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Contextualisation et variation de la langue française dans l'écriture littéraire au Cameroun: le cas de l'invention du beau regard de Patrice Nganang

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par Simplice Aimé Kengni
Université de Yaoundé I - Maitrise en Lettres Modernes Françaises 2006
  

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3.7 Le langage familier.

Dans les pratiques langagières, il existe plusieurs registres de langue. En effet, l'Encyclopédie libre WIKIPÉDIA définit les registres ou niveau de langue comme

L'ensemble des différentes formes d'expressions employées par les sujets parlants pour formuler leurs pensées. Généralement, ces diverses manières de s'exprimer s'apparentent comme étant assez ou très proche par le sens les unes des autres. Aussi celles-ci dépendent en grande partie de la culture respective des locuteurs, de leurs degrés d'intimité et les rapports hiérarchiques existant entre eux.60(*)

On distingue à cet effet le soutenu, le courant et le familier. Ce dernier occupe une large place dans notre corpus. Il est émaillé de termes argotiques et d'injures locales.

3.7.1 Les termes argotiques.

Napon définit l'argot comme un système clos utilisé par le groupe pour le distinguer des autres groupes parlant diverses variétés d'une langue.61(*)

Allant dans le même sens, P. Giraud précise que l'argot est un langage artificiel dans son emploi.62(*)

L'IBR présente les exemples ci-après :

37) Des gens s'arrêtaient, lui donnaient un sourire, mais au fond ne répétaient en sa conscience que la question silencieuse que déjà la rue dans un bar têtuement bruyant lui avait lancée. (p.26)

38) Il se rendait compte qu'il avait dans sa main le pistolet de son pouvoir, celui qu'il n'aurait jamais utilisé s'il n'y aurait eu cette maudite mbok. (p.58)

39) c'est au bout de notre cavale litique qu'un jour, dans le salon de notre tante, nous rencontrons un homme que nous croyons être son père à elle. (p.92)

Les termes têtuement bruyant (entêté par ses bruits) maudite mbok (prostituée) cavale litique (relations sexuelles) relèvent bel et bien du langage familier, ils sont généralement employés à l'oral. En effet, leur présence dans l'IBR relève du fait que cette oeuvre est le reflet du langage utilisé dans le quotidien des locuteurs camerounais tant au niveau urbain que rural.

Cet emploi s'étend même au niveau des injures locales.

3.7.2 Les injures locales.

Ce sont des mots ou des jurons généralement présents dans l'usage populaire du français au Cameroun et qui servent d'insultes ou de plaintes à l'endroit d'un tiers.

Nous avons recensé un nombre important dans notre corpus comme laisse apparaître les exemples suivants :

40) Pourquoi avait-elle choisi de se battre, « la sapack », pensa-t-il. (P.56)

41) Notre cher commissaire pouvait même dire trois mouf à la patrouille de police qui lui avait été refusée. (P.98)

42) Tu vas manger tout ça seul ? Chicheron

C'est la chicherie qui va tuer les Bamiléké. (P.138)

43) L'imbouc que le chauffeur impertinent reçut en échange, avec la menace d'un grand couteau. (P.150)

Ces termes injurieux sont puisés dans le répertoire des emplois des locuteurs camerounais. . Ils sont ici assumés par certains personnages et parfois reportés par l'auteur-narrateur. Tous ont à l'évidence une signification particulière.

- Dans l'exemple 40, sapack signifie prostituée.

- Le terme mouf est synonyme d'une insulte quelconque, il signifie en effet que le locuteur s'en fout de quelque chose bien précise.

- Le lexie chicheron qui est une dérivée du mot chiche en français standard renvoie ici à un égoïste.

Quant à l'occurrence imbouc, elle est l'équivalence d'imbécile dont elle semble en être le diminutif. Mais ce terme signifie en réalité illettré dans son usage vulgaire.

En filigrane, l'utilisation du langage familier permet de confirmer le fait que l'IBR reflète le répertoire linguistique du commun des locuteurs camerounais. Bien plus, il apparaît fort bien que cette oeuvre est puisée d'une main légère et puissante dans le langage populaire en vogue au Cameroun et servant à ses locuteurs de s'exprimer sans difficultés.

Au bout du compte, l'IBR de Patrice NGANANG s'inscrit au coeur de la société et des différentes cultures présentes au Cameroun, tout en transcrivant autant que faire se peut, la réalité quotidienne des locuteurs ainsi que leur sensibilité linguistique : d'où la vérification de l'hypothèse de recherche n°1

Par ailleurs, les faits lexico-sémantiques étudiés ici traduisent bien la vision du monde des locuteurs soucieux de faire apparaître leur culture dans la langue française ainsi que l'a souligné J. TABI MANGA :

Les cultures africaines traversent la langue française et y laissent des traces durables. Ces dernières transforment et bouleversent profondément les repérages sémantiques classiquement répertoriés dans les dictionnaires de référence. 63(*)

Ce procédé d'enrichissement peut aussi s'observer au niveau morpho-sémantique à travers le phénomène de créativité néologique.

* 60 L'Encyclopédie libre WIKIPÉDIA, http://fr.wikipédia.org/wiki/registre-de-langue.

* 61 A. NAPON, « Quelques faits d'appropriation du français à l'école secondaire à Ouagadougou », in Le Français en Afrique, Sud langues, Nice Cedex/n°13, 1999, p.100

* 62 P. GUIRAUD, L'Argot, Paris, PUF, 1985, p.33

* 63 J. TABI MANGA, (1993), op.cit. p.37

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