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Le geste de sauvegarde des objets numériques: L'éditorialisation de soi à  l'épreuve des réseaux

( Télécharger le fichier original )
par Francois Pelissolo
CELSA - Master 2 Recherche 2018
  

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E.3.b.2.3 La recherche

Le langage de bases de données SQL est un bon exemple d'optimisation de stockage qui se traduit par de moindres performances dans les accès en recherche : Bill Gates aime à dire que « c'est comme si vous deviez démonter tous les soirs votre voiture pour la ranger en pièces détachées dans votre garage. »

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E.3.b.3 L'enjeu Z : L'accessibilité : c'est là, mais où ? Le visible et l'invisible

« Si une resserre regorge de trésors mais que l'on n'en possède pas la clé, il est impossible de l'ouvrir et, faute de pouvoir l'ouvrir, on ne pourra voir les trésors qu'elle recèle. » (Nichiren Daishonin, cité par L.Leyoudec)

E.3.b.4 Les pratiques spécifiques du numérique Constats préalables :

- A la différence d'une copie analogique où chaque opération de recopie d'un objet maître dégrade un peu plus la qualité de la copie suivante, seule la première copie d'un objet réel vers un format numérique en dégrade la qualité : hors compression, toutes les copies suivantes seront identiques entre elles. A fortiori, si l'objet initial a été conçu de manière numérique, (la « clonabilité » des documents numériques44 ) ses reproductions ultérieures pourront être parfaitement conformes à cet objet initial45. L'alternative étant la diffusion délibérée de copies de moindre qualité, via une compression du son ou des pixels par exemple.

- La notion de « reproduction parfaite » grâce au numérique, qui semble évidente, détient sa part d'impensé : en effet, une oeuvre conçue au moyen d'un logiciel d'affichage de courbes fractales dans les années 80 sur un écran VGA (640x480) s'affichera au moyen d'un écran HD des années 2000 de manière supposée supérieure en qualité. Mais elle sera dégradée au contraire si l'objectif esthétique est de conserver le grain « pixellisé » de l'oeuvre initiale. Si l'auteur de l'oeuvre n'a pas pensé que les écrans pourraient varier en résolution et n'a pas sauvegardé les choix d'affichage de cette oeuvre, on peut même considérer l'oeuvre originale comme perdue, puisque les conditions de restitution de celle-ci ne sont plus garanties à l'identique de sa création. On retrouve, sous une autre forme, les enjeux de l'aura telle que Walter Benjamin a pu la poser en affirmant 46 « il manque une chose à la reproduction la plus parfaite : l'ici-et-maintenant de l'oeuvre d'art - le caractère absolument unique de son existence, au lieu même où elle se trouve. »

Ce décor posé, il est permis de se poser la question des situations où la sauvegarde numérique est mise en concurrence avec la sauvegarde physique. En effet, qu'il s'agisse de factures, de documents administratifs, de notes de lecture, de modes d'emploi, ou de recettes de cuisine, il

44 (Crozat, Bachimont, Cailleau, Bouchardon, & Gaillard, 2012)

45 Au point que pour éviter la copie pirate d'oeuvres originales, il est parfois utilisé un filigrane pour distinguer des copies diffusables, l'original gardant sa distinction par son absence de filigrane.

46 (Benjamin, 1939)

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n'existe pas de raison a priori de privilégier le papier ou le numérique. D'ailleurs certains sites « pratiques » préconisent la double sauvegarde (papier + numérique) pour tous les documents dits « importants » !

Il est permis cependant de trouver des avantages distincts à chacun des types de sauvegarde, avantages dépendant d'ailleurs des objets à sauvegarder :

- Un DVD ou un fichier vidéo a indiscutablement une qualité et une praticité supérieure à celle d'une cassette VHS, d'autant que les lecteurs de ce format deviennent introuvables.

- Les amateurs de « bon son » disent au contraire préférer la qualité d'un disque vinyle à celui d'un CD ou d'un fichier mp3.

- L'objet physique possède un pouvoir symbolique plus fort : il peut être collectionné, exhibé. A fortiori si sa taille contribue à sa valeur : une affiche papier ou un tableau présentent une valeur d'exposition très supérieure à un fichier .jpg, même quand il s'agit de simples reproductions.

- Le livre papier peut être feuilleté, annoté, truffé d'onglets d'indexation de type post-it, procurant une sensation visuelle et particulière que n'égalent pas pour certains amateurs les fonctionnalités équivalentes proposées par les ebooks. Alors que ceux-ci ont en leur faveur le faible poids dans les bagages, des fonctions de recherche, de traduction, de copier-coller...

- Dans une logique de pur contenu textuel, et si cela a un sens, le document numérique a pour lui d'être beaucoup plus facile à transformer en objet papier (par impression) que l'inverse (par scan), tout en étant moins encombrant, plus facile à dupliquer et à indexer/rechercher.

Les CD et les DVD constituent un cas à part intéressant, en tant que matérialisations physiques de fichiers numériques. Pour de nombreux mélomanes, le CD est inférieur au vinyle, mais il reste collectionnable, montrable, et classable sur des étagères, malgré sa pochette de taille réduite et un son « affadi ». Quant au DVD, mérite-t-il d'être conservé, alors qu'il est possible de le dupliquer sur un disque dur ? Et si oui, est-il pertinent d'en conserver le boîtier et la jaquette, souvent de médiocre qualité, et beaucoup plus encombrants que leur contenu seul, une fois classé dans des pochettes, alors que les informations qu'ils portent, et bien plus encore, sont disponibles sur internet ?

On peut être aussi tenté de sauvegarder plusieurs formats différents du même objet : il est ainsi arrivé à l'auteur de ce mémoire d'acquérir successivement la version audio, puis papier, et enfin ebook d'un même livre qui lui tenait particulièrement à coeur, chacun des formats possédant des avantages différents suivant le contexte d'utilisation.

Enfin, le choix peut être opéré au cas par cas, pour ceux qui font cohabiter des sauvegardes numériques ou non, ou au contraire de manière systématique, pour ceux qui ont choisi de basculer dans le « tout numérique ». L'ouvrage de Le Marec et Mairesse « Enquête sur les pratiques savantes ordinaires »47 propose un aperçu intéressant de la manière dont les stratégies de conservation de documents sont impactées - dans le cas des chercheurs - par l'âge, la carrière ou le lieu de vie.

E.3.b.5 L'anti-sauvegarde : l'effacement des traces

- Le geste préventif consiste à régulièrement chercher et effacer ses traces avant que des tiers n'y aient accès de manière indésirable

- Le geste correctif, en cas de problème, nécessite de faire supprimer des informations indésirables auxquelles l'individu n'a plus accès via un opérateur tiers.

L'effacement préventif des traces nécessite une compétence supérieure à celle requise pour les sauvegardes classiques car elle fonctionne « en creux » : là où on sait, par construction, ce que l'on veut sauvegarder car une production relève d'un acte délibéré, a contrario une trace peut être un résultat involontaire et non connu de l'utilisateur. L'exemple-type est celui des cookies (fichiers mouchards traçant les actions sur internet) : depuis 2014, la CNIL tente d'améliorer la prise de conscience du public sur ce sujet, à la fois aux imposant aux sites d'accompagner systématiquement l'usage de cookies de bandeaux d'avertissement tels que celui-ci :

Et au moyen de campagnes d'information, à l'image de ce clip « Comment j'ai attrapé un cookie »48 :

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47 (Mairesse & Le Marec, 2017)

48 (CNIL, 2013)

A-83

Dans le cas des moteurs de recherche, et en général des traces pouvant contrevenir à la préservation de la vie privée, la Cour de justice de l'Union européenne a imposé un « droit à l'oubli » numérique 2014, qui concerne en premier lieu les recherches nominatives sous Google. Suivant les situations, et le nombre de références à effacer, la mise en oeuvre de ce droit peut être assez simple : un formulaire Google « Suppression dans le cadre de la loi européenne sur la confidentialité » est destiné à cet effet.

Nous avons ainsi relevé la page wikipedia d'un ex-manager condamné plusieurs fois pour escroquerie : la page discussion donne lieu à un débat entre le droit du public d'être averti du passé « douteux » de la personne en question, et l'intéressé qui demande d'effacer la page au nom de son droit à l'oubli. Ce fameux droit à l'oubli (comme le droit à la vie privée d'ailleurs) rentre en conflit avec deux autres questions relevant autant du droit que des SIC : le droit d'information du public, et donc la liberté des médias, mais aussi le besoin des chercheurs de disposer d'archives. Comme l'indique Le Monde en 2013 : « ce droit à l'oubli ne fait pas l'unanimité : car qui dit oubli dit effacement du passé. De quoi faire bondir archivistes et historiens, qui conservent et écrivent la mémoire et l'histoire de nos sociétés. ».49

Cette contradiction relève en creux celle qui sous-tend le « désir d'archive » dans toutes les formes de pratiques de sauvegarde : plus que la peur de voir disparaître ses productions, c'est d'abord celle d'être livré à la main capricieuse du hasard, que ce soit sous la forme des pelleteuses qui effaceront les vestiges des villes d'hier et de demain, ou des archéologues du web qui exhumeront un selfie abandonné et choisiront d'en faire le symbole de l'humain de 2017.

« La démonstration du hiatus entre le temps présent et l'archive comme trace du temps passé ne concerne pas que la première grande fonction des archives, à savoir le fait d'être source de l'Histoire ; elle vaut également pour l'autre grande valeur des archives que sont la défense des droits du citoyen et l'accès à l'information. » 50

49 (Dumontet, 2013)

50 (Chabin, 2011)

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway