WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Cooperation transfrontaliere entre le Cameroun et la Guinee equatoriale

( Télécharger le fichier original )
par Eric Bertrand BELINGA
Universite de yaounde II=Soa, Institut Des Relations Internationales Du Cameroun - Master 2 2013
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

b. Les échanges transfrontaliers informels entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale

Les politiques économiques différentiées et les disparités au niveau des produits intérieurs bruts ont provoqué de forts mouvements de marchandises clandestines et l'accroissement de la contrebande entre les deux pays. En effet, la très grande majorité des relations économiques entre les deux pays est d'ordre illégal. Elles génèrent beaucoup de bénéfices à travers la contrebande et la fraude. Ils sont également organisés, car ses acteurs parviennent à un acheminement sans difficulté de leurs produits au delà des frontières.

· La contrebande et la fraude dans les échanges entre les deux Etats

La contrebande et la fraude bien qu'illégales constituent l'aspect principal des relations commerciales entre le Cameroun et la Guinée-équatoriale. Elles proposent aux différentes populations une gamme variée des produits, dont les conséquences sont incalculables sur l'utilisation par les usagers, mais également sur l'économie des Etats.

Les produits de la contrebande et de la fraude

La gamme des produits de contrebande est extrêmement large. On peut distinguer deux grands groupes : les produits agricoles et manufacturés. Il est intéressant de noter que les produits agricoles sont constitués presqu'exclusivement de produits d'origine camerounaise ou réexportés par le Cameroun. Il s'agit notamment du riz et de la farine, parfois réexportés, des haricots secs, des pommes de terre, du poisson, du garri, de noix de kola, de thé, etc. Ce sont là les rares produits agricoles qui franchissent la frontière en direction de la Guinée-équatoriale. Quelques produits agricoles proviennent aussi de la Guinée-équatoriale et trouvent leur chemin dans le sens inverse vers le Cameroun, notamment le poisson séché de Rio Campo.

Dans le domaine des produits manufacturés, les Camerounais exportent des pièces automobiles frauduleusement en Guinée-équatoriale. Lequel, par contre, inonde le Cameroun ou les pays tiers de ses produits manufacturés, mais un produit importé de la Guinée-équatoriale ne signifie pas qu'il a été produit par celui-ci. Ainsi, on trouve une grande variété de produits d'origine asiatique ou européenne dans les marchandises de la contrebande. Ces produits d'origine équato-guinéenne sont vendus non seulement dans les marchés camerounais près de la frontière mais aussi dans toutes les autres régions du pays. Rares sont en effet les villes et villages qui ne disposent pas de la gamme presque complète de ces produits, souvent de première nécessité.

Figure 6 : tableau représentant les filières et les produits de la contrebande

DESCRIPTION DES PRODUITS

Pièces détachées pour autos et motos : souvent contrefaites au Cameroun, de qualité médiocre et de durée de vie inférieure à celles des produits originaux. Ce sont les pneus, filtres, batteries

Alcool et boissons : Très souvent contrefaits, non potables et présentés dans des bouteilles mal imitées avec étiquettes photocopiées, ce sont Champagnes, bières etc.

Produits alimentaires-conserves : Lait en poudre, Nescafé, biscuits, bonbons, légumes en conserves, cube Maggi, sucre, sel. piments, huiles alimentaires etc.

Produits de soins de beauté et pharmaceutiques : dentifrices, brosses à dents, cirages, crèmes, laxatifs, perruques, mèches, laque, colorants, toutes sortes de médicaments sous forme de comprimés, de sirop, de poudre, de gel, rasoirs, shampooing etc.

Produits plastiques, quincaillerie, ustensiles de maison : seaux, vaisselle, cuvettes, baignoires, tuyauterie, jerricanes, bidons de toutes sortes, couverts, etc.

Textiles : Pagnes, tissus, dentelle, broderie, vêtements de friperie, etc.

Petits appareils et outils : montres, calculatrices, photo, outils agricoles, machettes, couteaux,

Appareils électriques et domestiques : Radio, télé, magnétoscopes, lampes, fers, etc.

Savons et lessives : Détergents, lessives, savons, détachants, etc.

Produits chimiques : Pesticides, engrais, insecticides, etc.

Chaussures : Cuir, plastiques, textiles, sports, etc.

Hydrocarbures et dérivés : Carburants, kérosène, huile de moteur, graissages, etc.

Source : Sous-Direction des échanges commerciaux du Ministère du Commerce (Cameroun)

L'exemple du pétrole et des hydrocarbures mérite une approche particulière. Comme nous l'avons déjà souligné ci-dessus, le trafic d'hydrocarbures entre la Guinée Equatoriale et le Cameroun est extrêmement important. La fraude sur les produits pétroliers constitue le cas le plus significatif des échanges informels en raison de son ampleur, de sa permanence dans le temps, du rôle qu'elle joue dans le portefeuille des ménages et des mesures gouvernementales qu'elle suscite. La contrebande d'essence repose essentiellement sur les disparités de prix pratiqués en Guinée Equatoriale et au Cameroun ou dans les autres pays voisins. Cette disparité de prix est toujours restée élevée, malgré quelques fluctuations, depuis les années 1960 et depuis que la Guinée Equatoriale est devenue producteur de pétrole. Dans la région du Sud-Cameroun particulièrement, les points de vente de fortune de cette essence longent les routes de la région, non seulement les plus fréquentées, mais aussi les routes de brousse connaissant une circulation régulière. L'essence est vendue en bouteilles de 5, 10, ou 20 litres à des prix qui défient toute concurrence au niveau des stations-essence. L'une des conséquences de cette activité, est que la qualité des carburants est souvent inférieure et douteuse par rapport à ceux vendus officiellement.

Les acteurs et réseaux d'acheminement des produits de la contrebande et de la fraude dans les échanges entre les deux Etats.

Le plus difficile de ce trafic est l'acheminement des produits de la fraude et de la contrebande. Ces acteurs de fraude et de la contrebande prennent d'énormes risques sur les voies de communications non sécurisés, et souvent d'accès impossible. Ils se déplacent souvent sur terre ou sur mer dans les engins vétustés à risque élevé.

Les cargaisons de carburant qui arrivent en contrebande au Cameroun sont souvent acheminées par voie maritime et terrestre. Les pistes forestières, les rivières Ntem et Kyé et la Mer au niveau de Campo et Manoka sont les espaces utilisés pour écouler ces produits de la contrebande et de la fraude. Le transport par voie maritime est beaucoup plus pratique pour cette marchandise lourde et encombrante. Il limite les chargements et les déchargements fréquents. Ainsi les quantités de produits pétroliers sortis en contrebande de la Guinée Equatoriale sont difficiles à quantifier comme tous les autres articles des circuits de la contrebande. Cependant, cette activité suit d'autres itinéraires tels que la voie terrestre. Tout au long de la frontière entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale, les postes de douane sont peu nombreux, la ligne frontalière est donc difficile à surveiller.

Le volume de marchandises en provenance de la Guinée Equatoriale est souvent introduit au Cameroun via les postes de douane, car les contrebandiers espèrent obtenir de la part des autorités des papiers et documents officiels qui leur permettrons ensuite de garder une couverture légale pour des marchandises largement sous-évaluées ou différentes par rapport à celles déclarées. Ceci facilite notamment l'acheminement des marchandises vers des villes ou villages situés à l'intérieur du Cameroun. La complicité des agents des douanes est achetée moyennant un intéressement en fonction de la valeur réelle des marchandises ainsi importées. Dans ce cas de figure, le trafic illégal ne peut plus être caractérisé par le terme de contrebande mais plutôt par celui de pratique douanière frauduleuse. Toutefois, la finalité est pratiquement la même, c'est-à-dire contourner des dispositions légales officielles et économiser de l'argent par rapport aux tarifs douaniers normaux.

Les itinéraires empruntés par les contrebandiers ont souvent un caractère saisonnier. Les voies terrestres vers la région du sud, principalement la route Meyo-centre- Ma'an vers Ebolowa,et Campo-Kribi ne sont pas bitumés et sont alors difficiles à pratiquer en saison des pluies. Il en va de même pour la voie maritime, la mer est agitée et le passage en bateau n'est pas sans danger. Pendant la saison des pluies, préférence est donnée à la voie fluviale au niveau du port de pêche de Douala, de Campo et Limbé, gonflée par les crues. Cependant, la dépendance saisonnière des itinéraires empruntés par la contrebande est restreinte par le changement fréquent des moyens de transport. Ainsi, peuvent être utilisés selon les cas le taxi-brousse, le camion, pick-up, les voitures légères, la moto, le portage, le bateau, la pirogue etc., en fonction de la saison, de la voie à emprunter et des moyens financiers du transporteur ou commanditaire. Il est intéressant de noter qu'en dehors des routes terrestres, la contrebande emprunte souvent des pistes aménagées à l'usage des contrebandiers. Ces pistes permettent le contournement des postes de la douane, mais sont souvent difficilement praticables et plus longues. La piste la plus empruntée de la région du sud est sans aucun doute celle qui va de Kyé-ossi à Ebolowa, via Ambam et celle passant par Ma'an-Kribi, dans le Littoral, celle de port de pêche de Douala et le port de Tiko qui dessert la Guinée Equatoriale et le Nigeria.

Les principaux points d'arrivée des marchandises de la contrebande dans la région du sud sont les villes les plus importantes en particulier la ville de Kyé-Ossi qui est « le centre de groupage par excellence des marchandises équato-guinéennes commercialisées dans le département d'Ambam et dans un grand nombre d'autres localités de la région du sud85(*) ». Ambam est située au carrefour des voies terrestres, qui relient la région du sud au Gabon et la Guinée Equatoriale.

D'autres points de chute importants de la contrebande sont Campo, Ma'an la région du littoral avec les villes de Kribi et Douala et la région du sud-ouest avec les villes de Limbé. La gamme de produits vendus sur les marchés centraux de ces localités est en effet très large et laisse supposer un arrivage direct et fréquent depuis la Guinée Equatoriale. En fait, toute la région du sud-ouest jusqu'à Douala compte de nombreux points de débarquement des marchandises en provenance de ce pays voisin. Le plus souvent, le débarquement se déroule en dehors des ports officiels pour éviter les contrôles douaniers. Contrairement aux routes nationales, où la contrebande se déroule en quelque sorte sous les yeux des autorités et parfois avec leur complicité, les marchandises qui entrent par voie maritime au Cameroun le sont souvent à l'insu des autorités. Il convient de signaler que les installations portuaires officielles de Campo et de Limbé ne sont pas parmi les lieux de prédilection des contrebandiers. Chargement et déchargement des marchandises ont lieu en aval de celles-ci. Un des plus importants points d'arrivée de produits et marchandises importés en contrebande dans la région du Sud-ouest est la ville de Douala. L'importance de son marché ainsi qu'une présence de migrants nigérians massive, en particulier des Igbo, laissant supposer des liens intensifs et directs avec les centres commerciaux de la Guinée Equatoriale, reliés par les réseaux de contrebande. Les nombreux bras du fleuve Wouri sont connus pour abriter les escales de chargement et de débarquement de marchandises en provenance de la Guinée Equatoriale.

Les divers produits de la contrebande atteignent leurs différents points de distribution par deux types de circuits commerciaux : le circuit à « un relais intermédiaire » et le circuit « en deux étapes ».

Le premier est de loin le plus utilisé et implique jusqu'à 97% des personnes et marchandises qui circulent dans le cadre de la contrebande. Régulièrement, les contrebandiers groupeurs quittent la Guinée Equatoriale pour le Cameroun ou vice versa, utilisant des voitures personnelles ou celles des transports publics nombreux, qui assurent les liaisons entre les deux pays pour acheminer eux-mêmes leurs marchandises. Enfin le circuit en deux étapes comporte deux relais intermédiaires, il s'agit du rabatteur et du réceptionnaire-détaillant. Le premier, domicilié en Guinée Equatoriale, achète les marchandises auprès des marchés et des commerces des villes équato-guinéennes avec l'argent fourni par le réceptionnaire-détaillant qui, lui est domicilié au Cameroun. Un ibis la marchandise achetée en Guinée Equatoriale, le rabatteur les confie à un transporteur ou un trafiquant-groupeur qui les achemine auprès du réceptionnaire-détaillant au Cameroun. La rémunération des deux intermédiaires incombe au réceptionnaire-détaillant. En rentrant en Guinée Equatoriale après livraison au Cameroun, le trafiquant-détaillant ou le transporteur emporte de l'argent destiné à financer une nouvelle commande86(*).

Les acteurs de la contrebande et de la fraude.

La population qui vit directement ou indirectement de la contrebande entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale est nombreuse. Les métiers de l'activité de la contrebande et de la fraude sont variés, ils sont : acheteurs, passeurs, transporteurs, grossistes, détaillants, douaniers, fonctionnaires à divers échelons, etc.

L'extrême mobilité des contrebandiers, leur méfiance vis-à-vis des enquêteurs et la multiplication des points de passage de la frontière rendent toute évaluation quantitative extrêmement difficile. Cependant, les enquêtes menées dans les milieux de la contrebande du Cameroun ont révélé que plus de la moitié des contrebandiers sont des Camerounais originaires des régions de l'ouest, du sud-ouest et des Nigérians. Sur ces 53,7% de nigérians, 61,2% sont Igbo, les autres sont des Yoruba, des Haoussa et des ressortissants d'ethnies minoritaires. La moitié du contingent des contrebandiers de nationalité camerounaise est constituée de Bamiléké, 30,2% sont des Haoussa et foulbé du nord-Cameroun, 15,6% sont originaires du nord-ouest, 1,2% du Sud-ouest. Les contrebandiers sont jeunes, les deux-tiers ont moins de 35 ans, un tiers d'entre eux exerce d'autres activités professionnelles et la durée moyenne de l'exercice d'une activité liée à la contrebande est de deux à cinq ans.87(*) Si une majorité des contrebandiers vit dans les villes du Cameroun88(*), une partie est aussi résidente en Guinée Equatoriale. Les contrebandiers établis en Guinée Equatoriale fréquentent les marchés camerounais proches de la frontière avec des produits manufacturés et en repartent parfois avec quelques denrées agricoles. Ils mettent les produits de la contrebande à la disposition soit des détaillants des marchés et des boutiques permanents, soit des comptoirs de vente qu'ils ont confiés en gérance à des parents ou à des amis. Certains contrebandiers se déplacent tous les 10 ou tous les 15 jours, mais la majorité fait un voyage par mois, en fonction de l'information qu'ils disposent sur les fluctuations des devises.

* 85 Fodoup, cité par Lothar Weiss Thomas op. Cit., p.117.

* 86 T. Lothar Weiss op.cit., p.118.

* 87 Enquête menée par T. Lothar Weiss op.cit., p.112.

* 88 Mamfé, Kumba, Limbé, Tiko, Maroua, Garoua, Guider.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King