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Les relations internationales âpres la guerre froide: analyses et perspectives

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par Merveil Ilonga leka bilimba
Université pédagogique nationale - Licence 2011
  

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§2. Nationalisme, eurocentrisme et guerre locale

Les guerres ethniques et nationalistes ne sont certainement pas nouvelles. Comme le faisait remarquer Barry Posen, "le nationalisme n'était pas inexistant au cours de ces quarante-cinq dernières années : il a joué au contraire un rôle clé dans le processus de décolonisation, alimentant à la fois les guerres révolutionnaires ou les guerres interétatiques129. Des inquiétudes nouvelles sur le nationalisme en Europe ont vu le jour, mais ceux qui trouvent le monde plus complexe et tumultueux qu'il ne l'était durant la Guerre froide se focalisent en réalité sur le seul continent européen.

Or, depuis la fin de la Guerre Civile grecque en 1949, l'Europe n'a plus connu de guerre civile. Ce bilan remarquable est aujourd'hui remis en question par les guerres civiles qui ont éclaté dans l'ancienne Yougoslavie. En plus, le chaos politique et économique, parfois violent, a accompagné la désintégration des empires soviétique et russe en Europe de l'Est et particulièrement en Asie.

Ces problèmes sont bien entendu très réels mais il convient de souligner à nouveau la résolution, remarquablement pacifique, des problèmes internationaux les plus cruciaux qui étaient concentrés en Europe.

127Op. cit.

128Hoffmann S., « Delusions of world order », New York Review of Books, 9 April, 1992, p. 37. 129Posen B. R., « Nationalism, the mass army, and military power, International Security, 18 fall, 1(...)

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Par ailleurs, il n'est pas du tout évident que la Guerre Froide ait empêché l'éclosion des conflits civils en Europe. L'épuration ethnique" n'est pas un phénomène récent. Pendant des années, les Bulgares par exemple ont poursuivi une politique de persécution systématique vis-à-vis des immigrés turcs. Les combats entre Arméniens et Azéris ont commencé avant la Guerre Froide, alors que conflit yougoslave résulte d'une tentative mal maîtrisée et incontrôlée de fédérer le pays, une situation qui aurait pu tout aussi bien se produire pendant la guerre froide130.

Parallèlement, si l'Europe de l'après-guerre Froide subit aujourd'hui plus de conflits armés que durant la Guerre Froide, le reste du monde, lui, connait moins de guerres qu'auparavant. L'Amérique latine a connu une longue et sanglante série de guerres civiles dont la plupart avaient été inspirées ou du moins exacerbées par la compétition de la Guerre Froide.

A la fin de celle-ci, cette zone du monde s'est affranchie de toute guerre civile. Autre exemple encore plus probant, celui de l'Est et du Sud-est de l'Asie. La Guerre Froide a provoqué ou du moins exacerbé des guerres longues et coûteuses en Corée, en Malaisie, en Thaïlande, en Chine, au Vietnam, et au Cambodge où elle n'a pas seulement mené à la guerre civile mais à une paix qui était bien pire. Des problèmes subsistent dans l'Est asiatique mais cette zone est devenue certainement plus stable, plus pacifique et plus prospère sur le plan économique qu'elle ne l'a été durant la Guerre froide. Par conséquent, à moins d'adopter une perspective complètement eurocentrique, il est tout simplement inexact d'affirmer que "les conflits entre nations et groupes ethniques prolifèrent" comme l'a formulé Samuel Huntington, ou d'affirmer comme Stanley Kober que de tels conflits sont "en train d'envahir le monde"131.

Dans la mesure où le nationalisme ou l'ultranationalisme constituaient l'une des causes principales de la Première et de la Seconde Guerre Mondiale, le souci de le voir réapparaître en Europe est certainement justifié132. Mais le nationalisme demeure puissant non seulement en Europe de l'Est mais aussi dans les paisibles pays de l'Europe de l'Ouest.

Or, là, les divergences nationales ne s'expriment que rarement par la violence, ou par des menaces de violence même si des visions messianiques à propos des transformations du monde continuent de se refléter dans les perspectives nationalistes133.

130Pour les commentaires critiques de Vaclav Havel sur le « nettoyage ethnique » des allemends et de(...) 131Cf. Huntington S., « Why international primacy matters », International Security, 17, spring, 199(...) 132VoirMearsheimer J. J., « Back to the future : Instability after the Cold War », International Se(...) 133Howard M., The Lessons of history, New Haven, CT, Yale University Press, 1991, chapitres 2 et 4.

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Cependant, ceci ne signifie pas forcément que les Européens de l'Ouest sont moins nationalistes qu'ils ne l'étaient dans les années 1920 ou même 1890. Est-ce que les Britanniques dont une bonne partie a récriminé à propos du nouveau tunnel sous la Manche, apprécient les Français plus que jadis ? Est-ce que les Italiens se sentent moins Italiens qu'auparavant ?

L'émergence de relations économiques plus étroites en Europe peut seulement signifier que ces pays ont enfin compris qu'il y avait un bénéfice à escompter d'une coopération économique mais elles n'impliquent pas que ces Européens s'apprécient plus les uns les autres, ou qu'ils s'identifient davantage aujourd'hui à une nation européenne.

La réunification de l'Allemagne représente un triomphe spectaculaire et pacifique du sentiment national : Si le nationalisme allemand s'était réellement dégradé, on aurait pu s'attendre à ce que la division de l'Allemagne subsiste après le départ des Soviétiques mais on a constaté rapidement qu'une Allemagne de l'Est indépendante n'avait plus guère de sens et les Allemands se sont jetés dans les bras les uns des autres.

Le nationalisme peut bien entendu conduire à la guerre et au désastre mais comme le suggère l'expérience de l'Europe de l'Ouest, il n'est pas besoin de le supprimer pour que la paix domine. La France et l'Allemagne aujourd'hui ne s'accordent pas sur tout mais ils n'envisagent plus d'utiliser la guerre ou la menace de la guerre pour résoudre leurs désaccords. Ils ont ainsi modifié l'un des plus importants paradigmes de la première moitié de ce siècle. Il serait particulièrement intéressant de voir si cette attitude peut influencer l'Europe de l'Est au moment où ces pays forgent leur destin.

La plupart d'entre eux ont parfaitement réussi à éviter la violence au cours de leur libération du joug soviétique ; ceci nous laisse espérer qu'en dépit de la violence nationaliste et malgré le cas Yougoslave, la guerre internationale pourra être évitée dans cette région. Le nationalisme peut en effet aussi être considéré comme une force constructive : si la Pologne parvient à surmonter ses troubles actuels, le nationalisme polonais y aura certainement contribué de manière positive.

De plus, il est possible d'identifier quatre développements importants susceptibles de réduire la fréquence et l'intensité des guerres locales en Europe ou ailleurs. Tout d'abord, la mort du communisme a entraîné dans sa chute bien des mythes romantiques sur la révolution134. Au cours des deux derniers siècles, de nombreux experts, philosophes et activistes politiques n'ont pas caché leurs enthousiasmes pour la révolution et ses soi-disant effets salutaires et purificateurs.

134 Par exemple, dans un livre sur le Vietnam qui s'est vu accorder de nombreux prix, le journaliste(...)

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Plus particulièrement, le communisme a affirmé pendant des décennies que les révolutions réussies et les guerres de libération dans le Tiers Monde entraîneraient un renouveau social, politique et économique. Les désastres qui ont suivi les révolutions soi-disant réussies au Vietnam et ailleurs ont surtout "purifié" le monde de l'idée selon laquelle la révolution peut avoir le moindre effet purificateur. Depuis, cette dialectique politique qui avait fait couler tant de litres d'encre et de sang a été heureusement abandonnée.

Deuxièmement, une fois la violence révolutionnaire discréditée aux yeux du monde entier, les réformes démocratiques pacifiques sont parallèlement devenues de plus en plus séduisantes, avec pour résultat que l'idéal démocratique s'est répandu à travers le monde. La démocratie est certes imparfaite mais souvent efficace pour résoudre les conflits locaux de manière pacifique. De plus, et contrairement à ce que l'on pense généralement, il semblerait que la démocratie soit un processus qui puise s'instaurer relativement aisément135.

Troisièmement, bien que peu de guerres locales aient été déclenchées directement par les principaux protagonistes de la Guerre Froide, bon nombre d'entre elles se sont sérieusement aggravées suite à leurs interventions. L'un des arguments principaux de l'idéologie communiste reposait sur l'idée que la violence révolutionnaire était la plupart du temps inévitable et que les Etats communistes se faisaient un devoir de les y aider. Parallèlement, la politique du containment à l'Ouest impliquait que la force soit utilisée pour repousser ces interventions.

Les grandes puissances restreignirent ou tentèrent de restreindre leurs petits "clients", mais le plus souvent elles s'y impliquèrent ouvertement. En plus de la Corée, du Viêt-Nam, de la République Dominicaine, du Liban en 1958, de l'Inde, de l'Afghanistan et de la Grenade où des troupes américaines, soviétiques et/ou chinoises ont été directement engagées, on peut estimer que la Guerre Froide a exacerbé des conflits violents en Thaïlande, en Birmanie, au Guatemala, au Nicaragua, au Salvador, au Venezuela, à Cuba, en Grèce, au Pérou, en Argentine, en Bolivie, au Cambodge, au Laos, en Angola, en Inde, au Mozambique, au Chili, au Congo, au Brésil, en Ethiopie, en Algérie, en Irak, aux Yémen, en Hongrie, à Zanzibar, en Afrique du Sud, en Guyane, en Indochine française, en Malaisie, en Iran, en Indonésie et aux Philippines.

Avec la fin de la Guerre Froide, on peut s'attendre à ce que de telles recrudescences n'aient plus lieu. Dans la mesure où cela signifie moins d'armes étrangères et moins d'aides extérieures aux potentats locaux, ces conflits et leur intensité devraient diminuer. En 1991, les ventes d'armes à ce que l'on appelait encore le Tiers Monde ont chuté d'un tiers par rapport au record atteint en 1986136. En 1993, elles avaient encore diminué de 20 %137.

135A ce propos voir Mueller J., « Democracy and Ralph's pretty good grocery : Elections, inequality,(...) 136Wright R. J. Jr, Testimony before the Senate Intelligence Committe, 2 february 1993.

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Mais l'expérience nous a malheureusement montré que les belligérants n'avaient besoin ni d'encouragements ni d'armes sophistiquées pour s'enrichir et semer le désordre. L'amélioration ne sera donc en aucun cas satisfaisante. Quatrièmement, alors que la coopération était particulièrement difficile à mettre en oeuvre durant la guerre froide en raison de la lutte intense qui figeait les positions de l'Est et l'Ouest, ces deux camps ont aujourd'hui de bonnes raisons de coopérer dans la plupart des domaines pour favoriser la paix et la stabilité.

Cependant, ils ne coopéreront de manière significative, c'est -à-dire en envoyant conjointement leurs troupes dans des zones à risques, uniquement là où ils considèreront que leurs intérêts sont fortement en jeu. La plupart du temps, ils se contenteront d'encourager des organisations comme les Nations unies à assumer les tâches singulièrement peu séduisantes du maintien et du renforcement de la paix dans les zones périphériques138.

Des "gardiens de la paix" perdront la vie, mais si la structure organisationnelle de ces opérations est modifiée pour que ces pertes touchent principalement des volontaires internationaux plus anonymes que des unités nationales facilement identifiables, alors l'impact de politique intérieure en sera plus faible pour chacun des pays concernés.

le contraste entre d'une part la lancinante routine des conflits à Chypre et en Irlande du Nord et d'autre part la terrible catastrophe bosniaque nous suggère que le patient travail de police internationale mené à Nicosie et à Belfast pendant des années a certainement permis de sauver des milliers de vies humaines139.

Avec la fin de la compétition issue de la guerre froide, de telles opérations conjointes seront de plus en plus fréquentes dans la mesure où l'Est et l'Ouest se retrouveront du même côté dans la majeure partie des conflits. Ainsi, sur les 26 missions de maintien de la paix entreprises par les Nations unies entre 1945 et 1992, 12 d'entre elles ont débutées après 1988140. Le budget des Nations Unies affecté au maintien de la paix a quadruplé, passant de 700 millions de dollars en 1991 à 2,8 milliards de dollars en 1992141.

De plus, avec l'application de sanctions économiques contre l'Iraq en 1990, contre Haïti en 1991 et contre la Serbie en 1992, les grandes nations sont peut-être en train d'affuter une nouvelle arme crédible, bon marché et sans doute efficace contre les agresseurs et semeurs de troubles des petits ou

137Schmitt E., « Arms sales to third world, especially by Russians », drop, New York Times, 20 July,(...) 138Cf. Urquhart B., « For a UN volunteer military force », New York Review of Books, 10 june, 1993,(...) 139Mais cela tend à être une tâche ingrate dans la mesure où les personnes dont les vies ont été sau(...) 140Prial F. J., « U. N. Seeks signal on troop notice », New York Times, 20 July, A2.

141New York Times, 12 décembre 1992, p. 12.

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moyens Etats. L'application de ces sanctions a en effet clairement montré que le monde pouvait sans peine se passer de la participation économique de ces pays, et dans un contexte d'harmonie relative, elles permettent de leur infliger de sérieux dommages à peu de frais.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein