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Une agriculture urbaine durable à  Kigali (Rwanda)

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par Felicien SEBUHINJA
Universite du Maine (France) - Masterà¢â‚¬â„¢s degree en politiques territoriales et developpement durable 2010
  

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V. CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL DE LA RECHERCHE

Toute pratique est informée par une théorie, que celle-ci soit consciente ou non (Fragnière, 1986, p.23). C'est pourquoi nous avons préféré rédiger cette partie théorique pour mieux mettre en contexte notre recherche.

V.1. De la durabilité de l'agriculture urbaine

La définition la plus usuelle du développement durable est celle qu'en a donnée la commission Brundtland en 1987 et reprise en 1992 à la Conférence de Rio : "Un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins". C'est une notion qui a fortement émergé depuis quelques décennies du fait de la prise de conscience de la limitation des ressources à notre disposition (matières premières, biodiversité, espace disponible, eau, etc.) et des problèmes environnementaux provoqués par les activités humaines. Cette notion se situe à la croisée de trois piliers ou objectifs fondamentaux :

- un pilier économique qui vise à continuer à produire des richesses pour satisfaire les besoins de la population mondiale ;

- un pilier social qui veille à réduire les inégalités à travers le monde ;

- un pilier environnemental qui cherche à préserver l'environnement que les générations futures recevront en héritage.

Quelque soit l'option retenue, l'optique d'un développement durable amène inévitablement à respecter les règles suivantes (Pearce-Turner-1990, cité par Monédiaire, 1999) :

- puiser dans les ressources renouvelables à un taux de cueillette inférieur au taux de renouvellement ;

- rejeter dans l'environnement des déchets à un taux inférieur à la capacité d'assimilation du milieu.

A ces conditions le développement sera durable, à la nuance près du stock de ressources épuisables, et il sera limité à la durée de vie de ce stock. Pour acquérir des degrés de liberté supplémentaires, plusieurs solutions sont possibles (Monédiaire, 1999) :

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- substituer des ressources renouvelables aux ressources épuisables, ce qui en milieu urbain concerne les politiques de transports, d'énergie, de construction...Il s'agit ensuite de substituer du capital artificiel au capital naturel quand cela est justifié4

- efficacité : le but est techniquement et économiquement accessible ;

- durabilité : la durée d'utilisation des produits détermine le rythme auquel ceux-ci sont remplacés, et par conséquent le montant des ressources utilisées ainsi que la quantité de déchets rejetés. Si on passait à un système de remplacement lent, on diviserait par deux la consommation des ressources et le montant de déchets. Pour ce faire, plusieurs stratégies complémentaires sont envisageables sans restreindre le niveau de vie des populations : réutilisation des produits, réparation, remise en état, recyclage. C'est dans cette perspective qu'il faudrait voir le rôle que pourrait jouer l'agriculture urbaine.

Appliqué à l'agriculture, le terme durable intègre, tout comme lorsqu'il est rapporté au développement, des dimensions à la fois économiques, sociales et environnementales, sur diverses échelles, spatiales et temporelles. En agriculture, les différentes voies développées en direction de la durabilité visent à atteindre des rendements acceptables tout en réduisant les impacts environnementaux négatifs. Ce sont des approches systémiques qui considèrent l'activité agricole dans ses interactions avec le milieu naturel l'environnant. Elles s'appuient à des niveaux variés sur la prise en compte des équilibres écologiques, voire tentent de reproduire le fonctionnement des systèmes naturels pour améliorer la productivité à long terme du système agricole (François Laurent, 2006).

Dans le contexte urbain, la notion d'agriculture durable fait écho aux liens entre agriculture et ville (AWA BA et AUBRY, 2010). Deux types de durabilité des exploitations de l'agriculture urbaine sont distingués par Awa et Aubry (2010):

- une durabilité appréhendée par les facteurs internes : la viabilité économique, la vivabilité de l'exploitation, dont témoignent la transmissibilité et la reproductibilité de l'exploitation elle-même, ainsi que ses impacts environnementaux.

- Une durabilité externe: vision que les décideurs urbains et les résidents ont sur le futur de cette agriculture comparativement à d'autres utilisations possibles de l'espace (logements, industries, espaces verts, etc.).

4 C'est-à-dire quand le surcroit de productivité du capital artificiel est supérieur au surcroit de ressources naturelles qu'il a fallu pour le produire.

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Le croisement de ces deux durabilités semble approprié pour le contexte urbain (idem): durable « intrinsèquement », une exploitation agricole urbaine peut être condamnée par l'existence de projets urbains (d'infrastructures par exemple) jugés prioritaires ; a contrario, les urbains peuvent souhaiter conserver, par exemple pour des raisons d'aménités paysagères (Donadieu et Fleury, 2005), des exploitations agricoles dont la viabilité économique ou la vivabilité sociale ne sont pas assurées.

Pour Godard et Hubert (2002) cités par BA et AUBRY, la durabilité de l'agriculture s'entend, d'une part, par la durabilité autocentrée de l'exploitation, d'autre part, par sa contribution à la durabilité du territoire qui l'inclut. Le concept de durabilité de l'agriculture5, dans le contexte urbain, renvoie pour beaucoup, d'une part, aux conditions de pérennisation in situ de l'occupation agricole de l'espace, étant donné que la construction sur un espace agricole est un phénomène largement irréversible ; d'autre part, à la contribution de l'agriculture au développement durable de la ville (Dabat, Aubry et Ramamonjisoa, 2006).

La durabilité à long terme de l'agriculture urbaine et périurbaine est conditionnée par la capacité des agriculteurs et des fonctionnaires urbains à exploiter les avantages de l'environnement tout en réduisant les problèmes et en trouvant les moyens de garantir aux producteurs l'accès à la terre (FAO-Comité de l'agriculture, 1999).

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard