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De la réparation du préjudice écologique en droit positif rwandais

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par Tite NIYIBIZI
Université libre de Kigali - Licence 2007
  

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III.2. Les mécanismes de socialisation du risque écologique

Il s'agira tout d'abord d'apprécier l'assurance de la responsabilité civile pour atteinte à l'environnement avant d'examiner ensuite les vertus du fonds de garantie pour l'indemnisation des victimes du dommage écologique.

III.2.1. L'assurance de la responsabilité civile pour atteinte à l'environnement

Une réflexion sur la réparation des dommages environnementaux serait nécessairement incomplète si elle ne se préoccupait pas des mécanismes destinés à garantir l'effectivité d'une telle réparation. C'est donc tout naturellement qu'elle conduit à évoquer le rôle de l'assurance.166(*)

En cas de dommages graves, l'indemnisation effective des victimes dépend de la solvabilité de l'industrie responsable. Or la meilleure garantie de cette solvabilité est la souscription d'une assurance de responsabilité couvrant les dommages causés par la pollution.167(*)

Le coût financier d'un dommage résultant d'une atteinte à l'environnement peut être considérable. Il n'est dès lors pas rare, pour ne pas dire systématique que le patrimoine de celui qui se trouve à l'origine de ce type de dommage s'avère insuffisant pour permettre une indemnisation satisfaisante des victimes de pareille atteinte. Il en va d'autant plus ainsi lorsque la faute ayant causé le dommage est imputable à un particulier ou à une entreprise de taille réduite, dont la capacité financière est limitée. Par la mutualisation des risques qu'il organise, l'assureur se présente en effet, a priori, comme l'intervenant économique ainsi désigné pour assumer le risque d'insolvabilité des auteurs d'une atteinte à l'environnement.168(*)

En effet, comme tout risque, la pollution ou l'atteinte au milieu naturel peut faire l'objet d'une assurance au titre de la responsabilité civile.

Mais la spécificité du dommage écologique et les coûts éventuellement indéterminés des réparations pour des préjudices se révèlent parfois longtemps après les faits. Ce qui a conduit certains assureurs à proposer sur le marché des contrats particuliers pour les atteintes à l'environnement. L'assurabilité du risque environnemental rencontre ainsi trois types d'obstacles :

· Le premier est celle d'ordre juridique, lorsque l'aléa fait défaut ;

· Un deuxième d'ordre actuariel, car le risque exige d'être calculable et mutualisable ;

· Le troisième est d'ordre économique, la prime devant être financièrement supportable par l'assuré.169(*)

III.2.1.1. La spécificité du risque «dommage à l'environnement»

Il est vrai qu'en matière d'environnement, nombreux sont les éléments qui incitent les compagnies à faire preuve de prudence. Qu'il s'agisse des manques des données statistiques, de l'importance du coût de règlement des sinistres ou de la difficulté de maîtriser l'aléa dont dépend l'indemnisation, l'on ne compte en effet pas le nombre de raisons parfaitement légitimes qu'ont les assureurs de manifester une certaine méfiance au regard de la couverture du risque environnemental.170(*)

Le mode de fonctionnement de l'assurance de responsabilité est indissociable des règles qui gouvernent la responsabilité civile et sur lesquelles elle vient se greffer. Si la responsabilité n'est pas établie l'assureur n'est naturellement pas tenu de prester sa garantie.171(*) Les problèmes d'imputabilité et de causalité ne sont dès lors guère aisés à surmonter, le dommage écologique apparaissant le plus généralement comme résultante d'une accumulation de pollutions diverses.

Ces différents obstacles que soulève la spécificité du dommage écologique, et en particulier celui constitué par l'évaluation de sa réparation amène généralement les assureurs à considérer que ce risque de dommage est inassurable.172(*)

L'évaluation du risque en terme d'assurance, est très difficile aussi bien de la part de l'industriel que de la compagnie d'assurance.173(*) Le risque de la responsabilité liée à une atteinte à l'environnement peut être couvert en Belgique par deux types de police d'assurance. Il s'agit d'une part, des polices spécifiques à ce risque particulier et dans le cadre desquelles la garantie responsabilité civile exploitation vise généralement le risque de pollution.174(*)

Il faut donc espérer que les expériences menées aux États-Unis et en Espagne pour tenter de qualifier le coût d'atteinte à la biodiversité constitueront des exemples capables de convaincre l'ensemble des assureurs de l'assurabilité des ces risques nouveaux, surtout le risque environnemental.175(*)

1°. La couverture du risque pollution par les polices générales de responsabilité civile

La prise en compte du risque pollution est récente, elle n'a pas accompagné le développement de la législation sur les installations classées. Jusqu'en 1960, la plupart des polices de responsabilités civiles, les chefs d'entreprise ne faisant aucune allusion aux dommages de pollution, seuls étaient parfois couverts les sinistres de pollution des eaux et de l'air d'origine accidentelle au sein « d'événement soudain, imprévu et extérieur à la victime et à la chose endommagée». 176(*) A partir des années 1970, les assureurs introduisent une clause d'exclusion des dommages causés aux eaux et à l'air qui fut élargie en 1974 aux diverses formes d'atteinte à l'environnement, tels que le bruit, les odeurs, les vibrations, les radiations, rayonnements ou modifications de température.177(*)

Aussi les atteintes à l'environnement ne pouvaient être couvertes que par un avenant spécial au contrat responsabilité. Désormais, il s'agit d'une garantie annexe qualifiée de «pollution accidentelle». La mise en oeuvre de la garantie implique un fait générateur soudain, la soudaineté, étant comprise comme un événement fortuit et imprévisible.178(*)

Afin de préserver le caractère aléatoire de leurs contrats, les assureurs précisent généralement que la garantie particulière relative aux atteintes à l'environnement n'est acquise que si les dommages sont les conséquences d'un accident.179(*)

Les atteintes à l'environnement doivent en effet être consécutives à des faits fortuits qui se produisent dans l'enceinte des sites de l'assuré. C'est donc l'origine fortuite du fait générateur du dommage qui conditionne la garantie du sinistre. L'atteinte doit être de nature accidentelle (soudaine, imprévue) ou non accidentelle, c'est à dire graduelle (lente, répétée, progressive). Sont donc hors de la garantie les faits de pollution chronique, qui sont les plus imprévisibles et les plus coûteuse.180(*) Quant à l'étendue de la garantie sont exclus les dommages suivants:

1. Les dommages résultant de l'inobservation des textes légaux 

Il agit d'exclure les atteintes à l'environnement qui résulteraient du nom respect de la réglementation applicable au risque assuré. Celle-ci est précisément mentionnée aux conditions particulières afin d'éviter une formation par trop générale de l'exclusion. C'est par exemple le fait de ne pas faire l'étude d'impact environnemental alors qu'il est recommandé par la loi.

2. Les dommages résultant de mauvais état et du défaut d'entretiens des installations

Ici encore, il s'agit de mettre l'assuré en face de sa responsabilité en attirant son attention sur son devoir de prévention des risques et la nécessité du caractère aléatoire de l'assurance. Le fait que l'assureur ait procédé à un contrôle technique du risque à la souscription ne dispense pas pour autant l'assuré de veiller à l'état de ses installations. Dès lors, s'il est établi un mauvais état, une insuffisance ou un entretien défectueux des installations et si cette situation était connue ou ne pouvait être ignorée de l'assuré, les dommages qui résultent sont exclus de la garantie.

3. Dommages résultant de l'activité normale de l'entreprise 

Cette exclusion s'inscrit également dans le cadre du caractère aléatoire du contrat d'assurance et de la fortuité de l'événement. Il s'agit notamment des dommages résultant d'atteintes à l'environnement autorisées ou tolérées par les autorités administratives pour l'exploitation de l'établissement de l'assuré. Ces dommages résultent de l'activité normale de l'entreprise. Il n'y a pas d'aléa.

4. Le dommage écologique pur 

On sait qu'il s'agit du milieu naturel lui-même, en tant que tel, sont exclus les dommages subis par les éléments naturels tels que l'air, l'eau, le sol, la faune, la flore dont l'usage est commun à tous, ainsi que les préjudices d'ordre esthétique ou d'agrément qui s'y rattachent.181(*) Il s'agit de composant physique et biologique de la nature n'ayant pas de propriétaire (eau, air, faune et flore sauvage) ainsi que toutes les parties du territoire avec leurs composants naturels accessibles à tous. D'une part en effet, l'assurance de responsabilité n'a vocation à s'appliquer qu'en cas d'atteintes à des biens appropriés. D'autre part, même dans le cas d'appropriation (le sol appartenant toujours à une personne physique ou morale, publique ou privée), la végétation naturelle qui y est enracinée est exclue de la garantie dès lors que l'usage de cette propriété est ouvert à tous.

La nature et l'étendue des dommages, leur durée, l'efficacité et le coût des moyens à mettre en oeuvre pour les réparer, font qu'ils échappent à toute évaluation économique fiable, à toute approche statistique de telle sorte qu'il apparaît que la restauration du milieu relève plus de la collectivité tout entière à qui il appartient d'apporter des solutions de prévention et de réparation appropriée, en cas de dégradation ou de pollution de l'environnement, généralement due d'ailleurs au développement des activités humaines dans leur ensemble bien plus qu'à un opérateur isolé, au moins dans le domaine terrestre.

D'après Michel PRIEUR, quels que soient les progrès du droit des assurances en matière d'environnement pour appréhender avec plus d'exactitude la variété des faits générateurs, les dommages pouvant être garantis restent limités aux dommages corporels, matériels et patrimoniaux. Sont donc exclus et non compensés les dommages purement écologiques frappant les milieux naturels, la faune sauvage et tous les éléments d'environnement non appropriés (res nullius, res communis).182(*)

5. Le dommage résultant de la faute intentionnelle

Parmi les exclusions classiques on rappellera enfin que figure celle de la faute intentionnelle de l'assuré, ce qui concerne la pollution fautive délibérée provoquée avec la volonté de causer le dommage, cas rare en pratique. Néanmoins, en droit des assurances sont bien garanties les conséquences dommageables d'atteintes à l'environnement causées intentionnellement par des préposés de l'assuré, l'assureur étant « garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable ...quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes.»183(*)

2°. La couverture des risques pollution par des polices spéciales

Les polices spécifiques au risque environnemental sont évidemment celles qui offrent la garantie la plus large et la plus adéquate. De manière générale, les polices couvrent en effet non seulement les dommages causés aux tiers par une atteinte à l'environnement émanant d'un site couvert, mais aussi les frais d'assainissement d'un site couvert suite à une atteinte à l'environnement émanant d'un tel site.184(*)

Cette assurance fut le premier modèle proposé par ASSURPOL. Il comprend une garantie principale couvrant la dette de la réparation de l'assuré -exploitant pour les dommages environnementaux causés à des tiers, et une garantie annexe (pour 20% de la garantie principale) pour des travaux de prévention destinés à éviter les dommages, source de responsabilité civile.185(*)

Cette assurance responsabilité civile environnementale est proposée pour diverses activités. La garantie couvre des faits de pollution survenus soit dans l'enceinte de l'entreprise, soit à l'occasion de travaux effectués sur un site appartenant à un tiers (contrat«chantier»), soit à l'occasion d'études et des travaux de dépollution réalisés chez des tiers (contrat«études et travaux»). Ce contrat d'assurance répond ou garantit à la fois la réparation et la prévention.186(*)

1° La réparation

La réparation contenue dans la garantie principale joue en faveur des tiers, victimes des dommages corporels (atteinte à leur santé), de dommage matériel (détérioration ou destruction d'un bien) les dommages doivent résultent d'une atteinte à l'environnement «émission, dispersion ou rejet ou dépôt de toute substance solide, liquide ou gazeuse diffuse par l'atmosphère, le sol ou les eaux». Elle recouvre aussi les nuisances. C'est-à-dire «la production d'odeurs, de bruits, de vibrations, de variations de température, d'ondes de radiations, de rayonnement excédant la mesure des obligations ordinaires de voisinage».

Il paraît clairement que ce contrat n'a pas pour objet de garantir la pollution historique, c'est à dire les conséquences résiduelles d'une activité antérieure, qu'il s'agisse tant des dommages déjà réalisés que des dommages à venir par exemple, sols de sites industriels sur lesquels se sont accumulés au fil des ans des résidus d'exploitation et qui ont infiltré le sous-sol, menaçant la nappe phréatique.)187(*)

2° La prévention

Le contrat comporte aussi une garantie annexe dite «frais d'opérations préventives.» Il s'agit des frais engagés pour188(*) :

§ Neutraliser, isoler, ou éliminer une menace réelle et imminente, des dommages (aux tiers) garantis.

§ Eviter l'aggravation, réelle et imminente, des dommages (aux tiers) garantis.

Il ne s'agit pas d'indemniser des tiers pour les dommages réalisés, mais de rembourser à l'assuré les frais qu'il a engagés en vue de prévenir (frais de prévention) ou de contenir (frais de protection) la réalisation imminente ou déjà amorcée de dommages.

La mise en jeu de cette double garantie est rigoureusement subordonnée189(*) à :

§ La menace, réelle et imminente, d'atteintes à l'environnement dans des conditions telles que si rien n'est entrepris leur survenance est quasi certaine.

§ La survenance d'atteintes à l'environnement dont l'extension est à craindre si des mesures ne sont pas prises immédiatement

Ceux-ci étant, toute l'originalité de ce contrat réside dans une garantie annexe couvrant des travaux de prévention pour des frais engagés par l'assuré pour contenir ou atténuer les effets dommageables pour les tiers des atteintes à l'environnement. La menace du dommage doit cependant être réelle et le dommage doit être «imminent». En d'autres termes, les coûts des travaux de prévention ne sont assurés que s'ils permettent de prévenir la survenance de dommage ou d'éviter l'aggravation d'un sinistre susceptible de mettre en jeu la garantie responsabilité civile.190(*)

Dans la pratique, l'on constate en effet que seules les entreprises de taille importante ou qui présentent un risque significatif d'atteinte à l'environnement souscrivent de telles polices.191(*)

Comme on l'a déjà souligné la responsabilité environnementale vise à faire en sorte qu'une personne ayant occasionné des dommages soit tenue à la réparation de ces derniers. Une telle responsabilité ne sera efficace que si le pollueur est identifié, si les préjudices sont réels et quantifiables et si un lien de causalité entre ceux-ci et le pollueur peut être démontré. Il ressort en tout cas de cette analyse que le droit de la responsabilité civile ne parvient pas à assumer à lui tout seul la fonction indemnitaire et préventive du principe pollueur payeur, car la victime court toujours le risque que le responsable ne soit pas identifié ou soit insolvable.

C'est en dehors de ce champ restrictif du droit que les solutions doivent être trouvées. Depuis longtemps les pouvoirs publics et les entreprises à risque se tournent vers des mécanismes alternatifs, tels ceux d'indemnisation collective qui garantissent un dédommagement automatique. La notion de responsabilité est précisément absente de ces fonds d'indemnisation. C'est en fait de la solidarité et non de la responsabilité qu'il s'agit.192(*) L'assureur interviendra lorsque toutes les conditions de la responsabilité seront réunies. Compte tenu des caractéristiques du dommage écologique, il faut envisager le fonds d'indemnisation pour victimes d'une atteinte à l'environnement.

* 166 TOURNEAU, Ph., Op. cit, p.455.

* 167 LAMBERT-FAIVRE, V., Op. cit, p.795.

* 168 Ibidem.

* 169 VINEY, G. et DUBUISON, B., Op.cit, p. 484.

* 170 Idem, p.506.

* 171 Idem, p.508.

* 172 Idem, p.506.

* 173 PRIEUR, M., éd, Op. cit, p.1074.

* 174 VINEY, G et DUBUISSON, B., Op. cit, p.506.

* 175 Idem, p.510.

* 176 PRIEUR, M., éd., Op. cit, p.1075.

* 177 Ibidem.

* 178 Ibidem.

* 179 VINEY, G et DUBUISSON, B., Op. cit, p.518.

* 180 CHAUMET, F., Op. cit, p.192.

* 181 CHAUMET, F., Op. cit, p.192.

* 182 PRIEUR, M., éd., Op. cit, p.1080.

* 183 Art. 113 du code des assurances français cité par : CHAUMET, F., Op. cit, p.195.

* 184VINEY, G et DUBUISSON, B., Op. cit, p.504.

* 185VINEY, G et DUBUISON, Op. cit, p. 487.

* 186 Ibidem.

* 187 CHAUMET, F., Op. cit, p.191.

* 188 CHAUMET, F., Op. cit, p.191.

* 189 Ibidem.

* 190 VINEY, G et DUBUISON, Op. cit, p.488.

* 191 Ibidem.

* 192 DE SADELEER, N., Op.cit, p.103.

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