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La production littéraire tchadienne écrite d'expression française : essai d'analyse sociologique.

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par Robert MAMADI
Université de Ngaoundéré - Master ès Letrres 2010
  

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1.1 La diversité linguistique : enjeux et perspectives

La diversité linguistique est la présence ou l'usage en un lieu donné d'une variété de langues. Le Tchad compte plus d'une centaine de langues utilisées. Ce multilinguisme n'a pas que des conséquences positives. Sur les plans politique, économique, socioculturel et éducatif, les langues peuvent freiner le développement, la communication et l'unité. L'intérêt de cette préoccupation tient du fait que la littérature n'est consommée que par un groupe restreint de locuteurs francophones.

Sur le plan politique, les conflits Nord-Sud sont dus, en partie, à la mauvaise gestion des langues. L'imposition d'une langue au plan national au détriment des autres peut causer un conflit ethnico-linguistique. Si l'arabe, par exemple utilisé pour la communication politique est compris par tous les Tchadiens et que la politique de la communication est orientée vers l'unité, la paix et le développement du pays peuvent être envisageables. Or, au

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Tchad, les modèles politiques légués par les afflictions de la guerre civile ne sont pas de nature à rendre aisée la volonté d'acceptation du point de vue des adversaires politiques d'origine et de langue autres que les nôtres, même si ceux-ci ont raison.

Cette inter-communicabilité linguistique peut conduire à une politique économique. Quand la langue pose des problèmes ségrégationnistes le pays régresse. Bref la politique linguistique commune, nationale favorise la tolérance et le commerce. Les peuples qui échangent biens et valeurs doivent se sentir heureux et libres en groupe. La division Nord-Sud tant décriée à fait d'Abéché (la capitale du Ouaddaï) le pôle économique arabo-musulman et de Moundou (au Logone occidental) le principal centre économique du Sud. Les données tendent cependant à changer ces dix dernières années.

Sur le plan socioculturel, la société, la famille, la culture et la religion d'autrui assaillent, si l'altérité cède sa place à la haine. L'Autre est une valeur, un ami potentiel. Le brassage est indispensable. Les termes « doum », « saray » et « banana » ont au Tchad une connotation péjorative qui divise les concitoyens. Baba Moustapha (Le Souffle de l'harmattan), Nocky Djédanoum (Illusions) et Marie Christine Koundja (Al-Istifack ou l'idylle de mes amis), etc. ont prôné l'unité par le mariage mixte malgré l'opposition sociale, culturelle, politique et religieuse. C'est vrai. Mais combien de Tchadiens ont franchi le premier pas ? Les quartiers des villes sont toujours restés séparés. Le refus de la différence et l'intolérance divisent le pays et fragilisent l'effort littéraire. Le souhait de tout écrivain est d'être lu en premier par le plus grand nombre possible de ses compatriotes. Si les hommes politiques placent les langues officielles au centre des initiatives, leur développement va favoriser la visibilité de la littérature sur le plan national. Les religieux et les politiques ne doivent pas voir en elles des véhicules de clivage et de division. La rentabilité économique favorisera la production, la diffusion et la lecture des oeuvres d'auteurs tchadiens.

Au plan éducatif, la culture de la lecture et de l'unité nationale n'est pas encore effective. La liberté religieuse, culturelle et d'opinion est en voie d'acquisition. Les langues sont nombreuses, mais seul l'arabe, la deuxième langue et l'unique après le français aux programmes scolaires est reconnu et placé optionnel malgré l'effort des instituteurs. Une chose à revoir est l'usage abusif de l'arabe local dans la vie socioprofessionnelle. Une descente dans des lieux publics tels que l'école peut être décourageante dans la mesure où, en l'absence du maître ou du professeur, les élèves, qui pourtant refusent le cours d'arabe

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littéraire ne se communiquent qu'en arabe local, qui est dans beaucoup de foyers la langue maternelle. En conséquence, après la terminale, les élèves sont illettrés en arabe littéraire, passables en français.

En perspective, pour la stabilité et le développement du Tchad, que les autorités politiques initient des projets de valorisation et de classification des langues. La réalité nord-sud est un bluff politique. La séparation ou l'usage d'une seule de ces langues à la radiodiffusion, à la télévision ou sur les papiers officiels est une injustice linguistique. Si notre langue, notre ethnie, notre religion nous empêchent de « commercer » avec autrui, nous sommes loin de la recherche de l'unité, d'ailleurs le premier mot de la devise du Tchad (Unité - Travail - Patrie). Le Tchadien francophone écrit des oeuvres, quelquefois primées, mais celle-ci ne sont pas lues, voire touchées par son voisin musulman du quartier parce que celui-ci est analphabète en français ou qu'il pense ne pas consommer les valeurs occidentales, chrétiennes, nuisibles à sa foi de fervent musulman. Le bilinguisme doit être équilibré pour tous les citoyens : c'est-à-dire lire et écrire en arabe et en français.

Une fois les langues nationales cultivées, valorisées, la diversité linguistique sera une richesse et non une source de cloisonnement. L'arabe et le français véhiculeront certes les civilisations arabo-musulmanes et judéo-chrétiennes occidentalisées mais ouvriront aussi des chances de formation à la jeunesse dépourvue de structures techniques. Ces valeurs doivent être selon Bangui, transmises, vécues, remaniées, animées et enrichies. Il souligne, lors du colloque célébrant le 30ème anniversaire de la Fondation de INSH de l'Université du Tchad, tenu à N'Djamena du 25 au 27 novembre 1991, que : « L'éducation est une occasion privilégiée d'acquisition d'une culture et de réflexion sur ses produits. Beaucoup de pays considèrent que c'est là une manière d'acquérir et d'affirmer une unité nationale qui se cherche » (Bangui, 1994 : 28). Les langues moulues par l'école bénéficient de production, de traduction et d'adaptation littéraire. La littérature ne sera plus en français seulement mais aussi en langues locales.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle