WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'action humanitaire et la reconstruction: le cas du tsunami indonésien de 2004 et du séisme haitien de 2010

( Télécharger le fichier original )
par Pierre Thibaut BATA
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2011
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

DEDICACES

Je dédie ce travail :

Au Seigneur Dieu Tout Puissant pour l'orientation, le contrôle et la force accordée jusqu'ici pour mener jusqu'au bout tous mes travaux durant mon cursus académique.

A ma feue mère Mme BATA née Ngo Nouga Philomène et à mon père Mr BATA Pierre Roch, qui ont toujours cru aux sacrifices et aux bienfaits de l'éducation.

A tous ceux qui sont confrontés dans leur chair ou devant leurs écrans à la violence, aux souffrances et à la marginalisation. A tous ceux qui la subissent, à tous ceux qui la combattent et militent pour la reconstruction d'un monde plus juste.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

REMERCIEMENTS

Au seuil de la présentation de ce travail, je ne saurais omettre d'exprimer mes sincères remerciements à tous ceux sans le concours multiforme de qui il n'aurait assurément jamais vu le jour.

Je voudrais remercier tout d'abord le Professeur Ernest-Marie MBONDA, non seulement parce qu'il a dirigé ce travail, mais aussi parce qu'il m'a permis de bénéficier de ses conseils pratiques, et ceci malgré ses innombrables engagements.

Mes remerciements vont ensuite à l'Association pour la Promotion des Droits de l'Homme en Afrique Centrale (APDHAC), à l'Université Catholique d'Afrique Centrale (l'UCAC) et à l'Université de Yaoundé II pour la formation reçue.

Je suis également reconnaissant à tout le corps enseignant du Master Droits de l'homme et action humanitaire pour m'avoir formé. Que le Professeur Jean Didier BOUKONGOU, Directeur du Master Droits de l'homme et action humanitaire soit particulièrement remercié pour la formation offerte, la rigueur dans le travail et pour l'opportunité à nous offerte de découvrir le vaste domaine des Droits de l'homme et de l'action humanitaire.

A tout le personnel de la Croix Rouge et spécialement au Dr GALIATCHA pour la disponibilité et l'encadrement durant mon stage académique.

Mes remerciements s'adressent également à tous mes amis et surtout mes camarades de la promotion Simone Weil pour leur soutien multiforme.

La beauté de la finale ne devrait pas faire oublier le début : j'aimerais particulièrement remercier mes parents, mon frère aîné Carlos Nicolas BATA pour son important soutien. Ma gratitude s'adresse également à mon frère Hervé BATA et à mes soeurs Dominique BATA, Marguerite BATA, Joyce BATA, Pierrette BATA, Nicole BATA qui ont été pour moi une source de motivation.

Je ne saurais clore sans remercier mon comité de relecture composé de Igor NGIMA, Mirelle MEFANME, Yvonne NGO OUM, Christelle TCHATCHOU dont l'abnégation aura permis d'accroître la clarté et la lisibilité de ce travail.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

SIGLES ET ABREVIATIONS

AGNU : Assemblée Générale des Nations Unies

BM : Banque Mondiale

CEP : Conseil Electoral Provisoire

CERF : Central Emergency Response Fund

CH : Coordinateur Humanitaire

CICR : Comité International de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge

CIRH : Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti

Ed : Editions

ERC : Emergency Relief Coordinator

ERU : Equipe de Réponse aux Urgences Humanitaires

FAO : L'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture

FIDA : Fonds International de Développement Agricole

FMI : Fond Monétaire International

GAM : Mouvement pour un Aceh libre

HRR : Humanitarian Response Review

Ibid : Ibidem (même chose)

IHNG : Institution Humanitaire Non Gouvernementale

ISDR : Stratégie Internationale de Prévention des Désastres

MDM : Médecins Du Monde

MINUSTAH : Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti

MSF : Médecins Sans Frontières

OCHA : Office for the Coordination of Humanitarian Affairs

OIT : Organisation Internationale du Travail

ONG : Organisation Non Gouvernementale

OP CIT : Opus Citadum (déjà cité)

PAH : Plan d'Action Humanitaire

PAM : Programme Alimentaire Mondial

PF : Pool Fund

PNH : Police Nationale d'Haiti

RDC : République Démocratique du Congo

RFI : Radio France International

SCHR : Programme du Comité Directeur pour l'Action Humanitaire

SCHR : Steering Commitee for Humanitarian Response

UE : Union Européenne

UN : United Nations

UNASUR : Union des Nations Sud-Américaines

UPU : Union Postale Universelle

URD : Urgence, Réhabilitation, Développement

USD : Dollars américain

VSF : Voix Sans Frontières

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

RESUME

Chaque jour des milliers de personnes meurent de faim, se retrouvent sans abris ou sans soins adéquats. Les catastrophes naturelles sont un exemple qui peut entraîner des êtres humains dans des situations qui ne leur permettent plus de survivre par leurs propres moyens. Ce n'est qu'avec le soutien d'autres personnes que ces hommes ont une chance de subsister. L'aide humanitaire est l'une des réponses à la détresse provoquée par ce genre de crise : elle permet de sauver des gens, de les aider à reconstruire leur existence et essaie de leur redonner l'espoir en l'avenir. L'aide humanitaire permet de remédier à la détresse la plus grave. Dans ce sens, beaucoup d'espoirs reposent sur le dos des acteurs humanitaires qui dans la plupart de leurs interventions, restent crispés sur le ressort exclusif qui a promu l'action humanitaire : l'urgence. Celle-ci est certes indispensable, mais il faut reconnaître qu'il devient de plus en plus nécessaire d'élargir le champ de l'action humanitaire à la reconstruction (méme s'il est admis que c'est aux Etats sinistrés qu'incombe le rôle premier de supprimer la cause des crises et de combattre les racines mêmes de la détresse). Ce travail a donc pour but de présenter les principales limites de l'aide humanitaire. L'objectif est de montrer que l'aide centrée sur l'urgence peut parfois diminuer fortement son effet bénéfique. Contribuer en l'occurrence à l'échec de la reconstruction. Le but n'est pas de remettre en question l'aide humanitaire d'urgence, laquelle sera toujours nécessaire, mais de montrer que sa prépondérance dans les situations de crise peut annihiler ou freiner tout espoir de reconstruction.

Mots dles :

Action humanitaire, bénéficiaires, Communauté internationale, crise humanitaire, Dons, Reconstruction, Séisme, Tsunami, urgence humanitaire, MSF.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

ABSTRACT

Every day, thousands of people die of hunger, become homeless or without appropriate treatments. Natural disasters are an example that may lead human beings to states in which they can no more survive by their own means. Their only chance to survive is the support of some other people. Humanitarian aid is one response to the poverty caused by this type of crisis: it saves people, helps them to rebuild their lives and tries to give hope in the future. Humanitarian aid helps to remedy to the worse poverty. That is, hope lies on humanitarian actors who in most interventions, enclose theirselves in the cause of the humanitarian action: emergency. This is certainly essential, but we have to admit that it becomes more and more necessary to widen the field of humanitarian action to rebuilding (even if it is admitted that it falls to the disaster-stricken country to suppress the cause of the crisis and fight the roots of poverty). This work therefore aims at presenting the main limits of humanitarian aid. The goal is to show that aid centered on emergency may sometimes harm more than it relieves, or considerably reduce its positive effects. It may contribute to the failure of the reconstruction indeed. The aim is not to question urgent humanitarian aid, that will always be necessary, but to show that its preponderance in crisis may annihilate or slow down any hope of reconstruction.

Keys words:

Humanitarian Action, Benefactor, International Community, Humanitarian Crisis, Rebuilding, Donation, Earthquake, Tsunami, Humanitarian Emergency, MSF

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

SOMMAIRE
DEDICACES I

REMERCIEMENTS

II

SIGLES ET ABREVIATIONS III

RESUME IV

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIERE PARTIE : L'INTERVENTION HUMANITAIRE EN INDONESIE ET EN

HAITI : ENTRE URGENCE ET RECONSTRUCTION 17

CHAPITRE I: LE CADRE JURIDIQUE DE L'INTERVENTION HUMANITAIRE EN INDONESIE ET EN HAITI 18

SECTION 1 : UN CADRE JURIDIQUE DE L'ACTION HUMANITAIRE LACUNAIRE DANS LE DOMAINE DE LA RECONSTRUCTION. 18
SECTION 2 : LE DEPLOIEMENT INSTITUTIONNEL HUMANITAIRE ET LA MOBILISATION EN INDONESIE

ET EN HAÏTI AU SERVICE DE L'URGENCE. 25

CHAPITRE II: LA MISE EN OEUVRE DE LA RECONSTRUCTION INDONESIENNE ET HAITIENNE: POLEMIQUE ET MALAISE 31

SECTION 1 : LA GESTION DE LA RECONSTRUCTION EN INDONESIE ET EN HAÏTI 31

SECTION 2 : LA PREDOMINANCE DE LA GESTION DE L'URGENCE GENERATRICE DE NOUVELLES CRISES : LES EFFETS PERVERS DE L'ASSISTANCE PROLONGEE 38

DEUXIEME PARTIE : LES FREINS ET LES PERSPECTIVES POST-CATASTROPHE EN INDONESIE ET EN HAITI 45

CHAPITRE I: LES FREINS A LA MISE EN OEUVRE DE LA RECONSTRUCTION 46

SECTION 1 : L'INTERVENTION LIMITEE ET INTERESSEE DES ACTEURS HUMANITAIRES ET L'ABSENCE DE FINANCEMENT COMME UNE ENTRAVE A LA RECONSTRUCTION 46
SECTION 2 : LES PRATIQUES DE L'ACTION HUMANITAIRE COMME UNE ENTRAVE A LA

RECONSTRUCTION. 51

CHAPITRE II: PERSPECTIVES POUR UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA RECONSTRUCTION DANS L'HUMANITAIRE 60

SECTION 1 : PERSPECTIVES INTERNES POUR UNE MEILLEURE RECONSTRUCTION 60

SECTION 2 : LA MISE EN OEUVRE DE L'APPROCHE PARTICIPATIVE ET LE ROLE CATALYSEUR DES ETATS ET DES MEDIAS POUR UNE RECONSTRUCTION EFFICACE. 64

CONCLUSION GENERALE 69

BIBLIOGRAPHIE 70

ANNEXES 77

TABLE DES MATIERES 78

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

INTRODUCTION GENERALE

« L'action humanitaire est celle qui vise, sans aucune discrimination et avec des moyens pacifiques, à préserver la vie dans le respect de la dignité, à restaurer l'homme dans ses capacités de choix. »1. Les désastres humains, sociaux, infrastructurels et économiques générés par les catastrophes naturelles ont appelé de par le monde à une prise de conscience générale de leurs conséquences destructrices. Ainsi, Etats, Organisations Internationales, ONG s'accordent à travers des actes et des décisions sur la nécessité de réduire les effets de ces phénomènes. Le code de conduite pour le mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge précise que « le droit de recevoir et d'offrir une assistance humanitaire est un principe humanitaire fondamental dont devraient bénéficier tous les citoyens de tous les pays »2.

Aussi, a-t-on vu se déployer dans l'urgence, en Indonésie3et en Haïti4, un déferlement de générosité planétaire pour venir en aide aux victimes et exorciser les images cauchemardesques qui inondaient les écrans. Les acteurs humanitaires sur le terrain ont apporté leur soutien aux victimes, pour limiter dans l'urgence les vulnérabilités de ces dernières. Cependant et au regard de la gestion actuelle des crises5 et de la réalité sociale qui y prévaut6, un certain nombre de questions méritent une attention particulière : une fois les morts enterrés, les blessés soignés, les sinistrés regroupés, faut-il considérer que la tâche est achevée ? Faut-il laisser les sinistrés désespérer de l'avenir ? Quand s'arreter ? L'objectif de rétablir l'homme dans ses capacités de choix à travers le procédé de reconstruction semble etre oblitéré par la réduction du champ de l'humanitaire au seul périmètre de l'urgence.

On assimile en effet aujourd'hui la cause humanitaire à l'intervention d'urgence, comme si l'on pouvait se contenter de sauver quelqu'un de la noyade pour ensuite

1 Rony BRAUMAN, L'action humanitaire, Flammarion, « Dominos », Paris, 1995, p. 9.

2 Le code de conduite pour le mouvement international de la Croix-Rouge et du croissant rouge et pour les ONG lors des opérations de secours d'urgence en cas de catastrophes.

3 Le 26 décembre 2004, les vagues du Tsunami ravagent les cotes d'Asie du Sud-est et emportent avec elles plus de 200 000 personnes.

4 Le 12 janvier 2010, un puissant séisme de magnitude 7,3 sur l'échelle de Richter a frappé l'ile d'Haïti prés de la capitale Port au prince occasionnant la mort de plus de 212.000 personnes.

5 Les crises indonésienne et haïtienne.

6 Aujourd'hui en Haïti comme en Indonésie, plusieurs personnes manquent encore du strict minimum pour survivre.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

l'abandonner sur la berge. Dans ce sens, « la restriction des interventions humanitaires aux situations d'urgence ne correspond plus au principe d'humanité qui implique l'obligation d'agir dans toutes les circonstances, et pas seulement dans les circonstances les plus urgentes et les plus tragiques »7.

Au delà de l'enjeu de la protection des populations vulnérables, c'est bien le sens de l'action humanitaire qui est remis en cause, dans ses aptitudes à pouvoir s'inscrire dans la durée. Mais par-dessus tout, c'est bien de la protection de la vie, de l'intégrité physique et morale ainsi que de la dignité de la personne humaine, dont il est question.

I- CONTEXTE DE L'ETUDE

Les catastrophes naturelles occupent de nos jours le devant de la scène de l'actualité internationale. Le 26 décembre 2004 et le 12 janvier 2010, l'Indonésie et Haïti ont été respectivement frappés par un violent tsunami8 et secoués par un puissant tremblement de terre9, occasionnant dans les deux cas, de nombreuses pertes tant sur le plan infrastructurel et économique que sur le plan humain10. Il fallait agir et ce dans l'urgence. Ainsi, à l'occasion de la Conférence de l'Organisation des Nations Unies sur le financement de l'aide humanitaire11 à Genève en Suisse, le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon a appelé la communauté internationale à « redoubler d'efforts pour assurer un financement suffisant permettant de répondre aux urgences et au travail humanitaire qui sauve des vies ». En effet,

7Ernest-Marie MBONDA, L'action humanitaire en Afrique, lieux et enjeux, Paris, Edition des archives contemporaines, 2008, p. 67.

8Beth GREENHOUGH, Tariq JAZEEL et Doreen MASSEY, « Introduction: geographical encounters with the Indian Ocean tsunami », in Geographical Journal, vol. 171, no. 4, Décembre 2005, p. 369.

9 Le 12 Janvier 2010, Haïti est frappé par un violent séisme. Celui-ci fait 300 000 victimes et 1,5 million de sansabris.

10Haïti et l'Indonésie, avant la survenue du séisme et du tsunami connaissent une certaine instabilité, marquée par des crises politiques et des problèmes climatiques. L'Indonésie, particulièrement Aceh est, le théâtre depuis 1976, d'une rébellion, animée par le GAM (Mouvement pour un Aceh Libre), qui s'explique en partie par le sentiment des habitants d'Aceh d'être marginalisés par le pouvoir central de Jakarta et dépossédés de leurs ressources en hydrocarbures. C'est aussi une partie du pays qui vit dans un contexte religieux très sensible.

Haïti, pays qui occupe la partie Est de l'île d'Hispaniola, dans l'archipel des Antilles (la partie Ouest étant constituée de la République Dominicaine), a une histoire faite d'instabilité politique et de catastrophes climatiques. Indépendants depuis 1804, après avoir été colonisés par les Espagnols et les Français, les Haïtiens connurent l'occupation américaine à partir de 1915, puis la dictature jusqu'à la fin des années 1980, avec les Duvalier père et fils. Jean Bertrand Aristide, Président élu au suffrage universel en 1990, est renversé un an plus tard par un coup d'Etat militaire et contraint de s'exiler. Il revient au pouvoir trois ans plus tard, avant de s'exiler à nouveau en 2004, sous la pression de la communauté internationale. Depuis 2006, c'est l'un de ses proches, René Préval, qui préside la République d'Haïti. En plus de cette instabilité politique, l'île est confrontée à de nombreux aléas climatiques.

11 L'ONU appelle à financer l'action humanitaire en 2011, Conférence de l'ONU sur le financement de l'aide humanitaire, à Genève, en Suisse, 25 janvier 2011.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

dans les premiers mois de la crise indonésienne12 et haïtienne, la mobilisation a été sans précédent. En Haïti par exemple, on a noté la promptitude avec laquelle acteurs humanitaires, stars de cinéma, artistes et musiciens se sont manifestés. A coté de cette mobilisation, plusieurs actions concertées ont été mises en oeuvre. D'une part, pendant que Bill Clinton, émissaire spécial des Nations unies pour Haïti était en visite à Port-au-Prince, le conseil de sécurité se réunissait à New York. D'autre part à Bruxelles, l'Union Européenne décidait d'une aide d'urgence supplémentaire et à Saint-Domingue, se tenait une première réunion de donateurs. Au Bénin, pays considéré comme le berceau du peuple haïtien, une collecte de fonds y a été organisée13. Dans le cas du tsunami, la quantité importante des dons14 collectés a conduit certaines organisations humanitaires, à l'instar de Médecins sans frontières (MSF), à appeler à l'arrêt de ceux-ci en sa faveur, en expliquant que ce qu'elle avait reçu était très largement suffisant.

De manière assez contradictoire, un an après le séisme de Port-au-Prince, c'est encore le chaos. Bon nombre de rapports continuent de présenter la situation précaire dans laquelle vit la population. Dans la capitale, c'est à mains nues que les habitants déblaient les décombres. Sur les rares chantiers en cours munis de simples seaux en plastique, parfois de pelles, ils déversent à longueur de journée la terre, les fers à béton, les briques, les gravats, tout ce que le séisme a laissé de leurs maisons, à même les trottoirs et les rues15. La reconstruction est encore au point mort16. Les sans-abris sont toujours dans une situation de précarité, de nombreuses personnes affamées et sans eau potable, et l'épidémie de choléra meurtrière17 rappelle le piteux état sanitaire du pays. En Indonésie, considérée comme un exemple d'une reconstruction plus ou moins réussie, c'est la qualité de cette reconstruction, à travers les programmes élaborés qui est interrogée quand on sait l'importance des moyens

12 Plus de 220 000 morts, dont 40 900 élèves et 2 500 enseignants ; 500 000 personnes déplacées ; 247 hôpitaux et centres médicaux détruits ; 1 755 écoles détruites ou endommagées ; 1 082 enfants orphelins des deux parents et 70 enfants orphelins et qui n'ont plus aucune famille.

13 Dans ce pays qui abrite la seule représentation diplomatique d'Haïti sur le continent africain, associations, ONG et autres particuliers se font un devoir de venir en aide à Haïti. Pour les Béninois, les Haïtiens sont un peuple frère.

14 Le Comité international de la Croix-Rouge a reçu 1,5 milliard d'euros, soit autant qu'en plusieurs décennies pour plus d'un millier de catastrophes naturelles couvertes par le CICR ces dernières années.

15 Pierre SALIGNON et Luc ÉVRARD, « Haïti ne peut plus attendre », in Humanitaire, disponible sur http://humanitaire.revues.org/index841.html, mis en ligne le 07 janvier 2011 (Consulté le 20 février 2011).

16 Oxfam porte un regard sévère sur la situation en Haïti. «Ni l'État haïtien, ni la communauté internationale n'a progressé sur le plan de la reconstruction».

17 L'épidémie a déjà officiellement causé plus de 3 000 décès et affecté plus de 52 000 personnes. Mais, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre de cas pourrait atteindre 70 000, la maladie touchant environ 400 000 personnes au cours des douze prochains mois. De leur côté, les autorités sanitaires et les organisations non gouvernementales (ONG) se déclarent impuissantes à enrayer la contagion.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

financiers récoltés à cet effet. Par ailleurs, si la vie semble avoir repris son cours, force est de constater que l'argent à lui seul ne cicatrise pas les profondes blessures. En effet, les images d'une ville dévastée comme au lendemain d'un bombardement ne disparaissent pas de la mémoire des victimes « d'un revers de la main ». Eléonore LABATTUT18 évoque d'ailleurs le niveau de vie encore très bas d'une partie de la population indonésienne touchée par le tsunami19. Elle souligne par ailleurs que de nouvelles tensions pourraient voir le jour si les efforts dans l'éducation, le développement et l'économie ne s'étendaient pas à ces districts.

Le contraste apparent entre l'état de dénuement des populations sinistrées qui vivent encore aujourd'hui dans une grande précarité et l'objectif de l'action humanitaire de remettre l'homme dans ses capacités de choix nous amène à nous interroger sur la finalité de l'action humanitaire.

II À DELIMITATION DE L'ETUDE

Dans l'optique de bien cerner notre sujet, il est nécessaire d'opérer une délimitation spatiale (A), matérielle (B) et temporelle (C).

A À Délimitation spatiale

Le Tsunami du 26 décembre 2004 qui a tué plus de 200 000 personnes et détruit de milliers de villages côtiers a affecté 12 pays asiatiques20. Notre étude portera particulièrement sur l'Indonésie, considéré comme le pays le plus touché avec plus de 167000 victimes21. Notre étude s'appuiera également sur le cas d'Haïti qui a été violement frappé par un séisme en 2010.

Les terrains d'Haïti et de l'Indonésie siéent à notre étude dans la mesure où ils nous permettent de nous interroger sur la place que les acteurs humanitaires accordent à la reconstruction dans leurs interventions, à travers un questionnement déjà formulé par Jean François MATTEI : « L'urgence humanitaire et Après » ?

18 Eléonore LABATTUT est architecte. Elle a collaboré avec l'ONG Architecture et Développement en Inde en 2005, et a effectué dans le cadre universitaire plusieurs études urbaines et territoriales.

19Six ans après le tsunami, plus de 3000 personnes sont encore sans logement, http://www.rfi.fr/contenu/20091218-6-ans-après-le-tsunami-nouveaux-défis-Aceh.

20 Tous ces pays n'ont pas été également et indistinctement affectés par le tsunami puisque l'épicentre du séisme, qui est à l'origine des raz-de-marée, est situé tout à l'est de l'océan Indien, à proximité de la province indonésienne d'Aceh, au nord de Sumatra, où les trois quarts des victimes ont été recensées.

21THE ASSOCIATED PRESS. « Cérémonies à la mémoire des victimes du tsunami de 2004 en Asie », 26 décembre 2009, http://www.latribune.fr/depeches/associated (Consulté le 11 janvier 2010).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

B- Délimitation matérielle

Notre étude convoquera en premier lieu, les normes contenues dans la Charte Humanitaire et Normes Minimales pour les Interventions lors de Catastrophes naturelles22. Il sera aussi question de faire recours aux différents principes et codes qui régissent les interventions des différents acteurs humanitaires sur le terrain. Il s'agit du Code de conduite pour le mouvement international de la croix rouge et du croissant rouge et pour les ONG lors des opérations de secours en cas de catastrophes, les dix principes de Médecins Sans Frontières. Nous ferons également mention de la responsabilité de protéger, un concept selon lequel les États souverains ont l'obligation de protéger leurs propres citoyens contre des catastrophes évitables, mais en vertu duquel aussi, s'ils refusent ou ne sont pas en mesure de le faire, cette responsabilité incombe à la communauté internationale. Acteurs importants dans les interventions humanitaires, les résolutions et rapports des Nations unies en matière de gestion des catastrophes seront nécessaires dans le cadre de notre travail. Ces textes nous permettront dans le cadre de notre étude, de mettre en exergue la place fondamentale et essentielle que les acteurs humanitaires accordent à l'urgence, ce qui peut être à l'origine du vide juridique que l'on observe aujourd'hui dans le champ de la reconstruction.

C À Délimitation temporelle

L'Indonésie et Haïti sont des pays qui ont connu plusieurs catastrophes naturelles. Loin d'avoir la prétention d'analyser toutes ces catastrophes, notre étude aura pour point de départ l'année 2004 qui représente pour les populations indonésiennes une date significative au vu de l'importance des dégâts occasionnés par le violent tsunami qui a sévi ce jour là dans l'ile. Nous nous référerons également à l'année 2010, Une date qui restera sans doute à jamais gravée dans la mémoire des Haïtiens. Ainsi, prenant pour point de départ l'année 2004 et compte tenu de la survenue de la crise haïtienne en 2010, nos travaux se limiterons en juin 2011, date de la présentation des résultats de nos recherches.

III À DEFINITION DES CONCEPTS

Le sujet sur l'action humanitaire et la reconstruction présente un certain nombre de concepts qu'il conviendrait de clarifier. Il s'agit plus précisément de l'action humanitaire(A) et de la reconstruction(B).

22 Ces normes sont de nature qualitative et précisent les niveaux minimaux à atteindre dans une intervention humanitaire destinée à porter secours aux personnes en détresse.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- / 4D1111010P DnitDire

J.L. BLONDEL définit l'action humanitaire à travers une liste de fournitures et services : « secours nutritionnels et matériels, assistance médicale, démarche contre les mesures arbitraires de détention, visites-entretiens sans témoins, réconfort spirituel, communication avec la famille, recherche de personnes, rapatriements, réunions de familles, couverture de certains besoins culturels comme l'éducation. »23 Cette définition a l'intérêt de mettre en évidence les domaines variés de l'action humanitaire : « assistance ponctuelle, interventions de nature politique, restauration des liens familiaux perturbés, culture et éducation~etc Par ailleurs, elle permet de prendre en compte l'ampleur de la complexité des problèmes que soulèvent des situations ou des crises humanitaires, et sans doute aussi des difficultés à y répondre de façon adéquate »24. Riche en extension, cette définition présente cependant la difficulté de formuler une définition permettant de cerner la notion d'humanitaire.

Rony BRAUMAN quant à lui définit l'action humanitaire comme « celle qui vise, sans aucune discrimination et avec des moyens pacifiques à préserver la vie dans le respect

de la dignité, à restaurer l'homme dans ses capacités de choix

25. Chez BRAUMAN et comme l'a expliqué Ernest Marie MBONDA, « la signification de l'humanitaire réside en premier lieu dans la visée fondamentale de la préservation de la vie, celle-ci étant, pour l'rtre humain au moins, inséparable de la notion de dignité et d'autonomie intrinsèquement liées au concept mrme de l'homme ». Pour lui, cette signification n'est pas neutre car « prend en compte, le grief qui a souvent été formulé contre l'action humanitaire, en l'occurrence, celui prétendant qu'elle installe les individus secourus, dans une situation de dépendance plutôt que de les aider à retrouver leur autonomie, grief auquel répond la dernière partie de la définition : restaurer l'homme dans ses capacités de choix ».

26

Selon Jean François MATTEI, l'action humanitaire est une action qui se noue entre deux consciences humaines. Une action qui consiste à créer des conditions d'un équilibre personnel qui permet à chaque bénéficiaire de se relancer, d'être à mesure de vivre sa vie. Une action qui permet à chaque personne d'avoir au moins un toit, une instruction, un accès

23J.L. BLONDEL, « Signification du mot «humanitaire » au vu des principes fondamentaux de la croix rouge et du croissant rouge », in RICR, N°780, Genève, 1989, pp. 535-536.

24 Ernest-Marie MBONDA, op. Cit. p. 23.

25 Rony BRAUMAN, L'action humanitaire Op. Cit. p. 9.

26Rony BRAUMAN, L'action humanitaire, Op. Cit. p. 9.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

aux soins, une activité productrice de revenus suffisants pour satisfaire les besoins d'une famille.

A la lumière de la définition de Ernest-Marie MBONDA, nous admettons au final que, « l'action humanitaire est une action qui consiste pour des acteurs de catégories diverses, agissant au nom d'un certain nombre de principes ou de valeurs, à déployer des efforts et des moyens humains, matériels et financiers pour délivrer de la détresse des personnes placées par des circonstances plus ou moins exceptionnelles dans des situations particulièrement difficiles »27. C'est celle qui poursuit l'action, accompagne corps brisés et dmes en peine, pour leur permettre de repartir dans la vie, la vraie vie de tous les jours, assurer la vie après la survie. C'est cette définition qui guidera notre travail.

B- La reconstruction

Il n'est pas toujours aisé de donner une définition arretée au concept de reconstruction28. Cependant pour comprendre la notion, il est important de la situer dans le temps29. La reconstruction évoque certaines interrogations : pour qui reconstruire? Avec qui reconstruire?, par qui reconstruire ? et comment reconstruire ?

Jean François MATTEI voit dans la reconstruction, au delà de la remise en l'état des édifices un aspect plus englobant. La reconstruction pour lui, est « la capacité à réussir à vivre et à se développer positivement, de manière socialem ent acceptable, en dépit du stress ou d'une adversité qui comporte normalement le risque grave d'une issue négative »30. Le CICR parlera plutôt de la « transition ». Il s'agit donc de venir en aide aux populations

27 Ernest-Marie MBONDA, Op. Cit, p. 25.

28 Elle s'appréhende généralement selon le dictionnaire Larousse comme « l'action de rétablir dans son état originel », p. 906.

29 D'après une analyse de Bernard HUSSON, affirmer que la reconstruction est à la jonction de l'urgence et du développement signifie qu'elle occupe une temporalité précise, ce que reconnaissent les experts dans le domaine. Une périodisation conventionnelle est la suivante : trois mois pour l'urgence, six pour la réhabilitation, axée sur le retour aux activités productives, puis la reconstruction proprement dite, ne dépassant pas deux ans d'intervalle, si possible. Pour lui, cet échelonnement peut sembler arbitraire, et il l'est d'ailleurs puisque souvent les activités se prolongent au-delà du découpage temporel ci-dessus. Néanmoins, il indique bien les paramètres dans lesquels opèrent les bâtisseurs humanitaires. La reconstruction post désastre s'inscrit donc dans des balises temporelles de l'urgence. Par ailleurs les activités de reconstruction se distinguent de celles du développement. Les premières sont conçues sur les court et moyen termes pour secourir, soigner les victimes et rebâtir toutes sortes d'infrastructures. Quant aux secondes, elles s'occupent en principe du long terme, de la transformation des sociétés vers un avenir supposé meilleur. La reconstruction participe à une logique développementaliste et le fait autour d'un concept charnière, celui de la vulnérabilité, sur lequel il est nécessaire de s'attarder. Cependant, celle-ci ne concerne pas seulement les édifices, ponts et routes mais aussi des questions d'ordre social et psychologique.

30 Un Face-à-face entre Rony BRAUMAN et Jean François Mattei, Quelles frontières pour l'action humanitaire ? Disponible sur http://www.lexpress.fr/actualite/monde/quelles-frontieres-pour-l-actionhumanitaire_483687.html,Propos recueillis par Anne VIDALIE, publié le 15/12/2005 (Consulté le 07/08/2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

sinistrées, les remettre dans leurs capacités de choix en leur remettant la décision de leur futur et en les libérant de la dépendance.

Jean Didier BOUKONGOU en complétant la définition de Mattei, intègre dans la reconstruction le critère qualité. Pour lui en effet, « la reconstruction d'un pays sinistré implique une compréhension fine des déterminants de la crise humanitaire. Si l'on reconstruit à l'identique, on risque de recréer ce qui fut à l'origine de la crise »31. Reconstruire n'est évidemment pas qu'une question logistique ou de moyens32. En effet, reconstruire à l'identique n'a aucun sens quand c'est l'emplacement de l'habitation33qui est à l'origine de la vulnérabilité. La reconstruction doit garantir une réduction des risques ou des vulnérabilités et c'est en cela qu'elle pourra mieux concourir à la répartition équitable des ressources du pays. Au final, la reconstruction pour nous c'est éviter de ne voir que la victime, mais l'humain dans sa globalité, ses besoins, ses capacités, ses aspirations, ses projets et même parfois ses rêves34.

IV -INTERET DE L'ETUDE

Cette étude présente un double intérêt scientifique (A) et social (B) A- L'intérr~t scientifique

L'intérêt scientifique ici suppose l'apport de cette étude dans le monde de la science et de la recherche, en ce qui concerne la problématique de l'action humanitaire et de la reconstruction. Loin d'être des pionniers en la matière35, notre étude en mettant en exergue de façon simultanée les cas de l'Indonésie et d'Haïti présente un intérêt scientifique.

Il nous amène en effet dans le cadre de notre travail à constater que l'instauration d'un véritable débat sur la reconstruction tant sur le plan juridique que sur le plan pratique, permettra au domaine de la science, de relever la faiblesse de l'encadrement du volet de la reconstruction dans le champ de l'humanitaire.

31Jean Didier BOUKONGOU, Gestion de l'action humanitaire, Cours de Master Droits de l'homme et Action humanitaire, 2010-2011, UCAC/APDHAC, Yaoundé, p. 15, inédit.

32 Tous ceux qui ont accompagné un jour le retour de personnes déplacées ou refugiées comprennent combien la reconstruction physique d'une maison est la partie la plus simple du processus de l'aide.

33 Au bord du fleuve, sur une zone inondable.

34 La reconstruction est réalisée pour les morts, les blessés, les vivants d'une population sinistrée tant, dans leur maison, leur chair, dans les hôpitaux, mais aussi dans leurs idées, leurs rêves.

35En ce qui concerne la reconstruction, bon nombre de travaux scientifiques se bornent à mettre en exergue la nécessité de la prendre en compte, sans en donner les voies et moyens.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

B- L'intérêt social

Notre étude sur le plan social, permettra d'envisager de nouveaux mécanismes pour une meilleure prise en compte du volet de la reconstruction, dans les interventions humanitaires.

Ainsi, elle interpelle au premier chef, les acteurs de l'humanitaire. En effet, la connaissance scientifique doit pouvoir guider l'action. Une étude qui met en exergue la problématique de la reconstruction peut permettre aux acteurs de l'humanitaire d'élargir leur champ d'action ou de compétence, dans l'optique d'améliorer les réponses apportées lors de leurs interventions.

Au second chef, notre étude bénéficie à la population sinistrée. En effet, la prédominance de la gestion de l'urgence pose des problèmes en rapport avec la dignité humaine. Notre étude milite en faveur du respect de la dignité des populations victimes des catastrophes.

V - REVUE DE LITTERATURE

Aborder la thématique de l'action humanitaire et de la reconstruction en Indonésie et en Haïti, impose de faire un état des lieux de la question. Il s'agira ici de procéder à une analyse doctrinale de la problématique de la reconstruction telle que développée par certains auteurs.

En effet, certains auteurs appréhendent l'action humanitaire dans un contexte essentiellement urgentiste, alors que d'autres l'inscrivent dans la durée pour parler de la reconstruction. Ce débat théorique soulève un certain nombre de questions36 : A qui revient le rôle de reconstruire ? Où commence et où s'arrête l'engagement humanitaire? En d'autres termes, la reconstruction est-elle inclue dans l'action humanitaire ou fait-elle partie du développement ?

36 A la survenue d'une crise, de nombreux moyens financiers sont souvent collectés pour venir en aide aux sinistrés. Il va sans dire qu'une nécessité de reconstruire s'impose. Cependant elle est oblitérée par la très forte concentration des fonds alloués à la phase d'urgence.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Pour Stéphane CHAUVIER : « Un devoir d'humanité est appelé par une situation d'urgence qu'il s'agit simplement de faire cesser »37. A cet effet, l'intervention humanitaire ne peut s'expliquer qu'au moment où une personne se trouve en situation de danger grave.

« Un devoir d'humanité ne peut, par définition, s'incarner dans une institution permanente »38. Venir en aide à un sinistré c'est porter secours à son prochain. Le devoir d'humanité est un devoir que nous pouvons avoir à l'égard de tout autre homme, dès lors qu'il se trouve dans une certaine situation d'urgence et de vulnérabilité. L'auteur poursuit en disant que « nous n'avons pas besoin d'avoir des relations régulières avec une personne ou d'rtre uni à elle par des liens particuliers pour avoir des obligations de ce genre à son endroit ». Dès qu'il vient à notre connaissance qu'une personne est dans une situation qui appelle notre assistance, nous avons une obligation urgente d'humanité envers elle ou, si l'on préfère, une obligation d'assistance39. A la lumière de ces développements, force est de constater que pour Stéphane CHAUVIER, il n'y a devoir d'humanité qu'au moment où une personne se trouve en situation de danger grave. A ce titre, on ne saurait conclure que la reconstruction fait partie intégrante de l'action humanitaire. Il faut agir dans l'urgence (parfois essentiellement dans le domaine sanitaire) et laisser la tâche de reconstruire aux autorités locales. En valorisant les aspects de neutralité et d'impartialité dans la compréhension de la finalité de l'action humanitaire, l'auteur dans sa conception de l'action humanitaire, met à mal la nécessité pour l'acteur humanitaire de poursuivre son action, en droite ligne avec le respect de la dignité humaine.

Rony BRAUMAN40, (dans le même sillage que CHAUVIER) lors d'un entretien vidéo avec un journaliste de RFI sur le thème de la reconstruction en Haïti après le séisme41, affirme que le procédé de reconstruction, ne fait pas partie intégrante des tâches assignées aux humanitaires. La question posée par le journaliste était celle de savoir si c'était au gouvernement de reprendre la main pour la reconstruction, le médecin répond par l'affirmative. C'est la même réponse qui fut donnée lors d'un face à face avec Jean François MATTEI42. Rony BRAUMAN réaffirme à cette occasion que « la reconstruction matérielle

37 Stéphane CHAUVIER, « Les principes de la justice distributive sont-ils applicables aux nations ? », in Revue de métaphysique et de morale, no1, 2002, p. 125.

38 Ibid.

39

Dans The Law of Peoples, John RAWLS parle de «duty of assistance».

40 Rony BRAUMAN est un médecin français, cofondateur et ancien président de Médecins sans Frontières

41RFI, interview réalisée le dans le cadre de la reconstruction en Haïti, disponible sur http://www.dailymotion.com/video/xhfw9j_rony-brauman-la-reconstruction-en-haiti-apres-le-seisme_news (consulté le 15 mai 2010).

42 Un face-à-face entre Rony BRAUMAN et Jean-François MATTEI. Op.cit.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

est du ressort de l'Etat et non du mouvement humanitaire ». Pour lui, l'action humanitaire se fixe pour objectif d'alléger des souffrances de façon impartiale et pacifique, voire, parfois, de sauver des vies, et non pas de les (re)construire ni d'encadrer des destins. Cela, c'est l'affaire des pretres ou des politiques. L'action humanitaire c'est« l'impérieuse nécessité du sauvetage d'urgence ». L'aide humanitaire, à la différence de l'aide au développement, intervient dans des situations de crise, de conflits, de déplacement des populations, de famine, d'épidémies, de catastrophes naturelles pour aider les plus vulnérables à se redresser et à franchir un cap difficile. Cette perception de l'action humanitaire est également partagée par les MSF ou « french doctors »43. Pour ces urgentistes triomphants, l'urgence est intrinsèquement liée à l'action humanitaire44, seul compte la nécessité de « sauver des corps ». La logique du développement, même humaniste inscrite dans la lutte contre la pauvreté, est ainsi récusée comme expression d'une action humanitaire. Assurément, l'héritage d'Henry DUNANT a connu une fortune45 et c'est grace à l'urgence que de nombreuses vies ont été sauvées. Cependant, si l'on considère que l'Etat sinistré est très souvent dans l'incapacité de se reprendre en main46 et si l'on s'appuie sur les fondements de l'action humanitaire et la finalité de celle-ci, l'on ne saurait considérer l'urgence comme « le tout » de l'action humanitaire. C'est une conception de l'action humanitaire partagée par plusieurs auteurs.

L'essentiel comme le pense Ernest-Marie MBONDA n'est pas en effet « de sauver une vie d'une catastrophe qui l'aurait sans doute annihilée sans cette intervention d'urgence, mais aussi de sauvegarder la dignité des personnes concernées. Or la simple survie ne suffit pas à garantir cette dignité. Celle-ci est autant menacée par une catastrophe susceptible de l'anéantir de façon brutale que par une situation de dépendance prolongée qui transforme un sujet humain en objet d'aide ou d'assistance »47. C'est dans ce sens que certains auteurs s'accordent à dire qu'une action humanitaire n'est pas suffisamment humaine si elle ne vise pas le rétablissement des capacités de choix de tous les concernés.

43 En 1971, Bernard KOUCHNER et Max RECAMIER sont à l'origine de la création de Médecins sans frontières (MSF), ouvrant la voie à ce qui fut présenté plus tard comme l'épopée des « French Doctors ».

44 Le secours d'urgence est né et il prolifère avec la création de nombreuses associations se réclamant du mouvement sans-frontiérisme. Depuis ce moment, pour les acteurs du secteur comme pour l'opinion publique, <4 humanitaire » se conjugue obligatoirement avec <4 urgence ».

45 L'assimilation de l'humanitaire à l'action d'urgence est pratiquement réalisée, et sa propagation sur la scène internationale va s'accélérer avec la vulgarisation du droit d'ingérence.

46 A la survenue d'une crise, le rôle de l'humanitaire dans l'urgence est de sauver des vies, et que la tache ou la mission de reconstruire le pays incombe au premier chef à l'Etat victime de la crise.

47 Ernest-Marie MBONDA, Op.cit. p. 68.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Pour Jean François MATTEI, quand on a sauvé de la mort un homme qui, par ailleurs, a tout perdu, il reste vulnérable car il n'a aucun moyen de redevenir libre, autonome et responsable. L'aide humanitaire a pour rôle de donner à chacun les moyens de (re)construire son existence. Sauver une vie c'est bien, mais ça ne suffit pas. Il s'inscrit dans ce sens dans la logique d'une action humanitaire durable dans ses effets. Reconstruire en son sens « c'est bien donner une maison à quelqu'un pour abriter sa famille, lui permettre d'envoyer son enfant à l'école, de se faire soigner »48. Il affirme à cet effet que : « Quand vous sortez quelqu'un des flots, vous ne pouvez pas l'abandonner sur la berge »49. L'action humanitaire ne donnerait donc sa pleine mesure, qu'en prolongeant le combat pour la survie par un engagement pour la vie, tout en créant les conditions d'un équilibre personnel retrouvé50.

A la différence du « concept cousin »51 de développement durable, qui entend concilier dans le temps croissance économique et respect de l'environnement, l'humanitaire ne doit être durable que dans les effets recherchés précise Jean François MATTEI. D'après lui, c'est une durabilité qui se mesure à l'aune des critères de : capacités de choix restaurées, autonomie retrouvée, projets et espoirs réveillés. Il ne s'agit donc pas d'une action humanitaire conçue pour se perpétuer, « elle a pour vocation de se dissoudre une fois les objectifs atteints C'est l'action humanitaire qui dépasse tout en l'intégrant, la seule urgence pour conduire le débat contre ce qui avilit, conjurer les facteurs qui fragilisent, permettre à chaque enfant, chaque adulte, d'avoir la vie devant soi »52.

Au delà des aspects ci-dessus évoqués, c'est la responsabilité de l'acteur humanitaire qui est mise en cause. « Une responsabilité humanitaire qui s'inscrit dans la durée sous peine de se ramener à des résultats sporadiques d'émotion et à céder ainsi à la logique médiatique de l'instantané »53 « L'urgence est ainsi faite que, souvent, elle ne perçoit son engagement qu'au prisme du corps à sauver sans délai, dans un environnement sociopolitique hostile ou pour le moins difficile. Pris dans l'élan impérieux d'agir,

48 La reconstruction à la charge de l'humanitaire, selon Jean François MATTEI, n'est pas la remise en l'état des infrastructures, des ports, des ponts, des grands édifices etc.

49 Jean François MATTEI, « L'urgence humanitaire et après », op. Cit. p. 155.

50 Jean François MATTEI dans un entretien avec Valérie ROUVIERE, affirme « Je reste convaincu qu'une fois qu'on a sauvé les gens, il faut les accompagner pour un mieux-vivre et une autonomie retrouvée. Après l'urgence, il faut assurer à chaque famille un toit, une école, un centre de santé et un travail. Ce sont les quatre directions dans lesquelles nous travaillons aujourd'hui. »

51 Jean François MATTEI, op. Cit, p. 37.

52 Jean François MATTEI, op. Cit. p. 155.

53 Eric GOEMAERE et François OST, « L'action humanitaire : questions et enjeux », in la Revue Nouvelle, no8, novembre 1996, pp 76-96.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

l'humanitaire d'urgence a tendance à ne voir que la victime, oubliant parfois l'humain dans sa globalité »54. Mary B. ANDERSON s'interroge d'ailleurs : « Aujourd'hui vous me sauvez la vie, mais pour quel avenir ? »55. Comme MATTEI, elle pense qu'il ne s'agit plus ou rarement, de sauver des vies ou de pratiquer les gestes de survie, mais davantage d'assurer un toit provisoire, une écoute, un réconfort aux personnes sinistrées.

Au demeurant, à trop considérer l'urgence56, il est possible de rentrer dans ce que Jean François MATTEI a appelé « les travers de l'immédiateté » ; l'action l'humanitaire perçue aujourd'hui sous ce seul prisme et au regard des crises indonésienne et haïtienne, et particulièrement au regard des défis à relever, participe-t-elle à une vision cohérente et satisfaisante du concept ? Non sans vouloir ériger la reconstruction comme moteur de l'action humanitaire, il s'agit dans un monde où tout événement est capté dans une logique de l'immédiateté, où les événements se chassent les uns les autres à une vitesse accélérée, de garder une perspective globale, dans laquelle la durée de l'action devient non pas l'opposé de l'urgence mais son complément indispensable. L'action humanitaire apporte l'espérance, or « il n'y a d'espérance qu'en pensant à demain, l'espérance a besoin de temps »57.

L'une des conclusions que nous pouvons tirer à la suite de cette revue de littérature est que la question sur la finalité de l'action humanitaire fait débat. Que ce soit du côté de l'urgence ou du côté de la reconstruction, elle a ses fervents défenseurs. Cependant, force est de constater que malgré l'importance de l'urgence dans une intervention humanitaire, la nécessité de penser à la reconstruction s'impose, car très peu prise en compte dans la plupart des interventions humanitaires.

VI #177; PROBLEMATIQUE

Le sujet sur « l'action humanitaire et la reconstruction » peut se décomposer en deux aspects. Le premier étant de considérer l'action humanitaire comme une action qui s'inscrit essentiellement dans l'urgence. Le deuxième aspect quant à lui découle du premier, mais

54 Jean François MATTEI, op.cit. p. 135.

55 Mary B. ANDERSON, « Aujourd'hui, vous me sauvez la vie, mais pour quel avenir ? Sur quelques dilemmes moraux de l'aide humanitaire », in Jonathan MOORE (édit) Des choix difficiles, p.86.

56 En vingt ans, la passion du secours s'est ainsi globalisée, et l'assimilation de l'humanitaire à l'action d'urgence est pratiquement réalisée et sa propagation sur la scène internationale va s'accélérer encore avec le lancement du fameux droit d'ingérence.

57Jean François MATTEI, Op Cit. p. 137.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

cependant épouse une conception encore plus large de l'action humanitaire, dans sa capacité à s'inscrire dans la durée.

Concernant le premier point, la prospection doctrinale plus haut déployée démontre à suffisance la place importante qu'occupe l'urgence dans une intervention humanitaire. Le deuxième point de la décomposition ci-dessus évoquée met en exergue la nécessité de soutenir l'effort de ceux qui, une fois leurs besoins essentiels satisfaits, aspirent à retrouver leur autonomie, composante essentielle de leur dignité, la nécessité d'éviter une situation de dépendance, d'aider des personnes traumatisées physiquement et psychologiquement à surmonter leurs épreuves. Malgré la reconnaissance du caractère crucial des enjeux liés à la reconstruction, celle-ci semble demeurer le parent pauvre de l'action humanitaire. La combinaison de ces deux axes permet de formuler la problématique suivante :

Au regard des normes de l'action humanitaire et au regard de la gestion des crises indonésienne et haïtienne, quelle est la place de la reconstruction dans le champ de l'humanitaire ? Peut-on attribuer la faiblesse de la reconstruction aux normes de l'action humanitaire ou aux facteurs qui l'entourent ?

VII- HYPOTHESE

L'analyse de la gestion des crises indonésienne et haïtienne révèle que le volet reconstruction continue d'occuper une place mineure dans le champ de l'action humanitaire. A cause d'une part d'un encadrement juridique lacunaire et d'autre part à cause des pratiques qui l'entourent.

VIII- CADRE METHODOLOGIQUE

Le cadre méthodologique est constitué de la méthode d'analyse qui est la procédure scientifique de validation de l'hypothèse (A), et de la technique d'investigation (B).

A- / es.1P 115101.115ADODOV

Les deux modèles d'analyse utilisés dans le cadre de cette recherche sont l'analyse juridique (1) et la méthode dialectique (2).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

1- L'analyse juridique

Il faudrait se situer dans une approche juridique au sens de Charles EISENMAN. Selon lui, la méthode juridique consiste en une double démarche : la première est une analyse des textes juridiques, et la seconde est plutôt une exploration de leur condition d'édiction, les interprétations et l'application qui en sont faites par les principaux concernés, c'est-à-dire les acteurs sociaux, véritables destinataires de la règle de droit.

Charles EISENMAN se résume en altérant dogmatique et casuistique dans la méthode juridique. Au sens large, la dogmatique considère la règle de droit conformément à l'armature législative. Au sens strict, il s'agit simplement de l'étude du droit positif. La casuistique nous permettra ici dans le cadre de cette étude, d'appliquer les textes juridiques et les normes au cas particulier de l'Indonésie et d'Haïti. Il sera question pour nous de résoudre les problèmes posés par l'action concrète de l'étude de deux cas similaires.

In fine, cette méthode permettra de confronter les normes internationales consacrant la gestion des crises avec la pratique des acteurs sur le terrain en se référant aux cas particuliers de l'Indonésie et d'Haïti.

2- La méthode dialectique

Cette méthode a pour point de départ la constatation des contradictions dont la réalité est faite. Selon Grawitz58, « la pensée de l'homme doit donc franchir un double écran, celui de ses propres limitations et contradictions, ensuite celui de l'incohérence des choses. » La méthode dialectique oppose deux thèses ; dans notre cas, la position d'urgence d'un coté et la position post-urgente de l'autre. L'utilisation de cette méthode nous permettra de mieux comprendre les rapports antagonistes entre l'urgence et la reconstruction.

B- Technique de recherche

La délimitation du sujet abordé couvre un vaste champ d'investigation du point de vue spatial et temporel59. Seulement les contraintes techniques et de temps rendent difficile un recueil des informations à la source ou encore, le recours à des techniques d'enquêtes courantes en sciences sociales.

58Madeleine GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, 8émeédition, Dalloz, Paris, 1990, §381 p. 490. 59 - Cf. supra, pp 4 à 5.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Aussi ce travail se base-t-il essentiellement sur la recherche documentaire à travers les textes officiels des nations unies, les chartes pour l'intervention humanitaire, les rapports des Nations Unies sur les crises indonésienne et haïtienne, des supports numériques, audio et visuels, documents produits par les ONG qui trahissent et traduisent leur manière de comprendre l'action humanitaire en fonction des situations vécues.

IX- ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN

Cette étude sera axée autour de deux grandes idées en conformité avec la problématique soulevée. Il sera question d'une part, de mettre en exergue l'intervention humanitaire en Indonésie et en Haïti oscillant entre urgence et reconstruction, pour voir comment, malgré les actions menées pour la reconstruction, l'urgence a occupé une place centrale voire essentielle (Première partie). D'autre part, il s'agira d'évaluer cette gestion de l'urgence qui nous permettra d'extirper les freins à la reconstruction y compris les différents moyens envisageables pour une meilleure reconstruction (Deuxième partie)

PREMIERE PARTIE : L'INTERVENTION HUMANITAIRE EN
INDONESIE ET EN HAITI : ENTRE URGENCE ET RECONSTRUCTION

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Bien que de nature différente, le séisme en Haïti et le tsunami en Indonésie ont en commun l'ampleur du phénomène naturel, son caractère massif et dévastateur. La résonance internationale du raz-de-marée en Asie avait été facilitée par la présence de nombreux touristes étrangers. Celle du tremblement de terre dans la petite île des Caraïbes l'a été par la taille de la communauté humanitaire et onusienne présente dans le pays60 , mais aussi par l'importance numérique de la diaspora haïtienne présente en Amérique du Nord et en Europe. Dans l'une ou dans l'autre crise, il a été question d'apporter dans les premiers instants et dans les plus brefs délais une aide aux populations sinistrées ; priorité à l'urgence qui guidait toute action. L'urgence humanitaire suscitée par l'ampleur du drame a ceci de particulier qu'elle draine avec elle une quantité importante d'acteurs et de moyens financiers. Tout se passe en effet comme si c'est le spectacle de la souffrance qu'il s'agit uniquement de faire cesser. Ce qui est à même de fausser les perspectives de reconstruction. La catastrophe naturelle d'une ampleur extrême qui a touché la capitale de Port au Prince semble nous faire revivre le scénario du tsunami de 2004 : appel aux dons, images choc à répétition, mise en place d'une action humanitaire conséquente à majorité centrée sur l'urgence. Les textes juridiques en la matière ne sauraient démentir cet état des choses (Chapitre I). Par ailleurs, six ans après le tsunami indonésien et un an après le drame haïtien l'on s'interroge sur la mise en oeuvre de la reconstruction qui s'avère être lacunaire dans plusieurs domaines (Chapitre II).

60 La Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah) a été déployée en 2004 en vertu de la résolution 1542 du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (30 avril). Composée de sept mille militaires (de dix-huit nationalités, sous commandement brésilien) et de près de deux mille civils, elle a été renforcée par trois mille cinq cents hommes après le séisme.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

CHAPITRE I

LE CADRE JURIDIQUE DE L'INTERVENTION HUMANITAIRE EN INDONESIE
ET EN HAITI

Il existe en effet un cadre juridique de l'action humanitaire qui s'impose à ses acteurs lors de leurs interventions sur les terrains de crises. Cependant à l'analyse de ces instruments à valeur non-contraignante, il est clair de constater que la reconstruction n'apparaît pas comme une priorité humanitaire (section I). Par ailleurs, lorsqu'on observe les cas indonésien et haïtien, il est aisé de s'accorder sur le fait que les acteurs humanitaires dans leurs interventions, s'arriment au rythme de l'urgence. Ce qui est pour la plupart du temps à l'origine de nouvelles crises (section II).

Section1 : Un cadre juridique de l'action humanitaire lacunaire dans le domaine de la reconstruction.

Nous verrons en effet ici que l'état actuel du cadre juridique de l'action humanitaire favorise une limitation de celle-ci à l'urgence. On pourrait faire allusion à la charte humanitaire et le code de conduite pour le Mouvement International de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et pour les ONG lors des opérations de secours en cas de catastrophes qui n'intègrent presque pas les éléments de reconstruction (il faudrait opérer une gymnastique interprétative lorsqu'ils existent) (Paragraphe 1), ou encore de la réforme humanitaire qui, malgré des évolutions, s'inscrit toujours dans une dynamique urgentiste (dans le cadre du financement et de l'approche de responsabilité sectorielle) et du cadre de la responsabilité de reconstruire(Paragraphe 2).

Paragraphe1 : La charte humanitaire et le code de conduite dans la logique de la
reconstruction : une nécessité d'interprétation.

En dépit du fait que la Charte humanitaire (A) et le code de conduite (B) ont été mis en place pour palier les défaillances des réponses humanitaires, la contribution de ces textes demeure insignifiante en ce qui concerne la reconstruction.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- La charte humanitaire et sa contribution limitée sur le plan de la reconstruction

Il faut avouer que la contribution de la charte humanitaire en matière de reconstruction se trouve vraiment limitée, voire inexistante61. Pour déceler les traits qui pourraient faire allusion à la reconstruction, il faudrait se livrer à une « gymnastique interprétative ». En effet,

on pourrait faire allusion à l'un des principes qu'elle promeut à savoir : « la dignitéhumaine»62 qui s'inscrit aussi bien dans le court terme que dans le long terme. La dignité est

inhérente à toute personne humaine et ne souffre d'aucune contestation. C'est bien dans ce sillage que s'inscrit la reconstruction. Dans le même ordre d'idées, il est précisé que, les informations figurant dans ce manuel ne sont pas prescriptives. Elles peuvent donc être appliquées de manière flexible à d'autres situations, comme la préparation en vue de catastrophes et la « transition suivant l'aide humanitaire ».

Cependant malgré l'affirmation du droit humain fondamental à vivre dans la dignité et la possible utilisation de la charte dans les situations de transition, nous pouvons constater que dans tout le manuel, l'accent est mis sur « la satisfaction des besoins urgents de survie des populations affectées par la catastrophe »63. Cet aspect apparaît clairement dans la définition de « sphère » spécifiquement sur l'une de ses convictions qui recommande de « prendre toutes les mesures possibles pour atténuer les souffrances humaines causées par les calamités(...) ». Par ailleurs, il est clair de noter que, malgré les révisions approfondies contenues dans l'édition 2004 qui tiennent compte des progrès techniques récents et des réactions et commentaires reçus d'organisations qui utilisent le projet Sphère sur le terrain, une place importante continue d'être accordée à l'urgence au détriment de la reconstruction. Dans les propos introductifs des principes de la charte, il est écrit : « Nous réaffirmons notre foi en l'impératif humanitaire et en sa primauté C'est dire que nous sommes convaincus que toutes les mesures possibles doivent être prises pour prévenir ou atténuer les souffrances humaines qu'engendrent conflits et calamités, et que les populations ainsi touchées sont en droit d'attendre protection et assistance ». De plus dans le cadre des questions transversales, il est mentionné que bien que la Charte humanitaire soit un énoncé général de principes

61 Elle se borne en effet à affirmer le droit des populations affectées à vivre dans la dignité sans préciser à long terme quelles sont les modalités pour y parvenir.

62 Les populations affectées par une catastrophe ont le droit de vivre dans la dignité

63 Projet sphère, Charte humanitaire et normes minimales pour les interventions lors de catastrophes de 2004, p. 412

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

humanitaires, le présent manuel ne saurait à lui seul constituer un guide d'évaluation complet ni un ensemble de critères pour l'action humanitaire64.

B- Le code de conduite et une prise en compte presqu'inexistante du volet de la
reconstruction

Le «Code de conduite pour le Mouvement International de la Croix-Rouge et du

Croissant- Rouge et les ONG lors des opérations de secours en cas de catastrophe » est le premier engagement des organisations humanitaires internationales à faire appel à la notion d'obligation et de responsabilité en matière d'assistance humanitaire65. Cette responsabilité s'articule autour de dix principes66 dont le premier met en exergue la fondamentale mission de l'humanitaire qui consiste à « soulager les souffrances des victimes les moins aptes à en supporter les conséquences ». Le primat continue d'être accordé à l'urgence. Par ailleurs, présentés dans un esprit d'ouverture et de coopération, ces principes directeurs sont donnés à titre d'orientation. Ils ne sont donc pas contraignants et de ce fait limitent les réflexions sur un éventuel prolongement de ces textes vers la prise en compte de la reconstruction dans le champ juridique humanitaire. Cette pauvreté juridique en matière de reconstruction s'observe également dans le cadre de la réforme humanitaire.

Paragraphe2 : Une réforme humanitaire essentiellement tournée vers l'urgence, et les
difficultés de mise en oeuvre de la responsabilité de protéger.

Conçue pour une réponse humanitaire « S45YMEOTIQ tRuTHMICHRQUAu4gICH »67, la réforme humanitaire (A) ne prend pas en compte ou alors très peu les aspects liés à la reconstruction. Par ailleurs, malgré la présence notoire de « la responsabilité de reconstruire » (B) dans le cadre général de la responsabilité de protéger, la reconstruction continue de souffrir de sa difficile mise en oeuvre.

A- La focalisation de la réforme humanitaire dans le domaine de l'urgence

64 Tous ces exemples démontrent à suffisance la place secondaire que les ONG accordent à la reconstruction. Cette dernière n'entre pas, tout au moins à la lecture de la charte, dans le champ de leurs interventions et par là même dans le champ de l'action humanitaire contemporaine.

65 Toutefois, le texte y fait référence en termes de principes généraux : non discrimination des secours, non instrumentalisation en faveur d'options religieuses ou politiques, indépendances par rapport aux gouvernements, respect dans le cadre des interventions destinées à sauver des vies.

66 Ces dix principes figurent dans le code de conduite en annexe 1.

67ONU, Rapport de l'ex Secrétaire Général des Nations Unies KOFI Annan, dans une liberté plus grande, développement et respect des droits de l'homme pour tous. (A/59/2005).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Malgré les évolutions observées, cette réforme reste lacunaire surtout dans le domaine de la reconstruction. La réforme humanitaire s'appuie sur quatre piliers essentiels qui sont : l'approche de responsabilité sectorielle ou « cluster approach », le coordonateur humanitaire, les mécanismes de financement et le partenariat global entre les agences onusiennes et non onusiennes (Global Humanitarian Partnership). Ces piliers de la réforme ont été institutionnalisés par les NU afin d'apporter dans l'urgence une réponse plus efficace, plus diligente et plus adéquate lors des interventions humanitaires. Cependant, en ne tenant presque pas compte de l'un des objectifs de l'action humanitaire dont l'objet est de remettre l'homme dans ses capacités de choix, peut-on réellement considérer que la réforme à travers ses piliers améliore effectivement l'action humanitaire en ce qui concerne la reconstruction, lorsque celle-ci continue de s'inscrire dans une dynamique essentiellement urgentiste. Pour mener cette analyse, nous nous arrêterons particulièrement sur deux piliers. A savoir le financement et l'approche cluster68.

> Le financement

Le financement est un pilier indispensable dans la réussite de toute intervention humanitaire, en ce sens qu'il ne peut y avoir de déploiement sur le terrain sans la disponibilité des fonds. La faible couverture des besoins (16%) observée lors des interventions humanitaires a fait naître plusieurs mécanismes dans le cadre de la réforme en concordance avec les principes de la Good Humanitarian Donorship Initiative. Il s'agit du CERF et Pool Fund.

A partir de la résolution des NU de l'Assemblée Générale du 15 décembre 2005 et dans le cadre de la réforme, on perçoit aisément la réaffirmation du primat de l'urgence sur la reconstruction. Le Central Emergency Response Fund (CERF) a en effet été mis en place afin d'améliorer « la prévisibilité et la rapidité du financement lors des urgences... ». Il apparaît comme un outil indispensable pour la réussite de l'action humanitaire à travers l'usage de trois méthodes de financement, toutes centrées sur l'urgence. Il s'agit d'abord du volet prêt69 qui est d'environ 50 USD ; ensuite le volet don pour les réponses rapides qui représentent plus de 2/3 des concessions du fond, soit 300 millions USD pour les urgences humanitaires ; et enfin du volet allocation aux urgences sous financées de l'ordre de 1/3 des concessions du

68 Le choix de ces deux piliers se justifie par le fait que, il ne saurait y avoir d'intervention humanitaire sans financement. De même, la coordination se veut plus efficace et renforcée par l'entremise de l'approche « cluster ». Ces piliers de la reforme des NU sont d'une importance capitale pour sa réussite.

69 Il constitue pour les organisations humanitaires un outil d'auto financement qui renforce leur flexibilité financière afin de combler leur lacune de financement.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

fond soit 150 millions USD. Par ces mécanismes, le CERF a été implémenté afin de renforcer l'actuel fond central auto-renouvelable. Excellent élément pour les projets vitaux des urgences humanitaires70, le CERF n'intègre pas des aspects liés à la reconstruction et c'est dans ce meme sillage que s'inscrit le Pool Fund.

« Le Pool Fund a pour but essentiel de contribuer à l'amélioration de la réponse de l'action humanitaire au travers des financements octroyés par les bailleurs de fonds pour les (besoins d'urgence) dans tous les pays dotés d'un coordinateur Humanitaire »71. C'est un fond d'urgence qui ne prend en considération que les six premiers mois de la crise. Aussi, dans le cadre du Pool Fund, les ONG urgentistes sont plus financées que celles qui s'inscrivent dans le long terme. Comme le CERF, le PF améliore la réponse humanitaire72, mais n'intègre pas le volet de la reconstruction. Qu'en est-il de l'approche de responsabilité sectorielle ?

Dans le cas du conflit en RDC par exemple, on a pu reprocher une certaine myopie à ces deux mécanismes73 qui se sont montrés impraticables au-delà du court terme et inaptes à garantir un financement prévisible sur le long terme alors que la crise congolaise est de nature prolongée. A ce sujet, certains organismes qui travaillent sur le terrain avancent que « ce sont les populations vulnérables du Congo qui perdent dans ce jeu des priorités et des interventions à court terme »74. Une ONG internationale par exemple signale qu'elle a facilement accédé aux fonds du Pool Fund ou du CERF pour financer une opération anticholéra de trois mois à Goma, mais qu'il lui a été beaucoup plus difficile de se faire débloquer des fonds pour un programme sanitaire plus substantiel qui devait faire face aux récurrences annuelles du choléra suite à la disparition des services de santé publique en RDC. En Ituri, des bénéficiaires ont exprimé leur souci de ne voir financés que les trois premiers mois de leur déplacement, sans savoir s'ils recevraient une assistance adéquate au-delà pour leur permettre de se réinstaller chez eux dans des conditions viables. Dans des cas semblables, certains organismes trouvent plus faciles de se mettre en cheville avec des donateurs bilatéraux,

70 Introduction au CERF, in http://cerf.un.org (consulté le 10 avril 2011).

71 RDC- humanitaire/pool fund, in http://www.rdc-humanitaire.net/ (consulté le 10avril 2011).

72 Il améliore la réponse humanitaire par de nouveaux programmes et stratégies tel que le PAH avec pour finalité la prise en compte des réalités urgentes sur le terrain de la crise.

73 Au CERF et au Pooled Fund, entre l'identification des besoins et le versement de l'argent sur le compte de l'organisme opérateur, le déboursement des fonds peut prendre jusqu'à six mois (il s'agit en effet primairement de sommes destinées à couvrir des urgences sous-financées, plutôt que d'une réponse rapide). C'est pourquoi, pour la plupart des acteurs, le mécanisme de réponse rapide mis en place par l'UNICEF/OCHA, qui ne prend que quelques jours, est plus approprié aux réponses rapides.

74 UN, opinion exprimée sur, www.undg.org/docs/7689/UNDAF%Final%20(9%20%August).doc (Consulté le 12 février 2011)

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

suivant un modèle plus traditionnel qui leur permet finalement une plus grande flexibilité et des réactions plus adaptées à la réalité.

> L'approche de responsabilité sectorielle

Comme le financement, l'approche de responsabilité sectorielle est une composante de la réforme humanitaire. Un groupe sectoriel ou cluster a pour mission entre autres, de se déployer dans toutes situations d'urgence majeure 75 qu'elle soit nouvelle ou en cours. Ainsi, les clusters leads sont nommés promptement et dans les situations d'urgences majeures. Il n'existe donc pas une rigidité dans cette désignation (les clusters lead ne sont crées en principe que dans les situations d'urgence). En RDC encore, certaines organisations ont rejeté en bloc l'approche cluster. Elles remettent en question la nécessité de ce rôle d'« intermédiaire » automatique entre les donateurs et les opérateurs : elles avancent que dans la majorité des cas, cette étape supplémentaire n'apporte rien et ne fait que gaspiller de l'argent. C'est une approche qui se trouve déjà limitée au niveau de l'urgence. En multipliant les réunions et les rencontres, on n'accélère pas toujours les réactions pratiques. Que peut-on espérer dans un tel contexte pour la reconstruction ? Dans le Nord Kivu, par exemple, un spécialiste en santé raconte que suite à une irruption de malaria, Médecins Sans Frontières a unilatéralement décidé de distribuer des moustiquaires alors que « les responsables du cluster' santé étaient encore en train d'ergoter autour d'une table plusieurs mois après ».

Les relations en droit international sont guidées par le respect de la « souveraineté des Etats ». Cependant, la nécessité d'une ingérence humanitaire (en cas de crise occasionnant d'importants dégâts) semble fragiliser ce principe fondamental. Qu'est ce qui peut justifier le fait que, malgré la vulgarisation du droit d'ingérence sous le joug de « la responsabilité de protéger », celui-ci continue d'être marginalisé au motif de « la souveraineté » des Etats. Il faut le noter, la souveraineté des Etats utilisée comme une arme peut dans un contexte de crise affaiblir la reconstruction.

75 L'IASC définit une urgence majeure comme « toute situation présentant des besoins humanitaires suffisamment complexes et à une échelle suffisamment vaste pour justifier une aide et des ressources extérieures importantes et exigeant une réponse multi sectorielle qui implique un large éventail d'intervenants humanitaires internationaux ».

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

B- La responsabilité de protéger et la prise en compte de la reconstruction

Le rapport publié par la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats porte sur la question du « Droit d'intervention humanitaire »76, plus connu sous le vocable de « la responsabilité de protéger »77. Cette responsabilité intègre les aspects aussi bien de l'urgence que ceux de la reconstruction. En effet, dans ce rapport de la commission et contrairement aux textes ci-dessus évoqués, une place de choix a été accordée au volet de la reconstruction. Notamment dans le point 5 qui traite essentiellement de la « responsabilité de reconstruire ». Cette responsabilité met en exergue les obligations inhérentes aux acteurs humanitaires après l'intervention d'urgence. Il s'agit entre autres de l'obligation de consolidation de la paix. Le paragraphe 5 alinéa1 mentionne que : « la responsabilité de protéger implique non seulement la responsabilité de prévenir et de réagir, mais aussi celle de compléter la réaction et de reconstruire (i) ». Pour atteindre cet objectif, un financement conséquent s'avère nécessaire, ainsi qu'une collaboration avec la population locale. L'alinéa 4 du meme paragraphe précise par ailleurs que, « le meilleur moyen de parvenir à une vraie réconciliation c'est d'oeuvrer à la reconstruction ». Trois domaines fondamentaux guident en effet cette responsabilité. A savoir la sécurité, la justice et le développement. Il faut noter dans un cadre général que, la responsabilité de reconstruire demeure soumise au principe de subsidiarité. En effet, l'application de la responsabilité de protéger fait face à des défis considérables, au premier titre desquels la présence de l'indispensable volonté politique et d'un consensus international. D'autres écueils comme, le manque de moyens et le manque de capacités des acteurs existent.

En dépit des avancées que proposent ces différents textes, nous nous rendons à l'évidence que, la reconstruction continue d'occuper un rôle second dans le champ de l'action humanitaire.

76 Mario BETTATI, professeur de droit international public à l'Université Paris II, et de Bernard KOUCHNER, homme politique français qui fut l'un des fondateurs de Médecins sans frontières. Ils voulaient s'opposer, selon l'expression du second, à "la théorie archaïque de la souveraineté des Etats, sacralisée en protection des massacres".

77 Le concept de Responsabilité de protéger est apparu en 2002, dans le sillage du rapport Brahimi sur les opérations de paix. La Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats, créée à l'initiative du Canada et d'un groupe de grandes fondations, délivre alors un rapport sur le principe et les modalités de la Responsabilité de protéger (rapport Evans-Sahnoun). Les conclusions de cette réflexion majeure seront reprises, en 2005, par le rapport du Groupe de Haut Niveau sur les menaces, les défis et le changement, ainsi que par le Secrétaire général, dans le contexte de la réforme des Nations Unies.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Section 2 : Le déploiement institutionnel humanitaire et la mobilisation en Indonésie et
en Haïti au service de l'urgence.

Les crises indonésienne et haïtienne ont la particularité d'avoir en commun (du fait d'avoir occasionné plusieurs pertes en vies humaines et matérielles) suscité une déferlante planétaire de générosité à travers une mobilisation sans précédent, qui a drainé avec elle une quantité importante de dons et promesses de dons pour la gestion de l'urgence (Paragraphe1). Il faut noter cependant que lorsque celle-ci se prolonge, d'autres crises sont susceptibles de voir le jour (Paragraphe2).

Paragraphe 1 : La mobilisation des acteurs classiques de l'action humanitaire et celle
des médias.

À événement exceptionnel, réaction exceptionnelle. Les tragédies du 26 décembre

2004 et du 12 janvier 2010 ont soulevé une contre-vague émotionnelle d'une ampleur inouïe. « L'émotion mondialisée a convoqué l'humanitaire au chevet des victimes »78 : Organisations internationales et associations, Etats et forces armées, Organisations Non Gouvernementales se sont grandement mobilisés ; à cela s'ajoute la présence massive des médias et des donnateurs privés qui sont considérés de plus en plus aujourd'hui comme des acteurs clés de l'humanitaire79. L'urgence a été en effet une priorité tant pour les organisations humanitaires classiques (A) que pour les médias (B).

A- La mobilisation des acteurs clallITXelASTAlWYMRQ AIIRTDQ11111e

Il n'aura en réalité fallu que quelques heures, lors du Tsunami indonésien et du séisme haïtien, pour que soient activés des centres opérationnels d'urgence (Sociétés Nationales de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge). Des cellules de crises sont mises sur pieds, associant plus ou moins des cadres nationaux du secourisme. Nous notons à titre d'exemple dans le cas du Tsunami, la mission assurée avec dévouement par de jeunes équipiers bénévoles originaires d'une vingtaine de départements, mission qui a permis d'entourer les enfants et les adultes choqués et traumatisés par le sinistre. L'urgence impose en effet une réponse immédiate ; dans ce sens, tous les opérateurs humanitaires, les gouvernements, les agences

78 Jean François MATTEI, DECENt, p. 50.

79Le développement exponentiel de nouvelles technologies de l'information et de la communication hisse les médias à un rang considérable des interventions humanitaires, par le fait même du rôle détermine(a)nt qu'ils jouent dans ces crises.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

internationales compétentes en Europe et sur les autres continents, déclenchaient leurs procédures d'intervention rapide. Un véritable fourmillement, cartes de la région à l'appui, électrisaient les sièges nationaux des grands opérateurs de la solidarité internationale pour réunir les moyens logistiques, trouver les possibilités de transférer du matériel, mobiliser les volontaires afin de porter secours à des victimes déjà chiffrées à plusieurs dizaines de milliers. Et cela sous la pression croissante d'une opinion qui, après la stupeur devant le déferlement en boucle des premières images, voit dans l'humanitaire, la nécessité ultime de conjurer l'impensable (l'urgence guide toute action). En Indonésie, dès le 26 décembre et après que le gouvernement s'est résolu à lancer un appel à la solidarité internationale, une Equipe de Réponse aux Urgences humanitaires (ERU) a atterrit à Medan sur l'ile de Sumatra. La cellule téléphonique du centre opérationnel d''urgence a été prise d'assaut, le site internet de l'association a littéralement explosé. Les appels ont inondé le standard, pour faire un don, aider s'informer, comprendre, voire simplement pour parler80. Pendant prés d'un mois et week-ends inclus, les associations humanitaires de référence81 ont accueilli toute la compassion qui s'est emparée de ces pays82.

En Haïti aussi, une mécanique de réponse à l'urgence s'est mise en marche. La Croix-Rouge française a mobilisé toutes ses capacités humaines et matérielles. Cinq Equipes de Réponses aux Urgences (ERU), soit 93 équipiers spécialisés en santé, eau/assainissement et distribution, ont été mobilisés durant près de 4 mois avant que ne débute tout le travail de post-urgence. À ce jour, 32 délégués en mission internationale sont toujours présents sur le terrain, appuyés par près de 250 collaborateurs nationaux83. En dehors de la présence des ONG locales déjà très nombreuses, nous notons aussi dans le cas d'Haïti, la forte implication des organisations Onusiennes. L'équation logistique, infiniment difficile à résoudre a facilité dans les cas haïtien84 et indonésien, un afflux massif de secours, émanant de forces armées

80 Jean François MATTEI, Op Cit, p. 33.

81 Médecins Sans Frontières, Handicap International, Action Contre la Faim, Médecins du Monde, Solidarités qui devient Solidarités International, Agence d'Aide à la Coopération Technique Et au Développement (ACTED),Première Urgence, Aide Médicale Internationale, Care France, Secours Islamique, Triangle, Comité d'Aide Médicale, etc. D'autres organisations caritatives agissent dans le domaine humanitaire : la Croix Rouge Française, le Secours Catholique, le Secours Populaire, etc.

82 Nous parlons dans un cadre général des pays qui ont été touchés par le Tsunami.

83 Il s'agit de la plus importante mobilisation de la Croix-Rouge française à l'international.

84 La France a colonisé Haïti jusqu'en 1804 où ce pays obtenait son indépendance après une révolte d'esclaves. Soutenu par les États Unis, Paris imposera un embargo militaire pour obliger Haïti à lui payer des réparations pour la libération des esclaves ! Port-au-Prince emprunta auprès de l'étranger pour payer. La dette fit soldée en 1947 par un dernier emprunt aux États-Unis !De son côté, les États-Unis ne reconnurent pas l'indépendance d'Haïti par crainte des répercussions d'une telle décision sur la situation interne avec ses millions d'esclaves. L'embargo américain sera maintenu jusqu'en 1863. En 1915, le président Wilson envoie des troupes pour mater une révolte d'haïtiens. Jusqu'en 1934, les Américains contrôleront le pays, percevant les droits de douane,

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

étrangère, notamment française et américaine. Une communion s'est donc créée autour de ces catastrophes dans l'optique, pour parler comme Jean François MATTEI, de donner une réponse humanitaire sans délai. Le rôle des médias dans ce sens est d'un apport indéniable.

B- Le rôle des médias dans la mobilisation en Indonésie et en HaïtiLes médias, qu'ils soient publics, privés, confessionnels ou associatifs, remplissent

généralement un ensemble de fonctions classiques, répertoriées depuis longtemps par les chercheurs et spécialistes85.

Dans l'urgence, le rôle des médias a été déterminant (tant en Haïti qu'en Indonésie) dans ce processus de type cathartique, relayant la puissance sensationnelle des images qui abondaient dans les rédactions. A la manière des « prêtres modernes»86, ils ont orchestré l'élan de générosité. Non seulement ils furent fournisseurs d'émotions, mais certains d'entre eux se sont également posés en acteurs directs de l'engagement humanitaire, lançant euxmémes des souscriptions, des partenariats, des parrainages. Ils ont incarné dans l'urgence, un rôle de prescripteurs comme jamais auparavant. Cette hypertrophie de la fonction médiatique eut naturellement des effets très bénéfiques. Les organisations humanitaires eurent la chance exceptionnelle de pouvoir s'appuyer sur des leviers de solidarité irremplaçables que furent les spots diffusés gratuitement par les grandes chaines de télévision et de radio et bien d'autres supports, si nombreux qu'il est impossible de les citer tous. C'est dans l'urgence que tout est réalisé. Et cette mobilisation médiatique a fonctionné comme un inimaginable amplificateur d'une générosité dont les associations humanitaires ont été les récepteurs87.

Paragraphe 2 : Un afflux massif des dons en Indonésie et en Haïti pour l'urgence

Dans les premiers mois qui ont suivi les catastrophes indonésiennes et haïtienne, la population sinistrée et la communauté internationale vivent au rythme des images cauchemardesques qui inondent le petit écran. L'objectif étant de susciter un élan de générosité et ce dans les plus brefs délais. D'un seul élan, l'ensemble de la société était à pied d'oeuvre. ONG, entreprises, fédérations associatives, pouvoirs publics... tout le monde s'y est

collectant les impôts et dirigeant de nombreuses institutions gouvernementales. De 1957 à 1986, Haïti connaît les dictatures de «Papa Doc» Duvalier et de son fils «Baby Doc», soutenus économiquement et militairement par les Américains. Durant ces deux périodes, les USA mirent directement ou indirectement le pays en coupe réglée.

85 Information : recherche, traitement, diffusion de l'information et expression d'opinion Économique : lieu de mise en valeur des biens et services, intermédiaire entre offreurs et demandeur: c'est par les médias qu'on reçoit l'essentiel des informations sur la vie sociale et politique. Ils influencent aussi le comportement de l'individu, qui tend à s'identifier au public ; fonction idéologique : influencer la manière de penser des individus en vue de maintenir ou renverser les structures sociales existantes.

86 Jean François MATTEI, « l'urgence humanitaire et après » Op Cit p. 45.

87 Ibid.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

mis. En Indonésie parce que débordés par l'afflux massif des dons, MSF estiment qu'ils en ont trop reçu pour la gestion de l'urgence et lancent un appel à l'arrêt de ceux-ci (A). En Haïti, par le biais de l'ONU, une interpellation constante de la communauté internationale de continuer à se mobiliser pour l'urgence est lancée(B).

A- La collecte des dons pour le Tsunami en Indonésie : quelles limites à la générosité88 ?

Quelles limites à la générosité ? S'interroge Jean François MATTEI. De façon plus claire, jusqu'où va l'engagement humanitaire et l'aide apportée à une population sinistrée ? Il a été clairement établi que, les crises indonésienne et haïtienne ont permis de rassembler des sommes importantes pour subvenir aux besoins des populations sinistrées. Evoquons en passant quelques chiffres, pour montrer l'importance des dons qui ont été collectés. Dans le cas du Tsunami en Indonésie, un montant de 288 millions d'euros a été collecté auxquels s'ajoutaient les 3O millions d'euros issus des financements institutionnels. Une fois les frais de collecte et de fonctionnement déduits, les sommes dont disposèrent les trente-deux organismes contrôlés atteignaient 289 millions d'euros. Soit pour cette seule urgence, plus de deux fois le budget annuel de MSF France et cinq fois le budget de Médecins du Monde. Dans le monde, c'est presque 13,6 milliards de dollars qui furent collectés au profit de la région touchée par le Tsunami, dont 5 milliards issus de fond privés89.

En 2005, moins de trois semaines après la catastrophe, MSF90 suspendait son appel aux dons et prévoyait déjà des réaffectations d'une part des sommes reçues vers d'autres causes jugées plus prioritaires. Si nous nous arrêtons sur le mandat qui guide les actions de MSF, à savoir « agir dans l'urgence », il est justifié de penser comme Jean François MATTEI que MSF avait raison. En effet, pour ces derniers le rôle de l'humanitaire se limite à ce niveau. Celui d'apporter dans un espace temporel et matériel très court, une aide à la population victime d'une catastrophe. La reconstruction ne relève donc pas de l'humanitaire mais de la responsabilité des Etats. Par le geste de Médecins Sans Frontière, la priorité de la gestion de l'urgence dans le champ humanitaire est réaffirmée. « La démarche humanitaire

88 Jean François MATTEI, Op. Cit. p. 50.

89 Michel DOUCIN, Les ONG : le contre pouvoir ?, Paris, Toogezer, 2007, p. 136, cité par Pierre MICHELETTI, in Humanitaire s'Adapter ou renoncer ? (coll. Marabout, 245 p) p.82.

90 Si nous nous attardons sur le cas particulier de MSF, c'est pour la simple raison que, MSF s'est imposé depuis 30 ans comme un opérateur humanitaire de référence, dont l'efficacité et l'expertise ne sont plus à démontrer.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

obéit à une temporalité : celle de l'émotion immédiate »91. Et le cas haïtien n'opère pas en ce sens une grande démarcation.

B- Haïti et une collecte des dons essentiellHPH2AWXr2éH JIHrNI'XatH2cH.

Huit jours après le séisme, plusieurs dons ont été récoltés en faveur de la population haïtienne. Les Etats-Unis avait fait des dons à hauteur de 132 millions d'euros, un « Téléthon » animé par l'acteur George CLOONEY rapportant 41 millions d'euros quelques jours plus tard. Même le Fonds Monétaire International (FMI) a décidé de verser 81 millions d'euros. La France n'a pas été en reste par l'ampleur des dons privés qu'elle a mobilisés au bénéfice de la population haïtienne. La prédominance de la gestion de l'urgence a conduit à lancer un appel de fonds, qui a été révisé plusieurs fois. Au départ, l'appel de 577 millions de dollars qui a été entièrement financé était initialement destiné à couvrir une période de six mois. Il a été élargi pour répondre aux besoins pendant un an comme, l'ouragan et les saisons de pluies approchaient. Le 18 février 2010, l'ONU lança un appel de fonds révisé d'un montant de 1,44 milliard de dollars pour aider quelques trois millions de personnes touchées par le séisme. Force est de remarquer que ce montant dépasse celui lancé après le gigantesque tsunami dans l'océan indien en décembre 2004 et que près d'un tiers des fonds demandés ont été injectés dans la gestion de l'urgence (nourriture, abris provisoires, éducation, santé, hygiène)92. Comme si cela ne suffisait pas, un nouvel appel a été lancé le 25 janvier 2011. Le Secrétaire général de l'ONU, BAN KI-MOON, a appelé la communauté internationale à « redoubler d'efforts pour assurer un financement suffisant, permettant de répondre aux urgences et au travail humanitaire qui sauve des vies », à l'occasion de la Conférence de l'ONU sur le financement de l'aide humanitaire, à Genève, en Suisse93. Renouvelant l'appel de fonds lancé en novembre pour financer les opérations humanitaires de l'ONU et de ses partenaires en 2011, le Secrétaire général a rappelé que les besoins humanitaires étaient « de plus en plus importants ». « Le système humanitaire international aide les gouvernements à aider leur propre peuple. De plus en plus de personnes comptent sur nous pour sauver des vies. Un soutien financier supplémentaire est plus nécessaire que jamais », a-t-il poursuivi. Quelle lecture pouvons-nous avoir des développements ci-dessus ? En effet, malgré la

91 Jean François MATTEI, Op. Cit. p. 53

92 Le Parisien, Appel de fonds pour Haïti disponible sur http://www.leparisien.fr/flash-actualité-monde/haitiappel-de-fond-record-del-onu-1-44-milliard-de-dollars-18-02-2010-821333.php. (Consulté le 13 décembre 2010).

93 L'ONU appelle à financer l'action humanitaire en 2011 United Nations News Service 25 Janvier 2011.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

nécessité qui s'impose d'engager des démarches pour la reconstruction, la mobilisation qui est faite continue de l'être au profit de l'urgence. Une fois de plus, l'urgence semble supplanter la reconstruction.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

CHAPITRE II
LA MISE EN OEUVRE DE LA RECONSTRUCTION INDONESIENNE ET

HAITIENNE: POLEMIQUE ET MALAISE

Bon nombre de rapports et d'articles présentent en effet la reconstruction indonésienne comme un véritable succès. Six ans après, Banda Aceh, chef-lieu de la province, est aujourd'hui le symbole du « triomphe sur le tsunami », un lieu où la qualité de la vie est élevée, où l'harmonie interreligieuse est une réalité et où « il y a eu une renaissance qui apporte de l'espoir au monde entier, notamment à la population d'Haïti »94. A travers les réalisations concrètes sur le plan matériel et l'implication des acteurs humanitaires de l'urgence dans le processus de reconstruction en Indonésie, cette dernière regorge en elle un certain nombre de lacunes pas très éloignées de celles que l'on retrouve aujourd'hui en Haïti. (Section I). Par ailleurs, il est clair et comme le pense Mary B ANDERSON que la non prise en compte du volet de la reconstruction dans le champ de l'humanitaire et à contrario la valorisation d'une gestion prolongée de l'urgence, peuvent être à l'origine de nouvelles crises; on parle à cet effet des dérives de la seule urgence (section II).

Section 1 : La gestion de la reconstruction en Indonésie et en Haïti

La reconstruction indonésienne a été présentée à plusieurs reprises comme un succès. Cependant, les nombreuses lacunes observées six ans plus tard nous amènent à nous interroger sur la véracité de cette réussite (paragraphe 1). Dans le cas haïtien, c'est tout le processus de reconstruction qui est remis en cause (paragraphe2).

Paragraphe 1: La reconstruction indonésienne : « un succès » ?

La province d'Aceh, au nord de l'île de Sumatra en Indonésie, a essuyé le plus lourd bilan de la catastrophe avec près de 170 000 morts. Aujourd'hui, la reconstruction apparaît comme un succès relatif (A). Cependant, avec le malaise considérable de l'économie du pays et les quelques 3000 personnes toujours sans logement décent à Banda Aceh six ans après, du fait de la corruption, peut-on encore affirmer aujourd'hui que la reconstruction indonésienne a été un succès ou du moins a-t-elle été intégrée dans le champ de l'humanitaire ? (B).

94 A déclaré à l'agence Fides Mgr Antonius SINAGA, archevêque catholique de Medan, la principale ville de Sumatra-Nord, 2010, http://www.zenit.org/article-23494?l=french (Consulté le 10 mars 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- Les réalisations matérielles en matière de reconstruction en Indonésie

« L'image est restée célèbre. Dans le bourg de pecheurs de Lampuuk, où plus des trois quarts de la population a trouvé la mort, seule la mosquée est restée debout après le passage

du tsunami. Six ans plus tard, le village est totalement reconstruit et les survivants tentent de reprendre le cours d'une vie normale même si le traumatisme est encore profond »95. En effet, Comme dans le reste des zones sinistrées d'Aceh, le bilan de la reconstruction semble positif, il ne reste presque aucune trace de la catastrophe. Grâce aux aides apportées pour une valeur totale de plus de 6,7 milliards de dollars, on a reconstruit 1 700 écoles, 996 édifices publics, 36 aéroports et ports, 3 800 mosquées, 363 ponts, plus de 20 000 kilomètres de routes et 150 000 maisons96 : de l'avis général, la reconstruction matérielle est globalement un succès. Cependant lorsqu'on s'interroge sur la participation des acteurs de l'urgence dans le processus de reconstruction, sur la situation des plus de 3000 personnes sans logement et sur l'économie qui peine à se redresser, peut-on affirmer que la reconstruction indonésienne a été un véritable succès et de ce fait intégrée dans le champ de l'action humanitaire contemporaine ?

B- La reconstruction indonésienne : une reconstruction lacunaire.

La reconstruction indonésienne que l'on présente aujourd'hui comme un véritable succès, est sans aucune contestation : Le fait de la participation matérielle et économique de la communauté internationale, par le biais des ONG, Etats, et autres acteurs internationaux de l'humanitaire. Les nombreuses réalisations sur le plan architectural et infrastructurel97 font en effet montre de la présence internationale dans le processus de reconstruction en Indonésie. Sans oublier les dons en espèces destinés à la distribution. Il faut noter cependant que, le volontarisme de l'Etat et l'efficacité de l'administration sont les ingrédients primordiaux de la reconstruction bien avant les ressources extérieures. Ainsi, il a été noté que, parce que plus affaiblie par la mort que par les blessures, la population indonésienne a grandement participé à son propre relèvement98. Six ans après le tsunami, le bilan chiffré de la reconstruction indonésienne donne l'impression d'un succès de l'action humanitaire. On serait en effet tenté

95Marie NORMAND, « 5ans après le tsunami : de nouveaux défis pour Aceh », disponible sur http://www.rfi.fr/contenu/20091218-5-ans-apres-le-tsunami-nouveaux-defis-aceh (Consulté le 10juillet 2010).

96 Dorian MALOVIC, « Indonésie : Aceh dans l'après-tsunami, un espoir pour Haïti », disponible sur http://www.zenit.org/article-23494?l=french (Consulté le 16 mai 2011).

97 La reconstruction d'Aceh a débuté dès 2005, grace notamment à un afflux très important de financements en don (de l'ordre de 5 Mds USD) en provenance des bailleurs et de la société civile au niveau mondial.

98 La présence du gouvernement indonésien dans les programmes de reconstruction a été remarquable et déterminante pour la reconstruction de l'Indonésie.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

de croire qu'au final la reconstruction occupe une place de choix dans la démarche de l'action humanitaire et de ses acteurs. En effet, avec le départ de la majorité d'ONG de l'Indonésie, et à la fin de la « bulle » des fonds post-tsunami, le prolongement de la reconstruction a été confié aux administrations locales, encore minées par la corruption. Par ce fait, on dénombre encore aujourd'hui, plus de 3000 victimes du tsunami qui attendent toujours un logement. De plus, Aceh doit maintenant faire face à une croissance affaiblie et à l'augmentation du taux de chômage99. Par ailleurs, de nombreux analystes craignent que les écarts de revenus menacent, à terme, la stabilité de la région100. Qu'en est-il du cas haïtien ?

Paragraphe 2 : La reconstruction en Haïti : une population dans l'attente de la
reconstruction
101.

Dans le cadre de la mise en oeuvre de la reconstruction, plusieurs actions ont vu le jour. On dénombre aujourd'hui en Haïti, plus de 400 ONG au service de la reconstruction. C'est le Grand « Barnum Humanitaire »102. Les humanitaires semblent en effet avoir tiré des leçons du cas indonésien. En effet, quelques années après la gestion de l'urgence en Indonésie, on a assisté à un départ massif des ONG humanitaires qui ont confié la tâche à l'administration indonésienne de reconstruire. Ainsi, dans le cas haïtien, de nombreuses dynamiques ont été mises en place par les populations sinistrées103, les ONG et par les acteurs internationaux. Cependant et en dépit de certaines avancées en ce qui concerne l'implication des ONG et des réalisations matérielles en matière de reconstruction(A), on observe encore une population dans l'attente d'une reconstruction (B).

99 Marie NORMAND, « 6 ans après le tsunami : de nouveaux défis pour Aceh », disponible sur http://www.rfi.fr/contenu/20091218-5-ans-apres-le-tsunami-nouveaux-defis-aceh. (Consulté le 28 mars 2011).

100 La paix est en effet encore relativement récente à Aceh. L'accord de paix qui a mis fin à 30 ans de conflit entre les rebelles du Mouvement pour l'Indépendance d'Aceh (GAM) - aujourd'hui au pouvoir - et le gouvernement indonésien, ne date que d'ao~t 2005.

101 Si quelques projets intéressants se sont concrétisés, il est clair que très peu a été fait. La Commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti (CIRH), mise sur pieds pour gérer les fonds et approuver les projets qui seront financés par ces mêmes fonds, a approuvé 74 projets au 17 décembre 2010 pour un montant total de 1,6 milliard de dollars. Récemment, un projet des États-Unis et de la Banque interaméricaine de développement (BID) d'un montant de 174 millions de dollars pour la création d'un parc industriel de 150 hectares dans la région nord du pays101 vient d'être adopté. Ce parc sera exploité par une société de gestion privée. Cet exemple montre que les priorités sont clairement définies : les intérêts des entreprises priment sur celui des Haïtiens. Pourtant, les traces du séisme sont toujours visibles partout où que l'on aille dans la capitale.

102 Pierre MICHELETTI, Humanitaire, s'adapter ou renoncer, Paris, Hachette, 2008, p 83.

103 Nesmy MANIGAT, Directeur d'Aide et Action Amérique Latine et Caraïbes. Dans un reportage vidéo, justifie l'intervention de la population sinistrée dans le processus de reconstruction par le fait que, cette dernière refuse de se considérer comme une victime.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- L'organisation de la reconstruction en Haïti

Plusieurs actions ont en effet été menées dans le cadre de la reconstruction en Haïti. Pour ne citer que celles là, on parlera de la conférence des donateurs de New-York (1), du projet argent et nourriture contre travail (2) et le projet travail contre nourriture et distribution de nourriture à l'école (3).

1- La conférence des donateurs de New-York

En prélude à la conférence des donateurs, le colloque « reconstruire Haïti » s'est tenu à l'école de Montréal au canada et a été l'occasion pour beaucoup d'exprimer leur volonté de s'investir104 et de présenter des projets d'aide. Les réflexions élaborées lors de cet événement devaient servir à établir un plan de reconstruction à présenter lors de la conférence des donateurs le 31 mars 2010 à New-York105 au siège des Nations Unies. Quelques 138 pays, plusieurs organismes internationaux, comme le FMI et la banque mondiale ainsi que des ONG et des membres de la diaspora haïtienne étaient présents à cette conférence. Le président haïtien, René Préval y a présenté le plan de reconstruction du pays106. Selon ce plan, la commission temporaire pour la reconstruction d'Haïti doit collecter et répartir 3,8 milliards de dollars au cours des 18 prochains mois qui ont suivi la catastrophe. La priorité irait à la reconstruction de 50 hôpitaux, 1300 établissements scolaires, d'institutions gouvernementales et d'infrastructures détruites, dont le palais présidentiel, le parlement, le principal palais de justice. Cette conférence représentait un grand espoir pour « aider Haïti à se reconstruire en mieux ». Le montant total promis s'élève à 9,9 milliards de dollars pour les trois prochaines années et au-delà. Durant les deux années à venir et selon les prévisions, le pays recevra 5,3 milliards. Pour Haïti, et son gouvernement, il s'agit d'une promesse bien au delà des attentes107. Avec cet engagement, il s'agit pour Haïti et ses partenaires internationaux de poser les jalons pour le développement grandeur nature d'un pays en ruine conformément aux

104 L'Union européenne s'est engagée à verser près de 1,6 milliard de dollars. Les Etats-Unis vont donner près de 1.2 milliard de dollars. Le Canada a promis près de 400 millions de dollars, et la Banque mondiale près de 500 millions de dollars. De nombreux pays, beaucoup moins riches, ont également tenu à participer. Cf. http://www.rfi.fr/contenu/20100401-communaute-internationale-mobilise-haiti-annees(Consulté le 30mars2011).

105 Colloque «Reconstruire Haïti» -- Jean-Max BELLERIVE craint que l'aide humanitaire ne devienne une habitude, Cf. http://www.ledevoir.com/international/actualites-internationales/284495/colloque-reconstruirehaiti-jean-max-bellerive-craint-que-l-aide-humanitaire-ne-devienne-une-habitude (Consulté le 28 mars 2011).

106 Martine Denis CHANDLER, Hugo Merveille et UWOLOWULAKANA Ikavi. Selon le plan du gouvernement haïtien, au cours des dix prochaines années, la reconstruction nécessitera un total de 11,5 milliards de dollars. Cf. http://minustah.org/?p=21924 (Consulté le 28mars 2011).

107 Martine Denis CHANDLER, Hugo Merveille et UWOLOWULAKANA IKAVI, Op. Cit.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

besoins identifiés par le gouvernement108. L'utilisation des sommes récoltées à l'issue de cette conférence a été confiée à la Commission Intérimaire de Reconstruction d'Haïti109

2- Projet argent et nourriture contre travail. Et stratégie de santé environnementale.

Le 30 mars 2010, en marge de la conférence de New-York, le programme alimentaire mondial a annoncé le lancement de nouveaux projets « Argent et nourriture contre travail » en Haïti, dans l'optique de soutenir la réhabilitation agricole, illustrant la mobilisation des Nations Unies pour une transformation en profondeur du pays avant la conférence des donnateurs. Michel CHANCY, secrétaire d'Etat pour la production animale et l'assistance alimentaire en Haïti, déclare à cet effet que : « ces programmes ont été validés par le gouvernement haïtien et seront mis en oeuvre en étroit partenariat avec les institutions nationales ». Ils suivent les priorités du gouvernement pour soutenir la production agricole et la sécurité alimentaire tout en garantissant l'accès à la nourriture pour les plus vulnérables, ce qui en fait un élément essentiel vers la sécurité et la stabilité sociale.

L'organisation internationale pour les migrations a annoncé pour sa part le lancement d'une nouvelle stratégie de santé environnementale et d'assainissement pour le pays, afin d'améliorer l'accès à l'eau potable et aux latrines. La première phase de cette stratégie inclut des campagnes de sensibilisation dans les campements spontanés où les sinistrés ont trouvé refuge après la catastrophe.

3- Le projet, travail contre nourriture et distribution de nourriture à l'école.

Le 19 février 2010, l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture(FAO) et l'organisation humanitaire internationale CARE, ont émis une alerte conjointe sur la crise alimentaire qui sévit dans le pays. Des évaluations rapides menées par la FAO et ses partenaires du groupe agriculture, ont montré que les « familles d'accueil » dépensent leurs maigres économies pour nourrir les nouveaux arrivants et consomment leurs réserves alimentaires. « Dans de nombreux cas, ces personnes n'ont plus d'autre choix que de manger les semences qu'elles avaient conservées pour la prochaine campagne et de manger ou de vendre leur bétail, notamment des chèvres ». Selon la FAO, la solution immédiate est de lancer des programmes « travail contre argent liquide dans le secteur agricole. Le programme alimentaire mondial qui a fourni avec ses partenaires une aide alimentaire à plus de 4,3 millions de personnes à Port-au-Prince a indiqué qu'il s'associe avec le gouvernement

108 Idem.

109 Cette commission est coprésidée par l'ancien président Américain, Bill CLINTON, et le premier ministre haïtien, Jean-Max BELLERIVE.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

haïtien pour lancer une stratégie urgente de relèvement rapide qui fera usage de vivres et d'argent liquides pour autonomiser la population locale afin de permettre aux gens de reconstruire leur vie. Aussi, les vivres-contre-travail et le cash-for-work remplacent progressivement les distributions générales de nourriture. Il s'agit des programmes ciblant une population d'environ 1,1 million.

Par ailleurs, une équipe spéciale dirigée à la fois par le FAO, le Fond International de Développement Agricole (FIDA) et le PAM a été créée. Cette équipe dans les prévisions, était censée appuyer le gouvernement haïtien dans la mise en oeuvre de stratégies visant à assurer la sécurité alimentaire du pays dans l'immédiat et à long terme, et à y intégrer la production agricole et des filets de sécurité sociale. Malgré toutes les rencontres concertées des acteurs internationaux, les promesses enregistrées et les projets lacunaires mis en oeuvre pour la reconstruction haïtienne, on observe encore aujourd'hui, une population dans l'attente de la reconstruction. Les leçons apprises du tsunami en Indonésie, semblent n'avoir pas eu un véritable écho dans le cas du séisme en Haïti.

B- L'efficacité limitée de la mise en oeuvre de la reconstruction en Haïti

Un an après le séisme qui a grandement affecté la ville de Port-au-Prince, les travaux de reconstructions tardent à se mettre en place. Sur les plus de 390 000 bâtiments qui ont été détruits, seul un millier a été remis en place110. Gravats et déchets de toute nature continuent d'abonder le long des trottoirs de la capitale. On s'interroge sur les promesses qui ont été faites pour le relèvement d'Haïti lors de la conférence qui s'est tenue à New-York (1) ; des interrogations qui créent au sein la population sinistrée un certain nombre d'inquiétudes (2).

1- Le non respect des promesses émises lors de la Conférence de New York.

La solidarité internationale a ses limites et Haïti en est la preuve. Les dons n'ont pas manqué dans les semaines qui ont suivi le tremblement de terre qui a provoqué la mort de plus de 250.000 personnes le 12 janvier 2010. Le Fond monétaire international (FMI) dans cet optique a annulé la dette d'Haïti à son égard, soit environ 209 millions d'euros. Mais l'argent pour la reconstruction n'est toujours pas au rendez-vous malgré les promesses, en tout cas pas assez111. En effet, les donateurs avaient promis sensiblement la somme de 10 milliards de

110 Frantz CADET, président du collectif Haïti Midi-Pyrénées, ensemble pour Haïti de Gilles CORRE

111RFI, « Les donateurs en Haïti tardent à tenir leurs promesses» disponible sur
http://www.rfi.fr/ameriques/20100723-donateurs-haiti-tardent-tenir-leurs-promesses-dons, (consulté le 30 mars 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

dollars en mars dernier112. En théorie, plus de la moitié était censée être versée au cours des prochains 18 mois. Mais, jusqu'à présent, seuls de rares pays comme le Brésil, la Norvège et l'Australie ont remis de l'argent. L'Union des Nations Sud-Américaines (UNASUR) a également un très grand en retard. Les Etats-Unis n'ont payé que 30 millions de dollars et ils en avaient promis plus d'un milliard. Le Co-président de la Commission internationale qui gère une partie des promesses d'aide humanitaire, l'ancien président américain Bill Clinton s'est déclaré frustré. Et s'est engagé à recontacter les donateurs pour leur rappeler leurs engagements. Une entreprise qui ne laisse pas la population haïtienne indifférente mais reste cependant inquiète.

2- / HIERaIEC INIXIO SIIE IIICHSIEoP N

Les fonds promis par l'aide internationale tardent à arriver. Un sentiment de frustration se développe dans la population face à la lenteur de la reconstruction113. Un an après le séisme dévastateur, les places publiques de la capitale haïtienne accueillent toujours ceux qui ont tout perdu le 12 janvier et malgré toute l'aide humanitaire arrivée en Haïti, les conditions de vie y sont toujours aussi précaires114. Les jeunes sont désespérés ; Plus qu'une maison, trouver un travail est devenu une priorité pour la jeunesse115. En mars, le Programme alimentaire a mis fin aux distributions massives de nourriture pour concentrer ses efforts sur les populations fragiles, les femmes enceintes, les enfants de moins de 5 ans et les personnes blessées. Une sélection nécessaire pour ne pas pénaliser l'agriculture nationale mais qui exclut tous les jeunes hommes sans famille à charge. Jean Roquet Clervaux membre d'une association qui travaille au niveau sanitaire, a du mal à contenir sa colère après l'année passé à vivre sous la tente il affirme: « Nous sommes devenus des nomades livrés à nous-mrmes On pensait qu'on allait rapidement construire des maisons, mais non. Du coup, nous sommes bien obligés de

112 Idem.

113Séisme en Haïti: entre frustrations et espoirs, les sinistrés livrés à eux-mêmes

http://www.rfi.fr/ameriques/20100711-seisme-haiti-entre-frustrations-espoirs-sinistres-livreseuxmemes,(consulté le 30mars 2011).

114 Un million et demi de sans-abri. Les chiffres et statistiques des organisations internationales peinent à retranscrire la dure réalité du pays. Depuis six mois, LUCKSON Pierre se lève, se lave, se nourrit et se rendort sur la place Boyer de Pétion ville, dans les hauteurs de Port-au-Prince. Ce jeune étudiant de 21 ans s'est construit son abri de fortune avec une bâche plastique qu'il a pu obtenir d'une ONG, avec des planches de bois récupérées dans les décombres de bâtiments effondrés. Un calendrier comme unique décoration dans sa petite construction, LUCKSON a du mal à se faire à sa nouvelle vie : « Avec la saison des pluies, les nuits sont de plus en plus pénibles. J'ai bien posé des cartons au sol pour éviter de tremper mon matelas mais ça ne suffit pas : la bâche plastique est très abîmée et commence à se déchirer ».

115 Maricia 23 ans, tente chaque jour d'intégrer un programme « argent contre travail » géré par les ONG. « J'aimerai avoir un boulot, un vrai pour satisfaire mes besoins premiers : avoir des vêtements, répondre aux besoins de mon ventre, c'est tout. Ici ça fait belle lurette qu'on ne nous a plus donné de nourriture sur le terrain », dit-elle. Mais les offres sont insuffisantes pour répondre aux nombreuses demandes. Aussi, Maricia essaie-t-elle de gagner quelques gourdes en vendant des boissons glacées à ses nouveaux voisins.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

rester sur le golf »116. En effet, Comme beaucoup, il a cru aux promesses des pays amis d'Haïti, aux sommes annoncées en grandes pompes après le sommet de New York le 31 mars. Mais l'argent n'a pas été débloqué : sur les 2,6 milliards de dollars promis et nécessaires pour l'année 2010, la Banque mondiale n'a pour l'heure reçu que 260 millions. Les frustrations sont les mêmes dans chacun des quelques 1342 camps de sinistrés recensés par l'ONU dans le pays117. On a en effet l'impression que contrairement à l'urgence, la reconstruction semble ne pas véritablement préoccuper les acteurs humanitaires sur le terrain. Le sentiment d'abandon crée par cette situation peut etre à l'origine d'autres crises tant sur le plan sanitaire, que sur le plan sociopolitique.

Section 2 : La prédominance de la gestion de l'urgence génératrice de nouvelles crises :
Les effets pervers de l'assistance prolongée.

Mary B. ANDERSON écrit : « Il n'est que trop fréquent que les secours d'urgence ne tiennent pas compte des circonstances qui font que les gens sont vulnérables aux catastrophes qui les frappent Lorsque l'aide a pour seul objet de traiter les symptômes des crises, elle n'influe pas sur les causes des crises Elle peut donc aggraver les vulnérabilités, voire créer de nouvelles zones de vulnérabilité en créant des groupes privilégiés, en sapant des systèmes de défense, ou en nourrissant des attentes excessives à l'égard de la disponibilité des ressources extérieures »118.

En effet, la frontière qui sépare l'aide d'urgence prolongée et l'émergence de nouvelles crises est très mince. Lorsque les acteurs humanitaires confondent « action humanitaire »119 et « pérennité humanitaire »120, lorsque les promesses qui sont faites ne sont pas tenues, bref lorsque les questions liées à la reconstruction ne font pas l'objet d'une attention particulière, celles-ci finissent toujours par s'imposer. Et lorsqu'elles interviennent

116 Très dur avec la communauté humanitaire, Jean Roquet CLERVAUX ne peut contenir un sourire las quand on l'interroge sur l'action du gouvernement : « Je n'attends rien de l'Etat haïtien, je me suis habitué à ne rien attendre d'eux. En revanche, les ONG, elles ont failli à leur mission : regardez toutes ces grossesses précoces, la délinquance juvénile qui augmente dans le camp. Ils n'ont pas aidé la jeunesse. Comment peut-on accepter ça ? ».

117R--.

ri, « Séisme en Haïti: entre frustrations et espoirs, les sinistrés livrés à eux-mêmes », disponible sur http://www.rfi.fr/ameriques/20100711-seisme-haiti-entre-frustrations-espoirs-sinistres

livrés à eux mêmes, (Consulté le 30 mars 2011).

118 Mary B. ANDERSON, « Aujourd'hui vous me sauvez la vie, mais pour quel avenir ? Sur quelques dilemmes moraux de l'aide humanitaire », in Jonathan MOORE (édit) Des choix difficiles p. 86.

119 Qui consiste selon Rony BRAUMAN à restaurer l'homme dans ses capacités de choix.

120 Nous essayons par cette expression, de traduire l'idée selon laquelle, parfois l'attitude de certains acteurs humanitaires plonge les populations sinistrées dans un perpétuel état d'assisté.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

dans ce climat, elles peuvent etre génératrices de nouvelles crises, d'ordre sanitaire et sécuritaire d'une part, politique et économique d'autre part (paragraphe I). Par ailleurs, l'aide d'urgence prolongée entraine très souvent une situation de dépendance des populations envers les organisations humanitaires (paragraphe II).

Paragraphe 1 : L'apparition de nouvelles crises du fait de la prolongation de l'aide
d'urgence en Indonésie et en Haïti.

La manne humanitaire dépourvue de toute visée reconstructive a des effets déstabilisateurs dans plusieurs domaines121. Il sera question pour nous dans cette partie et dans un premier temps, de mettre en exergue l'émergence des crises sanitaire et sécuritaire (A) et dans un second temps, il sera question de voir comment l'aide d'urgence prolongée peut favoriser la recrudescence des crises sociopolitiques et économiques (B).

A- L'émergence des crises sanitaire et sécuritaire en Haïti et en Indonésie.

1- L'émergence des crises sanitaires en Haïti et en Indonésie

Des mois après les catastrophes qui ont touché ces deux pays, de nombreuses crises ont émergé. Si en Haïti on a vu apparaître l'épidémie du choléra, en Indonésie c'est contre l'émergence d'un certain nombre de maladies telles que la tuberculose, le paludisme, le tétanos que le combat était mené.

En effet, après le tremblement de terre qui a dévasté Port-au-Prince le 12 janvier 2010, une épidémie de choléra éclatait en octobre ajoutant plus de 4 000 morts sur les 210 000 personnes atteintes aux centaines de milliers causés par le séisme. Au vue de la reconstruction encore au point mort, nombre de voix se sont alors fait entendre, estimant que le choléra122, comme les décombres qui obstruent encore Port-au-Prince, était le signe d'un échec patent de l'aide internationale. Selon une évaluation du Ministère haïtien de la Santé publique et de la population, 225.668 personnes seraient infectées par la maladie dont 121.883 ont demandé à etre hospitalisées. A Haïti, on a par ailleurs enregistré 4.452 décès dus à l'épidémie de choléra qui afflige le pays depuis octobre dernier, un chiffre qui augmente à chaque nouveau rapport des autorités. Le dernier en date a été publié le 3 février. La région la plus touchée par

121 Elle fait monter les prix (de l'immobilier en particulier). Elle génère un risque d'inflation salariale et crée de nouvelles distorsions sociales.

122 La population haïtienne et particulièrement les sinistrés du tremblement de terre, ont été confrontés à une crise sanitaire catastrophique. Le risque épidémique de choléra vient en effet aggraver une situation de grande précarité dans des camps, plus que jamais exposés aux pluies torrentielles et cyclones à venir. Plus de 1 500 cas avaient été recensés.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

l'épidémie continue à être Artibonite où était apparu le premier cas de choléra et où l'on compte 683 décès. Malgré les efforts faits pour contenir la diffusion de l'épidémie, cette dernière s'est propagée également dans la République dominicaine qui partage avec Haïti l'île de La Espagnola. Sur le territoire dominicain, on compte plus de 325 cas.

La Province d'Aceh en Indonésie qui compte 4,8 millions d'habitants a été la région la plus gravement touchée par le séisme et le tsunami qui a suivi le 26 décembre 2004. Des pertes considérables en vies humaines, biens et moyens de subsistance dans les 14 des 21 districts de la province, ont fait qu'une importante partie de la population se retrouve dans un dénuement complet et exposée à des maladies pouvant donner lieu à des épidémies. Au 22 mars 2005, l'Indonésie déclarait avoir enterré 126 602 corps et déclarait 93 638 personnes disparues et 514 150 personnes déplacées dans 20 district/villes de la province de Nanggroe Aceh Darussalam. Dans le secteur public, 53 des 244 centres de santé ont été détruits ou gravement endommagés et 42 des 481 professionnels de santé sont morts123. Cependant, environ 90 cas de tétanos (non contagieux) ont néanmoins été relevés et une campagne de vaccination des enfants contre la rougeole, maladie très contagieuse et potentiellement meurtrière, a été menée, en particulier par les médecins militaires français. L'émergence de ces crises sanitaires, dans une population qui exprime son indifférence, peuvent être en effet à l'origine de la naissance des crises sécuritaires.

2- La naissance des crises sécuritaires

Malgré l'importance de l'aide qui a été fournie, plus de trois millions d'haïtiens, soit près d'un tiers de la population, vivent encore dans une situation d'insécurité alimentaire. C'est ce qu'indique un organisme haïtien, la Coordination Nationale pour la Sécurité Alimentaire (CNSA), précisant que ce ne sont pas seulement les personnes déplacées à cause du séisme à souffrir de problèmes alimentaires mais également les populations du nord-ouest et du sud du pays. Selon la CNSA, le prix du riz a augmenté de 25% au cours des derniers mois, mais nombreuses sont les denrées alimentaires qui ont subi, elles aussi, une notable augmentation de leurs prix. Le marché a sürement subi les répercussions de l'épidémie de choléra (de nombreux consommateurs et commerçants ont choisi d'éviter les produits provenant de la région centrale d'Artibonite, foyer de l'épidémie) mais il est également vrai

123Chrétienté info, « AMERIQUE/HAITI À La reconstruction ne décolle pas et la population vit dans l'insécurité alimentaire » disponible sur http://www.chretiente.info/201102180000/ameriquehaiti-la-reconstruction-nedecolle-pas-et-la-population-vit-dans-l%E2%80%99insecurite-alimentaire (Consulté le 8 avril 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

que certaines terres sont exploitées par des consortiums étrangers en vue de productions destinées essentiellement à l'exportation. En dehors de l'insécurité alimentaire qui a très peu affectée l'Indonésie, Haïti est également confronté à d'autres insécurités dans les camps124, tels que le viol, le pillage, le vol etc.

Amnisty International affirme dans son rapport du 6 janvier 2011 que les femmes et les filles qui évoluent dans les camps de fortune en Haïti risquent davantage d'être victimes de viols et de violences sexuelles125. La violence sexuelle qui constituait déjà un problème en Haïti, s'est exacerbée à la suite de la catastrophe du 12 janvier 2010. Des victimes de viols demandent de l'aide à un groupe de soutien local presque tous les deux jours. À ceci, s'ajoutent la présence de bandes armées qui se livrent à des attaques dans les camps en totale impunité et le manque de mesures de protection pour les victimes de violence sexuelle, ce qui les expose à une victimisation secondaire. Malheureusement, le manque d'informations sur les étapes concrètes à suivre par les victimes de violence sexuelle, en vue de signaler le crime à la police et à la justice, ne fait que perpétuer cet esprit d'impunité126. Les filles, les femmes vivent quotidiennement dans la peur car elles se sentent abandonnées et sont conscientes de disposer de peu de recours. Les victimes, elles, perdent de plus en plus confiance dans le système judiciaire et policier puisque celles qui se sont armées de courage pour demander de l'aide ont fait face à l'incapacité, voire à l'impuissance de ces structures. Pour ce qui est de l'Indonésie, beaucoup également reste encore à faire en ce qui concerne la sécurité. En effet, depuis le tsunami qui a secoué l'océan indien il y a six ans, la population d'Aceh a fait de grands progrès en matière de restauration des infrastructures et des services communautaires et en terme d'implication des résidants dans la reconstruction de multiples secteurs d'activités. Cependant, dans son rapport 2010 sur le développement humain d'Aceh, le PNUD en listant les priorités et les défis qui l'attendent, mentionne la nécessité d'améliorer la sécurité127. L'Indonésie aujourd'hui vit sous la crainte de la reprise des hostilités. La paix est en effet encore relativement récente à Aceh. L'accord de paix qui a mis fin à 30 ans de conflit entre les rebelles du Mouvement pour l'Indépendance d'Aceh (GAM), aujourd'hui au pouvoir et le gouvernement indonésien est encore fragile.

124 Un an après le séisme du 12 janvier 2010, la situation humanitaire demeure précaire : 800.000 sinistrés vivent toujours dans l'un des 1000 camps répertoriés, sous la menace des intempéries et des épidémies, comme celle du choléra qui, depuis mi-octobre, a déjà causé le décès de 4800 malades.

125Amnesty International «Les violences sexuelles contre les femmes augmentent en Haïti», disponible sur http://www.amnesty.org/fr/news-and-updates/report/haiti-sexual-violence-against-women-increasing-2011-01- 06> (Consulté le 08 avril 2011).

126 Idem.

127 News center, Cf. http://www.un.org/french/newscentre/pdf/2011/05012011Fr.pdf (Consulté le 08 avril 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

B- La recrudescence des crises économique et politique.

Les réalisations accomplies à Aceh depuis le tsunami dépassent les prévisions les plus optimistes faites il y a six ans. La province reste confrontée à un certain nombre de défis, notamment la nécessité de faire revivre l'économie afin de générer des emplois productifs, d'améliorer la qualité et l'efficacité des services publics et d'en faire bénéficier les pauvres et les défavorisés128. Haïti semble être une répétition du cas indonésien, mais avec beaucoup plus d'acuité.

1- Une faible prise en compte des facteurs économiques.

Bien que dans la plupart des cas l'intention et la volonté soient des plus nobles, l'intervention sur le terrain peut déstabiliser le contexte local et nuire plutôt qu'aider les communautés ciblées. Dans le cas du tsunami, le débarquement massif des ONG occidentales a entraîné une inflation des prix d'environ 8%129. En effet elles ont dépensé sans compter l'argent reçu pour mettre en place leurs actions, sans réaliser que cette prodigalité pouvait avoir des conséquences sur l'économie locale. L'arrivée massive des denrées alimentaires gratuites peut ruiner le marché local. De plus, l'arrivée des organisations humanitaires en zone de crise instaure en effet souvent une véritable économie parallèle. Le flux de ressources accompagnant l'engagement d'organisations étrangères, peut devenir un facteur économique qui influence le système monétaire, le marché du travail, mais aussi le secteur de la production et des services

2- Une faible prise en compte des facteurs socio- politiques générateurs de crises sociales

Sur le plan politique, lorsque les organisations internationales et les ONG interviennent dans des Etats affaiblis ou ruinés, elles sont souvent obligées d'assurer les tâches incombant normalement à l'Etat et d'établir des structures parallèles. Cette prise de responsabilité peut engendrer une perte de crédibilité et de légitimité des organes restants de l'Etat auprès de la population. De plus, les politiciens et employés locaux risquent de se sentir déchargés de leurs responsabilités sociales. Dès lors, on peut redouter que l'argent d'ordinaire alloué par l'Etat à ces tâches ne soit détourné. Ces situations ont été vécues tant en Indonésie qu'en Haïti (de façon plus prononcée). En effet, comparé à l'Etat indonésien qui a dû fortement s'appuyer sur les institutions étatiques, pour la gestion du tsunami, on a assisté en

128 A déclaré le Directeur adjoint de l'agence onusienne en Indonésie, Stephen Rodrigues.

129 SIVAPRAGASAM P.P. et BENEFICE J., « L'aide vu du coté des victimes », in Economie et Humanisme, no 375, Décembre 2005. p. 25.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Haïti à un effacement presque total de l'Etat. La population haïtienne vit sans doute dans l'espoir qu'aujourd'hui, l'élection de MARTELLY apportera un plus dans le respect des obligations qui lui incombent. Ce problème peut aussi se manifester en situation d'occupation militaire130. Par ailleurs sur le plan social et dans le cas de l'Indonésie, les activités de réhabilitation et de reconstruction ont été menées principalement dans la province du sud, sous contrôle gouvernemental. Cette situation a augmenté la frustration des autres provinces et a nourri les tensions sociales. La passion qui anime les acteurs humanitaires doit être tempérée pour éviter les écueils de la naïveté et de la maladresse avec lesquelles certaines crises sont gérées. Ces conditions devraient rester toujours au centre des préoccupations des humanitaires, car chaque dérive pourrait méme contribuer à l'économie de guerre. L'action non concertée et parfois méme non réfléchie des ONG a été accusée d'avoir favorisé dans bien de cas certaines factions politiques. En Indonésie aussi, les habitants de Banda Aceh craignaient que derrière l'aide humanitaire, ce ne soient les militaires qui tirent les ficelles131.

Paragraphe 2 : La dépendance des populations assistées et les autres dérives.

Notre analyse à ce niveau consistera à montrer que, parce que l'aide d'urgence se prolonge, elle crée vis-à-vis de la personne secourue une sorte de dépendance de l'aide le plongeant dans un assistanat perpétuel (A). A côté de cela, parce que très peu aisé à conceptualiser, nous évoquerons les autres dérives de l'aide d'urgence prolongée (B).

A- La dépendance des populations sinistrées : conséquence de la perpétuation de

l'aide d'urgence.

L'aide internationale constitue d'importantes sources de financement pour les pays touchés par une catastrophe. Elle représente souvent l'unique solution dans pareil contexte. Malheureusement, elle peut contribuer à accentuer « la politique de la main tendue » des pays du sud132. En effet, méme si dans les conditions d'extrême misère et en l'absence de politique nationale cohérente et structurée l'aide internationale est souvent la solution privilégiée, on peut déplorer le fait qu'elle crée à long terme une dépendance en générant au fil du temps une sorte de fatalisme et une logique d'assistance dommageables. Cette aide pourrait alors

130 En effet, selon la (4ème) Convention de Genève de 1949, les troupes d'occupation ont l'obligation de prendre en charge la population civile de la zone qu'ils occupent. Ce sont cependant souvent des organisations humanitaires qui se chargent de cette tàhe et qui en libèrent ainsi les occupants.

131 D'anciens soldats à la retraite servaient de chauffeurs pour les organisations. Ces mêmes soldats qui, quelques années auparavant, les rendaient victimes de violences. Tous ces paramètres sont autant de difficultés pour gérer l'aide de manière efficace et durable.

132 Ces pays se reposant généralement sur l'aide des pays occidentaux et sur l'aide internationale.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

renforcer le désengagement des gouvernements vis-à-vis du bien être et du développement des populations desquelles ils sont responsables. Les humanitaires ne sont pas là pour se substituer aux Etats, mais pour les accompagner. Action contre la Faim l'a sans doute compris dans le cas de Haïti133 en tentant depuis plusieurs années de mettre en place des programmes impliquant et mobilisant le plus possible les communautés autour des projets d'aide. Ceci dans le but de pérenniser l'action en transmettant des connaissances et des compétences134.

B- les autres dérives de l'action humanitaire prolongée

Nous avons cité jusqu'à présent un grand nombre de limites de l'aide humanitaire prolongée. Dans les exemples que nous avons traités, d'autres abus importants mais plus difficiles à généraliser à un point de vue global peuvent naître. Dans le cadre du raz-de-marée par exemple, on a vu la présence de scientologues ou de fanatiques religieux qui recrutent un nombre impressionnant de nouveaux adhérents en leur apportant un soutien momentané ou un peu de nourriture. Par ailleurs, des sites internet frauduleux et sans scrupules n'ont pas hésité à utiliser les emblèmes du CICR pour demander des fonds. D'autres containers de matériel douteux sont arrivés sur place soi-disant pour des raisons humanitaires.

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Il y a lieu de retenir dans le cadre de cette première partie que, que ce soit en Indonésie ou en Haïti, l'urgence a prédominé. Cet état des choses a sans doute été favorisé par un cadre juridique limité dans le domaine de la reconstruction, mais aussi par les actions menées par les institutions humanitaires en Indonésie et en Haïti. Par ailleurs, tout en reconnaissant les démarches qui ont été entreprises dans le sens de la reconstruction, force a été de constater que, malgré la réussite relative que l'on attribue à la reconstruction indonésienne, celle-ci ne semble pas avoir porté des fruits pour le cas de Haïti. Certainement à cause du fait qu'ellemême renfermait de nombreuses limites. Il s'avère donc que la reconstruction continue d'occuper dans le champ de l'humanitaire une place négligeable. La nécessité d'identifier les freins à la réussite de la reconstruction post-crise et des perspectives pour y remédier s'impose à cet effet.

133 Faim Haïti, une population naufragée Action contre la Faim Février 2006.

134 Ce fut le cas lors de la réhabilitation du réseau d'eau de Port-de-Paix, de Saint-Louis du Nord et de l'île de la Tortue où les équipes d'Action contre la Faim Haïti, travaillaient en étroite collaboration avec l'administration locale et des « comités d'eau », montés pour l'occasion avec des Haïtiens formés.

DEUXIEME PARTIE : LES FREINS ET LES PERSPECTIVES POST-
CATASTROPHE EN INDONESIE ET EN HAITI

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

La reconstruction indonésienne apparaît comme un succès relatif mais aujourd'hui, quelques 3 000 victimes du tsunami attendent toujours d'être relogées. Les 150 000 maisons reconstruites n'ont pas toutes été attribuées aux bonnes personnes135 et 26% des Acehnais vivent toujours en dessous du seuil de pauvreté. Sous d'autres cieux, pour parodier le titre du dernier roman de l'écrivain haïtien Dany LAFERRIERE: « tout a bougé autour d'Haïti ». Un an après, en dépit d'un élan de générosité planétaire extraordinaire136 de promesses, de dons milliardaires de la part des Etats et d'une action massive des oeuvres d'entraide et de secours, le constat est terrible. Alors que le choléra et une élection présidentielle contestée se sont mis de la partie, près d'un million de rescapés vivent toujours dans la promiscuité d'immenses

camps de tentes et de tôles, seuls 5% des gravats de la capitale détruits à 85%, ont étédégagés. Bref, de reconstruction, pas la moindre trace en Haïti137. Fort de ce constat

inquiétant, il est impératif de s'interroger de prime abord sur les facteurs ou obstacles qui limitent la mise en oeuvre efficace du processus de reconstruction (Chapitre I) ; dans un second temps, nous examinerons quelques perspectives pour une meilleure prise en compte de la reconstruction par les acteurs humanitaires dans un contexte de crise (Chapitre II).

135 Ce constat nous amène à nous interroger sur le fait de savoir : pour qui reconstruit-on ?

136 En Suisse, la Chaîne du Bonheur récoltera 65 millions de francs.

137 «La situation est effectivement très difficile, surtout à Port-au-Prince, qui avant même le séisme était déjà une métropole du tiers-monde congestionnée, avec des bidonvilles surpeuplés», relève Alain GEIGER, responsable de projets à la Chaîne du Bonheur. Port au Prince, Haïti.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

CHAPITRE I
LES FREINS A LA MISE EN OEUVRE DE LA RECONSTRUCTION

La survenue d'une crise de grande envergure suscite généralement une importante vulgarisation médiatique qui draine avec elle une présence massive d'ONG. Malheureusement, il nous a souvent été donné de remarquer que, la phase de l'urgence achevée, médias et ONG tirent leur révérence. Ce qui comme l'absence de financement constituent de véritables entraves à la reconstruction (section I). Aussi, certaines pratiques humanitaires parce que pleines d'ambiguïté sont une entrave à la reconstruction (section II).

Section1 : L'intervention limitée et intéressée des acteurs humanitaires et l'absence de
financement comme une entrave à la reconstruction

Dans le cadre de cette partie, nous allons analyser de prime à bord le rôle des médias et des ONG dans l'échec de la reconstruction (paragraphe 1). Pour voir dans un deuxième temps comment les chances de réussite de la reconstruction peuvent etre compromises à cause de la corruption, des détournements des fonds et parfois du non respect des promesses des donateurs (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La participation limitée et intéressée des Médias et des ONG comme un
frein à la reconstruction

Jamais les médias n'ont pris autant d'importance dans le contexte humanitaire qu'aujourd'hui. Ils permettent en effet de focaliser l'attention sur des crises qui seraient passées inaperçues. Considérés comme des canaux efficaces pour informer et mobiliser la communauté internationale de la situation chaotique qui sévit dans un pays donné et à un moment donné, ceux-ci semblent focaliser la plus grande partie de leurs manoeuvres dans le cadre de l'urgence. Ce qui en soit serait en même de fragiliser la reconstruction (A). Cette dernière est aussi dans la plupart des cas victime de l'inconstance de certaines ONG qui, guidées par des intérets personnels, transforment l'action humanitaire en une activité lucrative (B).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- Les médias et la logique de l'instantané

Les médias jouent un rôle très important pour l'aide humanitaire : ils permettent de récolter des fonds, de sensibiliser le public aux différentes actions et de dénoncer les atrocités que l'on trouve dans certains pays. En ce qui concerne la collecte des fonds, Kofi Annan138 disait en 1994 que « lorsqu'il existe un problème qui n'a pas été pensé ou réfléchi, ce sont les médias qui ont le loisir d'influencer la manière dont la communauté internationale peut agir »139. Un rôle qu'ils semblent mener à bien.

Cependant, certaines actions des médias peuvent avoir des effets redoutables, ce qui en soi pourrait constituer une limite pour la reconstruction post crise140. En effet, pour parler comme Jean François MATTEI141, certains pionniers de l'humanitaire en accord avec les médias, n'ont pas hésité à activer la corde compassionnelle, à utiliser l'émotion, parfois avec démesure, pour représenter la victime sous le seul angle de la tristesse et de la pitié142. Dans le méme ordre d'idées, sous le coup de l'émotion produite par la grande mobilisation des médias dans l'urgence, le flot concentré de l'aide internationale peut aggraver le sentiment d'abandon dans les zones non bénéficiaires. C'est le cas par exemple de la crise du Darfour qui a été effacée par celle du Tsunami ; la crise du Niger par l'Ouragan Katrina aux Etats-Unis ; plus récemment la crise haïtienne par la crise du Japon143.

Par ailleurs, s'il est admis avec Jean François DENIAU144que les médias occupent une place importante dans l'action humanitaire145, l'une des difficultés qui demeure cependant est que l'ère des médias s'inscrit dans une logique de l'immédiateté. En Haïti par exemple, trop en faire le temps de l'urgence et faire systématiquement appel à un réflexe compassionnel a donné l'illusion au donateur que la rapidité du don comblera, voire « compensera » le malheur des populations sinistrées. Mais les médias ne portent leurs caméras que sur certaines séquences de l'intervention humanitaire : généralement les premiers temps d'une crise,

138 KOFI ANNAN est l'ancien secrétaire général des Nations Unies à qui a succédé BAN KI MOON.

139 Reymond Philippe, Margot Jonas, Margot Antoine, Les limites de l'aide humanitaire, Lausanne, 2006-2007, p. 62.

140 Une des limites les plus importantes est que l'intérêt public pour une catastrophe ne dure pas longtemps et donc que les fonds pour la phase de reconstruction ou l'après crise sont plus difficiles à mobiliser

141 Jean François MATTEI, Op. Cit. p. 135.

142 Idem.

143 Un violent séisme de magnitude 8,9, a touché le nord-est du Japon, a provoqué un énorme tsunami. Une série de vagues, dont la plus importante a atteint dix mètres de haut, a atteint les côtes nippones. Le bilan des pertes humaines s'alourdit d'heure en heure.

144 Selon Jean François DENIAU, le risque pour l'humanitaire « est moins l'excès de médiatisation que l'excès d'immédiatisation ».

145 Dans un contexte de crise, les médias nourrissent l'humanitaire dans l'optique d'édifier les consciences et réunir les moyens de l'aide.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

lorsque arrivent les premiers secours, et que les responsables politiques des pays donateurs se rendent sur place pour manifester la solidarité de leurs nations envers les populations frappées par le malheur. Bien souvent d'ailleurs, les médias ne couvrent ces sujets que parce que les hommes politiques effectuent une visite sur place, et les hommes politiques ne sont là que pour les journalistes qu'ils emportent avec eux dans l'avion. La tragédie ne sert alors que de toile de fond avec ses alignements de tentes ou de huttes de branchage, les enfants faméliques dans un dortoir sordide ou jouant devant les caméras et en guise de commentaire, l'interview d'un agent humanitaire arborant sur le dos le sigle de son organisation et appelant la communauté internationale à accroître son aide. Invariablement, l'émission se termine par le passage d'une bande annonce donnant le numéro de compte en banque de l'organisation. Dans un tel contexte, les fonds pour la phase de reconstruction où l'après crise sont plus difficiles à mobiliser et par conséquent, les perspectives de reconstruction moins envisageables. Ainsi dans un monde acquis à la cause du sensationnel où les événements se chassent les uns les autres à une vitesse accélérée, il s'agit comme le pense Jean François MATTEI, de garder une perspective globale, dans laquelle la durée de l'action devient non pas l'opposé de l'urgence mais son complément indispensable. Une approche que devrait intégrer bon nombre d'ONG humanitaires qui transforment l'action humanitaire en une sorte de marché.

B- / Hr2 1 * IHIe PDrH)WPDQitD1H146

Comme l'a mentionné Ernest-Marie MBONDA147, l'action humanitaire mobilise des associations et des organisations qui déploient de plus en plus des moyens colossaux pour accomplir leurs missions. Au cours de ces dix dernières années, remarque Rony BRAUMAN, « Le mouvement humanitaire est passé de l'artisanat à l'industrie, de la pénurie à l'opulence grâce à la générosité du public, certes, mais surtout grâce aux énormes financements

148.

gouvernementaux »Les organisations humanitaires ont développé d'imposants appareils, recruté du personnel, constitué des stocks. Devenues des « entrepreneurs de causes », elles tendent à identifier leurs intérêts d'institutions avec ceux des victimes, réelles ou supposées, c'est-à-dire à confondre les fins qu'elles poursuivent avec les moyens qu'elles mettent en oeuvre. De plus en plus considérés comme de grands opérateurs économiques, les

146L'extrait « marché de l'humanitaire » est tiré de l'ouvrage d'Ernest-Marie MBONDA, L'Action humanitaire en Afrique lieux et enjeux, Op.cit. p. 78.

147Ernest-Marie MBONDA, Op. Cit. p. 76. 148Ernest-Marie MBONDA, Op. Cit. p. 78.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

organisations humanitaires modernes se livrent à des achats d'équipements, de vivres, de couvertures, de médicaments, parfois inadaptés au contexte de leurs interventions. Dans l'urgence, chaque organisation essaye tant bien que mal de jouer sa partition et dans cette optique, chacune d'elle se livre à des batailles acharnées et à une concurrence féroce149 dans l'optique parfois d'être sélectionnée comme des agences de sous-traitance des organisations internationales et des Etats. Pour ces organisations, il s'agit de plus en plus d'engranger des points pour plaire aux donateurs et de ce fait, obtenir leur soutien financier. Dans le cas du tsunami en Indonésie, MSF constata que « nous sommes face à un vrai paradoxe : la multiplication des initiatives rend de plus en plus difficile le travail sur le terrain. C'est la course de la visibilité : des ONG veulent montrer à leurs donateurs qu'elles font bien quelque chose de leur argent »150. Dans le même ordre d'idée, on assiste très souvent à la survenue d'une crise nécessitant une intervention humanitaire, à la naissance spontanée de certaines ONG parfois sans statut réel. Aussitôt la gestion de l'urgence terminée, (gestion qu'elles assurent très peu), celles-ci comme des fantômes disparaissent dans l'ombre.

Dans un tel contexte quelle place occupe la « reconstruction » ? Cet état des choses ne justifie t-il pas les dérives rencontrées en Indonésie et en Haïti dans le cadre de la reconstruction ? En effet, l'échec de la reconstruction ou alors de son érection à une place de choix dans le champ de l'humanitaire (et de ses acteurs) émane des actions ou du comportement de certaines ONG. Soit elles existent réellement et ne s'impliquent pas véritablement dans le processus de reconstruction, soit elles naissent pour la circonstance et disparaissent aussitôt que leurs objectifs privés sont atteints.

Au final, la transformation de l'action humanitaire en une sorte de marché peut être considérée comme l'une des formes les plus pernicieuses de la perversion de l'action humanitaire, biaisant à coup sûr les perspectives envisagées pour la reconstruction. A côté des limites ci-dessus relevées, nous allons évoquer les limites liées aux fonds.

Paragraphe 2 : Le détournement des fonds consacrés à la reconstruction et le non-
respect des promesses faites par les donateurs

Le détournement des fonds (A) et la réalisation partielle des promesses pour la reconstruction (B) constituent effectivement une entrave à celle-ci.

149 Batailles dans lesquelles le recours aux pots-de-vin et à la corruption ne sont pas rare.

150Thomas HOFNUNG et Eliane PATRIARCA, « Embouteillage pour l'aide en Asie », disponible sur http://www.liberation.fr/evenement/0101515049-embouteillage-pour-l-aide-en-asie (Consulté le 18 avril 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- Le détournement des fonds consacrés à la reconstruction

La survenue d'une crise de grande ampleur appelle une mobilisation conséquente, tant sur le plan humain que sur le plan des fonds. Dans l'euphorie de l'urgence, ces fonds dans la majorité des cas font l'objet de détournements. C'est une situation endémique dans les contextes d'instabilité publique que connaissent certains pays (fait naturel ou anthropique). La pratique est devenue systématique. Les coupables parfois circonstanciels bénéficient d'une impunité totale. C'est une pratique à haut rendement et à bas risque, qui concerne tout le monde : les fonctionnaires et les élus, le Parlement, le pouvoir exécutif, le monde judiciaire, le secteur privé, les acteurs humanitaire etc. Dans le cas de Haïti, Marilyn ALLIEN151 déclarait déjà : « La gestion de l'argent nous inquiète : nous craignons qu'une partie de l'aide soit détournée et ne bénéficie pas aux Haïtiens qui en ont besoin »152. Un an plus tard en effet, seulement 38 pour cent des fonds ont été dépensés pour aider à la reconstruction d'Haïti, selon un sondage réalisé par le Chronicle of Philanthropy . En Haïti, on soupçonne largement que de grandes sommes d'argent ont été détournées vers les caisses des ONG et des organisations humanitaires153. L'Indonésie ne fut pas en reste. En effet, malgré le succès relatif qu'on lui reconnaît la reconstruction indonésienne a connu un retard à cause des détournements de fonds, la corruption et la mauvaise gestion. Le non respect des promesses faites par les donateurs dans le cadre de la reconstruction constituent également une limite à la reconstruction.

B- L'inexistante ou partielle réalisation des promesses des donateurs

Les crises dévastatrices ont la particularité de fragiliser les institutions économiques d'un pays. C'est à ce niveau qu'intervient la communauté internationale qui, à travers des actions concertées décident du montant du financement à allouer pour le relèvement du pays en crise. Cependant, le constat malheureux qui est souvent fait est celui de l'exécution tardive ou même de l'inexécution des promesses de financement. En Haïti, un an à peine, plus de cent cinquante gouvernements et autres acteurs internationaux s'étaient réunis pour contribuer significativement au relèvement et à la reconstruction d'Haïti après le tremblement de terre souffert par ce pays le 12 janvier 2010. La solidarité fut absolument louable, à s'en tenir aux

151 Présidente de la Fondation Héritage pour Haïti, la branche locale de Transparency International.

152Le Monde, <4 Reconstruction d'Haïti : le casse-tête de la corruption », disponible sur http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/02/02/reconstruction-d-haiti-le-casse-tete-de-la corruption_1300040_3222.html (Consulté le 29 avril 2011).

153Bill Van AUKEN, <4 Un an depuis le séisme en Haïti », dispo sur

http://wsws.org/francais/News/2011/jan2011/hait-j14.shtml (Consulté le 29 avril 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

déclarations. En effet, le montant promis de neuf milliards de dollars pour la reconstruction, dont cinq à verser dans les deux premières années, plus les offres supplémentaires en nature, quoique insuffisantes, traduisaient une volonté de coopération indéniable. Le principe déclaré de dégager cette aide selon les priorités du gouvernement haïtien, de façon à renforcer l'autorité de l'État, impliquait le respect de la souveraineté de ce pays meurtri et des prérogatives de ses autorités gouvernementales. Il semblait donc exister une volonté universelle de preter de l'aide à cette nation héroïque, la première à avoir brisé le joug colonial et aboli l'esclavage sur le continent américain.

Mais ce qu'il est advenu depuis n'a pas été en accord, hélas, avec l'esprit qui avait régné à cette conférence du 31 mars 2010, alors que, pourtant, nombre de ce qu'on appelle « les principaux donateurs » continuent de consacrer des ressources exorbitantes à la guerre et à l'intervention militaire. L'aide financière et matérielle promise, bien qu'insuffisante au regard de l'ampleur du problème, n'a pas été déboursée. La volonté du gouvernement haïtien n'a pas été respectée, pas plus que ses priorités. La reconstruction d'Haïti envers laquelle la communauté internationale s'était engagée reste en attente. L'Indonésie trois ans après le tsunami se retrouvait (peut être à basse échelle) dans la même situation154. Au demeurant, il n'y a pas que le défaut d'implication des acteurs ou l'absence de financement qui représente un frein à la reconstruction ; certaines pratiques humanitaires peuvent aussi en effet fragiliser celle-ci.

Section2 : Les pratiques de l'action humanitaire comme une entrave à la reconstruction.

Lorsque survient dans un lieu donné une catastrophe naturelle de grande envergure, on assiste généralement à un déploiement humanitaire colossal. Parce que spécialisés parfois dans des domaines semblables, ces acteurs humanitaires qui interviennent dans l'urgence dupliquent des interventions similaires dans un même rayon et pour la même population. On parle dans ce cas du défaut de coordination, sans laquelle il serait difficile d'envisager la démarche vers la reconstruction. Aussi, il faut noter que, dans un contexte de crise naturelle où il n'existe pas d'une part une cohésion au niveau politique et d'autre part une fragilité au niveau économique, il est très difficile de réaliser les objectifs de reconstruction (paragraphe

154Thomas KAUFFMANN, « La reconstruction après le tsunami, bilan provisoire », disponible sur http://www.thomas-kauffmann.tk/travelblog/?p=40 (consulté le 30/04/2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

1). Par ailleurs, l'on a souvent remarqué dans les interventions humanitaires que les acteurs marginalisent ou alors prennent très peu en considération l'apport des populations locales. Et dans la même logique ce sont des modèles de reconstruction parfois inadaptés au contexte qui veulent être imposés bafouant ainsi les considérations culturelles du pays sinistré (paragraphe

2).

Paragraphe 1 : Le défaut de coordination Humanitaire et l'instabilité politico-
économique comme entraves à la reconstruction.

En effet, lorsque la coordination humanitaire (A) est défaillante et le contexte politicoéconomique (B) chaotique, il est difficile d'envisager la réussite de la reconstruction.

A- Le défaut de coordination Humanitaire : un obstacle à la reconstruction.

En effet, face à l'aggravation à la multiplication et à la complexification des situations 10YEcitiiILhs IClurgence nées des catastrophes naturelles ou anthropiques, la nécessité de coordonner l'assistance à apporter aux victimes est devenue en elle-meme une urgence. C'est donc par les résolutions 46/182 du 19 décembre 1991, 47/168 du 22 décembre 1992, 48/57 du 14 décembre 1993 et 49/139 du 20 décembre 1994 que les UN ont entrepris une construction institutionnelle et normative visant à rationaliser les opérations humanitaires et à renforcer le rôle du secrétaire général dans l'aide humanitaire d'urgence et le secours en cas de catastrophes naturelles. On parle à cet effet de la coordination de l'action humanitaire. Elle a pour but de limiter les duplications d'interventions similaires dans un meme rayon d'action et pour la même population. Selon Jean Didier BOUKONGOU, « OaEILIisRc ICVtILeEICIEOa E coordination se justifie également par la réalité selon laquelle, dans une bousculade humanitaire, il peut y avoir un gaspillage de ressources qui peut avoir une grande incidence sur la population assistée à long terme »155.

Au vu de ce qui précède, il apparaît clairement qu'en l'absence d'une véritable coordination humanitaire, l'on ne saurait envisager une réussite de la reconstruction post crise156. Si les fonds reçus excédents et que les actions menées ne sont pas concertées ou coordonnées que faut-il attendre pour la reconstruction ? On l'a vu, l'aide est beaucoup plus efficace quand tout le monde tire à la meme corde. Il s'est avéré dans des cas de désastres majeurs comme l'ouragan Katrina en 2005 ou le séisme d'octobre 2005 au Pakistan que

155Jean Didier BOUKONGOU, Cours de coordination de l'action humanitaire, Master droits de l'homme et Action humanitaire, UCAC/APDHAC, année académique 2010-2011, inédit, p. 3.

156 La gestion de l'urgence étant elle-même défaillante.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

malgré la présence de nombreuses organisations humanitaires, les secours n'ont pas pu etre efficaces par manque de coordination ou de logistique. Ce fut aussi frappant dans le cas du tsunami. Dans ce dernier cas particulièrement en Indonésie, et malgré le fait que bon nombre d'observateurs s'arriment à dire que la reconstruction indonésienne a été un succès, nous avons assisté à ce que Pierre MICHELETTI a appelé le « Grand Barnum Humanitaire »157. Une situation qui entraîna notamment l'intervention d'innombrables petites associations aux domaines de compétences parfois aussi diverses qu'approximatives qui révélèrent des difficultés de coordination. Aussi, Le bureau de l'ONU chargé de coordonner l'aide humanitaire a reconnu avoir été vite dépassé : « Il y avait tellement d'organisations qui voulaient aider qu'il n'était pas facile pour elles de trouver un rôle »158. En Haïti également la coordination a eu du mal à se mettre en place159 du fait meme de la pluralité d'acteurs et d'actions non concertées sur le terrain. On aurait dit « une petite compétition entre amis ». En effet, l'importante médiatisation et la vive émotion que cette catastrophe a suscité au delà des simples frontières haïtiennes ont permis, dans les jours qui ont suivis le 12 janvier, d'obtenir une relative assistance internationale en matière de secours d'urgence. Les États se bousculaient alors pour « se tenir aux côtés » des Haïtiens en « cette période difficile »160. Exprimant tour à tour leur « profonde émotion»161, une course à l'assistance a été lancée dans les quelques jours qui ont suivis le séisme. Dans un tel contexte la reconstruction ne peut qu'etre un leurre dans la mesure où, s'il est admis que la reconstruction passe par une bonne gestion de l'urgence, on comprendrait alors que l'échec de cette dernière ne puisse qu'avoir des conséquences néfastes sur la reconstruction. Il est évident néanmoins que, lorsque la coordination est défaillante dans un contexte de crise, c'est parfois le fait de l'instabilité politique et économique qui sévit dans le pays en cause.

B- L'instabilité politique et économique comme un frein à la reconstruction.

1- I Iftxkuflfkysnfkfqxi

On parle d'instabilité politique dans un pays donné et pendant une période donnée lorsque règne un chaos au sein des institutions politiques ou étatiques. Elle constitue une

157 Pierre MICHELETTI, Op. Cit. p. 83.

158 Maragareta WAHLSTROM, la coordonnatrice adjointe des secours d'urgence des Nations unies.

159 Le chaos actuel dans le quel vit Haïti nous amène même à conclure que cette coordination a été inexistante. Ce qui a favorisé la récupération de la conduite des opérations de secours par l'armée américaine.

160América gov, « Développement en Haïti »Auteur, disponible sur http://www.america.gov/st/developfrench/2010/January/20100113153202esnamfuak8.532351e 02.html?CP.rss=true (Consulté le 19 avril 2011). 161Le monde, « Catastrophe haiti Sarkhozy fait part de sa profonde émotion » disponible sur http://www.lepoint.fr/actualites-monde/2010-01-13/catastrophe-haiti-sarkozy-fait-part-de-sa-profondeemotion/924/0/412940 (Consulté le 19 avril 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

véritable entrave à la reconstruction post-crise dans la mesure où il faut reconnaître que dans un climat de tension, il est presqu'impossible de penser la reconstruction. Chaque partie voulant faire valoir ses arguments par la force, de nombreuses pertes sur le plan humain et sur le plan matériel en résultent en termes de conséquences. On n'envisagera donc mieux la réussite de la reconstruction que dans un contexte de paix. A Aceh par exemple que l'on présente comme un exemple de reconstruction réussie, un conflit opposait depuis 1976 l'armée indonésienne au Mouvement pour un Aceh libre (GAM)162. Avant le 26 décembre, la province d'Aceh était sous administration militaire, et personne ne pouvait y accéder. La zone était très peu développée, et le taux de vaccination peu élevé. Depuis le tsunami, un processus de paix a été engagé ce qui sans doute a favorisé les avancées que l'on a observés en termes de reconstruction du pays.

Par ailleurs, le climat d'insécurité engendré par l'instabilité, favorise généralement l'intrusion d'une nouvelle forme d'acteurs que sont les militaires, (guidés par des intérêts géostratégique (s) et géopolitique (s), sous le couvert de la « responsabilité de protéger » ; une responsabilité de protéger qui, sauf erreur de notre part, s'inscrit dans le cadre strict de l'urgence163. Dans le cas haïtien164 par exemple, la chef de la diplomatie de l'UE165 Catherine ASHTON dans un communiqué signé également par les commissaires européens chargés respectivement du développement et de l'aide humanitaire Andris PIEBALGS et Kristalina GEORGIEV a fait mention de ce que, l'instabilité politique en Haïti ralentit et complique le processus de reconstruction. Il faut noter que, la stabilité et le fonctionnement démocratique d'Haïti constituent une condition préalable nécessaire pour que l'ensemble de la communauté internationale puissent coopérer dans l'optique de définir les besoins prioritaires du pays. Le

162 Banda Aceh, le 6 février. Le conflit avec le GAM «ne crée pas un environnement favorable à la reconstruction», indique le ministre indonésien des Affaires sociales.

163 N'ya t-il pas lieu de parler aujourd'hui d'une responsabilité de reconstruire ?

164 Il faut rappeler ici concernant la situation politique que, Haïti connaît une vie politique instable, marquée par plusieurs coups d'État, avant l'avènement au pouvoir de François Duvalier, en 1957. Celui-ci instaure un régime autoritaire qui exerce une sévère répression contre toute forme d'opposition. À la mort de Duvalier, en 1971, son fils François lui succède à la tête du pays. Il faut attendre 1986 avant que la contestation, qui s'amplifie depuis quelques années, n'entraîne le départ de Duvalier en exil. La Constitution adoptée en 1987 prévoit des réformes démocratiques, mais les militaires reprennent le contrôle du pays qui est brièvement dirigé par un président élu, Jean-Bertrand Aristide, en 1990-1991. Forcé à l'exil par l'armée, celui-ci revient au pouvoir en 1994 avec l'appui des Américains. Malgré la tenue d'élections, la vie politique à Haïti, un État d'une grande pauvreté, demeure cependant instable et imprévisible.

165 L'UE est le premier bailleur de fonds au monde en faveur d'Haïti. En mars 2010, elle s'était engagée à apporter au gouvernement haïtien une aide de 1,2 milliard d'euros. A ce jour, l'UE a engagé quelque 600 millions d'euros, soit plus de la moitié des fonds promis. A elle seule, la Commission a promis une aide de 522 millions d'euros dont 330 ont fait l'objet d'engagements.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

processus électoral chaotique166 que connaît Haïti ne saurait dans ce sens constituer une aide pour le relèvement du pays167. C'est en effet à cause de cette instabilité et à cause de la coordination défectueuse168que la récupération de la gestion des opérations par l'armée américaine a été favorisée. Une gestion fortement contestée quant aux perspectives de reconstruction. Une interrogation nous vient à l'esprit. S'il est admis que le militaire n'est pas un acteur humanitaire et que dans le cas haïtien, son intervention est pour la plupart du temps guidée par un certain nombre d'intérets géostratégique (s) et/ou géopolitique (s)169, qu'est ce qu'un sinistré dans l'attente d'une rétrocession de ses capacités de choix (reconstruction) pourrait espérer d'une telle intervention ? Cette question pourrait également se poser dans un contexte où les institutions du pays sinistré sont gangrenées par une instabilité politique et par le fléau de la corruption.

2- / IKMEKKIWOKIP IIuTO TOMITOWEu dTOHE IIIDSISn : des blocages pour une mise en MrTOITOffective de la reconstruction.

Lorsque survient dans un pays une catastrophe de grande envergure et que l'économie se porte bien, les possibilités de relèvement sont facilement envisageables. Evoquons une fois de plus le cas du Tsunami japonais de 2011 où les nombreux dégâts provoqués par la catastrophe ont été chiffrés à coup de dizaines de milliards de dollars170. À moyen terme cependant, l'économie japonaise pourrait rebondir fortement. Dressant un parallèle avec le séisme de Kobe, en 1995, Takuji Ôkubo, économiste à la Société Générale, souligne que la

166A la proclamation des résultats du premier tour, Mirlande MANIGAT arrive en tête avec 31 % devant le challenger Jude Célestin qui obtient 22%. Tous deux s'affronteront donc lors d'un second tour, dont la date avait été fixée provisoirement au 16 janvier. Le grand perdant de cette élection est le chanteur Michel MARTELLY. Pourtant, un groupe d'observateurs financé par l'Union européenne annonçait, sur la base de données recueillie dans 1600 bureaux de votes, qu'un deuxième tour aurait lieu entre Mirlande MANIGAT et Michel MARTELLY. Suite à cette annonce, Port-au-Prince a vécu des scènes de guérilla urbaine mardi soir : des manifestations ont eu lieu, des tirs ont été entendus et des barricades ont été dressées. Michel MARTELLY avait en effet promis une vague de contestation s'il ne passait pas le premier tour et il est capable de mobiliser des milliers d'admirateurs. Cf. http://www.lepost.fr/article/2010/12/08/2333074_election-en-haiti-un-deuxieme-tour-en-pointilles.html

(Consulté le 19 avril 2011).

167 Selon l'Organisation internationale pour les migrations, plus de 800.000 Haïtiens vivent toujours dans des camps de réfugiés dans des conditions très difficiles. A cela s'ajoute une épidémie de choléra qui, depuis son apparition en octobre, a tué 3.651 personnes et fait 171.304 malades, selon les dernières données de l'OMS.

168 Notons ici que la mission des nations unies pour la stabilisation en HAITI déjà sur le terrain avant la crise, et fortement contestée par la population haïtienne, a été également sévèrement affectée par le séisme.

169 Sans nier évidemment l'apport sécuritaire des militaires dans le cadre de l'acheminement de l'aide en Haïti,

170 Deux jours après la catastrophe, les destructions résultant du séisme et du tsunami qui ont frappé le Japon vendredi restent encore difficile à évaluer. Seule certitude : le tremblement de terre aura «un impact considérable sur les activitéS économiques d'un grand nombre de secteurs», a prévenu le porte-parole du gouvernement japonais, Yukio Edano. Des conséquences qui devraient se chiffrer en dizaines de milliards de dollars. Selon le spécialiste de la gestion des risques AIR Worldwide, le coût du seul tremblement de terre (sans compter les devrait atteindre 34,6 milliards de dollars. Cf. http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2011/03/12/04016- 20110312ARTFIG00428-japon-l-economie-rebondira-apres-le-seisme.php. (Consulté le 07 mars 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

reconstruction devrait générer un surcroît d'activité, et le besoin de la population de renouveler ses biens endommagés doper la consommation171. Si le japon se retrouve dans cette situation aujourd'hui, c'est bien parce qu'avant la survenue du drame, l'économie reposait sur des bases solides. On ne peut pas en dire autant d'Haïti où la situation économique et sociale est épouvantable. En effet, l'impact de la catastrophe a été extrêmement grave et il a handicapé un peu plus une économie qui, jusqu'en 2006, avait connu plusieurs décennies de déclin172. C'est également le cas en Indonésie certainement avec moins d'acuité, qui six ans après le tsunami, peine encore à redresser son économie.

Pour reconstruire un pays sévèrement affecté par une catastrophe, les acteurs de la reconstruction tant internes qu'internationaux ont un besoin énorme de fonds. On ne peut cependant pas dire, dans le cas indonésien et haïtien que ce sont les fonds qui ont manqué. En effet, la grande mobilisation orchestrée par les médias a entraîné une abondante générosité aussi bien sur le plan humain que sur le plan financier. Cependant, la reconstruction a été freinée par le fléau de la corruption. Six ans après le tsunami en Indonésie le prolongement de la reconstruction a été confié aux administrations locales, encore minées par la corruption et beaucoup s'interrogent sur leurs capacités à redresser l'économie de la province : Aceh doit maintenant faire face à une croissance affaiblie et à l'augmentation du taux de chômage dûe en partie au départ de la majorité des ONG (qui avaient pour priorité la gestion de l'urgence) et à la fin de la « bulle » des fonds post-tsunami. La reconstruction de la province indonésienne de Banda Aceh, à la pointe nord-ouest de Sumatra, la région la plus meurtrie par le tsunami du 26 décembre 2004, avait été conçue par le président Susilo Bambang Yudhoyono comme un modèle de transparence quant à l'utilisation des fonds - dons individuels d'une opinion mondiale bouleversée et assistance multilatérale des gouvernements. Il avait mis à sa tête un homme à la réputation impeccable sur ce plan, l'ancien ministre de l'énergie Kuntoro Mangkusubroto qui jurait en décembre 2005 que bien qu'un peu de retard ait été pris au démarrage, tout allait se passer "dans une propreté financière totale". Deux ans après le désastre - qui a fait à Aceh 200 000 morts et disparus et 500 000 sans-abri - les nuages commencent à s'accumuler sur l'opération. En effet, Le Bureau de Réhabilitation et Reconstruction (BRR) de M. Kuntoro est accusé depuis août 2006 par

171 «Après le tremblement de terre de 1995, le PIB japonais a crû de 1,9% en 1995, puis de 2,6% en 1996, alors que la croissance moyenne de l'économie nippone sur cette période était de 1,5%. La consommation a progressé de 2,2% entre 1995 et 1996 contre 1,1% en moyenne entre 1995 et 2004», précise Takuji Okubo. (Consulté le 14 mars 2011).

172Voir Crisis Group, Latin America/Caribbean Briefing N°19, Haiti 2009: Stability at Risk, 3 mars 2009.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

diverses Organisations Non Gouvernementales indonésiennes luttant contre la corruption, d'avoir laissé filer plusieurs millions de dollars dans des poches personnelles. M. Kuntoro lui- - même s'est vu reprocher de percevoir un salaire supérieur de plus de 10 % à celui du chef de l'Etat indonésien.

Un an après le séisme en Haïti, la reconstruction ne décolle toujours pas, certes à cause du non respect des promesses qui ont été faites par les donateurs, mais aussi à cause de la corruption. « Où sont passés les milliards promis »? S'interroge Stéphane PALLAGE173. Pour lui, il est loisible de conclure que ces inquiétudes sont fondées en Haïti car basées sur un historique d'institutions fragiles et corrompues. La corruption est bien présente en Haïti et elle freine certainement la reconstruction174. En dehors des limites ci-dessous évoquées, d'autres facteurs sont à même de freiner la reconstruction.

Paragraphe 2 : La non prise en compte des capacités locales ou l'imposition d'un modèle
standard de reconstruction et la marginalisation des facteurs culturels comme entraves à
la reconstruction.

L'examen des capacités locales pour parler de l'Etat (A) précédera celui des facteurs culturels (B).

A- La non prise en compte des capacités locales ou l'effacement de l'Etat comme un

frein à la reconstruction

Selon Jean Didier BOUKONGOU, « Il y a un problème pertinent qui oppose souvent les intervenants locaux à ceux internationaux C'est la récupération des actions des premiers par les seconds, et plus encore la perte d'intér~t sur les capacités locales ou l'ignorance d'efforts consentis antérieurement par des locaux dans l'amélioration de la situation ayant concourue au déploiement des agences humanitaires internationales sur le terrain oft les partenaires régionaux de ces dernières antérieurement déployés ailleurs »175. Ces nouveaux venus se présentent généralement avec des moyens colossaux par rapport aux locaux, et parce que guidés par l'urgence multiplient des actions basiques qui, au demeurant, ont parfois déjà

173 Stéphane PALLAGE est Directeur, Département des sciences économiques et membre de l'Observatoire sur les missions de paix et opérations humanitaires de la Chaire Raoul-DANDURAND.

174Stéphane PALLAGE, « Reconstruire Haïti », avril 2011, disponible sur

http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:cNvO0dq1f_UJ:www.dandurand.uqam.ca/uploads/files/ publications/rflexions/Plan_marshall_haiti_Pallage.pdf+la+reconstruction+frein%C3%A9e+par+la+corruption en+Haïti&hl=fr&gl=fr.

175Jean Didier BOUKONGOU, Cours de coordination de l'action humanitaire, Master droits de l'homme et Action humanitaire, UCAC/APDHAC, année académique 2010-2011, inédit, p. 3.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

été réalisées par les locaux. En effet, les associations humanitaires négligent souvent l'existence des entreprises locales. En envoyant du matériel déjà préfabriqué ou commercialisé sur place, elles entravent l'émergence d'une potentielle reconstruction tout en contribuant à l'essor fulgurant du chômage. Cette situation peut se résumer en ce que Sophie PERCHELLET a appelé « L'absence de L'Etat »176.Tout ceci peut facilement concourir aux conséquences inattendues notamment sur le plan de la reconstruction.

Dans le cas d'Haïti, il faut rappeler que, avant le 12 janvier 2010, les faiblesses d'Haïti existaient déjà. Prenons par exemple le fait que 80% des écoles étaient aux mains du privé (ONG, églises), alors que cette proportion s'élevait à 90% pour la santé. En d'autres termes, le séisme en Haïti a exacerbé l'absence de l'Etat177. En effet, contrairement à l'Indonésie qui doit son succès relatif de la reconstruction en grande partie à son Etat et à sa population, les Haïtiens quant à eux sont les grands absents du processus de reconstruction. Totalement exclus des concertations et des discussions, les mouvements sociaux s'organisent pourtant pour exprimer leurs idées. Les récentes révoltes dirigées contre la Mission des Nations Unies pour la stabilisation d'Haïti (MINUSTAH) ne sont pas seulement l'expression d'un malaise ayant pour cause le choléra. Car les Haïtiens n'ont pas attendu la diffusion de la maladie pour demander le départ de cette mission, au motif que les militaires et les policiers composant les contingents se sont rendus coupables de plusieurs exactions et actes de violence. La population sinistrée occupe une place centrale dans la mise en oeuvre du processus de reconstruction. Cette dernière intègre en effet des aspects qui sont pour la plupart du temps ignorés des acteurs de l'aide internationale. Parce que figés sur un modèle occidental de reconstruction à imposer, ils ne prennent pas en compte, ou alors très peu, les valeurs culturelles qui sont des composantes essentielles pour la réussite de la reconstruction.

B- LtIhFITEFRIXIFIRCMIXBiRC comme une conséquence des valeurs culturelles bafouées.

Par valeurs culturelles, il faut entendre les principes moraux qui se classent en fonction des particularités d'une société178. Lorsqu'elles sont négligées, elles peuvent considérablement occulter les démarches pour la reconstruction. Selon Jean Didier

176 Sophie PERCHELLET, « Haïti, du séisme au choléra : chronique de l'échec de la reconstruction », 13 janvier 2011, disponible sur http://camarade.over-blog.org/article-haiti-du-seisme-au-cholera-chronique-de-l-echec-de-la reconstruction-par-sophie-perchellet-64940141.html (Consulté le 21 avril 2011).

Sophie PERCHELLET est auteure du livre « Haïti : entre colonisation, dette et domination. Deux siècles de lutte pour la liberté », CADTM-PAPDA, 2010, dispo sur www.cadtm.org (Consulté le 21 avril 2011).

177 D'après Daniel Holly professeur au Département de science politique de l'UQAM « L'État haïtien est un État sans substance qui ne vise qu'à satisfaire les intérêts d'une élite. Ses objectifs n'ont rien à voir avec le progrès économique, social, culturel et institutionnel du pays ».

178 On peut y classer les habitudes alimentaires, vestimentaires, religieuses etc.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

BOUKONGOU, « ICIl rlIi à IlilOINlURI lr dlr PDiFillr qXiInlRIéiSRglii iSDr DXx blr4Inr

locaux ou qui ne sont pas adaptés aux réalités locales »179. De manière générale, il ne faut pas négliger les systèmes traditionnels déjà existants. Ainsi, la reconstruction d'habitats ne devrait se faire que dans le respect de la culture locale. En effet, reconstruire une zone d'habitation sans respecter la culture locale comporte un risque d'un démembrement social et d'un appauvrissement économique. Aujourd'hui, la culture locale n'est que trop peu souvent comprise et respectée. L'aide conduit souvent à fournir des aides matérielles (nourriture, vêtements, tentes et maisons) peu appropriées au contexte culturel, alors que les personnes auraient justement besoin de se sentir rassurées à ce moment-là. Une solution serait plutôt d'apporter un appui financier qui permettrait une plus grande autodétermination des populations mais aussi une incidence positive sur les économies locales.

L'exemple du tsunami illustre bien ce fait. La reconstruction à été confiée à des ONG qui ont le plus souvent fait appel à des entreprises de construction, lesquelles tendent plutôt à aligner des blocs uniformes de béton que de conserver le style architectural et d'utiliser des matériaux indigènes. De plus, il a été décidé de construire des maisons neuves pour tous, que les gens aient perdu leur toit ou non. De nombreuses maisons intactes, riches en histoire, ont donc été rasées pour reconstruire des blocs tous similaires. Dans de tels lieux, les familles ne peuvent pas réorganiser leur vie selon leurs propres besoins socioéconomiques et culturels. Les rapports de voisinage qui peuvent jouer un rôle fondamental pour le bien-etre d'un groupe, sont également sacrifiés. Il existe alors un grand risque de perte culturelle, de démembrement social et d'appauvrissement économique. Il aurait été préférable de donner aux gens une aide financière pour qu'ils puissent rebâtir eux-mêmes leurs maisons, selon leurs habitudes. Il est donc fondamental du coté des fournisseurs de l'aide de toujours se poser la question de savoir, quelle reconstruction serait la mieux adaptée aux besoins de la population ciblée ? Il ne s'agit donc pas comme le font bon nombre d'acteurs d'imposer un quelconque modèle standard de reconstruction pour la plupart du temps importé. Chaque pays est attaché à une histoire et à un certain nombre de valeurs qui lui sont propres. Occultées, surtout dans un contexte de crise, il est certain que même si des démarches pour la reconstruction sont entamées, elles seront vouées à l'échec. Sans rester sur une note amère, la reconstruction haïtienne peut trouver une solution à travers un certain nombre de facteurs.

179 Jean Didier BOUKONGOU, Logistique humanitaire, Master droits de l'homme et Action humanitaire, UCAC/APDHAC, année académique 2010-2011, inédit, p. 5.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

CHAPITRE II
PERSPECTIVES POUR UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA

RECONSTRUCTION DANS L'HUMANITAIRE

Tout au long du chapitre I, il a été question de voir qu'est ce qui pouvait dans le cas indonésien et haïtien constituer une entrave à la réussite d'une reconstruction. Celle-ci est fondamentale pour que la dignité humaine soit respectée. Il est donc important voire crucial de repenser son encadrement à travers un certain nombre de perspectives qui pourraient contribuer à sa réussite. Dans cette logique et en admettant qu'il existe certains facteurs universels sans lesquels la reconstruction serait un échec180, il sera alors question pour nous dans un premier temps d'envisager des perspectives sur le plan interne (section I) et dans un second temps, il sera question pour nous de montrer comment à travers la mise en oeuvre de l'approche participative et la considérable implication des Etats et des médias, il est possible d'envisager le succès de la reconstruction (section II).

Section1 : Perspectives internes pour une meilleure reconstruction

L'ancien président haïtien René Préval181 reconnaît que la stabilité politique, l'Etat de droit et la sécurité sont essentiels pour le succès de la reconstruction. Pour se faire, les institutions démocratiques de son pays doivent être renforcées (paragraphe 1). Il est également important pour une meilleure reconstruction que soit pris en compte les aspects socioéconomiques sans oublier par ailleurs, (un facteur souvent négligé) les atouts dont dispose la société civile (paragraphe 2).

Notre exposé dans ce cadre sera principalement axé sur le cas haïtien, parce que considéré par rapport au cas indonésien comme le plus récent et plus inquiétant en matière de reconstruction.

Paragraphe 1 : La préservation de la stabilité politique et le rétablissement de la

sécurité et de l'Etat de droit, comme clé de voûte du succès de la reconstruction.

L'on ne saurait en effet, envisager le succès de la reconstruction dans un Etat gangrené par des conflits internes, des guerres civiles, et par de nombreuses restrictions économiques

180 Notre énumération, il faut le noter est non exhaustive et de ce fait peut faire l'objet de compléments.

181 Le candidat Michel MARTELLY est proclamé vainqueur du second tour de l'élection présidentielle du 20 mars avec 716 986 voix (67.57%)», a déclaré le porte-parole du CEP Pierre-Thibault Junior.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

(A). Aussi, la sécurité et l'Etat de droit sont à considérer comme des atouts majeurs pour la réussite de la reconstruction (B).

A- La préservation de la stabilité politique : moteur de la reconstruction

En effet, pour qu'on puisse envisager la réussite de la reconstruction dans un contexte post-crise, il est nécessaire que soit instauré un climat politique stable. Dans le cas haïtien, il faut déjà rappeler que depuis 2007, les efforts combinés de la MINUSTAH et de la police nationale d'Haïti (PNH), ont contribué à réduire les menaces de violences politiques. La stabilisation d'Haïti dans le sillage du séisme requiert un gouvernement et des ministères opérationnels et essentiels, comme ceux de l'intérieur, de l'économie et des finances, de la planification et de la coopération internationale, de la justice, de l'agriculture et de l'éducation ainsi qu'un renforcement du ministère des affaires sociales, considérés comme les garants de la stabilité politique dans un pays. Celle-ci constitue une condition préalable nécessaire pour que l'ensemble de la communauté internationale puissent coopérer avec un partenaire légitime, capable de définir les besoins prioritaires du pays. Elle est ainsi un enjeu crucial dans la mesure où elle est extrêmement nécessaire à la prise de décisions importantes concernant la reconstruction. Cette stabilité politique passera sans doute par l'institution des élections libres et transparentes. Edmond MULLET représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies semble partager notre point de vu lorsqu'il insiste sur « la nécessité d'une élection présidentielle en 2010 afin d'éviter un dérapage constitutionnel alors que le pays est

assif »182.

B- / INMEGIIIPI111dI10110,allfifIREIBW WiffIlaRit

La sécurité et l'état de droit sont essentiels à la transition d'un pays en crise de la phase d'urgence et de relèvement vers la reconstruction et la préservation des gains de la stabilité. En Haïti, le niveau de présence de la PNH dans la rue grandement affectée par la catastrophe a fait montre de ce désir de préserver cette sécurité. La MINUSTAH qui se remet de la plus grande tragédie humaine de l'histoire des Nations Unies a été renforcée par 3 500 militaires et policiers dont la mission est d'appuyer la PNH. Depuis la catastrophe, la MINUSTAH a contribué au redressement institutionnel de la PNH pour veiller au maintien de la présence de celle-ci dans les rues183. C'est donc un apport fondamental pour la

182 The Associated Press, « UN envoy Haiti should hold presidential election », 4 mars 2010.

183 Les organisations de secours ont été encouragées à apporter une aide aux fonctionnaires et agents de la PNH. Des tentes fournies par la MINUSTAH ont été dressées à l'école de formation de la police ; la République dominicaine, (Consulté le 23 mars 2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

reconstruction que de rétablir la sécurité dans un pays. Les Etats en général et ceux vivant des situations de crises humanitaires en particulier éprouvent souvent beaucoup de difficultés à gérer les problèmes d'insécurité émanant de ces crises. Les pillages qui pour la plupart se sont produits dans les quartiers les plus durement touchés du centre-ville de Port-au-Prince, les cambriolages à domicile et car-jackings survenus peu après le tremblement de terre, les activités criminelles et notamment les viols, meurtres et enlèvements, les violences sexuelles ainsi que le trafic de cocaïne représentent une vraie gageure pour le travail humanitaire et par ricochet, un obstacle fondamental à la reconstruction.

La reconstruction passe également par la restauration de l'Etat de droit. À cause du problème de corruption, l'Etat de droit peine à se consolider en Haïti. Les actions engagées dans le sens de la reconstruction doivent l'être sur la base de l'instauration d'un pouvoir judiciaire fort et indépendant mieux, sur le respect des principes de la démocratie garanties de la consolidation de l'Etat de droit. Par ailleurs, l'amélioration du contexte socio-économique et l'apport de la société civile peuvent s'avérer être des atouts majeurs pour la réussite de la reconstruction.

Paragraphe 2 : Répondre aux besoins socio-économiques et établir un consensus
national.

En dehors des ébauches de solutions évoquées ci-dessus, il faut reconnaître que, lorsque sur le plan social et économique certains besoins ne sont pas comblés, le succès de la reconstruction est en péril (A). Aussi, l'absence de concertation nationale peut constituer un véritable frein à la reconstruction (B).

A- Répondre aux besoins socio-économiques

Les situations faisant suite à une catastrophe sont un terrain fertile à l'instabilité. Alors que la phase de l'urgence destinée à sauver des vies ralentit, les administrations sont souvent de plus en plus confrontées aux défis liés à une situation socio-économique exacerbée, touchant à la crise. Des maux structurels et profondément enracinés tels qu'une pauvreté omniprésente, alimentée par une croissance rapide de la population, un taux de chômage très élevé184, un accès limité à des services fondamentaux, l'absence d'infrastructures de base, la

184 La destruction de 30 000 édifices commerciaux et de plus de 180 bâtiments publics a aggravé le chômage. Seules 40 pour cent des usines sont en état de fonctionner et les opérations des ministères de l'État ont été réduites, en raison de contraintes spatiales. 43 % de la population active était constituée de travailleurs indépendants, de petits commerçants appartenant au secteur informel, qui dans bien des cas géraient leur entreprise à partir de leur domicile. Un quart de million de ces domiciles ont été détruits et un autre quart de million sont inutilisables en raison des dommages subi.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

dégradation de l'environnement et des pénuries alimentaires rendent difficiles la bonne marche de la reconstruction. En termes de chiffres et selon les rapports de l'OCHA et les autorités de reconstruction d'Haïti, environ 200 000 personnes déplacées se trouvent dans des zones à haut risque d'inondation et de glissement de terrain. L'OIT quant à elle estime qu'au moins 90 000 emplois ont été totalement perdus, ainsi qu'au moins 100 000 entreprises à domicile, ce qui pourrait signifier une perte de recettes pour près d'un million de personnes185

B- /atnpc1-liiiitOPn tc1411-nsus national autour de la reconstruction

En Indonésie, on a assisté à une sorte d'union nationale pour la reconstruction186. Des accords de paix ont été signés dans ce sens, restaurant la relative paix visible dans le pays. L'unique objectif national était de reconstruire à tout prix. Ainsi, Haïti doit s'inscrire dans la même logique. La reconstruction d'Haïti doit etre le fruit d'un effort commun. Elle ne peut etre un projet émanant seulement de l'État haïtien et de la Communauté internationale. La société civile haïtienne a fait montre à plusieurs reprises de ses capacités et de sa résilience. Il est donc aisé de reconnaître son rôle et la réponse appropriée qu'elle peut apporter dans l'orientation et l'exécution des projets de reconstruction. L'intégration participative de la société haïtienne devrait passer par la mise en place de mécanismes de concertation et d'information à la population et par l'inclusion des acteurs de la société civile haïtienne au sein des mécanismes de coordination de l'aide comme la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d'Haïti (CIRH). Ceci démontrerait une volonté de rupture avec la dynamique d'exclusion des forces sociales, notamment les organisations de femmes 187(celle-ci dénoncent leur très faible inclusion dans le PARDN, alors que leur participation au processus de reconstruction est essentielle)188 et paysannes, les mouvements de jeunes et les conseils de développement communautaire. Une telle mobilisation des secteurs marginalisés pourrait contribuer à une reconstruction basée sur la justice sociale et tournée vers le renforcement de

185 Ibid.

186 La mobilisation a été très forte en Indonésie sur le plan national. Société civile, ONG, Etat et autres y ont grondements contribué.

187 Marie St-Cyr, une militante haïtienne déclare à cet effet « Nous nous inquiétons du fait que, bien qu'il traite de questions transversales comme les questions des femmes, il s'agit en grande partie de rhétorique. Nous souhaitons que le gouvernement haïtien et la communauté internationale s'engagent à intégrer véritablement les femmes et les organisations féministes à l'ensemble du processus »

188 Au Sri Lanka par exemple et selon une analyse du groupe URD, beaucoup d'organisations dirigent leur attention vers les femmes et les foyers ou le chef de famille est de sexe féminin. Les projets qui se centres sur des catégories ou des groupes sociaux spécifiques paraissent plus à même de revêtir des objectifs consistant à déléguer les responsabilités et produisent des effets sur les individus à plus long terme et une solidarité de groupe.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

la cohésion nationale. Elle permettrait aussi la construction d'un consensus national autour du projet de la reconstruction d'Haïti.

D'autres facteurs sont à même de contribuer à la réussite de la reconstruction en Haïti.

Section2 : La mise en oeuvre de l'approche participative et le rôle catalyseur des Etats et
des médias pour une reconstruction efficace.

Il est certes vrai que la reconstruction d'un pays qui a été affecté par une catastrophe, incombe au premier chef à l'Etat. Mais, l'ampleur du drame concourt pour la plupart du temps, à la fragilisation de cet Etat. D'où le rôle fondamental de l'aide fournie par la communauté internationale. Celle-ci malheureusement (guidée parfois par un certain nombre d'intérets) est souvent fournie en marge des actions engagées dans ce sens où encore, sans la concertation et la participation des bénéficiaires de cette aide. Il s'avère donc important pour une meilleure reconstruction, de favoriser l'approche participative qui passera certainement par la valorisation du rôle des structures locales et la participation des populations dans le processus de reconstruction (paragraphe 1). Il sera également question pour une reconstruction efficace d'encourager les donateurs à s'exécuter par rapport à l'aide promise en passant par la réduction de la dette extérieure. Au final, le renforcement d'un cadre juridique spécifiquement dédié à la reconstruction pourrait etre d'un apport indéniable dans le cadre de l'amélioration de la reconstruction (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La mise en oeuvre de l'approche participative : Un facteur clé pour la
réussite de la reconstruction.

Les victimes ne doivent pas rester passives. Il faut leur donner les moyens de retrouver un statut d'acteur économique et de devenir actrices dans la gestion des crises. Mais c'est aussi s'appuyer sur les éléments déjà à disposition, comme au Tchad où des producteurs locaux ont pu approvisionner des camps de réfugiés. Comme le veut le projet sphère, il faut intégrer l'économie locale à l'aide autant que possible. Ainsi, la mise en oeuvre de l'approche participative ne sera une réussite que si l'on prend en considération le rôle important que peuvent jouer les secours locaux d'une part (A) et d'autre part la participation effective des populations dans le processus de reconstruction (B).

A- / ipssRuunicRXas lRcaXt danRIWXRBIKIRIDrecRVNIXHIRn

Si on parle d'abord de la réponse à ce type de catastrophe, il est évident de remarquer que tout le monde a occulté le fait que les secours les plus efficaces dans les heures suivant la

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

catastrophe avaient été locaux. Les vies sauvées l'ont été par les voisins et les proches, par les médecins et les secouristes des régions et des pays frappés par la tragédie. Si, dans les premières heures, les autorités nationales ont certes été désorganisées et confrontées à des difficultés logistiques pour atteindre les zones affectées, leur mobilisation a été réelle pour faire face à l'urgence de la situation. Certains pays comme l'Inde ont refusé le déploiement des secouristes internationaux, appelant les ONG à un peu de modestie devant ses propres capacités de réponse à la tragédie.

« Le tsunami a permis ainsi de rappeler une autre évidence: les humanitaires, pris ici dans un sens large, n'interviennent jamais sur des territoires vierges Le premier niveau de dialogue et de négociation dans ce type de catastrophe doit donc avoir lieu au plus près de la tragédie, sur le terrain, en lien avec les autorités publiques et les communautés concernées »189. En effet, au lieu de seulement penser à mobiliser mécaniquement les secours étrangers et à les projeter vers les zones de la tragédie, il est tout aussi efficace de s'appuyer sur les capacités de réponse locales et régionales aux catastrophes, quand elles existent. Et si ce n'est pas le cas, il serait judicieux de les renforcer ou de les développer avant de nouvelles tragédies. A côté d'initiatives multiples déjà lancées dans ce sens par les ONG, c'est l'objectif que se sont assignées depuis 2005 les Nations Unies au travers notamment de la Stratégie Internationale de Prévention des Désastres (ISDR)190, un sous-secrétariat des Nations Unies basé à Genève. Il reste à voir si ce dispositif sera efficace, mais l'initiative mérite d'être suivie.

B- Bénéficiaires et partenaires : quels rôles pour les populations dans la mise en

XvEeRMIEecR12stEXHIR12191 ?

D'après un constat de François GRÜNWALD Président du Groupe URD, dans les situations de crises, « les humanitaires comprennent en général mal les stratégies de survie des populations et sous-utilisent de façon quasi systématique les capacités desdites « victimes »a et le rôle qu'elles jouent ou peuvent jouer dans leur propre survie »192 (nous étendons meme l'action jusqu'à leur propre reconstruction). Dès lors poursuit-il, « la

189Pierre SALIGNON, « Quelles leçons tirer du Tsunami ? » disponible sur

http://www.youphil.com/fr/article/01417-quelles-lecons-tirer-du-tsunami-de-2004?ypcli=ano, décembre 2009, (Consulté le 12 mars 2011).

190 http://www.unisdr.org/eng/public_aware/world_camp/2006-2007/iddr/2007-iddr-fr.htm (Consulté le 15mai 2011).

191 Ce titre est inspiré par un ouvrage du groupe URD..intitulé Bénéficiaires ou partenaires ; quels rôles pour les populations daQMactiKVhumDJIaire ?, François GRUNWALD (dir.), Paris, Editions KARTHALA, 2005 p. 1.

192 François GRÜNWALD, Bénéficiaires ou partenaires ; quels rôles pour les populations dans l'action humanitaire ?, Paris, KARTHALA, 2005, p. 7.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

possibilité d'impliquer ces populations en détresse dans les programmes d'action humanitaire est souvent éludée, les opportunités que cela offrirait sous estimées et la question des impacts potentiels de cet engagement mal traités »193. Malgré la pluralité de textes en
action humanitaire qui soulignent l'importance de la participation194, « celle-ci sur le plan pratique est moins évidente. En effet, dans les interventions humanitaires, les acteurs tiennent

très peu compte des populations sur le terrain. Considéré parfois comme un marché »195, le
champ de l'humanitaire par le biais de ses acteurs va représenter un exutoire pour ces derniers. Matériel sophistiqué, technologie de pointe parfois en inadéquation avec le contexte. Aussi, voit-on souvent des contrats (à des coûts exorbitants) qui sont passés entre des sociétés étrangères et les ONG humanitaires. La main d'oeuvre dans ce cas est généralement étrangère. Les erreurs du tsunami en Indonésie il y a six ans ne doivent plus se reproduire en Haïti. La reconstruction c'est pour les haïtiens et avec les haïtiens. Cette participation peut donc prendre plusieurs formes. Elle peut donc etre passive, via un apport d'information, par la consultation, via l'apport de matériel et de main d'oeuvre par des initiatives locales et interactives avec à chaque niveau du processus la forte présence des populations locales. Pour que la reconstruction soit une réussite, elle a besoin de financements. Ceux-ci proviennent pour la plus part du temps des promesses faites par les Etats. Le respect de ces engagements contribuera donc certainement à la bonne marche de la reconstruction. Par ailleurs, les médias en ne cédant pas à la logique de l'instantané pourraient etre d'une aide fondamentale.

Paragraphe 2 I ll iESSIRIER IEWEIIERIP édias pour une meilleure reconstruction et la

nécessité de renforcer un cadre juridique spécifique à la reconstruction.
Avant d'analyser la question sur le renforcement du cadre juridique (B), nous allons mettre en

exergue le rôle des Etats et des médias (B).

A- Le respect des engagements pris par les Etats et l'intervention des médias : gage

d'un succ~s de la reconstruction.

Epris par une certaine compassion du fait de la survenue d'une crise dans un Etat tiers, la communauté internationale se sent très souvent interpellée. Celle-ci en guise de réponse promet de verser d'importantes sommes d'argent pour venir en aide aux sinistrés. Malheureusement dans la pratique, leurs engagements ne sont respectés qu'en partie. Pourtant, cet argent s'avère titre un atout majeur pour la bonne marche de la reconstruction. Il

193

Ibid.

194 Code de conduite pour le mouvement et les ONG, charte humanitaire.

195 Ernest-Marie MBONDA Opcit. p. 78.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

ne s'agit donc plus de rester au stade des promesses, mais bien plus. L'objectif de restaurer les victimes dans leurs capacités de choix passera certainement par ces financements. Aussi, l'apport des médias n'est pas négligeable.

En effet, une information fiable, documentée, attentive aux secteurs marginalisés, aux mouvements sociaux, aux communautés et disponible pour diverses audiences à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, s'avère indispensable pour favoriser l'expression et la vigilance citoyennes sur le processus de reconstruction. L'information professionnellement correcte, socialement articulée et dont la diffusion se fait sur une base globale/locale peut contribuer au respect des droits humains dans la gestion de l'urgence et la mise en oeuvre de la reconstruction, alimenter un débat critique sur les interventions, aider à la prise en compte des thématiques sociales, communautaires et de développement durable, contribuer à la promotion d'une vision nationale et une mobilisation des ressources. Dans cette optique, nous considérons les espaces médiatiques comme des observatoires de la reconstruction à travers le suivi des informations, le relais des plaidoyers et l'alimentation des débats citoyens. Assurer la collecte, le traitement et la diffusion quotidienne de l'information relative au processus de reconstruction, sur une base participative, pluraliste, inclusive en interpellant les divers acteurs concernés par la reconstruction : voilà ce qui doit former la trame de l'action des médias pour l'amélioration de la reconstruction dans les pays touchés par une catastrophe.

Toutes les solutions ci-dessus évoquées ne peuvent avoir plus de poids que par le renforcement d'un cadre juridique de la reconstruction.

B- Une réforme humanitaire au service de la reconstruction.

L'action humanitaire se professionnalise, cependant en ce qui concerne le volet de la reconstruction, malgré les démarches qui ont été entreprises dans ce sens, beaucoup reste encore à faire surtout sur le plan juridique196. Les nombreuses exactions observées sur le terrain post-crise rappellent à chaque fois la nécessité sur le plan éthique de concevoir un code de conduite pour la reconstruction. Ce code rappellera aux acteurs nationaux et internationaux qui interviennent dans ce cadre les objectifs et les finalités de leurs interventions à la suite d'une catastrophe. Aussi, il s'avère important d'envisager une réforme humanitaire avec des normes plus solides, spécifiquement dédiées à la reconstruction. Une réforme qui intégrera sans doute des aspects liés à la pauvreté et à des inégalités parfois occasionnées par une gestion accrue de l'urgence. Cette réforme fera également ressortir les aspects liés au financement de la reconstruction.

196 On a fait remarquer ci-dessus la prédominance de l'urgence dans le cadre juridique de l'action humanitaire.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

Par ailleurs, les humanitaires pourraient mettre sur pied des lignes directrices en admettant que certaines actions s'inscrivent dans l'urgence et sont appelées à disparaître en laissant la place à d'autres actions qui s'inscrivent dans la durabilité. On parlera à cet effet de l'action humanitaire transférable. Cela pourrait faire l'objet d'une codification. L'idée d'une action humanitaire a été défendue par Kjell-Ake Norquist qui pense que l'action humanitaire devrait avoir des éléments transférables et des éléments non transférables. Pour lui, l'idée est que l'action humanitaire puisse inclure à la fois des aspects non-transférables, ainsi que des aspects transférables.

CONCLUSION PARTIELLE DE LA DEUXIEME PARTIE

En somme, il apparaît clairement que les améliorations dans la réponse humanitaire ont été significatives en ce qui concerne majoritairement l'urgence. Cependant, force est de constater que toute seule, elle ne saurait combler les objectifs de l'action humanitaire. Remettre l'homme dans ses capacités de choix nécessite d'envisager le volet de la reconstruction. Malheureusement, celle-ci se trouve pour la plupart du temps limitée à cause d'un certain nombre d'obstacles. Il s'est donc avéré nécessaire d'extirper les freins à une reconstruction efficace sur le plan interne et externe et d'en proposer des solutions. Au final, en mettant en exergue le rôle fondamental que devrait jouer la communauté internationale (par le biais des humanitaires) sur le plan de la reconstruction, force est de remarquer que la reconstruction ne saurait être l'oeuvre entière des acteurs humanitaires, mais aussi celle des acteurs locaux. D'où la nécessité de valoriser l'approche participative. Par ailleurs, il faut noter que l'action humanitaire pour la reconstruction d'un pays sinistré, ne s'assimile pas à une assistance humanitaire conçue pour se perpétuer. Au contraire et comme le pense Jean François MATTEI, sa vocation est de se dissoudre une fois l'objectif de remettre l'homme dans ses capacités de choix est atteint.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

CONCLUSION GENERALE

Le débat au sujet de l'intégration de la reconstruction dans le champ de l'humanitaire est resté jusqu'à présent au stade de l'hypothèse et de bonnes intentions, étayé par une définition imprécise du sens et du domaine de la reconstruction.

Notre objectif à cet effet était de mener une analyse sur la problématique de la reconstruction en s'interrogeant sur la place qu'elle a occupée dans les crises indonésienne et haïtienne. Il a fallu dans cette optique présenter le dispositif normatif et institutionnel dans lequel s'inscrit la reconstruction, pour voir sa mise en oeuvre concrète dans les pays ci-dessus évoqués. En d'autres termes, il s'agissait de voir quelle était, aussi bien dans l'esprit des normes que dans l'esprit des humanitaires, la place qu'occupait la reconstruction. En somme, il s'agissait de faire un état des lieux de la réalisation des objectifs de l'action humanitaire.

Les résultats de cette analyse ont révélé qu'après la gestion de l'urgence qui a été prédominante en Indonésie et en Haïti, des démarches ont été entreprises dans le cadre de la reconstruction. Toutefois, elle est confrontée à un certain nombre d'obstacles l'empêchant d'être menée à son terme. Néanmoins, pour la réussite de la reconstruction, certaines solutions sont envisageables. Entre autres : l'instauration d'une stabilité politique, économique et sociale ; la valorisation d'une synergie véritable entre acteurs nationaux et internationaux contribuant à faciliter ou à améliorer la reconstruction. A ce propos, un renforcement de la participation de la population locale serait un plus. Tout au plus, la mise en place d'un cadre juridique spécifique à la reconstruction et d'un fond spécial pour la reconstruction, l'amélioration des stratégies locales permettraient de mieux gérer la phase de reconstruction.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

BIBLIOGRAPHIE

I-- MANUELS, DICTIONNAIRE ET COURS

A- MANUELS

ü Code de conduite pour le Mouvement international de la Croix Rouge et du Croissant Rouge et pour les Organisation non gouvernementales (ONG) lors des opérations de secours en cas de catastrophe, disponible sur http://www.icrc.org/web/fre/sitefre0.nsf/html/p1067

ü FICR, Programme de formation à la préparation aux catastrophes, module de formation et de référence, CD, 380 pages.

ü Guide pour la planification d'urgence et les interventions en cas de catastrophe, FICR, Genève, 2008, p. 76.

ü La Charte Humanitaire du projet Sphère, 2004, / disponible sur
http://www.sphereproject.org.412pages.

ü MOUREY (A), Manuel de Nutrition pour l'Intervention Humanitaire, Genève, CICR, janvier 2004, 719 pages.

ü UNHCR, Manuel des situations d'urgence, 2eme édition, Genève, 2001, 427 pages.

ü UNICEF, Manuel pour les Situations d'Urgence sur le Terrain, guide à l'usage du personnel de l'Unicef, New York, Division de la Communication, octobre, 2005, 478 pages.

B- DICTIONNAIRES

ü BOUCHET SAULNIER (F.), Dictionnaire pratique du droit international humanitaire, Paris, édition la découverte, août 2006, 592 pages.

ü NIOBEY (G.), Dictionnaire de poche de la langue française analogique. Nouveau dictionnaire analogique, Paris, éditions Larousse, 1980, 855 pages.

ü RUBIO (F.) et HURE(C.), Dictionnaire pratique de l'humanitaire, Editions Ellipses, 2010,272 pages.

C- COURS

ü BOUKONGOU (J.D), Cour de Logistique humanitaire, Master Droits de l'Homme et Action Humanitaire, UCAC/APDHAC, Yaoundé, année académique 2010-2011, inédit, 14 pages.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

ü BOUKONGOU (J.D), Cours de Coordination de l'action humanitaire, Master Droits de l'Homme et Action Humanitaire, UCAC/APDHAC, Yaoundé, année académique 2010-2011 inédit, 30 pages.

ü BOUKONGOU (J.D.), 9Cours de Gestion de l'Action Humanitaire, Master Droits de l'Homme et Action Humanitaire, UCAC/APDHAC, Yaoundé, année académique 2010-2011, inédit, 41 pages.

ü BOUKONGOU (J.D.), 9 9999999 99999999999r9999t9o9999999, Master Droits de l'Homme et

Action Humanitaire, UCAC/APDHAC, Yaoundé, année académique 2010-2011 inédit, 43 pages.

ü MBONDA (E.M.), Cours d'Action humanitaire, Master Droits de l'Homme et Action Humanitaire, UCAC/APDHAC, Yaoundé, année académique 2010-2011, inédit, 30 pages. II-- OUVRAGES

ü BETTATI (M.), Le droit d'ingérence9: Mutations de l'ordre international, Paris, éditions Odile Jacob, mars1996, 384 pages.

ü BRAUMAN (R.), 99999, 999999r. 9P9999999999999 9 99999, Paris, Bayard, 2006, 109pages

ü BRAUMAN (R.), 999 999t99r9, 9l9999l99 9 9, Paris, Textuel, 2002,120pages.

ü BRAUMAN (R.), L'action humanitaire, Paris, Flammarion, 1995, 127pages.

ü BRAUMAN (R.), 9Penser dans l'urgence, Paris, Editions du Seuil, 2006, 270pages.

ü BRAUMAN(R.), et BACKMAN (R.), L'999 999t99r9999999999 99999, Paris, Editions du CFPJ, 1996, 1O3pages.

ü CAHILL (K.M.), Au fondement de l'action humanitaire, Paris, Nil Editions, 269pages.

ü CAHILL (K.M.), 99999999999999 999t99r9, Paris, Nil Editions, 2006, 502 pages.

ü CROZIER (M.), et FRIEDBERG (E.), l'acteur et le système Les contraintes de l'action 99ll99t9v9, paris, seuil, 1977, 436 pages.

ü D'ANDLAU (G.), L'action humanitaire, Paris, PUF, « Que sais-je ? », 1998, 128pages.

ü GRAWITZ (M.), 99999999999999999999999999999, 8émeédition, Dalloz, Paris, 1990, p.490pages.

ü GRÜNWALD (F.), 999éf9c999r99999999999999r99 ; quels rôles pour les populations dans l'action humanitaire ?, Paris, KARTHALA, 2005, 424pages.

ü HAUG (H.), 999 999té999999t999, Genève, le Mouvement international de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, Institut Henry DUNANT / HAUPT, 691pages.

ü LECHERVY (C.), et RYFMAN (P.), 9999999999 999t99999999999999r9t99999999999999999: les

ONG, Paris, Hatier, 1993, 79pages.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

ü MATTEI (J.F.), L'Urgence humanitaire et après. Pour une action humanitaire durable. Paris, Hachette Littérature, 2005, 237 pages.

ü MBONDA (E.M.), L'action Humanitaire en Afrique, Lieux et Enjeux, Paris, éditions des archives contemporaines, 2008, 161pages.

ü MBONDA (E.M.), Guerres modernes africaines et responsabilité de la communauté internationale, Yaoundé, Presses de l'université catholique d'Afrique centrale, 2007, 47pages.

ü MOORE (J.), Des choix difficiles, les dilemmes moraux de l'humanitaire, Paris, Editions Gallimard, 1999, 433 pages.

ü MOORE (J.), Des choix difficiles, les dilemmes moraux de l'humanitaire, Paris, Gallimard, 1999, 459 pages.

ü PEROUSE DE MONTCLOS (M.A.), L'Aide humanitaire, l'aide à la guerre ?, Bruxelles, complexe, 2001, 207 pages.

ü PIROTTE (C.), et HUSSON (B.), Entre urgence et Développement : Pratiques humanitaires en questions, Paris, Karthala, 1998, 237pages.

ü SENARCLENS (P.), L'humanitaire en Catastrophe, Paris, Presses de Science Po, 1999,146 pages.

III- MEMOIRES ET ETUDES

ü ABBAH MOLO (S.D.), L'action humanitaire en Afrique : Le cas du Soudan, Mémoire de Master droits de l'homme et action humanitaire, UCAC, 2005-2006, 70 pages.

ü LEUNGA FOUKO (M.), La reforme de la Coordination humanitaire des Nations Unies : application aux cas de la RCA et de la RDC, Mémoire de Master droits de l'homme et action humanitaire, UCAC, 2009-2010, 87 pages.

III- ARTICLES

ü ALLIX (G.), La corruption en Haiti un cassse tête in http://www.google.fr (consulté le 20/04/2011).

ü ANDERSON (M.B.), « Aujourd'hui vous me sauvez la vie, mais pour quel avenir ?sur quelques dilemmes moraux de l'aide humanitaire », in, Des Choix difficiles. Les dilemmes moraux de l'humanitaire, Paris Gallimard, 1999, pp. 81-104.

ü ANDERSON (M.B.), « Le concept de vulnérabilité : au-delà des groupes vulnérables », in Revue internationale de la croix rouge, no808, Genève, 1984, pp. 360-412.

ü BETTATI (M.), « Ne tirez pas sur le droit d'ingérence », in Politique internationale, n.87, Printemps 2000, pp. 447-453.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

ü BLONDEL (J.L.), « L'humanitaire appartient-il à tout le monde ? réflexions autour d'un concept (trop ?) largement utilisé », in Revue Internationale de la Croix Rouge, N° 838, 2000, pp. 327-337.

ü BOUKONGOU (J.D.), « De la nécessaire coordination de l'action humanitaire », in Bulletin de l'APDHAC no33 novembre-décembre 2009, pp.13-16.

ü BOUKONGOU (J.D.), « La coordination des politiques humanitaires : quelles leçons à partir des expériences de l'Afrique Centrale ? » in Enjeux no8 juillet-septembre 2001, pp. 9- 12.

ü BRAUMAN (R.), « Reconstruction : priorité aux choix des Haïtiens » in Alternatives Internationales, n°46, mars 2010, pp1-8.

ü BRAUMAN (R.), « Emotion et action humanitaire », in Alternatives Internationales, n°46, janvier 2010, pp1-8.

ü BRAUMAN (R.), « Les dilemmes de l'action humanitaire dans les camps de réfugiés et les transferts des populations », in Des choix difficiles, Paris, Gallimard, 1999, pp.233-256.

ü BRAUMAN (R.), WEISSMAN F., Aide internationale: ce qui se passe en Haïti, in http://www.grotius.fr/aide-internationale-ce-qui-se-passe-en Haïti/html (consulté le
10/02/2011).

ü CHAUVIER (S.), « Les principes de la justice distributive sont-ils applicables aux nations ? », in revue de métaphysique et de morale, no1, 2002, pp.123-143.

ü EBERWEIN W.D. Quel futur de l'action humanitaire ? http://www.grotius.fr/quel-futurde-l'action-humanitaire/html (consulté le 10/02/2011).

ü EVRAD (L.), Haïti : « sortir de la dépendance humanitaire », in
http://www.medecinsdumonde.org/fr/Presse/Evenements/Parution-du-dernier-numero-de-larevue-Humanitaire-Haiti-sortir-de-la-dependance-humanitaire (Consulté le 08/01/2011).

ü FAIRCHILD (D.), « Don humanitaire, don pervers », in Revue du Mauss no25, 2005, pp. 389-395.

ü FICR, Amélioration de la coordination, programme de formation à la préparation aux catastrophes, 1998, pp. 21-26.

ü FRIEMAN (J.), « Les humanitaires et la presse », in Kevin M. CAHILL (édit.), Au fondement de L'action humanitaire, Paris Nil éditions, 2006, pp.163-187.

ü GOEMAERE (E.), et OST (F.), « L'action humanitaire : questions et enjeux », in la Revue nouvelle, 1996, pp.76-96.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

v' GRUNEWALD (F.), « De la prévention à la réhabilitation avant, pendant et après l'urgence l'expérience du CICR en perspective ", in RICR no813, mai-juin 1995, pp292-311. v' GUYLER (J.) Un an après le séisme Haïti est toujours sous les décombres in http://www.seneweb.com/news/International/un-an-apres-le-seisme-haiti-toujours-sous-lesdecombres_n_39830.html (consulté le 18/04/2011).

v' HASHMIN (F.), « Les défis de la réponse humanitaire collective au Sri Lanka ", in Migrations forcées, no29, janvier 2008 pp. 9-10.

v' HENRYS (J.H.), « La dépendance à l'aide extérieure ne date pas d'aujourd'hui ", in http://www.medecinsdumonde.org/fr/Presse/Evenements/Parution-du-dernier-numero-de-larevue-Humanitaire-Haiti-sortir-de-la-dependance-humanitaire (Consulté le 15/O2/2011).

v' LANZER (P.), « Les reformes humanitaires : une perspective depuis la RCA ", in Migrations forcées, no29, janvier 2008 pp25-27.

v' Le nouvelliste « L'instabilité politique est un frein à la reconstruction ", in

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=87667&Pub (Consulté le 12 mars 2011).

v' MARTONE (G.R.), « Stratégies de protection dans les interventions humanitaires », in CAHILL (K.M), Le secours humanitaire, Nil éditions, Paris, pp133-143.

v' MESMER (P.), Japon : deux mois après le séisme, place à la reconstruction, in http://www.lemonde.fr/japon/article/2011/05/11/japon-deux-mois-apres-le-tsunami-l-heurede-la-reconstruction_1520444_1492975.html (consulté le 20/04/2011)

V' OLINGA (A.D.) « Le cadre juridique de l'action humanitaire : Aspects internationaux et réalités régionales " in Enjeux no8, juillet-septembre 2008.

v' OLINGA (A.D.), « La problématique humanitaire à l'ère de la mondialisation ", in Cahiers de l'UCAC no6, Presses de l'université catholique d'Afrique centrale, 2000.

1' PELLET, (A.), « Droit d'ingérence ou Devoir d'assistance humanitaire ? "in Revue problèmes politiques et sociaux no758-759, 1er décembre-22 décembre 1995, Documentation française.

v' RAPPAZ (C.), «Reconstruire Haïti coûte une année de bonus dans une banque", http://www.illustre.ch/reconstruire_haiti_coute_une_annee_de_bonus_dans_une_banque_434 97 html (consulté le 10/02/2011).

1' RYFMAN (P), « L'action humanitaire en procès ", in Le Monde juin Paris, 2005, p. 17-18.

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

v' SOCRATES (M.), « Haïti : la France et les États-Unis se battent après avoir ruiné le pays », janvier 2010, in http://www.temoignages.re/haiti-la-france-et-les-etats-unis,41252.htm (Consulté le 20 février 2011).

'/ Stéphane PALLAGE, Reconstruire Haïti, réflexion, avril 2011,

http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:cNvO0dq1f_UJ:www.dandurand.uqa m.ca/uploads/files/publications/rflexions/Plan_marshall_haiti_Pallage.pdf+la+reconstruction. (consulté le 21/04/2011).

IV- DOCUMENTS

A- RAPPORTS

v' FEDERATION internationale des sociétés de la Croix Rouge et du croissant rouge, Résumé du rapport sur les catastrophes dans le monde 2003, 2003.

v' Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Cinq ans après le tsunami À Rapport 2004 À 2009

v' ONU, Rapport du secrétaire Général, Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l'homme pour tous (A/59/2005), mars 2005

v' ONU, Rapport du Secrétaire Général, Un monde plus sûr, une responsabilité partagée (A/59/565).

v' Rapport des nations unies en Haïti 2010 situation, défis et perspectives.

v' Rapport Evans-Sahnoun de la Commission internationale de la souveraineté des Etats sur le principe de la Responsabilité de protéger

1' Rapport quinquennal d'intervention CARE sur le Tsunami de 2004 Inde, Indonésie, Somalie, Sri Lanka et Thaïlande Décembre 2004 À Novembre 2009

B- TEXTES INTERNATIONAUX

v' La Convention de Tampere sur la mise à disposition de ressources de télécommunication pour l'atténuation des effets des catastrophes et pour les opérations de secours en cas de catastrophe, adoptée à Tampere (Finlande) le 18 juin1998

1' Résolution adoptée par l'Assemblée générale : Coopération internationale en matière d'aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles de la phase des secours à celle de l'aide au développement, A/61/L.42 et Add.1, 22 février 2007

1' Résolution adoptée par l'Assemblée générale : Coopération internationale en matière d'aide humanitaire à la suite de catastrophes naturelles de la phase des secours à celle de l'aide au développement, A/59/L.26/Rev.1 et Add.1, 3Mars 2005

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

1' Résolution adoptée par l'Assemblée générale : Stratégie internationale de prévention des catastrophes, A/58/484/Add.5, 27 février 2004

v' résolution 46/182 du 19 décembre 1991, en annexe à laquelle figurent les principes directeurs pour le renforcement de la coordination de l'aide humanitaire d'urgence du système des Nations Unies

V- AUTRES DOCUMENTS

LIENS INTERNET OU WEBOGRAPIE

v' http://camarade.over-blog.org/article-haiti-du-seisme-au-cholera-chronique-de-l-echec-dela-reconstruction-par-sophie-perchellet-64940141.html (consulté le 21/04/2011).

v' http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/pays/HTI/fr.html (consulté le 18/04/2011). v' http://www.cyberpresse.ca/international/dossiers/elections-en-haiti/201104/21/01- 4392131-martelly-president-cest-officiel.php (consulté le 23/04/2011).

v' http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index Dictionnairepratiquedudroithumanitaire-9782707147066.html

v' http://www.google.fr/#q=la+reconstruction+frein%C3%A9e+par+la+corruption+en+haiti &fp=8bba4cd1cc793c1c&hl=fr&psj=1 (consulté le 20/04/2011).

v' http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2011/03/12/04016-20110312ARTFIG00428-japon-leconomie-rebondira-apres-le-seisme.php (consulté le 20/04/2011).

v' http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/08/06/aider-haiti-a-sortir-de-la-dependancehumanitaire_1396339_3232.html (consulté le 28/04/2011).

v' http://www.lepost.fr/article/2010/12/08/2333074_election-en-haiti-un-deuxieme-tour-enpointilles.html (consulté le 19/04/2011).

v' http://www.quebec89.com/societe/haiti-coordonner-l%E2%80%99aide-humanitaire2223.html (consulté le 18/04/2011).

v' http://www.rfi.fr/ameriques/20110111-haiti-le-soutien-etat-instabilite-politique-reste-leprincipal-defi (consulté le 18/04/2011).

v' http://www.seneweb.com/news/International/un-an-apres-le-seisme-haiti-toujours-sousles-decombres_n_39830.html (consulté le 18/04/2011).

v' http://www.seneweb.com/news/International/un-an-apres-le-seisme-haiti-toujours-sousles-decombres_n_39830.html (consulté le 19/04/2011).

v' http://www.unicef.fr/contenu/actualite-humanitaire-unicef/haiti-une-reconstructiondifficile-entre-instabilite-politique-et-cholera-2011-01-07 (consulté le 18/04/2011).

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

ANNEXES

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

TABLE DES MATIERES

DEDICACES I

REMERCIEMENTS II

SIGLES ET ABREVIATIONS III

RESUME IV

ABSTRACT V

SOMMAIRE VI

INTRODUCTION GENERALE 1

I- CONTEXTE DE L'ETUDE 2

II À DELIMITATION DE L'ETUDE 4

III À DEFINITION DES CONCEPTS 5

IV -INTERET DE L'ETUDE 8

V - REVUE DE LITTERATURE 9

VI À PROBLEMATIQUE 13

VII- HYPOTHESE 14

VIII- CADRE METHODOLOGIQUE 14

IX- ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN 16

PREMIERE PARTIE : L'INTERVENTION HUMANITAIRE EN INDONESIE ET EN HAITI : ENTRE URGENCE ET RECONSTRUCTION 17

CHAPITRE I : LE CADRE JURIDIQUE DE L'INTERVENTION HUMANITAIRE EN INDONESIE ET EN HAITI 18

SECTION1 : UN CADRE JURIDIQUE DE L'ACTION HUMANITAIRE LACUNAIRE DANS LE DOMAINE DE LA RECONSTRUCTION. 18
Paragraphe1 : La charte humanitaire et le code de conduite dans la logique de la

reconstruction : une nécessité d'interprétation. . 18

A- La charte humanitaire et sa contribution limitée sur le plan de la reconstruction 19

B- Le code de conduite et une prise en compte presqu'inexistante du volet de la reconstruction 20
Paragraphe2 : Une réforme humanitaire essentiellement tournée vers l'urgence, et les

difficultés de mise en oeuvre de la responsabilité de protéger. 20

A- La focalisation de la réforme humanitaire dans le domaine de l'urgence 20

B- La responsabilité de protéger et la prise en compte de la reconstruction 24

SECTION2 : LE DEPLOIEMENT INSTITUTIONNEL HUMANITAIRE ET LA MOBILISATION EN INDONESIE ET EN HAÏTI AU SERVICE DE L'URGENCE. 25

Paragraphe 1 : La mobilisation des acteurs classiques de l'action humanitaire et celle

des médias. 25

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

A- La mobilisation des acteurs classiques de l'action humanitaire 25

B- Le rôle des médias dans la mobilisation en Indonésie et en Haïti 27

Paragraphe 2 : Un afflux massif des dons en Indonésie et en Haïti pour l'urgence . 27

A- La collecte des dons pour le Tsunami en Indonésie : quelles limites à la générosité ?

28

B- HAITI et une collecte des dons essentiellement tournée vers l'urgence. 29

CHAPITRE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA

RECONSTRUCTION INDONESIENNE ET HAITIENNE: POLEMIQUE ET MALAISE 31

SECTION 1 : LA GESTION DE LA RECONSTRUCTION EN INDONESIE ET EN HAÏTI 31

Paragraphe 1: La reconstruction indonésienne : « un succès » ? 31

A- Les réalisations matérielles en matière de reconstruction en Indonésie 32

B- La reconstruction indonésienne : une reconstruction lacunaire. 32
Paragraphe 2 : La reconstruction en Haïti : une population dans l'attente de la

reconstruction. 33

A- L'organisation de la reconstruction en Haïti 34

1- La conférence des donateurs de New-York 34

2- Projet argent et nourriture contre travail. Et stratégie de santé

environnementale. 35

3- Le projet, travail contre nourriture et distribution de nourriture à l'école. 35

B- L'efficacité limitée de la mise en oeuvre de la reconstruction en Haïti 36

1- Le non respect des promesses émises lors de la Conférence de New York 36

2- Le retard accusé par l'aide promise . 37
SECTION 2 : LA PREDOMINANCE DE LA GESTION DE L'URGENCE GENERATRICE DE NOUVELLES CRISES : LES EFFETS PERVERS DE L'ASSISTANCE PROLONGEE. 38

Paragraphe 1 : L'apparition de nouvelles crises du fait de la prolongation de l'aide

d'urgence en Indonésie et en Haïti... 39

A- L'émergence des crises sanitaire et sécuritaire en Haïti et en Indonésie. 39

1- L'émergence des crises sanitaires en Haïti et en Indonésie 39

2- La naissance des crises sécuritaires 40

B- La recrudescence des crises économique et politique. 42

1- Une faible prise en compte des facteurs économiques. 42

2- Une faible prise en compte des facteurs socio- politiques générateurs de crises

sociales 42

Paragraphe 2 : La dépendance des populations assistées et les autres dérives 43

A- La dépendance des populations sinistrées : conséquence de la perpétuation de l'aide

d'urgence. 43

B- les autres dérives de l'action humanitaire prolongée 44

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 44

DEUXIEME PARTIE : LES FREINS ET LES PERSPECTIVES POST-CATASTROPHE EN INDONESIE ET EN HAITI 45

CHAPITRE I :LES FREINS A LA MISE EN OEUVRE DE LA RECONSTRUCTION.46

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

SECTION1 : L'INTERVENTION LIMITEE ET INTERESSEE DES ACTEURS HUMANITAIRES ET L'ABSENCE DE FINANCEMENT COMME UNE ENTRAVE A LA RECONSTRUCTION 46

Paragraphe 1 : La participation limitée et intéressée des Médias et des ONG comme un

frein à la reconstruction 46

A- Les médias et la logique de l'instantané 47

B- Les ONG et le marché de l'humanitaire 48
Paragraphe 2 : Le détournement des fonds consacrés à la reconstruction et le non-

respect des promesses faites par les donateurs 49

A- Le détournement des fonds consacrés à la reconstruction 50

B- L'inexistante ou partielle réalisation des promesses des donateurs 50

SECTION2 : LES PRATIQUES DE L'ACTION HUMANITAIRE COMME UNE ENTRAVE A LA RECONSTRUCTION. 51
Paragraphe 1 : Le défaut de coordination Humanitaire et l'instabilité politico-

économique comme entraves à la reconstruction. 52

A- Le défaut de coordination Humanitaire : un obstacle à la reconstruction. 52

B- L'instabilité politique et économique comme un frein à la reconstruction. 53

1- / 41nMUbKItO SIVIOXI . 53

2- / 41nMUbKitOiO0oKIP IIuIIIt lIBOUN€IRU 0oMSMYn : des blocages pour une

P isI In u5rI IffI0115I1€I14U II0oKM11015n. . 55
Paragraphe2 : La non prise en compte des capacités locales ou l'imposition d'un modèle standard de reconstruction et la marginalisation des facteurs culturels, comme entraves

à la reconstruction 57

A- La non prise en compte des capacités locales ou l'effacement de l'Etat comme un frein à la reconstruction 57

B- L'échec de la reconstruction comme une conséquence des valeurs culturelles bafouées. 58

CHAPITRE II: PERSPECTIVES POUR UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA RECONSTRUCTION DA1 6 / IfF 8 0 $ 1 ,7$ ,5 ( 60

SECTION1 : PERSPECTIVES INTERNES POUR UNE MEILLEURE RECONSTRUCTION 60

Paragraphe 1 : La préservation de la stabilité politique et le rétablissement de la

sécurité et de l'Etat de droit, comme clé de voute du succès de la reconstruction. 60

A- La préservation de la stabilité politique : moteur de la reconstruction 61

B- Le rétablissement de la sécurité et de l'Etat de droit 61
Paragraphe 2 : Répondre aux besoins socio-économiques et établir un consensus

national. 62

A- Répondre aux besoins socio-économiques 62

B- La nécessité d'un consensus national autour de la reconstruction 63
SECTION2 : LA MISE EN OEUVRE DE L'APPROCHE PARTICIPATIVE ET LE ROLE CATALYSEUR DES ETATS ET DES MEDIAS POUR UNE RECONSTRUCTION EFFICACE. 64

Paragraphe 1 : La mise en oeuvre de l'approche participative : Un facteur clé pour la

réussite de la reconstruction. 64

A- L'apport des secours locaux dans la réussite de la reconstruction 64

L'action humanitaire et la reconstruction : Le cas du Tsunami indonésien de 2004 et du Séisme
haïtien de 2010

B- Bénéficiaires et partenaires : quels rôles pour les populations dans la mise en oeuvre

de la reconstruction ? 65 Paragraphe 2 : L'apport des Etats et des médias pour une meilleure reconstruction et la nécessité de renforcer un cadre juridique spécifique à la reconstruction. 66

A- Le respect des engagements pris par les Etats et l'intervention des médias : gage

d'un succès de la reconstruction. 66

B- Une réforme humanitaire au service de la reconstruction. 67

CONCLUSION PARTIELLE DE LA DEUXIEME PARTIE 68

CONCLUSION GENERALE 69

BIBLIOGRAPHIE 70

ANNEXES 77

TABLE DES MATIERES 78






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand