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Contre histoire de la philosophie / le laboratoire de la philosophie vivante chez Michel Onfray

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par Rania Kassir
Universite Libanaise - DEA 2008
  

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B. L'historicité de Jésus :

Le deuxième point dans le système d'Onfray qui suscite notre questionnement c'est l'historicité de Jésus. Jésus est-il un personnage mythique ou historique ?

Là encore, nous nous référons à Baumier Mathieu mais pour citer un autre penseur c'est John P. Meier.717(*) Ce penseur a écrit dans son ouvrage consacré à Jésus Un certain juif, Jésus : «  le plus étonnant, c'est qu'il soit des juifs ou des païens cultivés pour connaître son existence [Jésus] ou y faire allusion au cours du I e siècle ou au début du II e siècle »718(*). Partant de ce passage écrit par Meier, nous nous proposons de s'écarter des sources chrétiennes qui attestent l'historicité de Jésus et nous nous penchons, en revanche, sur des sources païennes et juives donc non-chrétiennes voire opposées au christianisme, pour résoudre la problématique de l'historicité. Pour ce faire, nous citons des passages qui mentionnent le nom du  « Christ » ou « Jésus » sans prendre ceux qui mentionnent « chrétiens » ou « christianisme ». La raison en est que Michel Onfray, profondément anti-chrétien, parle aussi du christianisme inventé par l'hystérique Paul de Tarse mais il pose, pour autant, Jésus comme fiction. Dans les pages qui viennent, nous citons, des historiens romains, païens et juifs.

Tout d'abord, en 112 ap. J.C, Pline Le Jeune719(*) a écrit une lettre à l'Empereur romain, Trajan dans la quelle il est question des chrétiens : « Les chrétiens arrêtés affirment que leur culpabilité ou leur erreur sont limitées à se réunir en un jour fixe, avant le jour, pour chanter des hymnes à Christ comme à un dieu, et se lier par un voeu solennel non pour quelque mauvaise action, mais à ne jamais commettre de fraudes, de vols, d'adultère, à ne pas trahir leur parole, et à ne pas renier leur foi si on leur demandait. » (Epîtres X, 96) 720(*)

A son tour, Tacite721(*) vers 115 évoque dans ses Annales le nom du Christ en parlant de l'Empereur romain Néron qui accusa les chrétiens d'avoir incendié Rome : «  Néron a infligé les tortures les plus recherchées à ces hommes qui sous le nom commun de chrétiens, étaient déjà marqués par la plus mérite des infamies. Leur nom tire son origine de Christ qui, sous le règne de Tibère avait subi la peine de mort part un décret du procurateur Ponce Pilate. » (Annales 1 XV& 44)722(*)

De son côté, Flavius Josèphe723(*) écrit dans les Antiquités juives deux passages dans lequel il figure le nom du Christ : «  Maintenant il y avait, en ce temps-là, un certain Jésus, un homme sage, s'il est permis de l'appeler un homme, parce que c'était un faiseur de miracles et un enseignant qui enseignait de telle manière que les hommes l'écoutaient avec plaisir. Il s'attirait après lui, à la fois beaucoup de Juifs, et beaucoup de Gentils. C'était le Christ, et lorsque Pilate le condamna à être crucifié, à la suggestion des principales personnalités parmi nous, ceux qui l'aimèrent depuis le début ne l'abandonnèrent pas ; parce ce qu'il leur apparut de nouveau le troisième jour, comme le leur avaient annoncé les prophètes, ainsi que disent milles autres merveilles à son sujet. Et la tribu des chrétiens, ainsi nommée d'après son nom, n'est pas encore éteinte à ce jour. » (Antiquités, Livre XVIII chap.3 &3)724(*). Et il ajoute : « Anan (...) convoqua un Sanhédrin des juges et fit comparaître le frère de Jésus -appelé-Messie et quelques autres. Il les accusa d'avoir transgresser la Loi et les livra pour être lapider. » ( Antiquités XX, 9 &1)725(*).

Autre preuve de la présence réelle de Jésus ce fut la crucifixion. Michel Onfray est résolu à mettre en cause la crucifixion de Jésus car, à son avis, montrer qu'une preuve de l'existence de Jésus est hypothétique c'est équivalent à prouver que l'existence de Jésus elle-même est contestable. Or nous allons, moyennant les analyses de Mathieu Baumier, suivre un cheminement inverse : établir la vérité de la crucifixion pour fonder l'historicité de Jésus.726(*)

Baumier va montrer tout d'abord qu'à l'Antiquité romaine, la croyance en la divinité de l'empereur au pouvoir mais aussi en celle du panthéon des empereurs décédés est un devoir imposé à tous ceux qui vivent dans l'Empire. Ceci se montre à travers l'offrande des sacrifices dans les cultes privés et publics pour rendre hommage aux empereurs romains. Dès lors, toute infraction à ce devoir sacré est susceptible d'encourir la peine capitale. A ce que nous rapporte Mathieu Baumier, cette méthode fut employée fréquemment par les représentants politiques des empereurs romains, du II au début du IV siècle, pour distinguer les chrétiens hostiles aux sacrifices de ceux qui sont favorables aux lois romaines. Cette méthode fut, en effet, à l'origine des persécutions subies par les premières communautés chrétiennes.

Or Jésus le Juif bien avant les communautés chrétiennes, a mis en question la loi romaine car il croit comme tout le peuple juif à l'époque en l'existence d'un Dieu unique, un Dieu qui est tout à fait différent des divinités romaines. Là-dessus, Baumier trouve que le raisonnement de Michel Onfray était contradictoire. D'un côté, il affirme que la crucifixion de Jésus est réfutable. Cette « crucifixion suppose une mise en cause du pouvoir impérial, ce que le crucifié ne fait jamais explicitement. »727(*). Et, d'un autre côté, il écrit que Jésus « fournit le patronyme emblématique de tous les juifs qui refusent l'armée d'occupation romaine et disposent pour seule arme de leur bonne foi soutenue par la croyance que leur Dieu peut accomplir des miracles et les libérer du joug colonial. »728(*). A en croire Baumier, la cause qui était implicite dans le premier paragraphe devint explicite dans le second.

Jusqu'ici on a appris que Jésus, le rebelle, méritait une peine capitale mais rien ne fait preuve de la nature de cette peine ? Jésus a-t-il été crucifié ou lapidé ?

Pour répondre à cette question, Baumier rapporte que la crucifixion est une peine capitale qui appartient au droit romain et elle concerne tous ceux qui ne sont pas citoyens romains. Tandis que la lapidation est une peine capitale appartenant au droit juif. Au dire de Baumier, Jésus est mis à mort selon le droit romain et non selon le droit juif. Cette idée trouve sa justification dans le but visé par le préfet romain : ce que veut Ponce Pilate était le maintien de son autorité et le règne de l'ordre en Rome. Il trouve alors dans les autorités juives de bonnes alliées car en tuant leur véritable ennemi (le prétendu Messie), il peut obtenir, en contrepartie la soumission des autorités juives et l'exercice de son pouvoir sur tout l'Empire. Faveur contre faveur. Le résultat : la crucifixion d'un Jésus réfractaire à l'autorité romaine.729(*)

Bref, d'après ces différentes citations repérées, on pourra dire que la thèse de Jésus, personnage historique prend le dessus sur celle de Jésus, personnage mythique, car un ennemi à l'encontre de l'ami n'à aucun intérêt dans cette histoire d'idées.

Il est notable à la fin que le fait de prouver l'existence historique de Jésus n'a aucun rapport à la croyance au Jésus. Meslier, cet alternatif exhumé par Onfray, a lui-même cru à l'existence de Jésus tout en le considérant comme fou, vil, méprisable et homme de néant.730(*)

De même, les Pères de l'Eglise croient à l'existence de Jésus tout en le trouvant le fils de Dieu. Il est donc nécessaire de séparer le Jésus historique du Jésus de la foi.

* 717 John Paul Meier est un prêtre catholique américain, spécialiste en exégèse.

Son oeuvre principale est A Marginal Jew : Rethinking the Historical Jesus . (3 vol).

Cette oeuvre est traduite en français aux éditions du Cerf et a pour titre Un certain juif : Jésus.

* 718 John MEIER, Un certain juif, Cerf, 2004, p.47 in L'Anti-Traité d'athéologie, op.cit., p.115

* 719 Pline le Jeune (61 ap.J.-C. , 120 ap.J.-C) est un écrivain, orateur et homme politique romain.

* 720 Voir Jésus historique sur le site suivant : foibiblique.com/articles/jesus-christ/.../Jésus_historique.htm.

* 721 Tacite ( 55 ap. J.-C. , 120 ap. J.-C ) est un historien et philosophe romain. Il a écrit un immense livre d'histoire qui couvre le règne de certains empereurs romains dont l'empereur Néron. Ce livre a été appelé Annales mais le titre original donné par Tacite fut Après la mort du divin Auguste.

* 722 Voir aussi : foibiblique.com/articles/jesus-christ/.../Jésus_historique.htm. , op.cit

Et L'Anti-Traité d'athéologie, op.cit., p.116.

* 723 Flavius josèphe ( 37 ap. J.-C , 100 ap. J.-C ) est un historien juif romanisé.

* 724 Voir le site précédent : foibibilque.com/articles/jesus-christ/.../Jésus_historique.htm.

* 725 L'Anti-Traité d'athéologie, op.cit., p.117

* 726 Ibid., pp.121-132

* 727 Traité d'athéologie, op.cit., p.173

* 728 Ibid., p.163

* 729 Il est notable ici que ce ne sont pas les juifs en tant que peuple qui ont collaboré au procès et à la condamnation du Jésus. Durant son procès et sa crucifixion, précise Baumier, Jésus était un juif et non un chrétien. De même ses disciples sont tous juifs. Cette distinction entre le peuple juif et les autorités juives est requise pour ne pas justifier un certain antisémitisme.

* 730 Cf. Les ultras des lumières, op.cit, p.65 ; p.66 ; p.67

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