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Géomarketing : localisation commerciale multiple

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par Jérôme Baray
Université de Rennes I - Doctorat 2002
  

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Partie II :

La localisation d'un réseau

Chapitre 4 :

Analyse d'un réseau de points de vente

de produits biologiques dans l'Ouest parisien

Introduction

Les produits bio sont un secteur qui en France comme en Europe ou aux Etats-Unis connaissent une forte croissance d'abord car les consommateurs échaudés par les scandales alimentaires souhaitent de plus en plus acheter des produits à la fois sûrs, sains et savoureux. D'autre part, les politiques françaises et européennes favorisent très largement l'agriculture biologique en octroyant aux surfaces agricoles dédiées à ce mode de production des subventions non négligeables. Enfin, les grands distributeurs voient dans ce type de produits

un moyen d'améliorer leur image de marque et leur rentabilité. La distribution des produits biologiques constitue un champ intéressant d'étude dans le cadre d'une problématique d'implantation commerciale étant donné que les magasins "bio" sont actuellement en pleine phase d'expansion, les premières créations datant d'une dizaine d'années. Ainsi, il reste en France encore de nombreuses opportunités pour créer son point de vente de produits biologiques en particulier dans les villes de taille moyenne. Nous nous proposons donc d'appliquer la nouvelle méthode explicitée au chapitre précédent à la localisation d'un réseau

de points de vente de produits biologiques dans l'Ouest Parisien. Ce choix géographique n'est pas anodin car l'Ouest Parisien à fort pouvoir d'achat et très hétéroclite est constitué de zones

où les magasins "bio" sont bien implantés (en particulier certains arrondissements de Paris) et d'autres zones apparemment encore libres de toute offre dans ce secteur. Notre démarche dans

ce chapitre constituera à partir d'une base de données d'adresses de clients potentiels habitant cette région et dans l'optique d'une recherche de localisations optimales pour des points de vente de produits biologiques, à construire le modèle p-médian correspondant grâce aux

principes du traitement du signal vus précédemment.

4.1 Le marché et la distribution des produits biologiques

4.1.1 Les produits biologiques : définition et importance du marché

Dopés par les nombreux scandales alimentaires (vache folle, poulet aux hormones, dioxine, fièvre aphteuse...), les produits biologiques sont un secteur dynamique et en pleine expansion bien que le commerce "bio" reste pour l'instant un micro-marché qui n'implique à l'heure actuelle que 1 % de la production agroalimentaire française et moins de 1 % du chiffre d'affaires du commerce de détail. Les qualités hygiéniques ou gustatives de ces produits très souvent au moins 10 % plus chers que les aliments industriels, n'apparaissent pas encore évidentes aux yeux des consommateurs : cependant, malgré leur chèreté, la vente de produits biologiques progresse en France et aux Etats-Unis au rythme de 20 % par an et les experts

tablent qu'à moyen terme, 5 % des dépenses des Français seront consacrées au "bio" 632 (soit

encore une marge de progression de 400 %).

En termes de statistiques, l'agriculture biologique concerne en France :

? 7500 exploitations agricoles sur 270 000 ha soit seulement encore 0,9 % de la surface agricole ; à titre de comparaison, l'agriculture biologique en Europe représente 2,1 % de la surface agricole ;

? un marché actuel de 4,5 milliards de francs et 1000 entreprises de transformation633.

L'engouement pour le "bio" se remarque dans la plupart des pays développés et particulièrement aux Etats-Unis où ce secteur pèse déjà 4 milliards de dollars634.

632 SYLVANDER B. (1999) Les Tendances de Consommation de Produits Biologiques en France et en Europe : Conséquences sur les Perspectives d'Evolution du Secteur. Colloque l'Agriculture Biologique Face à Son Développement, Les enjeux Futurs, 6-8 déc. 1999, Lyon.

633 INRA (1999) L'agriculture Biologique en France, Document du Groupe de Travail de l'Inra sur le Secteur

Biologique, Présidé par Guy Riba.

634 FOSTER C. et LAMPKIN N. (1999) European Organic Production Statistic 1993-96, Stuttgart, Hohenheim

University.

Mais que sont exactement les produits biologiques ?

L'appellation "biologique" est réglementée et strictement contrôlée par la loi.

Le logo "AB" (Agriculture Biologique) accordé par le ministère de l'agriculture sur un produit garantit en résumé635 :

o la conformité du produit avec la réglementation européenne en ce qui concerne les aliments d'origine végétale (interdiction d'utiliser des organismes génétiquement modifiés) ;

o la conformité au cahier des charges fixé par les pouvoirs publics français et européens pour tous les produits ayant des ingrédients d'origine animale ou destinés à la production animale ;

o que l'aliment a été obtenu par une production respectant à la fois la nature et l'homme par exemple par l'utilisation exclusive d'engrais ou de traitements écologiques et naturels ;

o que l'aliment incorpore au minimum 95 %

d'ingrédients issus de la production biologique.

Ecocert est l'organisme privé (mais néanmoins dépendant du ministère de l'agriculture) chargé

de s'assurer du contrôle annuel des productions classées comme biologiques. La certification "bio" est accordée par les organismes accrédités : Ecocert, Qualité France ou Socotec. Les entreprises souhaitant être agréées "biologiques" doivent de plus acquitter un droit d'utilisation du logo AB et être inscrites à la Direction Régionale de l'Agriculture. Une accréditation encore plus sévère pour les produits issus de l'agriculture biodynamique est accordée par l'organisme Demeter.

En outre, les exploitations agricoles ont la possibilité de s'engager avec l'Etat français dans un

contrat territorial d'exploitation (le label est encore inexistant). Ce contrat "écologique" oblige

635 BARAY J. (2002) Le Guide des Produits Bio, Editions Grancher, Paris.

alors l'exploitation qui l'adopte à respecter la flore et la faune, le paysage rural, à utiliser des matériaux traditionnels,... Au niveau des entreprises industrielles, on a prévu, à l'échelon international, la norme Iso 14000 de management de l'environnement qui vise également à ce que les activités humaines s'insèrent au mieux dans l'environnement sans trop lui nuire.

Les produits non-alimentaires tels qu'ampoule électrique, aspirateur traîneau, chaussures, colle pour revêtement de sols, congélateur, détergent pour textiles, filtre à café, lave-linge, linge, matelas, mobilier de bureau, mobilier scolaire, ordinateur personnel, papier à copier, papier absorbant, peinture, réfrigérateur, sac-poubelle, tee-shirt, textiles, vernis sont susceptibles de comporter le logo NF (Norme Française) de l'AFNOR ou l'Eco-label au niveau européen.

Les produits susceptibles d'être commercialisés dans une épicerie ou dans un supermarché dits "bio", correspondent donc à ceux que l'on pourrait trouver dans une grande surface traditionnelle avec en plus la contrainte de comporter des articles alimentaires incorporant au moins 95 % d'ingrédients issus de l'agriculture biologique. Les produits sont alors étiquetés avec les mentions obligatoires :

? "Agriculture Biologique"

É ou "Produit de l'Agriculture Biologique"

É ou "Produit issu de l'Agriculture Biologique"

É ou "X % des ingrédients d'origine agricole ont été obtenus selon les règles de

la production biologique (la mention 100% "bio" n'est pas autorisée)";

? nom de l'organisme certificateur (ex : Ecocert);

et peuvent comporter les mentions facultatives :

? "Système de contrôle CEE";

? le logo AB.

Dans les produits alimentaires, un cas particulier est représenté par le vin : il n'existe en effet à

ce jour aucun cahier des charges au niveau européen concernant sa fabrication. Les mentions pouvant figurer sur les étiquettes de vin sont seulement : "vin issu de raisins de l'Agriculture Biologique" avec le nom de l'organisme certificateur. Le logo AB n'est pas autorisé.

Rien n'empêche ces commerces de distribuer des produits n'ayant pas la qualité "bio" sinon le risque d'être attaqués pour publicité mensongère. On trouve pourtant rarement des produits alimentaires non-bio dans ce type de magasin. Dans le cas où des aliments contiendraient seulement de 70 % à 95 % d'ingrédients "bio", leur étiquette peut comporter les mentions suivantes :

? "X % des ingrédients d'origine agricole ont été obtenus selon les règles de la production biologique";

? le nom de l'organisme certificateur;

? la liste des ingrédients par ordre décroissant avec référence au mode de production biologique.

4.1.2 Le commerce de détail des produits biologiques en France

On recense en France à ce jour un peu plus de 2200 points de vente distribuant indistinctement des produits biologiques, naturels ou diététiques sans pouvoir parfois les classer dans une catégorie particulière. Ces activités se concentrent dans les régions très urbaines à pouvoir d'achat plutôt élevé, avec une prépondérance pour les départements comportant d'importants pôles urbains, souvent frontaliers ou côtiers avec en particulier : Paris et région parisienne, région lilloise, Strasbourg et Bas-Rhin, Lyon et Région Rhône- Alpes, Haute-Savoie, Bouches du Rhône, Côte d'Azur, Gironde (Bordeaux), Hérault (Montpellier), Haute-Garonne (Toulouse).

Fig. 4.1 - Les magasins "bio" et boutiques de produits diététiques en France par département en nombre

Source : CD Stratégie & Localisation - Jérôme Baray / société Articque

Fig. 4.2 - Les magasins "bio" et boutiques de produits diététiques

en France par département en densités par habitant

Source : CD Stratégie & Localisation - Jérôme Baray / société Articque

En région parisienne, les secteurs de la distribution de produits naturels, biologiques et diététiques se sont implantés dans les départements à revenus élevés (Ouest parisien et Hauts

de Seine surtout).

Fig. 4.3 - Les magasins "bio" et boutiques de produits diététiques et naturels en Ile-de-France en densité par habitant

Source : CD Stratégie & Localisation - Jérôme Baray / société Articque

Très peu de magasins de produits naturels (biologiques pour certains) peuvent se comparer aux commerces de détail traditionnels. En effet, la majorité des commerces recensés dans les statistiques ci-dessus, sont surtout spécialisés dans les produits non-alimentaires, par exemple dans la vente de suppléments diététiques ou naturels tels le groupe La Vie Claire ou encore dans les remèdes naturels, la phytothérapie, les huiles essentielles, les encens et plus généralement dans les articles proches de la philosophie spiritualiste dite du "New Age" qui prône sérénité, décontraction, partage des cultures et paix universelle.

Echappant à ce mouvement, seuls quelques acteurs du "bio" proposent un assortiment complet rivalisant avec le commerce de détail classique, allant de l'alimentaire (produits frais, fruits, légumes, viande, pain, céréales, vins certifiés biologiques) aux produits d'hygiène (dentifrice naturel dépourvu de fluor, savon végétal, lessive sans phosphate) en passant par quelques remèdes (aspirine naturelle, vitamines végétales) ou même par l'habillement (vêtement en coton "bio"). Seuls en France, deux groupes se sont pour l'instant structurés en réseau de points de vente qui n'ont rien à envier au supermarché ou au commerce de proximité

classique.

La première chaîne de distribution de produits "bio" en France est représentée par le réseau de franchise BioCoop avec 170 points de vente répartis sur tout le territoire. Sa centrale d'achats exclusive aux BioCoops propose près de 4000 références de produits biologiques, secs et frais

et d'éco-produits sélectionnés par les BioCoops. Selon les responsables du groupe, adhérer au réseau BioCoop créé en 1987 signifie636 :

· "promouvoir l'agriculture biologique, seule agriculture durable certifiée, respectueuse

de l'environnement et de la santé des hommes qui la cultivent et la consomment.

· entreprendre autrement en construisant, avec les BioCoops et leurs partenaires de la filière, un commerce équitable et transparent.

· bénéficier des services d'un réseau unique en France regroupant les pionniers de la distribution moderne des produits biologiques et écologiques, le premier du secteur en France, et proposer aux consommateurs des produits rigoureusement sélectionnés à des prix justes."

Le chiffre d'affaires des points de vente BioCoop varie de 1,5 million de francs dans les points

de vente de province à 7 ou 8 millions concernant ses implantations parisiennes dont certaines atteignent la taille d'un supermarché (ex. Canal "bio" dans le 19ème arrondissement de Paris).

Les adresses des implantations de BioCoop sont :

É O'racines 28 Rue Petrelle 75009 Paris

É Canal "bio" 300 Rue de Charenton 75012 Paris

É BioCoop Paris "Glacière" 55 Rue de la Glacière 75013 Paris

É Canal "bio" 46 Bis Quai de la Loire 75019 Paris

É BioCoop Grenelle 44 Bd de Grenelle 75015 Paris

É BioCoop Paris 17ème 153 Rue Legendre 75017 Paris

É Les Nouveaux Robinsons 127 Avenue Jean-Baptiste Clément 92100 Boulogne-Billancourt

É Les Nouveaux Robinsons 14 Rue des Graviers 92200 Neuilly Sur Seine

Il est à noter que ces implantations sont loin d'être toutes sous l'enseigne commune BioCoop.

Le réseau de points de vente ne bénéficie donc pas de la notoriété dont il aurait pu tirer profit auprès de ses clients. Sans doute, cet état de fait vient de l'histoire de ce groupe créé lors de la

636 Site du groupe Biocoop : www.biocoop.fr

fédération en novembre 1986, d'une quarantaine de coops aux noms évocateurs, dont Germinal, Sonneblüm, Regain, Soleil Levain, Aquarius, Kerbio, Scarabée, Floréal, Nature et Vie, Bigorre etc.. qui se sont aperçus qu'elles avaient le même souci de développer le "bio". Naturalia est le deuxième réseau de 16 points de vente pesant un chiffre d'affaires de 63 millions de francs (en 1999) et distribuant des produits biologiques alimentaires en étant

implanté majoritairement à Paris637.

Les implantations de Naturalia :

É 11-13 rue Montorgueil 75001 Paris

É 52 rue Saint Antoine 75004 Paris

É 36 rue Monge 75005 Paris

É 126 bd Raspail 75006 Paris

É 38 av de la Motte Picquet 75007 Paris

É 121 bd Magenta 75010 Paris

É 33 rue de la Roquette 75011 Paris

É 44 av d'Italie 75013 Paris

É 16 av du général Leclerc 75014 Paris

É 86 rue de Cambronne 75015 Paris

É 25 rue des Sablons 75016 Paris

É 26 rue Poncelet 75017 Paris

É 16 rue de Levis 75017 Paris

É 107 rue de Caulaincourt 75018 Paris

É 37 rue du Poteau 75018 Paris

É 188 rue de Fontenay 94300 Vincennes

A noter que le chiffre d'affaires de Naturalia suit bien la tendance du secteur en connaissant une hausse de 23 % en 1997, de 18 % en 1998 et de 15 % en 1999.

Hormis BioCoop et Naturalia, il existe quelques rares commerces individuels distribuant des produits biologiques, alimentaires et autres. Ce serait le seul cas en région parisienne du supermarché Espace "bio" St. Charles situé dans le 15ème arrondissement de Paris. Ce magasin

est selon ses dirigeants, la plus grande surface consacrée au "bio" en France. Avec plus de

6000 références et environ 10 millions de chiffre d'affaires sur 500 m² environ, il accueille quotidiennement 400 clients et compte environ 4000 consommateurs réguliers au total, certains n'hésitant pas à parcourir hebdomadairement plusieurs dizaines de kilomètres pour y

637 Site Internet : http://www.biocoop.fr/pageinterieure/jeudecadre.htm

faire leurs achats de la semaine. Les produits que l'on peut acheter dans ce véritable commerce biologique de détail sont par exemple par catégorie :

É Produits frais : fruits, légumes, lait, yaourt, oeuf, viande, poisson, plats préparés ;

É Boissons : eaux minérales, bière (bière de sarrasin, d'épeautre, au chanvre), digestif, vin rouge

et blanc, cidre, frenette, ortillette, chanvrette, limonade, jus de fruits et de légumes, eau

minérale, thé, boisson aux céréales (soja, avoine, riz) ;

É Epicerie salée : alimentation bébé, pâtes, produits japonais (agar agar, kombu, algue de mer, wakame, nori), conserves, condiments ;

É Epicerie sucrée : miel, pollen, biscuit, desserts de soja, substitut du sucre (fructose, sirop de blé), compotes, chocolat ;

É Petits déjeuners : biscottes, pain, muesli, succédané de café (poudre de caroube, yannoh), café, thé ;

É Produits Montignac ;

É Compléments alimentaires : spiruline, guayapi, jus d'aloe vera, propolis "bio", gel de silice, aliments sans gluten ;

É Alimentation animale : terrine et croquettes pour chien et chat ;

É Cosmétique et hygiène : dentifrice, cire de jojoba, huile solaire, argile Rhassoul, lotion, crème, shampooing naturel, huiles essentielles ;

É Non-alimentaire : insecticides "bio", crème à récurer, lessive, assouplissant, gel wc, savon, nettoie-vitre ;

Fig. 4.4 - La devanture du magasin Espace "bio" St. Charles

La force d'Espace "bio" est de négocier lui-même avec les producteurs ou grossistes sans passer par une quelconque centrale de distribution. En définitive, les tarifs pratiqués sont très voisins de ceux de la grande distribution. Le consommateur hésite moins à faire une expérience d'achat, et rassuré par la certification "bio" et la qualité des produits, est pris au jeu

et se fidélise.

Fig. 4.5 - Les localisations des commerces de détail "bio" à Paris et en région parisienne

4.1.3 La vente des produits biologiques sur Internet

Il n'est pas possible d'évoquer la distribution de produits biologiques sans parler d'Internet qui selon certains chercheurs représentent la quatrième révolution commerciale après les boutiques, les grands magasins et le libre-service638. Pour certains auteurs, ce nouveau mode

de distribution bouleversera demain notre façon de consommer639. Non pas qu'Internet aura le

monopole de la distribution, mais tout au moins jouera-t-il dans la même cour que les acteurs

638 VOLLE P. (2000) Du Marketing des Points de Vente à Celui des Sites Marchands : Spécificités, Opportunités

et Questions de Recherche, Revue Française du Marketing, N°177/178, P.83.

639 MOATI P. (2001) L'avenir de la Grande Distribution, Ed. Odile Jacob.

actuels de la grande distribution. En effet, une multitude de sites de commerces électroniques proposant des produits biologiques ont fleuri durant les années 1998 et 1999. Ces années de "vache folle" et le faible investissement indispensable à la création d'un site ont en effet stimulé à ce moment les créateurs de tout poil. Le soufflet est bien vite retombé car, en 2001, seuls restent, sur une centaine de commerces initialement créés, au plus une dizaine d'acteurs,

la plupart étant adossée à des commerces de détail bien réels et ayant pignon sur rue ce qui leur facilite considérablement la logistique et les problèmes de stock.

Pourquoi cet effondrement des projets de commerces "bio" sur Internet ? D'une part, les commandes n'étaient pas au rendez-vous et presque au même moment en 2000, La Poste par laquelle transitait la plupart des paquets alimentaires refusait d'assurer le transport des produits frais ce qui a contraint sans détours un grand nombre de sites à fermer. A l'heure actuelle, les quelques sites Internet restant en lice et distribuant des produits biologiques alimentaires sont essentiellement parisiens. Parmi eux, on trouve :

É www.Biodoo.com : le site de commerce électronique du groupe Naturalia associé à ces magasins.

É www.epiceriebio.com : qui distribue par La Poste des aliments "bio" conditionnés et des produits d'hygiène naturels.

É www. espacebio.com : le site d'Espace "bio" St. Charles. De l'aveu même du magasin, le site enregistre une seule commande par jour et effectue donc un chiffre d'affaires annuel de quelques dizaines de milliers de francs. Les paquets sont transportés en triporteur électrique écologique du magasin jusqu'au domicile du client.

É www.chezemile.com : site implanté à Houilles (78) spécialisé dans le "bio" haut-de-gamme.

É www.la-halle-au-bio.com : spécialisé dans les produits biologiques frais.

É www.natoora.com : référence 500 produits et atteint un chiffre d'affaires de 2 millions de francs dans Paris intra-muros. Les produits sont acheminés sous un délai de 24 heures au domicile du client dans un véhicule électrique comportant des compartiments réfrigérés.

É www.vivrebio.com : site distribuant les grandes marques d'aliments "bio" (Grillon d'Or, Priméal, Joannusmolen, Borsa, Le Moulin Pivert, la Drôme Provençale, Argiletz, Pierre Cattier).

www.biomarkets.com, www.biosegur.co m, www.viridis.com sont d'autres acteurs du "bio"

situé en province et d'importance moindre en terme de chiffre d'affaires 640.

Ainsi, les sites Internet distribuant des produits biologiques jouent dans l'immédiat un rôle négligeable dans un secteur encore peu développé, d'autant que les sites électroniques enregistrant un certain volume d'affaires sont ceux d'implantations réelles pour lesquelles le commerce virtuel ne constitue qu'une activité annexe et des profits secondaires. Certains observateurs ont qualifié le commerce électronique d'a-spatial641. Mais, bien au contraire, le

net fait apparaître par le truchement des liens, des renvois et des bannières, une nouvelle

distance psychologique cette fois et non plus seulement physique642. L'internaute qui "surfe", navigue de site en site et se construit mentalement cette distance psychologique en se fondant

sur un sentiment de proximité qui dépend de facteurs comme le partage d'une langue commune, la possibilité de contact et de recours en cas de problème,... (les sites régulièrement visités par un individu sont alors considérés comme proches). Pour des raisons de différences culturelles mais également de logistique et de livraison des produits commandés, les distances physiques ne sont pas abolies dans le cybercommerce qui n'est pas réellement global.

L'existence de sites adaptés à chaque pays démontre ce fait (ex. amazon.fr, amazon.com,

640 BARAY J. (2002) Le Guide des Produits Bio, Editions Grancher, Paris.

641 LORENTZ M. (1998) Le Commerce Electronique, Les Editions de Bercy, Ministère de l'Economie, des

Finances et de l'Industrie, p.15.

642 VOLLE P. (2000) Du Marketing des Points de Vente à Celui des Sites Marchands : Spécificités, Opportunités

et Questions de Recherche, Revue Française du Marketing, N°177/178, P.86.

amazon.de). Le commerce électronique ne serait global que si l'offre était la même pour tous

et si les clients provenaient du monde entier ce qui n'est généralement pas le cas. Même si les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) d'une manière générale devraient favoriser l'émergence d'un marketing individualisé ou plus personnalisé (ou marketing one to one), donc sans doute plus efficace, nul ne sait à l'heure actuelle si ceux-

ci ne resteront dans l'avenir que de simples améliorations technologiques de la vente par correspondance à l'image du minitel ou s'ils deviendront de véritables nouveaux canaux de distribution643.

La méfiance du consommateur à la fois vis-à-vis d'Internet et des produits biologiques, le

problème de la sécurité du paiement électronique et celui du transport feront que ces sites n'auront dans l'avenir proche qu'une envergure commerciale limitée, à moins que l'insécurité alimentaire atteigne un niveau tel que les consommateurs se détournent soudainement de leurs modes traditionnels d'achat pour en adopter d'autres. Un sondage effectué en ligne par le site www.edgdistribution.com auprès d'internautes professionnels de la distribution, indique que

60 % des personnes interrogées, ne voient pas dans le commerce électronique, "l'avenir de la grande distribution", (28 % le voient comme tel et 12 % ne se prononcent pas). Les spécialistes en prospective sentent bien les limites de la vente virtuelle : "Faire ses courses

sur Internet n'est pas plus satisfaisant. Certes, le consommateur n'a pas à se rendre en voiture

à l'hypermarché, mais il reste délicat de choisir de bons produits frais ou de l'habillement sur

un écran d'ordinateur"644. De plus, pour certains sites, le plus difficile est non pas encore de séduire la clientèle, mais de se voir confier la production d'artisans régionaux qui eux aussi, restent très méfiants face à une distribution de leurs produits sur Internet : le "bio" est en effet pour l'instant plus l'affaire de petits producteurs du terroir que des grands industriels de l'agroalimentaire. La grande distribution s'est, elle aussi, mise timidement au "bio". Mais, les

643 CLIQUET G. (2001) Rôle des NITIC dans l'Evolution des Canaux de Distribution, Proche-Orient n°13 - Revue de la Faculté de Gestion et de Management, Université Saint-Joseph, Beyrouth, p.71-93

644 BOVET P. (2001) L'hypermarché, le Caddie et le congélateur, Le Monde Diplomatique, Mars 2001, p.32.

mauvaises langues en particulier dans cette filière n'hésitent pas à dire que 40 % de produits "bio" en plus dans les rayons des hypermarchés en quelques mois n'est pas chose normale d'autant que la demande dépassait déjà largement l'offre. Ainsi, certains produits des grandes surfaces, étiquetés "bio", ne seraient pas véritablement "bio". Les consommateurs sensibles à cette appellation ne semblent plus se fonder seulement sur l'étiquette AB mais aussi et surtout

sur l'identité du producteur ainsi que sur l'origine du produit. Dans ce climat de méfiance, chacun souhaite être rassuré sur ce qu'il achète. Les consommateurs boudent plutôt la grande distribution dans le domaine du "bio", dont la réputation associée à celle de l'industrie agroalimentaire est quelque peu liée aux scandales alimentaires. Les commerces placés sur ce marché de niche très actif que sont les produits biologiques ont donc une véritable opportunité pour se développer et ce déploiement ne passera que par des réseaux de points de vente bien organisés et fonctionnant en phase. La notion d'enseigne est importante, de même qu'une bonne promotion car c'est sous cette bannière commune à tous les magasins d'un réseau que le consommateur va peu à peu acquérir l'envie d'acheter des produits sains sans risque et non dénaturés. Qu'il fasse ses courses chez lui, en vacances ou sur Internet, la marque, l'enseigne

est fondamentale pour enfin rassurer le client sur ce qu'il achète et le convertir au "bio".

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams