WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Mouvements de résistance et culture politique au Sud-Kivu. Mise en évidence des fondements idéologiques et des actions revendicatrices.

( Télécharger le fichier original )
par Philippe KAGANDA MULUME-ODERHWA
Université officielle de Bukavu - Diplôme d'études supérieures en sociologie politique 2009
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.2.1.5. Mouvements de résistance à tendance ethniciste

Un seul groupe a été retenu dans ce type de mouvement de résistance : le FRF. Dirigé par BISOGO, se mouvement serait une dissidence du groupe armé du Général MASUZU qui a rejoint l'armé régulière. Ce mouvement reprocherait le Général MASUNZU de trahison par le fait de laisser les Banyamulenge sans protection locale face aux menaces persistantes des groupes ethniques babambe, bafuliro et bavira. Les données sur ce mouvement de résistance ne sont pas fouillées car pendant les enquêtes, il était toujours en activité militaire intense. Nous avons pu interroger un seul sujet qui appartenait jadis au groupe armé FRF.

2.2.2. Structuration et occupation géopolitique des mouvements
de résistance au Sud-Kivu.

2.2.2.1 Structuration

Les mouvements de résistance au Sud-Kivu existent sous forme des organisations. Ils ont des objectifs, structures propres, moyens et stratégies d'action.

Objectif

Les opinions exprimées par tous les sujets interrogés convergents vers un objectif principal commun, à savoir « lutter contre l'agression étrangère, « chasser hors du territoire les envahisseurs ». Il a été noté également un objectif secondaire : « protéger la population contre les Interahamwe et les F.D.L.R. ». Toutefois, seul le mouvement de résistance Raiya Mutomboki a comme objectif d'empêcher tout groupe armé (national ou étranger) y compris l'armée régulière d'opérer sur son territoire.

La notion d'étranger ou d'envahisseur est fortement changeante et ambiguë. En effet, le contour sémantique de ces deux termes prend en considération aussi bien les citoyens rwandais que les congolais d'expression rwandaise ainsi qu'une connotation raciale (le nilotique opposé au bantou). La plupart de mouvements de résistance au Sud-Kivu sont nés entre et pendant les rébellions de 1996 menées par L.D. Kabila et celle du R.C.D. Ils ont été idéologiquement alimentés par le contexte de crise socio- politique dans la Région des Grands -Lacs manifesté par la violence, les tueries et massacres, l'ethnocentrisme, les guerres entre Etats. La présence de l'armée rwandaise sur le sol congolais a été considérée par les populations congolaises comme une invasion, une tentative ainsi, l'étranger ou l'envahisseur est le citoyen rwandais se trouvent sur le territoire congolais dans le cadre des opérations militaires.

On peut lire ce contexte dans le texte rédigé par Emmanuel Lubala Mugisho :

« Depuis la première guerre du Kivu en 1996, les population de cette régions avaient suspecté l'engagement des troupes rwandaises, ougandaises et burundaises aux côtés des rebelles Banyamulenge, notamment à cause des déclarations du Président Bizimungu du Rwanda relevant les ambitions territoriales de son pays sur le Kivu (.....).

Ainsi pendant que la presse internationale

s'empressait à faire accréditer la thèse d'une « guerre de libération », les populations du Kivu, autres que les Banyamulenge, avaient la conviction de subir « une guerre d'occupation »

Et les faits ne les ont pas contredits. Car au lendemain de la victoire de l'AFDL, les Banyamulenge et leurs alliés de l'Ouganda, du Rwanda et du Burundi se sont comportés à l'égard de autres communautés ethniques comme des vengeurs envers les vaincus. On a même assisté, dans les premiers mois qui ont suivi la fin de la guerre, à des pratiques de bastonnade, de chicotte, des crachats sur les gens (parfois même dans la bouche) et d'autres, traitements inhumains et humiliants infligés aux membres des ethnies non tutsi. Tout se déroulait comme dans un régime d'occupation étrangère. Malgré les dénégations du Rwanda et de l'ouganda, il semble que l'occupation d'une partie ou de la totalité du territoire congolais, soit l'une des motivations de l'invasion qu'ils ont entreprise »61.

C'est aussi, tout citoyen congolais d'expression rwandaise mais de l'ethnie tutsi (ou nilotique)62. Dans le Sud de la Province particulièrement, cette stigmatisation prend souvent la signification de l'ennemi. Les populations Bembe, Vira et Fuliro qui vivent aux côtés de Banyamulenge, notamment dans les Territoires de Fizi et d'Uvira les perçoivent comme des ennemis à la suite des conflits fonciers. En

61 E. LUBALA MUGISHO, « l'émergence d'un phénomène résistant au sud- kivu (1996- 2000) » in L'Afrique des Grands Lacs. Annuaire 1999-2000, p. 200-2001.

62 Dans son article intitulé « les identités transnationales et la construction de la paix dans les pays multiculturels : le cas de la communauté rwandophone en R.D. Congo » Oswalde Ndeshyo note ceci à propos de la citoyenneté contestée des populations rwandophones du Congo : « A vrai dire, les transplantés sont des Banyarwanda congolais de nationalité. Mais en réalité, c'est plutôt l'amalgame et la confusion.

D'une manière distincte, les Banyarwanda congolais font, toutes catégories confondues, l'objet de rejet, d'exclusion, d'exactions et de massacres par délit de faciès, depuis quatre décennies. Ils constituent une source majeure, récurrente et indéracinable de toutes les guerres civiles congolaises de l'Est jusqu'à la première guerre mondiale africaine en cours. Pour les uns, le Congo est une patrie de Bantous seulement et n'existe pas du tout de Tutsi congolais. Pour d'autres, les Hutus et les Tutsi du Congo sont , sinon tous des étrangers, en tout cas de nationalité congolaise douteuse, malgré toutes les lois successives concordantes relatives à leur nationalité congolaise.(...). ( p.185)

conséquence, cette ambiguïté sémantique conduit à une dérision de l'objectif, et partant au changement de la nature de la résistance qui, dans le fait, devient ethnique et non politique.

Par ailleurs, l'acteur visé étant étranger, il y a naturellement absence d'une revendication adressée à l'Etat Congolais. Les mouvements de résistance au Sud-Kivu ont constitué du point de vue téléologique un soutien à l'Etat Congolais pour protéger l'intégrité territoriale. A cet effet, leur objectif ou du moins leur raison d'existence aurait pu être limité dans le temps.

Mais au contraire, après le retour des soldats rwandais suivi de la réunification du Pays grace à l'Accord global et inclusif de 2001, il a été observé la naissance de plusieurs mouvements de résistance exprimant à la fois des revendications internes (grades militaires, postes politiques ou d'administration du portefeuille) et « la protection » du territoire national.

Structure.

La structure des mouvements de résistance du Sud-Kivu présente deux dimensions : militaire et politique.

La structure militaire empruntée à l'organisation de l'armée a été, pendant longtemps, le type organisationnel des mouvements de résistances. Les termes qui distinguent les différents niveaux hiérarchiques relèvent du jargon militaire. Il s'agit entre des termes suivants : commandement général, brigade, Bataillon, Section, Général, Lieutenat-colonel, Colonel, Major, Capitaine, etc.

Quoiqu'incohérente, la structure mise en place instaurait un système d'organisation déterminant les positions (statuts) des acteurs et leurs rôles au sein du mouvement. Il faut souligner que l'organisation interne n'a pas toujours caractérisé les mouvements de résistance au Sud-

Kivu. Tous les anciens mouvements de résistance se contentaient des structures réduites combinant quelques responsabilités militaires et fétichistes.

La veille des négociations (Sun City ou la Conférence de Goma) est une occasion propice pour mettre en place des structures capables de faciliter le positionnement de certains cadres militaires.

Il en est de même de la dimension politique qui a été prise en compte plus tard à la suite des contingences et dynamiques politiques.

A titre d'exemplatif, ci-dessous les organigrammes de deux mouvements de résistance.

Figure n° 7 : Organigramme de Mouvement de résistance Mai- Mai de Bunyakiri.

COMMANDANT

COMMANDANT SECOND

COMMANDANT EM

EMS

DTR

SRT.GEN

T1

DSS

T2

QG

DOCTEURS

AUDI MIC

T3

T4

T5

6e

BG

 
 
 
 

1ère

2e

3e

4e

5e

BG

 

BG

BG

BG

BG

 
 
 
 
 

7e

8e

9e

10e

11e

12e

BG

 

BG

BG

 

BG

BG

BG

S4

S1

Légende :

- AUDI MIL : Auditorat Militaire - Bg : Brigades bataillon

- DSS : Direction des Services de Santé

- DTR : Direction de transmission

- EMS : Etat Major Spécial - QG : Quartier Général

- SRT GEN : Secrétariat Général

- T1 : Chef du personnel

- T2 : Service de renseignement

- T3 : Service cargé des opérations

militaires

- T4 : Service chargé de la logistique

- T5 : Service des relations publiques et

questions politiques

Source : Syllabus (sic.) du major Wenemubi K. Araffat cité par WAKILONGO WAUBENGA, Op. Cit., p. 23.

S2

S3

S5

COMPAGNIE

PELETON

SECTION

BATAILLON

Figure n° 8 : Organigramme de l'opération Sud-Kivu /Fizi

Chef d'état Major

Services Spécialisés

Information

Santé

Secrétaire général

Bureaux

Brigades

Bataillons

Bureau 3 T3

Bureau 5 T5

Bureau 1 T1

Bureau 2 T2

Bureau 4T4

Source : Nous détenons l'information du mémoire de licence de

Monsieur Asa Wilondja (p.29) intitulé Militarisation participation politique des Bembe en Territoire de Fizi au Sud- Kivu 2007-2008

Ressources et stratégies

sont de trois types : les ressources matérielles, les ressources financières et les ressources symboliques et les ressources humaines.

- Ressources matérielles

Les bases militaires "de tous les mouvement résistance se trouvaient dans les milieux ruraux dépourvus en infrastructures. Par conséquent ils ne disposaient pas des immeubles importants sinon de maisons de fortune en paille ou herbes mortes et parfais des tentes d'abri. Cependant, la logistique militaire, étaient régulièrement approvisionnée. Tous les anciens mai-mai et chefs de mouvement interrogés citent 3 sources principales de l'équipement militaire : récupération des armes abandonnées par l'ennemi, l'approvisionnement par le gouvernement et les dons.63 L'armement lourd n'a pas été utilisé. Ainsi, on pourrait trouver les effets suivants : Boats, vivres, produits pharmaceutiques, armes (lance roquette, mortier, mip 50, M16, canon, MAA, Mag, Fallon, Fal, FM Karachi, R4, G3, etc).

- Ressources humaines

Les mouvements de résistance ont utilisé un nombre considérable de personnes. Celles-ci peuvent être reparties en trois catégories : personnel politique et personnel d'appoint et personnel militaire. Ce dernier est le plus important dans tout mouvement de résistance. Il est formé des cadres de commandement (officiers et sous officiers) et des hommes de troupe. Quant au personnel politique, il est formé des cadres politiques recrutés à la suite des événements de négociation comme souligné plus haut généralement, ces cadres ne restant pas en brousse avec les militaires. Ils résident en ville où ils opèrent clandestinement sous forme d'agents de liaison. Enfin, le

63 Ce soutien du Gouvernement se faisait pendant l'occupation de la province par la rébellion menée par de R.D.C. Les mai-mai étaient utilisés pour déstabiliser le R.C.D., et l'emprcher d'occuper plusieurs entités.

personnel de soutien est formé des gens qui participent indirectement aux activités militaires par des taches diverses : ce sont les porteurs pour le déplacement des armes, les féticheurs dits « docteurs », les cuisiniers, etc.

Le mode de recrutement des militaires et assimilés est à la fois volontaire et forcé. Les jeunes (adultes et enfants) voire les vieux sont intégrés soit volontairement soit par contrainte. Les effectifs déclarés par des mouvements de résistance font état de 81.810 hommes en activité militaire tel qu'indiqué que dans le tableau ci - dessous.

Tableau N° 5 : Effectifs des militaires des mouvements de

résistance au Sud-Kivu.

MOUVEMENT DE RESISTANCE

EFFECTIFS

%

1

Mai-Mai Mahoro

1.600

1, 95

2

Mai-Mai Kapopo

800

0,97

3

Pareco/S-K

4.500

5,50

4

Mai-Mai Ny'ikiriba

1.625

1,98

5

Mai-Mai Shikito

1.800

2,20

6

Mai-Mai shabunda

2.500

3,05

7

Mai-Mai Mudundu 40

6.200

7,57

8

Mai-Mai Zabuloni

13.250

16,19

9

Mai-Mai Yakatumba

8.000

9,77

10

Mai-Mai kirikicho

9.000

11,00

11

Mai-Mai Simba/MRS

32.535

39,68

 

TOTAL

81.810

100

Source : PROGRAMME AMANI/SUD-KIVU, Plan de mise en oeuvre pour le désengagement 2009, pp. 4-11.

- Ressources financières

Le financement des mouvements de résistance n'est pas organisé. Les moyens financiers proviennent principalement des dons, prélèvement (taxes) sur les populations, exploitation des minerais et parfois des appuis de l'Etat. Ils ne disposent pas des fonds considérables susceptibles de répondre aux multiples exigences d'un mouvement armé, notamment le payement des militaires, les voyages, l'achat des armes, etc. Aucun mouvement des résistances au Sud-Kivu ne dispose d'un compte bancaire ou d'un circuit de financement clair, et stable.

Quant aux stratégies, nous avons relevé la formation

militaire, les correspondances et moyens médiatiques, l'accommodation aux cultures locales, la contrainte.

- Formation militaire.

Tous les mouvements de résistance étudiée ont assuré à leurs combattants des enseignements et entrainements militaires. Ceux-ci visaient à leur donner des capacités nécessaires aux opérations de guerres ou combats mais aussi quelques aspects de la discipline militaire.

- Correspondances et moyens médiatiques

L'écrit comme les medias ont permis aux mouvements de résistances d'entretenir des relations entre eux et avec les autres organisations d'un côté, et sensibiliser les autres catégories sociales à se joindre à leur lutte. Ainsi les échanges des lettres ont eu lieu entre les mouvements de résistance ; des messages écrits, tracts ont été véhiculés dans les populations sous forme d'alerte ou d'interpellation comme le prouvent les correspondances ci - dessous.

S'agissant des moyens médiatiques, non seulement certaines mouvements de résistances exprimaient leurs points de vue sur des chaines de radio nationales (Radio Maendeleo) et internationales ( BBC, RFI) mais aussi ils ont crée occasionnellement un émetteur radio pour annoncer les attaques.

- L'accommodation aux cultures locales

Nombres de mouvement de résistance au Sud-Kivu sont en réalité l'émanation des communautés paysannes ou villageoises qui, confrontées aux situations d'insécurité permanente, le considèrent comme un moyen d'autodéfense. Nous pouvons ranger dans cette catégorie les mouvements de résistance suivant : Mai-mai mahoro (mwenga), Mai-mai NY'iKiriba (Uvira), Mai-mai shikito (mwenga), Mai-mai Mudundu 40 (Walungu), Mai- mai Zabuloni (Uvira ), Mai-Mai yakutumba (Fizi), Raia mutamboki

(Shabunda) . Les entretiens avec les autorités coutumières de ces contrées révèlent que ces celles -ci ont soit participé à la création desdits mouvements de résistance soit contribuer substantiellement par des moyens divers (hommes de troupe, mécanisme, superstition pour l'invulnérabilité, nourriture, etc.).

- La contrainte

Tous les mouvements de résistance n'ont pas reçu un accueil favorable dans les zones contrôlées. Deux facteurs peuvent expliquer cela : l'extension désordonnée dans plusieurs régions et les exactions contre les populations. En effet, à l'exception de Mai-mai Raia Mutomboki, tous les autres groupes armés ont occupé plusieurs zones en dehors de

leurs fiefs. Les sociétés rurales, généralement « homogènes », ont

opposé une résistance à leur présence. Par ailleurs, les exactions

commises sur les populations rurales ont entrainé le rejet social de certains mouvements de résistance. Par conséquent, pour imposer leur présence dans les sociétés rurales, les mouvements de résistance ont utilisé la contrainte matérialisée par des arrestations, l'anéantissement

des autorités administratives et coutumiers, la déportation des enfants et surtout des filles, etc.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand