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Contextualisation et variation de la langue française dans l'écriture littéraire au Cameroun: le cas de l'invention du beau regard de Patrice Nganang

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par Simplice Aimé Kengni
Université de Yaoundé I - Maitrise en Lettres Modernes Françaises 2006
  

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CHAPITRE TROISIÈME : LA VARIATION LEXICO-SÉMANTIQUE

Dans la langue française comme dans toute autre langue, l'utilisation d'un mot en discours est toujours chargé de sens. En effet, comme le remarque L.M. ONGUENE ESSONO,44(*)pour se comprendre, il faut mettre les mêmes sens sous les mêmes mots, les mêmes significations devant correspondre aux mêmes signifiés.

Cependant, l'usage du français au Cameroun présente une autre particularité qui est celle de la resémantisation des lexèmes, les chargeant d'un sens différent de celui qu'offrent les dictionnaires de référence. En réalité, la langue française utilisée ici fait face à une culture camerounaise, qui à travers ses langues la transforme et l'accorde à sa sensibilité. J. TABI MANGA souligne à juste titre que :

Les cultures africaines traversent la langue française en y laissant des traces durables. Ces dernières transforment, bouleversent profondément les repérages sémantiques classiquement répertoriés dans les dictionnaires de référence.45(*)

Notre corpus d'étude, qui est ici l'IBR, n'échappe pas à cette règle. La resémantisation du lexique français s'y opère à travers moult phonèmes tels que : les changements de dénotation et de connotation, les glissements de sens, les extensions sémantiques, les métaphorisations et les calques traductionnels.

Notre analyse a consisté à faire un relevé d'occurrences suivi de quelques interprétations suivant le contexte.

3.1 Le changement dans la dénotation.

La dénotation désigne le noyau sémique fondamental et invariable d'une lexie. Pour G. MOUNIN, il s'agit de :

La relation qui unit une forme linguistique à la classe d'objets du monde observable, cette forme a la propriété d'évoquer dans l'usage de la langue la classe des objets qu'elle dénote.46(*)

En français camerounais par contre, on remarque que les lexies peuvent perdre leur sens premier et en acquérir d'autres, inexistants le plus souvent dans le français central.

Dans l'analyse du corpus, nous avons remarqué que dans l'IBR, les changements dans la dénotation se situent à deux niveaux des classes grammaticales.

3.1.1 Les verbes.

Nous avons recensé à ce niveau les exemples ci-après :

1) Notre homme avait décidé d'inventer tout ce beau monde chez lui après pour arroser-cà. (P.19)

2) Quand il aurait dû réfléchir sur cela qu'il deviendrait durant ces jours si proches ou qu'il n'aurait plus sa tenue fière d'adjoint au commissaire de police à porter. (P.20)

3) Et Taba ne put la croire, vraiment, quand elle le rassura et lui dit : «le médecin n'a rien vu''. (P.134)

4) il se bouchait les oreilles, et il se rendait compte bien vite que cette voix criait des profondeurs de son âme, que cette voix de Mana qui explosait en lui, lui disjonctait les évidences. (P.183)

Ces différents exemples relevés dans l'IBR ont au niveau dénotatif, un sens totalement différent de celui que présente les dictionnaires de référence. Le noyau sémique fondamental que l'on reconnaît à ceux-ci a volé en éclats au profit d'un sens nouveau imposé par le contexte camerounais.

Dans l'exemple (1) arroser-ça, on note que ce groupe verbal qui en réalité signifie humecter, mouiller en versant un liquide, revêt ici une autre dénotation appropriée qui est : festoyer, organiser une grande fête pour marquer un événement heureux. L'événement dont il est question ici est la cérémonie de décoration du commissaire de police adjoint D. Eloundou qui est au seuil de la retraite.

Le verbe porter présent dans l'exemple (2) revêt le sens qui lui est imposé par la traduction dans certaines langues locales camerounaises.47(*) De ce fait, il renvoie ici à l'expression mettre sur soi (un vêtement).

L'occurrence n'à rien vu laisse apparaître l'expression du personnage Mana épouse de Taba. Le changement de dénotation porte ici sur le verbe voir qui signifie ici : «diagnostiquer.'' En fait, Mana rapporte à son mari que les analyses médicales effectuées par le médecin se sont avérées négatives.

Enfin, le dernier verbe disjonctait quant à lui est généralement utilisé par les locuteurs camerounais dans des échanges agressifs. (Exemple : j'ai l'impression que vous disjonctez un peu monsieur). Il renvoie de ce fait à l'expression perdre la tête ou perdre ses repères.

Dans la même perspective, nos analyses nous ont aussi permis de relever certains lexèmes dans le corpus, victimes des changements de dénotation.

* 44 L.M. ONGUENE ESSONO, « Normes endogènes et norme standard dans Ndzana Nga Zo'o description des procédés d'enrichississement du français au Cameroun », in NDZANA GA ZOGO, Yaoundé, Presses Universitaires de Yaoundé, 1999, PP.115-134

* 45 J. TABI MANGA, 1993, op.cit. pp.37-46

* 46 G. MOUNIN, Dictionnaire de linguistique, Paris, PUF, 1974, p.77

* 47 L.M. ONGUENE ESSONO (op.cit), p.127, souligne que ce verbe signifie en Eton mettre sur soi et porter (comme un fardeau ou comme un habit)

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams