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La production littéraire tchadienne écrite d'expression française : essai d'analyse sociologique.

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par Robert MAMADI
Université de Ngaoundéré - Master ès Letrres 2010
  

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1.1 Les réalités historiques de la littérature tchadienne

Le territoire qui constitue aujourd'hui Tchad a été occupé par des populations nomades à l'époque néolithique. On peut encore lire des gravures rupestres au Tibesti vers le nord du pays. Dans la vallée du Chari, divers textes retracent l'histoire de la civilisation Sao au XVIe siècle. À la période précoloniale, il est créé des royaumes dynamiques qui vont, non seulement s'affronter mais, attaquer le colonisateur plus tard. Il est question du royaume de Kanem, le sultanat de Baguirmi, l'empire du Ouaddaï, etc. La rivalité entre les Ouaddéens et les Baguirmiens à l'époque a favorisé la pénétration coloniale.

Les troupes coloniales françaises ont livré bataille à Rabah et à Mbang Gaourang, conquérant et roi résistants qu'ils ont trouvé au Tchad autour des années 1900. Les auteurs tchadiens en font mention dans leurs oeuvres, quand ils veulent comparer la dictature des années 60 et 70 à cette période. Dans Le Commandant Chaka, (Paris, Hatier, 1983), Baba Moustapha fait la représentation des maîtres du pouvoir. Il fait allusion aux révolutions progressistes qui ont suivi, selon A. Taboye, les indépendances africaines. Celles-ci, pour réussir adoptent le modèle de lutte anticoloniale :

Cette pièce rappelle l'époque des libérations nationales, celles des
révolutionnaires progressistes. Une période où se cachent comme dans toutes les

révolutions des personnages incultes, opportunistes surtout simplement mal intentionnés (Taboye, 2003 : 34).

L'histoire de Mbang Gaourang, le roi du Baguirmi, est réécrite par Palou Bebnoné dans la pièce éponyme. La pièce paraît en 1974. Bebnoné représente « un roi juste, humain, réaliste tolérant et proche de son peuple» (Taboye, 2003: 39). On y fait allusion à l'invasion du royaume baguirmien par Rabah à la fin du XIXe siècle. Dans l'oeuvre, Rabah se serait suicidé sous la pression de Padja qui dirige le combat, victorieux. Or l'histoire réelle du Tchad montre que Rabah fut tué le 22 avril 1900, à Kousseri par les troupes françaises.

L'histoire de Chaka et Mbang Gaourang est reprise pour exciter à la lutte révolutionnaire d'une part et moraliser les dirigeants intransigeants d'autre part. En 1920, les conquérants combattus, le Tchad devient une colonie française. Le christianisme a été à cette époque favorable à l'assimilation. Fort-Lamy11 fut donné comme nom à la capitale du Tchad, l'actuel N'Djamena. Le 16 août 1960, le Tchad devient à l'initiative du gouverneur Félix Éboué, un des territoires d'Afrique Noire, à se rallier à la cause de la France libre.

En effet, ce qui nous intéresse dans cette occupation coloniale, c'est l'imposition de la langue, et donc de l'écriture par l'école française. Avant la colonisation, chaque peuple avait sa forme d'école traditionnelle orale. La première école nouvelle au Tchad est implantée à Mao, par l'administration coloniale. La forme d'école traditionnelle est basée sur les pratiques religieuses et initiatiques qui varient d'un peuple à un autre. Une étude en littérature orale ou en histoire peut faire ressortir toutes ces diversités. Ayant appris à lire, écrire et à compter, les écoliers vont écrire pour sauvegarder les richesses intarissables de l'oralité. C'est dans ce contexte qu'est née la littérature tchadienne. Les diversités culturelles, linguistiques et religieuses vont permettre aux auteurs et chercheurs de doter le Tchad d'une littérature orale riche et variée, mais non publiée, donc inaccessible à tous. C'est en 1962 que Joseph Brahim Seid publie Au Tchad sous les étoiles et Palou Bedonne, La Dot.

L'école française et l'écriture, à cette époque n'ont pas arraché l'unanimité de la population. Leur acceptation a été une lutte sérieuse. La conséquence directe du refus de l'école est l'analphabétisme. Le taux d'analphabétisme au Tchad, depuis le règne de Tombalbaye est resté supérieur à 80%. Pour produire une oeuvre de qualité acceptable, il faut

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11 Nom du chef de la troupe française qui a tué Rabah

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bénéficier d'une éducation conséquente. Cela n'a pas été le cas pour le Tchad au début de son indépendance.

En dépit de la situation linguistique compliquée adjointe au niveau d'instruction, la littérature tchadienne va se développer en français. Il faut se dire que le recours au français est un choix réaliste. On écrit pour participer aux concours, pour être édité pour être lu. Quelques auteurs, malgré leur qualification dans d'autres domaines du savoir ont produit des textes littéraires pour rendre compte de la souffrance, de la violence et de la misère dans lesquelles est placé le peuple. Baba Moustapha résume leur préoccupation en ces termes :

En ce moment de notre histoire, si artiste, je devais produire des oeuvres qui ne seraient que belles ; je ne le ferais pas. Mais faire quelque chose qui rende compte de la souffrance de tout un peuple aux prises avec un destin cruel, un immense cri inexprimé. Notre art doit faire peser sur chacun le poids d'une responsabilité (Moustapha, 1979 : 66).

L'auteur veut dire qu'en ce temps de trouble, l'écrivain est semeur de liberté. L'esthétique littéraire n'est pas toujours sa préoccupation première. L'écrit est ici antidote au désespoir du peuple et non évasion.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon