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De la critique de la durabilité pour une justice environnementale participative.


par Tchilabalo Adjoussi
Institut Supérieur de Philosophie et des Sciences Humaines Don Bosco (ISPSH Don Bosco) - Master ès-Sciences de l’Homme et de la Société 2018
  

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Introduction

La protection de l'environnement et la lutte contre les inégalités environnementales sont devenues de nos jours des préoccupations de premier ordre au niveau mondial. Ces concepts n'échappent pas de nos jours aux médias, aux débats intellectuels ainsi qu'aux conférences intergouvernementales. La cause de cette mobilisation mondiale c'est deux siècles de développement (du XVIIIe au XXe siècle) qui ont conduit à la crise écologique. En effet, même si les modifications de l'environnement par l'homme remontent à l'apparition de l'homme lui-même, les modifications actuelles de l'environnement sont inquiétantes à cause de la rupture dans les processus biochimiques et écologiques anciens causée par la déforestation, l'industrialisation et l'intensification des pratiques agricoles et aussi le réchauffement de la planète comme le note si bien C. Grino (2001). Pour dire concrètement en quoi consiste ces phénomènes, E. Bonnefous (1973, p. 22) note:

On estime que 700 millions d'hectares de terre cultivées sont plus ou moins dégradées. La superficie des déserts a augmenté de 1milliard d'hectares depuis que l'homme a entrepris sa lutte contre la nature, et la FAO signale que le Sahara « avance» chaque année de 1,5 à 10 kilomètres. L'activité inconsidérée de l'homme a détruit à ce jour 2 milliards d'hectares de terre, soit 15% de toutes les terres continentales, 24% de toutes les terres aujourd'hui cultivables.

De nos jours ces chiffres se sont accrus. Les dégradations de la biosphère ont dès lors une envergure mondiale et bien que nul n'échappe aux méfaits d'un tel état de faits, ses conséquences sont subies de façon inéquitable; iniquité qui d'après C. Larrère (2017), se remarque quand certaines catégories sociales en souffrent plus que d'autres de façon significative; plus de 12 millions d'individus meurent selon l'OMS (2016) parce qu'ayant vécu ou travaillé dans un environnement insalubre, les enfants et les personnes âgées étant les plus exposés. Cet état de rareté relative de l'environnement, impose une jouissance limitée des qualités environnementales, constitue, tel que le signalait P. Van Parijs (1991), la condition suffisante pour évoquer le concept de justice et notamment de justice environnementale dans notre contexte.

La prise de conscience des dérèglements écologiques remonte à la seconde moitié du XXè siècle, précisément en 1968, par la publication des rapports de prévisions catastrophiques en matière environnementale, démographique, économique et sociale par le club de Rome. Puis s'ensuivront d'autres conférences qui auront pour but à la fois, d'accroitre la conscience environnementale et de remédier à cet état de fait; ce fut dans cette logique qu'en 1971, 2200 scientifiques s'adressaient au monde entier par le Message Menton pour

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prévenir une catastrophe écologique; en 1972 a lieu la Conférence de Stockholm sur « l'environnement humain » (première conférence des Nations Unies sur l'environnement).

En 1980, les mouvements de justice environnementale aux Etats-Unis attirent l'attention sur les inégalités environnementales persistantes telles que la construction des habitations près des sites pollués, les dépôts des déchets toxiques dans certains voisinages; les populations socialement vulnérables étant les plus touchées. C'est dans la logique de la résolution de la crise écologique à partir de ses deux polarités à savoir la dégradation de l'environnement d'une part et les inégalités environnementales d'autre part que se tient en 1992 la Conférence de Rio « le sommet de la Terre » qui adopte le développement durable, proposé par la commission Brundtland (1987) comme nouveau paradigme de développement mondial. Après Rio, la conférence de Kyoto en 1997 reviendra sur la nécessité de réduire les émissions de gaz à effets de serre; s'ensuivront les différentes Conférences des Parties (COP).

Dans ce concert de conférences, la conférence de Rio reste capitale car ce fut elle qui, ayant connu la participation de 170 chefs d'Etats, adopta officiellement le développement durable comme le nouveau paradigme de développement dont l'objectif est de juguler la crise écologique. Ce nouveau paradigme de développement a précisément pour but, d'après ladite conférence, d'interpeller les responsables des dégradations environnementales en l'occurrence les pouvoirs publics et les décideurs économiques pour que ceux-ci prennent leurs responsabilités conformément à la déclaration N°8 de Rio qui stipule: « afin de parvenir à un développement durable et à une meilleure qualité de vie pour tous, les Etats devraient réduire et éliminer les modes de production et de consommation non-viable». C'est dans cette perspective que le développement durable se veut, d'une part une solution immédiate aux inégalités environnementales par un changement de la gestion politique de l'environnement et d'autre part, une solution préventive dans l'optique de l'article 14 de la déclaration de Rio:

Les Etats devraient concerter efficacement leurs efforts pour décourager ou prévenir les déplacements et les transferts dans d'autres Etats de toutes activités qui provoquent une grave détérioration de l'environnement ou dont on a constaté qu'elles étaient nocives pour la santé de l'homme.

La conférence de Rio reconnaît donc l'importance de l'implication des politiques dans la résolution de la crise écologique. Bref, dans l'esprit du rapport Brundtland (1987), le développement durable est un processus de transformation dans lequel l'exploitation des ressources, la direction des investissements, l'orientation des techniques et les changements

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institutionnels se font de manière harmonieuse et renforcent le potentiel présent et à venir permettant de mieux répondre aux besoins et aspirations de l'humanité; tout ceci passant par le renforcement des rôles et des capacités des agences chargées de la protection de l'environnement et de la gestion des ressources.

Force est alors de constater que malgré la force des principes de la durabilité et sa mise en application depuis 1992, les dégradations et inégalités environnementales crèvent encore les yeux, signe de la persistance de la crise écologique. La persistance de ces inégalités et de la détérioration biosphérique laisse dire que derrière la prétendue lutte pour parvenir à l'égalité face aux risques environnementaux et à résorber les dégradations environnementales, la société de classes semble se perpétuer. Et reconnaître la persistance de ces inégalités sociales permet de comprendre comment les logiques sociales et les rapports politiques qui ont pris en otage la durabilité, continuent de mettre en danger la vie des plus vulnérables; d'où la nécessité de la justice environnementale qui se résume d'après C. Larrère (2017, p.35) à : « repérer, mesurer et corriger les inégalités environnementales ».

Etant une critique des inégalités environnementales et d'un usage anarchique des qualités environnementales, la justice environnementale est aussi une critique des retombées disproportionnées des politiques de la protection de l'environnement qui profitent surtout aux riches et ignorent les pauvres. Ceci étant, de façon objective, les politiques environnementales ne profiteront aux populations défavorisées qu'à condition que ceux qui réclament la justice environnementale, en l'occurrence les populations pauvres, soient en mesure de prendre part effective à la délibération. Mais plus qu'une simple accession aux instances de décision, la participation consiste précisément d'après C. Larrère (2017, p.27) à s'inspirer de « la façon dont d'autres communautés se sont organisées pour restaurer des biens communs ». C'est dans cette logique que s'inscrit notre travail intitulé: de la critique de la durabilité : pour une justice environnementale participative.

Notre critique de la durabilité ne sera pas les 17 Objectifs du Développement Durable (ODD) qui embrassent les sphères de la pauvreté, de la faim, de la santé, de l'éducation, de l'égalité des genres, de l'accès à l'eau et à l'assainissement, de la croissance durable inclusive, de l'énergie, des infrastructures, de l'inégalité entre les pays, de l'indépendance des villes, de la lutte contre les changements climatiques et ses impacts, de la protection des océans, de la gestion durable des forets, de la promotion des sociétés justes et de la revitalisation du partenariat mondial, ni un reniement de la durabilité ;au contraire, notre critique de la

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durabilité est une analyse foncièrement conceptuelle de la durabilité dans le but de la méthode classique de la durabilité qui est l'adoption des initiative de réparation des dommages environnementaux par les institutions sans l'avis des populations concernées; initiatives qui le plus souvent ne sont pas adaptées aux réalités locales; d'où notre question principale: en quoi la justice environnementale participative est une condition de possibilité de la durabilité? Cette question principale s'éclate en trois questions spécifiques qui orienteront notre travail.

En 1971, le « Message Menton» alertait toute la planète de l'état de notre biosphère déjà en détérioration. Cependant, comme le signale C. Larrère (2017), il était possible d'éviter la catastrophe en écartant ce qui nous divise et fusionner nos efforts autour du péril qui nous unit; principe sur lequel reviendra le rapport Brundtland qui, tout en insistant sur le fait que la globalisation du danger unifierait les intérêts divergents dans la lutte contre les dégradations écologiques, incère la notion des générations à venir dans la construction conceptuelle de la durabilité. Au nom de quels fondements peut-on s'employer à comprendre une telle configuration de la durabilité?

Une fois ces fondements mis au jour, il faudrait rappeler que la finalité de la durabilité est de parvenir à une réduction considérable des émissions de gaz à effets de serre, d'orienter la consommation énergétique vers les énergies renouvelables, de parvenir à une nouvelle gestion des espaces urbains afin d'y réduire la pollution, de règlementer l'exploitation des ressources minières et fossiles par souci pour les générations à venir et de juguler les inégalités environnementales. Mais, peut-on vraiment nier l'inefficacité des politiques qui visent à mener à cet idéal?

Or sans sensibilité environnementale, tous les efforts de restauration de l'environnement et des inégalités environnementales sont voués d'avance à l'échec. Au nom de quel modèle peut-on dès lors s'employer à résoudre les inégalités environnementales et de là, la crise écologique? Ces trois questions spécifiques débouchent sur trois hypothèses de travail.

Partant de l'évidence que la durabilité est un paradigme de développement qui se veut protecteur de l'environnement et économiquement soutenable en vue de juguler les inégalités environnementales, elle se pose comme un moyen préventif des dégradations environnementales d'une part et réparateur des inégalités qui en ont découlé d'autre part. Ancrée dans le rapport Brundtland, la durabilité tire donc ses fondements des dégradations

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environnementales devenues inquiétantes depuis la seconde moitié du vingtième siècle et des injustices environnementales. Ceci étant, la durabilité est tout entièrement dédiée au mieux-être des générations futures.

Bien que justifiée dans ses fondements la durabilité est néanmoins prise en otage par une complexité conceptuelle, politique, économique ainsi que par les divergences éthiques; tout ceci fragilise la durabilité pouvant mener à dire que, plutôt que de juguler la crise écologique, la durabilité contribue à son accentuation visible par les indicateurs de dégradation environnementale.

Au coeur de cette complexité, une solution à la crise écologique reste néanmoins envisageable dans la mesure où, tel que le signale une fois encore C. Larrère (2017), ceux qui réclame la justice environnementale participent non seulement à la délibération mais aussi à la restauration des qualités environnementales. La solution à la crise écologique émergerait donc de la participation.

Pour vérifier ces hypothèses, nous appréhendons le présent travail dans la logique d'une reformulation conceptuelle et méthodologique de la durabilité. Pour y parvenir, nous procédons d'abord par une analyse des fondements de la durabilité. Cette analyse permettra d'établir le lien entre la croissance de l'inquiétude environnementale et la construction conceptuelle de la durabilité. Une fois ce lien cadré et compris, nous procéderons ensuite à une évaluation critique de la durabilité eu égard à la persistance de la crise environnementale de nos jours. De là, une redéfinition de la durabilité nous permettra de mieux appréhender la justice environnementale participative.

Cette démarche sera structurée en trois parties qui constitueront les grandes articulations de notre travail; dans la première partie de notre travail, il s'agira pour nous de préciser les fondements de la durabilité. Dans la deuxième partie, il s'agira de son évaluation critique; ce qui nous permettra enfin, dans la troisième partie, de poser la justice environnementale participative comme source revitalisante de la durabilité dans le processus de la transition écologique.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams