) argue comme exemple l'instrument d'observation de la liberté des choix comptables, les accruals5. Lesquels mesurent l'incidence de la politique comptable menée par les dirigeants sur les variables calculées (provisions, amortissements, opérations de régularisation et charges à répartir).

1.3. Les coûts contractuels et les coûts politiques : des variables explicatives des choix

comptables

Chalayer-Rouchon (1994) traduit les manipulations comptables (choix comptables) par l'importance des coûts contractuels et politiques sur les transactions économiques de la firme. Ainsi, la gestion des résultats, dans une approche politico-contractuelle, résulte de la structure des coûts supportés par l'entreprise. A la suite, elle précise que les travaux empiriques menés pour expliquer les choix comptables dans une approche politico-contractuelle ont abouti à mettre en exergue trois hypothèses.

D'abord, l'hypothèse des coûts politiques, qui définit les choix comptables par les relations qu'ont les entreprises avec la puissance publique et les organismes de normalisation comptable. Dans le cadre de la comptabilité financière, il s'agit de se conformer au formalisme et aux règles comptables telles qu'énoncé par le normalisateur. Cette hypothèse nait donc de la validité de la théorie de la réglementation, et du fait que le normalisateur introduit des règles de tenue et de transactions économiques et financières entre les agents.

Zimmerman (1983) propose une mesure de l'intensité des coûts politiques par la taille de la firme. Il infère dans son étude que les entreprises les plus grandes sont beaucoup plus enclines à supporter les coûts politiques les plus importants (impôts, taxes, intéressements publics particuliers) (Chalayer-Rouchon, 1994). D'autres mesures permettent de déduire la graduation des coûts politiques subis par une firme : « l'appartenance à une industrie, la concentration de l'industrie, la part de marché de l'entreprise, l'intensité du capital, le risque systématique et la variabilité des résultats ». Des études concluent qu'à mesure que les entreprises appartiennent à ces segments, elles auront des velléités à baisser leurs résultats (Hagerman et Zmijewski (1979) et Morse et Richardson (1983).

Leuz et al.(2003) précisent que la gestion des résultats est plus importante pour les entreprises cotées dans les pays relevant du code civil que dans les pays du common law. Ce constat

5 Terme utilisé par Healy (1989), DeAngelo (1986) et Jones (1991)

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6 Les stock-options.

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disproportionnelle dans la gestion des résultats est également précisé en termes de pression institutionnelle. Dans un tout autre contexte, Ben Othman et Zeghal (2006) déduisent que les entreprises françaises gèrent leurs résultats pour minimiser les coûts politico-contractuels tandis que les entreprises canadiennes le font du fait de la pression du marché.

Ensuite, il y a l'hypothèse des rémunérations incitatives des dirigeants, qui postule que l'existence d'un contrat de rémunération variable peut justifier la gestion des résultats. Cornier et al (2006) concluent que la gestion des résultats est incitée par diverses primes dont les stocks options. Par des études de comparaisons sur des panels et des « timing », ils aboutissent au constat selon lequel à mesure que l'écart entre les résultats de l'année en cours et ceux de l'année précédente sont élevés, à concurrence les primes en stock-options sont moindres. Bien que l'hypothèse classique retienne que les clauses relatives aux contrats de rémunération des dirigeants soient une fonction croissante des manipulations comptables (au profit de l'utilité du dirigeant), des études tendent à démontrer le contraire. En effet, les analyses de Bebchuk et Frield (2003) montrent que l'hypothèse traditionnelle défendue par la théorie de l'agence est équivoque aux conclusions de leurs études, lesquelles pointent une non-convergence des intérêts des actionnaires et des dirigeants, même en présence d'un contrat de rémunération. Selon eux, les dirigeants ont des velléités à accroitre leur utilité en préservant un espace de discrétion managériale par la manipulation des résultats financiers, et cela même en recevant des stock-options.

Dans une étude récente, Huang, Huang et Shih (2012, p. 2389-2402) étudient les effets des contrats de rémunération sur les décisions d'investissement et concluent que les actions de propriété6 incitent les gestionnaires à émettre des dettes, tandis que la rémunération en prime basée sur les résultats induit une aversion à les émettre. Cette étude a mis en lumière l'association complexe entre l'existence d'un contrat de rémunération et les incitations à la gestion des résultats comptables. Les auteurs précisent qu'en général la rémunération à base de primes incite le dirigeant à accélérer l'investissement. Cependant le gestionnaire n'a aucune incitation à utiliser le financement par emprunt lorsqu'il n'est rémunéré qu'en espèces ou en primes. De même, il observe que les dirigeants recours à l'emprunt lorsqu'ils sont rémunérés à la fois en espèces et actions de propriété. Toutefois, Huang, Huang et Shih (2012) observent

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que dans la mesure où le contrat de rémunération comprend des primes en espèces, adossées aux résultats et aux actions de propriété, les dirigeants s'alignent sur les attentes des actionnaires. Les actions de propriété et les primes fondées sur le résultat ont des effets différents et même opposés sur les décisions d'investissement et de financement. Lesquelles décisions peuvent impacter la gestion des résultats comptables (variation du BFR pour les accruals et charges d'intérêts en ce qui concerne l'estimation du cash-flow anormal7).

Enfin, il y a l'hypothèse du contrat d'endettement et la place de l'actionnaire dans la gestion des résultats. A ce titre, Kelly (1983) observe que le contrat d'endettement est un mécanisme d'encadrement de la latitude discrétionnaire des dirigeants. Les « covenants »8 sont des outils de protection des créanciers contre « les éventuelles expropriations et transferts de richesses au profit des actionnaires ».

A titre d'exemple, He et al. (2017, p. 267-286) étudient la relation entre politique de dividendes et gestion des résultats. Sur un échantillon de 23 429 entreprises tirées de 29 pays, ils observent une association négative entre le statut de payeur des dividendes et la gestion des résultats. Ainsi, les entreprises qui versent les dividendes ont un intérêt à éviter de gérer les résultats. Par ailleurs, le non-versement des dividendes entraine systématiquement le paiement d'un produit privé aux actionnaires majoritaires -aux dépens des actionnaires minoritaires-. Ce produit encore appelé « `'private control benefits» ou `'avantages privés liés au contrôle» » disparait lorsque les dividendes sont versés. En procédant alors au versement des dividendes, il devient inutile de gérer les résultats pour dissimuler le versement de ces produits exceptionnels (He et al., 2017).

De plus, He et al. (2017) trouvent un lien entre politique de dividendes, gestion des résultats, d'une part, et l'accès futur au financement, d'autre part. Ils constatent qu'une politique axée sur le versement des dividendes augure une bonne gestion financière. Si les audits effectués sur les comptes de régularisation traduisent des manipulations comptables, cela pourrait jouer en défaveur des entreprises en besoin de financement (Gunny, 20109).

7 Résidu caractéristique des manipulations comptables par le cash-flow.

8 Clauses inclues dans les contrats d'endettement.

9 Cette étude met en exergue l'intérêt des contrôles des comptes de régularisation par les auditeurs et organismes de crédit.

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2. Les principales critiques de la théorie positive de la comptabilité

JeanJean (1999) distingue trois principales critiques faites à la théorie positive de la comptabilité : les critiques épistémologiques, les critiques liées au cadre conceptuel et celles liées à la validation des hypothèses.

Les critiques épistémologiques concernent la remise en cause des hypothèses énoncées par Watts et Zimmerman. En effet, le corps de critiques faites à la théorie positive de la comptabilité concerne : (a) l'ambiguïté sur la nature de la théorie de la comptabilité -s'agit-il d'une théorie positive ou normative ? -, (b) l'intérêt moindre des recherches prescriptives par rapport aux recherches normatives, (c) la complexité quant au positionnement de la théorie de la comptabilité au regard des principes d'action du cadre positiviste et (d) la remise en cause de la démarche qu'elle emprunte au regard des prescriptions des sciences, il s'agirait plutôt d'une sociologie de la comptabilité que d'une théorie positive de la comptabilité (Christenson, 1983). C'est donc le caractère de « pertinence » de la cette théorie qui est critiquée (Casta, 2009, p. 1400).

Les critiques liées au cadre conceptuel remettent en question la monotonie stricte entre l'utilité du dirigeant et la valeur actualisée des gains futurs. L'hypothèse de départ de Watts et Zimmerman sur la prédiction de l'utilité du dirigeant n'est pas toujours vérifiée. Le dirigeant peut faire montre de bonne volonté en stockant « du résultat » en prévision des éventuels résultats antérieurement déficitaires.

Les critiques sur la validation des hypothèses concernent premièrement la validité du postulat des pratiques comptables comme variable de la gestion des résultats. Les pratiques comptables ne sont pas forcément les seuls éléments flexibles du résultat. Deuxièmement, le choix d'un portefeuille de méthodes peut également être une manière d'interférer sur le résultat et par conséquent, sur l'utilité du dirigeant. (JeanJean, 1999, p. 27).

Casta (1999) argue que la « nature contingente des hypothèses » constitue une limite forte de la réplication des présupposés de cette théorie aux fins de sa validation. Il en veut pour preuve le confinement de l'empiricité de cette théorie au seul contexte nord-américain. Ainsi, l'Europe dispose de normes spécifiques qui peuvent par exemple rendre impossible la transposition de ces observations « sans précaution » ( e.i fiscalité, pratiques comptables autorisées, poids des marchés financiers, nature des entreprises -familiales ou managériales-, le type de contrôle et la place de l'Etat dans la vie sociale des entreprises).

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Section 2 : L'approche définitionnelle et les estimations de la gestion
stratégique des résultats

Sous-section 1 : Approche définitionnelle de la gestion stratégique des

résultats

Dans cette sous-section nous présenterons les diverses définitions et les modalités de la gestion stratégique des résultats

1. La gestion des résultats : une pluralité de définitions.

Deux définitions sont couramment usitées dans la littérature. La première est celle de Schipper (1989, p.92), qui définit la GR comme « une intervention délibérée du dirigeant dans le processus d'information financière externe dans le but de s'approprier des gains personnels ». La deuxième, plus récente, est celle de Degeorge, Patel et Zeckhauser (1999, p.2) qui identifient la GR comme « l'utilisation de la discrétion managériale pour influencer le résultat diffusé auprès des parties prenantes ». La première définition semble assez réductrice du fait du constat récurent de l'absence de la « monotonie stricte des incitations »10, qui déduit que les dirigeants ne sont pas toujours opportunistes en termes de choix comptables. Comme nous l'avons vu précédemment (en s'appuyant sur la théorie comportementale de l'agence), les incitations à la GR ont été débattues, notamment dans sa dimension béhavioriste. L'approche défendue par Degeorge et al (1999) rompt avec la pensée dominante héritée de l'école de Rochester et implique d'autres notions telles que la discrétion managériale et les parties prenantes, en considération des jeux d'influence entre ces derniers (Jensen, 2001)11.

Healy et Whalen (1999) comme Degeorge et al.(1999) introduisent une définition plus axée sur les « modes d'action » du manager dans la GR (Jeanjean, 2003). En effet Healy et Whalen (1999, p.386) définissent la GR comme « l'utilisation par les dirigeants de leurs latitudes

10 In incitations et contraintes de la gestion des résultats, Thomas JeanJean (2000).

11 Michael Jensen dans une critique de la théorie des parties prenantes ( value maximisation, stakeholder theory, and the corporate objective firm) considère la nécessité de rompre avec cette vision paternaliste du dirigeant ( notamment dans les allocations des ressources) et présente une remodélisation de cette théorie par un procédé qui prend en compte les autres parties prenantes de la firme.

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discrétionnaires dans le processus de comptabilité financière et dans la structuration des transactions pour modifier les états financiers soit pour induire en erreur certaines parties prenantes sur les performances réelles de l'entreprise, soit pour influencer les enjeux contractuels qui reposent sur les normes comptables ».

La « gestion des résultats » procède donc d'un champ définitionnel beaucoup plus large que la simple définition de Schipper (1989). En effet, Vidal (2011)12 pose le problème de la polysémie et de la mauvaise interprétation de la GR, en reprenant le terme de « manipulations comptables », qui n'est aucunement « péjoratif ». La GR relève de la dimension juridique du fait qu'elle désigne l'ensemble des manipulations comptables « autorisées » par le normalisateur. La frontière est donc étroite entre une GR dans le cadre de la réglementation comptable (options sur la pluralité des choix comptables légales) et une gestion frauduleuse des résultats (Dechow et ali., 2010).

Breton et Stolowy (2004) désignent la GR sous les termes de « transferts comptables de richesse, big bath accounting, nettoyage ou toilettage des comptes, habillage des états financiers ». En effet, la pluralité des formes prises par la GR est associée aux objectifs des dirigeants, à la prise en compte des pressions exogènes d'autres acteurs institutionnels (créanciers divers, banques, fournisseurs, obligataires ...) et à la pérennité de la firme.

Couramment, on admet deux types de manipulations comptables (Vidal, 2010) : les manipulations de la structure des comptes (sans altérer a fortiori le solde définitif) ou « window dressing » et les manipulations du solde définitif (résultat comptable) ou gestion du résultat. Enfin, Davidson et al. (1987) désignent la GR comme « la prise de mesures délibérées » au travers « des contraintes des normes comptables » dans le but ultime d'atteindre un seuil de résultat. Cette définition prend donc le contrepied de l'hypothèse traditionnelle de l'opportunisme des dirigeants et défend une vision plus consensuelle et sociale de la gestion des résultats, qui est censée être un mécanisme d'ajustement des résultats réels au bénéfice de la firme et de toutes ses parties prenantes. Lequel ajustement dépend du sens des manipulations comptables au regard des contingences, des obligations et du contexte qui pèsent sur la firme.

12 Revue Française de comptabilité, n°434, Juillet-Août 2010.

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2. L'approche managériale de la gestion des résultats : tentative de compréhension

d'une ambiguïté sociale

La théorie positive de la comptabilité telle qu'énoncé par Watts et Zimmerman (1986) se propose d'expliquer les principales causes et intentions qui motivent les préférences comptables des dirigeants, et les proportions discrétionnaires dont ils font montre dans la gestion des nombres comptables. La littérature concernant l'approche managériale de la gestion des résultats s'établie en termes d'incitations et contraintes. Les dirigeants adoptent des comportements en réponse à la préservation de leurs utilités mais également dans le but de satisfaire les actionnaires.

Watts et Zimmerman (1986) étayent trois grandes hypothèses qui explicitent les dispositions managériales à manipuler les résultats : (a) les managers ont des préférences à reporter les résultats futurs vers la période présente, (b) les firmes dont le levier financier est faible auront tendance à reporter les résultats futurs vers la période présente et (c) la taille non-négligeable de la firme détermine sa préférence à reporter en avant ses résultats (JeanJean, 2001).

Mard et Marsat (2012, p.13) établissent que parmi les facteurs incitatifs, et à l'instar de ceux cités précédemment, on peut retrouver les appels à l'épargne ou le changement de l'équipe dirigeante et que les contraintes liées à la gestion des résultats peuvent découler des règles comptables utilisées (normes US, IFRS ou Françaises), le système de protection légale13 et ce qu'ils nomment « les mécanismes de gouvernance »14.

Ce cadre formel -qui obéit à un schéma mental général des dirigeants- a fait l'objet de nombreuses critiques. JeanJean (2001) précise le constat récurrent de « la rupture de la monotonie stricte des incitations » à expliquer la gestion des résultats à partir du canevas traditionnel (à savoir les prédictions de la théorie positive de la comptabilité). S'agissant du contrat d'endettement par exemple, des études ont remis en cause le principe de la monotonie stricte des incitations des « debt covenants15 ». En effet, les entreprises en difficulté financière, et dont le matelas financier a défailli, auront tendance à obérer davantage leurs résultats (DeAngelo et Skinner, 1994). Les travaux de Iatridis et Kadoranis (2009, p. 164-173) montrent que les entreprises qui sont dans une situation financière difficile utilisent la GR afin

13 Les auteurs parlent indument des disparités entre le common low et code law.

14 Par référence à la qualité de l'audit, la structure de l'actionnariat et le conseil de direction.

15 e.i. les clauses contractuelles inscrites dans les contrats de dette.

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d'améliorer leurs nombre financiers d'une part et rassurer les créanciers (en capitaux propres er dettes) d'autre part. En effet, ils concluent que les entreprises qui sont en besoin de capitaux propres et dettes sont proches de la violation des clauses restrictives et qu'en considérant que la situation de telles entreprises en pâtirait sur le marché, les dirigeants seraient plus enclins à pratiquer la GR.

Healy (1985) précise que le manager ne suit pas toujours les objectifs associés à la monotonie stricte dans sa gestion stratégique des résultats. Il précise l'aspect équivoque de la gestion des résultats en présence de contrat de rémunération incitatif. En effet, dans la mesure où le résultat est élevé, il aura tendance à porter ce dernier à hauteur de son niveau maximum et si le résultat est faible (inférieur à la limite maximale), il aura tendance à davantage diminuer le résultat afin de l'augmenter les années suivantes.

3. Conception comptable et financière de la gestion des résultats

L'étude des manipulations comptables a abouti sur la modélisation de modèles économétriques mettant en exergue les effets discrétionnaires ou anormaux conscrits dans les déclarations comptables.

Avant d'approfondir la littérature relative à la GR, on peut d'ores et déjà retenir qu'elle se compose de deux principaux éléments : la gestion des résultats par les accruals (notée GRA) et la gestion des résultats par l'activité réelle (notée GRAR16).

Eisele (2012, p.15) distingue les caractéristiques propres à chacune de ces modalités de gestion des résultats en cinq (5) points : le timing, la composante du résultat affecté, le coût, les contraintes et la visibilité de la détection.

Le timing est différent selon que l'on se trouve dans une perspective de GRA ou GRAR. Dans la GRA, les opérations se font après la clôture des activités, en l'occurrence pendant l'établissement des états financiers (Roychowdhury, 2004 ; Gunny, 2010)17. Tandis que la GRAR doit être « initié à l'avance », c'est-à-dire avant la fin de l'année fiscale. Eisele (2012) précise que « les réductions des prix pour atteindre les objectifs de résultat doivent être accordées suffisamment à l'avance » dans le cadre de la GR.

16 Encore appelé gestion réelle des résultats.

17 Il est donc aisé de constater qu'il s'agit d'une approche beaucoup plus flexible que la GRAR.

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Le coût de la GR traduit les différents efforts consacrés par la direction aux « activités discrétionnaires ». Eisele (2012, p. 16) argue que le coût de la GR implique aussi la prise en compte de la « dimension des conséquences négatives sur la performance actuelle et future de l'entreprise ». Comme pour le timing, le coût de la GR est différent selon que l'on se situe dans une approche par GRA ou GRAR. Dans la GRA le coût est moindre que dans une approche par GRAR, parce que les manipulations comptables par les accruals subissent à terme un auto-dénouement (JeanJean, 2001). Il s'agit d'une gestion nulle des résultats, au sens du rapport coûts/bénéfices. Par contre, la GRAR est plus coûteuse que les manipulations par les accruals. Eisele (2012) rappelle que la modification des transactions réelles induit deux coûts : « les coûts liés à la planification des transactions et les coûts liés à la communication des écarts par rapport aux stratégies commerciales optimales ».

Dumas (2014, p.40) retient que la composante du résultat affectée par la GR a trait aux éléments sur lesquels l'interférence se portera (flux de trésorerie ou accruals). A ce titre, il rappelle que la GRA renvoie aux « choix comptables » et donc systématiquement aux produits et charges calculés (les accruals). Comme nous le verrons, la composante du résultat affectée peut aussi concerner la GRAR, dans des proportions peu ou prou importantes (Roychowdhury, 2006 ; Campa et Minano, 2015).

La visibilité de la détection : la GRA est plus aisée à détecter que la GRAR. Les instruments de détection des accruals discrétionnaires se sont largement développés depuis la première mesure des accruals normaux de Healy (1985). A l'opposé, la GRAR a été estimée en observant les seuils des résultats comptables ("seuil 0" de Burgsthaler et Dichev, 1997) puis par les mesures des effets anormaux sur les comptes d'exploitation (proxy des flux de trésorerie anormaux et proxy de la production anormale, Roychowdhury, 2006).

Les contraintes : l'environnement peut différencier l'ampleur de la GR. Dumas (2014, p. 29) illustre ce constat par le cas de l'adoption de la loi Sarbanes-Oxley (SOX) aux Etats-Unis qui a réduit la GRA (Cohen, 2008)18. Sur le plan de la culture juridique, on a pu observer que les entreprises cotées relevant des pays dont le code civil est de mis ont plus de velléités à gérer les résultats que les pays relevant du common law -où les contraintes sont plus importantes- (Leuz et al., 2003).

On pourrait ajouter une sixième caractéristique de différenciation entre la GRA et la GRAR, il s'agirait du contexte lié à la conjoncture des entreprises. En effet, des études ont démontré que

18 In Dumas (2014, p.29).

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les entreprises en période de détresse financière gèrent les résultats plus par les flux de trésorerie que par les accruals (Campa et Minano, 2015 ; Razzaque, Ali et Mather, 2016 ; Kouaib et Jarboui, 2016). Ceteris paribus, les entreprises saines auraient des tendances à manipuler leurs résultats par la GRA plutôt que par la GRAR.

Tableau 2 : Les caractéristiques des deux modalités de gestion des résultats

Caractéristiques

Gestion des résultats par
les accruals

Gestion des résultats par
l'activité réelle

Timing

Pendant l'établissement des
états financiers (après
l'année fiscale)

Pendant l'exercice
comptable (pendant l'année
fiscale)

Composante du résultat
affecté

Produits et charges calculés
(accruals)

Produits et charges ayant fait
l'objet de flux de trésorerie
et accruals

Coûts

Faible

Elevé

Contraintes

Gestion antérieure /
Auditeurs et législateurs.

Arbitrage coûts-bénéfices

Visibilité

Modéré / élevé

Faible

Source : Eisele (2012, p.29).

Sous-section 2 : Approche estimatoire de la gestion des résultats

A. La gestion des résultats par les accruals

La gestion des résultats par les choix comptables (ou accruals) découle des « changements des méthodes comptables et estimations utilisées lors de la présentation des états financiers » (Zang, 2012, p.676). Cette gestion découle de la liberté donnée aux dirigeants d'évaluer certains comptes comptables de manière discrétionnaire, tout en respectant le cadre normatif en vigueur. Cependant, la gestion des résultats par les accruals peut aussi découler d'opérations frauduleuses. Lesquelles se basent sur une gestion agressive des résultats comptables (Dechow, 2011, p.17-82). Les accruals résultent des « prescriptions des organismes de normalisation » et désignent « l'espace discrétionnaire substantiel permis par les normes comptables » (Jeanjean, 2001, p.1). Les effets des accruals sur le résultat ont fait l'objet de nombreuses études. Roychowdhury (2006, p.336) argue que ce type de gestion n'a pas d'effet sur les flux

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de trésorerie tandis que JeanJean (2001, p.5) l'entend de manière plus complexe, en retenant « la condition de non compensation ». Laquelle condition préconise qu'un élément d'accruals n'aura un effet mineur sur le résultat qu'à la seule condition qu'il existe un effet inverse de cet élément d'accruals sur les flux de trésorerie.

Par ailleurs, au-delà du débat relatif aux effets des accruals sur le résultat, la problématique de la nullité des accruals se pose. La littérature admet de manière générale que les accruals sont nuls à terme, il s'agit de la propriété d'auto-dénouement des accruals.

Par ailleurs, JeanJean (2001, p.15) argue que la GR consiste à un simple étalement de la « sécrétion » du résultat comptable et Healy (1985, p.89) conclut que l'effet majeur des accruals est de modifier « la temporalité » des résultats comptables.

Un autre aspect des accruals est son effet « mean reversion », c'est-à-dire la propriété de l'impossibilité de gérer « indéfiniment » les accruals, sur des horizons temporels longs, à la hausse ou à la baisse. Ces propriétés associées à celle de l'auto-dénouement rendent difficile l'estimation statistique de la période initiale de la gestion des résultats et des modalités de fiabilité des hypothèses de mesure des accruals.

Avant de passer en revue les différents modèles d'estimation des accruals discrétionnaires, il est nécessaire de présenter la construction logique de ces derniers par les accruals totaux et normaux, comme précisé par JeanJean (2002).

Résultat Comptablet = Flux de trésoreriet +/- Accrualst

La formule précédente aide à approcher la modalité d'estimation des accruals totaux. Il vient que les accruals totaux correspondent :

Accruals totaux (AT) = Accruals normaux (AN) + Accruals discrétionnaires (AD).

Accruals discrétionnaires (AD) = Accruals totaux (AT) - Accruals normaux (AN).

1. La classification des accruals en fonction de leurs natures.

JeanJean (2002) précise que les accruals n'ont un effet sur le résultat qu'à la seule condition que leur gestion ne produise pas un effet inverse sur les cash-flows ou sur un autre accrual.

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Toutefois, les accruals longs relevant du haut du bilan -à savoir l'actif stable- n'ont pas de contrepartie dans les cash-flows. Il reste alors les accruals courts -ceux de l'actif circulant-qui nécessitent une plus grande attention dans leurs estimations.

S'agissant des accruals nuls et non-nuls, il s'agit d'une simple déduction du principe de non compensation. Les accruals longs n'ont pas de contrepartie dans les flux de trésorerie d'exploitation, ce qui en fait a priori des accruals non-nuls. Les accruals courts sont beaucoup plus complexes. En effet, ils peuvent d'une période à une autre s'annuler, se compléter ou se réestimer dans les flux de trésorerie. Plus précisément, les accruals longs se composent des reprises et dotations aux amortissements sur immobilisation et de la production immobilisée et des accruals courts, qui se composent des dotations et reprises sur actifs circulants et de la variation de BFR.

L'estimation des manipulations comptables peut être faite en évaluant un seul accrual, c'est-à-dire en suivant son évolution et ses effets sur le résultat, ou en étudiant l'intégralité des manipulations comptables discrétionnaires, donc les accruals anormaux (JeanJean 2002). Nous obtenons le tableau qui suit :

Tableau 3 : Les différentes méthodes d'estimation des accruals discrétionnaires

Méthodes

Avantages

Inconvénients

Accruals discrétionnaires
totaux.

Mesure de la stratégie dans son ensemble

Erreur de mesure importante car modèle globalisant.

Grands échantillons

Accruals discrétionnaires
spécifiques.

Mesure fine de la gestion du résultat.

Résultat spécifiques à un secteur économique

Taille de l'échantillon réduite.

Source : Thomas JeanJean, 2002.

2. Les modèles naïfs : l'estimation des accruals normaux par une moyenne des

accruals totaux

Les premiers modèles estimatoires de la gestion des résultats, à partir des accruals, sont dits « naïfs ». En effet, les accruals normaux sont calculés par une simple moyenne des accruals totaux des années antérieures. Deux études sont des références dans l'estimation naïve des accruals, l'étude de Healy (1985) et celle de DeAngelo (1988).

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2.1. Le modèle de Healy (1985) : Les manipulations comptables par les accruals et la maximisation de l'utilité du dirigeant.

Le premier modèle d'évaluation des accruals est élaboré par Healy (1985) dans le cadre d'une étude empirique testant l'hypothèse d'agence selon laquelle les dirigeants manipulent les comptes pour maximiser leurs primes.

L'auteur décompose la performance en deux intéressements, à savoir les « bonus schemes » et « performance plans ».

RC = {Bonus schemes ; Performance plans).

S'intéressant aux seules primes, Healy (1985) établit un paramètre explicite des schémas incitatifs des dirigeants, arguant que ces derniers interfèrent sur la structure des résultats comptables pour augmenter la valeur actuelle de leurs primes.

Soit :

Bt' = Ptmax{(Et - Lt), 0).

Pour une période (t) établie, l'espérance de l'utilité du dirigeant équivaut à la maximisation de sa prime (Bt) dans la limite de la différence entre les gains déclarés (Et) et une limite minimale (Lt) en dessous de laquelle l'espérance de toute prime est nulle. L'espace discrétionnaire concerne donc l'ensemble des manipulations effectuées dans la région (Et-Lt).

Dans l'éventualité où il existerait un excédent de gain par rapport au gain cible, un plan d'intéressement (Ut') peut être considéré dans la limite de la différence entre le bénéfice réel et le bénéfice cible.

Soit :

Bt' = Pt {min{U', max{(Et - Lt), 0)11. Ainsi, Healy (1985) estime les accruals totaux comme suit :

ACCt = -DEPt - XIt. D1 + DARt + DINVt - L APt - {LTPt + Dt}. D219

In fine, il aboutit sur l'estimation des accruals normaux (NA) :

19 Désignation des termes en annexe.

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t--N

NA = 11 N Accruals_totauxk

k=t-1

L'hypothèse de base de ce modèle est que les accruals discrétionnaires sont en moyenne nuls. Ce qui suppose que l'on peut approcher les accruals normaux en faisant la moyenne des accruals totaux des années antérieures.

2.2. Le modèle de DeAngelo (1986) : la marche aléatoire des accruals 20.

Dans un tout autre contexte, DeAngelo (1986) étudie la gestion des résultats de 64 firmes ayant subi des opérations de MBO (Management Buy Out) et notamment les variations de leurs accruals et résultats nets. Le caractère opaque de la gestion des entreprises ayant fait l'objet d'opérations de MBO conduit DeAngelo à évaluer les possibles interférences sur les résultats avant lesdites opérations. Les conclusions traduisent une sous-évaluation des résultats avant les opérations de MBO.

L'approche de DeAngelo s'inspire du modèle de Healy (1985), avec la particularité de considérer le caractère aléatoire suivi par les résultats et ses composants. Il vient donc que la meilleure estimation du résultat en l'année (t) est au moins le résultat en l'année (t-1).

Soit,

Résultatt = Résultatt_1 + Et

Accrualst = Accrualst_1
ANt = ATt_1.

20 DeAngelo suppose que les résultats et les accruals suivent une marche aléatoire et qu'il est possible d'estimer les accruals discrétionnaires à partir des accruals totaux de l'année antérieur et non plus de la moyenne des accruals des années antérieurs.

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3. Les modèles économiques : la prise en compte du poids des immobilisations et

de la variation du Besoin en Fonds de Roulement (le passage du modèle de Jones de 1991 au modèle de Jones modifié de 1995).

A l'opposé des modèles naïfs, il a été considéré que les accruals prennent en compte l'effet conjoncturel des activités opérationnelles. Par ailleurs, le modèle developpé par Healy (1985) et DeAngelo (1986) sont moins précis que le modèle de Jones quant à la désagrégation et les effets des accruals discrétionnaires.

3.1. Le modèle de Jones (1991)

L'étude de Jones (1991) visait à répondre à une préoccupation des autorités fédérales américaines sur l'éventualité des manipulations comptables des sociétés bénéficiant d'allégements aux importations. L'approche défendue par cette étude était de mesurer l'ampleur de la gestion des résultats pendant les enquêtes sur les importations effectuées par ITC21. Le constat récurrent était que les entreprises d'export-import s'adonnaient à une gestion des nombres comptables afin d'obtenir des aides à l'importation et ainsi accroitre le montant de l'allégement accordé. La problématique de départ était le fait que l'ITC n'ajustait pas ses données financières au regard des procédures comptables utilisées et en fonction des décisions de comptabilité prises par les entreprises22. L'objectif poursuivi était la prise en compte de l'ajustement discrétionnaire des nombres comptables sur les nombres financiers élaborés par l'autorité de régulation.

Fort de ce constat, Jones (1991) propose d'approcher les accruals discrétionnaires par une estimation de la composante anormale des accruals totaux plutôt que par la composante discrétionnaire d'un seul accrual23. La composante discrétionnaire des accruals totaux a pour particularité de capter des différentes manipulations faites sur le résultat avant impôt. Lequel comprend les effets de tous les comptes de régularisation -utilisation des provisions-.

21 United States International Trade Commission.

22 `'Furthermore, interviews of ITC regulators indicate that the ITC does not adjust financial data for accounting procedures used or for accrual decisions made by firms» (Jennifer Jones, 1994, p 194).

23 `'which includes the effects of all accrual accounts, and, as such, managers are likely to use several accruals to reduce reported earnings.» (Jennifer Jones, 1994, p 194).

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DAt = a + (3. PART + ut + Et

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Jones (1991) argue que les accruals discrétionnaires se composent des résidus provenant des modèles classiques de prévision -soit (E)-.

Partant du modèle des accruals totaux de DeAngelo, il vient que les accruals totaux d'une période correspondent à la variation du BFR de cette période :

L ATt = (TAt - TAt-k) = (DAt - DAt-k) - (NAt - NAt-k).

A partir de cette estimation des accruals totaux, les accruals normaux équivalent à :

AN;,t = a; + (31.L CA;,t + (32. IMMOCORP;,t + Et

Les accruals discrétionnaires s'estiment donc comme suit :

Et = DAt = (TAt} - {(a; + (3i. L CA;,t + (32. IMMOCORP;,t))

Deux observations peuvent être faites au regard du modèle de Jones (1991). Premièrement, l'estimation des accruals normaux comprend la variation du chiffre d'affaires et les accruals normaux de l'actif stable (cela sous-entend donc que ce modèle exclu de ces comptes les accruals discrétionnaires). Deuxièmement, la part résiduelle Et des accruals normaux correspond aux accruals discrétionnaires des comptes estimés.

3.2. Le modèle de Jones modifié (1995) : une alternative aux limites du modèle de Jones

(1991).

Le modèle de Jones modifié (1995) est une alternative aux modèles précédents dans la mesure où ces derniers souffrent de quelques insuffisances. Dechow, Sloan et Sweeney (1995) procèdent à des tests d'hypothèse pour évaluer la performance des modèles de détection de la gestion des résultats. En effet, ils identifient trois problèmes majeurs. Partant sur la base de la relation linéaire telle que conçue par les premiers modèles :

Soit,

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Le premier problème24 concerne « l'attribution incorrecte de la gestion des résultats à PART ». En effet, comme nous le montre la relation linéaire précédente ji?? comprend la somme des effets omises par la variable estimatoire des accruals discrétionnaires ainsi que l'erreur de mesure des accruals discrétionnaires (error in the researcher's proxy for discretionary accruals).

Si le chercheur estime de manière erronée le coefficient attribué à PART (soit 0), il viendra que le coefficient estimé 13 sera biaisé. Et donc par effet de cascade, la probabilité de survenance d'une erreur de type I sera grande.

Le deuxième problème concerne « l'extraction incorrecte de la gestion des résultats causée par PART »25. Si la gestion des résultats qui est supposé être causée par PART 26 a lieu et que la corrélation entre u et PART est opposée en signe, alors le coefficient estimé de PART sera biaisé, ce qui accroitrait la probabilité d'une erreur de type II27.

Enfin, le dernier problème renvoi à l'hypothèse de non-corrélation entre ji et PART. Dans la mesure où cette absence de corrélation existerait, certaines variables pertinentes seraient exclues et partant, cette situation conduirait à gonfler l'erreur du coefficient estimé /9. Toutes choses égales par ailleurs, la probabilité de survenance d'une erreur de type II s'en trouvera forte. Comme précisé par JeanJean (2002), une hypothèse implicite du modèle de Jones (1991) est la non-anormalité de la variation du chiffre d'affaires. Autrement dit, le modèle de base (Jones, 1991) exclu que le chiffre d'affaires puisse être considéré comme une variable discrétionnaire -pouvant subir des interférences de la part du dirigeant-. Le modèle de Jones pose une toute autre réflexion en admettant que le pouvoir du dirigeant peut s'exprimer sur le chiffre d'affaires par l'entremise des créances. L'apport de ce modèle sera donc de corriger cette « tendance conjoncturelle » (Dechow et al., 1995).

L'extraction de la variation des créances du chiffre d'affaires entraine que seule la partie du chiffre d'affaires ayant une contrepartie monétaire effective sera prise en compte comme variable non discrétionnaire. La fonction suivante traduit cette correction :

24 incorrectly attributing earnings management to PART, p. 196.

25 Unintentionally extracting earnings management caused by PART, p. 196.

26 Valeur choisie en réponse au stimulus de gestion effectif des résultats. La valeur PART étant une variable dummy, il vient que si le chercheur lui donne la valeur 0, il n'y a pas de gestion effectif des résultats au regard du stimulus identifié (Dechow et ali, 1995).

27 L'hypothèse nulle de non gestion systématique des résultats en réponse à un stimulus identifié n'est pas rejetée.

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ANt = a; + 13;. (ACA;,t - ACREANCES;,t) + 132. IMMOCORP;,t + Et.

Les accruals discrétionnaires correspondent à :

DAt = TAt - NDAt

Et = DAt = (TAt} - [(a; + 131. (ACA;,t - ACREANCES;,t) + 132. IMMOCORP;,t)).

4. Estimation de la gestion des résultats par les accruals discrétionnaires : approche par des modèles mathématiques

Comme présenté par Kighir, Omar et Mohamed (2014), les modèles de Jones (1991) et Jones modifié (1995) peuvent souffrir de quelques insuffisances. Premièrement, ces estimateurs de gestion des résultats nécessitent une étendue importante de séries chronologiques pour spécifier les résultats obtenus. Deuxièmement, l'auto-réversion des accruals peut atténuer la spécificité des tests.

4.1. Beneish (1999) : une approche par le scoring.

Ce modèle présente la particularité d'établir une régression de référence (un score) susceptible de déceler les `'accruers28». Il propose donc une mesure de la captation des manipulations comptables (M) par huit indices agrégés à des coefficients pré-estimés.

M = -4.84 + 0.92 * DSRI + 0.528 *GMI + 0.404 *AQI + 0.892 * SGI + 0.115 * DEPI - 0.172* SGAI + 4.679* TATA - 0. 327* LVGI29.

Beneish (1999) indique que les entreprises qui obtiennent un score supérieur à 2.22 ont une forte probabilité d'être des manipulatrices. La spécificité de cette approche est de 76% de bons classements avec 17.5% d'erreur.

28 Termes désignant les entreprises qui pratiquent la gestion stratégique des résultats.

29 (DSRI): Trade receivable index, (GMI); Gross profit margin index, (AQI): Asset quality index, (DEPI): Depreciation index, (SGAI): Changing Debt Structure Index, (TATA): Total accrual/total asset rate, (SGI): Sales growing index, (LVGI): Marketing sales distribution expenses and general management expenses index.

40

30 Soit les encaissements créances.

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4.2. Le modèle de la marge : une conceptualisation transversale des accruals normaux.

Proposé par Peasnell, Pope and Young (2000), ce modèle a pour but d'approcher différemment des accruals normaux. Ils considèrent que les accruals estimés (normaux) correspondent au BFR. Toutefois leur compréhension du BFR est différente de la conception traditionnelle. Ils incluent donc de nouvelles variables explicatives.

Le modèle s'établit de la manière suivante :

BFR = a0 + a1CA + EC30 + ?? .

B. La détection des manipulations comptables par la distribution des

résultats.

Burgstalhler et Dichev (1997) initient une approche transversale dite de distribution des résultats, encore appelé "accounting thresholds", autrement dit les manipulations comptables pour atteindre un seuil préétabli. Burgstalhler et Dichev (1997) mettent en exergue deux discontinuités sur un échantillon de plus de 4000 entreprises : le seuil du résultat nul et le seuil des variations nulles des résultats (Vidal, 2010).

Figure 1 : Forme de la distribution des résultats au seuil des variations nulles des résultats.

Source : Burgstahler et Dichev , 1997, p 105.

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Comme il est visible sur la figure ci-dessus, à l'approche du seuil 0, une discontinuité anormale est observée : un niveau anormalement bas avant le seuil et un niveau anormalement élevé après le seuil, il s'agit du constat de "transfert d'effectif d'un intervalle sur l'autre" (Vidal, 2010). Yves Mard (2003) donnent quelques avantages et inconvénients de cette approche.

Le principal avantage de cette méthode est qu'elle est une alternative aux mesures de la GR par les accruals. La distribution des résultats fait office de mesure de portée générale (accruals et flux de trésorerie) par rapport aux seuls accruals discrétionnaires, qui nécessitent des estimations délicates et imparfaites.

L'inconvénient majeur de la mesure de Burghaster et Dichev (1997) est l'absence d'une distinction entre l'ampleur de la gestion des résultats par les accruals et celui par les flux de trésorerie. De plus, la distribution des résultats suppose que le chercheur ait une bonne connaissance du seuil nul de chaque entreprise, ce qui en pratique peut être difficile à estimer.

C. La gestion des résultats par l'activité réelle : les cash-flows anormaux et la production anormale

Dans cette partie nous allons procéder à une revue sommaire de la seconde modalité de la gestion des résultats comptables : la gestion des résultats par l'activité réelle.

Dechow et Skinner (2000) et Healy et Whalen (1999) étudient les entreprises qui gèrent les résultats par les activités réelles. Ils concluent qu'il y a d'évidentes interférences sur certains comptes d'exploitation. Ces pratiques concernent : la réduction des dépenses en R&D, la diminution des frais administratifs et généraux, la planification des ventes en rétrocédant des crédits plus `'flexibles» et la production excédentaire (Sellami et Adjaoud, 2010).

D'inspiration anglo-saxonne, la gestion réelle des résultats -real earnings management ou earning management through real activities manipulation- est généralement usitée pour l'atteinte d'un seuil de résultat : le seuil zéro ou "zero threshold" (Roychowdhury, 2006). Roychowdhury (2006) définit la GRAR de la manière suivante : "Real activities manipulation is defined as management actions that deviate from normal business practices, undertaken with the primary objective of meeting certain earnings thresholds31".

31 « La manipulation comptable des activités réelles est définie comme des mesures de gestion qui s'écartent des pratiques commerciales normales, entreprises dans le but principal de respecter certains seuils de résultat ».

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Roychowdhury (2006) argue que la GR peut aussi s'effectuer en interférant sur la structure des flux de trésorerie. Lesquelles interférences concernent "les remises de prix pour augmenter temporairement les ventes, la surproduction pour signaler un coût moindre des marchandises vendues et la réduction des dépenses discrétionnaires pour améliorer les marges déclarées pour les entreprises les moins performantes ".

Le modèle de Roychowdhury (2006) se focalise principalement sur les ventes et la production comme variables d'ajustement des activités réelles. Comme dans les mesures des accruals, E traduit le résidu, variable de l'interférence des dirigeants.

Soit les cash-flows totaux (1) et la production totale (2) :

(1) CFO;t/ACTIFSt_1 = a + 131(1/ACTIFS;t_1) + 132(VENTES/ACTIFS;t_1) + 133(AVENTES;t/ACTIFS;t_1) + E;t ; (2)PROD;t/ACTIFSt_1 = a + 131 (1/ACTIFS;t_1) + 132 (VENTES/ACTIFS;t_1) + 133 (?VENTES;t/ACTIFS;t_1) + E;t.

D. Le lissage des résultats : définition et détection

Le lissage du résultat est la forme de GR obéissant au principe de linéarité des bénéfices publiés. Son estimation par un modèle comparatif des scores a été largement développée dans l'article de Leuz et al. (2003). En effet, ces auteurs développent un score d'ensemble (`'The aggregate earnings management score», p.511) basé sur 4 mesures de la gestion des résultats32, cette mesure rend compte de la magnitude du lissage des résultats pour chacun des 31 pays de leur étude.

1. Définitions du lissage des résultats comptables.

Pour Mard et Schatt (2011, p. 311), le lissage des résultats consiste à « réduire la volatilité des résultats affichés », ce qui en tout état de cause « modifie la perception des parties prenantes du risque et de la situation financière de l'entreprise ». Attia (2013, p.233) argue que le lissage intentionnel du résultat est une modalité de gestion du résultat servant à « modérer les

32 Ces 4 mesures (notées de EM1 à EM4) comprennent (a) Smoothing reported operating earnings using accruals

(p.509), (b) Smoothing and the correlation between changes in accounting accruals and operating cash flows

(p.510), (c) Discretion in reported earnings : The magnitude of accruals (p.510) et (d) Discretion in reported earnings : Small loss avoidance (p.511).

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fluctuations du résultat d'une année à l'autre » et « consiste à manipuler des instruments comptables réels pour réduire la volatilité du résultat ».

2. L'estimation du lissage des résultats

L'article de Mard et Schatt (2011, p. 313-315) résume les différentes estimations du lissage des résultats. Deux études (Eckel, 1981 et Leuz et al., 2003) ont permis de mettre en exergue la pertinence de la variation d'indicateurs financiers tels que le résultat d'exploitation, le résultat net, le cash-flow des activités opérationnels et le chiffre d'affaires. Les deux ensembles de mesure du lissage des résultats concernent : (a) la variation des résultats et la variation des ventes d'une part et la variation des résultats et la variabilité des flux de trésorerie d'exploitation d'autre part.

2.1. La variation des résultats et la variation des ventes

Les premiers travaux, dans la lignée de ceux d'Eckel (1983), ont mesuré le lissage des résultats par l'élaboration d'un critère de la variation des résultats et la variation du chiffre d'affaires. La différence entre ces mesures de variation est censée rendre compte de la magnitude du lissage des résultats sur une période déterminée. A la différence de la mesure des accruals discrétionnaires, la modalité d'estimation de la manipulation des résultats par la variation des ventes et la variation du résultat permet de prendre en compte « le lissage naturel produit par le processus comptable, ainsi que les chocs liés à l'activité » (Mard et Schatt, 2011, p. 314). L'estimateur utilisé est un coefficient qui discrimine les « lisseurs » des « non-lisseurs ». Un coefficient de variation du résultat inférieur au coefficient de variation du chiffre d'affaires indique que l'entreprise en présence pratique le lissage des résultats.

2.2. La variation des résultats et variation des flux de trésorerie d'exploitation

Cette mesure a été influencée par l'apparition des mesures des pratiques discrétionnaires dans l'élaboration des nombres comptables, à savoir les accruals. Comme dans les travaux de Roychowdhury (2004 et 2006), cette estimation prend en compte le fait que « les flux de trésorerie d'exploitation s'imposent en grande part aux dirigeants et la gestion des résultats s'opère essentiellement à l'aide des accruals » (Mard et Schitt, 2011, p. 314). Comme pour la

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première estimation, une variation du résultat supérieure à la variation des flux de trésorerie d'exploitation traduit une « volonté de lisser les résultats via les accruals ».

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française.

Chapitre 2 : La détresse financière

Les causes de la défaillance financière sont plurielles. L'ensemble des domaines -sciences juridiques, économiques, financières, stratégiques, organisationnelles- contribuent à préciser les déterminants et les effets structurants de cette situation (Guillot, 2000).

Section 1 : La défaillance financière : une revue des principaux
déterminants

L'article récent de Sun et al. (2014, p.42-56) fournie une revue exhaustive des multiples définitions de la défaillance financière. Nous nous sommes donc appuyer sur ce papier pour présenter le cadre définitionnel de cette partie.

Sous-section 1 : Introduction au concept de détresse financière

La défaillance financière est la situation d'une entreprise qui éprouve des difficultés et des tensions à faire face à ses obligations vis-à-vis de ses débiteurs (Carminchael, 1972 ; Wruck 1990, Charreaux, 1996 ; Lin, 2009 ; du Jardin et Sévérin, 2011 ; Sun et al., 2014). Au regard de cette définition, il y a une distinction fondamentale entre entreprise défaillante et celles qui sont en état de faillite. Cette dernière décrit une situation de cessation définitive de l'activité et relève beaucoup plus de la conception juridique de la défaillance financière.

1. Conceptions économiques et financières de la défaillance financière

Baldwin et scott (1983) concluent que la défaillance découle d'une mauvaise conjoncture économique, un déclin des performances et une faible qualité du management.

La conjoncture économique est endogène à la situation de défaillance financière. En effet, la conjoncture difficile, le ralentissement de la croissance, le resserrement des marges dues à la concurrence et le manque de financement (Kherriza et Ahsina, 2016) pèsent sur les équilibres financiers des entreprises.

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La faible qualité de management renvoie en la compétence limitée et aux nombreux incidents d'agence qui rendent pénible l'élaboration d'un cadre de gestion optimale (Fabio Zona, 2016). La gestion des résultats trouvent également un intérêt sur ce prisme du fait qu'une gestion agressive et frauduleuse des résultats est susceptible de plonger la firme dans une tension financière et nourrir une incertitude quant à sa pérennité.

Sun et al. (2014, p.42) précisent : « inability to pay debts or preferred dividend and the corresponding consequences such as overdraft of bank deposits, liquidation for interests of creditors, and even entering the statutory bankruptcy proceeding 33». Les déterminants de la défaillance financière sont de plusieurs ordres, ce qui rend complexe la sélection d'une estimation conventionnellement pertinente au regard de toutes les natures de défaillances financières.

Foster (1986) définit la détresse financière comme « un grave problème de liquidité qui ne peut être résolu sans une restructuration de grande envergure de l'activité ou de la structure des entités économiques ». La liquidité renvoie à la problématique de solvabilité opérationnelle -à la différence de la solvabilité structurel, qui traduit la situation où la valeur des actifs d'une société est inférieure à la valeur de ses dettes, ce qui implique des fonds propres négatifs (Ben Jabeur, 2011, p.31) -, qui découle de l'incapacité chronique à disposer des flux de liquidités pour couvrir les échéances exigibles.

Dumpos et Zopounidis (1999) concluent que la défaillance financière ne saurait se limiter à l'incapacité de rembourser les paiements obligatoires importants, mais inclut également la situation de la valeur liquidative négative -ce qui signifie que le passif total d'une entreprise dépasse son actif total du point de vue de la comptabilité-.

En essayant de donner une définition générique de la défaillance financière, Ross et al (1999) arguent qu'elle se compose des quatre conditions suivantes: « (1) l'échec de l'entreprise, c'est-à-dire qu'une société ne peut pas payer l'encours de la dette après la liquidation, (2) la faillite juridique, à savoir, qu'une société ou ses créanciers demande au tribunal de déclarer faillite, (3) la faillite technique, à savoir, qu'une entreprise ne peut pas rembourser le capital et les intérêts, et (4) la faillite comptable, à savoir que : l'actif net comptable d'une société est négatif » (cité par Sun et al., 2014, p. 42).

33 L'incapacité de payer les dettes ou le dividende préférentiel et les conséquences correspondantes comme le découvert des dépôts bancaires, la liquidation des intérêts des créanciers, et l'ouverture d'une procédure de faillite statutaire.

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2. Conceptions juridiques et traitement des entreprises défaillantes.

Le référentiel juridique en matière d'encadrement des entreprises en difficulté fournit une compréhension de ses facteurs explicatifs. Les lois de référence sont celles du 1er mars 1984 (règlement à l'amiable) et du 25 janvier 1985 (procédure collective et régime commun de traitement des créanciers). Ces lois remplacent la loi du 13 juillet 1967 relative aux procédures de liquidation, faillite et banqueroute. L'intérêt du cadre juridique est de prescrire une force légale susceptible de prévenir l'échec des entreprises.

Toutefois, comme le précise Kherriza et Ahsina (2016) et Ben Jabour (2011), les caractéristiques légales de la situation de défaillance financière sont spécifiques à chaque contexte, et à la législation en vigueur.

La période de passage entre le statut d'entreprise saine et défaillante obéit à une procédure qui a comme fait générateur l'action portée auprès de la juridiction compétente pour rendre compte de (a) leurs incapacités à honorer leurs échéances et (b) la nécessité de procéder à une réorganisation.

Ben Jabeur (2011, p.40-43) fournit une revue intéressante de l'évolution des dispositions juridiques en matière de traitement des entreprises défaillantes. Ainsi, il distingue le traitement juridique de la défaillance financière en (i) dispositions relatives à la sauvegarde et (ii) traitement procédural des entreprises en difficulté.

2.1. Les dispositions de la loi relative à la prévention des entreprises défaillantes

L'évolution du cadre juridique de la gestion des entreprises en défaillance financière est récente. Depuis la loi abrogative du 1er mars 1984 et 1994, la loi de sauvegarde du 26 juillet 2005 a modifié l'horizon temporel et les critères de suivi des entreprises défaillantes. Précédemment, réduite à la gestion « sur le fait » des entreprises défaillantes, ce nouveau cadre (renforcé par l'ordonnance du 18 décembre 2008) promeut la propriété de prévention par une « procédure d'alerte ». Cette démarche permet (a) d'initier une procédure de conciliation, (b) rendre attractif l'utilisation de cette procédure (laquelle insiste sur la négociation comme un outil non-négligeable du règlement du litige financier), et (c) la protection de la créance qui fait l'objet de l'accord (la créance ne devient plus exigible par le créancier dès lors que l'accord est ratifié).

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2.2. Traitement procédural des entreprises défaillantes

Traditionnellement, le traitement juridique dans les pays relevant du droit civil (Leuz et al., 2003) est similaire en ce qui concerne le processus de gestion de cet incident. Ainsi, le cadre juridique français retient la démarche procédural des entreprises en difficulté comme suit : (a) l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, (b) la procédure de sauvegarde, (c) la procédure de redressement judiciaire et (d) la procédure de liquidation judiciaire.

a. L'ouverture de la procédure de redressement judiciaire

Dans la législation française, cette étape comprend trois déterminants, à savoir, « l'illiquidité », l'existence de l'incident au jour du jugement et l'exercice de la voie de recours par le débiteur. L'insolvabilité est la situation qui rend compte de l'incapacité de faire face aux exigences, l'illiquidité est par définition le critère fondamental entrainant à la cessation de paiement. L'ouverture de la procédure de redressement étant exclusivement du ressort des instances judiciaires, l'incident doit nécessairement exister non pas au jour de la déclaration de l'état de cessation de paiement mais au jour du jugement. L'exercice de recours est un bénéfice accordé au débiteur de réunir éventuellement des fonds pour éponger les dettes les plus exigeantes.

b. La procédure de sauvegarde : ordonnance du 18 décembre 2008

« La procédure de sauvegarde est ouverte aux entreprises qui ne sont pas en état de cessation de paiements mais qui traversent des difficultés qu'elles ne peuvent surmonter et qui sont de nature à la conduire à un état de cessation de paiements » (Ben Jabeur, 2011, p.40). Le débiteur personne physique (ou le représentant de la personne morale) doit saisir : (i) le tribunal de commerce si le débiteur est commerçant ou immatriculé au répertoire des métiers et (ii) le tribunal de grande instance dans les autres cas. En cas d'acceptation de la procédure de sauvegarde par les juridictions compétentes, un plan de sauvegarde est élaboré en fonction des perspectives de redressement de l'entreprise, de l'état du marché et des moyens disponibles. Ce cadre de sauvegarde précise aussi les modalités de règlement des dettes.

c. La procédure de redressement judiciaire

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A la différence de la procédure de sauvegarde, la procédure de redressement judiciaire est conditionnée par l'existence d'une situation de cessation de paiement. La procédure de redressement judiciaire est un état de restructuration des entreprises en cessation de paiement. Elle est ouverte : (i) à la demande du débiteur au plus tard 45 jours suivant la cessation de paiement ; (ii) à la demande d'un créancier, sauf si une procédure de conciliation est en cours ; (c) à la demande d'un procureur de la République sauf si une procédure de conciliation est en cours. La période d'observation de cette procédure est de 6 mois maximum, renouvelable dans une limite de 18 mois. Le plan de redressement judiciaire s'appuie sur des mesures drastiques de restructuration financière, à savoir, les licenciements et peut aboutir éventuellement sur une cession de la firme.

d. La procédure de liquidation judiciaire

La procédure de liquidation judiciaire est prononcée contre un débiteur en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible. Elle se matérialise par la cession d'actifs de l'entreprise pour éponger les dettes. Comme pour la procédure de redressement judiciaire, l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire doit être demandée dans les 45 jours qui suivent.

Sous-section 2 : Les déterminants de la défaillance financière.

Dans cette partie, nous verrons les critères financiers, économiques et stratégiques de l'état de détresse financière.

1. Les déterminants financiers de la défaillance des entreprises

Au regard de la seule procédure du redressement juridique, Severin (2006, p. 34) observe que la défaillance financière ne peut être conditionnée seulement à la cessation de paiement. Partant de là, l'auteur précise que les difficultés existent bien avant la procédure de redressement. A la suite du constat récurrent du lien endogène entre difficulté et problèmes de trésorerie, il retient que la définition de la difficulté financière est limitée et « ne tient pas compte des facteurs qui peuvent être à l'origine des problèmes de trésorerie ».

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Figure 2 : Grille de lecture de la santé financière de l'entreprise

Entreprise non
rentable et non
liquide

Fin prochaine

Pleine forme

Entreprise rentable et liquide

Santé financière de
l'entreprise rentabilité-

liquidité

Entreprise rentable
et non liquide

Entreprise non
rentable et liquide

Maladie passagère

Maladie chronique

Source : Ooghe et Van Wymeeresh (1990), figure tirée de Ben Jabeur (2011, p. 36).

Ooghe et Van Wymeeresh (1990) identifient deux critères de la dégradation de la solvabilité de l'entreprise, à savoir l'absence d'une valeur ajoutée soutenue et l'accroissement continu des charges de structure (cité par Jabeur, 2011, p. 36).

La rentabilité (ROA ou ROE) positive est un indicateur pertinent de l'équilibre et de la capacité de l'entreprise à créer une valeur au regard de la mobilisation des actifs mis à disposition. Cependant, le seul critère de rentabilité ne peut suffire pour classer une entreprise saine, c'est donc par parcimonie qu'on admet un tel indicateur. Il en est de même pour la propriété de la liquidité, une entreprise avec une trésorerie positive est capable de faire face aux passifs les plus exigibles (courants).

« Les causes immédiates de la défaillance sont financières » Blazier et Combier (1997, p. 39). Cette acception renvoie au cadre procédural des entreprises en difficultés financières. La raison en est que la procédure débute à l'instant précis où l'entreprise n'est plus en capacité de faire face à son passif exigible. En outre, ces auteurs retiennent que les facteurs explicatifs de la défaillance financière sont d'origine diverses et ne sont pas nécessairement financiers. Plusieurs éléments doivent être mobilisés pour évaluer les causes réelles de la détérioration des équilibres financiers de l'entreprise. Par ailleurs, l'évaluation de la dégradation de l'entreprise ne saurait être exclusivement rattaché à l'analyse des données financières mais à une recherche approfondie des causes des difficultés plus en amont (Blazier et Cornier, 1997).

Azzi (2012, p. 60) retient que la principale cause de la détresse économico-financière résulte de la dette octroyée pour atténuer les conflits d'intérêt et les asymétries d'information entre le principal et l'agent. La dette est prise dès lors comme « un mécanisme disciplinaire », tel

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qu'énoncé par la prédiction de la théorie de l'agence. Au regard de la littérature, on peut considérer l'endettement comme la variable explicative majeur de la détresse financière.

Figure 3 : Processus économique entrainant à la discontinuité financière

 

Charges trop élevées

Valeur ajoutée faible

 

Charges
financières

 
 
 
 
 
 

Rentabilité insuffisante

 

Manque d'autofinancement

Investissements excessif

Manque de liquidité

Endettement

Solvabilité entamée

Méfiance des

Illiquidité critique

Discontinuité

Source : Ooghe et Van Wymeeresh (1996).

2. Les déterminants économiques de la défaillance des entreprises

Ben Jabeur (2013, p. 103) observe une insuffisance de la littérature quant au traitement des facteurs macroéconomiques de la détresse financière. Il en veut pour preuve l'absence de variables macroéconomiques dans la modélisation de la prédiction de la défaillance financière. Ainsi, l'analyse financière par ses ratios, dans la posture traditionnelle, a déjà pris en compte les agrégats macroéconomiques associés à la détresse financière.

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Les travaux de Ben Jabeur (2013) s'articulent sur la détermination du « lien entre l'échec et les facteurs macroéconomiques des entreprises françaises ». Les résultats de cette étude nous aiderons peu ou prou à asseoir une grille de lecture sur les forces conjoncturelles qui pèsent sur les entreprises françaises. Ainsi, l'auteur a concentré l'essentiel de son étude sur l'identification des variables macroéconomiques les plus importantes afin d'estimer leur utilité dans une approche de prédiction (Ben Jabeur, 2013, p. 103).

Zopounidis (1995) retient que la défaillance économique renvoie à l'absence de rentabilité et d'efficacité économique de l'appareil productif (cité par Ben Jabeur, 2011).

Altman (1983 et 2006)34 conclut que les conditions macroéconomiques peuvent interférer de manière non-négligeable sur l'équilibre financier de l'entreprise. Ben Jabeur (2013) allègue que les facteurs macroéconomiques peuvent également déclencher l'échec de la firme. Comme facteurs macroéconomiques, il compte : « la conjoncture économique, le nombre de start-ups, le marché monétaire, politique de crédit sur le marché des changes, l'évolution du niveau des prix et l'ouverture de l'économie au commerce extérieur » (p.103-104).

Les jeunes entreprises sont plus vulnérables que les entreprises les plus anciennes. Pour les premières, l'échec est étroitement lié au manque d'expérience en matière de gestion financière. Tandis que pour les deuxièmes, il s'agit d'une difficulté d'adaptation à l'environnement changeant (Ben Jabeur, 2013). La mauvaise adaptation des entreprises les plus anciennes et les crises endogènes des petites entreprises exemplifient l'acception multifactorielle de l'échec (mauvais management et complexité macroéconomique persistante).

3. L'analyse stratégique de la défaillance financière.

La stratégie d'entreprise a pour objectif premier de créer de la valeur. La création de la valeur s'obtient par le croisement de trois problématiques fondamentalement différentes, à savoir, la pertinence, la rareté et la demande. Rapporter au phénomène de défaillance financière, les causes stratégiques de l'échec sont essentiellement dues à l'exploitation d'un paradigme biaisé de création de la valeur.

L'environnement joue également un rôle crucial dans les crises financières des entreprises. Plusieurs échecs sont liés à l'absence de relais de croissance, à l'inadaptation stratégique aux enjeux du marché, à l'absence d'innovations compétitives, aux échecs dans la recherche des

34 Cité par Ben Jabeur (2013, p. 103).

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briques perdues35, aux conflits entre les parties prenantes, à la mauvaise allocation de la richesse créée, à la dureté du marché et à la concurrence (féroce).

L'usage des matrices stratégiques n'est pas associé à la seule lecture des phénomènes environnementaux qui structurent le marché (ou le secteur d'activité) dans lequel l'entreprise évolue mais peut également aider à mieux cerner les divers choix stratégiques qui auraient éventuellement conduit l'entreprise à une situation de défaillance.

Besanger et Roth (2016, p. 28-29) arguent que « la matrice présente une double fonction : situer une entité (e.g. une entreprise) au sein d'un groupe de référence (e.g. un secteur d'activité), et déterminer la trajectoire de cette entité par rapport à la trajectoire moyenne du groupe ». La matrice stratégique aide à comprendre les décisions opérationnelles des entreprises et permet d'établir la stratégie organisationnelle (ensemble des pools de l'entreprise) la plus optimale possible. Il poursuit en concluant que les choix stratégiques sont étroitement liés au « mode de pensée inhérent à l'exercice de responsabilité ».

Figure 4 : Situation et trajectoire des entreprises dans une approche matricielle

Potentiel de l'entreprise au sein de
son groupe stratégique

(Q1)

(Q2)

(Q4)

(Q3)

Position de l'entreprise au sein de son groupe

stratégique

Source : Besanger et Roth (2016, p. 29)

Cette matrice décrit 4 situations (quadrants) possibles de la vie d'une entreprise. En considérant que l'entreprise est dans un processus permanent de transformation, elle sera emmenée à se confiner dans l'un des 4 quadrants. Chaque cadrant renvoie à une situation bien particulière. Le positionnement d'une entreprise dans un des quadrants est déterminé par (1) la variable sur

35 Recherche des éléments qui feront qu'un produit se rapproche de la perfection. Ce concept renvoie aussi à la notion de logique dominante ou sense making.

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l'axe des ordonnés (potentiel de l'entreprise au sein de son groupe) et (2) celle sur l'axe des abscisses (position de l'entreprise au sein de son groupe)36. Une entreprise proche du quadrant 2 (dit « magique ») aura réussi son processus de transformation. Lequel processus dépend de la réussite de la maximisation du couple potentiel-position.

Une entreprise passant de Q1 (dit « les déclassés ») à Q3 (dit « les challengers ») aura réussi à passer d'une « situation de déclin relatif » à une situation de « relance à venir ». La problématique ici est de trouver une stratégie opérationnelle susceptible de sortir l'entreprise d'une situation de quasi-disparition (Q3). Toutes choses égales par ailleurs, une entreprise qui aura réussi ce passage pourra éventuellement prétendre se rapprocher du quadrant magique ou au contraire de la situation Q4. Le processus de transformation est une problématique cruciale des entreprises, il est déterminé par une recherche approfondie des facteurs de réussite mais aussi par une gouvernance de qualité.

Enfin, la dynamique du marché et la faiblesse du management d'une entreprise peuvent l'entrainer dans une spirale négative décrite par le quadrant 4 (Q4). C'est donc cette situation qui nous intéresse, car elle doit pouvoir rendre compte des causes stratégiques de la défaillance financière dans une logique de marchés dynamiques. En considérant que Q3 traduit les signes avant-coureurs du stress organisationnel, Besanger et Roth (2016, p. 30) concluent que « à un certain niveau de consommation de ressources, et sans intervention extérieure, près de l'origine de la matrice, la disparition de l'entreprise sera inéluctable ».

La croissance du marché et la part de marché peuvent aussi expliquer la vulnérabilité de la structure financière des entreprises. La matrice du Boston Consulting Group (BCG) s'intéresse au partitionnement des entreprises en groupes distincts, relevant chacune d'une situation financière particulière.

36 De haut en bas (- à +) pour l'axe (1) et de gauche à droite (+ à -) pour l'axe (2).

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Figure 5 : Matrice BCG (croissance du marche et part de marché relative)

ti

a hé

c

deDilemmes

(Q1)

· Faible rentabilité

Forts besoins de financement

Etoiles (Q2)

· Bonne rentabilité

· Besoin de financement

 

Vache à lait (Q3)

· Forte rentabilité

· Faibles besoins de financement

 

TaPart

de marché

Source : Besanger et Roth (2016, p. 31)

La matrice BCG est mise en place par des gestionnaires de portefeuille, soucieux d'optimiser les rendements de leurs participations. Chaque quadrant décrivant une situation de marché spécifique, pour Q2, Q3, Q1 et Q4 la situation de marché est respectivement porteur, mature, en forte croissance et en déclin. L'intérêt de présenter ici cette matrice n'a pas pour but de faire une analyse exhaustive des implications de ce dispositif mais de mettre en exergue les 4 éléments (taux de croissance, part de marché, taux de rentabilité et besoin de financement) qui influencent la stratégie d'une firme. Ces éléments sont de facto des causes stratégiques de l'état de santé d'une entreprise. Le taux de croissance du marché et la part de marché relative influencent profondément la situation financière par la génération ou pas de cash-flows, par les variations des immobilisations et par le BFR (Besanger et Roth, 2016, p. 30).

Les 5 forces de Porter peuvent également être retenues ici pour évaluer les causes stratégiques de la défaillance des entreprises. Ces forces sont entre autres : la rivalité entre les concurrents (nombre de concurrents, croissance lente du marché, problèmes des coûts fixes, qui sont élevés, secteurs aux enjeux importants), le pouvoir de négociation des clients (l'information parfaite permet de maximiser les coûts), la menace des nouveaux entrants (robustesse du secteur vis-à-vis des nouveaux entrants), etc.

Les travaux de Fimayer (2011, p. 48) donne une revue conséquente de l'influence des forces porteriennes dans l'explication de la détresse financière. Crutzen et Caillie (2007) évaluent le risque de défaillance à partir des 5 forces de Porter. A cet égard, s'agissant du pouvoir de négociation des clients, ces derniers retiennent 6 facteurs explicites, à savoir le déclin général

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de la demande, les faillites des clients importants, les défaillances en chaine de clients, les créances en souffrance, la concentration des clients et la volatilité de la clientèle récente37. S'agissant du pouvoir de négociation des fournisseurs, ils retiennent les trois causes suivantes : la détérioration des relations avec le fournisseur, la défaillance d'un fournisseur important et la défaillance en cascade des fournisseurs.

Enfin les produits de substitution et la modification du paysage concurrentiel ne sont pas en reste dans l'explication de la détresse financière.

37 Ces causes sont citées par Fumayer (2011, p.48).

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Section 2 : La relation entre la comptabilité et la défaillance financière et le lien entre la gouvernance d'entreprise et la détresse financière.

Dans cette section, nous allons étendre les champs de compréhension de l'état de détresse financières à deux causes structurelles, à savoir, la comptabilité (par son système et son organisation) et à la gouvernance d'entreprise. De plus, la littérature fournie une revue exhaustive des indicateurs comptables et financiers de la défaillance financière.

Sous-section 1 : Le lien entre comptabilité et défaillance financière, et les
indicateurs comptables et financiers de la détresse financière.

Dans cette partie, nous présenterons la littérature relative à la place de la comptabilité dans la défaillance financière. Ensuite, Nous montrerons les principaux indicateurs comptables et financiers de la détresse financière.

1. Le lien entre la comptabilité et la défaillance financière

Nous notons deux points explicatifs de la relation entre la comptabilité et le risque de défaut : (1) le déficit du système comptable et (2) les choix comptables des entreprises en difficulté.

1.1. Déficit du système comptable et du système d'information

Maniani (2014) argue que la déficience du système comptable et l'absence d'un système d'information ont un lien endogène avec la défaillance financière. Il retient que les ratios comptables permettent d'apprécier les performances de l'entreprise. Bien que la primauté de la recherche revienne à l'analyse prédictive, des études ont démontré que l'existence et la qualité du système comptable sont susceptibles d'influencer la survie des entreprises. A cet égard, l'auteur affirme que la faible performance de la comptabilité contribue aux difficultés de l'entreprise.

Deux études exemplifient cette approche : Blazy et Combier (1997) et Ooghe et Waeyeart (2004). Les premiers retiennent que les problèmes d'information et de management sont à un peu plus de 1/4 à l'origine des difficultés financières des entreprises. Les deuxièmes considèrent qu'il existe une relation endogène entre défaillance financière et politique comptable et

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financière : déficit du système d'information et les manipulations comptables agressives. Le système comptable est utilisé pour dissimuler la « gravité de la situation », les manipulations comptables, en situation de crise, vise à augmenter le résultat (Koeing38 1985), et ce en interférant même sur la structure réelle des activités (Campa et Camacho-Minano, 2015).

1.2. Les choix comptables des entreprises en difficulté.

En période de détresse financière, les dirigeants sont enclins à manipuler leurs résultats (DeAngelo, 1994). L'auteur formule que les accruals se composent de deux parties : une partie liée à l'activité réelle et une autre liée à une volonté manifeste de diminuer le résultat comptable. Les pratiques comptables des entreprises varient selon qu'elles soient en période instable et en période stable. En période de détresse, la gestion à la baisse des résultats peut renvoyer à un signal lancé aux créanciers et peut être considérée comme une épargne discrétionnaire pour les années à venir (Healy, 1985).

2. Quelques indicateurs comptables et financiers de la détresse financière

Le Z-Score d'Altman constitue un critère majeur de classification des entreprises. Bien que pertinent, cette indice n'aide qu'à la discrimination des entreprises en fonction de deux groupes : le groupe des entreprises saines et celui des entreprises défaillantes. Cette classification ne prend en compte le niveau intermédiaire entre les entreprises saines et défaillantes. Ainsi, d'autres indicateurs permettent d'apprécier des `'états intermédiaires» de défaillance financière, à l'image de l'indicateur de Conan et Holder.

2.1. Le Z-Score d'Altman : la mesure traditionnelle de la classification des entreprises

défaillantes

Le Z-Score d'Altman est un indicateur financier qui permet de déterminer, à partir de 5 ratios, la probabilité d'insolvabilité d'une firme. Ces ratios comprennent l'ensemble des aspects financiers d'une entreprise, à savoir, la rentabilité, l'effet de levier, la liquidité, la solvabilité et l'activité.

38 Cité par Maniani (2014).

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Z-Score = 1,2A + 1,4B + 3,3C + 0,6D + 1,0E

A= Besoin en fond de roulement (BFR) / Total actifs

B = Réserves / Total Actifs

C = EBIT / Total Actifs

D = Capitalisation boursière / Total des dettes

E = Chiffre d'affaires / Total Actifs

Un Z-Score élevé indique que l'entreprise a une faible probabilité de faire faillite. A contrario, moins le Z-Score est élevé, plus l'entreprise a une forte probabilité de faire faillite.

2.2. Le score de Conan et Holder ; une mesure de classification graduelle de la détresse

financière

L'indicateur de Conan et Holder est une fonction-score qui permet de classifier les entreprises en trois groupes renseignant sur le niveau de santé financière.

Z= 0,24 X1 + 0,22 X2 + 0,16 X3 - 0,84 X4 - 0,10 X5.

X1 = Excédent brut d'exploitation / Total des dettes

X2 = Capitaux permanents / Total de l'actif

X3 = Réalisable et disponible / Total de l'actif X4= Frais financiers / CA HT

X5= Frais de personnel /valeur ajoutée

Lorsque le score est supérieur à 0.10, l'entreprise est en bonne santé. Par contre lorsque le score est situé entre 0.10 et 0.04, elle est en situation d'alerte, et en dessous de 0.004, elle est en danger.

2.3. Divers indicateurs de la détresse financière

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Tableau 4 : Critères comptables de classification des entreprises en détresse financière

Auteurs

Critères comptables

Asquith, Gertner et Sharfstein (1994)

- Soit EBITDA < dépenses d'intérêts sur deux années consécutives

- Soit EBITDA < 80% des dépenses d'intérêts sur une année

DeAngelo et DeAngelo (1990)

- Entreprises qui, sur cinq années,

connaissent au moins pendant trois années un résultat d'exploitation avant impôt négatif.

Gilson, John et Lang (1990)

- Cash-flow est insuffisant pour faire face au paiement de la dette

Hoshi, Kashyap et Scharfstein (1990)

-Année t : résultat d'exploitation > Dépenses d'intérêt

- Année t+1 et t+2 : résultat d'exploitation < Dépenses d'intérêt

Kang et Shivdasani (1997)

- Année t : EBIT/frais financiers > 1

- Année t+1 : baisse de 50 % (ou plus) de leur EBIT

Source : Severin (2006)

Sous-section 2 : La structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et la détresse financière

A. La structure de l'actionnariat et la détresse financière

Zhang et Gan (2011) étudie la relation entre structure de l'actionnariat (par la nature du contrôle l'actionnariat, la concentration de l'actionnariat, l'équilibrage de la propriété et le pourcentage de détention de la direction) et la détresse financière. Ils trouvent que la détresse financière est « nettement plus faible » est décorrélée de la structure de l'actionnariat des entreprises publiques que dans celle des entreprises privées.

Donker et al. (2009) étudient l'impact de la structure de l'actionnariat dans l'apparition de la détresse financière. Ils trouvent que la présence d'actionnaires extérieurs réduit significativement la probabilité de détresse financière. En effet, la présence de ce type

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d'actionnaire est associée à une surveillance qui empêche tout « comportement de gestion sous-optimal ». De plus, les auteurs observent que les niveaux élevés d'actionnaires institutionnels ne sont pas associés à une probabilité de détresse financière moindre.

Simpson et Gleason (1999) analysent l'association entre l'actionnariat et la structure du conseil d'administration et le mécanisme de contrôle interne qui influence la survie de l'entreprise. Ils étudient l'actionnariat par les administrateurs et les dirigeants, l'actionnariat par le chef de la direction, le nombre d'administrateurs, le pourcentage d'administrateurs internes et la dualité (actionnaire et dirigeant) du chef de la direction. Sur la base de 300 banques, ils trouvent que le fait que la probabilité de détresse financière est plus faible lorsque le dirigeant est à la fois directeur général et actionnaire. Cependant, ils concluent que les autres facteurs de l'actionnariat n'ont aucun effet sur la probabilité de détresse financière.

La détresse financière amplifie les conflits d'intérêt entre les dirigeants, les actionnaires et les créanciers. Dans cette situation, la grande majorité des dirigeants est remplacée. Il est donc évident que la défaillance financière modifie les relations entre les propriétaires de l'entreprise et ceux qu'ils ont délégués pour assurer la gestion courante de la firme. Le comportement « autonome » des actionnaires est fonction du niveau de leurs utilités. Autrement dit, plus les actionnaires sont insatisfaits et perdent leurs investissements (risque de faillite de la firme), plus ils auront tendance à évincer les dirigeants.

B. La gouvernance d'entreprise et la détresse financière

Les caractéristiques et la composition de la gouvernance d'entreprise peuvent entraîner et à la détresse financière (Salloum et Azoury, 2008). Toutefois, la littérature accorde une plus grande importance aux effets de la détresse financière sur les mécanismes de gouvernance.

1. La mauvaise gouvernance d'entreprise comme déterminant de l'état de la

détresse financière.

Peu d'études ont exploré la problématique de la mauvaise structure de gouvernance sur l'apparition et la persistance de la détresse financière. Salloum et Azoury (2010, p.44) montrent que « le concept de gouvernance et son faible rôle de contrôle causé par un agencement inadéquat facilitent la dégradation de la structure financière ». Plus précisément, les auteurs

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concluent que l'illiquidité et la détérioration des équilibres financiers ne peuvent être considérées comme les causes majeures de la détresse financière.

Les auteurs emploient des analyses de régression en trois étapes. Dans la première étape, il étudie l'association entre la variable de gouvernance d'entreprise ex ante (variable dépendante) et la variable de gouvernance ex post (variable indépendante), pour mesurer la pertinence de l'association entre ces mesures sur des horizons temporels différents. Dans la deuxième étape, ils modélisent à nouveau une régression linéaire en intégrant une variable indépendante de performance (taux de rendement des actifs) dans le but d'apprécier si « cette dernière contribue à certains effets modérateurs dans l'équation » (p. 49). La dernière étape consiste à évaluer la pertinence de l'interaction entre les variables indépendantes et la variable dépendante de la gouvernance. En procédant à ces séries de régressions, les auteurs approchent, par différence, l'impact de la gouvernance sur l'état de détresse financière.

Les résultats des régressions montrent que (1) en période de détresse financière, la proportion des outsiders est « négativement corrélée avec les performances futures de l'entreprise »39 et (2) la taille du conseil d'administration augmente et génère des effets négatifs.

Selon eux, la dette a un effet ambigu, notamment « son rôle incertain, positif et négatif » sur la structure financière de l'entreprise. Ainsi, ils concluent que le faible rôle du système de gouvernance d'entreprise dont le CA est en partie à l'origine du défaut.

2. Les effets de la détresse financière sur la gouvernance d'entreprise.

L'idée ici est de montrer que la détresse financière impact l'organisation, les mécanismes et les heuristiques de décision des entreprises.

A cet effet, une étude explicite de Houda (2008, p.5-10) sur 42 entreprises américaines, affichant un ratio de couverture amoindri et un déclin continu des résultats, étaye les effets de la détresse financière sur le structure de gouvernance. En effet, il s'appuie sur les travaux de Gilson (1989), Wruck (1990) et Gilson et al. (1990) pour évaluer les effets de la détresse financière sur la structure opérationnelle, organisationnelle et financière. Il se propose de suivre l'évolution des entreprises à travers leurs cycles de détresse financière. Il conclut sur une différence de mesures de restructuration 2, 3 et 4 ans à compter de la première année de

39 Autrement dit, la variable de la proportion d'administrateurs externes (outsiders) a un effet négatif sur la performance future.

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défaillance. L'auteur retient 3 familles de variables décrivant les mécanismes de gouvernance : le conseil d'administration, la structure de propriété et la rotation interne40 et des variables comptables comprenant les mesures de risque financier (levier financier et ratio de couverture des intérêts), risque opérationnel (actifs/ventes), taille (log des actifs), la liquidité (actifs courants/passifs courants) et la profitabilité (ROS : EBIT/ventes).

L'auteur utilise le test non-paramétrique de Mann-Whitney à partir d'une année de référence (t-1). L'utilisation de ce test rend compte de la différence des moyennes entre les variables citées précédemment, et cela sur une période allant de deux à quatre ans après l'année de référence (t-1). Les principaux résultats révèlent que les variables de gouvernance sont différentes selon que l'horizon s'étale sur deux années et trois années à compter de l'année de référence.

A titre indicatif, deux années après l'année du constat de défaillance, il observe que (1) la composition du CA mute « tout au long du cycle de détresse », (2) les entreprises en détresse financière développent une incitation à l'indépendance de leurs CA -augmentation de la taille du CA, accroissement du nombre de réunions, augmentation du ratio des outsiders et développement des dispositions de séparation des rôles dans les firmes en difficultés-, (3) les entreprises accroissent la propriété des CEO, des outsiders et des actionnaires majoritaires et (4) les firmes en détresse financière augmente la propriété managériale (p.17). De l'année de référence à la 3e année, la taille du CA s'amenuise et le nombre de réunions, le pourcentage des administrateurs externes et la séparation des rôles continuent d'augmenter. Comme dans la période précédente, la propriété des investisseurs institutionnels et la rotation de l'équipe dirigeante croissent. Par contre, l'auteur observe que la propriété des outsiders décroit légèrement.

40 Les variables utilisées comprennent pour (1) le conseil d'administration : la taille du conseil (le nombre total d'administrateurs), l'indépendance des administrateurs (pourcentage des administrateurs), la dualité (variable dichotomique qui prend la valeur 1 si le dirigeant est président du conseil et o sinon), l'activisme du conseil (nombre de réunion du conseil) ; (2) pour la structure de propriété (propriété managériale : le pourcentage du capital détenu par les membres du CA et les CEO), propriété des administrateurs externes (le pourcentage du capital détenu par les administrateurs externes), propriété des institutionnels (pourcentage du capital détenu par les institutionnels ayant plus de 5%) et propriété des actionnaires majoritaires (pourcentage du capital détenu par les actionnaires ayant plus de 5%) ; (3) pour la rotation interne : rotation du CEO et rotation de l'équipe des dirigeants (variable binaire qui prend la valeur 1 s'il y a une rotation du CEO et 0 sinon).

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Chapitre 3 : Discussions et hypothèses de recherche

Dans cette partie nous allons développer les discussions et les hypothèses spécifiques de notre étude. Nous avons étudié quatre points de la relation entre la gestion des résultats et la défaillance financière.

1. Les niveaux de défaillance financière et l'existence des trajectoires de gestion des

résultats

Avant de présenter notre première hypothèse de recherche sur le lien entre les trajectoires de GR et les niveaux de détresse financière, nous présenterons deux points, à savoir les effets de la détresse financière sur la gestion des résultats et les types de gestion des résultats en période de détresse financière.

1.1. Les effets de la détresse financière sur la gestion des résultats

Mard (2003) argue qu'en situation de faible performance, la gestion des résultats peut être plus prononcée à la baisse ou à la hausse. Elle serait plus prononcée à la baisse dans une perspective de « nettoyage des comptes » et d'une « liquidation des pertes » pour repartir sur des bases nouvelles et saines. A l'opposé, la gestion des résultats à la hausse viserait à obstruer les pertes enregistrées afin soit de préserver l'utilité du dirigeant, soit de conserver la confiance des créanciers. Il émet les hypothèses suivantes : (a) les entreprises fortement endettées gèrent les résultats à la hausse et (b) les entreprises ayant une faible performance boursière manipulent les résultats à la hausse. Pour estimer les accruals discrétionnaires, l'auteur utilise le modèle de Jones (1991). Les variables explicatives des hypothèses précitées sont : le taux d'endettement (dettes financières en fin d'exercice N sur les capitaux propres en fin d'exercice N) et la rentabilité boursière (variation du cours boursier durant l'exercice N). Les résultats des régressions montrent que : les accruals discrétionnaires les plus élevés sont ceux des entreprises dont la performance boursière est la moins importante.

Campa et Camacho-Minano (2015) étudient les choix comptables en termes de gestion des résultats des entreprises en période de détresse financière. Le principal objectif de leur étude a été de montrer la variable de la GR qui est la plus manipulée par les entreprises en détresse financière. En utilisant le modèle de Roychowdhury (2006) pour estimer la gestion des résultats

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par l'activité réelle et le modèle de Defond et Park (2001) pour les accruals anormaux. Ils procèdent à des régressions linéaires multiples à partir d'une variable endogène de détresse financière, l'indice de Fich et Slezak (2008) -variable dichotomique, qui prend la valeur 1 si le ratio du résultat d'exploitation sur les intérêts est inférieur à 1, et 0 sinon-. Les résultats montrent que la production anormale possède le seul coefficient positif (0.149) et significatif au seuil de 1%. Les coefficients des cash-flows anormaux et des accruals discrétionnaires recueillent respectivement -0.049 (au seuil de 10%) et -0.087 (au seuil de 10%). Ainsi, il vient qu'en période de détresse financière, les entreprises sur lesquelles l'étude a porté ont des velléités plus prononcées à gérer les résultats par l'activité réelle, plus précisément la production anormale.

Rosner (2003) teste l'hypothèse selon laquelle les entreprises en situation de faillite gèrent de manière agressive leurs résultats. Elle désagrège les accruals en 6 sous-éléments : (a) les variables de surévaluation des créances et des stocks, (b) les variables de sous-évaluation des dettes et des dépenses, (c) les variables de surévaluation du BFR / accruals du cycle d'exploitation, (d) les variables de surévaluation des immobilisations corporelles, (e) les variables de sous-évaluation des ventes, de la marge brute et des coûts des biens vendus et (f) les variables de surévaluation des accruals totaux et des accruals discrétionnaires. Il ajoute une variable de l' illiquidité de l'entreprise. Les résultats montrent que les coefficients des variables témoignent d'une gestion excessive des résultats de la part des entreprises en tension financière. De leur côté, Franceschetti et Koschtial (2013) trouvent que pendant les années précédant la détresse financière, les entreprises ont des velléités à réduire les manipulations comptables. Par ailleurs, ils trouvent que les entreprises faisant face à une situation d'insolvabilité ont 3 fois plus de chance de procéder à une gestion frauduleuse de leurs résultats.

Nous n'avons pas observé d'études qui traitent de la relation entre les différents niveaux de détresse financière et les pratiques de GR qui en découlent. De plus, les études portant sur l'association entre la détresse financière et la GR retiennent très souvent les accruals comme la mesure de référence de la GR.

1.2. Les types de gestion des résultats dans les entreprises en difficulté.

La gestion des résultats par les choix comptables (accruals) est souvent perçue comme nulle à terme. Le principe d'auto-dénouement des accruals peut cependant être faussé dès lors que l'accumulation des accruals est élevée. Une telle situation impacterait directement les

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performances actuelles et futures des firmes qui se retrouveraient dans une situation financière dégradée. La gestion des résultats parait de ce fait comme un instrument dangereux pouvant être nuisible pour la survie des entreprises. La revue de la littérature nous montre que la gestion des résultats peut être considérée comme un instrument d'amélioration de la santé financière (par la liquidation des pertes, afin de repartir sur de nouvelles bases) : c'est le principe du `'big bath accounting» (Breton et Stolowy 2004) et la gestion des résultats peut compromettre définitivement la santé financière des entreprises : c'est la gestion agressive des résultats.

a. L'hypothèse de la `'grande lessive» ou `'big bath accounting» : une perspective pour assainir la situation financière des entreprises en difficulté.

En période de détresse financière, les équipes dirigeantes peuvent recourir à une technique comptable consistant à dégrader davantage la santé financière de l'entreprise. Cette technique vise essentiellement à améliorer les résultats futurs par la détérioration de la situation financière actuelle. Une `'grande lessive» actuelle se traduit par une forte hausse des résultats futurs, et accroit concomitamment la rémunération des dirigeants. Les pratiques de `'big bath accounting» ont été premièrement observées par Healy (1985) ou encore DeAngelo (1988), elles se manifestent par des niveaux d'accruals discrétionnaires décroissants. Walsh et al. (1991) précisent que les études relatives au `'grand bain» traduisent que de telles pratiques se matérialisent par la dépréciation des valeurs comptables des actifs. Ces auteurs retiennent que la comptabilité du `'grand bain» intervient lorsque l'un des deux critères suivant est respecté : le critère de l'aberration de la croissance négative (NPGA41) et le critère de l'aberration de la croissance positive (PPGA). Le premier critère traduit une baisse drastique des résultats et le second traduit une hausse anormale des résultats. Les auteurs soutiennent que le dernier critère peut servir également à nettoyer les comptes.

Breton et Stolowy (2004) formule que la gestion des résultats est avant tout liée à la stratégie d'entreprise. Ils retiennent que les techniques de `'grand bain» sont associées au changement de l'équipe dirigeante. Dans l'hypothèse où il y a un nouveau dirigeant, il pourrait être poussé à constater davantage de pertes afin de repartir sur des bases saines, surtout quand la situation financière n'est pas bonne. De ce fait, la gestion des résultats se traduit par des fortes

41 (NPGA) Negative Profit Growth Aberration et (PPGA) Positive Profit Growth Aberration.

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dépréciations censées liquider définitivement les faiblesses financières de l'entreprise ou dans la moindre des mesures renégocier les contrats avec les créanciers.

b. Le lissage des résultats : alternative pour les entreprises en difficulté financière

Breton et Stolowy (2004) formulent que la comptabilité du `'grand bain» aide « à préparer le chemin pour les benéfices futurs, constants et bien lisses pendant des années ». Toutefois, les entreprises en difficulté financière peuvent lisser leurs résultats pour simuler une certaine stabilité financière -rappelant que le lissage des résultats se manifeste par des variations stables des résultats comptables-.

c. La gestion agressive des résultats : une pratique récurrente des entreprises en difficulté financière

L'éthique dans les pratiques de la GR a fait l'objet de nombreuses études. L'étude de Lamrani (2012) précise que la GR se situe sur un « continuum allant des pratiques acceptables aux pratiques inacceptables, à l'exemple des fraudes ». Par nature, les mesures acceptables sont celles qui sont « conservatrices ». La gestion acceptable des résultats est celle qui se fait au regard des normes en vigueur et par l'éthique des professionnels. L'éthique renvoie à l'équité qui prévaut pendant les évaluations comptables. La latitude qui est laissée aux dirigeants ne doit donc pas servir de tremplin à une gestion abusive ou agressive des résultats. L'omission de ce principe ternie la méthodologie utilisée dans l'évaluation comptable et entraine à une gestion frauduleuse des résultats.

La gestion agressive des résultats à la hausse tend à s'inverser avec la même amplitude sur les périodes ultérieures (Draief et Chouaya 2012). En obérant les résultats actuels, les dirigeants s'offre une épargne discrétionnaire pour les années futures. En constatant des dotations aux provisions élevés, ils s'attendent à renverser cette tendance par des gains futurs, et ce malgré la situation négative présente.

DeAngelo et al. (1994) et Janes (2003) arguent qu'une gestion agressive des résultats à la baisse reflète les difficultés financières de la firme et l'incapacité de cette dernière à générer des liquidités futures afin de rembourser ses dettes (Draief et Chouaya 2012). Ils poursuivent en retenant que la gestion agressive à la baisse est expliquée par la volonté de « dramatiser » la situation pour obtenir une renégociation de la dette dans des termes plus favorables.

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Par ailleurs, Roychowdhury (2006) constate que « les entreprises essaient d'éviter les pertes en offrant des rabais de prix pour augmenter temporairement les ventes, en faisant une surproduction pour réduire le coût des produits vendus et en réduisant les dépenses discrétionnaires de manière agressive pour améliorer les marges » (p.336). La gestion agressive des résultats peut donc également se faire par l'activité réelle de l'entreprise. A la différence des accruals, ce type de gestion est irrémédiable. Pour cet auteur, les entreprises en perte de performance sont les plus enclines à gérer de manière agressive les résultats comptables.

Les études auxquelles nous avons eu accès ont mis en exergue les pratiques de GR dans les entreprises défaillantes. Nous introduisons la possibilité selon laquelle les niveaux de détresse financière sont susceptibles de différencier significativement les pratiques de GR. Notre hypothèse de recherche s'énonce donc comme suit :

Hypothèse 1 : Selon les niveaux de difficulté financière, il existe des trajectoires de gestion des résultats.

2. L'ampleur de l'endettement et la gestion des résultats dans les entreprises

défaillantes

Plusieurs études ont tenté de mettre en exergue le lien entre l'endettement et la GR. De prime abord, l'endettement est perçu comme une variable incitative à la GR, et cela au profit des créanciers.

Au regard de la théorie politico-contractuelle, le seul contrat d'endettement est une incitation à la GR. Watts et Zimmerman (1986) reconnaissent que l'existence d'un tel contrat pousse les dirigeants avoir une GR `'orthodoxe» qui soit la plus alignée possible sur l'utilité des créanciers. Fort de cela, Anagnostopouloua et Tsekrekos (2016) trouvent que les entreprises ayant un endettement élevé gèrent les résultats à la fois par l'activité réelle et par les accruals. De plus, les clauses d'endettement peuvent être des leviers de la GR. C'est ainsi que Defond et Jiambalvo (1994) trouvent qu'une gestion agressive des résultats survient un an avant la violation des clauses d'endettement. Dans le même esprit, Draief (2008) formule que « une gestion agressive à la hausse ou à la baisse est mal perçue par les créanciers et affecte positivement le coût d'endettement ».

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De surcroît, Dichev et Skinner (2002) concluent que les entreprises qui violent les contrats d'endettement sont beaucoup plus portées à gérer les résultats par amplification que les entreprises qui respectent les « debt covenants ». Leur analyse montre que la gestion des résultats est entreprise afin d'éviter le risque de défaut.

En outre, Rodríguez-Pérez et van Hemmen (2010) étudie l'impact de l'endettement et de la diversification sur la gestion des résultats. Leurs résultats montrent que lorsque les entreprises sont moins diversifiées et endettées, elles gèrent moins les résultats que celles qui sont plus diversifiées et endettées.

Fort de tout ce qui précède, nous notons que la théorie positive de la comptabilité ne retient pas le cas particulier des entreprises en difficulté financière. L'insolvabilité étant le critère majeur de la détresse financière, nous nous attendons à ce que les entreprises en difficulté aient des niveaux d'endettement élevés.

Mard (2004) teste l'hypothèse selon laquelle les entreprises fortement endettées tendent à gérer les résultats à la hausse. Ainsi, par des modèles de corrélation, il observe que les entreprises les plus endettés enregistrent des accruals discrétionnaires négatifs. Cependant, bien que son étude ne concerne pas le cas spécifique des entreprises en difficulté, il reconnait que de tels résultats témoignent des difficultés financières que traversent ces entreprises, sans précisé si ces difficultés sont permanentes ou sporadiques.

Fort de ces études, il est notable que le lien entre la gestion des résultats et l'endettement est endogène. Cependant, ces études n'ont pas suffisamment mis en exergue les pratiques de GR et la politique d'endettement dans les entreprises en difficulté financière. En considérant qu'en situation de détresse financière les créanciers ont une aversion à maintenir les mêmes niveaux de prêts, nous souhaitons étendre les réflexions antérieures sur le concept de rationnement des dettes. Plus précisément, nous souhaitons savoir s'il existe un lien entre la réduction des dettes et les pratiques de gestion des résultats dans les entreprises en difficulté financière.

En nous appuyant sur les travaux cités ultra, nous émettons l'hypothèse de recherche suivante :

Hypothèse 2 : En situation de détresse financière, la réduction des dettes (dettes financières à long terme) incite à une gestion des résultats à la hausse.

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3. La complémentarité entre les opérations exceptionnelles et la GR dans les entreprises en défaillance financière.

a. L'existence d'une complémentarité entre les produits exceptionnels et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes.

S'agissant des produits exceptionnels, la littérature s'est intéressée aux opérations de cession d'actifs. Mard (2006) retient que cette modalité de GR a trait aux décisions réelles. Ainsi, l'auteur distingue trois formes de GRAR, à savoir, la GR par les opérations d'exploitation, la GR par les opérations de financement et la GR par les opérations d'investissement. Il teste les hypothèses suivantes : (a) les cessions d'actifs sont utilisées pour atténuer les variations du résultat net d'une année sur l'autre et (b) il existe une corrélation positive entre les résultats des cessions d'actifs et les ratios d'endettement. Ces résultats montrent que les sociétés dont la performance est en baisse enregistrent des produits de cession plus élevés.

Somme toute, s'agissant de cette opération, il trouve que la GR se fait par le montant d'actifs cédés, en les choisissant au regard des plus ou moins-values qu'ils génèrent.

Wang et al (2009) observent que les produits de la cession des actifs immobilisés représentent 6.6% du résultat d'exploitation et 62% du résultat hors-exploitation. Les auteurs trouvent que les entreprises utilisent les cessions d'actifs immobilisés pour atteindre des seuils. Plus précisément, ils constatent que la cession des actifs immobilisés est utilisée pour éviter de déclarer des pertes.

En considérant que les produits exceptionnels peuvent aider à augmenter les résultats, il est possible que les entreprises en détresse financière soient emmenées à céder plus rapidement et de façon plus importante les actifs dont elles disposent. Dans cette éventualité, nous préjugeons que les entreprises défaillantes constatent davantage de produits, qui peuvent être additionnels à la GR (si celle-ci est à la hausse). Notre hypothèse s'énonce donc comme suit :

Hypothèse 3a : Il y a une complémentarité significative entre les produits exceptionnels et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes. Aussi, selon les niveaux de détresse financière, il existe des complémentarités différenciées entre ces variables.

b. L'existence d'une complémentarité entre les charges exceptionnelles et la gestion des résultats dans les entreprises en difficulté financière.

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La gestion des résultats par les charges exceptionnelles peut servir de levier pour atteindre des objectifs en termes de gestion des résultats. Nous supposons qu'en période de détresse financière, la gestion des résultats peut être compléter par charges exceptionnelles à la baisse ou à la hausse.

S'agissant de la GR par les charges exceptionnelles, la littérature s'est particulièrement intéressée aux créances irrécouvrables. Pour les entreprises en difficulté financière, l'incapacité à recouvrer les créances est l'une des causes de la détresse financière du cycle d'exploitation. Toutefois, DeAngelo (1988) reconnaissait déjà qu'en raison de l'obligation d'évaluation des créances irrécouvrables par l'auditeur, la gestion des résultats par cette catégorie de créances est « assez faible ». De plus, elle précise que la GR par les créances irrécouvrables est « incompatible avec le lissage des résultats » mais est « cohérente » avec l'hypothèse selon laquelle « les entreprises gèrent leurs résultats en choisissant des accruals décroissants lorsque le résultat est élevé ».

Sachant que les charges exceptionnelles peuvent aider à l'atteinte d'un résultat plus faible, nous supposons qu'elles peuvent également aider à nettoyer les comptes par la réduction des résultats dans le cas où les entreprises sont dans une situation de détresse financière. Notre hypothèse de recherche est la suivante :

Hypothèse 3b : Il y a une complémentarité significative entre les charges exceptionnelles et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes. Aussi, selon les niveaux de détresse financière, il existe des complémentarités différenciées entre ces variables.

4. La relation entre la structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes

a. La relation entre la structure de l'actionnariat et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes.

Les études portant sur la relation entre la structure de l'actionnariat et la GR ont trait aux effets de la concentration actionnariale sur l'ampleur de la GR (Beneish, 1997 ; Mard et Marsat, 2012 ; Zhong et al., 2007 ; ...). D'aucuns pensent que la concentration du capital entre un petit nombre d'actionnaires désincite à la GR (c'est le cas de Beneish, 1997) et d'autres concluent que les entreprises dont le capital est diffus sont plus enclines à gérer les résultats comptables.

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Dans une publication intitulée « La structure de l'actionnariat explique-t-elle la décision de couverture du risque ? », Fayolle et Jarboui trouvent que la structure de l'actionnariat n'influence pas significativement les opérations de couverture du risque financier. Autrement dit, leurs travaux montrent qu'il y a une indépendance entre les décisions relevant des actionnaires et celles relevant du dirigeant. Cependant, leurs travaux n'ont concerné que le risque de change et le risque client. Lesquels sont des pertes comptables et financières, et ne peuvent être représentatives à elles seules de l'état de détresse financière.

Nous souhaitons étendre cette réflexion à la défaillance financière. En raison de son enjeu sur la survie des entreprises, nous considérons que les actionnaires peuvent influencer les choix comptables et les décisions relevant de la gestion normale de ces entreprises.

Hypothèse 4a : Lorsque les entreprises sont défaillantes, il existe une association significative entre la concentration de l'actionnariat et les choix comptables et financiers relevant de l'exploitation (décisions de couverture du risque de change, risque clients, ...).

Nous nous intéresserons également à la relation entre la nature de la structure de l'actionnariat et la GR dans les entreprises en difficulté. Mard et Marsat (2012) précise que la nature des actionnaires peut influencer les pratiques de GR. Ils indiquent que les objectifs poursuivis par un actionnaire dirigeant, familial, financier et étatique sont fondamentalement différents et pourraient significativement impacter les choix en matière de gestion comptable.

Par ailleurs, les auteurs précisent que la gestion des résultats est faible dans les entreprises dont l'actionnariat est familial. Ils identifient trois raisons qui expliquent les faibles manipulations comptables dans ce type d'entreprises, à savoir le contrôle accru, les objectifs à long terme et l'image de l'entreprise. S'agissant du contrôle accru, ils soutiennent que la nature patrimoniale du capital interfère substantiellement dans les pratiques de gestion de ces entreprises. De plus, les objectifs poursuivis par les entreprises dont l'actionnarial est familial sont sur le long terme. Enfin, ils reconnaissent que l'existence même d'une gestion des résultats découragerait ce type d'actionnaires à cause de l'image de manipulateurs comptables que cela renverrait.

Fort de cela, nous supposons qu'au début des difficultés financières les modes de gestion de ces entreprises sont susceptibles de changements. Le risque de la faillite pourrait pousser cette catégorie d'actionnaires à avoir des modes de gestion des résultats plus intenses.

Hypothèse 4b : En période de détresse financière, l'actionnariat familial est associé significativement à la gestion des résultats.

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b. La gouvernance d'entreprise et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes

Les études sur la gouvernance d'entreprise et la gestion des résultats peuvent être regroupées en deux groupes : les études sur la gouvernance d'entreprise externe et celles portant sur la gouvernance d'entreprise interne.

S'agissant de la gouvernance d'entreprise externe, on retient que (a) la protection des investisseurs externes compte dans l'étendue de la GR -la raison en est que plus le système juridique protège les investisseurs externes, plus la gestion des résultats est moindre, et inversement- et (b) les entreprises qui sont sur le point d'être acquises ou de perdre le contrôle ont d'avantage d'incitations à gérer les résultats pour éviter cela.

Concernant la gouvernance d'entreprise interne, (a) la structure de propriété peut avoir une influence sur la GR -dans une entreprise dont la structure de propriété est concentrée les pratiques de gestion des résultats sont plus courantes, afin de couvrir l'enracinement des propriétaires (développé par Man, 2013)- (b) il y a une relation négative entre l'indépendance du CA et la GR et (c) les femmes administrateurs développent des positions fortes de leadership et de contrôle, ce qui emmène les dirigeants à avoir une plus faible latitude à gérer les résultats (Man, 2013, p. 391).

En retenant le cas spécifique des administrateurs indépendants, nous supposons que la difficulté financière inverse la relation négative existante entre l'indépendance du conseil d'administration et la gestion des résultats.

Hypothèse 4c : En période de détresse financière, l'indépendance du conseil d'administration est positivement et significativement associée à la gestion des résultats.

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Tableau 5 : Quelques études relatives à la gestion des résultats et à la défaillance financière

Etudes

Périodes

Echantillons

Variables

Méthodologie

Principaux résultats

La relation entre la GR (accruals et

activité réelle) et la

détresse financière

Dépendantes

Indépendantes

Campa et Camacho- iñano (2015)

Mai-Juin

2010

362

entreprises

1086

observations

recueillies
auprès de la
Cour de
Justice de
Commerce de
Madrid

ABNCFO (Cash-flow anormal)

ABNPROD (Production anormale)

AWCA (Besoin en Fonds de roulement anormal).

DISTRESS
(niveau de
détresse
financière avant-
faillite)

SIZE (log des
actifs totaux)

CFO (cash-
flow/actifs totaux)

LEV (levier
mesuré par les
dettes totals sur
capitaux)

ROA
(variation

Ils mesurent la
détresse financière
par l'indicateur de
Fich et Slezak
(2008), qui est une
variable
dichotomique, à
savoir 1 (si le ratio
du résultat sur les
intérêts est inférieur
à 1) si la firme est
défaillante et 0 sinon
(si le ratio du résultat
sur les intérêts est
supérieur à 1).

L'estimation de laEISSUE

gestion réelle des
résultats s'est faite

L'analyse des régressions

montre que (1) les
entreprises présentant les

plus hauts niveaux de

détresse financière font
moins de la gestion du résultat par les cash-flows

(le â1 de la variable
DISTRESS est à -0.049 et

significatif au seuil de
10%). Par contre (2) elles le font plus par les coûts de

production (le â1 de la
variable DISTRESS est à

+0.149 et significatif au

seuil de 1%). Enfin, ils
montrent que (3) dans une période de faible détresse

Positive par
l'activité
réelle (coût
de
production).

75

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annuelle des
détenteurs de
capitaux)

DISSUE
(variation
annuelle des
dettes)

GROWTH
(variation
annuelle des
ventes nettes).

par la méthode de

Roychowdhury
(2006), à savoir le
Cash-flow anormal

et la production

anormale.

Ils estiment
également la gestion
des résultats par le
modèle de Ddefond
et Park (2001) sur le
BFR anormal.

financière, les entreprises présententun BFR anormal élevé tandis que pendant

une période de haute
détresse financière, le BFR anormal est présente un niveau faible (le â1 de la variable DISTRESS est à - 0.087 et significatif au seuil de 10%).

 

Rodríguez-
Pérez et van
Hemmen
(2010)

1992-2002

192
enteprises
non-
financières
(soit 1853
observations)

DACi,t
(accruals
discétionnair

es) Les
auteurs
estiment les
accruals
discrétionnair
es par 5
modèles
différents :
Modèle de
Jones (1991),
Jones
modified
(1994),
McNichols

DEBT ( dettes
totales / actifs
totaux )

DIV (variable

dichotomique : 1
si la firme est
diversifiée et 0

sinon)

DIV*DEBT
(interaction entre
la dette et la
variable muette
de diversification
)

Ils utilisent une
régression linéaire
multiple afin
d'apprécier
l'association et la
significativité entre
la variable
dépendante et les
variables
indépendantes,
précisement celles
aui renvoient à la
diversification et à
l'endettement.

La dette est négativement

et significativement

associée aux accruals

discrétionnaires (tous les
modèles). Ceci traduit que plus il y a de dettes, plus les

débiteurs controlent la

gestion des résultats.

Lorsqu'on rassemble la
dette et la diversification (variable DIV*DEBT) les coefficients sont positifs et significatifs en moyenne au seuil de 5%. Les auteurs

concluent que les

entreprises moins

diversifiées et qui sont

 

76

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(2002),
Kothari et al
(2005) et
Hribar et
Collins

LOGTA (log des
actifs, indicateur
de taille )

EFTAX (l'impôt)

 

endettées gèrent moins

leurs résultats que les
entreprises qui sont à la fois diversifiées et endettées.

 
 
 
 

(2002).

GROU (relation entre la GR et la taille des filiales, total des filiales /

 
 
 
 
 
 
 

Revenus totaux )

 
 
 
 
 
 
 

IDEBT (variable

qui capture les niveaux de dettes qui s'écartent de

la moyenne)

 
 
 
 
 
 
 

ICAP (difference
entre

l'augmentation de

 
 
 
 
 
 
 

K et les titres
émis sur le
marché)

 
 
 
 
 
 
 

BSIX (les six
grands auditeurs).

 
 
 
 
 
 
 

La littérature
retient qu'ils
s'opposent aux
choix comptables
qui visent à

 
 
 

77

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augmenter les
résultats.

 
 
 

Perols et

Octobre

108

Fraud

Aggregated Prior

Les auteurs ont

L'association entre la

Positive par

Lougee

1999-

entreprises

(variable

Discretionary

utilisé la régression

variable représentant les

les accruals

(2011)

Septembre

(54

dichotomique

Accruals

logistique.

accruals discrétionnaires et

 
 

2005

entreprises
fraudeuses,
AAER-

SEC et 54
non

fraudeuses).

, qui prend la valeur 1 si l'entreprise est fraudeuse et 0 sinon)

(correspond à la
somme des
accruals en t-1, t-
2 et t-3)

Meeting or
Beating Analyst
Forecasts (est une
variable muette,
qui prend 1 si les
prévisions des
analystes
correspondent ou
excedent et 0
sinon).

 

celle des prévisions des

analystes est positive et
significative (p= 0.008), la

gestion des résultats

pendant ces années est

associée à une forte
probabilité de fraude.

 
 
 
 
 

Unexpected,Reve
nue per Employee

 
 
 
 
 
 
 

(différence entre

 
 
 

78

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une entreprise et
son secteur dans
la variation du
pourcentage de
revenus par
employé de t-1 à
t0).

 
 
 
 
 
 
 

Aggregated Prior

 
 
 
 
 
 
 

Discretionary

 
 
 
 
 
 
 

Accruals

 
 
 
 
 
 
 

*Meeting or

 
 
 
 
 
 
 

Beating Analyst

 
 
 
 
 
 
 

Forecasts

 
 
 
 
 
 
 

Aggregated Prior

 
 
 
 
 
 
 

Discretionary

 
 
 
 
 
 
 

Accruals

 
 
 
 
 
 
 

*Unexpected

 
 
 
 
 
 
 

Revenue per

 
 
 
 
 
 
 

Employee

 
 
 
 
 
 
 

Control variables
(ensemble de
variables :

 
 
 
 
 
 
 

Percent

inside Directors,

 
 
 
 
 
 
 

Auditor, CFO

 
 
 
 
 
 
 

Change, Sales to

 
 
 

79

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Assets, AR
Growth, Gross
Margin Growth,
Sales Growth,
Current
Discretionary
Accruals, LIFO,
Debt to
Equity, Return on
Assets, Total
Assets, and Total
Sales).

(un coefficient est
associé à chacune
des variables
précitées)

 
 
 

Filip et
Raffournier

(2014)

2006-2009

8266
observations
annuelles
d'entreprises
de 16 pays de
l'UE.

Première mesure de lissage des
résultats de Leuz et al, 2003
(écart-type des CF divisé par
écart-type des RN)

Deuxième mesure de lissage des
résultats de Leuz et al.
(correlation de Spearman de la
différence entre les variations des
provisions et les variations de
CF).

Accruals discrétionnaires (Jones
modified)

Régressions linéaires
multiples pour les
mésures d'accruals
discrétionnaires.

Les deux mesures de

lissage présentent les
valeurs les plus basses en

2008 pour la première
mesure (0.750) et en 2009 pour la deuxième mesure

(0.576) alors que les
valeurs les plus élevées de lissage remontent à 2007

(respectivement pour la

première et deuxième

mesure : 1.015 et 0.685).
Une petite valeur de lissage

En période
de détresse
financière,
la gestion
des résultats
par les
accruals
s'aménuise.

80

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Accruals discrétionnaires (Jones
et al. 2008)

Accruals discrétionnaires
(Dechow et Dichev, 2002).

 

traduit une diminution de lissage du résultat au cours

de la période de crise

financière (laquelle a
débuté en 2007).

S'agissant des accruals, les trois modèles d'estimation montrent qu'ils ont baissé sur la période de la crise financière. Dans le modèle de Jones 1, en 2007 ils

équivalent à 0.203 alors

qu'en 2008 ils valent
0.124. Idem pour le modèle de Jones 2, qui passent de 0.186 à 0.118. Enfin, dans

le modèle de DD, ils
passent de 0.177 à 0.116.

 

Dimitras et al.

(2015)

2005-2011

46 entreprises
portugaises
(362
observations)

44 entreprises
irlandaises
(297
observations)

242

entreprises

Accruals
discrétionnair
es (Jones
1991).

BIGAi,t (variable
muette, qui prend
1 quand les
entreprises sont
auditées par un
big 4 et 0 sinon)

CFi,t (cash-flows)

OMi,t (Marge
brute

d'exploitation)

Régression linéaire
multiple

Les auteurs ont partitionné leurs résultats en 5 panels, représentant les 5 pays sur lesquels leur étude a porté.

Le panel A, des entreprises

portugaises, montre que
ces dernières lorsqu'elles en détresse financière et auditées par un BIG 4,

augmentent leurs
manipulations comptables,

De manière
générale, sur
l'étendue
des panels
étudiés, il
vient que les
le RN et
BFR
négatifs sont
négativemen
t associés

81

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italiennes

(1784
observations)

138
entreprises
grecques
(1715
observations)

112

entreprises
espagnoles

 

MBVi,t (valeur de
marché sur la
valeur de
l'entreprise)

SPi,t (proxies des

petits profits, prend 1 si le RN divisé par le total des actifs est entre

0 et 0.01 et 0

sinon)

 

coeffiient positif à 0.295 et significatif au seuil de 1%).

Le panel B montre que les

grandes entreprises
réduisent leurs gestion des

résultats. Aussi, les

entreprises en détresse

financière (présentant un

RN et BFR négatifs,

aménuisent leurs

manipulations comptable,

coefficient du RN et BFR

aux accruals discrétionnai res, excepté pour les entreprises portugaises.

 
 

(911

 

LLi,t (proxies de

 

négatifs est négatif à -0.179

 
 
 

observations)

 

la reconnaissance

 

et significatif à 5%, avec un

 
 
 

.

 

des pertes, prend
1 si le RN divisé

 

R2 à 0.169.

 
 
 
 
 

par le total des

 

Le panel C, des entreprises

 
 
 
 
 

actifs est inférieur

 

italiennes, montre que les

 
 
 
 
 

à -0.20 et 0 sinon)

 

entreprises en détresse

financière gèrent leurs

 
 
 
 
 

GDPi,t (croissance
du PNB ajusté de

 

résultats vers le bas,

coefficient du RN et BFR

 
 
 
 
 

l'inflation)

 

négatifs est négatif à -0.262

 
 
 
 
 

LEVi,t (ratio des

 

et significatif à 1%, avec un

 
 
 
 
 

dettes sur le total

 

R2 à 0.142.

 
 
 
 
 

de l'actif )

 

Le panel D, des entreprises

 
 
 
 
 

ROAi,t (résultat

 

grecques en détresse

 
 
 
 
 

net sur le total des

 

financière, montre qu'elles

 
 
 
 
 

actifs)

 

gèrent leurs résultats vers le bas, le coefficient du RN

 

82

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D1i,t (variable

 

et BFR négatifs est négatif

 
 
 
 
 

muette codée si

 

à -1.295 et significatif à

 
 
 
 
 

le RN de l'année

 

1%, avec un R2 à 0.885.

 
 
 
 
 

actuelle est

 

Le panel E, des entreprises

 
 
 
 
 

négatif et sinon)

 

espagnoles montre (1) une

 
 
 
 
 

D2i,t (variable

 

relation négative entre le

 
 
 
 
 

muette codée si

 

ROA et les accruals

 
 
 
 
 

le BFR de l'année

 

discrétionnaires (-0.798 et

 
 
 
 
 

actuel est négatif

 

significatif à 1%) et (2) les

 
 
 
 
 

et sinon).

 

entreprises en détresse

financière présentent un

 
 
 
 
 

D3i,t (variable

 

coefficient de la variable

 
 
 
 
 

dichotomique

 

RN et BFR négatifs à -

 
 
 
 
 

codée 1 si
l'association des
variables du RN
et BFR de l'année
actuelle est
negative et 0
sinon).

 

0.149 et significatif à 5%, avec un R2 à 0.135.

 

83

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Deuxième partie :

Cadre méthodologique et empirique

84

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A. L'Echantillon et méthode de classement des panels

Notre échantillon se compose de 149 entreprises du secteur agricole français tirées de la base de données Altares (toutes étant des sociétés anonymes disposant d'un CA). La période de notre étude s'étale de 2011 à 2014. De plus, nous avons retranché les entreprises dont les données étaient manquantes (entreprises dont l'exercice était inférieur à 12 mois et les entreprises ne disposant pas des données comptables suffisantes).

Pour classer les entreprises en fonction de leur situation financière, nous avons utilisé l'indice de Conan et Holder. Contrairement à l'indice d'Altman, qui ne distingue que le groupe des entreprises saines et celui des entreprises défaillantes, la mesure discriminante de Conan et Holder a la particularité de mettre en exergue une situation intermédiaire, qui est le niveau minimum de la difficulté financière.

Au regard de la discrimination de cette indice, nous distinguons bien 3 groupes, représentant les trois niveaux de situation financière. Le premier groupe est constitué de 41 entreprises dont la santé financière est bonne, un deuxième groupe est constitué de 35 entreprises dont la situation financière est faiblement sensible (nous nommons niveau 1 de la défaillance financière) et enfin un troisième groupe est constitué de 73 entreprises dont la situation financière est fortement sensible (nous nommons niveau 2 de la difficulté financière).

B. La mesure des variables de l'étude

Pour tester les hypothèses de notre étude, nous avons employé diverses méthodologies.

1. La mesure de la gestion des résultats.

Nous avons utilisé les deux mesures de gestion des résultats, à savoir la GR par les choix comptables (accruals) et la GR par l'activité réelle. S'agissant de la GR par les choix comptables, nous avons retenu le modèle Jones modifié de Dechow et al. (1995). La formulation de ce modèle est présentée dans la revue de la littérature. La gestion des résultats par l'activité réelle a été estimée par la méthode de Roychowdhury relative aux cash-flows anormaux et à la production anormale.

85

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2. La réduction de l'endettement

Pour tester l'hypothèse de la réduction de l'endettement, nous avons retenu le seul groupe des entreprises dont la santé financière est fortement dégradée. Ensuite, nous avons divisé ce groupe en deux sous-groupes : le groupe des entreprises dont la moyenne de la variation des dettes est négative et celle dont la moyenne de la variation des dettes est positive. En décomposant ce groupe de cette manière, nous observerons s'il y a des tendances de GR différenciées dans chaque sous-groupe.

3. La complémentarité entre les produits et charges exceptionnels et la gestion des

résultats dans les entreprises en difficulté.

Afin de tester la complémentarité entre ces variables, nous avons choisi de faire des régressions de manière itérative entre les variables de GR et les produits et charges exceptionnels sur opérations de gestion.

Nos modèles de base sont les suivants :

CEX;,t = a1 + a2DAC;,t + a3ACF;,t + a2APROD;,t + a2RN;,t + a3ENDET;,t + a4TAIL;,t + E;,t
PEX;,t = a1 + a2DAC;,t + a3ACF;,t + a2APROD;,t + a2RN;,t + a3ENDET;,t + a4TAIL;,t + E;,t

Puis par itération, nous remplacerons les variables dépendantes par les trois mesures de GR pour tester la pertinence de leurs complémentarités.

C. Les résultats, interprétations et limites

Dans cette partie nous testerons les hypothèses de recherche de notre étude en nous appuyons sur les méthodologies citées précédemment.

1. La gestion des résultats différenciée selon les niveaux de difficulté financière.

1.1. Les statistiques descriptives des variables de la GR

Les statistiques descriptives des variables de GR montrent que dans chaque groupe de notre étude il existe des tendances de GR. Nous avons jugé utile de présenter les statistiques

86

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descriptives en valeur et en valeurs absolues. L'intérêt de présenter les statistiques en valeurs découle de la prise en compte du sens (positif ou négatif) des variables de GR et les statistiques en valeurs absolues visent à observer l'ampleur de la GR dans chaque groupe. Afin d'observer la fluctuation des variables et leurs tendances centrales, nous avons retenu comme mesure : la moyenne, la médiane et les quartiles 1 et 3.

Les sorties du logiciel r nous renseignent sur les données ci-dessous. Quand nous étudions les statistiques descriptives en valeurs, la moyenne dans chaque groupe est presque nulle. Cependant les médianes nous indiquent les tendances centrales.

1.1.1. Les statistiques descriptives en valeurs

a. Les accruals discrétionnaires

En nous référant à la médiane, dans le premier groupe nous enregistrons plus d'entreprises qui gèrent à la hausse leurs résultats par les accruals que dans le second groupe, où il y a une plus grande proportion d'entreprises qui gèrent les résultats par les accruals à la baisse. Enfin dans le troisième groupe, nous notons que les entreprises ont une plus grande tendance à gérer les résultats à la hausse plutôt qu'à la baisse.

b. Les cash-flows anormaux

S'agissant des cash-flows anormaux, ils augmentent au fil de l'amplification de la défaillance financière. Ils passent donc de 0.002 dans le groupe 2 à 0.008 dans le groupe 3. Retenons que dans le groupe des entreprises saines, la plus grande proportion des entreprises gèrent les résultats à la baisse.

c. La production anormale

Contrairement au groupe des entreprises saines, nous observons moins d'entreprises qui gèrent les résultats à la hausse par la production anormale. Cependant, nous notons que lorsque la défaillance s'amplifie (groupe 3), la proportion d'entreprises qui gèrent les résultats à la hausse par cette variable augmente à nouveau. Il semble donc que les difficultés financière extrêmes sont une incitation à la gestion des résultats à la hausse.

87

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En appliquant le t-test de Student aux moyennes des deux groupes d'entreprises défaillantes, nous ne pouvons affirmer qu'elles sont statistiquement significatives (les p-values des trois tests étant toutes supérieures à 0.05).

1.1.2. Les statistiques descriptives en valeurs absolues

a. Les accruals discrétionnaires

Dans le tableau des mesures de GR en valeurs absolues, nous constatons que la moyenne et la médiane des accruals discrétionnaires sont variables d'un groupe à l'autre. Dans le groupe des entreprises saines, elles se situent respectivement à 0.069 et 0.059, dans le groupe des entreprises faiblement défaillantes elles baissent à 0.042 et 0.030 et enfin elles augmentent à nouveau à 0.077 et 0.059 dans le groupe des entreprises fortement défaillantes. En présence d'échantillons indépendants, nous avons utilisé un test paramétrique (le Test t de Student) de comparaison des moyennes. S'agissant de la comparaison des moyennes des accruals discrétionnaires du groupe 2 (entreprises faiblement défaillantes) et du groupe 3 (entreprises fortement défaillantes), le t-test présente une valeur de 3.33 avec une p-value à 0.001. Pour que l'on puisse conclure que les moyennes sont statistiquement différentes, il faut que la p-value soit inférieure à 0.05. Dans notre cas, la p-value est inférieure au seuil de 0.05. On peut donc dire que la différence des moyennes est statistiquement significative.

b. Les cash-flows anormaux

Dans le tableau des mesures de GR en valeurs absolues, nous constatons que la moyenne et la médiane des cash-flows anormaux sont également variables d'un groupe à l'autre. Dans le groupe des entreprises saines, elles se situent respectivement à 0.196 et 0.170, dans le groupe des entreprises faiblement défaillantes elles baissent à 0.052 et 0.041 et enfin elles augmentent à nouveau à 0.081 et 0.062 dans le groupe des entreprises fortement défaillantes. Le t-test présente une valeur de 2.77 avec une p-value à 0.006. On peut donc dire que la différence des moyennes est statistiquement significative.

c. La production anormale

Dans le tableau des mesures de GR en valeurs absolues, nous constatons que la moyenne et la médiane de la production anormale sont également variables d'un groupe à l'autre. Dans le

88

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française.

groupe des entreprises saines, elles se situent respectivement à 0.207 et 0.132, dans le groupe des entreprises faiblement défaillantes elles baissent à 0.090 et 0.073 et enfin elles s'apprécient à 0.113 et 0.086 dans le groupe des entreprises fortement défaillantes. Le t-test présente une valeur de 1.33 avec une p-value à 0.182. On ne peut donc dire que la différence des moyennes est statistiquement significative.

89

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française.

Tableau 6 : Les statistiques descriptives des variables de GR en valeurs

 

Groupes des entreprises saines
(n=41)

Groupe des entreprises faibl. défail.

(n=35)

Groupe des entreprises fort. défail.

(n=73)

t-test

a En valeurs

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Comparaison des
moyennes des
groupes 1&3

DAC*

-0.00

0.001

-0.053

0.086

-0.00

-0.006

-0.146

0.007

-0.00

0.008

-0.035

0.019

0.00

(p-value : 0.999)

ACF*

-0.001

-0.282

-0.081

0.086

0.00

0.002

-0.018

0.077

0.00

0.008

-0.030

0.047

0.00

(p-value : 0.999)

APROD*

0.00

0.053

-0.091

0.132

0.00

0.015

-0.043

0.077

-0.00

0.032

-0.062

0.086

0.01

(p-value : 0.988)

Tableau 7 : Les statistiques descriptives des variables de GR en valeurs absolues

 

Groupes des entreprises saines
(n=41)

Groupe des entreprises faibl. défail. (n=35)

Groupe des entreprises fort. défail.

(n=73)

t-test

b En valeurs absolues

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Comparaison des
moyennes des
groupes 1&3

DAC*

0.069

0.059

0.046

0.084

0.042

0.030

0.179

0.055

0.077

0.055

0.034

0.087

3.33

(p-value : 0.001)

ACF*

0.196

0.170

0.092

0.251

0.052

0.041

0.029

0.069

0.081

0.062

0.036

0.099

2.77

(p-value : 0.006)

APROD*

0.207

0.132

0.103

0.206

0.090

0.073

0.039

0.120

0.113

0.086

0.049

0.130

1.33

(p-value : 0.182)

* DAC : Discretionary Accruals ACF : Abnormal Cash-flows APROD : Abnormal Production

90

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française.

1.2. L'existence de trajectoires différenciées selon les niveaux de difficulté financière

Afin de tester notre hypothèse de recherche, nous avons distingué deux types de trajectoires : les trajectoires par le nombre d'entreprise qui gèrent à la hausse ou à la baisse (la médiane en valeurs) et la trajectoire par l'ampleur de la gestion des résultats (la moyenne en valeurs absolues).

1.2.1. L'existence des trajectoires différenciées par le nombre d'entreprises qui gèrent à la hausse ou à la baisse leurs résultats selon les niveaux de difficulté financière.

La tendance centrale des variables de gestion des résultats montre qu'il existe des trajectoires différenciées selon le niveau de difficulté financière. Dans le groupe des entreprises saines, il y a plus d'entreprises qui gèrent les résultats à la hausse par les accruals discrétionnaires et par la production anormale. Tandis qu'il y a plus d'entreprises qui gèrent les résultats à la baisse par les cash-flows anormaux.

Dans le groupe des entreprises faiblement défaillantes la tendance s'inverse, il y a plus d'entreprises qui gèrent les résultats à la hausse par les accruals discrétionnaires et les cash-flows anormaux. Par contre, nous observons qu'un plus grand nombre d'entreprises gèrent les résultats à la baisse par la production anormale.

Dans le groupe des entreprises fortement défaillantes, il y a plus d'entreprises qui gèrent les résultats à la hausse par la production anormale, les cash-flows anormaux et les accruals discrétionnaires.

91

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française.

Médiane

-0,006

0,002

Groupe 2

Médiane

Groupe 1

0,01 0

0,053

-0,252

-0,043

DAC ACF APROD

0

0

0,032

0,008

0,008

Médiane

Groupe 3

Figure 6 : Représentation des trajectoires des médianes des variables de GR

1.2.2. L'existence des trajectoires différenciées (par l'ampleur) de la gestion des résultats selon les niveaux de difficulté financière.

Au début de la défaillance financière, les entreprises gèrent les résultats à la baisse comparativement au groupe des entreprises saines, l'ampleur de la GR s'amenuise pour les trois variables (DAC, ACF et APROD). Lorsque la difficulté s'intensifie, les indicateurs de GR augmentent.

Il semble que lorsque les entreprises sont faiblement défaillantes, elles sont poussées à gérer leurs résultats plus par l'activité réelle que par les accruals discrétionnaires. Le constat est le même pour le groupe des entreprises fortement défaillantes. En nous référant aux statistiques descriptives en valeurs, nous remarquons que les médianes des accruals discrétionnaires et de la production anormale du groupe 3 sont différentes de leurs moyennes. La moyenne négative implique que l'ampleur de la GR à la baisse est plus importante que l'ampleur de la GR à la hausse. Une plus grande proportion d'entreprises est encline à gérer les résultats à la baisse afin de liquider les pertes et repartir sur des bases saines et une autre proportion gère les résultats à la hausse pour simuler de performances ou accélérer les ventes (par des réductions commerciales par ex.).

92

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Nos résultats rejoignent les conclusions de Campa et Camacho-Minano (2015), qui formulaient qu'en période de détresse financière les entreprises défaillantes gèrent plus les résultats par l'activité réelle que par les accruals discrétionnaires. Nous notons également que l'amplification de la difficulté financière (voir le groupe 3) accroit l'ampleur de la gestion des résultats.

 
 

0,1

0,09

 

0,0

 
 

0,073

0,0

0,052

0,042

 

0,041

 

0,03

 
 
 
 

0 1 2 3

Groupes

APROD ACF DAC

Ampleur de la GR

0,12 0,1 0,08 0,06 0,04 0,02

0

13

81

77

Figure 7 : Représentation des niveaux de GR (les moyennes en valeurs absolues)

2. Les effets de la réduction de l'endettement sur la gestion des résultats des entreprises

défaillantes.

Nous avons retenu comme deuxième hypothèse que la réduction de l'endettement est susceptible d'atténuer la gestion des résultats. Afin de tester cette hypothèse de recherche, nous avons estimé dans le groupe des entreprises fortement défaillantes, celles qui présentaient en moyenne une variation négative des dettes sur la période de notre étude. Nous nous sommes intéressés à observer le comportement des variables de GR. Le tableau suivant présente les différences entre l'ampleur de la GR des entreprises fortement défaillantes et parmi elles, celles qui ont réduit leurs dettes.

93

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Tableau 8 : Différence de l'ampleur de GR entre les entreprises réductrices et non-
réductrices des dettes (en moyenne)

 

DAC

ACF

APROD

Groupe des entreprises
fortement défaillantes

0.077

0.081

0.113

a Groupe a

0.045

0.055

0.105

b Groupe b

0.046

0.051

0.108

b Le groupe a est celui des entreprises fortement défaillantes ayant en moyenne des variations positives des dettes

c Le groupe b est celui des entreprises fortement défaillantes ayant en moyenne des variations négatives des dettes.

Figure 8 : Représentation du voisinage de l'ampleur de la GR entre les entreprises
défaillantes réductrices et non-réductrices des dettes.

Ampleur de la GR

0,12

0,08

0,06

0,04

0,02

0,1

0

0 1 2 3

DAC; 0,045

Groupe a Groupe b

DAC; 0,046

Groupes

ACF; 0,055

ACF; 0,051

APROD; 0,105

APROD; 0,108

Nous n'observons pas de différence marquante de GR entre les entreprises défaillantes n'ayant pas en moyenne des variations négatives des dettes et celles qui ont en moyenne des variations des dettes négatives.

94

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Figure 9 : Représentation de la GR par les accruals sous l'hypothèse de la réduction des

dettes

0,35

Niveau de GR

-0,05

0,25

0,15

0,05

-0,1

0,3

0,2

0,1

0

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

-0,15

Nombre d'enteprises

-0,25

Nombre d'entreprises

0,2

6

7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

0

Niveau de GR

-0,05

-0,1

-0,15

-0,2

1

0,15

0,1

0,05

3

2

5

4

Figure 10 : Représentation de la GR par les cash-flows anormaux sous l'hypothèse de la
réduction des dettes

95

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Figure 11 : Représentation de la GR par la production anormale sous l'hypothèse de la
réduction des dettes

0,8

Nombre d'entreprises

-0,6

Niveau de GR

-0,2

-0,4

0,6

0,4

0,2

0

1

2

3

4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

Fort de ce qui précède, nous concluons qu'il semble que la réduction des dettes incite les entreprises à gérer leurs résultats à la hausse. Bien que l'ampleur de la GR semble indifférenciée entre les groupes des entreprises ayant réduit leurs dettes et celles n'ayant pas réduit leurs dettes, il est remarquable que la tendance générale de la GR est à la hausse.

3. Les activités exceptionnelles et la gestion des résultats dans les entreprises en

difficulté financière.

3.1. Les statistiques descriptives des variables

A la lecture du tableau des statistiques descriptives des deux échantillons, nous notons que les charges et les produits exceptionnels sont en moyenne plus importants dans le groupe des entreprises fortement défaillantes. En outre, dans le groupe des entreprises faiblement défaillantes, nous observons que 20% des entreprises n'ont pas enregistré des charges exceptionnelles et 33% des entreprises de l'échantillon n'ont pas comptabilisé des produits exceptionnels. Dans le groupe des entreprises fortement défaillantes, les proportions sont respectivement de 30 et 40%.

96

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française.

Par ailleurs, nous constatons que l'endettement, la taille et les variables de GR sont en moyenne plus grandes dans le groupe des entreprises fortement défaillantes.

3.2. Les produits et les charges exceptionnels comme variables complémentaires de la gestion des résultats des entreprises en difficulté

Nous avons estimé les variables de la régression linéaire en nous inspirant du modèle de Mard (2006) relatif à l'association entre les produits de cession et la variation du résultat net. Comme variables explicatives, nous avons retenu les mesures de GR et comme variables de contrôle : le résultat net et l'endettement normés sur l'actif total et enfin la taille (le logarithme népérien de l'actif total). Dans un premier temps nous avons déterminé la matrice de corrélation des variables dépendantes et indépendantes, et dans un second temps nous avons élaboré les régressions linéaires multiples.

3.2.1. Le test de corrélation de Pearson des coefficients des variables dépendantes et

indépendantes.

Le coefficient de Pearson nous aide à mesurer le niveau de corrélation entre deux variables données. Ce coefficient est situé entre -1 et 1 avec deux indications majeures. Il est dit `'fort» lorsqu'il est compris entre 0.5 et 1 et `'faible» entre -0.5 et -1.

Nous avons construit deux matrices de corrélation, une pour chaque niveau de difficulté financière.

3.2.1.1. Le test de corrélation de Pearson du groupe des entreprises faiblement

défaillantes

S'agissant du groupe des entreprises faiblement défaillantes, nous constatons qu'aucune variable n'a un effet statistiquement significatif au seuil de 1%. Toutefois, la corrélation entre l'endettement et le résultat net est négative et significative au seuil de 10%, ce qui renseigne sur le fait que plus les entreprises sont endettées, plus le résultat net baisse de 0.4 fois. Nous notons également une corrélation significative au seuil de 10% entre la taille et les accruals discrétionnaires. Cela indique que la plus la taille augmente, plus les entreprises du groupe gèrent leurs résultats à la baisse par les accruals.

97

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Concernant des produits et charges exceptionnels, nous constatons que les corrélations sont mitigées. En effet, bien que non significative, les charges exceptionnelles ont un effet régressif sur la gestion des résultats. Autrement dit, lorsque qu'une unité supplémentaire de charges exceptionnelles augmente, les entreprises gèrent les résultats à la baisse, cela pour toutes les variables de GR (DAC, ACF et APROD). Les produits exceptionnels sont positivement et non-significativement corrélés aux accruals discrétionnaires et aux cash-flows anormaux. Ce qui implique que l'augmentation d'une unité supplémentaire des produits exceptionnels entraine par ricochet une gestion à la hausse desdites variables de GR, respectivement de 0.02 fois et 0.05 fois. Cependant, le raisonnement n'est pas le même entre les produits exceptionnels et la production anormale. En effet, ces variables sont négativement et non-significativement corrélées.

3.2.1.2. Le test de corrélation de Pearson du groupe des entreprises fortement défaillantes.

A la lecture du tableau, nous constatons que les trois mesures de GR (DAC, ACF et APROD) sont positivement et significativement corrélées entre elles au seuil de 1%.

Nous notons également que dans ce groupe, les produits et les charges exceptionnels sont négativement et non-significativement corrélés à toutes les mesures de GR. L'endettement est également négativement et non-significativement corrélé aux mesures de GR. Cependant, les corrélations entre l'endettement et les produits et charges exceptionnels sont positive.

Enfin, nous observons une corrélation négative au seuil de 10% entre le résultat net normé par l'actif total et les charges exceptionnels, ce qui est normal au regard du caractère régressif des charges. L'endettement est corrélé positivement et significativement au seuil de 10% avec les produits exceptionnels, ce qui semble indiquer que l'augmentation de l'endettement d'une unité se traduit par l'augmentation des produits exceptionnels et inversement.

3.2.2. Les tests d'association entre les produits et charges exceptionnels et les variables de

gestion des résultats

Afin de tester l'existence de la complémentarité entre les variables de GR et les produits et charges exceptionnels, nous avons procéder à des régressions linéaires multiples. L'existence

98

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des complémentarités différenciées sera observable au regard des coefficients estimés dans chaque panel de notre étude.

3.2.2.1. Les tests d'association sur le panel des entreprises faiblement défaillantes

Nous n'observons aucune variable endogène qui ait un impact sur les variables dépendantes. Toutefois, nous constatons que le coefficient de régression de la variable des charges exceptionnelles sur la production anormale est très élevé (de l'ordre de 5.401). il semble qu'au début de la détresse financière la production anormale s'associe à une forte proportion de charges exceptionnelles. Le signe négatif indiquerait le sens de la gestion des résultats dans ce cas de figure. Cependant, ce coefficient apparait non-significatif, ce qui indique que nous ne pouvons conclure sur la vraisemblance d'une telle relation.

3.2.2.2. Les tests d'association sur le panel des entreprises fortement défaillantes

Contrairement au panel des entreprises faiblement défaillantes, le groupe des entreprises fortement défaillantes présente des variables indépendantes significatives. S'agissant des variables des produits et charges exceptionnels, nous constatons que lorsqu'elles sont les variables dépendantes, aucune variables de GR n'est significativement associés à elles. Aussi les R2 des modèles de régression sont respectivement de 12.9% et 12%.

Par contre, les variables de GR sont significativement associées entre elles. Lorsque la production anormale est la variable dépendante, les autres variables de GR (les accruals discrétionnaires et la production anormale) sont significativement associées avec elle au seuil de 1%. Nous constatons aussi que les coefficients des produits et charges exceptionnels sont plus importants dans ce cas. Le R2 du modèle de régression est de 88.4%.

Comme dans le panel précèdent, les produits et charges exceptionnels ne sont pas significativement associés aux variables de GR.

4. Les limites de l'étude

Notre étude se confronte à quelques limites. Premièrement, sur un plan méthodologique,
l'estimation de la gestion des résultats par le modèle de Jones modifié aurait pu être améliorée

99

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par une plus grande étendue de la période de l'étude, l'indicateur de Conan et Holder ne se limite qu'à trois niveaux de la situation financière, d'avantage de niveaux de détresse financière aurait permis de mieux délimiter et observer les pratiques de GR. La méthode de distinction des entreprises réductrices et non-réductrices des dettes souffre d'une lacune. En effet, l'absence des données sur l'objet des décisions de réduction des dettes limite la validité de cette hypothèse.

De plus, la régression linéaire devant estimé le niveau de complémentarité entre la GR et les activités exceptionnelles peut être amélioré. En effet, nous n'avons choisi que trois variables de contrôle. Ces dernières peuvent limiter la pertinence et la significativité des variables dépendantes et indépendantes. Par ailleurs, on aurait pu estimer cette complémentarité différemment, en distinguant les entreprises qui gèrent les résultats à la hausse (en faisant des régressions seulement avec les produits exceptionnels) et celles qui gèrent les résultats à la baisse (en procédant à des régressions seulement avec les charges exceptionnelles).

Deuxièmement, l'échantillon de notre étude est limité. Avec un plus grand échantillon, sur des secteurs d'activité différents, cette étude aurait pu être plus élaborée.

100

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Tableau 9 : Statistiques descriptives des variables des régressions linéaires multiples

 

Groupe des entreprises faibl. défail.

(n=35)

Groupe des entreprises fort. défail.

(n=73)

t-test

a En valeurs

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Moyenne

Médiane

1er

Quartile

3e

Quartile

Comparaison des
moyennes des deux
groupes

CEX*

0.00

0.00

0.00

0.00

0.002

0.00

0.00

0.002

4.94

(p-value : 0.00)

PEX

0.00

0.00

0.002

0.001

0.01

0.00

0.00

0.002

1.87

(p-value : 0.06)

RN*

0.001

0.016

0.017

0.03

0.01

0.01

-0.02

0.06

1.11

(p-value : 0.269)

ENDET*

0.24

0.31

0.38

0.51

0.368

0.324

0.223

0.465

19.95

(p-value : 0.00)

TAIL*

3.533

3.767

3.837

4.109

3.650

3.544

3.317

3.869

63.80

(p-value : 0.00)

DAC*

0.042

0.030

0.179

0.055

0.077

0.055

0.034

0.087

3.33

(p-value : 0.001)

ACF*

0.052

0.041

0.029

0.069

0.081

0.062

0.036

0.099

2.77

(p-value : 0.006)

APROD*

0.090

0.073

0.039

0.120

0.113

0.086

0.049

0.130

1.33

(p-value : 0.182)

*

CEX : Charges exceptionnelles sur opérations de gestion sur total actif

PEX : Produits exceptionnels sur opérations de gestion sur total actif

RN : Résultat net sur total actif

ENDET : Total des dettes sur total actif

TAIL : Log de l'actif total.

DAC : Valeurs absolues des accruals discrétionnaires

ACF : Valeurs absolues des cash-flows anormaux

APROD : Valeurs absolues des productions anormales

101

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Tableau 10 : Matrice de corrélation des coefficients des variables indépendantes et dépendantes du panel des entreprises faiblement défaillantes

 

DAC

ACF

APROD

CEX

PEX

RN

ENDET

TAIL

DAC

1

 
 
 
 
 
 
 

ACF

-0.26

1

 
 
 
 
 
 

APROD

0.07

0.08

1

 
 
 
 
 

CEX

-0.04

-0.22

-0.27

1

 
 
 
 

PEX

0.02

0.05

-0.14

0.07

1

 
 
 

RN

0.01

0.19

-0.12

-0.09

0.26

1

 
 

ENDET

0.07

-0.23

0.15

-0.04

-0.19

-0.40*

1

 

TAIL

-0.37*

0.24

0.01

-0.09

-0.12

-0.04

0.29

1

Tableau 11 : Matrice de corrélation des coefficients des variables indépendantes et dépendantes du panel des entreprises fortement défaillantes

 

DAC

ACF

APROD

CEX

PEX

RN

ENDET

TAIL

DAC

1

 
 
 
 
 
 
 

ACF

0.81***

1

 
 
 
 
 
 

APROD

0.86***

0.92***

1

 
 
 
 
 

CEX

-0.16

-0.15

-0.16

1

 
 
 
 

PEX

-0.11

-0.08

-0.07

0.00

1

 
 
 

RN

-0.01

-0.14

-0.10

-0.26*

0.04

1

 
 

ENDET

-0.31**

-0.30*

-0.28*

0.14

0.30*

-0.15

1

 

TAIL

-0.13

-0.10

-0.11

-0.15

-0.11

0.18

0.07

1

p-values (0, "***» 0.001, "**» 0.01, "*» 0.05, ".»0.1, " " 1)

102

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Figure 12 : Histogramme de significativité des coefficients des variables des entreprises
faiblement défaillantes

Figure 13 : Histogramme de significativité des coefficients des variables des entreprises
fortement défaillantes

Source : les sorties du logiciel R

103

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Tableau 12 : Tableau des régressions linéaires du panel des entreprises faiblement défaillantes

(A) (B) (C) (D) (E)

Var. dépendantes DAC ACF APROD PEX CEX

INTERCEPT 0.17* -0.01 0.114 0.00 0.00

DAC -0.161 0.099 0.00 -0.00

ACF -0.178 0.185 0.00 -0.015

APROD 0.032 0.055 -0.00 -0.010

PEX 0.013 0.227 -0.936 0.028

CEX -1.125 2.392 -5.401 0.154

RN 0.139 0.109 -0.227 0.061 -0.015

ENDET 0.033 -0.055 0.044 -0.00 -0.00

TAIL -0.035 . 0.022 -0.01 -0.00 -0.00

Residual Stand. err. 0.04 0.038 0.07 0.00 0.00

Multiple R-Squared 0.202 0.231 0.118 0.101 0.135

Adjusted R-Squared -0.00 0.031 -0.109 -0.132 -0.089

F-statistic 0.976 1.16 0.52 0.433 0.602

p-value 0.468 0.357 0.81 0.872 0.748

104

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Tableau 13 : Tableau des régressions linéaires du panel des entreprises fortement défaillantes

Residual Stand. err. 0.028

Multiple R-Squared 0.749

Adjusted R-Squared 0.722

F-statistic 27.8

p-value 0.00

0.02

0.04

0.05

0.005

0.858

0.884

0.129

0.120

0.84

0.872

0.035

0.026

56.35

71.25

1.376

1.276

0.00

0.00

0.230

0.276

(A) (B) (C) (D) (E)

Var. dépendantes DAC ACF APROD PEX CEX

INTERCEPT 0.023 0.009 -0.00 0.025 0.007 .

DAC 0.089 0.658*** -0.161 -0.000

ACF 0.177 1.465*** 0.048 -0.010

APROD 0.332*** 0.373*** 0.051 -0.005

PEX -0.051 0.007 0.032 -0.004

CEX -0.014 -0.121 -0.24 -0.329

RN 0.033 -0.024 -0.005 0.043 -0.009 .

ENDET -0.009 -0.014 0.009 0.086* 0.002

TAIL 0.005 0.001 -0.00 -0.013 -0.001

105

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française.

Conclusion

Notre étude visait essentiellement à analyser, sous quatre angles, les pratiques de gestion des résultats (par l'activité réelle et par les choix comptables) dans les entreprises en détresse financière. En effet, il s'agissait premièrement de montrer l'existence d'une gestion des résultats différenciée selon les niveaux de difficulté financière. Ensuite, de tester l'effet de la réduction de l'endettement sur la GR. Puis, il s'agissait d'apprécier la relation entre les activités exceptionnelles et la gestion des résultats. Enfin, nous avons construit des hypothèses de recherche sur l'impact de la détresse financière sur l'association entre structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et les pratiques de GR.

Au regard de nos résultats, nous avons abouti aux conclusions suivantes : (a) la gestion des résultats est significativement différenciée selon les niveaux de difficulté financière, (b) la réduction de l'endettement dans les entreprises extrêmement défaillantes n'impacte ni à la hausse ni à la baisse la gestion des résultats et (c) les produits et les charges exceptionnels ne sont pas associés aux pratiques de gestion des résultats dans les entreprises défaillantes.

Nos résultats rejoignent ceux de Campa et Camacho-Minano en ce qui concerne les pratiques de GR dominantes en période de détresse financière, à savoir que les entreprises ont des velléités plus importantes à gérer les résultats par l'activité réelle que par les accruals. Par ailleurs, nous notons que lorsque les entreprises sont en situation d'extrême difficulté financière, la réduction de l'endettement n'impacte pas l'ampleur de la GR, elles ont donc les mêmes niveaux de GR que les entreprises dont la variation des dettes restent positive. Enfin, à la différence des travaux de Mard (2006), qui observe dans les entreprises sous-performantes l'existence d'une gestion des résultats par les produits de cession pour lisser les résultats, nous constatons que les produits et les charges exceptionnels sont décorrélés des activités de gestion des résultats dans les entreprises défaillantes. Dans tous les cas, l'inutilité du lissage du résultat dans les entreprises fortement défaillantes semble être la justification majeure de ce résultat. Cependant, l'échantillon sur lequel nous avons mené nos tests est faible. Une étude plus approfondie sur un échantillon plus grand, avec plus d'avantage de niveaux de difficulté financière et sur des secteurs d'activité différents peuvent enrichir la présente étude.

En raison de l'absence des données, nous n'avons pu tester les hypothèses relatives à la structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes.

106

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Table des matières

Résumé 1

Abstract 2

Remerciements 3

Liste des sigles et abréviations 4

Liste des figures 5

Liste des tableaux 6

Sommaire 7

Introduction générale 9

Les questions de recherche 10

Première partie : Cadre théorique 13

Revue de la littérature sur la gestion des résultats et la défaillance financière 14

Chapitre 1 : La gestion stratégique des résultats 14

Section 1 : Les fondements théoriques de la gestion des résultats. 14
Sous-section 1 : La théorie de l'agence, théorie comportementale de l'agence et la théorie de la réglementation :

un cadre explicatif de la gestion des résultats. 15

1. La théorie de l'agence (« standard agency framework ») et la gestion des résultats. 15

2. La théorie comportementale de l'agence (« behavioral agency theory »). 16

3. La gestion des résultats au regard de la théorie de l'agence 18

4. La théorie de la réglementation 19

Sous-section 2 : La gestion des résultats à l'aune de la théorie positive de la comptabilité 20

1. La théorie positive de la comptabilité et la gestion des résultats. 20

1.1. Les hypothèses de la théorie positive de la comptabilité en matière de gestion de résultat. 21

1.2. L'instrumentation des pratiques de gestion des résultats 21

1.3. Les coûts contractuels et les coûts politiques : des variables explicatives des choix comptables 22

2. Les principales critiques de la théorie positive de la comptabilité 25

Section 2 : L'approche définitionnelle et les estimations de la gestion stratégique des résultats 26

Sous-section 1 : Approche définitionnelle de la gestion stratégique des résultats 26

1. La gestion des résultats : une pluralité de définitions 26

2. L'approche managériale de la gestion des résultats : tentative de compréhension d'une ambiguïté

sociale 28

3. Conception comptable et financière de la gestion des résultats 29

Sous-section 2 : Approche estimatoire de la gestion des résultats 31

A.La gestion des résultats par les accruals 31

1. La classification des accruals en fonction de leurs natures. 32

2. Les modèles naïfs : l'estimation des accruals normaux par une moyenne des accruals totaux 33

107

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

2.1.Le modèle de Healy (1985) : Les manipulations comptables par les accruals et la maximisation de

l'utilité du dirigeant. 34

2.2.Le modèle de DeAngelo (1986) : la marche aléatoire des accruals . 35

3.Les modèles économiques : la prise en compte du poids des immobilisations et de la variation du Besoin en Fonds de Roulement (le passage du modèle de Jones de 1991 au modèle de Jones modifié de

1995). 36

3.1.Le modèle de Jones (1991) 36

3.2.Le modèle de Jones modifié (1995) : une alternative aux limites du modèle de Jones (1991). 37

4.Estimation de la gestion des résultats par les accruals discrétionnaires : approche par des modèles

mathématiques 39

4.1.Beneish (1999) : une approche par le scoring. 39

4.2.Le modèle de la marge : une conceptualisation transversale des accruals normaux. 40

B.La détection des manipulations comptables par la distribution des résultats. 40

C.La gestion des résultats par l'activité réelle : les cash-flows anormaux et la production anormale 41

D.Le lissage des résultats : définition et détection 42

1.Définitions du lissage des résultats comptables. 42

2.L'estimation du lissage des résultats 43

2.1.La variation des résultats et la variation des ventes 43

2.2.La variation des résultats et variation des flux de trésorerie d'exploitation 43

Chapitre 2 : La détresse financière 45

Section 1 : La défaillance financière : une revue des principaux déterminants 45

Sous-section 1 : Introduction au concept de détresse financière 45

1. Conceptions économiques et financières de la défaillance financière 45

2.Conceptions juridiques et traitement des entreprises défaillantes. 47

2.1. Les dispositions de la loi relative à la prévention des entreprises défaillantes 47

2.2. Traitement procédural des entreprises défaillantes 48

a.L'ouverture de la procédure de redressement judiciaire 48

b.La procédure de sauvegarde : ordonnance du 18 décembre 2008 48

c.La procédure de redressement judiciaire 48

d.La procédure de liquidation judiciaire 49

Sous-section 2 : Les déterminants de la défaillance financière. 49

1.Les déterminants financiers de la défaillance des entreprises 49

2.Les déterminants économiques de la défaillance des entreprises 51

3.L'analyse stratégique de la défaillance financière 52

Section 2 : La relation entre la comptabilité et la défaillance financière et le lien entre la gouvernance

d'entreprise et la détresse financière. 57

Sous-section 1 : Le lien entre comptabilité et défaillance financière, et les indicateurs comptables et financiers de

la détresse financière. 57

108

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

1. Le lien entre la comptabilité et la défaillance financière 57

1.1.Déficit du système comptable et du système d'information 57

1.2.Les choix comptables des entreprises en difficulté. 58

2. Quelques indicateurs comptables et financiers de la détresse financière 58

2.1. Le Z-Score d'Altman : la mesure traditionnelle de la classification des entreprises défaillantes 58

2.2.Le score de Conan et Holder ; une mesure de classification graduelle de la détresse financière 59

2.3.Divers indicateurs de la détresse financière 59

Sous-section 2 : La structure de l'actionnariat, la gouvernance d'entreprise et la détresse financière 60

A.La structure de l'actionnariat et la détresse financière 60

B.La gouvernance d'entreprise et la détresse financière 61

1. La mauvaise gouvernance d'entreprise comme déterminant de l'état de la détresse financière. 61

2. Les effets de la détresse financière sur la gouvernance d'entreprise. 62

Chapitre 3 : Discussions et hypothèses de recherche 64

1. Les niveaux de défaillance financière et l'existence des trajectoires de gestion des résultats 64

1.1.Les effets de la détresse financière sur la gestion des résultats 64

1.2.Les types de gestion des résultats dans les entreprises en difficulté. 65

a.L'hypothèse de la `'grande lessive» ou `'big bath accounting» : une perspective pour assainir

la situation financière des entreprises en difficulté. 66

b.Le lissage des résultats : alternative pour les entreprises en difficulté financière 67

c.La gestion agressive des résultats : une pratique récurrente des entreprises en difficulté

financière 67

2. L'ampleur de l'endettement et la gestion des résultats dans les entreprises défaillantes 68

3. La complémentarité entre les opérations exceptionnelles et la GR dans les entreprises en défaillance

financière. 70

a. L'existence d'une complémentarité entre les produits exceptionnels et la gestion des résultats dans les

entreprises défaillantes. 70

b. L'existence d'une complémentarité entre les charges exceptionnelles et la gestion des résultats dans les

entreprises en difficulté financière 70

Deuxième partie : Cadre méthodologique et empirique 83

A. L'Echantillon et méthode de classement des panels 84

B. La mesure des variables de l'étude 84

1. La mesure de la gestion des résultats. 84

2. La réduction de l'endettement 85

3. La complémentarité entre les produits et charges exceptionnels et la gestion des résultats dans les

entreprises en difficulté. 85

C. Les résultats, interprétations et limites 85

1. La gestion des résultats différenciée selon les niveaux de difficulté financière. 85

1.1. Les statistiques descriptives des variables de la GR 85

109

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

1.1.1. Les statistiques descriptives en valeurs 86

1.1.2. Les statistiques descriptives en valeurs absolues 87

1.2. L'existence de trajectoires différenciées selon les niveaux de difficulté financière 90

1.2.1. L'existence des trajectoires différenciées par le nombre d'entreprises qui gèrent à la hausse

ou à la baisse leurs résultats selon les niveaux de difficulté financière. 90

1.2.2. L'existence des trajectoires différenciées (par l'ampleur) de la gestion des résultats selon

les niveaux de difficulté financière. 91

2. Les effets de la réduction de l'endettement sur la gestion des résultats des entreprises défaillantes. 92

3. Les activités exceptionnelles et la gestion des résultats dans les entreprises en difficulté financière 95

3.1. Les statistiques descriptives des variables 95

3.2. Les produits et les charges exceptionnels comme variables complémentaires de la gestion des résultats

des entreprises en difficulté 96

3.2.1. Le test de corrélation de Pearson des coefficients des variables dépendantes et

indépendantes. 96

3.2.1.1. Le test de corrélation de Pearson du groupe des entreprises faiblement défaillantes 96

3.2.1.2. Le test de corrélation de Pearson du groupe des entreprises fortement défaillantes. 97

3.2.2. Les tests d'association entre les produits et charges exceptionnels et les variables de

gestion des résultats 97

3.2.2.1. Les tests d'association sur le panel des entreprises faiblement défaillantes 98

3.2.2.2. Les tests d'association sur le panel des entreprises fortement défaillantes 98

4. Les limites de l'étude 98

Conclusion 105

Table des matières 106

Annexes 110

Bibliographie 119

110

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Annexes

111

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

Annexe 1 : Extrait de l'estimation des Accruals discrétionnaires

TACS = ai + bi. (OCA;,S - OCREANCES;,S) + ci. IMMOCORP;,S + ES.

TAC

2014

CA-CREA

2014

IMMOCORP

2014

a

b

c

NAC

2014

DAC
2014 (ES)

 
 

ai

+ bi. (OCA;,S

- OCREANCES;,S) + ci. IMMOCORP;,S

 

0,050388297

0,278309554

0,624345313

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00393679

0,05432509

-0,037972769

0,158018154

0,346520424

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00269265

-0,04066542

0,034300792

0,382585752

0,490765172

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00092602

0,03522681

-0,031898177

0,368636078

0,292583281

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00372466

-0,03562284

-0,082484725

0,818737271

0,65885947

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00533315

-0,07715158

-0,062942247

0,233641081

0,319361143

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00324547

-0,06618772

-0,067785771

0,258513189

0,525339728

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00159948

-0,0661863

-0,045508982

0,465868263

0,477245509

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00070057

-0,04480841

0,061754935

0,55325386

0,645690834

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00473576

0,06649069

0,135657779

0,056548491

0,619689423

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00358617

0,13924395

-0,002227136

0,107431263

0,667980517

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00477116

0,00254403

-0,033030591

0,797749763

0,653336948

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,0051811

-0,02784949

-0,106476772

0,100373008

0,765344184

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00704081

-0,09943596

0,174919931

-0,036893323

0,806602611

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00785622

0,18277615

-0,048932172

0,427165556

0,651255766

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00472848

-0,04420369

0,282732448

2,914611006

0,108159393

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00526323

0,27746922

0,009310987

0,136561142

0,536312849

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00172321

0,0110342

-0,024972707

0,108078603

0,684361354

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00515502

-0,01981769

112

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

-0,06956248

0,164305949

0,363550519

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00228746

-0,07184994

-0,130883463

0,080040272

0,746035741

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00656702

-0,12431644

-0,052286152

-0,003062787

0,922336469

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,01060011

-0,04168604

0,192990048

0,142795327

0,487667676

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00059219

0,19358224

0,073942187

0,705697528

0,149141181

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00671238

0,06722981

-0,037659033

0,731806616

0,253435115

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00424448

-0,04190352

-0,020738283

0,160099544

0,78888428

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00765651

-0,01308177

0,006466053

0,115394181

0,80353146

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00795038

0,01441643

0,049149338

3,321361059

0,291115312

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00054053

0,04860881

-0,304181657

0,039611269

0,75351119

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,0066978

-0,29748385

0,00828438

0,046844404

0,956168098

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,01144583

0,01973021

0,216915786

0,602624863

0,932191032

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,01149081

0,22840659

0,118743421

0,3337249

0,746677987

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00685856

0,12560198

-0,021011673

0,066342412

0,598638132

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00310446

-0,01790721

-0,064626379

0,49044586

0,622805655

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00413201

-0,06049437

-0,084488449

0,092739274

0,328382838

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00318804

-0,08767649

-0,01844621

0,164130874

0,543961223

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00193216

-0,01651405

-0,011962847

0,407382166

0,852527067

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00941465

-0,00254819

0,117412935

0,319402985

0,582089552

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00299322

0,12040616

-0,050816697

0,231941924

0,271506352

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00436665

-0,05518335

-0,036144578

0,091328276

0,609251822

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00337995

-0,03276463

0,012934519

0,2934519

0,683104285

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00532767

0,01826219

-0,019641332

0,330486763

0,713065756

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00606884

-0,01357249

0,026745068

0,221358118

0,755595599

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00694466

0,03368973

-0,005963676

0,168880455

0,309840065

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00353876

-0,00950244

0,142011834

0,649243918

0,463182117

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,00057151

0,14258334

-0,170504872

0,211691763

1,060673162

0,01097

-0,00109

-0,02339

-0,01406989

-0,15643498

0,004560261

0,06009772

0,438273616

0,01097

-0,00109

-0,02339

0,00065327

0,00390699

113

Gestion stratégique des résultats, structure de l'actionnariat et gouvernance d'entreprise : une étude appliquée aux PME défaillantes du secteur agricole

française.

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Annexe 2 : article sur la gestion des résultats

Extrait d'interview :

Enseignante-chercheuse en sciences de gestion, Marie-Anne Verdier appelle à examiner les comptes des entreprises au-delà des discours de communication.

Marie-Anne Verdier, Enseignante-chercheuse au LGCO (université de Toulouse-III)

Comment des entreprises peuvent-elles présenter des résultats qui semblent mauvais sur le plan comptable si elles ne sont pas en difficulté économique?

Marie-Anne Verdier : Les résultats comptables permettent de construire une réalité économique, mais ceux-ci ne sont pas la réalité. Ce ne sont pas nécessairement les chiffres comptables qui parlent d'eux-mêmes et qui imposent la décision de licencier. C'est souvent la volonté de licencier des grands groupes qui va les amener à construire une réalité économique dégradée à travers des chiffres comptables. La plupart du temps, les comptes ne sont pas manipulés. Sauf quand il s'agit d'entreprises qui procèdent à des suppressions d'emplois. Dans ma thèse (qui analyse les comptes de 107 entreprises cotées en France ayant procédé à des réductions d'effectifs - NDLR), j'ai montré que les grandes sociétés qui annoncent des suppressions d'emplois ou des licenciements ont plus tendance à manipuler leurs comptes à la baisse que celles qui ne détruisent pas d'emplois. Cela ne va pas s'arranger avec la loi travail, qui met en avant des indicateurs illusoires pour justifier des licenciements économiques, comme une baisse temporaire de chiffre d'affaires ou de commandes qui ne permet pas de juger de la santé économique réelle d'une entreprise.

Quels sont les artifices qui permettent à ces entreprises de noircir le tableau?

Marie-Anne Verdier : Les dépréciations d'actifs et les provisions sont les deux postes principaux qui peuvent être utilisés pour gérer des résultats à la baisse. Quand PSA procède à plus de 4 milliards d'euros de dépréciations d'actifs et à 500 millions d'euros de provisions pour l'exercice 2012 (année de l'annonce de la fermeture de l'usine d'Aulnay-sous-Bois et de 8 000 suppressions d'emplois - NDLR), cela l'amène à présenter des pertes de 5 milliards d'euros, c'est un jeu d'écritures comptables. Ses dépréciations d'actifs correspondaient au fait

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que PSA anticipait qu'elle ne disposerait plus de l'usine d'Aulnay et ses provisions couvraient notamment le coût du plan social. Mais on peut mettre un peu tout ce qu'on veut dans des provisions: cela peut aussi bien relever de l'anticipation de dégâts environnementaux que d'indemnités éventuelles à payer aux prud'hommes en cas de recours des salariés. Ces dépréciations d'actifs ou ces provisions doivent par la suite être réintégrées en produits, les années suivantes, ce qui gonfle artificiellement les résultats futurs et contribue à justifier la restructuration a posteriori.

Comment expliquer que ces chiffres comptables aient pris autant de pouvoir?

Marie-Anne Verdier : Depuis le début des années 2000, le discours politique et médiatique autour des restructurations a largement contribué à ce que les salariés intègrent l'argumentaire financier. Par manque de compétences ou d'objectivité, de nombreux journalistes dans les grands médias reprennent les chiffres tels qu'ils sont communiqués par la direction, sans regard critique. Et relèguent le point de vue syndical au second plan. Cela va de pair avec une prépondérance du discours économique sur le discours social. Cela amène les salariés concernés eux-mêmes par des suppressions de postes à se résoudre à accepter la situation à tort.

Source : Entretien réalisé par Loan Nguyen Vendredi, 17 Février, 2017

L'Humanité.fr

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Annexe 3 : article sur la défaillance financière

Extrait d'article de presse :

Un nouveau signe du "ça va mieux" prêché par le gouvernement: les défaillances d'entreprises ont fortement reculé l'an dernier en France, grâce à l'amélioration de la conjoncture dans des secteurs clé comme l'industrie et la construction.

Selon les chiffres publiés vendredi par la Banque de France, le nombre d'entreprises ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, de mise en liquidation ou de placement en redressement judiciaire a reculé de 8% en 2016.

Au total, 58.057 entreprises ont été concernées, contre 63.081 lors des douze mois précédents.

Ce chiffre marque un retournement notable par rapport à l'année précédente. En 2015, année des attentats de Paris, le nombre de défaillances avait en effet augmenté de 1,1%, avec un bond de 8,2% dans le secteur hébergement-restauration.

"On est sur un indicateur qui montre pour la première fois une vraie tendance", souligne Thierry Millon, directeur des études au cabinet privé Altarès qui recense aussi les défaillances d'entreprise.

- Une embellie 'fragile' -

"L'amélioration a été constante au fil de l'année", et a même été observée en décembre, mois pourtant délicat pour les entreprises qui clôturent leur comptes à cette période-là, commente-t-il.

Une embellie que confirme Jean-Eudes du Mesnil du Buisson, secrétaire général de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises). "Le climat des affaires s'améliore, on le ressent nettement", déclare-t-il à l'AFP.

Pour le responsable patronal, la situation reste néanmoins "fragile", le nombre de défaillances étant encore "élevé". "Il est supérieur de 24% à ce qu'il était avant la crise de 2008", souligne-t-il.

Dans le détail, les secteurs de la construction et de l'industrie ont enregistré les plus forts reculs, avec des baisses respectives du nombre de défaillances de 13,5% et 11,2%, selon la Banque de France.

Les défaillances ont par ailleurs diminué de 9% dans le secteur du commerce et de la réparation automobile, de 7,9% dans l'hébergement et la restauration, et de 7% dans les activités financières et d'assurance.

- L'agriculture à la peine -

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Deux secteurs, à l'inverse, ont été à la peine l'an dernier: les transports et l'entreposage (+0,2%), et surtout l'agriculture, où le nombre de défaillances a augmenté de 4,5%.

"Il y a un problème structurel dans les exploitations agricoles en France qui est un problème d'endettement, notamment dans le secteur de l'élevage et des grandes cultures", explique Elodie Dessart, économiste chez Axema, le syndicat des industriels de l'agroéquipement.

Beaucoup de ces exploitations, très dépendantes du cours des matières premières, ont ainsi vu leurs revenus baisser ces dernières années, du fait de la baisse des prix.

"Il y a également eu des facteurs conjoncturels", comme les intempéries et l'épidémie de grippe aviaire. "Cela a conduit beaucoup d'exploitations à mettre la clé sous la porte", poursuit Mme Dessart, qui juge la situation "inquiétante".

Par taille d'entreprise, les défaillances ont fortement reculé chez les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises (-23,1%). Pour les petites et moyennes entreprises, la tendance est moins prononcée (-8%).

- Prudence pour 2017 -

"Les très petites entreprises ont bénéficié bien après les autres du regain d'activité, (...) alors que les grandes entreprises ont pu retourner très vite à l'international", explique Thierry Millon.

Pour 2017, Altarès prévoit une poursuite de la tendance à la baisse, même si celle-ci devrait être moins spectaculaire qu'en 2016, en raison notamment des incertitudes qui planent sur le contexte international et national.

Les entreprises se demandent "si elles vont pouvoir continuer à faire des affaires ou si des conditions de protectionnisme et de nationalisme ne vont pas leur mettre des bâtons dans les roues", indique M. Millon.

Une prudence partagée par Jean-Eudes du Mesnil du Buisson, qui n'écarte pas "une nouvelle hausse des défaillances" cette année.

"On a actuellement des indicateurs économiques qui sont favorables, comme le faible prix du pétrole ou les faibles taux d'intérêts. Mais ces indicateurs pourraient se retourner", prévient-il.

Source : Par Valentin BONTEMPS et Eléonore DERMY Publié le 10/03/2017

Nordlittoral. fr

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams