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L'intégration des pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) dans l'économie mondiale par les APE (Accords de partenariat économique): leurre imposé ou ambition réaliste pour le développement ?

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par Stéphanie de Halleux
Université Libre de Bruxelles - D.E.S. en Coopération au développement 2008
  

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IV.2. LES ETUDES D'IMPACT SUR LA LIBERALISATION COMMERCIALE

Dans la présente partie, il est important d'exposer les différents impacts des APE qui ont été mis en avant dans les études réalisées par des experts indépendants, des centres de recherche et des organisations de la société civile. Comme l'explique effectivement l'ECDPM, depuis que la Commission européenne a proposé de remplacer les préférences commerciales unilatérales par des zones de libre-échange avec les États ACP, les effets probables de l'ouverture des échanges, ont « toujours

173 LIPCHITZ, A., op.cit., p. 15.

174 Id., p. 13.

175 Depuis 2001, les PMA peuvent bénéficier de l'initiative « Tout sauf les armes » selon laquelle tous les produits couverts par cette initiative exceptés les armes, peuvent entrer sur le marché communautaire en franchise de douane et libres de tout contingentement.

176 LIPCHITZ, A., op.cit., p. 4.

177 D'après Jean-Claude Lefort, deux raisons majeures expliquent le fait que les droits de douane constituent une source de revenu importante pour les États africains. La première raison est que les droits de douane constituent les seuls instruments de politique agricole et industrielle à la disposition de pays pauvres, qui ne disposent que de faibles ressources pour investir dans ces secteurs clés et sont donc contraints de se contenter de les protéger. La seconde raison avancée par l'auteur est que, « compte tenu de leur situation économique et sociale, caractérisée par un nombre élevé de familles d'agriculteurs, dont la seule perspective est d'assurer leur autosubsistance alimentaire, et par la taille considérable du secteur informel, les taxes à l'importation représentent un optimum fiscal et budgétaire pour ces pays ». Voir : LEFORT, J-C., op.cit., p. 128.

178LIPCHITZ, A., op.cit., p. 15.

été un des principaux sujets de discorde179 ». Une rapide présentation des impacts des APE s'avère dès lors utile dans la mesure où elle rend compte des inquiétudes qu'un tel projet (les APE) a suscité tant au niveau de la société civile qu'au niveau des États ACP. Par ailleurs, la nécessité d'énumérer succinctement les impacts des APE se justifie par l'importance qu'ont revêtu les études d'impacts en tant qu'outil d'aide à la décision pour les négociateurs180 des pays ACP. Ainsi, comme le précise la Commission économique pour l'Afrique de l'ONU dans son étude d'impacts des APE sur l'Afrique, « la présente étude (...) aspire à jouer un rôle capital en tant que pièce maîtresse indispensable pour adopter des positions africaines communes, à la fois aux niveaux régional et sous-régional, à mesure de la progression du processus de négociation sur les APE181 ».

Avant de présenter un rapide panorama des impacts des APE mis en avant dans les diverses études, il est utile d'énoncer quelques remarques. Tout d'abord, il est important de préciser la nature théorique des études d'impacts dans la mesure où elles ont été effectuées sur base d'hypothèses ou de simulations sur les économies de ces pays. En outre, l'ECDPM évoque également les contraintes méthodologiques, telles la faible quantité et qualité de données disponibles, auxquelles les études ont été confrontées dans leur travail182. D'autre part, l'ECDPM insiste également sur le fait que si toutes les études d'impacts s'accordent à dire que les APE auront un impact significatif sur les économies ACP, ceux-ci varient grandement d'une région à l'autre et d'un pays à l'autre, démontrant de la sorte le caractère fortement hétérogène des régions considérées183.

Primo, toutes les études s'accordent sur l'importance de la perte de recettes
douanières184
consécutives à la réduction des entraves aux échanges dans un APE.

179 BILAL, « APE Alternatifs et alternatives aux APE. Scénarios envisageables pour les relations commerciales entre Les ACP et l'UE », op.cit., p.38.

180 Malgré l'importance que revêtait l'élaboration d'études d'impacts pour les États ACP, Jean-Claude Lefort déplore qu'il n'existât toujours pas en 2006 d'étude de référence sur l'impact du libre-échange procédant à une analyse détaillée, pays par pays et région par région. En conséquence, le député explique que les pays ACP ont été contraints de lancer eux-mêmes le processus d'évaluation en ordre dispersé et dans la mesure de leurs moyens. En outre, Monsieur Lefort précise que l'étude menée par le célèbre cabinet de consultant PriceWaterhouseCoopers (à la demande de la Commission européenne), s'est avérée extrêmement décevante sans compter le fait que le rapport final n'offrait qu' « une vision partielle et partiale des défis posés par les APE ». Voir : LEFORT, J-C., op.cit., p.119-125.

181 CENTRE AFRICAIN POUR LES POLITIQUES COMMERCIALES, Effets des accords de partenariat économique entre l'UE et l'Afrique sur l'économie et le bien-être, Commission économique pour l'Afrique, travail en cours, n°22, septembre 2005, p. 9.

182 BILAL, « APE Alternatifs et alternatives aux APE. Scénarios envisageables pour les relations commerciales entre Les ACP et l'UE », op.cit., p.42.

183 Ibid.

184 Dans son rapport d'information adressé à l'assemblée nationale française, le député Jean-Claude Lefort explique que la perte de recettes douanières n'est pas considéré par la Commission européenne comme un problème majeur. En effet, selon l'auteur, pour la direction générale du commerce de la Commission, « la croissance supplémentaire qu'apporteront les APE compensera les pertes douanières. » Ainsi, pour la DG commerce, le choc budgétaire résultant des APE est un faux problème qu'il faut relativiser. Selon l'analyse de la DG commerce, un problème budgétaire peut se poser, mais celui-ci ne sera pas immédiat en raison de l'étalement dans le temps du démantèlement tarifaire. D'autre part, la DG commerce estime que le choc sera salutaire car il

Ainsi, selon Commission économique pour l'Afrique de l'ONU, « compte tenu de la place qu'occupent les importations de l'UE dans ces pays et de la dépendance de la majorité des pays africains à l'égard des recettes fiscales, le démantèlement tarifaire entraînera dans tous les cas une baisse considérable des revenus. » En outre, plusieurs études mettent en garde contre les impacts que ces pertes de recettes pourraient avoir sur les dépenses publiques, car des gouvernements qui ne parviendraient pas à compenser cette perte par d'autres formes de recettes n'auraient d'autre choix que de réduire leurs dépenses, ce qui mettraient finalement les secteurs sociaux en danger185. Comme nous l'avons précisé ci-dessus, les pertes de recettes douanières varient d'une région à l'autre et d'un pays à l'autre en fonction de l'importance qu'occupe l'UE en tant que partenaire commercial186.

Secundo, les études prévoient que l'abaissement des recettes douanières accroisse le flux des échanges et principalement les exportations de l'Union européenne187 sur les marchés ACP. À l'inverse, le marché communautaire étant déjà totalement ouvert (96,5 % de l'ensemble des importations des ACP ont un accès au marché communautaire en franchise de douane) aux pays ACP, la suppression des droits de douane au titre d'un APE n'aurait qu'un effet limité sur les exportations des ACP vers l'UE188. La concurrence accrue des producteurs étrangers risquerait de perturber des secteurs économiques nationaux. Ainsi Cécilia Bellora évoque dans son étude que les agricultures des pays ACP sont moins compétitives que celles de l'Europe et que l'ouverture des marchés ACP aux produits européens « pourrait causer l'élimination d'une très grande partie des productions en posant de sérieux problèmes en termes de souveraineté alimentaire et de conséquences sociales puisque 63 % de la population active des ACP est agricole.189 » En outre, la Commission économique pour l'Afrique de l'ONU, affirme également dans son étude que le risque de désindustrialisation est réel. Elle énonce ainsi, dans l'hypothèse où un APE entre les parties prévoit la pleine réciprocité, que « la

imposera de réformer les systèmes d'imposition inefficaces des pays ACP, lesquels renchérissent le coût du capital et des biens intermédiaires. Voir : LEFORT, J-C., op.cit., p.125-126.

185 BILAL, « APE Alternatifs et alternatives aux APE. Scénarios envisageables pour les relations commerciales entre Les ACP et l'UE », op.cit., p.41.

186 Dans la région de l'Afrique orientale et australe, les pays qui subiront les pertes les plus importantes sont le Kenya, le Soudan, Maurice, l'Ethiopie, la République démocratique du Congo et les Seychelles. Au sein de la CEDEAO, le Nigeria perdra 427 millions de dollars, le Ghana 194 millions de dollars et la Côte d'Ivoire plus de 112 millions de dollars. Les membres de la CEMAC qui subiront les pertes les pus importantes sont le Cameroun, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad. En ce qui concerne la SADC, les effets seront significatifs pour le Botswana et le Swaziland, tandis que pour les pays de la SACU, l'Angola perdrait 103,2 millions de dollars, la Tanzanie 32,5 millions de dollars et le Mozambique 7,6 millions de dollars. Voir : CENTRE AFRICAIN POUR LES POLITIQUES COMMERCIALES, op.cit. Voir : Annexes.

187 Voir : BILAL, S., « APE Alternatifs et alternatives aux APE. Scénarios envisageables pour les relations commerciales entre Les ACP et l'UE », op.cit., p. 40.

188 Ibid.

189 BELLORA, C., Comment les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique peuvent-ils tirer parti des Accords de partenariat économique ?, Synthèse du Colloque organisé par la FARM (Fondation pour l'Agriculture et la Ruralité dans le Monde) les 28 et 29 novembre 2006, 21 décembre 2006, p.1 1.

majorité des industries de l'Afrique subsaharienne connaîtront une réduction de leur production. Ce recul sera plus marqué dans les secteurs considérés comme étant à la base de l'industrialisation, à savoir les industries à intensité technologique faible ou moyenne, l'industrie lourde, les vêtements et les textiles. 190»

Nous finirons par mentionner le risque de désintégration régionale induit par les APE. La Commission économique pour l'Afrique de l'ONU (CEA) prévoit que les APE auront pour effet de renforcer les échanges de l'UE sur les marchés régionaux africains, mais qu'une partie de ces gains proviendront en réalité d'un détournement des courants d'échanges191 au détriment du reste du monde et du groupement constitué par la communauté économique régionale et l'Accord de partenariat économique lui-même192. La CEA en conclut dès lors qu' « à moins de prendre des mesures de compensation claires, les APE risquent de compromettre sérieusement les gains acquis jusqu'à présent dans le cadre du processus d'intégration du continent. 193»

Finalement, la conclusion de nombreuses études d'impact est que la libéralisation du commerce seule n'est pas une condition suffisante pour garantir des niveaux plus élevés d'échanges et/ou de développement durable au niveau économique, environnemental et social194. L'ECDPM affirme quant à lui : « sans politiques ni ressources adéquates pour s'ajuster, promouvoir la transformation économique nécessaire, produire et commercialiser leurs marchandises de manière concurrentielle, les pays ACP ont peu de chances de profiter des nouveaux accords de libre-échange avec l'UE.195 »

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand