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Transfert des armes légères et de petit calibre et conflits armés: le cas des Philippines

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par Salamane YAMEOGO
Institut de hautes études internationales et du développement Genève - Master of Arts in Developpment Studies 2009
  

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Salamane YAMEOGO/IHEID.MDEV/Semestre : Automne 2008/Dossier du Sem. MAOROM. Prof. Jean-Luc MAURER.

Forces Armées Gouvernementale dans les zones de combat au Sud-ouest de Mindanao.

Thème:
TRANSFERT DES ARMES LEGERES ET DE PETIT CALIBRE ET CONFLITS ARMES :
LE CAS DES PHILIPPINES
Enseignants :

Jean-Luc MAURER
Christine LUTRINGER

Etudiant : Salamane YAMEOGO

Adresse Electronique: salamaneyameogo@yahoo.fr

Institut : IHEID

Master : MDEV.

1

Transfert des Armes Légères et de Petit Calibre et Conflits armés : Le cas des Philippines

INTRODUCTION

Mindanao, une des Îles les plus importantes de l'archipel des Philippines, est en proie à un conflit armé opposant le gouvernement philippin et le Front de Libération Islamique Moro (MILF). Le MILF qui s'est formé dans les années 1960 est devenu un Mouvement indépendantiste de tendance islamique, en 1978. Sa branche armée est la Bangsa Moro Islamic Armed Forces. A cette rébellion indépendantiste s'ajoutent le Groupe Abou Sayyaf, (les membres d'Abu Sayyaf sont à l'origine issus du Front Moro de Libération Nationale (MNLF) dont ils se séparent en 1991 sous l'impulsion de A bdurajik Abubakar Janjalani) et la Nouvelle Armée Populaire (NPA) qui mène depuis 1969 une lutte armée pour délivrer le peuple de « l'exploitation et l'oppression ». L'armée populaire combat les grands propriétaires terriens et la grande bourgeoisie, et ce principalement dans les campagnes. En dehors des acteurs internes, des acteurs externes influent sur ce conflit trentenaire.

La perpétuation de ce conflit est en plus des causes endogènes multiples rendue possible par les soutiens extérieurs dont bénéficient les différents belligérants. Ainsi, le gouvernement est principalement soutenu par les États-Unis qui leur fournissent du matériel militaire. C'est le cas en 2001 pour des armes transférées dont la valeur est estimée à plus de 100 millions d'euros. Ces livraisons portaient notamment sur des hélicoptères, des avions de transport et 30 000 fusils M16. Quant aux Groupes Armés non Etatiques, ils bénéficient de l'assistance armée en provenance de la Chine (Le gouvernement chinois aurait par exemple fait parvenir des armes à la New People's Army (NPA, Nouvelle Armée du peuple). La Malaisie et la Libye soutiendraient le Front de Libération Islamique Moro et Groupe Abou Sayyaf. Ce dernier qui serait également soutenu par Al-Qaïda. Ces factions sont armées par d'autres entités alliées à travers des transferts d'armes. C'est précisément sur le transfert d'armes, notamment des Armes Légères et de Petit Calibre (ALPC) que porte le présent travail.

Transfert des Armes Légères et de Petit Calibre et Conflits armés : Le cas des Philippines

Les ALPC sont classées dans la catégorie des armes conventionnelles, contrairement aux Armes de Destruction Massive (ADM). Elles connaissent une diversité de définition allant de celle adoptée par les Organisations Inter-Gouvernementales1 et ONG à celle retenue par les Nations Unies2 en passant par celles des chercheurs3. Toutefois, il convient de retenir la définition des Nations Unies en ce que cette définition est la réunion d'un consensus de la forte majorité des Etats. Pour les Nations Unies, les ALPC sont : toute arme à feu portable par un individu ou un véhicule léger, et dont le calibre est inférieur à 100 millimètres dont les revolvers et pistolets à chargement automatique, fusils et carabines, mitraillettes, fusils d'assaut, mitrailleuses légères ou lourdes, lance-grenades et canon antiaériens portatifs, canons anti-chars portatifs, lance missiles et lance roquettes portatifs et mortiers.

Le transfert d'armes est « une redistribution de la possession d'armes légères, que ce soit de facto ou de jure, d'un acteur à un autre. Il implique au moins deux acteurs principaux, l'initiateur et le bénéficiaire. Ces acteurs peuvent être des particuliers, des groupes, tels que des sociétés ou des bandes rebelles, ou encore des Etats. Les acteurs intermédiaires, tels que les courtiers ou les agents de transport, sont impliqués dans les aspects logistiques du

1 L'Union Européenne retient les définitions suivantes : armes de petits calibres et accessoires spécialement conçus pour un usage militaire (mitrailleuses, mitraillettes, fusils automatiques et semi-automatiques) ; les armes légères portables individuelles ou collectives (canons, obusiers et mortiers d'un calibre inférieur à 100mm, lance-grenades, armes antichars légères, armes sans recul de type lance-roquette) ; et les missiles antichars et antiaériens (missiles antichars et lanceurs, missiles antiaériens/systèmes de défense aérienne portables de type Manpads). Pour la CEDEAO, aux termes de l'article 1 de la Convention sur , on entend par : 1. ARMES LEGERES : les armes portables destinées à être utilisées par plusieurs personnes travaillant en équipe et comprenant notamment : les mitrailleuses lourdes ; les lance-grenades portatifs, amovibles ou montés ;les canons antiaériens portatifs ; les canons antichars portatifs, fusils sans recul ;les lance-missiles et lance-roquettes antichars portatifs ; les lance-missiles aériens portatifs ;les mortiers de calibre inférieur à 100 millimètres, 2. ARMES DE PETIT CALIBRE : les armes destinées à être utilisées par une personne et comprenant notamment : les armes à feu et toute autre arme ou dispositif de destruction tel que bombe explosive, bombe incendiaire ou bombe à gaz, grenade, lance roquette, missile, système de missile ou mine ; les revolvers et les pistolets à chargement automatique ; les fusils et les carabines ; les mitraillettes ; les fusils d'assaut ; les mitrailleuses légères ;3. MUNITIONS : Ensemble des éléments destinés à être tirés ou lancés au moyen d'une arme à feu ou à partir d'un vecteur, comprenant, entre autres : les cartouches; les projectiles et les missiles pour armes légères ; les conteneurs mobiles avec missiles ou projectiles pour système anti-aérien ou antichar à simple action ; 4. AUTRES MATERIELS CONNEXES : toutes composantes, pièces ou pièces détachées ou pièces de rechange d'une arme légère ou de petit calibre qui sont nécessaires au fonctionnement d'une arme ou d'une munition ; toutes substances chimiques servant de matière active utilisées comme agent propulsif ou agent explosif,

2 En référence à la définition des Nations Unies, une arme à feu se définit comme toute arme à canon portative et propulsant des plombs, une balle ou un projectile par l'action d'un explosif, ou conçue à cette fin.

3

3 Le Small Arms Survey « utilise les termes «armes légères et de petit calibre» au sens large pour désigner tant les armes légères et de petit calibre de type militaire que les armes à feu commerciales (armes de poing et armes d'épaule). D'une manière générale, elle adopte la définition utilisée par les Nations unies dans le Rapport du groupe d'experts gouvernementaux sur les armes de petit calibre (Nations unies, 1997): Armes de petit calibre: revolvers et pistolets à chargement automatique, fusils et carabines, fusils d'assaut, pistoletsmitrailleurs et mitrailleuses légères. Armes légères: mitrailleuses lourdes, lance-grenades portatifs amovibles et montés, canons antichars et antiaériens portatifs, fusils sans recul, lance-missiles antichars et antiaériens portatifs et mortiers d'un calibre inférieur à 100 mm.Le Small Arms Survey utilise les termes «armes à feu» et «armes» pour désigner des armes portatives qui tirent un projectile à travers un canon par la mise à feu d'une charge explosive. Les termes «armes légères>> et «armes de petit calibre>> sont utilisés plus généralement pour faire référence à l'ensemble des appareils portatifs, à propulsion ou à détonation explosive ou chimique », V. Small Arms Servey, « Du changement dans la continuité: produits et producteurs », 2004, http://www.smallarmssurvey.org/files/sas/publications/year_b_pdf/2004/2004SASCh1_full_fr.pdf, consulté le samedi à 10h05

transfert "4. Ces transferts d'ALPC ont un rapport étroit avec le conflit armé au Mindanao quoique l'inter-relation entre armement et conflit armé ne soit aisé à démontrer.

La corrélation entre conflits armés et armements (et spécialement transferts des armes) est complexe. Certains prétendent que la question des armements n'a rien à voir avec celle des conflits armés. Ceux-ci ont des racines économiques, culturelles, religieuses, psycho-sociales (peur de l'autre, de l'inconnu, de l'avenir), stratégiques, politiques; plus profondément encore, elles renvoient à l'instinct de mort collectif, expression du péché social qui pousse non seulement à se battre mais à désirer la destruction. Ils font valoir que la « pulsion de guerre " est tellement puissante que, pour qui veut vraiment tuer, n'importe quoi peut devenir une arme. Illustration des attentats du 11 septembre, du génocide au Rwanda en 1994. A l'inverse, d'autres voient dans l'acquisition d'armements la source méme des conflits armés et militent donc pour une interdiction totale du commerce des armes (Lucien DALOZ 2001). A ce sujet, Mervyn PATTERSON affirme que : « C'est une évidence pour tous: là où il y a des armes, il y aura un conflit " (Mervyn PATTERSON 2003). A Laurent LEGER de renchérir «Pas de guerre sans armes, et pas d'armes sans marchand de mort " (Laurent LEGER 2007).

Quoi qu'il en soit, il convient de retenir que : s'il est vrai que les facteurs d'un conflit armé seraient moins liés à l'armement, il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui la prolifération anarchique des armes, particulièrement des Armes Légères et de Petit Calibre participerait à la privatisation de la violence armé et favoriserait le déclenchement et la perpétuation des conflits armés comme celui en cours aux Philippines.

Mais, comment l'armement peut-il être un facteur de conflit armé ? L'acquisition et l'utilisation des armes ne sont t-ils pas légitimes, surtout pour les Etats comme le dispose les

4 Small Arms Servey Yearbook, 2002.

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Transfert des Armes Légères et de Petit Calibre et Conflits armés : Le cas des Philippines

articles 2§4 et 51 de la Charte des Nations Unies ? Aussi, les civils ont-ils le droit de porter des armes. En un mot, comment un facteur naguère vu comme une source de développement a pu se transformer en facteur de conflit armé, en facteur d'insécurité ?

Dans la présente analyse, il sera mis d'abord en exergue les causes premières du conflit de Mindanao (I). Ensuite, l'analyse va porter sur la connexion entre l'armement des belligérants et la continuation du conflit (II). Enfin, un tour d'horizon va permettre de saisir les stratégies régionales pour la lutte contre la prolifération des ALPC (III).

I. MINDANAO, LA MULTI-CAUSALITE D'UN CONFLIT ARME

1. La pauvreté massive et l'injustice économique :

Mindanao fait partie des Îles dotées d'énormes richesses et épargné des aléas climatiques et des catastrophes comme les typhons qui frappent l'Asie du sud-est. L'Île contribue aux exportations agricoles du pays pour 45% elle est un producteur important de cultures industrielles, mais elle est aussi riche en ressources minières et en bois ; elle a un potentiel touristique énorme de par la beauté de ses paysages.

2. La mal gouvernance

Cette mauvaise gouvernance est caractérisée par la corruption, le clientélisme politique, la personnalisation du pouvoir, la violation des droits humains. La bourgeoisie reste en majorité en même temps les gros propriétaires et détenteurs, les gros investisseurs, les gros financiers et les gros boursiers. La démocratie philippine est jeune, cela veut dire qu'elle est encore fragile et donc soumise à la fois aux pressions extérieures internationales et aux pressions de la pauvreté et de la rébellion internes (Olivier Duhayon 2006).

3. L'exploitation des communautés culturelles :

Une portion de la population fait l'objet d'exclusion aux plans économique, social, politique. Elle est appelée « les indigènes ». Leur nombre varie entre 1 et 2 millions, car ils sont dans la forêt, nomades, et ne sont pas recensés exactement. Ils sont dépossédés de leurs terres, et sont perçus par tous les autres Philippins comme des sauvages.

4. La particularité religieuse.

Le pays est composé de : 83% de Catholiques romains, 9% de Protestants, 3% de Musulmans, 5% de Bouddhistes et de 3% pour le reste. Dans les années 80, l'Eglise catholique a été l'un des principaux acteurs du renversement de la dictature de Marcos. Dans le conflit en cours, le facteur religieux pèse fortement. Les «Moros>> (une appropriation de l'argot portugais signifiant «Musulman>>) luttent pour la création d'un Etat islamique dans la région australe de Mindanao. La défense de la spécificité musulmane est renforcée avec le Groupe Abou Sayyaf.

II. L'ARMEMENT, UN FACTEUR NON NEGLIGEABLE DU CONFLIT A MINDANAO

La relation entre l'armement et les conflits armés est assez discutée au sein de la doctrine. Les armes sont une source de développement pour certains alors que d'autres les voient comme des engins conduisant aux conflits. Toutefois, si ce débat a sa place d'être, il reste que tous reconnaissent que la prolifération des armes amplifie les conflits. Particulièrement l'affluence des ALPC constitue un facteur de conflit. Cela est d'autant plus vrai car depuis un peu plus de ces deux dernières décennies, sur quarante neuf (49) conflits, quarante sept (47) sont menés au moyen d'armes légères. Sept cent (700) millions d'Armes Légères et de Petits Calibres (ALPC) circulent dans le monde, dont la moitié entre les mains de civils : si l'on ramène ce chiffre à la population mondiale, un humain sur neuf détient un engin de mort5. Chaque année, les armes tuent en moyenne plus d'un demi-million d'hommes, de femmes et

5 Laurent LÉGER, Trafics d'armes : enquête sur les marchands de mort, Flammarion, 2007 p.10

Transfert des Armes Légères et de Petit Calibre et Conflits armés : Le cas des Philippines

d'enfants. Des milliers d'autres personnes sont mutilées, torturées ou contraintes de fuir de chez elles. La prolifération, la disponibilité et l'emploi aveugle d'armes légères et de petit calibre (A.L.P.C.) ont déstabilisé les régions; alimenté et prolongé les conflits; favorisé l'émergence de nouveaux conflits; rendu les conflits plus mortels; exacerbé le déplacement de familles et de communautés; compromis la valeur et la dignité de la vie humaine; stimulé une culture de la violence; entravé les initiatives de secours et l'action humanitaire; compromis l'espoir d'une bonne gestion des affaires publiques; conduit à l'effondrement de l'État, et empêché la consolidation de la paix ainsi que le développement économique et social. Dans les pays déchirés par les conflits, les gouvernements qui consacrent aux armes de guerre des ressources déjà limitées auront, à terme, du mal à tenir leurs engagements en matière d'éducation, de soins de santé et de logements corrects - qui sont des droits économiques, sociaux et culturels reconnus au niveau international6.

Ces armes sont tellement destructrices que Koffi Annan les a qualifiés de « d'Armes des Destruction Massive >>. En un mot, elles sont au coeur des conflits armés comme celui qui a cours à Mindanao. Mais, comment les différentes factions se procurent des ALPC ? En réalité, il y a diverses sources d'approvisionnement. D'une part, la production locale et artisanale (1) et, d'autre part, les transferts internationaux tant en faveur des forces gouvernementales qu'en faveur des factions rebelles (2).

1. La circulation locale des ALPC

S'approvisionner en armes et en munitions représente une des préoccupations de taille des
groupes armés non étatiques dont les groupes armés rebelles. La régularité et la fiabilité de la
logistique sont fréquemment les points critiques de ces mouvements. Depuis la seconde

6« Droits de l'Homme »,

7

http://www.eda.admin.ch/etc/medialib/downloads/edazen/doc/publi.Par.0225.File.tmp/DroitsHommefr.pdf, consulté le samedi 3 mai 2008 à 10h 25

guerre mondiale, s'est développé un artisanat de production d'armes basé sur l'usage de pièces de plomberie. Ces fusils à un coup appelés « Slam Bang " ou « Paliuntod Gun " sont produits en grande quantité sur l'île de Luçon. Le Paliuntod engendrera le développement d'armes plus sophistiquées, utilisant des munitions de chasse, les « Paltik Guns ", généralement à un coup. Aux Philippines, dès 1972, avec l'application de la loi martiale par le président Marcos, la production artisanale d'armes s'est éteinte pour céder la place aux armes d'importation, plus puissantes et plus fiables, comme le M-16 américain, ou le FN FAL belge. Cependant, cette fabrication artisanale des ALPC n'a pas complètement cessé. Elle s'opère dans la clandestinité surtout dans les zones sous contrôle rebelles. Selon Merliza M. Makinano et Alfredo Lubang (2001), dès 1969, le MNLF en plus d'avoir été soutenu de l'étranger, notamment sous forme de livraisons d'armes et d'entraînement militaire s'approvisionne principalement à partir de sources d'armes à feu illégales à Mindanao comme les armes perdues au cours d'opérations militaires ou policières, la fabrication clandestine, la contrebande, et la fabrication par les rebelles eux-mêmes. Ainsi, ils affirment qu'en 1998, selon les chiffres publiés par la police, quelque 329 985 armes à feu se trouvaient dans le pays, entre les mains d'amateurs d'armes à feu, de chefs de guerre politiques, de bande criminelles, et même de fonctionnaires et d'agents du gouvernement. À Mindanao, les particuliers possèdent des armes à feu pour leur sécurité, pour le pouvoir et le prestige, ainsi que pour des raisons socio-économiques. On dit aussi qu'il est dans la « culture >> des musulmans de posséder des armes à feu, car les musulmans de cette région associent souvent le droit de posséder des armes à feu à leur patrimoine religieux. En outre, l'accès facile aux armes et leur bas prix contribuent à leur prolifération. La contrebande des armes est également répandue, en raison de la configuration géographique du pays, des bénéfices énormes à réaliser, de la connivence de plus en plus courante entre les syndicats criminels et les agents de police, et de la participation de familles politiquement influentes. Encore aujourd'hui,

Transfert des Armes Légères et de Petit Calibre et Conflits armés : Le cas des Philippines

malgré les efforts des gouvernements, les armes à feu prolifèrent à Mindanao (Merliza M. Makinano et Alfredo Lubang 2001). Ils renchérissent en ces termes « As of June 1999, military intelligence statistics suggested that there were 11,777 firearms in the possession of the Southern Philippines Secessionist Groups alone (i.e., MILF, Abu Sayyaf, and NICC/MILO), up from 4,300 in 1976 (prior to 1996 figures include the MNLF). Its peak number of 17,800 firearms in 1995, dropped to 7,230 in 1996 but is steadily rising since then. These statistics, however, do not include the firearms in the possession of communist insurgents, criminal syndicates, political clans or individuals ».

2. / IIIMDMBW IUSLIWDCHICIMIMILEr

Les armes légères peuvent circuler de diverses manières au travers (ou à l'intérieur) des frontières des États : les transferts d'armes licites : ils sont en général définis comme étant des transferts approuvés par tous les gouvernements impliqués dans la transaction (pays importateur, pays exportateur et, le cas échéant, pays de transit) et qui sont conformes à la fois au droit national et au droit international ; les transferts d'armes illicites négociés sur le marché noir : il s'agit de transactions qui violent clairement le droit national et/ou le droit international et qui sont réalisées sans l'autorisation officielle du gouvernement et les transferts d'armes négociés sur le marché gris : il s'agit de transactions dont la licéité est douteuse et qui n'entrent pas clairement dans l'une des autres catégories ; toute une gamme de transferts relèvent de cette catégorie (par exemple, les transactions qui sont autorisées par le gouvernement soit du pays fournisseur soit du pays destinataire, mais non pas par ces deux pays)7.

Les Philippines importent leur armement en provenance de nombreux pays. Selon l'organisation Contrôl Arms, à la fin 2001, le gouvernement américain a offert au

9

7 Le Small Arms Servey parle à ce sujet de transfert légal ou illicite, de transfert autorisé ou non autorisé et de transfert intentionnel ou non intentionnel. SAS, Yearbook 2002.

gouvernement des Philippines de l'équipement militaire d'une valeur supérieure à 100 millions de dollars, dont des hélicoptères, des avions de transport et 30.000 fusils M-16. Cet équipement devait servir pour lutter contre des groupes armés opérant dans l'archipel. Ces transferts faisaient partie de la guerre contre la terreur engagée par les Etats-Unis. En outre, les militaires américains ont également fourni des formations en matière de lutte anti insurrectionnelle.

Toutefois ces formations ne font pas mention des strictes garanties concernant le respect des droits humains, or le mécanismes de surveillance du respect des droits humains aux Philippines est pratiquement non-existant. En conséquence, cette assistance militaire américaine risque d'exacerber la spirale des violations des droits humains, d'aggraver les tensions locales, et de prolonger le conflit armé dans le centre de l'île de Mindanao. Il existe déjà un marché florissant de ventes illégales d'armes légères aux Philippines et l'on craint que l'injection d'équipement militaire américain, qui inclut des armes légères, contribue à une plus grande prolifération de ces armes. Les munitions, perdues, volées ou vendues illégalement, appartenant aux forces armées philippines, atterrissent parfois entre les mains de groupes criminels ou de groupes politiques armées. A Mindanao, par exemple, plus de 70 p. cent de la population détient une ou plusieurs armes à feu. On peut acheter une mitrailleuse pour à peine 375 dollars et un revolver pour seulement 15 dollars. Dans le pays, jusqu'à 82 p. cent des homicides sont dus à des armes légères. En plus des USA, d'autres pays exportent des armes aux Philippines. Le Canada a vendu des équipements militaires, des véhicules blindés légers et des hélicoptères et des moteurs d'avion et des armes de poing aux Philippines. La Belgique, la Chine, Israël exportent des ALPC en faveur du gouvernement Philippin

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De manière générale, l'approvisionnement en armes au profit du gouvernement philippin n'a pas tari depuis 1980. En dépit des périodes de moindres importations, le gouvernement n'a cessé de s'armer. C'est ce que révèlent les tableaux suivants :

Ce tableau fournit une idée des importations des armes par les Philippines depuis 1980. Il s'agit de la valeur de l'ensemble des produits ou équipements militaires qu'un pays se procure à l'extérieur de ses frontières. Ces acquisitions peuvent s'effectuer sous différentes formes (achat, aide, licences manufacturières, etc.) Cette statistique regroupe des armes conventionnelles majeures telles que les avions, les véhicules blindés, l'artillerie, les systèmes de radar, etc. La somme totale est calculée en dollars américains constants de 1990. C'est en 1983 qu'on enregistre le plus haut niveau (136 000 000) et c'est en 2002 qu'on enregistre le plus bas niveau (5 000 000). Le changement enregistré entre la première et la dernière année est 41%. Pour mesurer ce changement, nous disposons des résultats pour presque toutes les années de la période 1980-2006.

Année

Somme estimée en millions de dollars US.

1980

73 000 000

1981

35 000 000

1982

21 000 000

1983

136 000 000

1984

54 000 000

1985

35 000 000

1987

26 000 000

1988

9 000 000

1989

23 000 000

1990

39 000 000

1991

43 000 000

1992

59 000 000

1993

51 000 000

1994

70 000 000

1995

30 000 000

1996

32 000 000

1997

45 000 000

1998

63 000 000

2001

9 000 000

2002

5 000 000

2003

8 000 000

2004

37 000 000

2005

14 000 000

2006

43 000 000

2007*

37 333 333

2008*

40 333 333

Les dernières années, marquées par un astérisque (*), sont des estimations effectuées par
Perspective monde à partir des cinq données précédentes, selon un modèle de régression

linéaire simple. Les fluctuations des demandes varient sans doute en fonction de l'intensitédu conflit.

Après l'échec des négociations de paix en 2007, on voit une hausse des importations exprimée en millions de dollars en passant de 37333333 à 40333333. En somme, le conflit du Mindanao est un facteur important d'armement de la part du pouvoir central. Quant aux forces rebelles, elles bénéficient de soutiens de l'extérieur. Ces groupes armés non étatiques bénéficient de l'assistance armée en provenance de la Chine (Le gouvernement chinois aurait

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par exemple fait parvenir des armes à la New People's Army (NPA, Nouvelle Armée du peuple). La Malaisie et la Libye soutiendraient le Front de Libération Islamique Moro et Groupe Abou Sayyaf. Ce dernier qui serait également soutenu par Al-Qaïda.

III. LE CONTRÒLE DE l'ARMEMENT, UN PAS A FRANCHIR POUR LA RESOLUTION DES CONFLITS ARMES.

La résolution des conflits armés, notamment du conflit qui sévit aux Philippines passe par une maîtrise de la prolifération des armes particulièrement ALPC. Ces dernières, facilement commercialisables, dissimulables, transférables et utilisables méritent d'être sérieusement contrôlées. Ainsi, un arsenal de normes et de structures sont mises en place tant au niveau interne des Philippines (1) qu'au niveau sous régional pour encadrer le foisonnement des ALPC (2).

1. Le contrôle de l'armement : Une préoccupation de l'Etat Philippin

Aux Philippines, diverses normes sont édictées pour lutter contre la prolifération des ALPC. Il en va ainsi des normes législatives, règlementaires et autres programmes administratifs. Les Organisations de la Société Civile (OSC) participent également à cette lutte.

S'agissant des normes, règlements, c'est le Décret présidentiel de 1866 dans son annexe 2 qui régit le contrôle des ALPC. Ce Décret est renforcé par la Loi n°8294. C'est à la Division des armes à feu et des explosifs comprenant le Groupe de la Sécurité Civile et de la Police nationale qu'échoit la compétence d'administrer, d'appliquer et de faire respecter les règles concernant les ALPC et tout autres types d'armes.

Ce sont les Articles 877, 883 et 887 du Code administratif révisé (Loi fondamentale sur les armes à feu) qui encadrent le domaine des ALPC. Selon l'Article 877, on entend par «arme à feu" ou «arme" les fusils, mousquets, carabines, fusils de chasse, revolvers, pistolets et autres armes mortelles qui peuvent tirer des balles, cartouches, missiles ou autres, au moyen de poudre ou d'un autre explosif. Le terme comprend aussi les armes à air comprimé, à l'exception des armes de petit calibre et de portée limitée utilisées comme jouets. Le barillet d'une arme à feu quelle qu'elle soit est considéré comme une arme à feu complète ". Quant à la fabrication et à la circulation, l'article 883 dispose que « Article 883 - Quiconque souhaite fabriquer ou distribuer des armes à feu, des composantes d'armes à feu ou des munitions d'armes à feu, ou des instruments ou articles utilisés ou prévus pour être utilisés dans la fabrication d'armes à feu, de composantes d'armes à feu ou de munitions doit présenter au Président des Philippines une demande de licence précisant le montant qu'il a prévu d'investir dans la fabrication ou l'achat et la vente desdits articles, la classe des armes, munitions ou accessoires qu'il prévoit de fabriquer ou d'acheter et de vendre au titre de la licence demandée, ainsi que tout renseignement complémentaire que pourrait demander le Président de la République à l'examen de la demande. Le Président accepte ou rejette la demande. En cas d'approbation, il fixe le montant de la caution à verser avant l'émission de la licence puis jusqu'à expiration de la licence ou, le cas échéant, de sa révocation par les autorités ". La détention des ALPC est aussi régit par le même Code en son article 887 aux termes duquel il est prévu que : « Quiconque souhaite détenir une ou plusieurs armes à feu pour sa protection

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personnelle ou pour la chasse ou d'autres fins légales uniquement, ainsi que les munitions correspondantes, doit présenter une demande de licence pour les armes et les munitions en question ». Ces dispositions montrent que la législation philippine est plus ou moins étoffée pour lutter contre la prolifération des ALPC. Aussi, pour assurer l'effectivité des normes, il a été crée des institutions comme la Division de la Police et des explosifs. Cette Division est chargée : Superviser et contrôler l'importation, l'exportation, la fabrication, la distribution, la possession, la vente, le transport, la réparation et le port d'armes à feu et de munitions; superviser et contrôler l'importation, l'exportation, la fabrication, la distribution, l'achat, la vente, le transport, la possession et l'utilisation d'explosifs, d'agents de tir, de composants d'explosifs et autres matériaux explosifs; superviser et contrôler la fabrication, la distribution, l'achat et la vente de pétards à mèche et de produits pyrotechniques et de leurs composants; superviser et contrôler les activités des ateliers de réparation, clubs de tir, clubs de chasse et stands de tir; Appuyer les unités de la Police nationale et les autres organes d'application des lois dans leurs enquêtes sur des affaires impliquant des armes à feu et des explosifs; Centraliser tous les registres d'armes à feu du pays; Élaborer des règles et règlements relatifs aux lois sur les armes à feu, les munitions, les explosifs, les pétards à mèche et les produits pyrotechniques, les composants d'explosifs et autres matériaux explosifs et de mener des activités éducatives sur les lois, règles et règlements se rapportant aux armes à feu et aux explosifs et organiser des séminaires sur la sûreté des armes à feu et la détention responsable d'armes à feu (CRC/C/OPAC/PHL/Q/1, par. 9). La société civile est soutenue par des pays comme le Canada dans cette lutte. C'est le cas du Réseau d'Action des Philippines Armes Légères est un réseau de personnes intéressées représentant 14 groupes civils prestigieux à travers les Philippines qui s'efforcent de réduire les retombées des armes illégales individuelles et de petit calibre. Ont assisté au lancement de la campagne du RAPAL, à la résidence de l'ambassadeur du Canada, des hauts responsables de la Chambre des

représentants, du ministère de l'intérieur et des gouvernements locaux, du ministère du Bienêtre social et du Développement, du ministère de l'Éducation, de la Culture et des Sports, du ministère des Affaires étrangères et de la police nationale des Philippines. En plus des mesures internes, une mobilisation au niveau sous régionale est à mentionner.

2. Le contrôle de l'armement : Une priorité de la coopération régionale

La lutte contre la prolifération des ALPC dans le cadre sous régional est une entreprise récente. Reconnaissant les conséquences de cette abondance due la persistance de conflits armés dans certains pays où la demande en armes est assez élevée, de la grande disponibilité d'armes dans les pays qui sortent de guerres ou les programmes de désarmement n'ont été menés que partiellement, de la porosité des frontières et de molles législations nationales en matière d'ALPC, les Etats au sein de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) se sont mobilisés pour combattre cette affluence. Elle a axé sa stratégie sur dans un Plan d'Action global prenant en considération le crime transnational. Ce plan renferme la lutte contre le terrorisme, le blanchiment d'argent, le trafic d'êtres humains et la piraterie. L'ASEAN enjoint aux Etats à des échanges d'informations entre les pays membres et une coopération renforcée entre leurs services de polices ; une harmonisation des systèmes de marquage pour les armes, les munitions, leurs pièces et composants en accord avec le Protocole des Nations Unies ; une collaboration renforcée d'Aseanapol avec Interpol, Europol et les autres organisations internationales et la mise en place des bases de données des trafics dans la région.

Mais, cette oeuvre paraît quelque peu limitée car la question a été envisagée sous le seul angle du combat contre le trafic illicite sans prendre en contre les transferts gris qui est une source importante d'approvisionnement d'armes tant pour les Etats que pour les acteurs non étatiques. Aussi, une réelle harmonisation des législations serait impérieuse car l'écart des

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normes constituent des brèches affaiblissant tout le système. En outre, d'autres pas restent à franchir relativement à la réglementation des activités de courtage en armement, de marquage des armes et de conservation des données enregistrées lors des transferts qui ne sont pas encore effectifs. De même, vue le caractère non contraignant du Plan d'Action, de la politique de la « soft diplomacy » et de non ingérence dans les affaires internes des Etats, il reste à nouer des accords bilatéraux ou multilatéraux entre pays frontaliers. Dans cet esprit, les Philippines et l'Indonésie ont mis en place un mémorandum de collaboration sur la question des ALPC, des munitions, des pièces et accessoires, des explosifs et des composants d'explosifs, dont les points importants sont l'échange d'informations et l'augmentation de la transparence en matière de production, de stockage et transferts d'ALPC. Enfin, le Japon n'est pas indifférent à ces politiques. C'est ainsi que par le biais de la Japanese Assistance Team for Small Arms Management in Cambodia (JSAC) en coopération avec l'European Union Assistance Team for Small Arms Management in Cambodia (EUSAC), un programme de DDR et une Commission Nationale (National Commission for Weapons Management and Reform) ont été mis en place en matière d'ALPC en faveur du gouvernement cambodgien. Ces efforts ont notamment abouti à la mise en place d'une nouvelle loi (Law on management of weapons, explosives and ammunitions) en avril 2005.

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Somme toute, la prévention, la gestion et le règlement des conflits armés qui déchirent la région en particulier passent par une réelle maîtrise des ALPC. Armement et Développement ne font pas toujours bon ménage, surtout dans ce cas précis les armes portent sérieusement une entrave au développement des Philippines. Pour se faire, une véritable lutte doit s'engager contre la prolifération des ALPC sous toutes ses formes car sans paix, sécurité et stabilité, tout processus de développement serait voué à l'échec. Ce conflit ne sera pas définitivement résolu avec la satisfaction des attentes sociales, économique et politiques des différentes factions en jeu. La lutte contre la prolifération des ALPC devrait sérieusement être prise en compte.

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