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La place de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques du Commissaire aux comptes

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par Dayashanker POTA
IAE de la Réunion - Maîtrise de Sciences et Techniques comptables et financières 2006
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE LA REUNION

Institut d'Administration des Entreprises

MEMOIRE

présenté pour l'obtention du diplôme de

MAITRISE DES SCIENCES ET TECHNIQUES

COMPTABLES ET FINANCIERES

La place de l'environnement de l'entreprise

dans l'approche par les risques

du commissaire aux comptes

par

POTA Dayashanker

Sous la direction de

M. Jean-Marc DUHE

Année universitaire : 2005-2006

UNIVERSITE DE LA REUNION

Institut d'Administration des Entreprises

MEMOIRE

présenté pour l'obtention du diplôme de

MAITRISE DES SCIENCES ET TECHNIQUES

COMPTABLE ET FINANCIERE

La place de l'environnement de l'entreprise

dans l'approche par les risques

du commissaire aux comptes

par

POTA Dayashanker

_______________________

Sous la direction de

M. Jean-Marc DUHE

Chacun a raison de son propre point de vue,

mais il n'est pas impossible que tous le monde est tort.

Mahatma Gandhi

REMERCIEMENTS

Je souhaite tout d'abord exprimer mes plus sincères remerciements à Monsieur Jean Marc DUHE qui a accepté de diriger la rédaction de ce mémoire et qui a sans doute contribué à le rendre meilleur. Outre ses précieux conseils, il a toujours su faire preuve d'une grande patience et d'une certaine perspicacité à mon égard, qui m'ont permis d'aboutir dans mon travail.

Je tiens à exprimer ma gratitude à l'égard de tous les commissaires aux comptes qui ont accepté de répondre à mes questions et qui ont établis ainsi le lien entre la théorie et la pratique, indispensable au travail de recherche d'un mémoire.

Je remercie également mes parents et toute ma famille, qui m'ont toujours soutenu et encouragé, et grâce à qui j'ai pu entreprendre ce dont j'avais envie, sans avoir à me soucier des aspects matériels.

J'aimerais aussi adresser un clin d'oeil particulier à mes deux grands amis, Déva et Johan qui, en plus de leur amitié et leur soutien, ont toujours fait en sorte rendre la vie plus agréable à l'IAE

Enfin, je souhaiterais remercier tout les amis et les personnes qui m'ont toujours encouragé et accompagné mon travail de leur pensée positive mais qu'il serait trop long de citer ici.

Liste des abréviations

CNCC : Conseil national des commissaires aux comptes

H3C : Haut conseil du commissariat aux comptes

IFAC : International Federation of Accountants

ISA : International Standards of Auditing

Introduction

La globalisation qui caractérise notre économie moderne a accentué la sensibilité de l'entreprise à son environnement. L'évolution et le fonctionnement de l'entreprise peuvent être en partie déterminés par son environnement. Selon plusieurs partisans de la théorie de la contingence, tels Lawrence et Lorsch (1967), l'environnement global de l'entreprise va en conditionner les fonctions et il peut même être le déterminant principal de la performance de l'organisation (Prescott,1986). Cette notion se retrouve dans la théorie de l'économie industrielle de Porter (1980), pour laquelle un ensemble de facteurs extérieurs à l'entreprise va déterminer son taux de profit ainsi que son comportement stratégique.

Les caractéristiques de l'entreprise sont étroitement liées à l'environnement de celle-ci. La notion d'environnement peut être rapprochée de celle de l'écosystème en écologie, qui est définie comme un système d'interactions entre les populations de différentes espèces vivant dans un même site, et entre ces populations et le milieu physique1(*). Ainsi l'environnement serait un système global dont ferait partie l'entreprise en tant que sous-système en relation avec le système économique, politique ou social et les autres sous-systèmes qui l'entourent.

En sciences de Gestion l'environnement de l'entreprise peut être défini comme l'ensemble des facteurs socio-économiques qui influent sur la vie de l'entreprise2(*). Ces contraintes proviennent principalement des ressources dont dispose l'entreprise, de la législation social, financière ou commerciale, de la technologie en vigueur, du pouvoir politique en place ou encore des différentes parties prenantes à la vie de l'entreprise. Dans la mesure où le comportement de l'entreprise peut en partie être expliqué par les exigences de l'environnement dans lequel elle évolue, il peut constituer un bon point de départ pour toute analyse concernant cette dernière.

Les états financiers ayant pour but de refléter la réalité économique de l'entreprise, ils pourront aussi être affectés par son environnement.

Dans un essai intitulé « Comptabilité et euphémisme » en 2005, Bernard Colasse assigne à la comptabilité le rôle de fournir les informations qui permettront à l'entreprise de se légitimer face à son environnement. Pour lui cette fonction de légitimation peut parfois conduire les dirigeants à manipuler l'information comptable afin de faire en sorte que cette dernière réponde aux attentes de son environnement.

Outre le fait, pour les états financiers de refléter les effets de l'environnement sur l'entreprise, il peut donc aussi être une cause directe de la manière dont ils sont présentés avec les différentes options comptables qui sont offertes aux dirigeants.

L'objectif de l'audit est de certifier la régularité, la sincérité et l'image fidèle des comptes de l'entreprise. Les contraintes de l'environnement peuvent être un facteur de risque qui irait à l'encontre du respect de certain de ces principes. Il n'est donc pas sans conséquence sur la mission de certification du commissaire aux comptes.

Lorsqu'il va analyser une entreprise, le commissaire aux comptes est confronté à des risques de différentes natures qui pourront être la cause d'une mauvaise information comptable. Il devra donc identifier et évaluer ces risques afin d'en connaître les incidences sur les objectifs de sa mission.

Les nouvelles normes d'audit émises par l'Internatonal Federation of Accountants (IFAC) élaborent un modèle d'audit dans lequel l'identification des risques occupe la place centrale dans la mission des auditeurs. L'approche par les risques repose sur une réflexion approfondie et préalable sur la nature des risques qui peuvent affecter les comptes. Elle va permettre de donner la priorité au traitement des risques significatifs pour que l'effort le plus important se concentre d'abord sur ces derniers. Cette approche vise à réduire le risque d'audit qui est le risque que l'auditeur formule une opinion erronée sur les comptes. Les normes professionnelles définissent le risque d'audit comme la résultante de trois composantes : le risque inhérent de l'entreprise, le risque lié au contrôle et le risque de non détection. Ce dernier risque va être évalué à partir de l'analyse conjointe des deux premiers. Leurs intensités respectives permettront de définir un programme de contrôle sur les comptes qui sera en adéquation avec le risque d'audit souhaité.

L'analyse des risques et de leurs incidences possibles sur les comptes est importante pour le déroulement de la mission d'audit car la nature des risques conditionne la structure des travaux permettant au commissaire aux comptes de fonder son opinion. Il est donc important d'identifier les risques que peut faire peser l'environnement sur les états financiers.

L'évaluation du risque lié à la connaissance générale de l'entreprise et de son environnement est maintenant plus précisément définie dans les nouvelles normes d'audit internationales émises par l'IFAC. La norme ISA 315 stipule clairement que la compréhension de l'environnement de l'entreprise est un aspect essentiel de la mission de l'auditeur et lui assurera un audit de qualité. La contingence de l'environnement est un facteur de risque pour l'entreprise qui devra donc être prise en compte par l'auditeur.

Une étude en 2003 de Thiery-Dubuisson S., montre, que l'évolution de l'environnement macroéconomique fait partie de l'une des causes qui a modifié l'orientation de l'approche par les risques des grands cabinets d'audit. Ceux-ci adoptant maintenant une approche qui vise à évaluer le risque total sur la viabilité et la continuité de la firme auditée. La prise en compte de l'environnement a transformé l'approche par les risques des commissaires aux comptes de ces cabinets.

Il apparaît dès lors intéressant d'étudier précisément le rôle réel joué par l'environnement de l'entreprise dans l'identification et l'évaluation des risques par le commissaire aux comptes.

La contribution de notre mémoire s'inscrit donc en la réponse à l'interrogation suivante : « L'analyse de l'environnement de l'entreprise est-elle intégrée efficacement dans l'approche par les risque du commissaire aux comptes ?»

Pour cause de contraintes géographiques, nous limiterons notre terrain d'étude aux cabinets d'audit de la Réunion qui sont de tailles plus ou moins réduites. Il s'agira pour nous, au travers d'une recherche exploratoire, d'étudier les conséquences de la prise en compte de l'environnement sur la démarche d'audit par les risques.

Plusieurs auteurs se sont déjà intéressés aux effets de l'environnement économique sur l'orientation de la mission d'audit.

Dès 1997, Bell et al avance que pour l'amélioration de l'audit financier, l'auditeur doit se baser sur l'étude de la dynamique du système de l'entreprise auditée. Il doit étudier les relations entre l'entreprise et ses fournisseurs, ses clients, ses concurrents ou encore ses apporteurs de capitaux.

D'autres auteurs ont ensuite réalisé des études avec des raisonnements analogues mais aussi en démontrant concrètement le bien fondé de cette analyse de l'environnement de l'entreprise. Ainsi en 2000, Erickson, Mayhew et Félix, après la faillite de la banque américaine Saving & Loans de 1987, réalisent un audit de ces banques qui se base sur les feuilles de travail de l'audit qui a été réalisé avant la faillite. Ce nouvel audit intègre l'étude de l'environnement de la banque. Ils établissent alors clairement qu'une connaissance approfondie de l'environnement économique et stratégique du client aurait permis aux auditeurs de détecter les fraudes et d'éviter la faillite. La considération de l'environnement économique dans la démarche d'audit aurait dirigé les contrôles sur les transactions irrégulières.

Notre étude s'inscrit dans la lignée de ces recherches avec pour modeste ambition d'étudier le véritable rôle de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans la mission du commissaire aux comptes. Le but de ce mémoire est de comprendre dans quelle mesure les commissaires aux comptes s'intéressent à l'environnement, s'ils en tiennent compte, pour améliorer la pertinence de leur approche par les risques. Nous voulons savoir si les risques liés à l'environnement sont bien appréhendés par les commissaires aux comptes en général.

Pour ce faire, nous effectuerons donc une étude exploratoire qui sa base sur le cadre réunionnais. La Réunion étant un territoire ultrapériphérique insulaire, il conviendra de s'interroger sur les éventuels biais dans notre analyse que peut générer ce statut particulier. Il peut engendrer certains comportements spécifiques qui pourraient avoir un impact sur les résultats de notre étude. Par ailleurs, le fait que notre tissu économique, soit composé presque exclusivement de Petites et Moyennes Entreprises, pourrait étayer les résultats des autres travaux de recherche sur l'audit par les risques de ce type d'entreprise.

Notre étude étant basée sur la description par les auditeurs de leur approche de l'audit, nous nous appuierons sur une démarche exclusivement qualitative qui prendra la forme d'entretiens semi-directifs avec les commissaires aux comptes de l'île. L'analyse de la perception qu'on les commissaires aux comptes de leur démarche permettra de dire en quoi l'intégration de l'environnement dans l'approche par les risques peut améliorer la pertinence des contrôles et de mieux cerner son influence sur le jugement de ces derniers. Par la suite, nous pourrons juger de sa correcte intégration, tant par rapport à l'application des normes que de l'amélioration qui est apportée à la qualité de la mission d'audit.

Sur le plan pratique, cette étude peut, si le besoin en était, sensibiliser les commissaires aux comptes sur l'utilisation de l'environnement de l'entreprise dans leur approche par les risques. En effet la mise en place des nouvelles normes d'audit, qui auront une valeur législative, les oblige maintenant à une meilleure appréhension des aspects des risques en général et ceux de l'environnement de l'entreprise en particulier. D'un point de vue plus concret, nous pouvons penser qu'elle pourrait servir de support à une description du comportement des commissaires aux comptes locaux de leurs démarches d'audit qui pourrait amener à une prise de conscience sur d'éventuelles lacunes. Dans cette optique, il serait alors judicieux de proposer un outil qui pourrait aider à améliorer la prise de connaissance des risques liés à l'environnement de l'entreprise.

Dans une première partie, nous montrerons que l'environnement est important pour l'identification des risques pertinents de la mission d'audit légal.

Cette partie décrira d'abord l'importance de l'environnement pour l'entreprise et montrera qu'il est facteur de risques pour cette dernière. Ensuite, elle présentera précisément la place qu'il occupe dans l'approche par les risques du commissaire aux comptes avant de montrer l'importance que ce dernier doit lui accorder afin d'améliorer la qualité de son audit.

Dans une deuxième partie, nous réaliserons donc une étude empirique visant à étudier la perception qu'on les commissaires aux comptes de la place de l'environnement dans leur approche par les risques afin de savoir si elle est en adéquation avec la fonction de l'environnement qui aura été dégagée dans la première partie. L'analyse des résultats de l'étude permettra de tirer des conclusions auxquelles nous apporterons quelques recommandations.

PARTIE I : L'aspect théorique de la prise en compte de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques

L'objectif de cette partie est de montrer l'importance de l'environnement de l'entreprise dans l'identification et l'évaluation des risques pertinents pour la réalisation d'un audit financier. Après avoir décrit l'influence qu'exerce l'environnement sur l'entreprise et les risques dus à ce dernier, nous présenterons l'approche par les risques dans la démarche du commissaire aux comptes avant d'étudier la place que doit occuper l'analyse de l'environnement dans cette approche afin d'améliorer la détection des risques.

Chapitre 1 : Influence de l'environnement sur les risques de l'entreprise

Il s'agit ici de définir précisément ce que l'on entend par environnement de l'entreprise afin de mieux comprendre la manière dont il peut impacter l'entreprise et les états financiers pour ensuite appréhender comment son analyse pourrait contribuer à l'amélioration de l'approche par les risques.

A. Définition des caractéristiques de l'environnement d'une entreprise

La compréhension de l'environnement de l'entreprise permet de mieux la connaître. La description des caractéristiques de l'environnement donne l'occasion de mieux concevoir les rapports existant entre l'entreprise et ce dernier. L'environnement est composé de tous les éléments et acteurs extérieurs susceptibles d'affecter l'activité de l'entreprise. Ces facteurs extérieurs peuvent apparaîtrent comme des contraintes ou des opportunités. Ce mémoire étant relatif aux risques pour l'entreprise, nous nous intéresserons principalement aux facteurs contraignants de l'environnement. L'environnement de l'entreprise a de multiples composantes qui le rendent complexe. Dans un souci de commodité pour l'analyse de son influence sur l'entreprise, on peut distinguer l'environnement entre deux grandes composantes : le macroenvironnment et le microenvironnment.3(*)

1. Le Macroenvironnement

Le macroenvironnement est l'environnement général de l'entreprise. Il est commun à un grand nombre d'entreprises exerçant des activités différentes. Il comprend les variables qui vont influencer l'entreprise alors que celle-ci, même de grande taille, ne pourra avoir qu'une influence très faible voire nulle sur ces variables. Elles n'affecteront que partiellement la gestion courante de l'entreprise mais auront un impact non négligeable sur la gestion à long terme. D'une façon générale, elles vont générer des contraintes pour l'entreprise, qui devra les intégrer dans son orientation stratégique et dans le fonctionnement de sa structure.

Il est donc important d'avoir une perception globale de cet environnement général qui peut être décomposé en un ensemble de sous-systèmes regroupant plusieurs types de facteurs.

Le macroenvironnement peut être décrit à l'aide du modèle PESTEL qui va le décomposer en six sous-ensembles :

- Un cadre Politique : Les décisions politiques sur les thèmes de la fiscalité ou du social par exemple vont se répercuter sur le comportement des acteurs de l'entreprise.

- Un cadre Economique : On retrouve ici les grandes tendances liées à la conjoncture économique comme la croissance, l'inflation, le chômage ou encore la politique monétaire qui vont se répercutées sur l'activité de l'entreprise.

- Un cadre Socioculturel : Les facteurs démographiques, culturels, morales ou l'évolution des modes de vie peuvent en partie expliquer le comportement de l'entreprise et de son marché.

- Un cadre Technologique : Il comprend les nouvelles avancées technologiques, les dépenses de recherche et développement publics ou privées qui augmenteront la productivité des entreprises.

- Un cadre Ecologique : Il reflète à la fois l'évolution des règlementations liées à la protection de l'environnement et celle des nouvelles attentes des clients sur la dimension éthique des entreprises. On peut aussi y intégrer les ressources naturelles que va utiliser l'entreprise.

- Un cadre Légal : Toutes les sociétés devront respecter les lois, règlement et autres décrets qui vont régir l'exercice de l'activité économique.

Ces différents éléments vont définir le cadre d'action général qui s'impose à l'entreprise. Elle devra étudier leurs actions et leurs interactions afin d'assurer la pérennité de son activité. Si elle ne peut véritablement changer ce cadre, elle a en revanche la possibilité d'interagir avec son environnement plus proche.

2. Le Microenvironnement

Le microenvironnement constitue l'environnement proche ou immédiat de l'entreprise. On le qualifie également de spécifique car il est propre à chaque entreprise ou secteur d'activité. Il regroupe les éléments qui vont avoir une influence directe sur l'entreprise mais sur qui l'entreprise pourra aussi agir. Outre les concurrents, il comprend toutes les « parties prenantes » à l'entreprise. Ce terme est la traduction française de « stakeholders » qui a été définie par Freeman4(*) (1984) comme « tout groupe ou individu qui peut affecter ou être affecté par l'atteinte des buts de l'organisation ». Les stakeholders représentent toutes les entités pour lesquels l'entreprise représente un « enjeu ». Les parties prenantes peuvent être classées en deux catégories. Celles qui sont liées à l'entreprise par un contrat comme les clients, les fournisseurs ou les actionnaires et celles qui sont diffuses tels que les organismes administratifs, les collectivités locales ou encore l'opinion publique.

Les clients et fournisseurs comptent parmi les parties prenantes les plus influentes de l'activité de l'entreprise et font parties des éléments qui concourent au « jeu concurrentiel » selon M.Porter (1982). L'environnement concurrentiel peut être décrit selon son approche. Son analyse ne se limite pas aux seules entreprises intervenantes sur un même secteur mais il tient compte aussi des menaces potentielles telles que l'entrée de nouveaux concurrents, l'apparition de produits de substitution et des pressions exercées par les clients et les fournisseurs. Ces cinq « forces » ont une influence déterminante sur les conditions de la concurrence qui se trouvent à l'origine des performances de la plupart des entreprises.

Les échanges de l'entreprise avec son environnement proche sont en étroite relation avec son activité et affecteront plus directement ses choix et ses actions. Ce microenvironnement présente souvent aussi un caractère contraignant qui peut se révéler hostile. Les influences du macroenvironnement vont se répercuter au niveau microéconomique mais elles s'expriment de manière plus pressante sur l'entreprise car elles se concrétisent au travers d'échanges et de transactions.

L'environnement de l'entreprise peut donc être appréhendé selon le schéma suivant :

Environnement concurrentiel

-Concurrents

-Barrières à l'entrée

-Produits de substitution

-Compétitivité de l'entreprise

Parties prenantes contractuelles

(Clients, fournisseurs, Apporteurs de capitaux)

Parties prenantes non contractuelles

- Organes administratifs

- Collectivités locales

- Syndicats de personnels

Entreprise

Microenvironnement

Structure de l'activité

(Marché et organisation spécifique)

Cadre technologique

Cadre socioculturel

Cadre politique

Cadre Légal

Macroenvironnement

Cadre économique

Cadre écologique

Les composantes du microenvironnement vont interagir directement avec l'entreprise qui devra elle-même agir dans le cadre général fixé par le macroenvironnment.

Touts les facteurs de l'environnement aussi bien général que spécifique sont interdépendantes et vont avoir un impact à tous les niveaux de l'entreprise. L'analyse de toutes les composantes de l'environnement montre qu'ils sont principalement facteurs de contraintes pour l'entreprise et qu'ils peuvent être parfois déterminants dans l'organisation et l'évolution de son activité.

B. Influence de l'environnement pour l'entreprise

Les caractéristiques de l'entreprise sont étroitement liées à son environnement. Il va donc jouer un rôle significatif sur la conduite de l'activité de celle-ci, qui sera retracée dans les états financiers. Par ailleurs, il pourra également influencer l'élaboration même de ces états financiers par les contraintes qu'il va générer.

1. Influence sur l'activité de l'entreprise

L'évolution et le fonctionnement de l'entreprise sont déterminés par son environnement. Ce postulat est posé par la théorie de la contingence5(*) qui énonce le principe du déterminisme environnemental. Ce courant de pensée suppose la prise en considération de l'environnement dans toutes les actions de l'entreprise. Il va affecter autant la structure organisationnelle de l'entreprise que sa stratégie. L'entreprise devra s'adapter spécifiquement aux différents types de contexte. Selon les plus célèbres de ses partisans comme Lawrence et Lorsch, l'environnement global et son degré d'incertitude vont déterminer les fonctions de l'entreprise. Pour eux, la performance découle de l'adéquation entre des conditions externes et des capacités internes. L'environnement apparaît alors comme une contrainte que l'entreprise va devoir intégrer dans la gestion de son activité.

Cette approche par le déterminisme environnemental s'applique plutôt à l'environnement global qui affecte plus la gestion stratégique de l'entreprise. L'environnement spécifique de l'entreprise affecte plus directement sa gestion courante. D'après Porter l'environnement concurrentiel va conditionner la réussite ou l'échec de l'entreprise. Pour assurer sa pérennité, l'entreprise va devoir choisir sa stratégie concurrentielle qui est conditionnée par l'analyse des cinq forces de la concurrence. Ces forces déterminent la rentabilité d'un secteur et donc celui de la firme. Les dirigeants vont mettre en place leurs stratégies concurrentielles eu égard à la pression que vont exercer ces forces sur le secteur d'activité et la firme.

Les conséquences de l'environnement proche de l'entreprise peuvent être aussi appréhendées de manière plus formelle par la théorie des parties prenantes qui ont déjà été évoquées précédemment. Cette théorie s'intéresse à l'étude des relations entre l'entreprise et ses parties prenantes. Elle va identifier les liens qui existent entre les partenaires de l'entreprise et la réalisation des objectifs de la firme. Etant insérée dans un réseau d'acteurs économiques affectés directement ou indirectement par son activité, l'entreprise doit gérer les interactions entre ses objectifs économiques et les attentes des parties prenantes. Plusieurs études ont montré que la prise en compte des « stakeholders » dans la gestion de la l'entreprise conduit à une performance supérieure à celle des autres firmes. Les dirigeants doivent agir au sein de l'entreprise en tenant compte des intérêts et des revendications des différents acteurs. D'après Mitchell et al la dépendance des firmes par rapport à des « stakeholders » concernant l'apport de ressources importantes se traduit par un pouvoir d'influence sur la firme pour ces derniers.

Par ailleurs, certains chercheurs comme Hill et Jones ont fait de cette théorie une généralisation de la théorie de l'agence. Les dirigeants de l'entreprise y sont toujours vus comme les agents et les « stakeholders » comme le principal. Les différentes parties prenantes vont se distinguer les unes des autres par leurs importances et leurs pouvoirs vis-à-vis des dirigeants mais toutes auront des intérêts sur l'entreprise. Cette nouvelle relation d'agence conduirait à un équilibrage des intérêts. Les parties prenantes pourront donc demander aux dirigeants d'intégrer dans leur gestion la prise en compte de leurs intérêts.

Cette approche est particulièrement intéressante au niveau de l'audit car elle montre la nécessité de la communication financière à l'égard de toutes les parties prenantes de l'entreprise et non seulement pour les apporteurs de capitaux. En tant qu'utilisateur des états financiers qui ont un intérêt dans l'entreprise, les parties prenantes pourront avoir une influence sur l'élaboration de ces états.

2. Influence de l'environnement sur les états financiers

La comptabilité financière est un langage utilisé pour décrire la réalité économique de la firme dont elle est l'instrument de communication et d'information. Elle va « enregistrer, de façon exhaustive les transactions dans le but de déterminer périodiquement et de présenter sous la forme d'états financiers de synthèse, une situation patrimoniale ainsi qu'un résultat global de l'entreprise »6(*). Cette situation patrimoniale et ce résultat sont l'une des conséquences de la gestion de l'entreprise. Cette gestion est réalisée en partie en considération de l'environnement de l'entreprise. En exprimant la gestion des dirigeants, les états financiers vont refléter également l'action de l'environnement sur l'entreprise. Ce dernier va affecter l'activité et la gestion de l'entreprise et façonner ainsi la représentation des performances qui va en être donnée au travers des états financiers.

L'environnement peut donc être considéré comme l'une des causes indirectes de la représentation financière de l'entreprise. Il peut aussi affecter directement le processus d'élaboration des comptes au travers de son influence sur la conception du système comptable en lui-même. En effet, cette influence peut être illustrée au travers de la mise ne place des normes comptables internationales qui ont pour but d'harmoniser les pratiques comptables des différents pays. Ce besoin d'harmonisation comptable internationale découle des différences qui existent entre les systèmes comptables nationaux. Ces différences proviennent principalement de la diversité des systèmes politique, économique, juridique voire même des cultures. Ainsi une étude comparée des pratiques et des systèmes comptables dans le monde, de Nobes et Parker, met en évidence l'influence déterminante des variables économiques et culturelles comme facteur de différenciation.7(*) On retrouve parmi ces facteurs d'influences, les facteurs du macroenvironnement qui est le même que celui de l'entreprise. Il existe donc une interrelation entre l'environnement général et la normalisation comptable. Il va donc influencer les systèmes comptables qui vont ensuite devenir une composante de cet environnement.

Selon la théorie des «stakeholders », l'environnement direct des entreprises pourra lui aussi avoir un impact sur l'élaboration des états financiers par la pression que peuvent exercer les parties prenantes sur les concepteurs des comptes. La comptabilité est un outil de communication qui permet à ses utilisateurs de prendre des décisions et d'apprécier les performances de l'entreprise. Les fonctions d'enregistrement et de synthèse lui confèrent un rôle primordial dans les relations entre l'entreprise et ses parties prenantes.

Ces parties prenantes sont les principaux utilisateurs de l'information financière. Les dirigeants, qui définissent la politique comptable et sont responsables de l'élaboration des états financiers, peuvent privilégier la fonction de communication de la comptabilité au détriment des principes de régularité, de sincérité et d'image fidèle qui régissent l'établissement des comptes. L'étude de l'impact des contrats partenariaux de l'entreprise sur le choix des pratiques comptables est connue sous le nom de théorie politico-contractuelle ou de théorie positive de la comptabilité qui a été élaboré par Watts et Zimmerman. Selon eux, les variables qui influencent les dirigeants et l'entreprise sont déterminantes dans le processus d'élaboration des états financiers. L'ensemble de contrats qui caractérisent la firme, fait de celle-ci le point d'équilibre d'acteurs dont les objectifs divergent. La comptabilité se trouve au centre du processus d'élaboration et de contrôle de la bonne exécution des contrats. Dès lors, le dirigeant qui dispose de plusieurs options comptables et bénéficie d'une asymétrie d'information, va proposer des méthodes comptables conformes à l'intérêt des parties prenantes les plus influentes ou qui participent le plus à son bien être. Les dirigeants vont chercher à maximiser leurs intérêts et ceux de l'entreprise en présentant des états financiers qui risque de ne pas refléter la réalité de l'entreprise mais plutôt celle qui leurs sera le plus profitable.

Outre son influence sur la gestion de l'entreprise qui va en déterminer les performances, l'environnement intervient à deux niveaux dans le processus comptable :

- Au niveau de l'environnement général : par l'action de ses différentes composantes sur le processus politique de normalisation comptable.

- Au niveau de l'entreprise : par l'influence qu'il exerce sur la politique comptable.

On voit bien l'importance pour l'audit d'analyser l'environnement de l'entreprise. En effet, il peut non seulement intervenir dans le processus d'élaboration des comptes par le biais de diverses incitations ou contraintes, mais il est également composé des utilisateurs des états financiers. Le fait de comprendre l'influence et les attentes des utilisateurs à l'égard de l'entreprise lui permettra d'anticiper les risques que ces derniers ne soient pas conformes aux normes comptables, qui permettent de retranscrire l'image fidèle de l'entreprise, mais plutôt aux attentes des utilisateurs.

L'environnement peut donc être facteur de risques qui vont se répercuter tant au niveau de l'activité de l'entreprise, qu'au niveau du respect des principes d'établissement des états financiers.

C. L'environnement comme facteur de risques pour l'entreprise

En gestion, le risque peut être définie comme « la non-atteinte d'un objectif causée par tout facteur pouvant peser sur la non réalisation de cet objectif ».8(*) Il est donc lié à la notion d'incertitude. Le risque peut résulter de la poursuite même des objectifs de la firme mais aussi des évolutions dans son environnement puisque celui-ci affecte l'entreprise. Il convient d'identifier les menaces diverses associées à des évolutions défavorables provenant de facteurs composant l'environnement général mais aussi les actions négatives émanant directement ou indirectement de l'environnement proche de l'entreprise. Les risques découlant de ces actions vont se matérialisés, là encore, au niveau de l'activité de l'entreprise et au niveau des états financiers.

1. Facteurs de risques pour l'activité de l'entreprise

L'activité de l'entreprise va être affectée par des risques de plusieurs natures liés aux multiples composantes de l'environnement qui apparaît comme contingent. L'entreprise doit faire face à un environnement en pleine évolution.

Les risques liés à l'environnement vont dépendre de ses caractéristiques. Un environnement turbulent, qui est caractérisé par la rapidité des changements économiques, technologiques, sociaux ou politiques, va développer les risques. La complexité de l'environnement, qui est fonction du nombre de facteurs et de relations qui le composent est aussi un facteur de risque plus important pour l'entreprise. Plus les échanges entre l'entreprise et son environnement seront variés, plus il sera difficile à l'entreprise de contrôler ces relations. La nature des transactions pourra aussi occasionner des risques si elles reposent sur des connaissances spécifiques ou difficilement quantifiables. Les risques seront également plus conséquents si l'environnement est hostile. L'hostilité va dépendre de la concurrence, des relations sociales ou encore de la disponibilité des ressources dans l'environnement.

Le risque doit aussi être traité du point de vue des caractéristiques de l'entreprise. En effet plus l'entreprise sera sensible à son environnement et plus celui-ci va être facteur de risque.

Le premier facteur de risque auquel peut être confrontée l'entreprise est le non respect du cadre légal dans lequel elle insère son activité. Les changements de réglementation peuvent placer l'entreprise en situation illégale et compromettre la poursuite de son activité. L'entreprise doit veiller à toutes les modifications règlementaires afin de s'assurer du respect de celles-ci.

La conjoncture économique générale va déterminer les conditions financières et de marché auxquels sera confrontée l'entreprise et va être porteuse de risque pour la gestion et la rentabilité de l'entreprise. La globalisation de l'économie a exacerbé la sensibilité aux risques à cause de l'ouverture plus grande des entreprises aux marchés internationaux. Le nombre d'entreprises concurrentes est aujourd'hui plus important. Les variables majeures déterminant l'environnement économique sont de plus en plus dépendantes du contexte international et donc plus difficilement appréhendables.

De plus la mondialisation est favorisée par l'évolution et la diffusion rapide des technologies qui sont génératrices de nouveaux risques découlant parfois d'une mauvaise maîtrise de ces nouvelles techniques ou d'une erreur d'appréciation de leurs impacts sur l'entreprise.

Les facteurs écologiques et sociaux sont aussi générateurs de risques structuraux qu'il est plus difficile d'appréhender mais qui sont important pour la légitimation de l'entreprise à l'égard de la société. L'image citoyenne de l'entreprise est devenue importante pour la plupart des consommateurs.

A ces risques liés à l'environnement global, vont venir s'ajouter les risques liés aux parties prenantes de l'entreprise. Outre les risques dus aux pressions qu'elles vont exercer sur l'entreprise, cette dernière devra tenir compte des risques qui vont affecter les parties prenantes elles mêmes à cause de la relation étroite qu'elles ont avec l'entreprise.

Les principaux facteurs de risques pour l'activité de l'entreprise peuvent être synthétisé dans le schéma suivant :

Principaux Facteurs de risques liés à l'environnement de l'entreprise

Caractéristiques de l'environnement

Conformité au cadre légal

Mauvaise conjoncture économique

Evolutions technologiques

Risques liés aux Ressources naturelles

Risques liés aux parties prenantes

Risques pour l'activité de l'entreprise

Cette revue des principaux risques que génère l'environnement de l'entreprise ne saurait être exhaustive. Par ailleurs, il convient de rappeler que les variables sont interdépendantes et qu'il ne faut donc pas s'attacher seulement à l'identification des facteurs mais aussi à leurs actions conjuguées sur l'entreprise.

L'environnement est donc une cause directe de risque pour la pérennité de l'activité de l'entreprise.

2. Facteurs de risque pour les états financiers

L'environnement crée des pressions importantes sur l'entreprise, qui peuvent inciter les dirigeants à agir sur la mesure des performances afin d'améliorer faussement les états financiers. En effet, d'après ce qui a été vu à la section précédente avec la théorie positive de la comptabilité, les dirigeants peuvent chercher à utiliser les différentes méthodes comptables qui leurs sont offertes pour modifier la présentation et le contenu des états financiers. Ces derniers doivent être réguliers, sincère et refléter une image fidèle de l'entreprise afin de servir de support fiable aux prises de décision des différents utilisateurs. Les dirigeants auront tendance à présenter des comptes conformes aux attentes de ces utilisateurs afin de réduire au maximum l'influence qu'ils pourraient avoir sur l'entreprise en présentant les choses sous un jour favorable pour eux. Les dirigeants vont instrumentaliser l'information comptable pour limiter les actions des parties prenantes sur l'entreprise.

Les choix comptables sont le plus souvent utilisés dans un objectif de gestion des résultats, car les intérêts de l'entreprise sont déterminés par les conditions des contrats entre l'entreprise et les parties prenantes. Or un grand nombre de ces contrats sont fondés sur les bénéfices. La gestion des résultats se fait le plus couramment par le biais de ce qui est communément appelé dans la littérature et la pratique les « accruals ». Ce sont les ajustements qui résultent des travaux de fin d'exercice qui concernent les dotations aux amortissements, les provisions, les reprises ou encore les changements de méthodes comptables. Ils sont, pour beaucoup, laissés à la discrétion du dirigeant qui pourra aisément en modifier le montant réel.

Le montant des « accruals » a souvent été utilisé dans diverses études afin de mettre en évidence une gestion des résultats. Les études sur la gestion des résultats ont montré qu'ils avaient trois objectifs principaux :

§ La minimisation des coûts politiques : Une étude de Jones et al en 1992 a montré que les entreprises qui déposaient une plainte auprès de la commission américaine décidant des tarifs dissuasifs sur les importations sous évaluaient leurs résultats afin de cautionner leurs demandes pour une hausse des taxes sur les produits importés.

§ Minimiser les frais de financement : Une étude de De Angelo et al en 1994 a permis de conclure que l'on choisit les méthodes comptables de façon à gérer une crise financière et à obtenir de meilleures conditions des prêteurs dans la renégociation d'emprunts.

§ Maximiser la fortune des dirigeants : Toujours selon De Angelo les dirigeants vont augmenter les résultats de l'entreprise dans le but de convaincre les actionnaires de garder leur confiance dans la direction.

Ces études montrent toutes que la gestion des résultats trouve sa source dans un souci de réduction du pouvoir de l'environnement, représenté ici par les parties prenantes, sur l'entreprise et les dirigeants. La politique comptable de gestion des résultats mise en oeuvre par les dirigeants va limiter l'influence de l'environnement sur l'entreprise en lui donnant une mauvaise perception de la réalité économique de cette dernière et en faussant ainsi son action.

Les manipulations comptables ont pour effet de transférer la richesse de certaines parties prenantes à l'entreprise ou aux dirigeants. Selon une étude de Breton et Schatt certaines manipulations comptables irrégulières conduisent directement à une réduction du montant d'impôt, d'un endettement auprès des banquiers dans des conditions plus avantageuses, d'une limitation du coût salarial ou d'une conservation des parts de marchés ou des marges réalisées sur la vente de leurs produits. Ici encore, le but rechercher est de diminuer le champ d'action des parties prenantes à l'égard de l'entreprise. L'Etat ne va pas récupérer le montant d'impôt auquel il prétend. Les organismes financiers voient leurs rémunérations diminuées en proposant des taux d'intérêts qui ne sont pas en adéquation avec la situation réelle de l'entreprise. Les entreprises vont justifier une augmentation des prix à l'égard des clients en affichant des bénéfices plus faibles.

L'environnement peut aussi parfois avoir des conséquences directes sur le risque que les états financiers ne reflètent pas la réalité de l'entreprise. En effet, l'instabilité de l'environnement économique peut conduire à une situation de crise qui peut être à l'origine de risques que la technique comptable ne traduit qu'imparfaitement. Les états financiers ayant une vision rétrospective, ils ne permettent pas d'anticiper les changements qui peuvent se révéler déterminants pour la pérennité de l'entreprise en situation de crise. L'information financière ne sera pas donc pas pertinente à l'égard des parties prenantes de l'entreprise.

L'environnement est donc un facteur qui peut générer des risques importants concernant d'une part l'atteinte des objectifs de la firme et d'autre part la conformité des états financiers aux normes comptables. Ces risques devront donc être pris en compte pour la réalisation de la mission de certification de l'auditeur externe.

Chapitre 2 : L'approche par les risques dans la mission d'audit légal

Les nouvelles normes d'audit émises par l'Internatonal Federation of Accountants (IFAC) placent l'approche par les risques au centre des obligations des commissaires aux comptes. L'objectif de ce chapitre est de décrire l'approche par les risques et son évolution afin de mieux comprendre la manière dont le commissaire aux comptes doit intégrer l'analyse de l'environnement dans sa démarche. Avant d'étudier le modèle d'approche par les risques et l'intégration de l'environnement de l'entreprise dans cette approche, il semble opportun de préciser le contexte dans lequel elle prend place.

A. Le contexte de l'approche par les risques

Faisant partie intégrante de la démarche d'audit, l'approche par les risques s'insère dans un cadre légal. La législation va, aujourd'hui, fixer les règles à suivre dans la démarche de l'audit et l'objectif de l'approche par les risques qui est la limitation du risque d'audit.

1. Le cadre légal

Le cadre législatif est initialement définit par le code de commerce et la loi de 1966 sur les sociétés commerciales. L'article L.225-235 de ce code définie la mission d'audit légal comme « la certification que les comptes annuels sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé, ainsi que de la situation financière et du patrimoine de la société ». Cette mission comprend aussi des missions particulières relatives à la vérification et la certification de certaines opérations ou à la révélations d'évènements se déroulant dans la société comme les faits délictueux ou susceptibles de mettre en cause la continuité de l'exploitation. En certifiant les états financiers, l'auditeur va être le garant d'informations susceptibles de motiver de nombreuses décisions des destinataires de l'information financières que sont les parties prenantes de l'entreprise. La mission légale des commissaires aux comptes était guidée, jusqu'à l'application de la 8e directive européenne, par un ensemble de normes d'exercice professionnel et par un code de déontologie. Ces normes étaient publiées dans un « référentiel normatif et déontologique de la CNCC ». Elles étaient issues des anciennes normes ISA de l'IFAC et avaient été adaptées au contexte français. Elles imposaient déjà une approche par les risques qui était dominée par l'identification des risques qui découlaient du contrôle interne. En outre, le commissaire aux comptes devait également s'informer sur les risques propres à l'entreprise et à son secteur d'activité pour l'acceptation et la planification de la mission.

Par ailleurs, la loi sur la sécurité financière de 2003 a soumis la profession et ses instances à la surveillance d'un Haut Conseil du Commissariat aux Comptes. Ce dernier a pour mission la surveillance de la profession avec le concours de la CNCC et veiller au respect de la déontologie et de l'indépendance des commissaires aux comptes. Pour ce faire, il dispose de multiples prérogatives dont l'identification et la promotion des bonnes pratiques professionnelles. Il pourra donc valider certaines pratiques d'organismes internationaux et les faire homologuer auprès du ministère de la justice. Cette prérogative prend tout son sens avec l'adoption en septembre 2005 de la 8e directive européenne qui confère aux nouvelles normes ISA un caractère obligatoire. Le H3C a en effet précisé qu'« en vertu des lois françaises et européennes, toutes les normes de l'IFAC sont normatives et quasi législatives, sans distinction entre les obligations de différents niveaux ». Ces normes, qui consacrent l'approche par les risques, devront donc être appliquées par tous les commissaires aux comptes.

Il est donc important de définir l'objectif principal de cette approche qui est la limitation du risque d'audit.

2. L'objectif de limitation du risque d'audit

Les modifications apportées par l'application des normes internationales sur l'approche par les risques, n'en ont pas changé l'objectif et les caractéristiques principales qui lui assignent comme objectif la limitation du risque d'audit.

Le risque d'audit est défini comme « le risque que le commissaire aux compte exprime une opinion incorrecte du fait d'anomalies significatives contenues dans les comptes et non détectées. » C'est le risque d'émettre une opinion erronée sur les états financiers.

Il comprend trois composantes :

- Le risque inhérent (ou risque général de l'entreprise) : C'est le risque qu'une erreur significative se produise dans les comptes, compte tenu des particularités de la société, de ses activités, de son environnement, de la nature de ses comptes et de ses opérations. Les caractéristiques propres de l'entreprise vont générer des risques potentiels de nature à influencer l'ensemble des opérations de l'entreprise.

- Le risque lié au contrôle : C'est le risque que les systèmes de contrôles mis en place par la société n'assurent pas la prévention ou la correction des erreurs dans les comptes. Ce risque va dépendre de l'efficacité avec laquelle fonctionne le contrôle interne.

- Le risque de non-détection : C'est le risque que les procédures de vérification de l'auditeur ne lui permettent pas de détecter des erreurs significatives. Ce risque est lié à l'importance du programme de contrôle mis en place par l'auditeur.

Le risque inhérent et le risque lié au contrôle correspondent au risque que les états financiers contiennent des anomalies significatives avant la réalisation de l'audit et le risque de non-détection est le risque que l'auditeur ne détecte pas ces anomalies. L'appréciation de l'importance relative de ces risques va déterminer le risque d'audit qui devra être limitée dans le cadre d'une démarche structurée.

B. Le modèle d'approche par les risques

La récente adoption des nouvelles normes de l'IFAC par le H3C a fait évoluer le modèle français d'approche par les risques. Etant dans une période transitoire entre l'application de ces nouvelles normes et l'ancienne codification, cette partie décrira l'approche par les risques selon les anciennes normes professionnelles de la CNCC et fera une présentation détaillée des modifications apportées par l'adoption de la 8e directive européenne sur le contrôle légal. L'approche par les risques « traditionnelle » va progressivement être remplacée par une nouvelle approche qui privilégie une compréhension plus approfondie de l'entité contrôlée et de son environnement.

1. L'approche par les risques dans le modèle français

L'approche par les risques repose sur une réflexion approfondie et préalable sur les risques qui peuvent affecter les états financiers de l'entreprise. Comme il a été vu précédemment, des risques de différentes natures pourront être la cause d'anomalies significatives dans les comptes. L'évaluation de ces risques va conditionner la structure des travaux d'audit permettant au commissaire aux comptes de fonder son opinion.

L'approche par les risques s'inscrit dans la phase de planification et d'orientation de la mission d'audit. Cette phase comprend trois étapes que sont, la prise de connaissance générale de l'entreprise, la détermination des domaines et systèmes significatifs et la rédaction du plan d'audit ou plan de mission. La prise de connaissance de l'entreprise a pour but de comprendre le contexte dans lequel elle évolue et de la situer dans son environnement. Elle aboutit à l'approche par les risques car elle permet d'identifier les risques généraux et les domaines et systèmes significatifs. De cette identification, découle l'étape de détermination des domaines et systèmes significatifs qui conduit à déterminer les seuils de signification et apprécier l'importance relative qu'une erreur soit susceptible de fausser la lecture des états financiers. Ensuite, le plan de mission élabore le programme général de travail qui va intégrer les éléments dus aux risques et aux systèmes significatifs et définir la stratégie de contrôle ainsi que les moyens qui y seront affectés.

L'approche par les risques s'insère donc dans l'étape de prise de connaissance de l'entité qui a pour but principal d'établir un cadre de référence pour le commissaire aux comptes. Dans cet objectif de fixation d'un référentiel, le commissaire aux comptes doit identifier et comprendre les évènements, les opérations et les pratiques qui peuvent avoir une importance significative sur les états financiers, la mission d'audit et son opinion. Pour ce faire, il devra tenir compte de l'environnement de l'entreprise qui peut agir sur ces facteurs. Ce sont les facteurs de risques qui peuvent engendrer des anomalies significatives dans les états financiers.

L'approche par les risques peut se résumer à l'équation suivante :

Risque d'audit = Risque inhérent + Risque lié au contrôle + Risque de non-détection

Le risque inhérent et le risque lié au contrôle sont les risques propres à la société contrôlée alors que le risque de non-détection est le risque propre de l'auditeur. L'auditeur va évaluer les risques propres à l'entité, pour ensuite tenter de limiter le risque de non-détection, en mettant en oeuvre des procédures d'audit sur la base de son évaluation.

Selon la norme 2-301 de la CNCC, le risque inhérent doit être évalué au niveau des comptes pris dans leur ensemble et au niveau de la nature et du montant des opérations traitées. Pour le niveau de risque des comptes pris dans leur ensemble, il doit tenir compte des facteurs influençant la situation économique de l'entreprise, des risques liés à l'organisation générale de la société ou encore de l'attitude de la direction et les pressions exercées sur cette dernière. C'est dans ce cadre qu'il va analyser l'environnement de l'entreprise. Pour les risques liés à la nature et au montant des opérations, il va prendre en considération les opérations inhabituelles, la vulnérabilité des actifs aux pertes ou aux détournements, la complexité de certaines opérations ou encore le degré de jugement pour la détermination des valeurs d'inventaires.

L'évaluation du contrôle interne s'effectue en plusieurs étapes. L'auditeur va prendre une connaissance détaillée du système de contrôle interne, s'il existe, avant d'identifier quels sont les contrôles dont la défaillance induirait une erreur dans les comptes et enfin de tester les contrôles de manière à apprécier leur efficacité.

Cette approche par les risques segmente le risque d'audit et est essentiellement basée sur les flux d'informations. Elle met en avant l'évaluation des contrôles mis en place par l'entreprise qui occupe une place importante dans la détermination du risque d'audit. Cette notion de prédominance des contrôles de l'entreprise dans la détection des risques conduit à considérer un risque maximum pour les entités n'effectuant pas ou peu de contrôles, ce qui peut entraîner l'exécution d'un audit exhaustif des comptes qui parfois est inutile. Le modèle d'approche par les risques mise en place par l'IFAC a pour ambition d'effacer ces quelques limites.

2. Les apports des nouvelles normes de l'IFAC à l'approche par les risques

Avant de présenter les modifications liées à l'adoption des nouvelles normes de l'IFAC, il convient de préciser que ces normes accordent la place centrale à l'approche par les risques pour la réalisation du contrôle légal des comptes.

Aussi, la réforme interdit à l'auditeur de considérer a priori que les risques sont à un niveau maximal et que la direction ne met pas en place de contrôles satisfaisants pour s'affranchir de l'analyse des risques et planifier directement les procédures de vérifications des comptes, et ce, quelles que soient l'activité et l'importance de l'entité contrôlée. L'auditeur devra impérativement identifier, évaluer et donner la priorité aux risques d'anomalies significatives dans les états financiers afin que l'effort le plus important soit axé en priorité sur les secteurs à risques les plus significatifs.

Si les nouvelles normes n'ont pas modifié les objectifs et les caractéristiques de l'approche par les risques, l'auditeur doit avoir une compréhension plus approfondie de l'entreprise, de son environnement et de son contrôle interne, pour pouvoir exécuter sa mission en se conformant au nouveau modèle.

Ce changement de perception est caractérisé par la norme ISA 315 qui est entièrement consacrée à la prise de connaissance de l'entité et de son environnement y compris de son contrôle interne. Cette compréhension porte essentiellement sur les risques identifiés et évalués par l'entité elle-même et les contrôles qu'elle a mis en place pour atteindre ses objectifs. L'auditeur va se concentrer sur les objectifs les plus importants et les plus pertinents pour l'audit et évaluer les risques qui s'y rapportent.

Ce nouveau modèle peut être synthétisé par le schéma suivant :

Compréhension de l'entreprise, de son environnement et de son contrôle interne

Prise en considération du risque de fraude

Liens entre les objectifs de l'entreprise, les risques s'y rapportant et les contrôles mis en place

Identification des risques pertinents pour l'audit

Détermination du plan d'audit

La première étape de la nouvelle démarche est donc la compréhension de l'entité, de ses objectifs, de sa gestion des risques et des contrôles qu'elle met en place pour y faire face. L'auditeur devra utiliser les sources et les moyens indiqués par les normes pour accéder au niveau de compréhension exigée. Il devra notamment obtenir une compréhension des « risques d'entreprise » pertinents pour l'audit des états financiers. De plus, il devra aussi identifier et comprendre les risques découlant de facteurs externes ou internes qui pourraient avoir une incidence négative sur la capacité de l'entreprise à atteindre ses objectifs et à appliquer sa stratégie. En effet, quelle que soit son activité et même si elle ne le formalise pas, une entreprise définit ou se voit imposer des objectifs. Elle va mettre ne oeuvre des stratégies pour les réaliser et établir une stratégie de maîtrise des risques inhérents qui pourraient entraver la réalisation de ses objectifs. Ces stratégies auront des répercussions sur les états financiers et il est important de les comprendre afin de déterminer les risques d'anomalies significatives sur ces états.

La deuxième étape concerne le risque de fraude et la compréhension par l'auditeur des contrôles préventifs et de détection mis en place par la société pour limiter ce risque.

L'auditeur devra, lors de la troisième étape, établir les liens entre les objectifs de l'entité, les risques correspondants et les contrôles qui seront pertinents pour l'audit. Il va exercer un jugement pour déterminer quel risque a un lien avec ses propres objectifs d'audit, parmi tous ceux qui menacent les objectifs de l'entreprise et les contrôles mis en place pour les prévenir.

Ensuite il va identifier et évaluer le lien entre les risques identifiés par l'entité et les risques d'anomalies significatives dans les états financiers. Comme dans l'ancienne approche par les risques, l'auditeur va planifier et réaliser la vérification de manière à ramener le risque d'audit à un niveau suffisamment faible. La limitation du risque d'audit passe toujours par l'évaluation de ses trois composantes mais maintenant l'auditeur doit procéder à une évaluation combinée des risques inhérents et des risques liés aux contrôles. Cette évaluation combinée constitue alors le risque d'anomalie significative. L'auditeur va évaluer tous les risques inhérents afin de savoir si les risques significatifs font l'objet de contrôles et si ces contrôles sont efficaces pour déterminer le risque inhérent résiduel pertinent pour l'audit. Ce risque n'aura pas été identifié par l'entreprise et ne fait donc pas l'objet de contrôle. C'est sur cette catégorie de risques que l'auditeur devra porter toute son attention. Au travers de cette démarche l'auditeur aura évalué le contrôle interne puisqu'il a testé les procédures pour chaque risque inhérent significatif. Il faudra néanmoins compléter cette évaluation du contrôle interne par une évaluation plus globale pour les besoins de l'appréciation de l'auditeur du rapport du président concernant le contrôle interne. L'évaluation combinée des risques inhérents et de contrôles internes est justifiée par le fait que certains risques d'entreprises, comme ceux dus à des circonstances extérieures, peuvent avoir une incidence sur le risque inhérent et sur le risque lié au contrôle. Néanmoins, le commissaire aux comptes peut faire une évaluation séparée des risques inhérents et des risques liés au contrôle interne correspondant à l'approche antérieure.

Enfin, l'auditeur va apporter une réponse globale aux risques évalués en mettant en place le plan d'audit qui permettra d'exécuter des procédures afin de ramener le risque d'audit à un niveau acceptable faible.

Cette approche dynamique est aussi illustrée par le fait que les normes attribuent désormais un caractère itératif à la mission d'audit. La compréhension de l'entité va être un processus continu qui permettra de recueillir, d'actualiser et d'analyser les risques tout au long du déroulement de l'audit. Au cours de la mission, l'auditeur pourra, plus librement qu'auparavant modifier sa stratégie d'audit.

Les nouveautés apportées par l'application des normes internationales ne touchent pas tant à la démarche d'audit par les risques en elle-même mais plutôt à l'esprit de l'ancienne approche par les risques. En centrant la démarche sur les risques d'entreprises, son environnement va y jouer un rôle plus important puisqu'il peut être à l'origine de ces risques. Le commissaire aux comptes va non seulement analyser l'environnement pour mieux comprendre l'entité contrôlée, mais aussi pour évaluer directement des risques pertinents pour l'audit.

C. La place de l'environnement de l'entreprise dans le modèle de l'IFAC

La principale innovation apportée par l'application des nouvelles normes de l'ISA réside dans le fait que l'auditeur, au travers de sa compréhension qu'il aura acquis de l'entité et de son environnement, devra établir des liens entre les objectifs de l'entité et les risques correspondants pour évaluer les risques d'anomalies significatives dans les états financiers. Pour ce faire, il devra comprendre comment l'entreprise gère ses risques avant d'en dégager les risques pertinents pour l'audit. L'analyse de cette démarche permettra d'y situer l'environnement qui est un facteur de risque pour l'entreprise avant d'en dégager les risques pertinents pour l'audit s'y rapportant.

1. Le processus d'identification des risques pertinent pour l'audit

La gestion des risques par l'entreprise est définie en fonction de ses objectifs. Après la compréhension des objectifs par l'auditeur, celui-ci va déterminer les risques pouvant entraîner des anomalies significatives dans les états financiers qui se rapportent à la réalisation de ces objectifs. L'auditeur doit donc comprendre la façon dont l'entreprise gère ses risques afin d'établir les liens entre les objectifs de l'entité et les risques pertinents pour l'audit. Par ailleurs il identifie lui-même d'autres risques pouvant affecter les comptes

Ces nouvelles obligations sont définies dans la norme ISA 315 qui donne les éléments que l'auditeur doit comprendre dans le cadre de la gestion des risques d'entreprise. Il devra tenir compte :

§ Du secteur d'activité, la réglementation du secteur et les autres facteurs externes y compris le référentiel comptable applicable.

§ De la nature de l'entité et ses choix en matière de pratique comptable.

§ Des objectifs, des stratégies et des risques d'entreprises qui en résultent.

§ De la mesure et l'examen des performances financières de l'entreprise.

§ Du contrôle interne de l'entreprise

Nous retrouvons ici plusieurs facteurs en relation avec l'environnement de l'entreprise.

La compréhension du contrôle interne de l'entreprise se fait en même temps que la compréhension de la gestion des risques. En effet, le contrôle interne d'une entreprise est une composante de la gestion des risques d'entreprise et l'auditeur lorsqu'il va étudier l'entreprise et son environnement, étudie à la fois la façon dont l'entreprise gère ses risques et le contrôle interne qu'elle a mis en place pour maîtriser ces risques. L'environnement devient donc une composante directe de l'évaluation du contrôle interne.

La gestion des risques d'entreprise aide l'entreprise à atteindre les objectifs avec efficacité et constitue une prévention contre les pertes. Elle est en liaison avec l'objectif de fournir une information financière fiable qui sert de support décisionnel et celui de la conformité de l'entreprise aux lois et règlements en vigueur puisqu'elle doit éviter à l'entreprise des conséquences qui lui seront préjudiciables. Ces objectifs sont à rapprocher avec les risques dus à l'environnement évoqués dans le premier chapitre de cette partie.

L'identification des objectifs va donc précéder l'identification d'évènements de nature à constituer un risque. L'auditeur va analyser plus particulièrement les objectifs ayant un lien direct avec les objectifs de l'audit et pour lesquels les risques que l'objectif ne soit pas atteint entraîne un risque d'erreur dans les comptes. Selon la norme ISA 315, ces objectifs sont principalement la conformité au cadre règlementaire, la fiabilité de l'information financière ou la mesure et vérification de la performance.

Au travers de sa compréhension de l'entreprise et de son environnement ainsi que de sa gestion des risques l'auditeur va analyser les risques potentiels d'anomalies significatives dans les états financiers. Il devra ensuite établir un lien entre les objectifs de l'entité et les risques correspondants qui peuvent l'intéresser pour son audit.

Tout d'abord l'auditeur appréciera les risques pertinents pour l'audit au niveau de l'entité dans son ensemble qui incluent les risques applicables à toutes les entités, les risques résultant de choix stratégiques fait par la direction et les risques du secteur dans lequel opère l'entité. Au niveau de l'entreprise l'auditeur va plus précisément évaluer les risques relatifs aux objectifs de conformité aux lois et aux règlements, à la fiabilité de l'information financière, à la maîtrise des « affaires » et à la performance financière.

Par ailleurs, compte tenu de l'extension des utilisateurs des états financiers, l'auditeur devra aussi tenir compte des risques pouvant affecter les objectifs d'intérêt général, notamment sur la pertinence des informations qui sont donnée à ces utilisateurs.

Le processus d'identification des risques pertinent pour l'audit liés à l'environnement peut être résumé par le schéma suivant :

Environnement de l'entreprise

Risques d'entreprises

Conformité aux lois et règlements

Information financière fiable

Maîtrise des affaires ou des actions

Performance financière

Risques pertinents pour l'audit

Risques encourus par toutes les entités

Risques résultant des choix stratégiques

Risques résultant du secteur d'activité

La norme ISA 315 impose aussi à l'auditeur de déterminer des risques qui exigent une prise en compte spéciale d'audit. Ce sont des risques dits « significatifs » qui peuvent entraîner des anomalies. L'auditeur va examiner un certain nombre d'éléments, comme la possibilité de fraude, les évolutions de l'environnement ou encore le degré de complexité des opérations pour déterminer si le risque exige une attention particulière.

D'après les nouvelles normes, l'audit des états financiers requiert donc une compréhension plus approfondie de l'entreprise et de son environnement afin d'identifier et d'évaluer les risques qui peuvent entraîner des anomalies significatives dans les états financiers. Les caractéristiques de l'entreprise étant liées à celles de son environnement, il conviendrait de préciser les risques s'y rapportant.

2. Les risques liés à l'environnement pertinents pour l'audit

Comme nous l'avons vu dans le premier chapitre, l'environnement est facteur de risque pour l'entreprise. Il s'agira alors, pour le commissaire aux comptes d'identifier et d'évaluer les risques d'anomalies significatives dans les états financiers liés aux éléments externes de l'entreprise.

Tout d'abord, il est important de cerner les risques liés au secteur d'activité dans lequel opère l'entreprise. Il peut générer des risques spécifiques résultant de la nature des activités ou encore du degré de règlementation. L'auditeur devra obtenir une connaissance appropriée du secteur d'activité afin de déterminer un cadre de référence pour les états financiers. Le secteur d'activité peut être porteur de réglementations qui lui sont propres. Le commissaire aux comptes devra les connaître afin de savoir si elles sont appliquées par l'entreprise.

L'environnement règlementaire est un autre facteur de risque important dont doit tenir compte l'auditeur. Le non respect de certains textes législatifs peut remettre en cause la continuité d'exploitation de l'entreprise. Par exemple, une entreprise ne respectant pas les obligations relatives à une licence d'exploitation devrait cesser son activité. De plus, ce sont les lois ou règlements qui sont pris en compte pour l'élaboration des états financiers. Ils peuvent concerner les modes d'évaluations et de présentations des états financiers ou la façon de comptabiliser certaines opérations. L'auditeur devra aussi comprendre comment l'entreprise a choisi ses pratiques comptables et déterminer si cela est conforme au référentiel comptable applicable au secteur d'activité.

Le non respect de la loi peut être volontaire et conduire à la fraude. Certaines activités sont propices à la fraude. En outre les contraintes imposées par l'environnement à l'entreprise peuvent encourager ces derniers à frauder. Des pressions exercées par les organismes financiers sur les dirigeants ou une augmentation des prélèvements fiscaux peuvent conduire à l'établissement d'états financiers frauduleux. L'auditeur doit apprécier la présence éventuelle d'un ou plusieurs facteurs de risques de fraude.

Les risques liés à la conjoncture économique vont avoir un impact sur les flux financiers de l'entreprise. Ils pourront remettre en cause la continuité de l'exploitation et l'auditeur devra vérifier si l'entreprise en a conscience. Par ailleurs l'environnement économique va créer des pressions importantes sur l'entreprise, qui peuvent inciter les dirigeants à agir sur la mesure des performances en vue d'améliorer faussement les résultats et les états financiers. La connaissance des tendances économiques peut éveiller les soupçons de l'auditeur sur un résultat qui ne serait pas en adéquation avec ces dernières. Le premier chapitre de cette partie a bien montré que l'environnement de l'entreprise pouvait conduire à une gestion des résultats avec la théorie politico-contractuelle de la comptabilité.

Les risques que des anomalies puissent apparaître dans les comptes de l'entité contrôlée peuvent donc aussi bien provenir d'évènements imposés à l'entreprise par les circonstances ou l'environnement que par les choix que peut faire la direction.

Ces risques peuvent concerner toutes les entreprises y compris les plus petites et l'auditeur devra en tenir compte s'il veut rendre plus pertinente son approche. Il apparaît dès lors intéressant d'étudier le degré d'importance de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques.

Chapitre 3 : L'importance de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques

Les deux premiers chapitres ont décrit respectivement la manière dont l'environnement pouvait être facteur de risque pour l'entreprise et ses états financiers et la démarche à laquelle doit se tenir le commissaire aux comptes pour identifier et évaluer les risques d'anomalies significatives dans les états financiers dans le cadre de sa mission d'audit légal. Le dernier chapitre de cette partie théorique va s'attacher à montrer que l'environnement doit occuper une place importante dans l'analyse des risques de l'auditeur externe. Il s'agit de montrer que l'environnement est important d'une part parce qu'il peut avoir une influence sur l'orientation même de l'approche par les risques et d'autre part parce qu'il permet une amélioration de la détection des risques et donc de la qualité de l'audit.

A. L'augmentation de l'importance de l'environnement au niveau règlementaire

Avant de montrer que l'intégration de l'analyse de l'environnement de l'entreprise contribue significativement à la détection des risques d'anomalies dans les états financiers, lacomparaison entre le nouveau et l'ancien système d'approche par les risques nous montrera que l'analyse de l'environnement va y occuper une place plus importante.

1. L'évolution de la place de l'environnement au niveau règlementaire

Les nouvelles normes de l'IFAC précise maintenant clairement que la compréhension de l'environnement de l'entreprise est un aspect essentiel dans l'approche par les risques afin d'assurer au commissaire aux comptes un audit de qualité, qui tient compte de tous les facteurs qui peuvent générer des anomalies dans les états financiers. Dans le référentiel basé sur les normes du code de déontologie, les risques d'entreprise avaient une importance moindre et les commissaires aux comptes devaient accorder une attention plus importante aux risques liés au contrôle interne.

En effet, les anciennes normes d'audit n'imposent pas une revue exhaustive des risques qui peuvent menacer les objectifs de l'entité. Sur cette base, le commissaire aux comptes ne tient compte, en général, de l'environnement de l'entreprise que pour définir les risques généraux de sa mission d'audit. L'identification de ces risques lui permet d'accepter la mission en connaissant les risques principaux auxquels l'entreprise est exposée et ensuite de déterminer l'orientation à donner à cette mission. Les risques liés à l`environnement, qui déterminent la situation économique de l'entreprise, sont compris dans ces risques généraux. Ces risques vont transparaître au niveau des risques liés à la nature et au montant des opérations et des risques liés à la conception et au fonctionnement des systèmes. Bien souvent, comme l'a décrit le rapport annuel du H3C au titre de 2004, les commissaires aux comptes négligent l'impact des risque généraux sur les états financiers9(*) ou ils considèrent ces risques comme maximaux. Ils vont alors exécuter les contrôles sans appréciation des raisons qui motivent les procédures d'audit, ce qui peut parfois diminuer la pertinence de ces contrôles.

Le nouveau modèle d'approche par les risques conduit à une meilleure compréhension des conséquences de l'environnement sur l'entreprise et ces états financiers. L'auditeur doit maintenant appréhender les risques d'entreprises qui peuvent affecter directement les états financiers et faire le lien avec les objectifs de l'entreprise. L'environnement va donc y occuper une place plus importante du fait qu'il peut entraîner des changements d'objectifs et qu'il est également sources de risques pour l'entreprise. D'après la norme ISA 315, le risque pourra résulter de la poursuite même des objectifs de l'entité mais aussi des changements dans son environnement. En outre, c'est au travers de l'identification des risques inhérents induits par l'environnement, que l'auditeur devra évaluer le contrôle interne de l'entité afin de déterminer les risques résiduels d'anomalies significatives dans les états financiers qui sont mal gérés par l'entreprise. L'environnement de l'entité est un facteur de risque inhérent et il provoque des changements au niveau des objectifs pour l'entreprise qui se répercuteront dans les états financiers. L'auditeur se doit de déterminer ces risques afin d'orienter ses procédures d'audit sur les contrôles que l'entreprise a mis en place pour y faire face et qui pourront provoquer des anomalies significatives dans les états financiers.

A la lecture de ces nouvelles normes, il apparaît donc que l'analyse de l'environnement de l'entreprise devra occuper une place plus significative dans l'approche par les risques de l'entreprise.

2. Appréciation de la place de l'environnement au niveau règlementaire

L'analyse de l'évolution de la place de l'environnement dans la réforme des normes du code déontologie, nous a montré que l'environnement de l'entreprise est mieux pris en compte pour l'identification et l'évaluation des risques pertinents pour l'audit. Cette modification trouve son origine dans la réponse à des lacunes de l'ancien système sur la prise en compte de certains risques qui, de par l'évolution de la vie économique, sont maintenant devenue facteurs de risques pour la mission d'audit.

Au regard des risques qui ont été décrits dans le chapitre 1, les normes françaises ne préconisent pas l'analyse de certains risques qui pourraient avoir des conséquences pour la certification des états financiers. Les risques concernant l'évolution du contexte juridique les caractéristiques de l'environnement, les évolutions technologiques, les risques liés aux ressources naturelles ou ceux liés à l'évolution de la situation des parties prenantes ne sont pas pris en compte explicitement en tant que risques qui pourraient avoir une influence pour l'audit. Si pour certains ils sont cités dans les normes en tant que risques généraux pour l'acceptation et la planification de la mission, ils ne prennent pas en compte le fait que ces risques pourraient avoir une influence sur la réalité de l'image fidèle qui est donnée dans les états financiers.

Les risques liés à l'environnement de l'entreprise n'ont pas une influence majeure dans l'approche par les risques des anciennes normes alors qu'elles sont à l'origine de la plupart des risques encourus par l'entreprise et qu'ils conditionnent en partie la gestion de cette dernière.

Ces quelques limites vont être, en partie, comblées par la mise en application des normes de l'IFAC qui, elles, se basent sur les risques d'entreprises pour déterminer l'orientation à donner aux contrôles. Néanmoins cette nouvelle démarche n'est pas encore totalement en adéquation avec les nouvelles attentes des utilisateurs de l'information financière à l'égard de l'audit et n'a pas encore intégré certaines évolution de l'environnement des entreprises qui peuvent améliorer la détection des risques.

B. L'influence de l'analyse de l'environnement sur l'approche par les risques

Il convient de noter qu'une prépondérance de la prise en compte de l'environnement dans l'approche par les risques peut même en modifier certaines caractéristiques. L'environnement peut être vu comme un facteur d'évolution de l'approche par les risques. Cet aspect a été démontré aux travers d'études qui soulignent les conditions de l'environnement qui ont favorisé cette évolution et son degré d'intégration dans la pratique des commissaires aux comptes.

1. Les conditions de l'environnement qui influencent l'approche par les risques

Comme nous l'avons vu lors de la section antérieure, la mise en place d'une approche par les risques selon les nouvelles normes de l'IFAC impose une meilleure compréhension de l'entreprise qui conduit à une analyse plus significative de son environnement. Cette évolution avait été anticipée depuis plusieurs années déjà par certains cabinets d'audit qui avaient plus centré leurs approches par les risques sur l'activité et les objectifs de l'entreprise que sur les systèmes de comptabilisation des flux financiers.

Dès 1997, Bell et al réalisent une étude approfondie sur l'évaluation des risques pertinents pour la mission d'audit. Pour les auteurs l'interconnexion entre les entreprises et leur environnement conduit à développer de nouvelles approches d'audit. Ils vont décrire préalablement les conditions de la modification de l'orientation de l'approche par les risques avant de montrer comment elle est intégrée dans un grand cabinet d'audit. Ils soulignent que l'accélération de la globalisation de l'économie, la multiplication du nombre et de la variété des interdépendances entre les agents économiques font qu'il est primordial pour la réalisation d'un audit financier de tenir compte du fait que l'entreprise n'est pas une entité isolée. L'accroissement de la complexité des interconnexions entre les agents économiques étant dû aux avancées technologiques qui ont marqué la fin du vingtième siècle. En effet, les auteurs considèrent que ces évolutions de la technologie, en réduisant les distances et en permettant la circulation rapide des informations, ont favorisé la mondialisation du marché et aussi l'intensification de la concurrence entre les firmes.

On retrouve dans cette analyse plusieurs variables de l'environnement global qui ont été étudiées dans le premier chapitre. Mais les modifications des attentes des parties prenantes de l'entreprise, qui sont également les utilisateurs de l'information financière, peuvent aussi avoir un impact indirect sur l'approche par les risques des commissaires aux comptes. En effet l'accroissement de l'expectation gap, qui est l'anglicisme désignant le décalage entre les attentes des utilisateurs de l'information financière et la qualité perçue des travaux d'audit, montre que les auditeurs doivent s'adapter à un environnement changeant afin de mieux répondre aux attentes des utilisateurs de l'information financière.

Comme nous l'avons déjà souligné avec la théorie des parties prenantes, l'accroissement de l'influence sociale et économique des entreprises montrent que les états financiers sont établis dans une logique partenariale. Aujourd'hui, l'information financière s'adresse à tous les partenaires de l'entreprise. Dans ce cadre de réflexion, l'auditeur se doit « d'assumer un rôle social de certification des états financiers en offrant aux utilisateurs un service d'assurance que le risque lié à la qualité de l'information est bas »10(*). Les parties prenantes exigent une approche plus prospective de l'audit qui permettrait d'apporter des réponses rapides aux décisions qu'ils doivent prendre en se basant sur les états financiers. Ils attendent principalement de l'auditeur, qu'il puisse certifier le fait que les états financiers leurs permettent de s'assurer tant de la pérennité de l'entreprise que de la performance de la gestion des dirigeants et de l'absence absolue de fraude qui appauvrirait leurs patrimoine. Or, comme viennent l'attester les récentes modifications législatives suite aux scandales financiers, la mission d'audit légal n'est pas toujours adaptée à ces attentes. En effet, le commissaire aux comptes ne va se prononcer que sur la régularité, la sincérité et l'image fidèles des états financiers, sur l'absence de fraude avec une assurance raisonnable et enfin sur la continuité de l'exploitation à court terme. Il n'apporte pas de précision sur le fait que les états financiers permettent de juger de la viabilité et la profitabilité de la société auditée.

Afin d'apporter une réponse pratique aux exigences des parties prenantes ou de l'environnement global des entreprises, certains cabinets d'audit modifient leurs approches par les risques qui se concentreront sur les risques globaux ou stratégiques de l'entreprise.

2. L'environnement comme facteur d'évolution de l'approche par les risques

L'identification et l'évaluation des risques vont conditionner l'orientation et la planification de la mission d'audit, c'est donc sur l'approche par les risques que vont agir en premier lieu les auditeurs afin de faire écho aux attentes de l'environnement.

Cette hypothèse est corroborée par une étude, réalisée en 2003 par S.Thiery-Dubuisson, sur les conditions d'implantations de ce nouveau type d'approche par les risques plus orientée sur l'activité et la stratégie des sociétés auditées. Au travers d'une série d'entretiens réalisés avec les associés des principales firmes d'audit en France, l'auteur indique que l'évolution de l'environnement macroéconomique et de la conjoncture est l'une des causes de ce changement d'orientation de l'approche par les risques au sein de ces cabinets. La majorité des interviewés reconnaissent que « l'évolution de l'environnement, des règlementations et de marché en général est une des conditions de développements d'approches par les risques qui intègrent le risque total du client ». Le risque total porte sur la viabilité et la profitabilité de l'entreprise auditée. Par ailleurs, les résultats de l'étude montrent également que ce type d'approche a pour objectif de s'adapter aux caractéristiques de clients et donne une forme de légitimité à la mission d'audit légal. En effet, elle permet de donner plus d'informations sur la pérennité de l'entreprise auditée en identifiant précisément les risques liés aux activités stratégiques du client. Elle apporte donc une plue value au management de l'entreprise qui pourra se servir de l'audit pour améliorer la gestion des risques de son activité. De plus la prédominance donnée à cette phase d'approche par les risques ainsi que son adaptation aux caractéristiques du client et à son environnement permet aux auditeurs de mieux répondre aux attentes des utilisateurs de l'information financière

Les caractéristiques principales de ce type d'approche par les risques avaient été développées par Bell et al dans l'étude que nous avons déjà citée. Les auteurs attestent qu'une connaissance approfondie de la nature de l'activité du client et des risques qui y sont attachés ainsi que des relations et interactions de l'entreprise avec son environnement sont essentiels pour une évaluation des états financiers. L'entreprise doit être vue comme un système en relation avec d'autres systèmes. L'auditeur doit donc appréhender l'ensemble pour mieux comprendre l'entreprise et les risques qui y sont attachés. Pour eux, il doit focaliser son évaluation des risques sur la dynamique des relations de l'entreprise comme son interaction avec les clients, les fournisseurs, les concurrents, les apporteurs de capitaux ou autres partenaires qui peuvent représenter une menace pour la viabilité de son activité. L'auditeur doit évaluer le risque que les objectifs de l'entreprise ne soient pas atteints à cause de facteurs aussi bien externes, qu'internes. Cette approche lui permettra de porter un meilleur jugement sur la validité des états financiers qui se doivent de refléter l'image fidèle de l'entreprise. Ils pensent que la connaissance qu'aura l'auditeur de l'entreprise et la manière dont ce dernier évalue les risques liés à l'activité du client et à son environnement direct influenceront ses actions et son jugement de façon déterminante.

L'évolution de l'environnement économique ainsi que celle des attentes des utilisateurs de l'information financier ont donc créé les conditions pratiques pour le développement d'un nouveau type d'approche par les risques dans les grands cabinets d'audit. On retrouve dans ce type d'approche, qui se base plus sur la stratégie de l'entreprise, l'importance de l'analyse de l'environnement qui va permettre de détecter les forces et les faiblesses de l'entreprise. Cette prépondérance de l'analyse de l'environnement de l'entreprise peut aussi, dans une approche par les risques de type plus classique, permettre d'améliorer la qualité de la mission d'audit.

C. L'analyse de l'environnement comme facteur d'amélioration de la qualité de la mission d'audit

L'environnement est important dans l'approche par les risques car il est facteur de risque pertinent pour l'audit d'une part, il peut avoir une influence sur l'orientation de l'approche en elle-même d'autre part et enfin une analyse approfondie de cet environnement est susceptible d'améliorer sensiblement la qualité de la mission d'audit légal. L'évaluation de la qualité de l'audit peut être effectuée par la mesure de « l'adaptabilité des travaux d'audit réalisés aux zones de risque de l'entreprise »11(*). Un audit de qualité est donc un audit basé sur la pertinence des travaux d'audit aux zones de risques de l'entreprise. L'approche par les risques qui va orienter les contrôles sur les zones de risques les plus pertinentes pour l'audit va donc conditionner la qualité de l'audit. Des recherches ont montré que l'analyse de approfondie de l'environnement de l'entreprise améliorait sensiblement la détection des risques et qu'elle pouvait être déterminante dans la détection de fraude. Elle peut donc être considérée comme un facteur d'amélioration de la qualité de l'audit car elle permet de détecter des risques plus pertinents pour l'audit voire des cas de fraudes caractérisés.

1. La compréhension de l'environnement comme facteur d'amélioration de la détection des risques

Selon les nouvelles normes de l'IFAC, la connaissance approfondie de l'entreprise et de son environnement, doivent servir de base à un audit financier pour la détection des risques. Cette connaissance va guider l'auditeur dans son évaluation des zones de risques les plus pertinente pour la réalisation de sa mission. La pertinence de ce concept a été démontrée par une étude réalisée en 2003 par Choy et King. Cette étude utilise le System-Mediated Mental model, qui allie la théorie générales des systèmes à celle des modèles mentaux, pour démontrer que dans le cadre d'un environnement complexe et en évolution, une meilleure connaissance de l'entreprise et de ses relations avec son environnement diminue le nombre d'erreurs dans la détection des risques pertinents pour l'audit.

Les chercheurs ont comparé deux approches d'audit par les risques, selon que l'auditeur utilise sa connaissance de l'entreprise et de ses interactions avec l'environnement pour identifier les risques pertinents pour l'audit, comme le préconise Bell et al, ou qu'il utilise une approche plus centrée sur les flux de données enregistrées pour la production des états financiers. De plus, la comparaison a été faîte dans le cadre de deux environnements différents : un environnement stable et un environnement dynamique.

Pour ce faire, ils se sont basés sur une série d'hypothèses générées par le System-Mediated Mental model. Ce modèle inédit a pour but d'apporter une explication sur la manière dont une décision, qui intègre plusieurs éléments, sera prise. Il repose en effet sur la combinaison de la théorie des modèles mentaux de Johnson-Laird et la théorie générale des systèmes de Von Bertalanffy qui souligne l'importance de comprendre les comportements individuels comme une partie intégrante d'un système, en l'occurrence l'environnement. La théorie des modèles mentaux a pour but, elle, d'expliquer le processus de prise de décision d'un individu. Elle pose comme postulat que les individus font des déductions en se construisant des représentations mentales qui sont des représentations internes d'éléments extérieurs à l'individu. Mais lorsque la représentation mentale intègre trop d'évènements complexes, elle va être faussée et induire ainsi des erreurs pour la prise de décision.

Dans le cadre du processus de déduction sur les risques pertinent pour l'audit, l'auditeur va se faire une représentation mentale des multiples éléments nécessaires à la détection des risques pour les états financiers. Etant donnée la complexité de ces éléments qui peuvent être l'entreprise auditée, son environnement, son système de comptabilisation des transaction ou autres données liées à la mission d'audit, il va commettre des erreurs sur les risques pertinents pour la réalisation de cette mission.

Ces erreurs pourront être limitées si l'auditeur analyse l'entreprise comme un système intégré afin de mieux comprendre les risques comme l'ont montré Bell et al dans leur étude. Cette approche, qui amènera à une compréhension globale de l'entreprise et de son environnement, simplifiera la représentation de l'auditeur et favorisera la pertinence de son jugement sur les risques d'anomalies dans les états financiers.

L'étude a placé plusieurs auditeurs dans les contextes précités. Les résultats sont venus corroborer toutes les hypothèses de départ du modèle. Premièrement, elle a montré que les auditeurs faisaient des erreurs systématiques dans la détection des risques lorsqu'ils n'utilisaient pas l'approche d'audit qui intègre l'environnement comme le suppose la théorie des modèles mentaux. Deuxièmement, l'hypothèse selon laquelle, l'exactitude des déductions faîtes par l'auditeur sur les risques est plus élevée lorsqu'il procède à une analyse approfondie de l'entreprise et son environnement, a été vérifiée. Enfin, l'étude a démontré que cette approche est encore plus pertinente dans le cadre d'un environnement complexe qui évolue. En effet les résultats ont prouvé que lorsque les auditeurs utilisent une approche basée sur le système de comptabilisation des transactions et de production des états financiers et non centrée sur l'analyse de l'environnement de l'entreprise, ils commettaient beaucoup plus d'erreurs dans l'identification des risques pertinents pour l'audit lorsqu'ils se retrouvaient en présence d'un environnement complexe et dynamique.

Cette étude a mis en valeur les préconisations de Bell et al ainsi que l'importance pour l'auditeur de mener une analyse complète de l'environnement de l'entreprise qui lui permettra de mieux identifier et d'évaluer les risques d'anomalies significatives dans les états financiers. Les anomalies peuvent être une caractéristique de la fraude qui peut aussi être appréhendée par l'analyse de l'environnement de l'entreprise.

2. L'analyse de l'environnement de l'entreprise comme facteur déterminant dans la détection de la fraude

Les scandales financiers de ces dernières années et les modifications réglementaires qu'ils ont engendrées dans la mission des auditeurs légaux, ont montré la nécessité d'identifier les facteurs de risques qui vont prédisposer les dirigeants de l'entreprise à la fraude. Ces facteurs de risques de fraude sont, ici plus qu'ailleurs, en étroite corrélation avec les contraintes imposées par l'environnement à l'entreprise. Comme nous l'avons vu au premier chapitre, selon la théorie positive de la comptabilité les dirigeants auront tendance à manipuler les données comptables pour satisfaire leurs intérêts personnels ou ceux de l'entreprise, et ce en réponse aux contraintes de l'environnement. C'est pourquoi, il est important pour l'auditeur de comprendre la façon dont l'entreprise interagit avec son environnement, car cela lui permettra d'identifier l'origine des risques de manipulations comptables qui ont pour objet de masquer la fraude.

Le lien entre la détection de la fraude et l'environnement de l'entreprise a été étudié en 2000 par Erickson, Mayhew et Felix. Ces chercheurs ont critiqué la démarche d'audit qui n'a pas permis de détecter la fraude qui a conduit à la faillite de la Lincoln Savings and Loan en 1987. Ils ont utilisé les comptes-rendus d'audition des procès intentés aux cabinets de l'époque, ainsi que leurs feuilles de travail pour démontrer qu'une connaissance approfondie de l'environnement économique, stratégique et industriel aurait permis d'identifier une fraude sur d'importantes transactions immobilières.

En effet, les auteurs cherchent à montrer pourquoi l'audit n'a pas permis de détecter la fraude. Ils ont donc réalisé un audit fictif de la Lincoln Saving and Loan à partir des feuilles de travail des cabinets qui ont été mis en cause pour leur audit et des informations dont pouvaient disposer les auditeurs à l'époque de la réalisation de cet audit.

Ils étudient particulièrement des transactions portant sur la vente fictive de terrains dont le produit a contribué de façon considérable au profit de la banque durant cette période. Selon eux, en comparant les transactions effectuées sur la vente de terrains par la Lincoln Saving and Loan, au niveau général de l'activité économique dans l'état de l'Arizona à l'époque, les auditeurs auraient pu s'apercevoir que la valeur des terrains enregistrés dans les comptes étaient déraisonnables.

De plus s'ils avaient mieux étudié les motivations réelles des acheteurs de ces terrains, il aurait été clair que leurs acquisitions n'avaient pas d'objectif économique légitime pour l'activité de ces derniers.

En outre avec une meilleure compréhension des contraintes réglementaires, les auditeurs aurait dû réaliser que la Lincoln Saving and Loan utilisait ces transactions économiquement irrégulières pour générer des profits qui lui permettraient d'atteindre le capital minimum obligatoire requis par la loi.

Les auteurs démontrent que les auditeurs n'ont pas étudié suffisamment l'activité de la banque et les forces économiques qui influençaient ses opérations. Ils se sont contentés d'examiner strictement la forme des transactions en négligeant leurs aspects économiques. Leurs analyses suggèrent qu'une compréhension approfondie de l'activité de l'entreprise et de son environnement peut amener à des procédures d'audit efficaces qui apportent des preuves fiables de la présence de manipulations comptables constitutives de fraude.

Ici encore, l'analyse de l'environnement de l'entreprise améliore la qualité de l'audit puisqu'elle va orienter les contrôles sur les zones de risques les plus pertinentes pour la détection d'anomalies significatives dans les états financiers.

Cette première partie a montré que l'environnement de l'entreprise a une influence sur son activité et est facteur de risque pour cette dernière. Ces risques vont se répercuter de manière directe ou indirecte dans les états financiers et l'auditeur devra en tenir compte dans son approche. Cette approche par les risques a évolué récemment et a accordé une place plus importante à la compréhension de l'activité de l'entreprise et de son environnement. En outre la prise en compte de l'environnement est un facteur d'amélioration de la qualité de l'audit.

Nous pouvons résumer l'ensemble des facteurs montrant que l'environnement doit occuper une place importante dans la mission d'audit par le schéma suivant :

L'environnement est facteur de risque pour l'entreprise

L'évolution des normes entraîne une meilleure prise en compte de l'environnement

La prise en compte de l'environnement a fait évoluer l'orientation de l'approche par les risques pour certains cabinets d'audit

La prise en compte de l'environnement améliore la qualité de l'audit

L'environnement de l'entreprise doit occuper une place importante

dans l'approche par les risques

Dans le cadre d'un environnement de plus en plus dynamique et complexe et dont les interactions avec l'entreprise se sont accrues ces dernières années, il apparaît donc important d'en intégrer l'analyse de façon substantielle pour l'identification et l'évaluation des risques les plus pertinents pour la mission d'audit légal.

Partie 2 : Etude empirique de l'intégration de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques des Commissaires aux comptes

Le but de ce mémoire est d'essayer de comprendre dans quelle mesure l'intégration de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques, par les commissaires aux comptes, peut rendre plus pertinente cette approche, eu égard aux objectifs de la mission d'audit. Il s'agit d'étudier d'une part la place occupée par l'analyse de l'environnement dans sa mission et d'autre part, à partir de cette étude, d'apprécier la pertinence de cette intégration. L'objectif, étant de savoir si, comme l'a préconisée la première partie de ce mémoire, l'analyse de l'environnement de l'entreprise améliore l'identification et l'évaluation des risques liés à la mission d'audit légal.

Pour ce faire, une étude exploratoire a été réalisée auprès de plusieurs commissaires aux comptes par le moyen d'entretiens semi-directifs. Cette étude a pour but de décrire la vision qu'ils ont de la place de l'environnement de l'entreprise dans la mission d'audit et les apports de l'analyse de l'environnement à leur démarche de détection des risques.

D'une façon très générale, l'étude montre que si les commissaires aux comptes ont conscience de l'importance de l'environnement de l'entreprise et qu'ils l'intègrent dans leurs jugements sur les risques de l'entreprise pertinents pour la mission d'audit, la formalisation de l'analyse de l'environnement peut présenter quelques déficiences. Il paraît donc intéressant d'essayer de proposer un outil qui améliorerait la concrétisation de l'analyse de l'environnement de l'entreprise pour la détection des risques.

Cette deuxième partie va donc, après avoir présenté l'étude réalisée et les résultats obtenus, proposer un outil qui pourrait être utilisé par les commissaires afin de mieux prendre en compte certains risques de l'environnement de l'entreprise dans leurs missions d'audit.

Chapitre 1 : Présentation de la méthodologie et description de l'étude empirique

Ce chapitre va décrire l'étude empirique pour fixer les conditions de l'interprétation des résultats obtenus. Il va tout d'abord présenter la méthodologie qui été employée pour la réalisation de cette étude afin d'en justifier l'utilisation avant ensuite de faire la description précise de l'enquête de terrain qui a été réalisée.

A. Présentation de la méthodologie

L'étude avait pour but de comprendre la démarche utilisée par les commissaires aux comptes afin d'apprécier l'intégration de l'analyse de l'environnement de l'entreprise. La méthodologie employée pour la réalisation de cette étude a été l'entretien semi-directif dont nous ferons la présentation avant d'en justifier l'utilisation.

1. L'entretien semi-directif

Les entretiens servent, en général, à recueillir « des informations spécifiques et de nature qualitatives »12(*). Ils visent d'abord à explorer et à comprendre plutôt qu'à mesurer et à quantifier. Les études menées par entretiens se basent sur des effectifs réduits ne prétendant pas à la représentativité. Les résultats obtenus ne peuvent donc pas être généralisés.

L'entretien semi-directif est une technique souvent employée pour la réalisation d'études exploratoires et peut être classé dans la catégorie des approches non directives des études qualitatives. Cette approche donne lieu à la production d'un discours spontané dont le raisonnement se construit au fur et à mesure de l'entretien et qu'aucune logique extérieure ne vient structurer. Ces entretiens s'inscrivent dans les techniques d'enquêtes de terrain sur les représentations et les pratiques visant d'une part à connaître la conception qu'en ont les acteurs et d'autre part la description des pratiques.

En effet, ils doivent permettre d'améliorer la connaissance d'un champ d'étude dont les thèmes essentiels sont familiers mais qui présente des aspects qui méritent un approfondissement. L'entretien semi-directif va être centré autour de thèmes précis à aborder qui vont être définis dans un guide d'entretien qui sera établi au préalable. A partir d'une consigne de départ ces thèmes doivent être introduits par l'interviewer, si l'interviewé ne les aborde pas spontanément, ou pour les approfondir. Le guide d'entretien ne doit pas être un questionnaire ouvert mais servir de rappel à l'enquêteur pour les thèmes qui lui seront utiles pour son étude et que l'interviewé doit donc impérativement abordé. Le guide d'entretien utilisé pour notre enquête se trouve en annexe de ce mémoire et est articulé autour d'une dizaine de questions se rapportant à trois thèmes principaux. Ils ont été définis d'une part par rapport à la connaissance que nous avions et voulions acquérir du sujet et d'autre part en intégrant des éléments introduits dans la partie théorique.

L'approche semi-directive consiste donc à canaliser le discours des interviewés sur un thème général afin de l'étudier de manière systématique. Elle permet de comprendre avec précision les aspects souhaités d'une démarche pratique tout en restant fidèle à la vision de l'interviewé puisqu'il s'exprime librement. Cette technique d'enquêtes, même si elle ne permettra pas de généraliser les conclusions, procède d'une démarche apte à valider la compréhension d'un phénomène et est donc justifiée dans le cadre d'un travail de recherche exploratoire tel que le nôtre.

2. Justification du choix de la méthode des entretiens semi-directifs

La méthode des entretiens semi-directifs a été employée de par sa pertinence par rapport à l'étude qui devait être réalisée mais aussi parce qu'elle s'appuie sur une approche qui répond aux critères des normes de recherches en science de gestion.

L'objectif de notre étude est de situer avec précision l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques du commissaire aux comptes afin d'en comprendre l'importance et les apports à l'identification des risques d'anomalies dans les états financiers. Il s'agit donc d'approfondir la connaissance que nous pouvions avoir de la démarche de l'auditeur sur les risques en précisant un aspect particulier. En outre, il était important que le discours des auditeurs ne soit pas dirigé puisqu'il devait être analysé dans l'optique d'une appréciation des propos rapportés. Cette brève description des objectifs de l'étude montre qu'ils concordent avec les caractéristiques des entretiens semi-directifs qui viennent d'être évoqués dans la section précédente.

Par ailleurs il faut souligner que nous devions faire face à des contraintes liées au cadre de l'étude qui est celui de l'île de la Réunion. L'enquête de terrain ne pouvant porter que sur des cabinets d'audits locaux, leurs caractéristiques imposaient une étude qui ne pouvait être qu'exploratoire et donc revêtir un caractère exclusivement qualitatif.

Néanmoins, même si ce type d'étude ne permet pas une généralisation des résultats, elle vise à la mise en évidence de phénomènes qui correspondent à une certaine forme de réalité et qui tendent à la limite vers l'administration de la preuve comme s'attachent à le montrer Bares et Caumont dans un article sur le caractère scientifique de la démarche utilisée pour les études basées sur les entretiens. Dans leur article les auteurs aboutissent à la conclusion que la pratique des études qualitatives et notamment des entretiens s'inscrit dans un processus classique de recherche dont la légitimité des résultats n'a pas a être remise en cause du moment que les normes sont respectées.

Les entretiens semi-directifs procèdent donc d'une démarche de recherche reconnue et parfaitement adaptée à la réalisation d'une étude empirique qui a pour objectif de répondre à notre problématique. La compréhension et la validation des résultats passent par la description précise des conditions et du déroulement de cette dernière.

B. Description de l'étude réalisée

Afin d'améliorer l'interprétation des résultats et de montrer que l'enquête de terrain a relevé d'une démarche précise, il est important de bien définir la façon dont cette étude s'est déroulée. Nous préciserons d'abord le cadre de l'étude et les caractéristiques des cabinets d'audit dont font partie les commissaires aux comptes qui ont participé aux entretiens avant de décrire les modalités de réalisation de ces derniers.

1. Cadre de l'étude et cabinets étudiés

Comme nous l'avons précisé en introduction de ce mémoire, les contraintes de notre situation géographique limite le cadre de notre étude aux cabinets d'audits de la Réunion. En effet l'île de la Réunion est un département français ce qui fait d'elle un territoire ultrapériphérique insulaire13(*). Le contexte réunionnais est donc caractérisé par une relation de dépendance à l'égard de la France, une exiguïté du marché intérieur avec moins de 750 000 habitants, des coûts de facteurs de production relativement élevés ou encore de faibles échanges tant avec les pays de la zone Océan Indien qu'avec ceux ayant des relations économiques avec la France. Ces caractéristiques font que la plupart des entreprises réunionnaises sont des petites et moyennes entreprises qui connaissent des situations économiques diversifiées selon les secteurs et qui sont soumises aux particularités conférées par le statut de la Réunion. Il est important aussi de préciser que le contexte culturel et social de l'île n'est pas sans influence sur les comportements des acteurs économiques réunionnais.

Ces variables de l'environnement réunionnais vont conditionnées les caractéristiques des cabinets d'audit locaux qui doivent s'adapter à leur propre marché qui est celui des entreprises. Les cabinets d'audit à la Réunion sont donc de taille plus ou moins réduite au regard de ceux existant dans les grands pays industrialisés qui ont fait l'objet des études évoquées dans la partie théorique de ce mémoire. Le marché de l'audit et du commissariat aux comptes à la Réunion est réparti, pour sa majorité, sur deux cabinets d'audit relativement grand et qui sont composés de plusieurs commissaires aux comptes. Le reste des missions est confié à de petits cabinets regroupant deux ou trois commissaires aux comptes ou à des experts-comptables exerçant également la profession de commissaire aux comptes.

Malgré l'envoi de courriers et de mails ou de communications téléphoniques afin d'exposer notre étude à plusieurs membres de la profession, nous n'avons pu recueillir que cinq entretiens auprès de ces derniers. Le taux de réponse a été de réponse favorable à nos demande a été de 12% et peut être expliqué par la relative spécificité du sujet.

Cet échantillon est donc composé d'un commissaire aux comptes faisant partie de l'un des deux grands cabinet, d'un commissaire aux comptes d'un cabinet moyen qui s'occupe d'entreprises assez importantes, d'un commissaire aux comptes d'un petit cabinet et enfin de deux commissaires aux comptes exerçant principalement la profession d'expert-comptable mais qui interviennent sur des missions d'audit légal de façon ponctuelle. L'échantillon apparaît comme assez hétérogène et les interviewés qui ont répondu à la demande d'entretien l'ont fait dans un même état d'esprit qui, de notre avis, avait trait au sentiment positif de nous apporter leur aide.

2. Les modalités des entretiens

L'étude de terrain a donc consisté à interroger cinq commissaires aux comptes de cabinets d'audit différents situés à la Réunion. Tous les entretiens ont été réalisés dans les bureaux des personnes interrogées et ont eu une durée variable comprise entre une demi-heure et une heure. Le matériel utilisé pour recueillir au mieux les données était composé du guide d'entretien établi préalablement (Annexe I), de quoi écrire pour la prise de notes à mesure que l'interviewé parle et d'un magnétophone pour deux des cinq entretiens.

S'agissant d'un entretien semi-directif, le guide d'entretien se composait d'une question principale qui avait pour but de lancer le discours et de petites questions directives afin d'amener l'interviewé à aborder des thèmes pertinents pour la réponse à notre problématique.

Le thème et les objectifs de l'étude ont été présentés à chaque interlocuteurs avant les entretiens, lors de la demande, afin qu'ils comprennent notre démarche et s'expriment en connaissance de cause.

Lors des entretiens, le ton des discours variait selon les interlocuteurs et la taille du cabinet auquel ils appartenaient. Les commissaires aux comptes des cabinets plus importants s'exprimaient de manière très formelle en faisant souvent référence au caractère strict et confidentiel de leurs démarches alors que ceux des petits cabinets parlaient plus librement en illustrant leurs propos d'exemples.

Comme il a été précisé auparavant, les entretiens semi-directifs ont fait que les commissaires aux comptes ont donné la perception qu'ils ont de leurs démarches. Le plus souvent, ils tenaient des propos d'ordres généraux qui nous ont permis de dégager une impression globale sur le sujet traité.

La description et l'analyse des discours rapportés vont nous apporter un début de réponse à nos interrogations.

Chapitre 2 : Présentation et interprétation des résultats de l'étude

L'objectif principal de l'étude était, à partir d'une vision globale de la place de l'environnement dans l'approche par les risques, d'aboutir à une conception plus précise du rôle réel joué par l'environnement dans la démarche d'audit du commissaire aux comptes. Ce chapitre fera d'abord la synthèse objective des propos récoltés lors des entretiens puis ils seront analyser afin d'en tirer des conclusions en rapport avec la problématique de notre étude.A. Présentation des résultats de l'étude qualitative

Comme remarque préliminaire, il faut bien stipuler que lors de tous les entretiens les commissaires aux comptes nous ont affirmé utiliser systématiquement une approche d'audit par les risques. Néanmoins, certains d'entre eux avouent moins se préoccuper des risques lorsqu'ils s'agit d'auditer des petites entreprises ou là ils se concentrent plus sur les comptes à proprement parlé. Cela peut en partie être expliqué par la formation qu'ont suivie ces derniers. Au cours d'un entretien, un commissaire aux comptes nous a précisé : « Tous les commissaires aux comptes sont tenus à une approche par les risques. Mais il est vrai que ceux qui n'ont pas suivi de formation spécifique à l'audit ou ceux issue de l'expertise comptable s'intéressent moins aux risques et s'attachent plus à la révision exhaustive des comptes pour les sociétés de petites taille». Mais, dans tous les cas, l'environnement de l'entreprise va jouer un rôle sur l'acceptation, l'orientation et la planification de la mission.

Un premier état lieu des résultats des entretiens a donc fait ressortir les différents facteurs de l'environnement de l'entreprise qui sont pris en compte par le commissaire pour la détection et l'évaluation des risques pertinents pour son audit. Leurs propos ont aussi permis de déterminer la place réelle de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans la démarche d'audit par les risques.

1. Les principaux facteurs de l'environnement pris en compte par les commissaires aux comptes

Le rapprochement des différents discours a permis de dégager les principaux facteurs liés à l'environnement dont vont tenir compte les auditeurs afin d'identifier les risques d'anomalies significatives dans les états financiers.

L'aspect de l'environnement auquel les commissaires aux comptes attachent le plus d'importance et le plus couramment cité par ces derniers est le contexte juridique de l'entreprise. Selon eux, la non-conformité aux lois et aux règlements est la principale source de risque tant pour l'entreprise et ses états financiers que pour le commissaire aux comptes lui-même qui peut voir sa responsabilité engagée s'il n'a pas décelé et révélé une mauvaise application de la loi par l'entreprise auditée. Ce propos tenue par l'un des commissaires aux comptes résume assez bien la pensée générale des autres : « Le cadre réglementaire de l'entreprise est primordial pour mener à bien notre mission, nous devons en permanence nous assurer que les dirigeants respectent la réglementation. Il faut impérativement prendre des informations sur les obligations spécifiques de certaines entreprises et connaître la réglementation particulière propre à certains secteurs d'activité ». Il apparaît important pour les commissaires aux comptes de vérifier que l'entreprise respecte les textes législatifs qui peuvent avoir des incidences sur l'activité de cette dernière, sa façon d'établir les états financiers ou encore remettre en cause la continuité de son exploitation. Au cours des entretiens, ils ont également insisté sur l'actualisation des connaissances au niveau des règlements juridiques. La veille réglementaire concerne les deux niveaux de réglementations que sont la réglementation générale à toutes les entreprises et la réglementation particulière au secteur d'activité.

La connaissance des règles juridiques particulières de certains secteurs d'activité va précéder la compréhension par le commissaire aux comptes du secteur d'activité en lui-même. C'est là, l'autre aspect significatif de l'environnement auquel les auditeurs interrogés vont s'intéresser et qui va représenter un élément fondamental de l'évaluation des risques de l'entreprise. Les éléments du secteur d'activité relatif au marché de l'activité, à l'environnement et à la position concurrentielle, aux contraintes générées par la conduite de l'activité, aux pratiques comptables particulières de certains secteurs ou encore au degré d'homogénéité du secteur sont ceux cités le plus souvent dans le discours des commissaires aux comptes. Par ailleurs ils soulignent unanimement « l'importance d'avoir déjà des connaissances préalables sur le secteur d'activité ». Avant d'accepter la mission ils vont consulter les publications relatives aux secteurs d'activités concernés et autres documents concernant l'entreprise, s'entretenir avec les dirigeants ou le personnel de la société ou encore s'appuyer sur l'expérience personnelle qu'ils ont pu avoir du secteur d'activité. Cette prise d'information sera ensuite complétée tout au long de la mission avec d'autres options possibles comme la visite des locaux et des sites de production ou le recours à des experts. Néanmoins les personnes interrogées ont toujours évoqué ce dernier cas en tant qu'option et avouent ne l'avoir jamais utilisé.

Le degré d'influence des apporteurs de capitaux et de complexité de la structure des entreprises a aussi été cité à plusieurs reprises comme un risque possible qui pourrait remettre en cause la validité des états financiers. Trois des cinq commissaires aux comptes interrogés étudient la structure financière et la répartition des capital des entreprises qu'ils auditent dans le but de connaître la nature des relations entre les associés et les dirigeants. Nous retrouvons ici la notion de risque relevant des parties prenantes de l'entité contrôlée.

Les interviewés ont insisté aussi sur le fait que ces informations sur l'environnement de l'entreprise doivent être connues des collaborateurs du commissaires aux comptes. Cela afin d'améliorer la qualité des contrôles qu'ils auront ensuite à effectuer.

Nous pouvons remarquer que ces facteurs principalement cités par les commissaires aux comptes, sont aussi ceux qui représentent le risque le plus important pour l'activité de l'entreprise14(*). Par ailleurs, ils tiennent autant de l'environnement général avec le cadre légal que de l'environnement particulier avec l'analyse du secteur d'activité qui détermine l'environnement concurrentiel ou les conditions de marché. Cela est justifié, pour les commissaires aux comptes car ces éléments, vont leurs permettre de mieux appréhender la nature de l'entité avant qu'ils s'en servent pour l'identification des risques.

L'approche des commissaires aux comptes au niveau de la description de l'environnement de l'entreprise peut être résumée par le schéma suivant :

Nature de l'entreprise

Opérations, Structure, Etats Financiers

Environnement réglementaire

Facteurs du secteur d'activité

-Marché

-Environnement concurrentiel

-Compétitivité

-Pratiques spécifiques

Relations avec les tiers

Clients, Fournisseurs, Associés, Partenaires financiers

La compréhension du secteur d'activité et de l'environnement réglementaire permet aux commissaires aux comptes de mieux appréhender la nature de l'entreprise et ses relations avec les tiers, les opérations qu'elle enregistre, le solde de ses comptes et les informations susceptibles d'être données dans les états financiers. Cela lui permettra, ensuite, de donner une meilleure orientation à ses contrôles.

Outre ces aspects de l'environnement qui étaient cités prioritairement par chaque commissaire aux comptes interrogés, ils ont également évoqué d'autres facteurs de l'environnement qui pouvaient avoir une influence sur l'orientation de leurs contrôles.

La conjoncture économique a été un facteur de risque récurrent dans leurs discours. Si certains reconnaissent que les variations des tendances économiques peuvent les amener à se poser des questions dans certaines parties des états financiers, ils s'accordent tous sur le fait que le contexte économique auquel est confrontée l'entreprise est, encore une fois, essentiel pour apprécier de sa continuité d'exploitation. Les commissaires aux comptes ont souvent fait référence spontanément à cette partie de la mission d'audit légal lorsque nous les interrogions sur l'impact de l'environnement sur cette mission. Nous avons pu constater qu'ils y accordaient beaucoup d'importance et que la majorité des risques qui pouvaient remettre en cause cette continuité d'exploitation était liés à l'environnement d'après les propos des commissaires interrogés.

Cette analyse vient être corroborée par le fait que les commissaires aux comptes nous disent s'intéresser plus particulièrement à des facteurs comme l'environnement réglementaire, la compétitivité ou encore l'influence de certains acteurs extérieurs à l'entreprise, non seulement parce qu'ils pourraient entraîner des anomalies dans les comptes mais aussi et surtout parce qu'ils sont susceptibles de remettre en cause la continuité d'exploitation.

En effet, à côté de l'environnement purement économique, la retranscription des propos fait apparaître que l'environnement technologique pouvait aussi représenter un risque pour la continuité d'exploitation de par les conséquences des évolutions technologiques sur les activités des entreprises. D'après l'un des interviewés : « Il nous faut nous tenir au courant des avancées au niveau des techniques de production utilisées par les entreprises, car une entreprise qui ne s'est pas adaptée aux évolutions technologiques peut voir l'avenir de son activité menacée ».

L'environnement technologique peut aussi avoir un impact direct sur la validité des états financiers par le biais de la comptabilisation des immobilisations. La connaissance des technologies employées permettra aux commissaires aux comptes de mieux apprécier la pertinence du montant de certains amortissements ou provisions enregistrées dans les comptes en estiment plus pertinemment la dépréciation des immobilisations.

Il faut aussi noter que les commissaires aux comptes n'accordent pas tous la même importance à ces éléments. Sur les 5 personnes interrogées, la place accordée est différente selon les éléments évoqués. Par exemple, l'environnement technologique ou la structure de la société n'a été évoqué que par 3 d'entre eux et ils ne s'y intéressaient pas tous de la même façon. Pour certains d'entre eux la structure juridique peut apporter des informations sur l'influence et les motivations des associés alors que d'autres s'y sont intéressés juste pour vérifier la conformité par rapport à d'éventuelles spécificités réglementaire.

Sans pouvoir être pleinement exhaustif sur le contenu des propos qui nous ont été rapportés, nous pouvons constater que les facteurs de l'environnement auxquels s'intéressent principalement les commissaires aux comptes interrogés rejoignent ceux évoqués dans la partie théorique de ce mémoire pour la détection des risques significatifs dans le déroulement de la mission d'audit. Il s'agit donc maintenant de nous intéresser à l'influence de l'environnement perçu par les commissaires aux comptes.

2. La place occupée par l'analyse de l'environnement dans la mission d'audit

Après la détermination des principales variables de l'environnement qui intéressent les commissaires aux comptes, les entretiens avaient pour objectif de situer précisément la place occupée par leurs analyses dans l'orientation qu'ils vont donner à leurs contrôles. Nous voulions savoir dans quelle mesure ils s'appuient sur l'analyse de l'environnement pour planifier leurs contrôles.

Lorsqu'ils abordaient ce thème, les commissaires aux comptes précisaient à chaque fois que l'analyse des facteurs liés à l'environnement de l'entreprise intervenaient lors des phases d'acceptation , d'orientation et de planification de la mission d'audit afin de se conformer aux normes d'exercices professionnelles de la CNCC. En effet, ils vont analyser l'environnement de l'entreprise d'abord pour mieux la connaître et ensuite pour identifier et évaluer certains risques. Même si le processus de prise de connaissance est continu et cumulatif, ils admettent que, sans évolution notable, l'environnement a moins d'importance au cours du reste de la mission.

La majorité des interviewés font une évaluation séparée du contrôle interne tout en utilisant certaines informations de l'environnement pour conforter leur appréciation. Mais ces informations ne servent pas à alléger l'évaluation du contrôle interne. Par contre, ils utilisent beaucoup les informations liées à l'environnement pour les missions connexes à l'audit des comptes comme la révélations des faits délictueux ou encore l'appréciation de la continuité d'exploitation.

Pour la plupart des commissaires aux comptes interrogés, l'analyse des facteurs de l'environnement s'insère dans l'évaluation du risque inhérent de l'audit qui va servir à la définition du plan de mission. Elle leur permet d'établir le cadre de référence pour l'audit de certaines parties des états financiers au travers de la détermination des seuils de signification et de l'appréciation de la retranscription de l'image fidèle dans les états financiers. Les informations venant de l'environnement vont aussi permettre de déceler les incohérences de certains renseignements donnés par les dirigeants. Pour reprendre le discours d'un des commissaires au comptes : « les éléments venant de l'extérieur de l'entreprise représentent une source d'information très fiable, ce sont des éléments plus probants que les informations qui peuvent nous être donné au sein de l'entreprise ». Toutefois, les auditeurs consultés ont le plus souvent évoqué la réunion d'information avec les dirigeants dans l'optique de mieux comprendre le degré d'exposition aux risques liés à l'environnement de l'entreprise auditée.

L'aspect le plus pertinent des propos des commissaires aux comptes interviewés réside dans le fait qu'ils reconnaissent que l'environnement peut se révéler déterminant dans l'identification des risques à condition que la prise d'informations soit faite de manière probante. Elle doit se faire dans le cadre d'une approche globale de l'entreprise qui, de par la connaissance approfondie de cette dernière et de son environnement qu'elle engendrerait, améliorait la pertinence des contrôles. Cela va nécessiter la mise en oeuvre de moyens pour l'analyse de l'environnement surtout au niveau de la recherche et de la mobilisation d'informations.

En effet l'un des commissaires aux comptes nous dit « qu'il faut être curieux de tout ». En pratique, ils disent qu'il faut s'adonner à la lecture des revues, rechercher les services de documentation les plus pertinents, aller sur le terrain pour affiner ses connaissances sur certains points particuliers, réviser tous les critères chaque année et pour chaque renouvellement de mandat ou encore s'entourer de collaborateurs se spécialisant dans la surveillance d'aspects précis de l'environnement. Tout cela ne devant pas se faire au détriment des autres aspects de la mission d'audit légal.

Cette maîtrise des informations sur l'environnement exige donc la mobilisation d'importantes ressources, notamment en terme de temps ou de qualification, de la part des cabinets d'audit. C'est pourquoi, bien souvent, les commissaires aux comptes s'appuient sur leurs expériences et les connaissances sur les facteurs de l'environnement qu'ils ont pu acquérir lors de leurs différentes missions. Ainsi, un des commissaires aux comptes déclare : « Il nous faut développer un sens critique qui permet de voir plus loin que les comptes ou les données et se fier parfois à son instinct pour identifier certains risques ».

Pour les commissaires aux comptes interrogés, l'environnement apparaît plus comme un cadre de référence qui leur permettrait de se poser des questions sur certaines parties des états financiers lors des contrôles qu'ils vont effectuer. S'il peut orienter directement certains contrôles, son influence va avoir une portée plus globale au niveau du jugement du commissaire aux comptes sur les comptes.

Tous les commissaires aux comptes semblent donc conscients du rôle que doit jouer l'analyse de l'environnement, mais il semble n'exercer qu'une influence modérée dans l'orientation qui va être donnée aux contrôles. L'interprétation plus détaillée de cette description succincte de la place occupée par l'analyse de l'environnement de l'entreprise peut apporter des éléments de réponse permettant d'apprécier de son influence sur le jugement concernant la validité des états financiers.

B. Interprétation des résultats de l'étude qualitative

La retranscription du discours des commissaires aux comptes a montré qu'ils prenaient en compte des éléments de l'environnement afin d'identifier et d'évaluer certains risques qui seraient susceptibles d'entraîner des anomalies significatives dans les états financiers. Cette intégration des facteurs de l'environnement se fait conformément au cadre imposé par les normes d'exercices professionnelles du code de déontologie de la CNCC mais n'est pas déterminante dans la prise de décision sur les contrôles à effectuer pour les commissaires aux comptes interrogés.

1. Une analyse de l'environnement figée dans le cadre normatif

Il apparaît clairement à la lecture de la description donnée par les commissaires aux comptes de l'insertion de l'analyse de l'environnement qu'ils se conforment scrupuleusement à la démarche préconisée par les normes concernant la connaissance de l'entreprise.

En effet, tant au niveau des éléments pris en compte pour l'analyse qu'au niveau de l'importance réservée à cette analyse dans l'approche par les risques, la plupart des commissaires aux comptes de l'étude se contentent de faire en sorte de respecter l'application des normes sans réelle étude approfondie des risques liés à ces éléments. Il est vrai que l'application des normes avec minutie apporte déjà beaucoup d'éléments sur la compréhension des actions de l'environnement sur l'entreprise. Mais, ce qui ressort du discours des commissaires aux comptes, c'est que bien souvent, même s'ils en tiennent en compte, ils ne mettent pas en oeuvre les moyens pour parvenir à un résultat qui améliorait sensiblement l'identification et l'évaluation des risques liés à la mission d'audit.

Ces lacunes au niveau de l'analyse de l'environnement aboutissent à la description d'éléments dont les effets notoires sur la mission ne sont pas précisés. Cela peut être en partie expliqué par le relatif degré de simplicité de l'environnement des entreprises locales dû à leur taille plus ou moins petite.

Cet aspect de l'analyse peut être illustré par la récurrence de la référence faîte à la remise en cause de la continuité d'exploitation liée à des facteurs de l'environnement. Le déclenchement de la procédure d'alerte par le commissaire aux comptes lorsqu'il relève un fait de nature à compromettre la continuité d'exploitation fait partie des interventions prévues par la loi dont le non respect va engager la responsabilité de ce dernier. Devant le respect de cette obligation légale, le commissaire aux comptes sera plus enclin à tenir compte de tous les éléments ayant trait à la continuité d'exploitation. D'où une meilleure analyse des effets de l'environnement de l'entreprise puisque ce dernier apportant beaucoup de contraintes qui seraient susceptibles d'affecter la continuité de l'exploitation. Le rapport de cause à effet entre l'environnement et la remise en cause de la continuité d'exploitation étant ici mieux caractérisé par la loi que celui pouvant exister entre l'environnement et les anomalies dans les états financiers.

Nous pouvons constater que les commissaires aux comptes vont rester enfermés dans le cadre légal qui leur est imposé sans chercher à améliorer la pertinence de leur approche par les risques par une meilleure prise en compte de l'environnement de l'entreprise. Pour résumer nos propos, si le commissaire aux comptes n'est pas tenu par une obligation légale ou normative, il va attacher moins d'importance à d'éventuels risques liés à l'environnement de l'entreprise. Toutefois, ces propos sont à nuancer, dans la mesure où la mise en application prochaine du nouveau référentiel normatif de l'IFAC obligera à une meilleure prise en compte des éléments de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques, par le biais de l'appréciation des risques d'entreprises et de l'évaluation combinée des risques inhérents et des risques liés aux contrôles. L'environnement de l'entreprise sera pris en compte pour l'évaluation des deux principales composantes du risque d'audit.

A ce stade de l'analyse, il convient de mettre en évidence quelques limites relatives à la réalisation de notre étude. Tout d'abord, la description des objectifs de l'étude ayant été présentée lors de la demande d'entretien, les commissaires aux comptes qui ont bien voulu nous répondre apparaissent, de notre point vue, comme les plus consciencieux. C'est peut être parce qu'ils étaient plus ou moins sûr de la façon dont ils intégraient l'environnement de l'entreprise dans leurs approches par les risques qu'ils ont accepté l'entretien. D'autres part, les lacunes évoquées pour la mise en oeuvre de moyens pour l'analyse de l'environnement peuvent résulter de la taille relativement réduite des cabinets locaux et ne sont donc pas généralisables à tous les cabinets d'audit.

Cette caractéristique liée aux manques de moyens va conduire les commissaires aux comptes à une intégration plus subjective de l'analyse de l'environnement pour apprécier les risques d'anomalies dans les états financiers.

2. Le caractère subjectif et informel de l'intégration de l'analyse de l'environnement dans l'identification des risques

Malgré la conformité stricte au cadre normatif, chaque commissaire aux comptes a sa propre vision de l'analyse de l'environnement. L'importance des facteurs liés à l'environnement va varier selon les commissaires aux comptes, ainsi que, par suite, le degré de prise en compte dans sa démarche d'approche par les risques.

Si les éléments de l'environnement sont plus ou moins les mêmes pour tous les commissaires aux comptes du fait de leur définition dans les normes, ils ont un impact et donc une place différente pour chacun d'entre eux. Comme nous l'avons vu dans la partie descriptive, certains vont se référer à l'environnement plus pour apprécier la continuité d'exploitation, alors que d'autres vont y attacher plus d'importance pour la détection des risques d'anomalies dans les états financiers.

Cela peut, de notre avis, être expliqué par la taille des cabinets d'audits et les moyens qui y sont attachés ainsi que par la formation des commissaires aux comptes comme décrit en début de section. En effet, l'impact de l'analyse des éléments de l'environnement sur l'entreprise et les états financiers va varier selon les moyens mis en oeuvre par les commissaires aux comptes pour cette analyse. D'où une importance différente accordée à l'environnement selon les cabinets. Certains commissaires aux comptes vont analyser les facteurs de l'environnement de façon très succincte, juste pour se conformer aux normes, alors que d'autres vont faire une analyse plus approfondie afin de mieux comprendre les interactions avec l'entreprise et les risques qu'il va générer concernant la validité des états financiers. Ce deuxième type d'approche rejoint plus la place dévouée à l'environnement évoquée dans la partie théorique. Dans ce cas, il semblerait qu'il conditionne une partie des risques généraux de l'audit pour les commissaires aux comptes qui s'y tiennent. Ce caractère subjectif de l'intégration de l'analyse de l'environnement est à rapprocher avec le degré de sensibilisation des commissaires aux comptes à la détection des risques et leurs influences sur la mission d'audit.

Cette subjectivité relève, peut être, parfois, de l'absence de formalisme pour l'analyse de l'environnement. En effet, comme nous le montre certains propos, bien souvent les commissaires aux comptes vont intégrer les facteurs de risques dus à l'environnement de manière informelle. Ils vont se forger une représentation de l'environnement par le biais de leurs connaissances personnelles de l'entreprise et de son secteur d'activité ou de l'environnement juridique et économique générale qui va leur permettrent de mettre en évidence certains points importants qui pourraient être facteur de risque pour l'entreprise. Mails, la plupart d'entre eux avouent ne pas formaliser explicitement une analyse approfondie de l'environnement dans leurs dossiers de travail. Ce n'est que lorsqu'ils voient qu'il est vraiment susceptible d'avoir un problème qu'ils vont justifier les contrôles par un élément de l'environnement.

Cela peut être expliqué par le caractère insulaire de la Réunion. L'étroitesse de l'île et son faible degré d'ouverture à l'internationale peut permettre de mieux appréhender l'environnement des entreprises. Cependant, certains commissaires aux comptes ont évoqué le caractère spécifique de certains aspects de l'environnement réunionnais qui pourraient représenter d'importants risques pour la mission d'audit. La fragilité du marché réunionnais, l'environnement concurrentiel particuliers de certains secteurs d'activités, le fort degré de dépendance à l'égard de la France métropolitaine ou encore certains phénomènes sociaux ou climatiques propres à la Réunion sont des facteurs de risques spécifiques dont ont parlé trois des commissaires aux comptes de notre étude.

Par ailleurs nous pouvons constater un certain écart entre les pratiques des commissaires aux comptes interrogés et celles des cabinets évoquées par les études qui ont été décrites en première partie de ce mémoire. Encore une fois, nous pouvons évoquer la différence de taille entre les cabinets locaux et ceux pour lesquels l'analyse de l'environnement de l'entreprise a un impact plus important sur la mission d'audit.

L'étude fait donc ressortir quelques facteurs qui peuvent être à l'origine de la faible influence de l'environnement de l'entreprise dans l'identification des risques que synthétise le schéma suivant :

Formation des

CAC

Rigidité dans le respect des normes

Subjectivité dans l'analyse de l'environnement

Manque de formalisme pour l'analyse de l'environnement

Lacunes au niveau de la mise en oeuvre de moyens pour analyser les risques

Faible influence des risques liés à l'environnement de l'entreprise dans

les risques pertinents pour l'audit

L'analyse de l'environnement de l'entreprise apparaît donc comme plus ou moins importante suivant les commissaires aux comptes interrogés. Majoritairement, nous pouvons constater qu'ils en tiennent compte dans la réalisation de leurs missions mais que la corrélation entre les facteurs de l'environnement et les risques d'anomalies n'apparaît pas toujours comme évidente. Plutôt qu'une analyse précise, ils vont plus utiliser leurs jugements personnels pour identifier les risques relatifs à l'environnement de l'entreprise. L'environnement ne va avoir qu'une influence minime dans l'identification des risques pertinents pour l'audit au regard des risques qu'il fait encourir à l'entreprise. L'analyse de l'environnement, telle qu'elle est faîte actuellement, n'apporte qu'une faible plus-value à l'analyse des risques.

Ce type d'approche devra être modifié avec la mise en application prochaine du nouveau référentiel de l'IFAC qui apporte une meilleure prise en compte des risques liés à l'environnement de l'entreprise. Au regard des quelques faiblesses révélées par cette étude exploratoire, il apparaît donc judicieux de proposer un outil qui permettrait à la fois d'intégrer les modifications engendrées par la mise en application prochaine des normes de l'IFAC et d'améliorer l'identification des risques dus à l'environnement de l'entreprise pour la mission d'audit.

Chapitre 3 : Proposition d'un outil pour une meilleure identification des risques liés à l'environnement de l'entreprise

Dans le dernier chapitre de ce mémoire, nous voudrions donc synthétiser notre travail en proposant un outil qui permettrait de mieux identifier des risques liés à l'environnement de l'entreprise. Il permettrait également d'anticiper la mise en application des normes de l'IFAC.

Cet outil prendrait la forme d'un simple questionnaire qui viserait à mettre en évidence certains risques qui ont été évoqués dans ce mémoire et qui, à notre avis, ne sont pas assez pris en compte par les commissaires aux comptes dans leurs approches. Nous précisons que ce questionnaire n'a pas vocation à être exhaustif pour l'identification des risques de l'environnement et n'est qu'une prémisse à l'élaboration d'une véritable méthodologie d'analyse des risques. De plus, il ne s'agit que d'une proposition qui n'a été validé par aucun test empirique.

Avant de présenter le questionnaire qui pourra être repris en tant que feuille de travail, nous exposerons les éléments qui ont été pris en compte pour son élaboration ainsi que la démarche à suivre pour l'employer efficacement.

A. Facteurs pris en compte et démarche à suivre

Cette partie vise à introduire la présentation du questionnaire. Elle va décrire brièvement les facteurs de risques qui ont été pris en compte pou élaborer le questionnaire ainsi que la démarche à suivre pour une utilisation pertinente de ce dernier.

1. Facteurs de risques pris en compte pour l'élaboration du modèle

L'objectif qui a guidé l'élaboration du questionnaire était la prise en compte des risques liés à l'environnement de l'entreprise qui seraient susceptibles d'affecter la mission de certification des états financiers. En réponse à l'étude réalisée qui a montré que les risques liés au secteur d'activité et à la conformité au cadre légal étaient plus ou moins bien pris en compte, nous avons voulu centré notre questionnaire sur les risques de l'environnement qui affecteraient indirectement les états financiers par le biais de leurs effets sur l'activité de l'entreprise.

Les facteurs de risques qui ont servis à l'élaboration du questionnaire sont donc ceux relatifs :

Ø Aux caractéristiques de l'environnement

Ø A l'environnement économique 

Ø A l'environnement technologique

Ø A l'environnement social

Ø Aux parties prenantes de l'entreprise

Les questions qui seront posées viseront à établir un lien avec les objectifs de l'entreprise afin de comprendre comment ces risques seront pris en compte par cette dernière.

2. Démarche à suivre pour intégrer efficacement le questionnaire dans l'approche par les risques

Le questionnaire ne se suffisant pas à lui-même, il devra être intégrer efficacement dans la mission d'audit. Pour ce faire, il est important de suivre une démarche bien définie qu'illustre le schéma suivant :

Questionnaire sur les risques liés à l'environnement

Estimation sur la probabilité d'affecter les objectifs de l'entreprise pertinents pour l'audit

Identification et évaluation des contrôles relatifs à ces risques

Elaboration des procédures d'audits sur les états financiers

Réunion avec dirigeants

Veille documentaire

Connaissances personnelles

Collecte d'informations sur les parties prenantes

Compréhension de l'entreprise et de son environnement

Afin de se conformer au nouveau modèle d'approche par les risques, le commissaire aux comptes devra répondre à ces questions lors de la phase de compréhension de l'entité.

Il va compléter le questionnaire en recherchant à identifier les risques potentiels en mettant en oeuvre plusieurs moyens comme ses connaissances personnelles, des réunions avec les dirigeants, la collecte d'informations sur l'environnement général par le biais de veille documentaire ou sur les parties prenantes en les identifiant avec précision. Il va ensuite évaluer la probabilité que ces risques viennent affecter les objectifs de l'entreprise pertinents pour l'audit.

Il devra ensuite s'informer sur la manière dont l'entreprise va gérer ces risques, si elle les gère, afin ensuite d'évaluer les contrôles qu'elle a mis en place pour y faire face et de mettre en places les procédures d'audit adéquates pour vérifier qu'ils ne remettent pas en cause son jugement sur la certification de l'entreprise.

B. Présentation et portée du questionnaire

Le questionnaire a été élaboré pour essayer d'identifier certains risques relatifs à l'environnement, dont ne tiennent pas forcément compte les commissaires aux comptes mais qui sont susceptibles d'avoir une influence non négligeable sur l'entreprise et sur la mission de certification de l'image fidèle.

1. Le questionnaire

Nous présentons les questions suivies de l'explication qui pourraient amener les commissaires aux comptes à identifier certains risques.

Ø Questions portant sur les caractéristiques de l'environnement de l'entreprise

§ Quel est le degré de complexité de l'environnement de l'entreprise ? (Le nombre de facteurs composant l'environnement accentue le nombre de contraintes et donc les risques)

§ Quelles sont l'importance et la nature des relations de l'entreprise avec son environnement ? (Plus les échanges seront nombreux et variés et plus ils seront difficilement enregistrables par l'entreprise)

Ø Questions portant sur les risques relatifs à l'environnement économique

§ Quelles sont les dernières évolutions de l'environnement économique général du secteur géographique de l'entreprise ? (Les grandes tendances économiques vont permettre d'évaluer les perspectives de long terme pour l'entreprise et savoir si elle a conscience des risques éventuels)

§ Quelle est la situation du marché sur lequel opère l'entreprise ? (La situation du marché doit permettre de savoir si l'entreprise a anticipé correctement des changements qui pourraient l'affecter à court terme)

§ Quel est le niveau de concurrence de ce marché ? (Il s'agit de comprendre l'influence des concurrents sur l'entreprise afin d'étudier les menaces et les réponses apportés par l'entreprise)

§ Combien d'entreprise dépose leurs bilans dans ce secteur d'activité ? (Savoir si la situation de l'entreprise est conforme avec le niveau d'activité du secteur)

§ L'activité de l'entreprise est-elle vulnérable au contexte international ? (Etudier la sensibilité de l'entreprise aux risques du contexte internationale et comprendre comment ces risques vont l'affecter)

§ Quel est le taux de chômage dans le secteur d'activité de l'entreprise ? (Comparer le taux d'emploi de l'entreprise à celui de son secteur d'activité pour détecter d'éventuelles anomalies dans les rémunérations des salariés)

Ø Questions portant sur les risques relatifs à l'environnement technologique

§ Quelles sont les technologies en vigueur qui pourraient être employé par l'entreprise ? (Etudier le degré d'avancé technologique de l'entreprise et sa conformité avec celui de son secteur d'activité afin d'analyser le risque que l'entreprise soit dépassée en matière d'équipements)

§ Les nouvelles techniques de production ont-elles été bien intégrées par les entreprises du même secteur ? (Anticiper les éventuelles difficultés de l'entreprise à intégrer une avancée technologique)

§ Quel est le degré d'investissement dans les nouvelles technologies des entreprises du même secteur ? (Etudier l'adéquation en matière de dépenses de recherches et développements entre l'entreprise et son secteur d'activité)

Ø Questions portant sur les risques de l'environnement social

§ Existe-t-il suffisamment de personnels qualifiés et compétents dans le secteur d'activité de l'entreprise ? (Etudier le risque que l'entreprise ait des difficultés à trouver des ressources humaines et assurer sa pérennité)

§ Quel est le degré d'importance des syndicats dans le secteur d'activité ? (Anticiper les risques liés à des mouvements de grèves massifs qui pourraient entraîner une cessation temporaire d'activité)

Ø Questions portant sur les risques relatifs aux parties prenantes

§ Quelle est la répartition du capital de la société ? (Etudier l'influence que pourraient avoir certains apporteurs de capitaux sur la gestion de l'entreprise)

§ Quelles sont les caractéristiques des apporteurs de capitaux ? (Etudier le degré d'implication des apporteurs de capitaux dans l'entreprise)

§ Quelle est la nature des relations entre les apporteurs de capitaux ? (Anticiper sur le risque d'éventuels désaccord entre les apporteurs de capitaux sur l'entreprise)

§ Quels genres de relations l'entreprise entretient-elle avec sa banque ? (Etudier les risques que la banque vienne perturber la gestion de l'entreprise)

§ Quelle est la situation économique des clients et des fournisseurs ? (Anticiper le risque de rupture de relations commerciales qui pourraient affecter l'entreprise)

§ Quel est le degré d'influence des collectivités locales sur l'entreprise ? (Etudier le risque que les changements qui interviendraient dans ces organismes viennent affecter l'activité de l'entreprise)

2. Portée du questionnaire

Ce questionnaire n'a ni l'ambition, ni la vocation à être exhaustif sur les risques relatifs à l'environnement qui pourraient être pertinent pour la mission d'audit. Il doit juste amener le commissaire aux comptes à réfléchir à la probabilité d'occurrences de certains évènements qui entraîneraient des risques d'anomalies dans les états financiers.

Nous avons voulu mettre en évidence certains risques qui, au regard de notre étude, ne présentent pas beaucoup d'intérêt pour les commissaires aux comptes alors que ce sont des éléments pouvant avoir une incidence significative sur la représentation de l'entreprise qui va être donnée dans les états financiers.

Il serait intéressant, à la suite d'un autre travail de recherche, de proposer un véritable outil qui faciliterait le passage de l'analyse de l'environnement à l'analyse des risques et à l'évaluation du risque inhérent et qui aurait vocation à être intégré à la démarche d'un cabinet d'audit. Le présent travail n'ayant pour but, rappelons le, que de mettre en évidence certaines limites de l'analyse actuelle qui est faite de l'environnement de l'entreprise.

Conclusion

La notion de risque environnemental pour l'entreprise existe et elle doit être prise en compte dans l'approche par les risques qui est utilisée par les commissaires aux comptes dans leur mission d'audit légal. Les risques d'origines externes à l'entreprise représentent une part non négligeable des « risques d'entreprise » qui sont maintenant à la base du nouveau modèle d'audit par les risques préconisé par les nouvelles normes de l'IFAC qui entreront en application prochainement en France.

La mise en application de ce nouveau référentiel conduira les commissaires aux comptes à modifier leur approche qui a tendance à négliger l'impact des risques relatifs à l'environnement de l'entreprise sur les états financiers.

Le travail effectué montre en effet que si l'environnement est appréhendé de façon plus ou moins importante, les risques qui en découlent ne sont pas forcément pris en compte pour la planification de l'audit. Cela est dû, en partie à des lacunes au niveau de la mise en oeuvre pratique pour l'analyse de l'environnement, ce qui entraîne une perte d'efficacité pour l'identification et l'évaluation des risques pertinents pour l'audit.

Nous pensons donc, qu'au regard de la plus value que pourrait apporter une analyse approfondie de l'environnement de l'entreprise à la mission d'audit, il faudrait amener les commissaires aux comptes à l'intégrer avec une plus grande pertinence dans leur approche par les risques.

Il convient de préciser que notre étude de terrain n'a porté que sur un faible échantillon de commissaires aux comptes et qui plus est évoluant dans un environnement générateur de spécificités comme celui de la Réunion. Il ne faudrait donc pas tenter de généraliser les comportements évoqués à l'ensemble de la profession.

La réalisation de cette étude ouvre néanmoins quelques perspectives de recherche eu égard aux résultats obtenus. Premièrement, il serait intéressant d'affiner l'étude des moyens qui sont utilisés pour matérialiser cette analyse de l'environnement afin de mieux déterminer la corrélation entre l'identification des risques et de leurs conséquences réels sur l'orientation des contrôles.

Par ailleurs, nous avons pu constater au cours de notre étude des références faites à certains risques spécifiques à la Réunion. Une deuxième perspective de recherche intéressante serait d'essayer d'établir l'existence d'un risque environnemental propre aux territoires ultrapériphériques insulaires comme la Réunion pour l'audition des états financiers.

De plus, l'étude exploratoire réalisée n'ayant pour vocation que de poser le problème, il serait indispensable de se confronter directement au terrain de la réalisation de missions d'audit afin de rendre plus concrets nos propos et d'étayer ainsi notre analyse.

Outre ces considérations, nous avons voulu dans ce mémoire, au travers d'une démarche généraliste, faire le lien entre deux notions, que sont l'entreprise et son environnement, qui de notre avis ne peuvent être dissociées pour toute analyse de gestion.

Bibliographie

Ouvrages

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CALME, I., HAMELIN, J., LAFONTAINE, J-P., DUCROUX, S., et GERBAUD, F., (2003), « Introduction à la Gestion », Dunod

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Articles

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CHEMANGUI Makram, (2004), « La problématique de mesure de la qualité d'audit », Article de recherche de AUDENCIA, Université de Nantes

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COLASSE Bernard, (2005), « Comptabilité et euphémisme », Article d'actualité de recherche du CREFIGE, ( www.crefige.dauphine.fr/recherche/actualité)

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ERICKSON, M., MAYHEW, B., et FELIX, W., (2000) « Why do audits fail? Evidence from Lincoln Savings and Loan », Journal of Accounting Research, Vol 38

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STOLOWY Hervé et BRETON Gaetan, (2003), « La gestion des données comptables : une revue de la littérature », Comptabilité-Contrôle-Audit / Tome 9 - Volume 1 - Mai 2003

THIERY-DUBUISON Stéphanie, (2003), « Approche par les risques: les auditeurs peuvent-ils innover? » Comptabilité - Contrôle - Audit / Numéro special - Mai 2003

Textes Officiels

Handbook of International Auditing, Assurance and Ethics Pronouncement de l'International Federation of Accountants, (2005)

DIRECTIVE 2006/43/CE du parlement européen, (2006)

Normes d'audit du référentiel normatif et déontologique de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes

ANNEXE I

Guide d'entretien

Présentation du sujet

Place de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques du Commissaire aux comptes.

Comment l'environnement de l'entreprise est-il considéré dans la conduction d'un audit ?

Le CAC s'intéresse t-il à la façon dont les facteurs liés à l'environnement vont affecter l'entité et les états financiers ? Leurs analyse apporte t-elle un plus à l'audit ?

I- L'orientation et la planification de la mission d'audit

1-Quels sont les éléments qu'un CAC de la Réunion prend en compte pour planifier sa mission ?

2-Une approche par les risques est-elle employée ?

3-Quelles sont les interrogations du CAC sur la situation de l'entreprise à auditée ?

II- La place de l'environnement de l'entreprise auditée dans la mission

4-Le CAC tient-il compte de facteurs extérieurs à l'entreprise pour appréhender l'ampleur de sa mission ?

5-Y-a-t-il une analyse du secteur d'activité, des relations avec les tiers, de la sensibilité de l'entreprise à la conjoncture, des dispositions particulières éventuellement appliquée à l'entreprise ?

III- L'intégration de l'environnement dans l'analyse des risques

6- Quels sont les moyens utilisés par le CAC pour appréhender l'environnement de l'entreprise ?

7- Les facteurs de risques liés à l'environnement de l'entreprise influence t-ils l'orientation de l'évaluation du contrôle interne ?

8- Le commissaire aux comptes évalue t-il séparément les risques inhérents et les risques liés aux contrôle interne ?

9- L'analyse de l'environnement améliore t-elle l'identification des risques pour un commissaire aux comptes, a-t-elle une influence sur son opinion sur les comptes ?

Table des matières

Introduction 1

PARTIE I : L'aspect théorique de la prise en compte de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques 6

Chapitre 1 : Influence de l'environnement sur les risques de l'entreprise 6

A. Définition des caractéristiques de l'environnement d'une entreprise 6

1. Le Macroenvironnement 7

2. Le Microenvironnement 8

B. Influence de l'environnement pour l'entreprise 10

1. Influence sur l'activité de l'entreprise 10

2. Influence de l'environnement sur les états financiers 11

C. L'environnement comme facteur de risques pour l'entreprise 14

1. Facteurs de risques pour l'activité de l'entreprise 14

2. Facteurs de risque pour les états financiers 16

Chapitre 2 : L'approche par les risques dans la mission d'audit légal 18

A. Le contexte de l'approche par les risques 19

1. Le cadre légal 19

2. L'objectif de limitation du risque d'audit 20

B. Le modèle d'approche par les risques 21

1. L'approche par les risques dans le modèle français 21

2. Les apports des nouvelles normes de l'IFAC à l'approche par les risques 23

C. La place de l'environnement de l'entreprise dans le modèle de l'IFAC 26

1. Le processus d'identification des risques pertinent pour l'audit 26

2. Les risques liés à l'environnement pertinents pour l'audit 29

Chapitre 3 : L'importance de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques 30

A. L'augmentation de l'importance de l'environnement au niveau règlementaire 31

1. L'évolution de la place de l'environnement au niveau règlementaire 31

2. Appréciation de la place de l'environnement au niveau règlementaire 32

B. L'influence de l'analyse de l'environnement sur l'approche par les risques 33

1. Les conditions de l'environnement qui influencent l'approche par les risques 33

2. L'environnement comme facteur d'évolution de l'approche par les risques 35

C. L'analyse de l'environnement comme facteur d'amélioration de la qualité de la mission d'audit 36

1. La compréhension de l'environnement comme facteur d'amélioration de la détection des risques 37

2. L'analyse de l'environnement de l'entreprise comme facteur déterminant dans la détection de la fraude 39

Partie 2 : Etude empirique de l'intégration de l'analyse de l'environnement de l'entreprise dans l'approche par les risques des CAC 42

Chapitre 1 : Présentation de la méthodologie et description de l'étude empirique 43

A. Présentation de la méthodologie 43

1. L'entretien semi-directif 43

2. Justification du choix de la méthode des entretiens semi-directifs 44

B. Description de l'étude réalisée 45

1. Cadre de l'étude et cabinets étudiés 45

2. Les modalités des entretiens 46

Chapitre 2 : Présentation et interprétation des résultats de l'étude 47

A. Présentation des résultats de l'étude qualitative 48

1. Les principaux facteurs de l'environnement pris en compte par les commissaires aux comptes 48

2. La place occupée par l'analyse de l'environnement dans la mission d'audit 52

B. Interprétation des résultats de l'étude qualitative 54

1. Une analyse de l'environnement figée dans le cadre normatif 55

2. Le caractère subjectif et informel de l'intégration de l'analyse de l'environnement dans l'identification des risques 56

Chapitre 3 : Proposition d'un outil pour une meilleure identification des risques liés à l'environnement de l'entreprise 59

A. Facteurs pris en compte et démarche à suivre 60

1. Facteurs de risques pris en compte pour l'élaboration du modèle 60

2. Démarche à suivre pour intégrer efficacement le questionnaire dans l'approche par les risques 60

B. Présentation et portée du questionnaire 61

1. Le questionnaire 62

2. Portée du questionnaire 64

Conclusion 65

Bibliographie 67

ANNEXE I 69

* 1 Frontier.S, Les écosystèmes, « Que sais-je ? », PUF

* 2 Lexique Sciences de gestion, Dalloz

* 3 Calmé et al, « Introduction à la Gestion », Dunod

* 4 A.S Damak, « La théorie des parties prenantes :théorie empirique ou normative », CREFIGE

* 5 J-C Beaufils, « Comprendre l'entreprise », Ed Vuibert

* 6 J.Richard, « Etats de synthèse du plan comptable », Encyclopédie de Sciences de Gestion

* 7 J-F.Casta, « La comptabilité et ses utilisateurs », Encyclopédie de Sciences de Gestion

* 8 P.Lorino, «Méthodes et pratiques de la performance »,Editions Organisations

* 9 Rapport annuel du H3C au titre de 2004, titre III, Contrôles périodiques, www.justice.gouv.fr/h3c/rapph3C.pdf

* 10 D.Carassus et N.Gardes, « Audit légal et gouvernance d'entreprise », Conférence internationale de l'enseignement et de la recherche en comptabilité, IAE de Bordeaux

* 11 M.Chemangui, « La problématique de mesure de la qualité de l'audit », Article de recherche de AUDENCIA Nantes

* 12 D. Caumont, « Les études de marché », Dunod

* 13 Boyer et al, « Environnement institutionnel et compétitif des entreprises réunionnaises », Etude ECER, IAE de la Réunion

* 14 Partie I, Chap 3 de ce mémoire






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