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Essai d'analyse critique du role de la philosophie à travers les ouvrages de Paulin Hountondji et de Marcien Towa

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par Issiaga DIALLO
Université de Sonfonia Conakry - Maitrise 2005
  

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SECTION 3 : LA QUESTION DU ROLE DE LA PHILOSOPHIE

La question du rôle de la philosophie revient constamment toutes les fois qu'un esprit tente d'y porter sa réflexion. Du fait de sa spécificité de discipline purement discursive, n'ayant nullement la prétention d'apporter des solutions notamment aux divers problèmes de la vie de l'homme, elle est considérée par d'aucuns comme une activité oisive, une activité dont l'existence même contribue plus à la complexification de la vie de l'homme qu'elle ne lui procure satisfaction. En réalité la question du rôle de la philosophie est une des questions fondamentales de la philosophie elle-même. Elle travers cette discipline depuis sa création et les tentatives d'y apporter une réponse satisfaisante sont fort diverses, donc loin de pouvoir satisfaire tout le monde. Encore que, en philosophie, rien ne parait pouvoir satisfaire, la philosophie elle-même ne se préoccupe pas de satisfaire les hommes dans quelque domaine que ce soit, mais plutôt de poser les questions, les bonnes questions. En tout état de cause il semble que celui qui s'adonne à la pratique philosophique exerce une activité dont il ignore le rôle. Il ne nous revient pas ici de faire une énumération des rôles traditionnellement attribués à la philosophie. Nous nous limiterons à examiner ce qui a été avancé comme rôle de celle-ci au sein de la littérature consacrée à la problématique philosophique africaine avant les ouvrages de Towa et Hountondji qui nous intéressent. Dans cette perspective elle-même, la première difficulté qui surgit est celle de savoir s'il faut envisager l'existence d'une philosophie qui serait celle de tous les Africains, donc comme telle qui jouerait le même rôle dans toutes les sociétés africaines ; ou s'il faut bannir toute forme d'uniformisation et considérer que le rôle de la philosophie sur le continent ne doit pas être quelque chose de figé ; mais quelque chose qui est appelé à évoluer, à varier en fonction de l'espace et du temps. C'est vraisemblablement pour la première position qu'opte Taita Towet qui, dans un article paru dans Présence Africaine N° 27-28 - août - novembre 1959, abordait la question dans un article intitulé « Le rôle d'un philosophe africain »25(*). A cet effet dès le début de son argumentation, il nous enjoint de lire son essai « en gardant présente dans la mémoire l'unité culturelle des Noirs d'Afrique ». D'ors et déjà, à la lumière de l'évolution qu'a pris le débat sur la problématique philosophique africaine, nous savons que cette seule assertion discréditerait définitivement cet essai en sorte que bien des intellectuels de la trempe de Towa et Hountondji, ne trouveraient plus d'intérêt le parcourir. Cependant dépassons ces préjugés et essayons de voir ce que doit être le rôle d'un philosophe africain pour Taita Towet. Il énumère plusieurs rôles que le philosophe africain a à jouer. Le premier est relatif à la détermination des caractéristiques et attributs propres au philosophe et leur explication en termes clairs au public africain. Cela certainement parce que de son point de vue, le monde noir semble méconnaître la philosophie. Il est donc impératif à ses yeux de lui faire comprendre ce qu'est la philosophie, ce qui de son point de vue passe par la définition de ce qu'est un philosophe. Cela aura l'avantage de percevoir tout au long de l'histoire de cette discipline, le genre de personnes qui ont été considérées comme étant philosophes et déterminer si des personnes semblables ont existé ou non sur le continent africain. C'est ainsi qu'il faudra se pencher sur de grands noms de la philosophie comme Platon et Aristote. Nous savons que pour bien des auteurs, aussi bien dans la pensée occidentale qu'africaine, la philosophie n'est digne d'être considérée comme telle que si elle est écrite. A cet effet l'étude de Socrate qui comme on le sait n'a jamais écris, ferait ressortir que l'oralité des peuples noirs n'est pas un handicap pour la pratique philosophique. En outre il estime que dans le cadre de la pratique de la philosophie sur le continent africain l'effort doit être fait pour prendre garde contre les phrases comportant des suggestions contestables. Cela pourra conduire à la pratique d'une pensée saine et dénudée de toutes affirmations gratuites et irréfléchies. Sur ce point, il fait ressortir en substance la problématique fondamentale de la définition de la philosophie. Il remarque que traditionnellement celle-ci est considérée comme l'amour de la sagesse. Il trouve que cette définition est incomplète et il convient au philosophe africain de procéder à une étude minutieuse de la question, sur la base notamment de l'étude des philosophes anciens et leurs oeuvres. Ensuite, dans son acception, il est impérieux pour le philosophe africain de déterminer le point de départ de la philosophie négro-africaine. Car pour lui, ce départ n'est nullement à situer au point atteint par la philosophie des autres continents notamment celle de l'Occident. Pour lui, si nous le faisions « nous n'aurons guère la possibilité de formuler et de synthétiser ce qui pourrait être appelé la philosophie négro-africaine » (p.116). Car à ses yeux, au premier niveau de considération, la question de la philosophie négro-africaine se pose en termes de race avant d'accéder par la suite à l'universalité. Ériger le point de départ de la philosophie africaine au point d'arrivée des autres philosophies de l'y diluer voire de l'étouffer. A cet effet il estime que le point de départ de la philosophie africaine doit être cherché dans la philosophie de la religion ou des religions (p.116). C'est pourquoi il incombe au philosophe africain de s'atteler à cette tache. Plus précisément il est question d'élucider les différentes croyances des peuples différents clans africains. Cette étude se fondera sur les résultats des études anthropologiques, sociologiques, ethnologiques etc., dans le but ultime de trouver leur universalité. Un autre rôle du philosophe africain est celui d'étudier les coutumes et traditions africaines ainsi que leur signification éthique. Cela est d'autant plus fondé que les coutumes et les traditions en Afrique occupent une place incontournable. Au nom d'elles, ce qui aurait pu être considéré comme des atrocités peut être toléré, mieux pratiqué et transmis de génération en génération pour ne jamais être abandonné. Donc il convient selon Taita Towet de s'interroger et d'apporter des réponses satisfaisantes à des questions essentielles : quelle est l'attitude de l'Africain face à la vie ? Quel est le fondement des comportements des Africains ? Pour l'Africain, qu'est-ce que la vie heureuse ? En un mot le philosophe doit étudier et élucider la logique interne qui commande à tous les actes des Africains. Cette logique par ailleurs n'est pas à confondre avec la logique aristotélicienne. Elle renvoie à la signification de la signification. Cette étude passe par un examen des langues africaines pour éprouver leur capacité à exprimer logiquement nos pensées. Et enfin, selon Taita Towet, il revient au philosophe de d'étudier les buts pour lesquels existent les gouvernements africains. Plus précisément, il est question de s'interroger sur ces formes de gouvernement pour savoir si ceux-ci conviennent aux peuples africains, s'ils servent réellement les intérêts des peuples africains ou s'ils ne sont là que pour une minorité. De plus il doit poser la question de leur légitimité : sont-ils responsables devant les peuples qu'ils gouvernent ou devant Dieu.

Cette étude de l'article de Taita Towet, loin d'être exhaustive, montre que sur-le-champ spécifique africain la question du rôle de la philosophie s'est posé depuis bien des années et que des perspectives fort intéressantes ont été envisagées. Elle fait ressortir une propension de lier philosophie et race notamment et d'exclure toute possibilité de convergence entre la philosophie négro-africaine et celle des autres continents notamment celle de l'Occident. Cependant cela n'enlève rien à la pertinence de ses propositions qui se situent à une période où la problématique même d'une philosophie africaine faisant rage. Ce qu'on peut dire c'est qu'entre temps les débats ont évolué. Plus précisément cette manière de concevoir la philosophie a été battue en brèche, d'autres pistes ont été proposées. Des pistes qui, même si elles ne font pas l'accord de tout le monde dans ce débat, restent pour néanmoins représentatives d'une certaine intelligentsia africaine. Donc il faut en tenir compte et c'est seulement sur la base de la prise en compte de tous les courants de la philosophie africaine qu'il est possible de dégager et d'analyser la question du rôle de la philosophie sur le continent africain.

* 25 TOWET, Taita, Le rôle d'un philosophe africain, in Présence africaine 1959) n.27-28, 108-128, et in SMET, A.J. (ed), Philosophie africaine. Kinshasa, 1975, I, 185-206.

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