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La chefferie traditionnelle Bene a l'ère de la libéralisation politique au Cameroun et de ses ressorts: le cas de l'arrondissement de Nkol-Metet

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par Sylvain Charles AMOUGOU MVENG
Université Yaoundé II SOA - DEA Sciences politiques 2009
  

Disponible en mode multipage

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    SOMMAIRE

    INTRODUCTION 3

    Première partie : Les ressorts normatifs et affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de                            Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 33

    Chapitre1 : Les ressorts normatifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de                   la libéralisation politique 34

    Section 1 : La prévalence maintenue des normes juridiques à l'ère de la                   libéralisation politique 35

    Section 2 : Le caractère récessif des normes coutumières de la Chefferie traditionnelle à                   l'ère de la libéralisation politique 40

    Conclusion partielle 51

    Chapitre 2 : Les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère                      de la libéralisation politique 53

    Section 1 : Les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet entre                  communalisation et sociation 54

    Section 2 : La fragilisation de la grâce des Chefs 60

    Conclusion partielle 68

    Deuxième partie : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-                                 Metet à l'ère de la libéralisation politique 69

    Chapitre 3 : Les ressorts stratégiques de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère                    de la libéralisation politique 71

    Section 1 : Les Chefferies traditionnelles Bene comme lieu d'un pouvoir sous contrôle                  bureaucratique et élitaire 71

    Section 2 : Les Chefferies tradionnelles Bene comme arène et marché politique 86

    Conclusion partielle 96

    Chapitre 4 : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet à                         l'ère de la libéralisation politique 97

    Section 1 : Les Chefferies traditionnelles comme lieu d'activités socioéconomiques 98

    Section 2 : La place des Chefs et des Chefferies dans l'activité de la libéralisation politique 113

    Conclusion partielle 121

    CONCLUSION GENERALE 122

    Dédicaces

    A MES PARENTS :

    Ø Mon père le Révérend Docteur Luc Bruno MVENG OWONO

    Ø Ma mère ZE EBOTO Marie

    A LA REFRAM :

    Ø Rencontre Fraternelle de la Famille Mveng

    REMERCIEMENTS

    Produit de l'Université de Yaoundé II-Soa, et du système éducatif camerounais dans tous ses paliers, nous nous devons l'honneur et le plaisir de remercier l'Etat du Cameroun, notre pays, qui a mis à la disposition de sa jeunesse, des structures d'encadrement de haut niveau, pour l'acquisition et la diffusion des savoirs. Sans lesquelles nous ne pourrions faire les études en Science Politique.

    Nous remercions vivement les autorités académiques pour leur diligence et davantage, le corps enseignant dans sa totalité, pour sa grande conscience professionnelle, et l'exercice sans faille de son magistère.

    - Nous disons particulièrement notre gratitude au Docteur Owona Nguini Mathias Eric, qui a accepté diriger nos premiers pas dans la recherche, avec patience et minutie sans jamais se départir de sa rigueur intellectuelle.

    - Nous voulons également rendre un vibrant hommage auProfesseur Njoya Jean, Chef de Département de Science Politique à l'Université de Yaoundé II-Soa,auProfesseurMouiche Ibrahim et au Docteur Nsisoa Marcel, qui ont suscité en nous, le goût de faire les études en Science Politique au plus haut niveau ; mieux encore à nous intéresser à la socio-anthropologie politique. Nous les remercions également pour la documentation mise à notre disposition.

    - Notre hommage va également à l'endroit de Monsieur le vice-Recteur chargé des affaires académiques, le Professeur Minkoa She Adolphe, qui a su nous remettre sur les rails de la recherche quand nous pensions renoncer à la poursuite de la rédaction de ce mémoire. Nous lui disons infiniment merci pour cette action salvatrice.

    - Nous rendons un vibrant hommage à nos parents qui nous ont donné la vie, et surtout qui n'ont jamais lésiné sur les moyens pour nous garantir une formation académique digne de ce nom. Au Révérend pasteur Docteur Luc Bruno Mveng qui aura veillé au toilettage de ce travail, grâce à son éclectisme très développé. A notre mère, née Ze Eboto Marie, pour sa constante attention et ses encouragements inlassables.

    - Nous remercions chacun de nos frères et soeurs, pour tout le soutien et l'attachement indéfectible pour la réalisation de ce travail. En d'autres termes, la production de ce document a bénéficié du concours de la REFRAM qui des saisies, en passant aux impressions, aux reliures,a été d'un apport sans faille. Nous remercions à cet effet nommément: M. Eboto Ze Martin Paul ; M. Ela Ela Amos et son épouse Minso Mveng Jeanne-Marie ; M. Mveng Mveng  et son épouse Ngaleba Nicole ; M. Mbarga Mveng et son épouse Gbil Clarisse ; au Dr PhD Owono Zambo et son épouse Dr Longang Elise ; M. Messi et son épouse Atyame Mveng Marilyne Louise ; M. Mbala Zangana Benjamin et sa fiancée Ottou Anicette et enfin MadameZe Mveng Marie Pélagie.

    - Nous remercions singulièrement notre grand frère, Monsieur Mveng Mveng Luc Bruno pour tous les sacrifices consentis à notre égard pour notre épanouissement intégral dans le cadre de notre formation, de l'école primaire à l'université.

    - Nous voulons remercier leurs Majestés, Chefs de 3e degré et Chefs de groupement pour leur disponibilité à nous fournir des informations lors de nos différents entretiens. Nous voulons remercier ici particulièrement Leurs Majestés Mbala Zangana Benjamin, Chef de groupement Bene-Nord-Est ; Ondoua Menyié Paul Aimé, Chef de groupement Bané Sud- Est ; Oyono Owono Joseph Chef de 3e degré d'Awäe ; Mva Kouma Emmanuel de la chefferie de 3e degré de Bikoko ; enfin de Bala Bala Francis de la Chefferie de 3e degré d'Oveng, qui nous ont gracieusement ouvert les portes de leurs Chefferies et ont également mis à notre disposition leurs archives pour une meilleure connaissance des Chefferies Bene.

    - Nous remercions également Monsieur Zambo Assembe Salomon Emile, qui a été pour nous à Soa un véritable tuteur.

    - Nous remercions nos camarades du département de Science politique, qui ont instauré une saine émulation,  et avec lesquels nous avons partagé de bons moments de la première année en cinquième année et qui ont participé à la relecture de ce travail. Nous saluons particulièrement ici, Hervé Nguiamba, Aboé jean, Ngoula Serge, Edjo'o Jean Claude, Mbede Anette, Mbeck Laura, Abega Stephane, Mbata Charles, Mbebi Raymond, Edouard Yogo, Ngobo Annick, Messia Lionel, Mbeguele Amour Destin et Assako Mbita Rodrigue.

    - Nous remercions également, l'équipe dirigeante de la JAME (Jeunesse Active de Metet en Evolution), qui a facilité notre déploiement sur le terrain en jouant généralement le rôle de guide. Nous rendons à cet effet un hommage sincère à son Président, Ndi Ndi Anicet ; à son vice-Président, Mbala Manga Gallus et enfin à son Chargé de la Communication, Abega Abessolo.

    - Enfin nous ne saurions terminer sans adresser notre gratitude à Zanga Omgbwa Paul pour son coaching et Essola Hélène Nadia pour son soutien multiforme durant tout notre séjour à Soa.

    RESUME

    La Chefferie traditionnelle au Cameroun à l'ère de la libéralisation politique reste régie par le Décret N°77/245 du 15 juillet 1977. Ce Décret pris à l'époque du monolithisme ne permet plus de rendre suffisamment compte du rôle à jouer par la Chefferie traditionnelle dans la conjoncture politique actuelle qui est axée sur la démocratisation et mieux encore de la décentralisation qui trouve son fondement dans la Loi fondamentale camerounaise n°96/06 du 18 janvier 1996.

    Malgré cet état de choses, à Nkol-Metet, à l'ère de la libéralisation politique, la Chefferie traditionnelle est à l'image d'un marché politique où les acteurs sociaux investissent de nombreux capitaux pour la revitaliser. Ces investissements sociaux n'ont pas que des fins philanthropiques ; elles visent aussi à asseoir, mieux, à conforter des assises politiques des acteurs de la reviviscence dans ce terroir. En d'autres termes, le contrôle des Chefferies Bene à l'ère de la libéralisation politique fait l'objet d'un enjeu à la fois stratégique et pragmatique opposant parfois Chefs traditionnels-Elites ; Elites-Elites ou tout simplement a favorisé la création des alliances de revers. Cependant pour mieux apprécier les conflits latents et manifestes du contrôle des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet, faut-il relever ici qu'ils sont fortement entretenus par des logiques politico ethniques et ethnico politiques.

    En dernière analyse la compétition pour le contrôle de la Chefferie traditionnelle a vu émerger les politiciens investisseurs, qui par leurs multiples investissements, ont relativement permis la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet dont le crédo est axé sur le militantisme ostentatoire des Chefs traditionnels ; la promotion de l'agriculture par des Chefs et des Elites majeures ; l'amélioration du secteur sanitaire (création des centres de santé, création d'adductions d'eaux...) ; enfin la promotion de l'éducation scolaire par l'organisation des journées d'excellence scolaires, la construction des bâtiments scolaires...

    Nous ne saurions clore sans évoquer que l'un des signes forts de la libéralisation politique sur la Chefferie traditionnelle de Nkol-Metet est l'élection de Sa Majesté Oyono Owono Joseph, comme le tout premier Maire de Nkol-Metet. Cela traduit tout simplement l'inscription officielle de la Chefferie traditionnelle dans l'implémentation du processus de la décentralisation à Nkol-Metet.

    ABSTRACT

    Traditional Chiefdom in Cameroon, in the era of political liberalization has its legitimacy, based on decree N° 77/ 245 of july 1977. This decree that was taken in a monolithic period is no more capable of treating the role that traditional Chiefdom should play; democracy, which is also more concerned with decentralization, whose background lies on the Cameroonian fundamental law N° 96/06 of 18thjanuary 1996.

    Despite all this situation, in Nkol-Metet in the heart of political liberalization era, traditional chiefdoms look like a political market where social actors invest a lot of capital to revive it. These social investments do not only have philanthropic goals, they also seek the comfort of political sets of those actors in order to revive this territory. In other words, the control of the Bene Chiefdom in the political liberalization is an object of strategical and pragmatical stakes, creating sometimes opposition between traditional stake elites; or simply has favored the creation of reverse alliances. Nevertheless, to better appreciate conflicts be noticed that they are strengthened ethnic-political logics.

    The competition for the control of the traditional Chiefdom has relatively permitted the Nkol-Metet Chiefdom, which lies its principle on the mode ostentatious militancy of traditional Chiefs; the promotion of agriculture by Chiefs and major elites; the improvement of health facilities (creation of health center, creation of water supply centers; and the promotion of education trough the organization of scholarship days, construction of schools.

    As we are straight to conclude, one of the major signs of political liberalization of traditional Chiefdom of Nkol-Metet is the election of his highness Oyono Owono Joseph as the ever first Mayor of this area. This seems to be the implementation of decentralization.

    SIGLES ET ABREVIATIONS

    ACK :Association Culturelle du Kazanga.

    ACTRAN : Association des Chefs Traditionnelsdel'Arrondissement de Nkol-Metet.

    ACTRANK : Association des Chefs Traditionnels du Nyong Ekéllé.

    ACTRANSO : Association des Chefs Traditionnels du Nyong et So'o.

    ADENSO: Associationdes Elites du Départementdu Nyong et So'o

    AFP : Allianceof Progressive Forces

    AMEC : Action pour la Méritocratie et l'Egalitédes Chances.

    ASFRADO : Association des Frères et Amis pour le Développement d'Oveng.

    BEPC : Brevetd'Etudes du Premier Cycle.

    BRIC : Blocpour la Reconstruction et l'Indépendance Economique du Cameroun

    CEP : Certificat d'Etudes Primaires.

    CEPE : Certificat d'Etudes Primaires et Elémentaires.

    CES : Collège d'Enseignement Secondaire.

    CODEMEC : Comité de Développement de Metet- Centre.

    CPP : Cameroun People Party.

    CRA : Centre Régional d'Agriculture.

    DGSN : Délégué Générale à la Sûreté Nationale.

    Dr : Docteur

    EKMA : Ekoan Mvog Amougou.

    EPC : Eglise Presbytérienne Camerounaise.

    EPCO : Eglise Presbytérienne Camerounaise Orthodoxe.

    GIC : Groupe d'Initiative Commune.

    JAME : Jeunesse Activede Meteten Evolution.

    MINAT : Ministèrede l'Administration Territoriale.

    MPA : Mission Presbytérienne Américaine.

    NTIC : Nouvelle Technique de l'Information et de la Communication.

    ONCPB : Organisme National de la Commercialisation des Produits de Base.

    ONG : Organisation Non Gouvernementale.

    PADDEC :Patriotes Démocrates pour le Développement du Cameroun.

    PDC : Programmede Développement Communautaire.

    PNDP : Programme National de Développement Participatif.

    RDC : République Démocratique du Congo.

    RDPC/Rdpc : Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais.

    REFRAM : Rencontre Fraternelle de la Famille Mveng.

    SDF : Social Democratic Front.

    SEMRY : Société d'Expansion et la Modernisation de la Culture de Riz de Yagoua.

    S.M : Sa Majesté.

    UNC : Union Nationale Camerounaise.

    UNDP : Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès.

    UPC : Union des Populations du Cameroun.

    INTRODUCTION

    Section I : Construction de l'objet

    Paragraphe 1 : Contexte et intérêt de l'étude

    A- Contexte

    Les Chefferies traditionnelles en Afrique et au Cameroun en particulier, ont participé et participent de près ou de loin à la construction de l'Etat en Afrique. A l'ère coloniale, tant dans les systèmes coloniaux allemand, français et anglais, la Chefferie traditionnelle a été utilisée pour faciliter les missions des puissances colonisatrices. Autrement dit, l'Etat colonial devenu indépendant a utilisé les autorités traditionnelles pour s'implanter sur l'ensemble du territoire, pour relayer ses injonctions, pour contrôler les populations et approvisionner en moyens humains et financiers ses caisses insatiables (voir Heritier Mambi, 2010 :9 ; Mouiche, 2005 :4 ; Julius Ngoh, 1990 : 82 ; Geshiere, 1996 :307 ; Ngongo, 1987). En dépit de l'ostracisme1(*) (Jacquemot, 2007 :57), les fragilisations et les cas de dépersonnification qu'elles ont connus (voir, Bayart 1989 ; Owona Nguini 1998 : 61 Nach Mback 2000 :79), elles se sont imposées comme l'une des composantes administratives2(*) et sociologiques de nombreux pays africains. Dans la terminologie de Nach Mback, (2000 :88) les Chefs traditionnels sont : «  les auxiliaires déconcentrés d'essence traditionnelle » et en ce qui concerne la Chefferie traditionnelle il affirme :

    « laChefferie traditionnelle est d'abord une collectivité humaine établie sur une portion du territoire de l'Etat. Elle est ensuite le cadre d'exercice de ses compétences par une autorité justement dénommée Chef traditionnel » (Nach Mback 2000 :77).

    Au Cameroun, la libéralisation politique survenue aux années 1990, qui résulte en grande partie de l'impact des « dynamiques du dedans 3(*)et du dehors  4(*)», aura le mérite de décongestionner l'espace politique camerounais ; car elle a accru l'émancipation des forces politiques 5(*)`'d'en haut'' et `'d'en bas''. Au niveau des Chefferies traditionnelles, la libéralisation politique marque de façon plus ouverte le rapport au monde politique, mieux de la participation politique des Chefs traditionnels. C'est certainement l'impact de la libéralisation politique sur la Chefferie traditionnelle qui a accentué le militantisme politique grandissant des Chefs traditionnels dans tous les coins du terroir national. Ainsi du Nord au Sud, de l'Est comme à l'Ouest du pays, le militantisme politique des Chefs traditionnels s'avère être un des enjeux majeurs de la reviviscence de la Chefferie traditionnelle. (Voir Mouiche, 2005 ; Perrot et Fauvelle, 1999, Bat, 2009). A Nkol-Metet, cette participation politique a plutôt contribué à mettre les processus devant permettre la revalorisation de leur institution. C'est dans cette optique qu'est née le 30 mars 1998, l'association des Chefs traditionnels de Nkol-Metet (l'ACTRAN)6(*).Cette association comprend tous les Chefs traditionnels et a pour mission de rassembler et mobiliser toute l'élite traditionnelle de l'Arrondissement de Nkol-Metet, en vue de l'établissement et de la consolidation des liens de fraternité et de solidarité entre tous les Chefs traditionnels ; revaloriser les us et coutumes à travers la Chefferie traditionnelle ; sensibiliser par l'information et la formation des Chefs traditionnels quant à leurs rôles vis à vis de l'autorité administrative d'une part, et leurs administrés d'autre part. Promouvoir le développement économique et social et culturel des différentes Chefferies de l'Arrondissement de Nkol-Metet ; promouvoir le bien-être des populations dans leurs Chefferies. Toujours à Nkol-Metet, les Chefferies de groupement ont été fonctionnalisées à cette ère de la libéralisation politique pourtant elles ont été hibernées pendant vingt six (26) années7(*). Ainsi, nous avons formulé, notre sujet comme suit : la Chefferie traditionnelle Bene à l'ère de la libéralisation au Cameroun et de ses ressorts : le Cas de l'Arrondissement de Nkol-Metet. En jetant notre dévolu sur les Chefferies traditionnelles de Nkol-Metet, nous avons pris une posture d'astronome des Sciences Sociales qui, selon Levi Strauss :

    «  est chargé de découvrir un sens à des configurations très différentes, par leur ordre de grandeur et leur éloignement, de celles qui avoisinent immédiatement l'observateur » (Claude Levis Strauss, 1961 :415).

    L'objet de la recherche devient ainsi clair : analyser l'impact de la démocratisation, mieux, de la libéralisation politique impulsée par l'Etat sur la structure infra étatique qu'est la Chefferie traditionnelle,  mieux encore, des Chefferies BENE de Nkol-Metet. Il est alors possible d'indiquer les principaux objectifs que se fixe la présente recherche. D'une part, il est question de mettre en lumière comment se manifeste la reviviscence des Chefferies traditionnelles BENE de Nkol-Metet, depuis l'inscription du Cameroun dans le processus de la décentralisation. D'autre part, comprendre les principaux enjeux et les mobiles du déploiement des Chefs traditionnels, des élites politiques et des associations politiques et apolitiques pour la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet.

    B- Intérêt de l'étude

    De prime abord, il nous convient de dire avec Schopenhauer :

    « Ainsi, la tâche n'est point de contempler ce que nul n'a encore contemplé, mais de méditer comme personne n'a encore médité sur ce que tout le monde a devant les yeux » (Schopenhauer in Grawitz, 2001 :351).

    Le sujet relatif à la Chefferie traditionnelle Bene à l'ère de la libéralisation politique et de ses ressorts: le cas de l'Arrondissement de Nkol-Metet a un intérêt certain. Dans le cadre réflexif, il s'inscrit dans le champ de la politologie, plus précisément, de l'anthropologie politique ; c'est dans ce sillage que ce sujet nous permet, de saisir le fonctionnement du champ politique local à Nkol-Metet à travers la participation politique des Chefs traditionnels, comme étant les gardiens de la tradition, mais surtout les promoteurs du développement local. En d'autres termes, ce sujet nous permet de dégager l'impact de la démocratisation, mieux, de la libéralisation politique impulsée par l'Etat sur la structure infra-étatique que constitue les Chefferies traditionnelles.

    Dans sa dimension empirique, ce sujet nous permet de mettre en exergue la synergie d'actions entre les Chefs traditionnels, l'élite et les associations pour revitaliser la Chefferie traditionnelle BENE à Nkol-Metet. De même, il permet de clarifier les interactions observées entre la Mairie et les Chefferies, quoique symboliques comme inscription de la Chefferie traditionnelle BENE dans le processus de la décentralisation. Ainsi dit, l'intérêt empirique du sujet, élucide clairement le déploiement des forces politiques à Nkol-Metet dans la revitalisation de la Chefferie traditionnelle.

    L'intérêt de ce sujet, c'est aussi son actualité. L'un des faits actuels proéminents, c'est la mise effective des Chefferies de groupement en 2008 ; pourtant, celles-ci sont prévues par l'arrêté n°13 MINAT/DCT du 19 janvier 1982, qui porte création des Chefferies de groupement dans le Département du Nyong et So'o. L'effectivité de ces Chefferies intègre une nouvelle grille d'analyse sur le fonctionnement des Chefferies à Nkol-Metet en essayant de mettre en lumière les interactions Chefferies de groupements-Chefferies de 3e degré ; Chefferies- Mairie ; Chefferies- élites ; Chefferies-Sous-préfecture...

    Ce sujet a aussi, une dimension prospective. L'effectivité des Chefferies de groupement à Nkol-Metet depuis 2008 trouve implicitement une explication dans le fait que les Pouvoirs Publics veulent par celles-ci impulser la décentralisation au niveau des Chefferies de 3e degré. L'élection des personnes chevronnées8(*)à la tête de ces Chefferies obéit, loin s'en faut, à une telle ambition. Toujours d'un point de vue prospectif, la décentralisation n'étant pas encore totalement effective au Cameroun, le dynamisme développemental dont jouissent certaines Chefferies à Nkol-Metet à travers les actions des Chefs traditionnels et certaines élites, trahissent quelque peu leurs ambitions camouflées pour les élections sénatoriales, les élections des Conseils Régionaux ou tout simplement de conforter leurs assises politiques...

    C- Cadre conceptuel

    Le cadre conceptuel est le lieu de clarification des concepts. Sindjoun, cité par Atangana (2010 :3), fait de cette phase, un impératif analytique. C'est dans ce sillage qu'Emile Durkheim affirme :

    «La première tâche du sociologue doit donc être de définir les choses dont il traite, afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question. C'est la première et la plus indispensable de toute preuve de vérification...De plus, puisque c'est par cette définition initiale qu'est constitué l'objet même de la science, celui-ci sera une chose ou non, suivant la manière que cette définition sera faite ».(DURKHEIM, 2007:34).

    Il apparaît fondamental de définir les concepts suivants : libéralisation politique, Décentralisation et Chefferie traditionnelle.

    · Libéralisation politique

    La libéralisation politique est un concept étroitement lié à celui de la démocratisation. En effet, la libéralisation politique fait partie des étapes du processus de la démocratisation à côté de la transition démocratique qui se déroule entre deux situations stables d'un régime politique avec une possibilité de changement des pratiques et des normes dans le sens de la démocratisation ( Quantin Patrick,1998) et de la consolidation démocratique. Selon Przeworski, cette étape se résume par le fait que l'ordre institutionnel démocratique s'impose comme le seul cadre du jeu, quand toutes les principales forces politiques, même lorsqu'elles ont perdu n'envisagent d'autre alternative que d'inscrire leurs actions dans ce cadre institutionnel démocratique. Au regard de la complexité du processus de la démocratisation, Bruce Koppel affirme :

    « le processus de la démocratisation comprendra certainement les éléments de la libéralisation politique, mais il sera accompagné d'un approfondissement du contenu démocratique des institutions politiques existantes » (1995 :5).

    En d'autres termes, le processus de la démocratisation qui est l'instauration d'un système de gouvernement démocratique (Mouiche, 2005 :14), se distingue, peu s'en faut, de la libéralisation politique ; dans la mesure où la libéralisation politique est :

    « Un processus consistant à rendre effectif certains droits, qui protègent aussi bien les particuliers que les groupes sociaux d'actes arbitraires commis par l'Etat ou les tierces parties ». (O'Donnel et Schmitter, cité par Mouiche, 2005 :14).

    Par contre, pour Huntington (1996) :

    « La libéralisation politique d'un régime signifie simplement l'ouverture partielle d'un système politique autoritaire, et n'implique pas la tenue d'élections libres ».

    La libéralisation politique, ne conduit pas forcément à la démocratie (Huntington, 1996 :7) ; dans la mesure où certains dirigeants se servent d'elle juste comme des concessions en y apportant juste des changements mineurs qui leur permettent de demeurer en place. De telles attitudes ont conduit le Professeur Sindjoun Luc à considérer la libéralisation politique en Afrique comme une modernisation conservatrice des pouvoirs publics en Place (voir Sindjoun, 1994). En d'autres termes, la transition vers la démocratie pluraliste au Cameroun présente les aspects d'une démocratisation autoritaire. C'est dans ce sens qu'Owona Nguini répercute l'idée d'un analyste politique du droit impliqué dans les cénacles gouvernants qui conçoit :

    « la technologie politique utilisée au Cameroun pour le passage à la modernité étatique comme un mode évolutionnaire plutôt que révolutionnaire de transition » (Owona Nguini 1998 :63).

    Au demeurant, au Cameroun, la démocratisation se trouve être au stade de la libéralisation politique. Ainsi, en plus de son impact sur la superstructure à travers la reconnaissance officielle des libertés civiles fondamentales, dans plusieurs cas, le gouvernement restaure les libertés de mouvement, d'expression, d'association des individus et des groupes dans la société. On assista par exemple à la libération des prisonniers politiques, à la censure politique, à la légalisation des partis politiques. Comme la libéralisation économique, la libéralisation politique réduit l'intervention de l'Etat dans le marché politique, suspend le monopôle des autorités politiques et consacre la pluralité des opinions et des organisations. Au niveau de l'infrastructure, dans le cas d'espèce qu'est la Chefferie traditionnelle, elle a accentué le militantisme politique des Chefs traditionnels et a libéré les forces politiques `'d'en haut'' comme `'d'en bas'' en favorisant relativement la reviviscence des Chefferies traditionnelles.

    A Nkol-Metet, la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique est étroitement liée au militantisme des Chefs traditionnels et à la libération des forces politiquesde toutes obédiences confondues.

    Tout notre essai définitionnel sur la libéralisation politique convient à notre étude et nous permet de voir que la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique est inscrite dans le chantier de sa modernisation, mieux, jette le pont entre la tradition et la modernité. C'est pourquoi Olivier de Sardane et al, affirment :

    «  l'autorité traditionnellement conférée aux Chefs tribaux représente pour beaucoup, un pouvoir ancestral respecté pour tous. Le processus de modernisation et de développement démocratique, doit trouver les moyens d'intégrer ce pouvoir, afin que la démocratisation ne conduise pas à un effondrement de l'ordre établi et à l'élimination des mécanismes traditionnels de résolution des conflits et de gestion du bien commun »  (Olivier de Sardane et Al., 1993 :17).

    Ainsi, la libéralisation politique telle qu'envisagée, au niveau des Chefferies traditionnelles, vise quelque peu à mettre en exergue la cohabitation entre le pouvoir moderne et le pouvoir traditionnel. Cela peut se traduire par le fait que, la décentralisation impulsée par la libéralisation politique au Cameroun a eu des incidences sur la Chefferie à Nkol-Metet.

    · Décentralisation

    La décentralisation est une politique de transfert des attributions de l'Etat vers les collectivités territoriales ou des institutions publiques, pour qu'elles disposent d'un pouvoir juridique et d'une autonomie financière. Le transfert de ces attributions, qui reste néanmoins sous la surveillance de l'Etat, permet à ce dernier de décharger ses administrations centrales et de confier les responsabilités au niveau le plus adapté. La décentralisation, se distingue de ce fait de la déconcentration qui consiste, elle, à transférer aux représentants locaux de l'administration centrale placée sous l'autorité hiérarchique de celle-ci, le pouvoir de prendre certaines décisions. Ici, les agents sont nommés par l'Etat dont ils répondent de façon très stricte. Néanmoins, la décentralisation va souvent avec la déconcentration, nécessaire pour l'accompagner et en faciliter sa mise en oeuvre.

    Au Cameroun, elle met en exergue plusieurs enjeux. Les plus plausibles, sont d'une part, les enjeux démocratiques, qui se traduisent par la participation directe des citoyens au processus de prise de décisions locales. D'autre part, les enjeux du développement9(*), mieux, de la promotion du développement durable, qui est une incitation des populations à prendre des initiatives sur le plan local, et à s'investir dans la recherche des solutions idoines auxquelles elles sont confrontées10(*) ; mieux, cet enjeu a pour avantage, une meilleure adaptation des politiques publiques. C'est dans ce sillage qu'à Nkol-Metet, l'élaboration du plan de développement communautaire (PDC) conjointement par la Mairie de Nkol-Metet et le programme national du développement participatif (PNDP) s'est faite en collaboration avec les Chefs traditionnels qui sont mieux placés pour fournir les attentes des populations. C'est au regard de toutes ces exigences et ces objectifs que Eko'o Afane affirme :

    « La décentralisation est à coup sûr, l'une des réformes majeures de ces temps. C'est une onde de choc qui ébranlera les uns après les autres, tous les domaines de l'action publique, et la vie quotidienne des citoyens ». (Eko'o Afane, 2009 :13).

    La décentralisation revêt une importance capitale, car elle modernise l'Etat, en redéfinissant les rapports entre les citoyens et le pouvoir. Cependant, nous n'allons pas tomber dans cette exaltation euphorique de la décentralisation au Cameroun. En effet, lorsqu'on parle de collectivités territoriales décentralisées au Cameroun, il s'agit explicitement des régions et des communes. Celles-ci sont chargées de promouvoir le développement économique, sanitaire, éducatif, culturel, et sportif de ces collectivités. En observant de près comment la commune fonctionne dans l'Arrondissement de Nkol-Metet, il se dégage que les prérogatives dévolues aux communes par la loi constitutionnelle en vigueur au Cameroun, en son article 55 alinéa 2, sont relativement en grande partie jouées par les Chefferies ; car celles-ci sont au coeur des dynamiques locales, tant sur le plan économique que politique. Cet article stipule :

    «  ... les conseils des collectivités territoriales décentralisées ont pour mission de promouvoir le développement économique, social, sanitaire, éducatif, culturel et sportif de ces communauté ».

    Concrètement, à Nkol-Metet, les Chefferies sont au centre de ces dynamiques ; on peut par exemple citer l'action de l'Association de la Chefferie traditionnelle d'Obout dénommée Nkul Mbida Nga Mballa, pour la transformation d'Obout en un Pôle économique à travers le financement des micros projets ; de l'ASFRADO (l'Association des Frères et Amis d'Oveng)  à travers la construction en dur de l'école publique d'Oveng et la création des adductions d'eau. Il faut relever ici que, même si la Chefferie traditionnelle n'est pas toujours à l'initiative de certains projets de développement11(*), il s'avère que dans nos études de cas, les Chefs traditionnels se sont montrés des loyaux partenaires pour des réalisations concourant à la revitalisation de leur communauté ; de même, certaines élites ont su associer les Chefs traditionnels dans cette noble mission.

    Le regroupement des Chefferies à Nkol-Metet, à l'ère de la décentralisation, n'est pas qu'un simple fait du hasard. Il s'inscrit dans la tradition africaine qui fait un appel retentissant à l'unité, à la solidarité, d'où les proverbes suivants : « une seule main ne peut attacher un mets » ; « l'union fait la force ».Ainsi, par le biais de ce regroupement, le développement se veut désormais synchronisé. Ceci permet une meilleure vitalisation de ces Chefferies, car il se développe une émulation inter-Chefferie et intra Chefferie.   Yves Poulin partage ce point de vue lorsqu'il affirme que :

     « la décentralisation accroîtrait la compétition entre gouvernements locaux et encouragerait de ce fait l'innovation » (Yves Poulin, 2004 :3).

    En d'autres termes, au sein d'un même groupement les Chefferies sont en permanente concurrence, à la quête du leadership ; ceci peut se traduire par la multiplicité des projets communautaires de développement impulsés par leurs Chefs traditionnels.

    Toutes choses étant égales par ailleurs, le fait qui se dégage est que la décentralisation concilie la légitimité démocratique avec la légitimité historique et traditionnelle.

    · Chefferie traditionnelle

    L'histoire de l'Afrique nous révèle que bien avant l'arrivée et l'installation du premier colon allemand au Cameroun, les assemblées coutumières existaient déjà, et procédaient à la désignation de leurs Chefs qui avaient la charge d'organiser la communauté. Aussi, faut-il le rappeler ici, que le terme Chefferie traditionnelle est une importation du colonisateur. Celle-ci a connu plusieurs mutations juridiques. Elle est entrée dans le vocabulaire juridique camerounais par l'arrêté n°244 du 04 février 1933, fixant le statut des Chefs traditionnels. La législation la plus récente sur les Chefferies traditionnelles date de 1977, avec le décret n°77/245 du 15 juillet 1977, portant organisation des Chefferies traditionnelles au Cameroun. Le législateur camerounais par ce décret, fait de la Chefferie traditionnelle un échelon dans l'organisation administrative du Cameroun. Ainsi, nous pouvons définir la Chefferie comme cette forme d'organisation politique caractérisée par l'existence d'un individu ou d'un petit groupe relativement spécialisé dans un rôle de direction des actions collectives ou de régulation qui dépasse les limites d'un lignage ou d'un village. Elle peut se développer par division du travail entre gouvernants assistés d'agents subalternes et spécialisés. Cette définition nous semble incomplète ; celle qui sied à notre étude, est celle élaborée par Héritier Mambi, qui la définit au sens moderne du terme comme étant :

    «  un type d'organisation politique ancienne, sans structure étatique, mais dirigée par des Chefs disposant généralement d'un pouvoir héréditaire ». (Héritier Mambi, 2010 :30-31).

    Au Cameroun, les Chefferies sont regroupées en trois catégories: la Chefferie de 1er degré qui doit couvrir au moins deux Chefferies de 2e degré et qui ne peut aller au-delà du cadre territorial d'un département ; les Chefferies de second degré dont le ressort ne peut aller au-delà de l'Arrondissement et doit comprendre au moins deux Chefferies de 3edegré. Dans l'Arrondissement de Nkol-Metet, on dénombre deux Chefferies de 2e degré. Celles-ci regroupent chacune un peu plus d'une dizaine de Chefferies de 3e degré. C'est ainsi qu'on a :les Chefferies Bané-Nord-Est, et Bané-Sud-Est qui couvrent les trente deux Chefferies de troisième degré que compte l'Arrondissement de Nkol-Metet. Enfin, la Chefferie de 3e degré correspond au village en milieu rural, et au quartier en milieu urbain.

    Toutes choses étant égales par ailleurs, au Cameroun, les Chefferies traditionnelles obéissent aux critères d'ordre sociologique. Ainsi on a par exemple, les lamibé du Grand Nord, caractérisés par un pouvoir féodal ; les Chefferies grassfields à l'Ouest et au Nord-Ouest, caractérisées par une légitimité rituelle profonde et procèdent d'une longue tradition. Enfin, les Chefferies lignagères au Centre, Sud, Est (comme dans l'Arrondissement de Nkol-Metet), d'origine coloniale où la notion de Chef est presque ignorée (voir Mouiche, 2005 : 13 - 14). Ces Chefferies sont souvent considérées comme des « Sociétés acéphales » au regard de leur faible centralisation du pouvoir. C'est Evans Pritchard et Meyer Fortes qui ont d'abord mis en exergue cette réalité, en distinguant deux types de sociétés : les sociétés qui sont dotées d'une organisation centralisée, gérant les relations politiques entre entités territoriales, (c'est le cas des lamibé par exemple), et celles où l'absence de gouvernement est perceptible au profit des segments et des lignages qui lui assurent une certaine verticalité (voir, Marie Gruenais et Jean Schmitz, 1995 :7). Les Chefferies lignagères correspondent presque aux `'sociétés contre l'Etat,'' que décrit Clastres (1974), notamment au regard de la fonction du Chef. Clastres résume la fonction du Chef en ces termes :

    « Humbles en leur portée, les fonctions du Chef n'en sont pas moins contrôlées par l'opinion publique, planificateur des activités économiques et cérémonielles du groupe, le leader ne possède aucun pouvoir décisionnaire, il n'est jamais assuré que ses ordres seront exécutés [...] le pouvoir du Chef dépend du bon vouloir du groupe » (Clastres, 1974 :34).

    La Chefferie traditionnelle dans le Centre Sud et Est n'a pas la même connotation que dans les parties du Nord et Ouest du Cameroun ; car on constate qu'il n'ya pas le respect et le culte de la personnalité du Chef12(*)qu'on observe ailleurs. Cependant les Chefferies du Centre-Sud-Est présentent une originalité, en ce sens qu'elles jettent les bases des principes de souveraineté, de non ingérence et de coexistence pacifique. En effet, à la tête de chaque lignage (MVOG) il y a un Chef, ce dernier ne peut, sauf invitation formelle d'un de ses pairs, s'ingérer dans les affaires d'un autre lignage ; c'est aussi le cas de litige entre les `' MVOG,'' le consensus est souvent la voie prisée par les parties en litiges ; en ce sens que c'est la justice des fins qui est prônée. Celle-ci a pour objectif premier de mettre un terme à une perturbation sociale, et non aliéner les individus. Il devient donc impérieux de considérer les Chefferies Bene, dans leur originalité et dans leur contexte ; et non l'appréhender sur les schèmes d'analyses d'autres Chefferies traditionnelles qui ne sont pas confinées dans la même réalité sociologique. C'est dans cet ordre d'idées qu'il faut rappeler ici que les structures lignagères d'origine précoloniale ont donné naissance aux Chefferies à Nkol-Metet à l'ère coloniale. Celles-ci, ont connu de nombreux dynamismes. Par exemple pendant la période du protectorat Allemand 13(*)à Nkol-Metet, chaque village était doté d'une Chefferie. Par contre pendant la période de tutelle, puis de Mandat Franco Britannique, les micros Chefferies ont été regroupées en deux grandes Chefferies : la Chefferie Mvog Amougou et la Chefferie Mvog Zambo. Enfin à l'ère post coloniale ces deux grandes Chefferies ont d'abord été atomisées en micros Chefferies et ensuite par l'arrêté n°13/A/MINAT/DCT du 19 Janvier 1982, déterminant les Chefferies traditionnelles de 2e degré dans le Département du Nyong et So'o, Province14(*) du Centre-Sud elles ont servi de base à la création des Chefferies de groupement qui ne seront fonctionnelles qu'à partir de l'année 2008.

    La brève présentation des Chefferies traditionnelles en fonction de leur réalité sociale suppose que la prégnance de la Chefferie dépend fortement d'un certain nombre d'éléments sociologiques, qui la valorisent ou la dévalorisent ; c'est ce qui justifie le manque d'uniformité. Au vu de l'exigence de l'heure, toutes les Chefferies doivent être partie prenante de leur développement et celui de l'Etat. Leur reviviscence consistera à procéder à des transferts technologiques intra culturels et inter culturels. C'est dans cette logique que Bayart affirme : « La production des dynamiques du dedans est indissociable des immixtions du dehors » (Bayart, 1989 :323).

    D- Revue de la littérature

    L'ignorance mutuelle est souvent le risque que court tout jeune chercheur. Or, comme l'Ecclésiaste nous le fait savoir : « il n'y a rien de nouveau sous le soleil 15(*)». En d'autres termes, le chercheur est comme un nain juché sur les épaules de géants. Eu égard à ce constat, tout chercheur a l'impérieux devoir de se référer sur les travaux de ses devanciers, afin d'établir sa démarcation par rapport à ceux-ci et d'éviter d'inventer inutilement l'existant, le connu, de défoncer une porte entre- ouverte (Atangana : 2010 :12). Au sens de Bachelard (1968), cette démarcation consiste à faire une rupture épistémologique, mieux, une coupure épistémologique qui met l'accent sur la différence de nature, entre la connaissance non scientifique (Doxa) et la connaissance scientifique. Cette étape de la recherche qu'est la revue de la littérature est donc très essentielle, car elle est une sorte d'évaluation, qui permet de faire le point sur ce qui a été dit, ou écrit sur le sujet. Soucieux du respect de cette exigence, nous avons consulté certains travaux, qui abondaient dans le sens de notre thématique, qui est la Chefferie traditionnelle BENE à l'ère de la libéralisation politique au Cameroun et de ses ressorts: le cas de l'Arrondissement deNkol-Metet.

    Notre revue de la littérature est axée sur les travaux d'auteurs camerounais, africains et africanistes qui font de la décennie 1990, une décennie de la reviviscence de la Chefferie traditionnelle en Afrique et au Cameroun en Particulier. D'après nos lectures, il appert que la reviviscence de la Chefferie traditionnelle depuis la libéralisation politique ne saurait être appréhendée de façon univoque.

    La reviviscence de la Chefferie traditionnelle s'est opérée par l'impact du militantisme des Chefs traditionnels. C'est dans ce sillage que Mouiche (2005) montre l'impact des effets induits du multipartisme dans certaines Chefferies de la Région de l'Ouest16(*) au Cameroun. L'auteur met en exergue l'effet ambivalent du multipartisme à l'issue des élections municipales de 1996 ; soit qu'elle a permis de conforter les assises politiques de certains Chefs ; soit alors elle a contribué à leur déchéance sur le plan politique. C'est dans ce sillage que l'auteur nous montre par exemple qu'à Banka, Sa Majesté Monkam Tchientcheu grâce à son militantisme au sein du RDPC, a été élu Maire de Banka. L'auteur, met également en exergue que Sa Majesté Monkam Tchientcheu a été élu parce qu'il a toujours su faire profiter à ces sujets les dividendes acquises de son alliance avec le RDPC (Mouiche, 2005 :69-77). La réhabilitation d'une école confessionnelle en école publique ; la construction d'un stade de football sont là, les quelques gages de son succès aux élections municipales de 1996. L'auteur nous montre aussi que leurs Majestés Tayo II Marcel et le Sultan Mbombuo Njoya ont été déchus aux élections municipales de 1996 respectivement à Bangou et à Foumban parce qu'ils n'ont pas su faire profiter assez suffisamment à leurs sujets leur alliance avec le RDPC ; d'où l'émergence du SDF (Social Democratic Front) à Bangou et de l'UDC (Union Démocratique du Cameroun) à Foumban. (Mouiche, 2005 : 135-166 ; 167-206). Dans la Région du Nord Ouest au Cameroun, Bat (2009), nous révèle que le militantisme politique en faveur du RDPC du Fon Ngwa'fo dit le `'Roi-pot'' où il a été d'ailleurs Vice Président du Bureau Politique a grandement contribué au rayonnement de la communauté Mankon. A titre d'illustration, nous pouvons citer, la construction d'un musée à Mankon, dans une perspective d'intégration défense de la Société Mankon. Le Roi Pot a également mis sur pied un lobby dénommé: MACUDA (Mankon Cultural Development) qui a pour vocation de défendre au plus haut niveau les intérêts des ressortissants de Mankon et surtout d'assurer leur insertion socioprofessionnelle. Pour Perrot et Fauvelle (2003), tout ce dynamisme est une preuve réelle du  `'retour des Rois''. Ces auteurs, nous montrent comment les rapports Etats - Chefferies se sont améliorés au profit d'une synergie d'actions qui n'escamotent pas totalement leurs rivalités d'antan, car chacun des deux partenaires cherche par tous les moyens de conquérir le terrain occupé par l'autre.

    La reviviscence de la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique, se manifeste aussi par la promotion du développement socio économique et sanitaire des Chefs traditionnels. Mouiche (2005 b: 1), qui est l'un des portes étendards de ce courant, affirme à cet effet que :

     « lesChefs sont les acteurs du développement local ; certes, ils font partie de la société politique en tant que suppôt du pouvoir, en leur qualité d'Auxiliaires de l'Administration, mais en même temps, on les retrouve dans la sphère civile ».

    Cet auteur, de façon empirique, à mis en exergue le rôle prépondérant du Sultan Bamoun dans ce secteur d'activité, et plus précisément dans le domaine de la santé, et la promotion de la culture, comme facteurs de rentrées des devises économiques. Dans le domaine de la santé, l'auteur nous montre que la construction de l'hôpital des Rois Bamoun au Palais à Foumban est une initiative du Sultan qui, grâce à son capital social, a été fortement appuyé par le Conseil de Haut Seine en France, afin d'améliorer les conditions sanitaires des populations du Noun. En réhabilitant le festival culturel Bamoun le Nguon, cela a permis de drainer plusieurs touristes à Foumban ; a permis la commercialisation des produits artisanaux et agricoles bref, à construire le développement individuel et communautaire des populations de Foumban. C'est donc avec raison que l'auteur affirme : «  c'est la culture qui conçoit le plan sur lequel le développement prend place ». Djateng (2007) a beaucoup plus une vision prospective du développement local au niveau de la Chefferie traditionnelle. Pour cet auteur, trois conditions doivent être préalablement remplies. Primo, il faut promouvoir le développement humain, c'est-à-dire impliquer grandement hommes, femmes et jeunes aux activités de la Chefferie. Secundo, s'appuyer sur les potentialités locales à travers par exemple, l'organisation des festivals culturels comme le Nguon chez les Bamoun ; le Ngondo chez les Sawa... il le renchérit en ces termes : « Notre diversité culturelle est une richesse, à condition de faire d'elle un instrument de développement et un connecteur des capacités ».Tercio et enfin, promouvoir la justice des fins, qui est une justice réparatrice et non privative des droits des individus.

    Au lendemain des années 1990, la reviviscence de la Chefferie traditionnelle s'est également manifestée par l'action des élites, des associations apolitiques comme politiques sur la Chefferie traditionnelle. Pour Geschiere (1996), les élites revigorent la Chefferie traditionnelle. Pour cet auteur, sans leurs actions, les Chefferies semblent être vidées de leur substance. Par contre avec elles, elles reprennent leur vigueur. Mouiche (2005) par contre, laisse néanmoins transparaître les rivalités des élites avec les Chefs traditionnels comme ce fut le cas, entre Fotso Victor et Sa Majesté Ngnié Kamga aux élections municipales de 1996 (voir Mouiche 2005 : 99-131). Pour Barbier 17(*)(1983), l'action des élites, notamment de la diaspora, qu'il qualifie de périphérie active de la Chefferie, est plutôt une manifestation de leur déférence vis-à-vis de la Chefferie. Pour Foaleng (2007), l'élite pose les actes à la Chefferie (notamment la Chefferie Bamiléké) pour s'octroyer une place de notable au sein de la Chefferie ; d'où l'assimilation de l'élite comme une `'néo-notabilité''. Il démontre à cet effet, que même les Chefferies Bamiléké sont aussi traversées par les phénomènes de `'big-men''. Bayart (1989), résume de façon très laconique toute cette activité en faisant de la Chefferie, un des foyers `'d'assimilation des élites''. Wim Van Binsbergen et Nyam Simb Calvin (2004), quant à eux, insistent davantage sur l'impact des associations sur la Chefferie traditionnelle. Wim Van Binsbergen, en étudiant les rapports entre les Chefs royaux de Nkoya, et l'association culturelle du Kazanga (ACK) en Zambie, il nous démontre que l'émergence de la dite association a redynamisé la vie sociale de la Chefferie ; mais a entraîné la folklorisation des Chefs royaux de Nkoya, car les populations ont su que seul l'ACK pouvait leur apporter le bien-être. Nyam Simb Calvin, quant à lui nous montre comment l'association des Chefs traditionnels du Nyong Ekéllé (ACTRANK), dans la Région du Centre au Cameroun a amorcé le chantier de la reviviscence de la Chefferie traditionnelle dans ce ressort territorial. Concrètement, sur le plan vestimentaire, les Chefs de l'ACTRANK s'interdisent désormais lors des cérémonies officielles, à continuer d'arborer la tenue héritée de la colonisation par la confection d'une ténue symbolisant les valeurs culturelles Bassa18(*) . La même association octroie aussi des prêts aux Chefs traditionnels démunis afin que ceux-ci, bâtissent des maisons dignes de leur majesté. (Nyam, 2004 :21-26). Bref, l'auteur met en exergue la prise de conscience des Chefs traditionnels Bassa qui s'associent dorénavant afin de redorer le blason de la Chefferie traditionnelle.

    Enfin, la reviviscence de la Chefferie traditionnelle s'est aussi manifestée par la reconnaissance de manière formelle de la Chefferie traditionnelle dans plusieurs constitutions des Pays africains, et dans le cadre de la décentralisation, plusieurs pays, sont des instances plénières de ce processus. Le Cameroun en fait partie, mais on note encore une implication institutionnelle relativement faible des Chefferies traditionnelles dans ce processus  c'est pourquoi Nach Mback(2000 :78) fait de la Chefferie traditionnelle au Cameroun : « un sujet juridique non identifié »; d'où la nécessité d'effectuer ici une socio -anthropologie politique comparative.

    Jean Pierre Olivier de Sardan, nous montre la place essentielle des Chefferies traditionnelles au Niger. L'auteur, après avoir précisé qu'elles sont des Chefferies administratives, mentionne également que ce Pays est l'un des rares pays africains n'ayant pas encore mis en oeuvre une politique de décentralisation. La spécificité de ce pays est que, la Chefferie traditionnelle est pratiquement le seul mode d'exercice du pouvoir local. En dehors de quelques communes urbaines, où les Maires sont nommés et non élus. Dans ce pays, comme le mentionne l'auteur, le monde rural ne connaît ni municipalités, ni maires, ni leurs équivalents. L'auteur nous montre par conséquent, que l'omnipotence locale des Chefs traditionnels dans ce pays, a abouti à la centralisation de leur pouvoir. C'est ainsi que les pratiques autoritaires et patrimoniales se sont accentuées au détriment de la participation des individus et l'effectivité de la réalisation de certains projets communautaires. Le bémol que nous pouvons apporter à ce niveau, est que la reconnaissance ou l'implication des Chefs traditionnels à notre sens, ne saurait faire souffrir les droits fondamentaux des individus et leurs aspirations au développement. Par contre, les travaux d'Héritier Mambi, de Pierre Jacquemot et de Goeh-Akue N'bueke Adovi se démarquent du précédent, parce qu'ils analysent l'implication des Chefferies dans le sillage de la décentralisation. C'est dans cette logique qu'Héritier Mambi se trouve. Cet auteur met en exergue l'entremêlement entre le pouvoir traditionnel et le pouvoir moderne en République Démocratique du Congo (RDC) : d'où sa théorie sur `'l'hybridation des pouvoirs'', qui s'inscrit en droite ligne avec la réviviscence. L'hybridation se traduit par le fait que dans ce pays, les deux pouvoirs coexistant, tentent d'occuper le terrain pris par l'autre. L'une des spécificités majeures de l'implication de la Chefferie traditionnelle dans ce pays, est la reconnaissance du droit coutumier dans la hiérarchie des normes. Notre rapprochement avec cet auteur, se situe dans la désignation des Chefs traditionnels, pour lui, il faut passer d'un système héréditaire à un système capacitaire. En citant Paine, il affirme :

    «  Tous les hommes sont égaux, aucun d'eux n'a le droit de passer à sa famille le pouvoir de régner éternellement sur les autres ; car si lui-même peut mériter que ses contemporains l'honorent, ses descendants peuvent être tout à fait indignes de partager ses honneurs » (Héritier Mambi, 2010 : 31). Pierre Jacquemot quant à lui, analyse l'enrôlement des Chefferies traditionnelles dans le processus de décentralisation au Ghana. L'auteur nous montre que la décentralisation est structurée autour de 138 districts, dans lesquels se trouvent les Chefferies traditionnelles. Les Chefferies, de facto sont une composante significative de la vie locale. Celles-ci sont compétentes principalement en matières civiles, foncières et la gestion des ressources naturelles. Au Togo, par contre, comme le mentionne Goeh-Akue N'bueke Adovi, la Chefferie traditionnelle est formellement reconnue, comme l'instance garante des us et coutumes. C'est plus précisément l'article 143 de la Constitution (de 1992) en vigueur dudit pays qui précise : « la Chefferie traditionnelle est gardienne des us et coutumes ». Autre fait majeur de l'insertion de la Chefferie traditionnelle dans ce pays, est la création d'une direction de la Chefferie traditionnelle, par le décret, portant organisation du Ministère de l'Intérieur Togolais notamment dans son article 14.

    D' après la présentation de la littérature sélective présentée dans le présent travail, il en ressort que la libéralisation politique a impacté sur la Chefferie traditionnelle de quatre manières, déterminant ainsi les principaux courants théoriques dans lesquels se sont inscrits les auteurs précités. Le premier impact, est celui du militantisme des Chefs traditionnels. Contrairement à l'Ouest ou au Nord Ouest, où la libéralisation politique a soit conforté l'assisse politique de certains Chefs traditionnels, soit alors les a déchus à l'issue des élections municipales de 1996 (Mouiche, 2005 ; Bat, 2009), à Nkol-Metet, ces élections marquent plutôt l'inauguration de la Mairie et marquent de ce fait le premier contact officiel des Chefs traditionnels de Nkol-Metet avec le monde politique. De ce fait, l'expérience acquise par les Chefs traditionnels pendant l'ère monolithique à Nkol-Metet est une expérience nouvelle des Chefs traditionnels. Le deuxième impact, a été l'émergence des Chefs traditionnels comme les acteurs de développement. Dans ce registre, les Chefs de Nkol-Metet se manifestent résolument par la démultiplication de création des champs communautaires, de nombreux GICS (groupes d'initiatives communes) ; mais ces projets ont un caractère relativement jeune de sorte que, les résultats n'ont pas encore atteints leurs effets optimum comme on l'a par exemple vu au royaume Bamoun avec l'hôpital des rois (Mouiche, 2005 b). Le troisième impact, met en exergue l'action des élites et des associations sur la vie de la Chefferie. A Nkol-Metet, on note une association des Chefs traditionnels (ACTRAN), qui a les objectifs semblables à ceux de l'ACTRANK. Le dernier impact met en exergue le degré d'institutionnalisation de la Chefferie traditionnelle dans la hiérarchie des normes. De là nous avons vu des avancées louables dans de nombreux pays du Golfe de Guinée19(*), où les Chefferies traditionnelles ont des prérogatives clairement définies. Au Cameroun, ce n'est pas encore le cas. Le décret de 1977 ne suffit pas à lui seul pour rendre compte de la dimension symbolique de la Chefferie traditionnelle ; mais surtout de la dynamique qu'elle peut apporter pour catalyser le processus de la décentralisation. Les expériences d'ailleurs constituent une boîte à outils pour les Pouvoirs Publics camerounais.

    Nous souscrivons à toutes ses approches ; mais dans le cadre de ce travail, nous allons davantage appréhender la réviviscence de la Chefferie traditionnelle à travers l'action des Chefs pour le développement local ; la réviviscence par le militantisme politique des Chefs traditionnels et enfin la réviviscence de la Chefferie par l'action des élites et associations.

    L'originalité de ce travail est d'abord liée au fait que son auteur est l'un des pionniers de ce type de travail à Nkol-Metet ; ensuite, parce qu'il nous permet de dégager la spécificité à Nkol-Metet des dynamismes ambiants tels que le militantisme politique des Chefs traditionnels, l'action des Chefs pour la promotion du développement local ; l'impact de l'action des élites et associations sur la Chefferie traditionnelle largement développé par bon nombre de travaux d'auteurs mais reflétant la spécificité des terroirs étudiés par eux.

    Paragraphe 2 : Problématique et hypothèses

    A- Problématique

    La libéralisation politique survenue dans de nombreux Etats africains dans la décennie 1990, à l'égard de la Chefferie traditionnelle les a inscrit dans une nouvelle dynamique ; mieux, dans le sillage de leur reviviscence. Le problème général de la recherche, est d'appréhender les logiques qui ont conduit à mettre sur pied les mécanismes ayant permis d'amorcer le chantier de la réviviscence à Nkol-Metet. Toutefois, il s'agit d'analyser comment se manifeste la reviviscence des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet. De façon générale, en Afrique comme au Cameroun, la libéralisation politique a catalysé la reviviscence de la Chefferie traditionnelle de diverses manières. On note la reviviscence de la Chefferie traditionnelle par le militantisme politique des Chefs traditionnels (cf Mouiche, 2005 ; Bat, 2009 ; Perrot ; Fauvelle, 2003). On note la reviviscence de la Chefferie traditionnelle par l'action des Chefs traditionnels à promouvoir le développement local (cf Ngnepi 2007 ; Mouiche 2005 b). La reviviscence de la Chefferie traditionnelle sous l'effet de la libéralisation politique se traduit également par leur implication dans le processus de la décentralisation, et surtout leur reconnaissance dans la hiérarchie des normes (voir Olivier de Sardan 1998 ; Jacquemot 2007 ; Mambi 2010). Enfin, la reviviscence de la Chefferie traditionnelle pendant cette ère de la décentralisation est marquée par l'activisme des élites et des associations autour de la Chefferie (Foaleng 2007 ; Barbier 1983 ; Geshiere 1996...Van Binsbergen).

    A Nkol-Metet en particulier, on peut lire l'impact de la libéralisation politique sur la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à partir de trois axes majeurs : le militantisme ostentatoire des Chefs traditionnels; le développement socio économique ; l'activisme des élites, mieux, de la « périphérie active » de la Chefferie traditionnelle (voir Barbier 1983 ; Foaleng 2007).

    De façon concrète, le militantisme politique des Chefs traditionnels à Nkol-Metet a hissé Sa Majesté Oyono Owono Joseph comme premier Maire de la commune de Nkol-Metet sous la bannière du RDPC20(*) (Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais), à l'issue des élections municipales de 1996. De même, le militantisme politique, toujours sous la bannière du RDPC a conduit à l'élection de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé comme Député du Nyong et so'o de 2002 -2007. S'agissant du développement local à Nkol-Metet, il résulte de l'action combinée des Chefs traditionnels, de certaines élites et de certaines associations pour revivifier la Chefferie traditionnelle. On peut ainsi citer l'impact des associations telles que L'ACTRAN, L'ASFRADO (Association des Frères et Amis pour le Développement d'Oveng) à Oveng, Renaissance de Bikoko, à Bikoko... Mais également de l'action des élites telles que le Colonel Amougou Nguélé, 21(*)à Obout, ou de Ndi Mboh François à Ngoantet II, pour le développement de leur Chefferie. La reviviscence de la Chefferie traditionnelle se manifeste également par leur enrôlement dans les Conseils Municipaux à Nkol-Metet et surtout de leur rôle consultatif en matière de jugulations des fléaux tels que l'inceste, la sorcellerie et surtout leur rôle essentiel pour la sensibilisation des populations autour des questions ayant trait à la décentralisation.

    Au demeurant, plusieurs questions méritent d'être posées. La principale question est la suivante : peut-on véritablement rattacher l'activisme socio politique et socio économique des Chefs traditionnels à la libéralisation politique ? En d'autres termes, qu'elle est le véritable leitmotiv du déploiement généralisé des Chefs traditionnels de Nkol-Metet autour des Chefferies traditionnelles à cette ère de la libéralisation politique ?

    A cette question centrale, nous pouvons adjoindre les questions de recherches suivantes : quelles sont les rentes escomptées de la collaboration des Chefs traditionnels avec les élites et les associations pour la Chefferie traditionnelle ? S'agit-il des actions purement philanthropiques ou des actions de façade ? En d'autres termes, qu'est-ce-qui se trame derrière l'action synergique élites- associations ? Quels sont les enjeux de la collaboration mairie et Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet ? Ne serait-il pas un moyen pour les Chefs traditionnels de devenir des acteurs pléniers du processus de la décentralisation à Nkol-Metet ? Comment appréhender l'investissement des Chefferies de groupement par la caste politicienne, mieux, par les big-men22(*) à Nkol-Metet ? Quelles sont les déterminants de leur leadership ?

    B- Hypothèses

    L'hypothèse dans une recherche est une explication provisoire de la nature des relations entre deux ou plusieurs phénomènes. Elle doit être confirmée ou infirmée par les faits. C'est alors que Grawitz résume l'hypothèse comme suit : « une proposition de réponse à une question posée » (Grawitz, 2001 :398)

    Selon Quivy et Capenhoudt : « il est rare(...) que l'on s'en tienne à une seule hypothèse. C'est le plus souvent un corps d'hypothèses que l'on construit » (Quivy et Capenhoudt in Atangana, 2010 :9). Cela nous conduit à dégager une hypothèse principale et des hypothèses connexes.

    L'hypothèse centrale de cette étude est la suivante : Le dynamisme sociopolitique et socio économique observé autour de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet est, loin s'en faut, une conséquence de la libéralisation politique ; mieux, elle est venue amplifier et officialiser les ambitions socioéconomiques et sociopolitiques des Chefs traditionnels et des forces politiques pour la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet.

    La première hypothèse connexe est que l'activisme sociopolitique et socioéconomique des Chefs traditionnels et les autres forces politiques (élites, associations apolitiques et politiques) peut être analysée de manière ambivalente. D'abord, elle traduirait leur action dans l'optique d'un leadership institutionnalisée et/ou dans l'optique de `'sauver la face''23(*). Ensuite, il se tramerait derrière tout cet activisme des ambitions politico administratives des protagonistes de la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, qui viseraient des postes de Sénateur, Député et de Maire...

    Enfin, la deuxième hypothèse, quant à elle est que l'investissement des Chefferies de groupements par les professionnels de la politique, répond au besoin de l'amélioration du système héréditaire de désignation des Chefs traditionnels, par un système capacitaire de désignation de Chefs confortant de ce fait, le caractère administratif des Chefferies de groupement à Nkol-Metet, qui sont des Chefferies nouvellement créées.

    C-Présentation du champ d'analyse

    L'Arrondissement de Nkol-Metet est situé dans la Région du Centre au Cameroun à 90 kilomètres de la capitale politique; Yaoundé entre le 3°26 latitude Nord et 11°46 longitude Est. L'Arrondissement de Nkol-Metet dépend administrativement du département du Nyong et So'o dont le Chef lieu est Mbalmayo. Le climat est de type équatorial, avec deux saisons pluvieuses et une saison sèche. Néanmoins, il faut noter que les changements climatiques ont considérablement troublé la typologie de ce climat.

    D'un point de vue démographique, Arrêté n°13/A/MINAT/DCT du19 janvier 1982, déterminant les Chefferies traditionnelles de deuxième degré dans le département du Nyong et So'o, estime la population de Nkol-Metet à 16 060 habitants. En 2010, on estime sa population à 30 000 habitants24(*).

    D'un point de vue ethnographique, les populations de Nkol-Metet sont des Bene25(*). Cependant, il convient de rappeler ici que les principales familles Bene sont issues des unions matrimoniales de Nne bodo avec, Amombo Kunu et de Ndzié Manga qui donneront sept (7) grands lignages Bene : les Mvog Belinga, les Oteloa ou Mvog Owono Tsogo, les Mvog Mbartsogo, les Mvog Manze, les Mvog Ndi et les Mvog Manga (Laburthe-Tolra, 1981 :145). Ces différents lignages ont subi le processus de la segmentation qui est consubstantiellement liée à l'organisation politico sociale des sociétés lignagères segmentaires. En effet, la segmentation se résume par le fait que chaque segment lignager est le point de départ d'un nouveau Mvog (Laburthe-Tolra, 1981 : 205 ; Marie Gruenais et Jean Schmitz, 1995 :7). Dans le cas d'espèce, les Bene de Nkol-Metet dérivent de la postérité de Mbartsogo26(*) qui a donné naissance à douze (12) lignages dont huit sont présents à Nkol-Metet. Quoique les Mvog Mbartsogo soient dominants, il existe aussi à Nkol-Metet des minorités ethniques Bene et non Bene qui sont présentes et assimilées aux grands ensembles de la postérité de Mbartsogo. Nous faisons référence ici aux : Eben, Elende, Kombé, Mvog Ndi, Yembäe, Yenakoun. Le tableau ci-dessous fait référence aux principaux lignages issus de la postérité de Mbartsogo à Nkol-Metet :

    Tableau1 : Lignages issus de la postérité de Mbartsogoà Nkol-Metet

    Fils de Mbartsogo

    Nom du lignage

    Localisation à Nkol-Metet

    Amougou Ba'ana

    Mvog Amougou 

    Efoulan, Obout, Ebomsi I, Ebomsi II, Metet-Centre, Oveng, Ayéné, Bizock, Mengueme Bané, Soa si, Yop...

    Mbarga Ba'ana

    Mvog Mbarga

    Nkolya 1, 2,3

    Evundu Ba'ana

    Mvog Evundu

    Ekekam

    Essissima Nkoa

    Mvog Essissima 

    Nkol-Ekabili ;Mefindi

    Zambo Melunu

    Mvog Zambo 

    Awäe, Ngoantet I et II, Nsessougou.

    Evini Melunu

    Mvog Evini

    Olamdoé , Kondessong

    Mba'a

    Mvog Mba'a 

    Nkomvana- Bizock

    Zang

    Mvog Zang

    Ekekam

     Source : Laburthe-Tolra (1981), Les seigneurs de la forêt.

    Adaptation : Amougou Mveng

    D'un point de vue administratif et politique, l'Arrondissement de Nkol-Metet, épouse les contours géographique de la Commune de la dite localité. Ex District de Nkol-Metet, cet Arrondissement est né en faveur des Décrets N°2008/376 du 12/11/2008 portant organisation administrative de la République du Cameroun, qui en son article Ier alinéa 2, passe de quatre à trois circonscriptions administratives : Les Régions, les Départements, et les Arrondissements. Et du Décret n°2010/198 du 16/06/2010 qui érige les Districts en Arrondissements. L'Arrondissement de Nkol-Metet compte trente-quatre(34) Chefferies dont deux (2) Chefferies de Groupement et trente- deux (32) Chefferies de 3e degré.

    D'un point de vue de l'activité politico administrative, les Bene et notamment ceux de Nkol-Metet ont souvent eu à occuper de très hautes fonctions politico -administratives au Cameroun. On peut citer ici, l' Honorable Amougou Nguélé Paul de regretté mémoire qui a été député de l'ALCAM ( Assemblée Législative du Cameroun),et Secrétaire d'Etat plusieurs fois dans les Gouvernements du Président Ahidjo ; Mbarga Nguélé Martin actuel Délégué Général à la Sûreté Nationale ; des Directeurs Généraux Etoundi Oyono Emmanuel , Madame Mbarga Bernadette ; des anciennes personnalités municipales et parlementaires , Mbala Zangana Benjamin et Nguélé Mbala Constantin, anciens Maires de Mbalmayo , les Honorables Mbala Amougou Jean Aimé , Maze Jean Alfred27(*) de regrettée mémoire et Ondoua Menyié Paul Aimé ; des officiers de l'armée camerounaise tels que : le Colonel Amougou Nguélé Emmanuel actuel Chef d'Etat Major particulier du Président Biya, du Colonel Nguélé Amougou Philémon ancien intendant de l'armée camerounaise au Ministère de la défense...

    S'agissant des partis politiques, on retrouve à Nkol-Metet, le RDPC28(*) (Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais) ; le SDF (Social Democratic Front) ; l'UNDP (Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès) ; et l'UPC (Union Nationale des Populations du Cameroun). Néanmoins, le RDPC est le parti dominant à Nkol-Metet. Dans cette circonscription administrative, le RDPC est le seul parti qui mène une vie politique au-delà des échéances électorales. C'est cet état des choses qui a toujours justifié l'hégémonie de cette formation politique, tant aux élections présidentielles qu'aux élections législatives et municipales. Ainsi dit, Nkol-Metet se présente comme une zone d'influence du parti politique dominant au Cameroun dans la mesure où les autres partis participent à la folklorisassion29(*) du jeu politique. Le tableau ci- dessous corrobore avec notre argumentaire.

    Tableau 2 : candidats ayant obtenu au moins 0,01% des suffrages aux élections présidentielles du 09 octobre 201130(*).

    Candidats

    Pourcentage obtenu

    Biya Paul(RDPC)

    95,46%

    Ni John Fruh Ndi (SDF)

    0,66%

    Dang Ester (BRIC)

    0,19%

    Garga Haman (ADD)

    0,04%

    Momo Jean (PADDEC)

    0,02%

    Muna Bernard (AFP)

    -

    Tabi Owona (AMEC)

    -

    Ekane Anicet (MANIDEM)

    0,01%

    Ndam Njoya (UDC)

    -

    Walla Kahbang (CPP)

    -

    Source : ELECAM/ Rapport général sur le déroulement de l'élection présidentielle du 09 octobre 2011.

    Sur le plan social et Sanitaire, l'Hôpital -EPC de Metet, vu sa position à cheval entre les Départements du Nyong et So'o et du Dja et Lobo, a fortement desservi les populations de ces localités et même de l'ensemble du pays en matière de santé publique. L'Arrondissement de Nkol-Metet compte sept établissements d'Enseignements Secondaires ; une trentaine d'Ecoles Primaires et trois Ecoles Maternelles31(*).

    Sur le plan sécuritaire, l'Arrondissement de Nkol-Metet compte une brigade de Gendarmerie.

    Suivant les consignes de Quivy et Campenhoudt, qui disent  qu'il faut encore circonscrire le champ des analyses empiriques dans l'espace social et dans le temps. (Quivy et Campenhoudt cité par Atangana 2010 :19). D'où l'impératif d'indiquer notre cadre temporel d'étude entre l'année 1996 et 2011. Pendant cette période, la Chefferie traditionnelle à Nkol- Metet a été au centre de plusieurs dynamismes d'ordre institutionnel et non institutionnel. En 1996, les premières élections municipales organisées consacrent l'élection d'un Chef traditionnel  Oyono Owono Joseph; en 1998, l'ACTRAN voit le jour sous l'impulsion de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé Chef du village Nkol- Ekabili à l'Est de Nkol-Metet. En 2008, la mutation des Districts au profit des Arrondissements par le Décret N°2008/376 du 12/ 11/2008 coïncide avec l'effectivité des Chefferies de groupement ; bref, beaucoup d'événements ont marqué la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet pendant cette trame chronologique que nous essayerons de dérouler, autant que faire se peut tout le long de ce travail.

    Les considérations méthodologiques méritent aussi d'être présentées dans ce travail.

    Section II : Construction de la démarche

    Toute méthode, affirme Albarello (1998), doit être fonction de la recherche, du type de résultats escomptés, et de l'analyse que l'on souhaite.

    Il s'agit donc pour nous, d'expliquer comment nous avons procédé pour cerner notre sujet d'étude, les techniques dont nous avons eu recours, ainsi que les approches disciplinaires. En d'autres termes, il s'agira d'envisager cette partie en deux mouvements. Le premier, sera consacré aux techniques de collectes de données. Le second, par contre, insistera sur les méthodes mobilisées pour l'analyse des faits, des informations et des données d'une part, et d'autre part, pour la conduite générale de la recherche.

    Paragraphe 1 : Techniques de collectes des données

    Les techniques sont des moyens d'aborder les problèmes, lorsque ceux-ci sont précisés (Grawitz, 2001 :353). Dans le cadre de ce travail, nous avons exploité les sources documentaires, l'enquête sur le terrain par l'entretien semi-directif et l'observation participante.

    A- Les sources documentaires

    Pour ce qui est des sources documentaires, nous avons utilisé les ouvrages généraux, spécialisés, les articles et les archives publiques et privées.

    Cette technique est particulière, parce que le chercheur n'exerce aucun contrôle sur la façon dont les documents ont été établis, celui-ci, doit alors sélectionner ce qui l'intéresse, interpréter ou comparer des matériaux pour les rendre utilisables (Grawitz, 2001 :573). Les ouvrages généraux nous ont permis d'avoir la matière théorique pour une meilleure saisine de notre sujet, notamment par l'emploi de nombreux concepts que nous avons mobilisés tout au long de notre travail. Les ouvrages spécialisés par contre, nous ont permis tant sur le pouvoir traditionnel que sur la société traditionnelle Béti, d'avoir des connaissances pratiques, d'une part, sur le monde de la Chefferie traditionnelle à travers des expériences observées dans les communautés étudiées, et d'autre part, appréhender le monde culturel Béti ; ce qui nous a permis de dégager quelques nuances existant au sein des pahouins.

    Les documents officiels et privés ont été également mobilisés. Il était donc logique de consulter la Loi Fondamentale du 18/01/1996 ; les textes et lois organisant l'Administration Territoriale au Cameroun ; les rapports généraux sur les élections présidentielles de 2004 et 2011 commis respectivement par l'Observatoire National des Elections (ONEL) et Elections Cameroun (ELECAM) ; les textes organisant la Chefferie traditionnelle au Cameroun. Tous Ces documents, nous ont permis d'évaluer la dynamique évolutive institutionnelle au Cameroun et de saisir l'impact de celle -ci, sur la Chefferie traditionnelle. Les documents privés, comme ceux d'Ekoan Mvog Amougou et de l'ACTRAN, nous ont permis de voir l'action des Elites et Chefs traditionnels dans la reconstruction de l'identité culturelle BENE. La diligence de certaines Majestés comme Mbala Zangana Benjamin Chef de groupement BENE Nord Est, Ondoua Menyié Paul Aimé Chef de groupement BENE Sud Est et Sa Majesté Oyono Owono Joseph Chef de 3e degré d'Awäe, qui nous ont donné libre accès à leur documentation, ce qui nous a allégé la tâche dans cette entreprise de collecte des données.

    L'analyse documentaire nous a beaucoup édifié sur notre objet d'étude, dans la mesure où elle nous a fourni les informations difficiles à recueillir sur le terrain. Mais elle reste particulièrement insuffisante en anthropologie politique, qui demande que le chercheur soit immergé dans la société qu'il étudie. D'où l'importance de l'enquête de terrain et de l'observation participante.

    B- Les techniques vivantes

    L'enquête est une procédure dont le but est de collecter des données sur le terrain (Alpe, 2005 : 80). Dans ce travail, nous avons opté pour l'enquête par entretien, semi-directif, où l'enquêteur oriente par des relances le discours du sujet, pour qu'il aborde un certain nombre de points définis à l'avance dans le protocole de recherche (Alpe, 2005 : 81). Notre travail porte sur toutes les Chefferies de l'Arrondissement de Nkol-Metet, mais nous avons principalement effectué nos enquêtes dans les Chefferies suivantes : la Chefferie de groupement BENE-Nord-Est sis à Metet-Centre  dit Mbama Metet; la Chefferie de groupement BENE -Sud -Est sis à Nkol-Ekabili ; les Chefferies de 3e degré de Metet-Centre ; d'Awäe ; d' Obout; de Ngoantet II, Nkolya III ; Efoulan ; Oveng ; Yembäe ; Nkol-Ekabili ; Soa si...Ces Chefferies ici sont mises en exergue, parce que nous y avons séjourné à plusieurs reprises et intensifié dans celles-ci, notre recherche. Dans ces Chefferies, nous avons interrogé les Chefs traditionnels, leurs représentants notables des lieux, certaines élites et responsables des associations, afin de mieux cerner les contours de leurs interactions dans celles-ci. Nous avons également interrogé les Autorités Administratives telles que le Sous -Préfet de Nkol-Metet, Madame Lombo Sylvie Chantal et le Commandant de Brigade de la Gendarmerie de Nkol-Metet, Adjudant Chef, Agodi Patrice. Pour avoir une lecture du `'bas'', nous avons interrogé les personnes selon le genre et l'ethnie. Dans ce registre, les motocyclistes ont constitué la principale source d'informations. Ces enquêtes nous ont permis de constater que les Chefs traditionnels de Nkol-Metet sont les principaux initiateurs des projets Communautaires à Nkol-Metet. S'agissant de l'action des Elites et de certaines associations, celle-ci n'est pas encore totalement satisfaisante au regard du caractère embryonnaire de leurs actions qui augurent néanmoins les lendemains meilleurs.  En tant qu'originaire de cette localité, nous avons été informé par l'observation participante, qui est étroitement liée à notre quasi permanente présence à Nkol-Metet. Ce travail, s'est aussi concrétisé grâce aux méthodes d'analyses qu'il convient maintenant de présenter.

    Paragraphe 2 : Méthodes d'analyses

    La méthode est constituée de l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités qu'elle poursuit, les démontre et les vérifie (Grawitz, 2001 :351). Pour parvenir aux réalités que nous poursuivons, nous avons essentiellement mobilisé l'interactionnisme à travers une double posture : une posture symbolique et une posture pragmatico-stratégique.

    L'interactionnisme, est une méthode qui a été introduite par les sociologues de l'Ecole de Chicago, et en particulier par Robert Ezra Park et Ernest Burgness. Ces sociologues se sont inspirés du sens que donnent à ce terme les physiciens. Cette méthode se donne pour objectif de mettre en avant les `'rôles'', les `'relations'', les `'choix'', les aspirations des acteurs (Badie / Birbaum/ Braud, 2001 : 142- 143). Trois interactionnistes ont su porter le flambeau de cette méthode. D'abord, Talcott Parsons mobilisera cette méthode dans le sillage de l'interaction sociale comme le processus social général, qui constitue le fondement de la cohésion sociale. Ensuite Howard Becker qui s'inscrit dans la même optique que Talcott. Pour lui, les individus peuvent s'engager dans les interactions intenses sans jamais se rencontrer physiquement. De plus, les interactions se produisent aussi entre groupes et organisations. (Alpe et al, 2005 :134). Enfin, Erving Goffman, quant à lui, viendra systématiser l'interactionnisme symbolique élaboré par Georges Mead, Herbert Blumer (Abderrahim, 2000 ; Grawitz, 2001 :137).

    Selon Goffman, par interaction, on entend à peu près l'influence réciproque que les partenaires exercent sur leurs actions respectives lorsqu'ils sont en présence physique immédiate les uns et les autres. (Alpe et al, 2005 :134). A la différence de Talcott Parsons et Howard Becker, Erving Goffman met au centre de son interactionnisme la `'relation sociale'' il affirme à cet effet : «  Le monde en vérité est une cérémonie ».En d'autres termes, les acteurs y exposent leur personnage, qu'ils veulent crédible en utilisant les ficelles de la dramatisation, mystification, idéalisation, les représentations frauduleuses. Autant de techniques pour ne pas perdre la face. Ainsi dit, il se dégage de l'interactionnisme une posture symbolique. L'interactionnisme politique sera également mobilisé dans ce travail.

    En effet, l'interaction politique en tant que grille d'analyse permet de comprendre et de vérifier quel type de relation relie diverses unités sociales et structure les rapports que les unités entretiennent  (Jacques Lagroye  cité par Nuembissi Kom, 2007 :24). C'est ainsi que les métaphores du « jeu » et de « marché » permettent de rendre compte des rapports de pouvoir et les relations entre agents dans une perspective relationnelle et dans des systèmes d'interaction. Cette démarche cherche à expliquer pourquoi telle unité sociale participe à l'interaction, ses intérêts à « entrer dans le jeu », les comportements qu'elles parviennent à imposer et les ressources dont elles disposentdans la compétition. La perspective interactionniste combine ainsi analyse des contraintes et stratégies des acteurs, pesanteurs structurelles, et dynamiques individuelles ou collectives (Olivier de Sardan, 1995 : 40).

    Cette méthode nous permettra ainsi d'analyser l'ensemble des interactions entre les Chefs traditionnels, les élites et d'autres forces politiques sur la sphère cheffale Bene de Nkol-Metet et autour du pouvoir local qui constitue ici l'enjeu principal. Elle permettra par ailleurs de prendre en compte les rapports de force et les phénomènes d'inégalités, l'accent étant mis ici comme le relève Olivier de Sardan (1995 : 40) « sur les ressources des acteurs sociaux « d'en bas » et leur marge de manoeuvre ». Elle nous permettra également de déterminer et de comprendre les relations de coopération, de domination, de concurrence et d'antagonisme des intérêts qui s'établissent entre les acteurs sociaux dans l'arène politique de Nkol-Metet.

    Bailey Frédérick (1971), inscrit également ces travaux dans le sillage de l'interactionnisme politique, mieux de l'interactionnisme pragmatico-stratégique qu'il a élaboré dans son ouvrage intitulé, « les règles du jeu politique ». En effet, pour Bailey, l'interactionnisme est mobilisé pour examiner les situations de conflit au sein des arènes de développement en situant l'observation à l'interface entre société locale et les actions de développement. Ainsi dit, il devient possible d'identifier les élites émergentes, mieux, de déterminer le leadership politique qu'il configure dans la notion `'d'équipe politique'' (voir aussi Frédérick Sawicki, 2003 :71-88). En d'autres termes, l'interactionnisme dans la posture de Bailey nous permettra d'étayer l'affrontement des groupes stratégiques pour le contrôle des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet. A travers la notion de code normatif, nous verrons comment les acteurs sociaux se servent des normes pour se positionner dans l'arène de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet. Enfin, la mobilisation de la notion du code opérationnel, nous permettra davantage d'élucider les ressorts pragmatiques et stratégiques des forces politiques de Nkol-Metet pour la reviviscence des Chefferies traditionnelles.

    Nous souscrivons dans ce travail à ces deux approches qui nous permettront de dégager l'influence réciproque que les différents protagonistes de la réviviscence (Chefs traditionnels, élites et responsables d'associations) de la Chefferie à Nkol-Metet exercent sur leurs actions respectives.C'est ainsi, que nous serons amenés à mettre en exergue les rapports entre les Chefs de groupements et les Chefs de 3e degré ; entre Chefs Traditionnels et les Elites /Associations politiques et non apolitiques. Bref, l'interactionnisme nous permettra de mieux évaluer les coûts et bénéfices que tirent les acteurs de la reviviscence et les populations de Nkol-Metet de ces différentes interactions.

    Paragraphe 3 : Les articulations de l'étude

    Ce travail est bâti autour de deux parties. La première partie, intitulée :Les ressorts normatifs et affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique. Cette partie nous permettra d'évaluer l'ordonnancement juridique de la Chefferie traditionnelle au Cameroun, mieux, il nous permettra d'analyser le niveau d'institutionnalisation des Chefferies traditionnelles au Cameroun. Toutefois, il sera opportun d'expliciter le répertoire coutumier comme étant un substrat très déterminant pour une meilleure saisine de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet. C'est ainsi que pour mieux décrypter cet état de choses, nous avons subdivisé cette partie en deux chapitres. Le premier chapitre intitulé : Les ressorts normatifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique; le deuxième chapitre est intitulé : Les ressorts affectifs de laChefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique. La deuxième partie intitulée : Les ressorts pragmatiquesde laChefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, a pour objectif d'analyser l'activisme sociopolitique et socioéconomique des Chefs traditionnels, des élites, des forces politiques autour des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet comme des gages leur permettant soit de s'assurer un rayonnement politique ; soit alors de conforter leurs assisses politiques. Pour ce faire, deux chapitres meublent cette partie. Le premier chapitre de cette deuxième partie est intitulé : Les ressorts stratégiques delaChefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique; enfin, le deuxième chapitre de cette partie est intitulé :Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique.

    Première partie :Les ressorts normatifs et affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique

    La Chefferie traditionnelle au regard du Décret du 15 juillet 1977 portant organisation de la Chefferie traditionnelle au Cameroun, qui l'encadre juridiquement au Cameroun, est considérée comme un élément de l'organisation administrative et territoriale et comme Nach Mback le souligne : 

    «  laChefferie traditionnelle est d'abord une collectivité humaine établie sur une position du territoire de l'Etat. Elle est ensuite le cadre d'exercice de ses compétences par une autorité généralement dénommée Chef traditionnel » (Nach Mback, 2000 : 77).

    Ainsi dit, la Chefferie traditionnelle au Cameroun est à la croisée des chemins entre l'ordre institutionnel étatique et l'ordre institutionnel coutumier. En d'autres termes, la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet comme ses consoeurs d'autres sphères, trouve ses fondements dans un double répertoire. D'une part, nous avons un répertoire normatif à travers des textes législatifs, mieux, de la règle de droit et les lois coutumières ; d'autre part, d'un répertoire affectif qui lui-même est lié à l'historicité et à la cosmogonie des Bene de Nkol-Metet.

    Au demeurant, pour mieux lire les trajectoires normatives et affectives de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, deux chapitres meubleront cette partie. Le premier chapitre qui est intitulé,Les ressorts normatifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique nous permettra de faire une évaluation des textes législatifs régissant la Chefferie traditionnelle au Cameroun, et surtout étayer sur leur impact à l'ère de la libéralisation politique. Ce chapitre nous permettra également d'évaluer la permanence des normes coutumières comme l'un des bras séculier régissant la Chefferie traditionnelle. Le deuxième chapitre intitulé, Les ressorts affectifs de laChefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, consiste à élucider les dynamiques ethnico politiques et politico ethniques, comme le creuset où se forge l'affection de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet et surtout à évaluer leur pesanteur à l'ère de la libéralisation politique.

    Chapitre1 : Les ressorts normatifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique

    La Chefferie traditionnelle au Cameroun est régie par le Décret N°77/245 du 15 juillet 1977 portant organisation des Chefferies traditionnelles. Ce décret pris à l'époque du monolithisme au Cameroun demeure le texte de référence de la Chefferie traditionnelle au Cameroun. Au-delà de son effort de codification de l'institution Cheffale, ce décret brille par son éclectisme dans la mesure où il tient compte de la diversité coutumière, qui est consubstantiellement liée à la diversité culturelle du Cameroun. C'est pourquoi l'article 6 dudit décret stipule :

    « Toute Chefferie Traditionnelle est placée sous l'autorité d'un Chef, assisté d'un conseil de notables, formé selon la tradition locale ». Aussi l'article 8 du même décret, dans le même ordre d'idées stipule :

    « Les Chefs Traditionnels sont, en principe, choisis au sein des familles appelées à exercer coutumièrement le commandement traditionnel ».

    Au demeurant, malgré la forte prégnance de ce décret, qui continue à porter ses effets juridiques à cette ère de la libéralisation politique au Cameroun, la Constitution du 18/01/1996 essaye relativement et implicitement de reconnaître la place de la Chefferie traditionnelle au Cameroun. En effet, en son article Ier, la Loi fondamentale camerounaise affirme reconnaître les valeurs traditionnelles conformes aux principes démocratiques, aux droits de l'Homme et à la loi. Ce faisant, parler des valeurs traditionnelles, sous entend implicitement qu'on fait référence aux Chefferies traditionnelles car celles-ci sont les gardiennes de nos traditions. C'est dans cette veine que Momo Bernard affirme :

    « La Chefferie traditionnelle représente avant tout la valeur culturelle d'un village, d'une tribu ou d'une ethnie » (Momo Bernard cité par Nach Mback 2000 :83).

    A l'ère de la libéralisation politique au Cameroun, certains décrets organisant la structure gouvernementale ont tenu compte de la place de la Chefferie traditionnelle. A titre d'exemple, les Décrets n°2004/320 du 08 décembre 2004 portant organisation du Gouvernement en son article 5(a) et n°2005/104 du 13 avril 2005 portant organisation du Ministère de l'Administration Territoriale et de la Décentralisation dans son article Ier (2a) reconnaissent au dit Ministère, les prérogatives relatives à l'organisation et au suivi de la Chefferie traditionnelle.

    L'objectif de ce chapitre est ainsi clair, dans la mesure où il nous permet d'étudier les répertoires normatifs de la Chefferie traditionnelle au Cameroun en général et de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet en particulier. Ainsi dit, l'ossature de ce chapitre est bâtie autour de deux sections. La première section étudie la prévalence des normes juridiques à l'ère de la libéralisation politique. Tandis que la deuxième section analyse la récessivité des normes coutumières de la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique.

    Section 1 : La prévalence maintenue des normes juridiques à l'ère de la libéralisation politique

    L'essentiel de la législation sur la Chefferie traditionnelle au Cameroun est l'oeuvre de l'Administration. En d'autres termes, c'est l'Etat qui détermine le champ de compétence de la Chefferie traditionnelle. C'est pourquoi Kamto 32(*)affirme : « quand l'Etat avance, la Chefferie recule, quand la politique s'installe, la Chefferie socio-historique éclate » (Kamto cité par Nach Mback 2000 : 114). Dans le même sillage Claude-Hélène Perrot, affirme : « l'Etat dispose face à la Chefferie de l'arme juridique par laquelle il peut à sa guise reconnaître ou ne pas reconnaître son existence » (Claude-Hélène Perrot cité par Mouiche, 2005a :19).

    En d'autres termes, les normes régissant la Chefferie traditionnelle au Cameroun sont prises à l'extérieur de ces institutions. C'est dans cet ordre d'idées, que Nach Mbach (2000 :93), fait de la Chefferie traditionnelle au Cameroun un « acteur juridique extraverti ». Cependant même à l'ère de la libéralisation politique la Chefferie traditionnelle reste fortement dépendante des normes prises à l'ère coloniale33(*) et réévaluées par le décret de 1977 et d'autres lois connexes à l'instar de la Loi n°79/17 du 30 Juin 1979 relative aux contestations soulevées à l'occasion de la désignation des Chefs traditionnels ; la Loi n° 80/31 du 27 novembre 1980 dessaisissant les juridictions des affaires relatives aux contestations soulevées à l'occasion de la désignation des Chefs traditionnels ; le Décret n°77/245 du 15 juillet 1977 portant organisation des Chefferies traditionnelles, modifié et complété par le Décret n°82/241 du 24 Juin 1982 ; l'Arrêté conjoint N°82/MINAT/DOT/MINFI/B fixant le taux de la prime d'efficacité à attribuer aux Chefs traditionnels ; l'Arrêté n°57/A/MINAT/MINFI du 26 février 1983 fixant le taux d'allocation fixe à attribuer aux Chefs Traditionnels de premier et deuxième degrés et la lettre ministérielle déterminant spécifiant les attributions du Collège des Notabilités Coutumières en matière de désignation des Chefs traditionnels .

    Dans le cadre de cette section, il nous apparaît judicieux avant d'examiner le niveau d'intégration de la Chefferie traditionnelle par la Constitution de 1996, qui inscrit officiellement le Cameroun dans le chantier de la démocratisation, il nous revient d'abord, d'examiner la persistance du Décret de 1977, comme le référentiel juridique par excellence organisant la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique au Cameroun.

    Paragraphe 1 : La persistance du décret de 1977 comme référentiel juridique organisant la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique

    Le Décret de 1977 est le décret qui donne un sens juridique à la Chefferie traditionnelle. Ce Décret qui compte 40 articles, est un corpus juridique qui prévoit les dispositions relatives à l'organisation de la Chefferie traditionnelle sur une base territoriale 34(*); à la désignation des Chefs ; les attributions et avantages attachés aux fonctions de Chef traditionnel ; les garanties et disciplines des Chefs traditionnels... Ce qui nous intéresse principalement dans ce décret, c'est le statut qu'il réserve à la fonction de Chef traditionnel. L'article 20 dudit décret fait du Chef traditionnel un Auxiliaire de l'Administration. C'est la raison pour laquelle, dans le cadre de ce paragraphe, nous analyserons d'abord la fonction du Chef traditionnel comme Auxiliaire de l'Administration ; ensuite nous allons dégager l'obsolescence de ce statut à l'ère de la libéralisation politique.

    A- Le Décret de 1977 et la consécration du Chef traditionnel comme Auxiliaire de l' Administration

    Le statut juridique du Chef traditionnel comme Auxiliaire de l'Administration dénature quelque peu l'institution de la Chefferie traditionnelle au Cameroun. Car ce décret établit surtout les attributions du Chef traditionnel vis-à-vis de l'Etat au détriment de la communauté dont il est le Chef. Au regard de cet état de chose, il se dégage une confusion dans le statut juridique du Chef traditionnel. Selon Nach Mback, les Chefferies traditionnelles n'appartiennent ni au registre de la déconcentration, ni à celui de la décentralisation administrative. Dans le sassement de ses idées, il fera de cette institution : « un sujet juridique non identifié ». (Nach Mback 2000 :78). Pourtant, ce décret consacre formellement les Chefs traditionnels, comme Auxiliaires de l'Administration. C'est dans ce sillage que Ngnepi (2007) renchérit l'idée que les Chefferies participent du processus de la déconcentration, dans la mesure où toutes les directives les concernant viennent du pouvoir central. Toutes choses étant égales par ailleurs, l'essentiel de la fonction du Chef au regard du Décret de 1977 notamment dans son article 20 renchérit l'idée selon laquelle la Chefferie sert principalement les ambitions de l'Etat. Cet article stipule :

    Auxiliaires de l'Administration, les Chefs Traditionnels sont notamment chargés :

    - de transmettre à la population les directives des autorités administratives, et d'en assurer l'exécution ;

    - de concourir, sous la direction des autorités administratives compétentes, au maintien de l'ordre public et au développement économique, social et culturel de leurs unités de commandement ;

    - de recouvrer les impôts et taxes de l'Etat et des autres collectivités publiques, dans les conditions fixées par la réglementation ;

    Indépendamment des tâches qui précèdent, les Chefs Traditionnels doivent accomplir toute autre mission qui peut leur être confiée par l'Autorité Administrative locale.

    Au demeurant, d'après tout ce qui précède, il est assez visible que ce décret a quasi ignoré la dimension traditionnelle de la Chefferie traditionnelle, le rôle du Chef dans sa communauté et a surtout transformé les Chefs traditionnels en collecteurs d'impôts. C'est dans cette optique que pour Towa (2006), la Chefferie traditionnelle est née en pays Béti pour faire des économies pour les puissances colonisatrices. Du reste, à l'ère de la libéralisation politique au Cameroun, le décret de 1977 mérite d'être actualisé.

    B- Obsolescence du Décret de 1977 à l'ère de la libéralisation politique

    Le Décret de 1977 a été édicté à l'ère du monolithisme ; or dans ce contexte, les logiques jacobines étaient très mobilisées et les pouvoirs publics se méfiaient de toutes forces politiques centrifuges (Ahmadou Ahidjo, 1968 : 20). C'est pourquoi ce décret a quasiment assujetti la Chefferie traditionnelle à l'Administration.

    Avec la libéralisation politique, les Chefs traditionnels ne sont plus que des simples Auxiliaires de l'Administration, ils sont désormais des partenaires de l'Etat. La décentralisation qui est née de la libéralisation politique au Cameroun oblige conjoncturellement les Chefs traditionnels à être à la fois des relais de l'Administration mais aussi, les promoteurs du développement local dans leur communauté. En d'autres termes, les Chefs traditionnels au Cameroun sont devenus les Auxiliaires de l'Etat au service de l'Etat et des metteurs en scène du développement de leur communauté dans les domaines économiques ; éducatif ; sanitaire et culturel. Mouiche affirme dans ce sillage : « les Chefs sont les acteurs du développement local ; certes, ils font partie de la société politique en tant que suppôt du pouvoir, en leur qualité d'auxiliaires de l'administration, mais en même temps, on les retrouve dans la sphère civile ». (Mouiche 2005b :1). Djateng (2007) corrobore cette idée en affirmant : «  les Chefferies traditionnelles peuvent féconder le développement local en ce sens qu'elles recèlent en leur sein des structures de concertations  de pouvoirs ; des lieux d'analyse et de création de modèles alternatifs de développement ».

    A Nkol-Metet, cela est déjà visible, les Chefs traditionnels sont au centre des dynamiques locales35(*) et sont de plus en plus associés à proposer leur vision sur le plan du développement communautaire de ce terroir.

    Au regard des fonctions que leur impose la nouvelle conjoncture politique, dans laquelle les Chefs traditionnels se trouvent, le Décret de 1977 ne permet pas suffisamment de rendre compte de la fonction actuelle de la Chefferie traditionnelle au Cameroun.

    Paragraphe 2 : La Constitution de 1996 et la faible institutionnalisation de la Chefferie Traditionnelle

    La Constitution du 18 janvier 1996 inscrit le Cameroun dans le processus de la décentralisation qui est une preuve palpable de la démocratisation dans ce pays. En son article Ier il est stipulé : «  La République du Cameroun est un Etat unitaire décentralisé ». la décentralisation vise à donner une plus value aux collectivités locales, mieux , elle offre aux populations des opportunités de prendre directement part aux processus de prise de décisions locales dans les domaines économiques, politiques, culturels, éducatifs et sanitaires... Pour ce faire, deux instances la garantissent à savoir : les Régions et les Communes (Cf. article 55 alinéa 1 et 2).  En scrutant de près les Chefferies Traditionnelles au Cameroun, on se rend compte qu'elles s'imposent de plus en plus comme les leviers des dynamiques locales (Cf. revue de la littérature) ; la loi constitutionnelle n'a pas réussi à les intégrer officiellement comme des instances pléniers du processus de la décentralisation pourtant, celles-ci jouent grandement un rôle dans ce processus.

    Malgré la faible implication de la Chefferie traditionnelle au Cameroun par la Constitution du 18 janvier 1996, le législateur camerounais a relativement prévu une place à la Chefferie traditionnelle. D'abord en son article Ier alinéa 2, elle reconnaît et protège les valeurs traditionnelles ; or les Chefferies sont les gardiennes de nos valeurs36(*) traditionnelles. Ensuite dans son article 55 alinéa 1 laisse transparaître une brèche de création de collectivités territoriales,cet article stipule : «  les collectivités territoriales décentralisées de la République sont les Régions et les Communes. Tout autre type de collectivité territoriale décentralisée est créé par la loi ». Il revient donc aux pouvoirs publics d'exploiter vivement cette disposition conservatoire. Enfin l'article 57 apparaît comme la disposition qui implique explicitement la Chefferie dans le processus de la décentralisation en ce sens qu'il fait du Chef traditionnel, un acteur de la Région, mieux, fait du Chef Traditionnel membre de droit du Conseil régional. L'article 57 alinéa 2 le précise en ces termes :

    «  le Conseil régional37(*)est l'organe délibérant de la Région. Les conseillers régionaux dont le mandat est de cinq (5) ans sont :

    - Les délégués des départements élus au suffrage universel indirect,

    - Les représentants du commandement traditionnel élus par leurs pairs ».

    Au demeurant, il appert que les ressorts normatifs juridiques de la Chefferie traditionnelle se trouvent être le Décret de 1977 qui, de plus en plus , devient désuet et la Constitution de 18 janvier 1996 qui implique quasi implicitement la Chefferie traditionnelle ceci peut-être justifié par le fait que de nombreux analystes politistes voient en cette réforme constitutionnelle une modernisation conservatrice (voir Sindjoun, 1994 ; Owona Nguini 1998 :63). Il devient donc impérieux comme nous l'exhorte Nach Mback, de donner à la Chefferie traditionnelle son véritable sens. Il dit :

      «  la texture organique et l'armature juridiques qui régissent les Chefferies traditionnelles au Cameroun sont à décolonialiser afin de transformer ces institutions en instance de promotion des identités et des cultures, en cadres de développement aux côtés des régions juridiquement émancipées » (Nach Mback, 2000 :60).

    A côté de la règle de droit, la coutume produit des normes spécifiques à une culture donnée d'où son caractère récessif comme norme régissant la Chefferie traditionnelle. La coutume est aussi l'élément qui permet de singulariser une Chefferie d'une autre.

    Section 2 : Le caractère récessif des normes coutumières de la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique

    La coutume est un ensemble de comportements plus ou moins obligatoires, en général validés par référence aux ancêtres. Elle a pour fondement la tradition. La répétition sans exception confirme sa valorisation sociale. Son origine est le plus souvent immémoriale et sans texte. Ces caractéristiques la distinguent de la loi dont l'origine est précise, connue et dont les règles sont écrites (voir Grawitz, 2004 : 96-97). Mappa affirme dans cette veine que :

    « Ce qui est supposé distinguer le pouvoir moderne du pouvoir traditionnel est qu'en réalité, le premier a des documents, qui sont réglementés (code civil, constitution, décrets) ; par contre le Chef coutumier travaille sans constitution et sans documents écrits, il s'agit de deux pouvoirs parallèles, l'un étant dépositaire du pouvoir administratif, et l'autre, du pouvoir ancestral » (Mappa 1998 : 181).

    La récessivité de la coutume est liée par le fait qu' elle prescrit des normes spécifiques à un groupe social déterminé et de ce fait vient compléter le caractère général et impersonnel des textes législatifs. En d'autres termes, la coutume étant un usage ayant acquis une épaisseur dans le temps et l'espace lui confère un caractère obligatoire et est aussi  l'élément distinctif d'un groupe social, dans la mesure où chaque groupe social à des usages qui fondent sa particularité. Ainsi dit, quoique les textes législatifs s'imposent comme les référentiels juridiques régissant la Chefferie traditionnelle au Cameroun, les coutumes leur donnent un sens concret. A titre d'exemple, l'article 6 du décret de 1977 prévoit que le Conseil de notables soit institué selon la tradition locale.

    La présente section a pour objectif d'expliciter la place de la coutume dans l'échiquier des normes régissant la Chefferie traditionnelle. Pour ce faire, il est question pour nous dans une première perspective, d'élucider la coutume comme cadre de dévolution et d'exercice du pouvoir traditionnel, et ensuite, nous aborderons la relativisation de la norme coutumière à l'ère de la libéralisation politique.

    Paragraphe 1 : La coutume comme cadre de dévolution et d'exercice de Traditionnelle

    Pour Weber (1919 :30), le pouvoir trouve sa raison d'être dans la domination. La domination résulte du recours à la puissance pour obtenir l'exécution des décisions. Elle aboutit à une dissymétrie totale entre dominants et dominés. L'obéissance est consentie lorsque l'autorité est légitime. Cette légitimité peut être soit traditionnelle, c'est-à-dire, qu'elle repose sur les valeurs de la tradition ; soit charismatique, quant à elle repose sur les valeurs de la personne du Chef ; soit encore rationnelle, dans ce cas, elle repose sur le droit et la compétence.

    Pour le moment, nous porterons particulièrement notre attention sur la première et la deuxième forme de légitimité, qui correspondent respectivement aux fondements coutumiers du pouvoir traditionnel chez les Bene en général et les Bene de Nkol-Metet en particulier.

    Dans le cadre de ce paragraphe, nous analyserons d'abord la coutume comme cadre de dévolution du pouvoir chez les Bene ; avant d'en examiner l'exercice du pouvoir traditionnelle dans cette aire culturelle.

    A- La coutume comme cadre de dévolution du pouvoir traditionnel

    La coutume est la norme qui est en premier mobilisée pour désigner le détenteur du pouvoir traditionnel chez les Bene. En d'autres termes, la dévolution du pouvoir chez les Bene est basée sur deux instances : la Coutume comme corpus des normes non écrites et le charisme des individus.

    1- La coutume, première instance de dévolution du pouvoir chez les Bene

    Chez les Bene, les règles coutumières constituent le substrat juridique qui régit les individus dans cet espace culturel. En d'autres termes, dans cette communauté, l'autorité est d'abord celle de l'Eternel d'hier, c'est-à-dire, celle des coutumes sanctifiées par leur validité immémoriale et par l'habitude enracinée en l'homme de les respecter. De cette coutume, il appert que les aînés sont foncièrement les bénéficiaires du pouvoir traditionnel. Un adage Béti le renchérit si bien en ces termes :« ntôl mon meyian m'esia » ; en d'autres termes, cela signifie que le fils aîné est considéré comme le dauphin de son père.

    Au demeurant, il en est plus de doute que chez les Bene comme dans l'ensemble du complexe Béti, que le pouvoir soit ancré autour du droit d'aînesse38(*), le Ntol ou le Nyamoro (l'aîné) est la clé de voûte en vertu du principe de la sagesse qui, chez les Béti, dépend d'un âge suffisamment avancé. Cependant, la prééminence de l'aîné dépend de celle du lignage aîné. L'aîné, pour gouverner, a besoin de la reconnaissance de son équité, ou son efficacité par les membres de son groupe ; en d'autres termes, tous ses pouvoirs lui sont reconnus de façon consensuelle,39(*) afin qu'il puisse exercer. A contrario, ce ne serait pas possible.

    Ainsi dit, les logiques gérontocratiques sont enracinées dans les usages Bene .On fait davantage confiance aux plus anciens, qui sont de ce fait très écoutés. Mais comme Kpwang le fait remarquer, l'aîné n'a pas toujours permis l'implantation des Chefferies efficaces (voir Kpwang 2007 : 77).

    Au-delà de la force coutumière comme dévolution du pouvoir chez les Bene, la dévolution du pouvoir peut emprunter un autre canon qui est celui du charisme.

    2- Le charisme, deuxième instance de la dévolution du pouvoir chez les Bene

    Le charisme est considéré comme l'une des qualités exceptionnelles, grâce auxquelles un individu exerce une influence sur les autres individus. Selon Weber,40(*) le charisme peut ressortir de trois ordres : le premier étant personnel. Exemple : un Chef de guerre, un Chef politique ou une virtuose religieuse (prophète ou magicien). En second lieu, le charisme héréditaire, qui tient au prestige de la lignée (cas des monarchies héréditaires). Enfin le charisme de fonction41(*), qui ne découle pas des mérites personnels de l'individu mais de sa place dans une institution. Par exemple, le Chef au sein d'une Chefferie dispose d'un charisme de fonction, alors que le Chef d'un réseau épistémique dispose d'un charisme personnel. Toutes choses étant égales par ailleurs, chez les Bene ces trois types de charismes peuvent se manifester cumulativement chez un individu. Cependant dans cette aire culturelle, le charisme du Chef se résume dans sa bravoure, son éloquence, son habileté, son partage des richesses... (Voir Ongodo, 2005 : 31; Laburthe-Tolra, 1981 : 358-359). Mais pour mieux lire toutes ses valeurs, nous les avons regroupées dans deux registres, l'Ayog (courage) et l'Akab (générosité).

    2-1- L'Ayog (courage)

    Dans ce premier registre, nous analyserons les éléments qui forgent le pouvoir du Chef. Nous avons en premier lieu, le don de la parole et l'éloquence,42(*) et ensuite la condition physique, qui sont les éléments importants pour s'imposer chez les Bene /Béti.

    S'agissant de l'art oratoire, il constitue un véritable atout pour posséder son auditoire. C'est par cette qualité que chez le béti le Chef est souvent qualifié de Ndzoé ou Ndjobôt, « c'est-à-dire, celui qui parle au nom du groupe » tout entier. Son éloquence, et/ou son maniement de la langue doit faire montre de sa connaissance des proverbes béti notoirement, si possible. Et le Conseil des anciens d'appuyer péremptoirement.

    En dehors du maniement de la langue, le physique du leader était parfois un atout pour s'imposer, ou digne d'admiration.

    Autrefois, la condition physique était aussi nécessaire pour s'imposer comme Chef. Laburthe-Tolra (1981 : 359) décrit bien le rôle du physique dans la gouverne du peuple en ces termes : « la tradition Béti est nette sur les traits de caractère qui vont permettre à un individu de s'imposer comme Chef. Le premier, qui n'est pas suffisant, mais qui est commun sans être obligatoire, est sa force physique, nécessaire d'ailleurs à tout garçon pour être vrai homme ».

    Selon la cosmogonie Bene, Nnë Bodo, qui est considéré comme l'ancêtre des Bene, semblait jouir d'une condition physique impressionnante lui ayant permis de protéger les siens et surtout ayant permis aux siens de traverser le fleuve Sanaga43(*) sur le dos d'un serpent dénommé Ngamedza'a. Selon Laburthe-Tolra, Nnë Bodo était nanti d'une double supériorité. Il affirme à cet effet que : « Sa supériorité magique allait de pair avec sa supériorité physique et son courage » (Laburthe-Tolra, 1981 :106).

    Il ressort de ces deux éléments qui fondent l'Ayog (le courage) du Chef que ces derniers rentrent dans le registre du charisme personnel. Cependant, l'Akab (la générosité)  du Chef, doit aussi être lu à travers son charisme de fonction, et ce charisme de fonction mérite que l'on s'y attarde.

    2-2- L'Akab ou la générosité

    Pour mieux cerner la notion de générosité, nous allons nous référer à la richesse du Chefqui, au-delà de celle que constitue les hommes44(*), doit être aussi matérielle. En d'autres termes, le Chef doit être un homme vraiment riche, « Nkukuma », pour pouvoir redistribuer ; car sa richesse ne lui revient pas totalement ; elle est pour le groupe, c'est pourquoi le Chef, chez les Bene, est donc considéré comme un "Ntomba," c'est-à-dire, un homme distingué auquel le peuple se reconnaît, ou un "Mfan môt". C'est-à-dire, un vrai homme. C'est-à-dire, un homme capitalisant des biens et des pouvoirs matrimoniaux, des parents et dépendants, prestige et influence (voire Bayart, 1989 :281). Cela sous-entend qu'en plus du capital culturel que lui confère la maîtrise des us et coutumes, le Chef doit pouvoir avoir un fort capital économique et social45(*).

    Le pouvoir du Chef basé sur la coutume et l'hérédité revient à faire de la fonction du Chef traditionnel : " celle qui consiste à instaurer le consensus, en appesantissant les conflits, sans pourtant chercher à les élucider, pour instaurer des règles et assurer un lien social stable" (Mappa 1999 :93).

    B- L'exercice du pouvoir traditionnel chez les Bene

    Aborder la question du pouvoir dans la société traditionnelle Bene, nous inscrit, dans le sillage de l'examen du domaine politique dans cette société. Selon Lowie (1931), le domaine politique est l'ensemble des fonctions législatives, exécutives et judiciaires. Contrairement aux Etats modernes où des institutions distinctes exercent ces pouvoirs, chez les Bene, la politique et la parenté sont fortement imbriqués et cela est consubstantiellement lié au sacro principe du `' Nda bod'' ». Quinn (1980) l'affirme également en ces termes:

    «A head man's authority was limited to his own nda bodand here his control as virtually complete».

    Aussi, cette imbrication de la parenté et la politique rend l'exercice du pouvoir un pouvoir diffus, d'où l'assimilation des sociétés segmentaires à des sociétés à pouvoir diffus46(*).

    Il nous revient dans cette partie d'analyser l'exercice du pouvoir à travers : le Chef traditionnel et le conseil des notables ; le représentant du Chef et les Zomloa.

    1- Le Chef traditionnel et le Conseil des Notables

    Le Chef traditionnel et le Conseil des Notables dans les Chefferies Bene sont des institutions importées par l'Administration coloniale et répercutées par l'Etat post colonial. Autrefois était considéré Chef des grands Chefs de familles charismatiques, qui avaient une grande capacité de redistribution des richesses et de protection de leurs peuples.

    Toutes choses étant égales par ailleurs, ces deux organes exercent collégialement deux types de pouvoirs : le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.

    S'agissant du pouvoir exécutif, les lois à exécuter ont une double appartenance. Primo, elles émanent des textes législatifs camerounais, notamment du décret de 1977, qui font des Chefs traditionnels des Auxiliaires de l'Administration, et du Conseil des Notables l'organe qui l'assiste dans cette prérogative (Cf. article 6 du Décret de 1977). Secundo, les coutumes léguées par les ancêtres. Ceci étant, l'exercice du pouvoir exécutif par ses deux entités fait de ces deux acteurs des acteurs hybrides. C'est dans cette veine Elong Mbassi affirme :

    «  le citoyen africain émarge simultanément à trois registres institutionnels différents et complémentaires : le registre traditionnel, le registre administratif et le registre religieux » (Elong Mbassi cité par Nach Mback, 2000 : 79).

    A côté de leur rôle d'assistance des Chefs traditionnels, le Conseil des Notables47(*)joue un rôle prépondérant pour la désignation des Chefs traditionnels. L'article 11 du Décret de 1977 stipule à cet effet : « Les notabilités coutumières compétentes, sont obligatoirement consultées pour la désignation d'un Chef ». Aussi, ce Conseil a aussi un rôle de contrebalancer l'omnipotence des Chefs traditionnels.

    Cependant nous notons qu'à Nkol-Metet que le choix des notables48(*) n'est pas toujours rigoureusement effectué et parfois même c'est une institution virtuelle. C'est dans cet ordre d'idées qu'Amougou Fidèle49(*) l'affirmait déjà ainsi : 

    « chez nous ici à Metet-centre, le conseil des notables n'est pas véritablement institué ; car, c'est lorsqu'il y'a un litige que toute personne se trouvant à la Chefferie est fait notable. En d'autres termes, les notables ici sont des notables circonstanciels et non des dignitaires assermentés et reconnus tels ».

    Quant au pouvoir judiciaire le Chef traditionnel et son Conseil de Notables l'exercent également. C'est l'article 21 du Décret de 1977 qui institue leur compétence en matière judiciaire. Cet article dispose :

    « Les Chefs traditionnels peuvent, conformément à la coutume et lorsque les lois et règlements n'en disposent pas autrement, procéder à des conciliations ou arbitrages entre leurs Administrés ».

    Au-delà de l'aspect juridique, l'aspect anthropologique nous révèle que la viabilité de la fonction du Chef dans les sociétés traditionnelles dépend fortement du pouvoir judiciaire en ce sens que, le Chef traditionnel prenait une envergure en fonction de son habilité à concilier les parties en litiges ou à établir le consensus dans sa communauté.

    Au demeurant, la justice traditionnelle est de plus en plus délaissée par les populations. Il est allégué que celle- ci est partiale, notamment quand c'est le Chef traditionnel lui-même qui désigne ses notables ; la pauvreté ambiante de certains Chefs a pour conséquence la corruption de ces derniers, qui prennent parfois des pots de vins avant la résolution des litiges ; aussi, cette justice est essentiellement inégalitaire dans la mesure où elle protège grandement les aînés. C'est ainsi, même s'il s'avère que c'est l'aîné qui est fautif lors d'un litige, le plus jeune est toujours sommé d'une sanction50(*). C'est pourquoi, comme l'affirme Mbala Gallus51(*):

    «  en observant comment fonctionne notre système judiciaire traditionnel, s'il nous arrive un problème avec un aîné, nous allons directement nous rendre à la gendarmerie, parce que nous avons à faire à un système judiciaire traditionnel corrompu, qui fragilise par là même la Chefferie traditionnelle béti ».

    Bien que l'autorité de l'exercice de la fonction judiciaire se soit érodé, des individus recourent  encore à ces tribunaux coutumiers; c'est ainsi qu' à chaque fois qu'ils sont sollicités, le Chef et ses Notables constituent un tribunal, pour régler les litiges en fonction des normes coutumières, tout en préservant la justice des fins et davantage, privilégier les ententes tacites au détriment de celles répressives ; bien qu'il existe des prisons traditionnelles (mimbog). Celles-ci ne consistant pas forcément à un enfermement de l'individu, mais plutôt à l'ostracisme des individus malveillants, impertinents et désobligeants.

    2- Le Représentant du Chef traditionnel

    Le Représentant du Chef est une institution qui a réussi à s'imposer avec l'usure du temps. La quasi-totalité des villages de l'Arrondissement de Nkol-Metet ont un Représentant du Chef, qui est la véritable cheville ouvrière de la Chefferie, en ce sens que ce sont ces derniers qui assurent l'administration quotidienne de leur Chefferie. En d'autres termes, les Représentants des Chefs exercent aussi les pouvoirs exécutif et législatif. A Nkol-Metet ces derniers ont le vent en poupe, parce que la plupart des Chefs traditionnels dans ce terroir sont des fonctionnaires de l'Etat, ou des hommes d'affaires. D'où leur rôle important car ce sont eux qui rendent de plus en plus viable les Chefferies au regard de leur présence permanente au village; c'est pourquoi, ils sont aussi affectueusement appelés Nkukuma. Leur émergence résulte aussi du non respect des Chefs traditionnels de l'article 17 du décret de 1977, qui stipule : « le Chef doit nécessairement résider sur son territoire de commandement ; les fonctions de Chef sont incompatibles avec toute autre fonction publique. Toutefois, l'autorité investie du pouvoir de désignation peut autoriser le cumul de fonctions, notamment, lorsque la personne intéressée réside sur le territoire de la Chefferie concernée ».

    Pour devenir Représentant du Chef, soit on est discrétionnairement désigné par le Chef du village, sur la base d'une certaine affinité entre le Chef et ce dernier. Du point de vue strictement juridique, l'article 6 du Décret de 1977 autorise le Chef traditionnel de désigner au sein du Conseil de Notables, un notable qui le représente en cas d'absence ou d'empêchement ; ce dernier peut mettre fin à ses fonctions. Aussi, de plus en plus dans les usages à Nkol-Metet, ce sont les populations qui désignent le Notable Représentant du Chef52(*).

    Quid des Zomloa ?

    3- Les Zomloa

    Si l'ensemble des institutions citées plus haut participent pour la plupart au pouvoir exécutif et judiciaire chez les Bene, les Zomloa sont beaucoup plus une émanation du pouvoir religieux. Les Zomloa53(*) sont les véritables gardiens de la tradition ; ils ont la possibilité et la capacité d'entrer en rapport avec des puissances surnaturelles. C'est pourquoi, ils sont considérés comme des oracles et des bâtonniers ; comme le mentionne Sa Majesté Akoa Amougou vincent 54(*):

    «  le Zomloa est la bouche du village ; il est l'homme du jour et l'homme de la nuit ».

    En d'autres termes, il est le porte parole du village. Par ce rôle, il contribue à la sacralisation du pouvoir du Chef traditionnel qui prend exceptionnellement la parole lorsqu'il y a un Zomloa établi. Le Zomloa est aussi un grand prêtre de la tradition Béti, il est le relais entre les vivants et les morts ; c'est au vu de tout cela qu'il est assimilé à un oracle dont le rôle est la protection de l'intégrité du village contre toutes agressions mystiques et maléfiques. Ceci s'explique parce que le Zomloa est fondamentalement sorcier.55(*)

    Le Zomloa, au regard de ses prérogatives, a une influence très grande. Cette influence est souvent source de conflits56(*) entre les Chefs et leur Zomloa. Dans l'imagerie populaire des Bene, on assimile le Zomloa au véritable Chef traditionnel (nkukuma ya nnam) et le Chef du village au représentant de l'Etat (nkukuma ya ngovina ou nkukuma mintangane). Mais il n'existe pas d'incompatibilités entre les deux fonctions. A Nkol-Metet, nous avons pu dénombrer deux Chefs du village Zomloa.

    A Nkol-Metet, on dénombre très peu de Zomloa, car les Bene ont assimilé leurs traditions à celles du christianisme au point où tout ce qui est tradition relève du paganisme (nsem). Par contre, de l'autre côté de la rive du Nyong, notamment dans l'Arrondissement de Ngomedzap, cette institution est belle et bien enracinée.

    Quoique le pouvoir soit diffus, il se dégage une véritable structuration politique dont la particularité est la collégialité et la consensualité de l'exercice du pouvoir dans cette aire culturelle. C'est dans ce canal que Mappa affirme :

    « le politique en tant que présence d'un pouvoir qui commande un groupe est universel ; mais la politique en tant que pouvoir explicitement institué par la société et posé comme objet de la délibération collective est une spécificité occidentale ». (Mappa, 1998 : 89 ; voir aussi Shapera57(*) cité par Aletum, 2001 :211 ).

    Paragraphe 2 : La relativisation de la norme coutumière à l'ère de la libéralisation politique

    La norme coutumière qui permet à la Chefferie traditionnelle de jouir de son auréole sacrée, est de plus en plus relativisée. A l'ère de la libéralisation politique, cela est plus manifeste lorsqu'il faut désigner des nouveaux Chefs traditionnels. De plus en plus, les phénomènes de Big men 58(*)se font ressentir. Au Cameroun cet état de chose se traduit par l'inflation des Ministres-Chefs ; des Directeurs généraux-Chefs. On essaye de justifier ces phénomènes en argumentant la mue du système héréditaire par un système capacitaire. Pour Thomas Paine, cela contribuerait à mieux revaloriser la Chefferie traditionnelle. Il affirme :

    « la succession héréditaire est une insulte à la postérité. Tous les hommes étant égaux, aucun d'eux n'a le droit de passer à sa famille le pouvoir de régner éternellement sur les autres ; car si lui-même peut mériter que ses contemporains l'honorent, ses descendants peuvent être tout a fait indignes de partager ses honneurs » (Thomas Paine in Heritier Mambi, 2010 :28). Pour Nach Mback cela conduirait au déclin de la Chefferie ; il déclare : «  le vrai mal dont souffre la Chefferie traditionnelle se trouve dans le dévoiement des valeurs qui fondent sa respectabilité » (Nach Mback, 2000 :113). Dans une position médiane Mappa affirme : «  le pouvoir du Chef traditionnel est héréditaire et obligatoire ; normalement l'héritier ne peut pas le refuser, on peut également le conquérir par la force ou par l'achat ; mais dans ce cas aussi, le pouvoir acheté devient héréditaire » (Mappa 2000 : 102).

    Au demeurant, pour mieux apprécier la relativisation de la norme coutumière notamment à Nkol-Metet, nous serons amenés de mettre en exergue le caractère administratif des Chefferies de ce terroir. Cela sera renchéri à travers une brève évaluation des Chefferies de Groupement nouvellement fonctionnelles ; ensuite, nous examinerons la convoitise de la direction des Chefferies traditionnelles en dehors des familles appelées à exercer coutumièrement le commandement traditionnel.

    A- Le caractère administratif des Chefferies traditionnelles

    La notion des Chefferies en milieu Bene est une importation de la colonisation. A Nkol-Metet on situe leur avènement vers les années 1900. Selon Laburthe-Tolra A partir de la période coloniale Française, on s'est contenté d'enregistrer l'homogénéité globale de la culture et opérer des regroupements sommaires en « Chefferies » administratives déterminées du point de vue qui intéressait le colonisateur au premier Chef, c'est-à-dire, la perception de l'argent des impôts. Il était plus important de repérer la sphère d'influence de chaque Chef que d'enregistrer les modalités exactes de cette influence (Laburthe-Tolra, 1981:32).

    A Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, la logique administrative n'a pas été escamotée. On a pu le constater lorsqu'il fallait fonctionnaliser les Chefferies de Groupement59(*) dans ce terroir. La conquête de celles-ci ont donné lieu à des véritables campagnes électorales. La désignation des Chefs de groupements a mobilisé l'élite de Nkol-Metet60(*), toutes obédiences confondues. Ces élites ont constitué des lobbies autour des candidats qu'ils soutenaient. En d'autres termes, les logiques des lobbies ont été les facteurs les plus proéminentes pour désigner les Chefs de Groupement.

    B- Le désir du trône hors des familles à exercer coutumièrement commandement traditionnel

    L'assertion de Jean-François Bayart (1989 :208), qui fait de la Chefferie, l'un des sites de l'assimilation des élites61(*), se confirme à Nkol-Metet. Ainsi dit, la Chefferie traditionnelle fait l'objet des convoitises en dehors des familles appelées à exercer coutumièrement le commandement traditionnel. Dans les faits, les Chefs en place sont de plus en plus menacés par des élites prétentieuses62(*). Les quelques cas de décès intervenus dans ce terroir ont permis de voir des prétendants prêts à faire un hold-up aux familles des défunts Chefs.

    Ces faits illustrent que ni les coutumes, ni même les textes législatifs ont été exempts des dynamiques de la libéralisation politique, qui ont permis insidieusement de redonner du poil à la bête aux Chefferies traditionnelles.

    Conclusion partielle

    Le présent chapitre avait pour objectif d'examiner les ressorts normatifs de la Chefferie traditionnelle Bene à l'ère de la libéralisation politique au Cameroun, force pour nous est de constater que ces ressorts tiennent sur deux bras complémentaires. Le premier bras tient sur les textes législatifs, entre autres la Constitution de 1996 et le Décret de 1977 ; le second bras tient sur la norme coutumière, qui donne un sens concret à la règle de droit.

    En définitive, dans le contexte de la libéralisation politique, ces répertoires normatifs méritent d'être réévalués, afin de donner aux Chefferies traditionnelles une place plus adéquate entre tradition et modernité.

    Chapitre 2 : Les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique

    La Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet s'est formée autour des lignages issus de la postérité de MbarTsogo ancêtre des Bene de Nkol-Metet. La parenté est donc la règle qui a présidé à la formation des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet. Cette pratique faisant référence au système parental n'est pas qu'une spécificité Bene. Elle est même très récurrente dans l'espace Béti. Balandier affirme dans cette veine :

    «   l'espace pahouin est un espace où les groupes sociaux sont établis en fonction de la parenté (Balandier, 1982 : 12).

    A Nkol-Metet la Chefferie traditionnelle est née de deux formes de sociabilités, qui découlent des unions matrimoniales polygamiques de Mbartsogo ; il s'agit de la communalisation, qui caractérise les relations sociales de réciprocité, entre des individus participant à l'activité sociale, sur la base d'un sentiment subjectif d'appartenance à une même communauté. Ce sentiment se fonde sur une dimension affective ou traditionnelle (Alpe 2005 :34)  et la sociation, qui caractérise les relations sociales de réciprocité entre les individus participant à l'activité sociale, sur la base de la poursuite des intérêts communs ou convergents (Max Weber cité par Alpe, 2005 :240 ). Toutes choses étant égales par ailleurs, ces deux dimensions de la sociabilité sont des dynamiques de l'action collective et selon Braud :

    « C'est la mobilisation des groupes d'individus tournée en apparence vers des objectifs communs, mais le plus souvent inspirée par des logiques diversifiées auxquelles un mécanisme intégrateur donne une efficacité globale » (Braud, 2008: 778).

    L'objectif de ce chapitre consiste à élucider les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene, et surtout à évaluer leur pesanteur à l'ère de la libéralisation politique. Ceci étant, la trame argumentaire de ce chapitre repose sur deux sections. La première section va étayer l'émergence de la Chefferie de Nkol-Metet entre communalisation et sociation comme le creuset où se forge la légitimité traditionnelle. La deuxième section, quant à elle, nous permettra de voir qu'à l'ère de la libéralisation politique ces dynamismes persistent, mais ont plutôt contribué à fragiliser la grâce des Chefs.

    Section 1 : Les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet entrecommunalisation et sociation

    La Chefferie traditionnelle en pays Bene, nous le dirions jamais assez, est une importation de l'Administration coloniale relayée plus tard par les nouveaux pouvoirs publics indépendants. Selon Laburthe-Tolra, la formation des Chefferies en pays Bene s'est faite sans une véritable rigueur ; car l'Administration coloniale s'est contentée d'enregistrer l'homogénéité globale de la culture, et a opéré les regroupements sommaires en Chefferies administratives (Laburthe-Tolra, 1980 :32). Bien que la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet soit née de la sorte, il n'en va pas de même, de relever que la communalisation et la sociation ont été instinctivement mobilisées par les Bene comme mode d'organisation de leur communauté.

    La présente section est bâtie autour de deux paragraphes. Le premier paragraphe explicite la formation des premières Chefferies de Nkol-Metet entre communalisation et sociation. Le deuxième paragraphe, met en lumière la configuration des Chefferies de groupement actuelles à Nkol-Metet, comme un atavisme de ces dynamiques de l'action collective.

    Paragraphe 1 : Genèse de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet entre communalisation et sociation

    La cosmogonie Bene nous informe que Mbartsogo, qui est l'ancêtre des Bene de Nkol-Metet eût huit épouses63(*), qui lui donnèrent quatorze (14) fils. (Laburthe-Tolra, 1981 :147). C'est à partir d'eux que naîtront les principaux lignages de Nkol-Metet. On notera cependant des rivalités au sein de cette progéniture. Ces rivalités constituent en quelque sorte les origines lointaines de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet. Le récit de Laburthe-Tolra est assez explicite à ce sujet. Cet ethnologue nous fait savoir que la première femme de Mbartsogo s'appelait Baana Wali, donna naissance à 4 garçons : Amugu Baana, Zang Mengunu, Mbarga Ba'ana, Evundu Ba'ana. Alors que les autres femmes ne purent engendrer qu'un ou deux garçons, si bien que lorsqu'il y avait des querelles entre enfants, Amugu et ses trois frères s'assemblaient et remportaient sur leurs frères. Mbartsogo appela son fils Essissima et lui ordonna de réunir ses autres frères pour contrecarrer l'action des fils de Baana (Laburthe-Tolra, 1981 : 148). Ainsi dit, c'est de la rivalité consanguine que se dégage l'organisation politico sociale des Bene de Nkol-Metet, qui a pris les allures de la communalisation et de la sociation.

    A- La Chefferie Traditionnelle Bene de Nkol-Metet et l'option de communalisation

    La communalisation a émergé principalement au sein du groupe ethnique Mvog Amougou. En effet, c'est le groupe ethnique majoritaire de par sa supériorité démographique et de par sa représentativité territoriale. Conscients de ses valeurs qui sont davantage enrichis par les logiques séculaires de rivalité au sein du lignage de Mbartsogo, on aboutit avant les années 50 à un regroupement des villages Mvog Amougou à un pôle du commandement traditionnel autour de Sa Majesté Samba Obono. Mais il faut aussi relever que c'est de la forte procréation de Mbala Messolo64(*), qui était fils d'Amougou Baana65(*), qui a véritablement permis d'établir à Nkol-Metet un véritable empire Mvog Amougou ; dans la mesure où les Mvog Amougou de Nkol-Metet sont essentiellement issus de sa postérité.

    Tableau 3:Configuration ethnique dans la Chefferie Mvog Amougou

    Sous groupe ethnique Mvog Amougou

    Nombres de villages

    Noms des villages

    Mvog Nguélé Nsa

    02

    EbomsiI ; Efoulan

    Mvog Zambo Nsa

    02

    Mengueme-Bane ; Metet-Centre66(*)

    Mvog Medza

    01

    Ebomsi II

    Mvog Mbida Meye et Mbala Ngambala

    01

    Obout

    Mvog Amougou Meye

    01

    Bizock

    Mvog Minfumu

    01

    Yop

    Mvog Owono Metugu

    03

    Ayéné, Oveng, So asi, Ndick

    Elende ( pas Mvog Amougou)

    01

    Elende

    Yembäe ( pas Mvog Amougou)

    02

    Yembäe- Nkol-Metet et Zalom

    Kombé( pas Mvog Amougou)

    01

    Kombé

    Mvog Ndi( pas Mvog Amougou)

     

    Minorité ethnique présente à Ayéné

    Source : enquêtes.

    En effet, Samba Obono apparaît comme le tout premier Chef traditionnel67(*)Mvog Amougou. Ce dernier était originaire du village Mvog Amougou d'Ebomsi I ; ce qui fit de ce village, le siège des institutions du commandement traditionnel Mvog Amougou. Ainsi dit, près d'une quizaine de villages Mvog Amougouet assimilés s'acquittaient de leurs frais d'impôts auprès de cette Chefferie. Cette Chefferie va connaître une conjoncture obscure entraînant des malversations financières de Sa Majesté Samba Obono, qui aurait détourné l'argent de l'impôt et serait démis conséquemment  de ses fonctions de Chef par l'Administration coloniale. Cette destitution occasionna des bouleversements notoires. D'abord, on assista à une mutation du siège de la Chefferie d'Ebomsi I au village Mvog Amougou de Metet-centre. Ensuite, le nouveau Chef, Sa Majesté Mbala Messolo Offele68(*), un militaire retraité, sera secondé dans ses tâches par son frère consanguin Owono Mbala David69(*), afin d'éviter à nouveau les exactions financières.

    Ceci étant, jusqu'à l'année de dislocation de cette grande Chefferie en micros Chefferies, au début des années 60, le siège de cette Chefferie demeura à Metet-Centre. Il appert aussi, que cette Chefferie s'est construite et consolidée autour de la grande famille Mvog Amougou, avec l'accointance des Yembäe ; des Elende ; des Kombé et les Mvog Ndi. Pourtant sa consoeur est foncièrement hétéroclite.

    B- La Chefferie Traditionnelle Bene de Nkol-Metet et l'option de sociation

    A côté de la densité ethno démographique Mvog Amougou, les autres groupes ethniques non Mvog Amougou de Nkol-Metet, s'étaient regroupés pour contrebalancer l'hégémonie Mvog Amougou. Dans le cas d'espèce, les Mvog Zambo ; les Mvog Nnomo ; les Mvog Essissima ; les Mvog Evundu ; les Mvog Evini, vont eux aussi se constituer à une unité de commandement traditionnel. Dans cette mosaïque ethnique , les Mvog Zambo constituent le groupe ethnique le plus dominant. C'est dans cette optique que le siège de cette Chefferie sera localisé à Awäe, l'un des villages Mvog Zambo de Nkol-Metet, et sera même surnommée Chefferie Mvog Zambo70(*). Cette Chefferie aura à sa tête Sa Majesté Zambo Abomo. Les missions de cette Chefferie sur le plan administratif ne diffèrent pas de la Chefferie précédente, dans la mesure où la collecte des impôts demeure sa tâche essentielle.

    Tableau 4:Configuration ethnique dans la Chefferie Mvog Zambo

    Ethnies

    Nombre de villages

    Noms des villages

    Mvog Zambo

    4

    Awäe, Ngoantet, Nkoltombo, Nsessougou

    Mvog Nnomo

    1

    Nkolya

    Mvog Evini

    1

    Olamdoé

    Mvog Essissima

    1

    Nkol-Ekabili

    Mvog Evundu

    1

    Ekekam

    Yembäe

    1

    Bikoko

    Yenakoun

    1

    Kondessong

    Sources : enquêtes

    Cependant, l'hétérogénéité ethnique de cette Chefferie a favorisé une forte décentralisation du pouvoir du Chef. Cet aspect des choses a abouti à conforter l'assise politique de certains Notables (capitat), qui étaient devenus de véritables Chefs 71(*)de leur entités démographiques, et n'attendaient accessoirement que l'intervention de leur Chef.

    Au demeurant, la grande Chefferie Mvog Zambo, qui avait les ambitions de constituer un équilibre de pouvoir pour faire face à l'hégémonie Mvog Amougou, ne survivra pas elle aussi au lendemain de l'indépendance du Cameroun ; à cause de la nature des alliances de revers des différents groupes ethniques la constituant ; d'où son atomisation en micros Chefferies.

    En scrutant les Chefferies de Groupement nouvellement fonctionnelles dans l'Arrondissement de Nkol-Metet, on se rend compte que celles-ci ont des ressorts ataviques ; mieux, leur composition est quasi calquée sur la structure des deux Chefferies décrites ci-dessus.

    Paragraphe 2 : L'avènement des Chefferies de Groupement à Nkol-Metet : des ressorts ataviques dans un contexte de la libéralisation politique

    La Chefferie de Groupement à Nkol-Metet, naît, loin s'en faut, des décombres de la Chefferie de Foé Avora Frédérick, qui, par ses accointances avec Charles Atangana Ntsama, Chef supérieur des Ewondo et des Bene, sera fait Chef Supérieur de plus de 81Chefferies dans le Département du Nyong et So'o, et plus précisément, dans les Arrondissements de Mbalmayo, Akoeman, Mengueme, Ngomedzap et Nkol-Metet72(*). A sa mort en 1961, la Chefferie de groupement restera vacante jusqu'à la promulgation de l'arrêté n°13/A/MINAT/DCT du 19 janvier 1982, portant organisation des Chefferies de 2e degré dans le Département du Nyong et So'o. Cet arrêté aura du mal à être effectif à Nkol-Metet. Lors de nos entretiens, le retard de l'effectivité de ces groupements trouve principalement ses causes dans leur mauvais découpage. C'est dans ce sillage que Sa Majesté Tsoungui Emmanuel73(*) le renchérit en disant :

    «  Normalement à Nkol- Metet, on doit avoir au moins cinq Chefferies de 2e degré. Les Mvog Amougou compte tenu de leur démographie doivent avoir au moins deux Chefferies de Groupement, les Mvog Zambo une Chefferie de Groupement, les Mvog Essissima, une Chefferie de Groupement et enfin, les Yembae, une Chefferie de groupement ».

    Une certaine opinion voit aussi comme cause du retard, les tractations malicieuses de certaines élites, qui avaient des préférences avérées pour certains candidats. En dépit de tout cela, les Chefferies de Groupement ne sont à Nkol-Metet opérationnelles que depuis 2008. Il s'agit, de la Chefferie BENE- Nord- Est et la Chefferie BENE- Sud-Est que nous allons succinctement présenter dans la suite de notre argumentation.

    A- La Chefferie de Groupement Bene -Nord- Est

    La Chefferie BENE- Nord-Est a effectivement vu le jour en 2008. Elle a à sa tête Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, fils d'Owono Mbala David, Petit-fils de Mbala Zangana et arrière petit-fils de Zambo Nsa, fils de Mbala Messolo. En un mot, la Chefferie de groupement BENE- Nord- Est est restée dans la lignée de Zambo Nsa, et son ressort territorial est quasi calqué sur la configuration territoriale de la Chefferie de Samba Obono (les Yembäe s'étant volontairement retirés des Mvog Amougou). C'est pourquoi les populations de Nkol-Metet l'ont rebaptisé la Chefferie de groupement Mvog Amougou.

    Tableau 5 : Configuration ethnique de la Chefferie Bene-Nord-Est.

    Ethnies

    Nombre de villages

    Villages

    Observations

    Mvog Amougou

    16

    Ayéné ;Bizock ; Ebomsi I ; Ebomsi II ; Endengue ;Efoulan ; Mbedoumou II ;

    Mbega ; Mengueme-Bane ;Metet-Centre ;Nkolngui ;NkolOveng;Obout;Oveng;Soasi;Yop.

    On retrouve les ethnies Yembama à Oveng ; les Eben à Bizock ; les Kombé à Soa si ; les Mvog Ndi à Ayéné et enfin les Mvog Mba'a à Ekekam.

    Elendé

    01

    Elendé

    Yembäe

    01

    Zalom

    Source : Arrêté N°13/A/MINAT/DCT du 19 janvier1982 déterminant les Chefferies                 traditionnelles dans le Département du Nyong et So'o, Province du Centre- Sud.

    Adaptation : Amougou Mveng Sylvain Charles.

    B- La Chefferie de Groupement Bene- Sud- Est

    La Chefferie BENE- Sud-Est, comme la précédente, est née des vestiges de l'ancienne Chefferie Mvog Zambo. La particularité de son avènement en 2008 est qu'elle a à sa tête un Chef qui cumule les fonctions de Chef de 3e degré avec celle de Chef de groupement : Sa Majesté, Ondoua Menyié Paul Aimé, qui est un Mvog Essissima, les assume dorénavant pleinement. Dans ce groupement, les Mvog Essissima sont l'un des groupes ethniques minoritaires et avec l'avènement de la Chefferie de Groupement, ils ont réussi à se défaire des grands ensembles ethniques que sont les Mvog Zambo et les Mvog Nnomo, pour se hisser à la tête de cette Chefferie dont son siège est à Nkol-Ekabili (chez les Mvog Essissima). Alors que dans la Chefferie de Zambo Abomo, la Chefferie avait pour siège Awäe, en terre Mvog Zambo. Compte tenu de la faible démographie des Mvog Essissima, la légitmité de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé à la tête de cette Chefferie est souvent contestée ;mais celui-ci a su trouver une réplique pertinente: «  Essissima Nkoa, l'ancêtre des Mvog Essissima, était le fils aîné de MbarTsogo. Or, chez les Béti, le pouvoir traditionnel revient aux aînés. La loi du nombre est un principe démocratique certes mais non un principe traditionnel ». (Source : Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé entretien du 01/02/2012 à Mbalmayo). Pour Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, l'avènement des Chefferies de Groupement à Nkol-Metet se présente comme une aubaine pour revivifier les traditions Bene à Nkol-Metet.

    Tableau6 : Configuration ethnique de la Chefferie Bene-Sud-Est.

    Ethnies

    Nombre de villages

    Noms des Villages

    Mvog Zambo

    05

    Awäe ;Ngoantet I ;

    Ngoantet II ; Nkoltombo ;Nsessougou

    Mvog Nnomo

    03

    Nkolya I ; Nkolya II ; Nkolya III

    Yembäe

    02

    Bikoko et Nkol-Metet( Yembäe).

    Mvog Evundu

    Mvog Mbaa

    01

    Ekekam

    Mvog Essissima

    01

    Nkol-Ekabili

    Mvog Evini

    01

    Olamdoé

    Yenakoun

    01

    Kondessong

    Source : Arrêté N°13/A/MINAT/DCT du 19 janvier 1982 déterminant les Chefferies traditionnelles dans le Département du Nyong et So'o, Province du Centre- Sud.

    Adaptation : Amougou Mveng Sylvain Charles.

    Section II : La fragilisation de la grâce des Chefs

    A l'ère de la libéralisation politique, l'attention autour de la Chefferie traditionnelle s'est redoublée. L'exercice du pouvoir traditionnel est sous contrôle des forces politiques présentes dans la sphère territoriale de la Chefferie traditionnelle. Autrement dit, les logiques purement héréditaires et la dimension sacrée du pouvoir sont relativement escamotées. De plus en plus, la légitimité des Chefs traditionnels est remise en question ; aussi note-t-on un certain désamour de certaines autorités traditionnelles par des élites et des populations, ce qui transforme du coup les trônes des Chefs traditionnels en sièges éjectables. Ce constat est souvent renchéri par l'inanité de certains Chefs traditionnels en matière de développement socio économique et même socio politique.

    A Nkol-Metet, ces faits sont visibles ; et pour mieux les saisir, il nous échoit dans un premier paragraphe d'élucider la controverse autour de la légitimité des Chefferies traditionnelles, mieux des Chefs traditionnels. Dans le cas d'espèce, nous ferons essentiellement allusion aux Chefferies de Groupement nouvellement fonctionnelles à Nkol-Metet. Ensuite, dans un second paragraphe nous essayerons un tant soit peu d'élucider sur des causes du désamour des Chefs traditionnels à Nkol-Metet.

    Paragraphe 1 : De la légitimité controversée de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet

    La légitimité au-delà de la conformité au droit suppose de plus l'acceptation et la reconnaissance du droit de commander du pouvoir en place, par les membres d'une communauté (Ferrero et Aron cités par Grawitz, 2004 : 252-253).

    A Nkol-Metet, cette reconnaissance de commander est souvent quelque peu contestée. Cela se fait davantage ressentir au niveau des Chefferies de groupement qui, depuis leur fonctionnalisation, ont du mal à s'imposer dans le paysage socio administratif et socioculturel de Nkol-Metet. Les clivages politico ethniques sont souvent évoqués ; de même les critères ayant présidé à la désignation des Chefs de groupement à Nkol-Metet.

    A- Les ressorts ethniques de la controverse de la légitimité des Chefs

    A Nkol-Metet, la vie socio politique et socioculturelle s'appuie fondamentalement sur les appartenances ethniques. Bien que pratiquement, presque tous sont issus d'un ancêtre commun, certains clans Bene se veulent hégémoniques au point de mépriser les autres.

    C'est cet état esprit qui a animé les détracteurs de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé dans la Chefferie Bene-Sud-Est. En effet, dans cette Chefferie de groupement, l'ethnie Mvog Essissima, qui est l'ethnie de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, est une minorité ethnique démographique 74(*) (voir tableau ci-dessus). La désignation de ce dernier a fait l'objet d'une contestation par ses pairs, et a même bloqué la procédure d'homologation de sa désignation. En ce sens que ses pairs détracteurs ont engagé auprès de l'Administration des recours, afin de lui barrer la route. Bien que ces recours ont quelque peu retardé son homologation75(*) Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé sera finalement confirmée Chef de groupement.

    Cependant, ce qui a favorisé la victoire d'Ondoua Menyié Paul Aimé, c'est sa grande activité au sein de L'ACTRAN, mais dans un cadre conjoncturel, la désorganisation de l'ethnie Mvog Zambo à travers ses candidatures multiples a considérablement joué en sa faveur. En effet, ce scrutin était constitué d'un électorat de 14 personnes qui étaient tous des Chefs traditionnels, parmi eux, il y'avait cinq Chefs traditionnels candidats à cette élection.

    Tableau 7:Candidats en lice

    Candidats

    Chefferies

    Ethnie

    Ondoua Menyié Paul Aimé

    Nkol-Ekabili

    Mvog Essissima

    Ohanda Emmanuel

    Ngoantet I

    Mvog Zambo

    Oyono Owono Joseph

    Awae

    Mvog Zambo

    Tsoungui Emmanuel

    Ngoantet II

    Mvog Zambo

    Kouma Ateba

    Yembäe

    Yembäe

    Source : enquêtes

    En d'autres termes, sur les cinq candidats en lice, trois étaient issus de l'ethnie Mvog Zambo, un de l'ethnie Mvog Essissima et un de l'ethnie Yembäe. Faute d'ententes entre les Mvog-Zambo, les résultats des urnes se présentaient ainsi qu'il suit :

    Tableau 8: Résultats du scrutin

    Candidats

    Nombre de suffrage exprimés en sa faveur

    Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé

    7 voix (vainqueur)

    Sa Majesté Tsoungui Emmanuel

    3 voix

    Sa Majesté Ohanda Emmanuel

    1 voix

    Sa Majesté Kouma Ateba

    1 voix

    Sa Majesté Oyono Owono Joseph

    1 voix

    Source : enquêtes

    Au demeurant, Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, comme dans une dialectique des intelligents, a transformé la minorité ethnique démographique en groupe ethnique dominant. Et avec beaucoup d'arrogance et crânement affirme :

    «  Essissima Nkoa, l'ancêtre des Mvog Essissima, était le fils aîné de MbarTsogo or, chez les Béti, le pouvoir traditionnel revient aux aînés. La loi du nombre est un principe démocratique certes, mais non un principe traditionnel76(*) ».

    B- La controverse de la légitimité liée aux critères de désignation des Chefs traditionnels

    L'avènement des Chefferies de groupement à Nkol-Metet, a posé un problème de critère de désignation des Chefs devant les incarner. Au départ le Préfet du Nyong et So'o de cette époque, Monsieur Ndongo James, lors d'une réunion de concertation avec les forces vives de l'Arrondissement de Nkol-Metet au mois de mai 2005, proposa que c'est au sein des Chefs de 3e degré qu'émerge les nouveaux Chefs de groupement. Ce dernier va se raviser lorsque des élites politico-administratives du terroir, lui feront savoir que ces Chefferies devraient être ouvertes à tous et pour tous77(*). Saisissant la balle au bond monsieur Mbala Zangana Benjamin brigua le trône de la Chefferie de groupement Bene-Nord-Est.

    Au moment où sa candidature à la désignation a été contestée par une certaine clique de Chefs traditionnels, qui évoquaient avec hargne qu'il n'avait pas la légitimité traditionnelle78(*), monsieur Mbala Zangana Benjamin s'est maintenu mordicus. En effet, contrairement à la désignation du Chef de groupement dans la Chefferie Bene-Sud-Est où l'électorat n'était constitué que des Chefs traditionnels, dans la Chefferie Bene-Nord-Est, Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin était le seul candidat non Chef de ce corps électoral, et sa victoire n'a tenu qu'à un fil, mais reste tout de même une victoire.79(*)

    Tableau 9 : Candidats en lice au départ

    Candidats

    Chefferies

    Ethnies

    Observations

    Bala Bala Francis

    Oveng

    Mvog Amougou

    Désistement avant le Scrutin

    Bengono François

    Mbedoumou

    -

     

    Mbala Messi Manfred

    Metet-Centre

    -

     

    Mbala Zangana Benjamin

    Metet-Centre

    -

    Seul candidat n'étant pas Chef traditionnel

    Mbida Jean Marie

    Obout

    -

    Désistement avant le Scrutin

    Ondoua Ndi Marcel

    Mengueme -Bané

    -

     

    Tableau 10: Résultats du premier tour

    Candidats

    Nombres de voix obtenus

    Observations

    Bengono François

    2

    Eliminé

    Mbala Messi Manfred

    4

    Finaliste

    Mbala Zangana Benjamin

    4

    Finaliste

    Ondoua Ndi Marcel

    3

    Eliminé

    Sources : Enquêtes

    Tableau 11: Résultats du tour final

    Candidats

    Nombres de voix obtenus

    Observations

    Mbala Zangana Benjamin

    7

    Vainqueur

    Mbala Messi Manfred

    6

    Perdant

    Sources : Enquêtes

    La conséquence de l'âpreté de la désignation de ce dernier, à la tête de la Chefferie de groupement donne lieu à une gestion mitigée de cette Chefferie. En effet, Le spectre de la défaite aux élections de Sa Majesté Mbala Messi pèse grandement sur la gestion de la Chefferie de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin. En effet, la clique des Chefs ayant pour figure de proue Sa Majesté Mbala Messi n'a jamais voulu lui faire des allégeances quelconques. La preuve en est que Sa Majesté Mbala Messi Manfred a boycotté la cérémonie d'intronisation de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin alors qu'il était présent chez lui à Metet-Centre le jour de cette cérémonie officielle. Or, la symbolique même de celle-ci, a pour but d'adouber le nouveau Chef et pour les Chefs de catégories inférieures, de faire allégeance au nouveau Chef, par mimétisme ou flagornerie, qu'importe. La conséquence de cet état de choses est que Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin collabore essentiellement avec les Chefs reconnaissant son autorité, ce qui l'empêche de mener sereinement son action.

    Le secrétaire de la Chefferie de groupement et représentant du Chef d'Obout, Amougou Ada Albert80(*) le confirme en ces mots :

    « Le problème de notre groupement se trouve dans le fait que notre Chef travaille uniquement avec les Chefs qui l'ont élu, pourtant, une fois élu, il doit coopérer avec tout le monde ».

    Cet état de chose astreint Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin à s'appuyer fortement sur les Autorités Administratives, d'où l'émergence de velléités d'imposition dans la direction de la Chefferie de groupement.

    En principe, le Chef de groupement n'a aucune imposition à adresser aux Chefs de 3e degré, ces derniers ne doivent que répercuter les directives venant de l'Administration, notamment, celles émanant des Sous Préfets. Mais ce dernier peut procéder par trafic d'influences, surtout lorsque le Chef de groupement entretient de bonnes relations avec le Sous Préfet qui, selon les articles 28 et 29 du décret de 1977, ont compétence d'apprécier positivement ou négativement les activités des Chefs traditionnels.

    Au demeurant, le Chef de groupement dans une localité, est le collaborateur le plus proche du Sous Préfet. Madame le Sous Préfet de Nkol-Metet, Lombo Marthe nous le confirme au regard de sa collaboration avec les deux Chefs de groupement de Nkol-Metet. Elle affirme :

    « Notre travail serait harassant si on n'avait pas la présence des Chefs de groupement. Ils jouent le rôle d'éclaireur et balisent la voie du bon déroulement de nos tournées administratives »81(*).

    Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin s'appuie grandement sur cette Autorité pour poser des actions. Par exemple, pour se rendre aux obsèques de Sa Majesté Mbala Messi Manfred82(*) son adversaire politique, Monsieur E, nous fait savoir qu'il a d'abord pris avis chez Madame le Sous Préfet, qui lui assigna même de la représenter dans les différentes phases des obsèques de ce dernier. Le rapprochement quasi systématique de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin auprès de sa hiérarchie est perçu de façon variable par les populations de son groupement. D'aucuns pensent qu'il n'a pas le charisme personnel pour anéantir les clivages nocifs qui gangrènent son action. Pour d'autres, il a plutôt pris des postures d'imposition. Un de ses proches collaborateurs nous l'affirme en ces termes :

    « Notre Chef de groupement se comporte comme un Sous -Préfet, il nous donne les directives sans nous consulter. Nous l'avons encore constaté lorsque nous devions recevoir Madame le Sous Préfet lors de sa tournée de prise de contact avec les populations de notre village. Au lieu de nous demander comment nous nous sommes préparés à cette cérémonie, ce dernier nous a plutôt imposé un certain nombre de choses (...) si c'est cela le groupement, je pense qu'à Nkol-Metet, vaudrait mieux le supprimer et conserver tout simplement les rapports Sous Préfets Chefs de village ».

    A nous référer au commentaire de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, il dément quelque peu ce commentaire, même s'il admet les velléités d'imposition sous l'actif d'une déformation professionnelle il affirme :

    « ce que je sais, c'est que je suis rompu au style administratif ».

    Paragraphe 2: le désamour vis-à-vis des Chefs par les élites et par les populations

    Dans l'imagerie populaire Béti et Bene en particulier, le caractère administratif des Chefferies traditionnelles suscite un certain désintérêt. Cependant à Nkol-Metet, le désamour va au-delà de ce fait ; il trouve plutôt ses foyers dans le management fantaisiste des Chefferies et aussi par les comportements déviants de certains Chefs.

    A- Le management fantaisiste des Chefferies de Groupement

    L'avènement des Chefferies de groupement dans l'Arrondissement de Nkol-Metet a suscité au sein des populations de ce terroir beaucoup d'espoir. Celles-ci voyaient en elles une nouvelle option pour solutionner quotidiennement leurs problèmes. Ils seront quelque peu désillusionnés, dans la mesure où ces Chefs brillent plus par leur non présence permanente à leur Chefferie de groupement.

    En ce qui concerne la Chefferie de groupement Bene Nord Est dirigée par Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, l'on se rend compte que cette Chefferie abrite son locataire de façon occasionnelle, car Sa Majesté a plutôt installé ces quartiers à Mbalmayo. Le seul signe de l'existence permanente de cette Chefferie est la levée des couleurs chaque matin par un locataire Bamiléké83(*) habitant la concession de la Chefferie de groupement sise à Metet-Centre. Si Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin lors de nos entretiens ne nous a pas décliné les raisons de sa non permanente présence effective à son poste de commandement. Son pair Ondoua Menyié nous a donné quelques raisons de son vide juridique.

    En effet, Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé par contre attribue ce dysfonctionnement à sa grande implication politicienne. Ce dernier nous fait savoir qu'au risque de ne pas mêler l'activité politique de la gestion de la Chefferie traditionnelle, les deux secteurs d'activités étant différents, depuis son élection comme Député, ce dernier a installé le siège de ces activités politiques à Mbalmayo où il reste dans la semaine quatre jours sur sept, c'est-à-dire de lundi à jeudi, et trois jours sur sept à la Chefferie de Nkol Ekabili, c'est-à-dire, du vendredi à dimanche. Ce fonctionnement à été maintenu même devenu Chef de groupement. Cependant, quoique qu'il s'efforce à justifier les raisons de ses absences dans son champ de commandement traditionnel, cela est préjudiciable pour la bonne conduite de la Chefferie. Mouiche le faisait déjà remarquer quand il affirmait avec autorité :

      « Quand un Chef fait la politique, il ne suit pas les problèmes de son village »(Mouiche, 2005 : 127).

    B- La Chefferie traditionnelle Bene entre laxisme et déviances

    L'une des critiques faites à certains Chefs traditionnels de Nkol-Metet, c'est leur laxisme à prendre en compte les problèmes de leur communauté, mieux, certains villages ont vécu dans une léthargie ambiante. Le foisonnement des associations à Nkol-Metet et le déploiement manifeste des élites pour le développement de leur communauté est opportunément une conséquence positive de cet état de choses.

    Il est aussi important de faire cas des cas déviants de certains Chefs. On évoque les cas de corruption, d'impartialité de certains Chefs traditionnels. Par exemple dans la Chefferie traditionnelle d'Oveng par Nkol-Metet, il est reproché à Sa Majesté Bala Bala Francis d'avoir ces attitudes. Les populations de ce village ont même d'ailleurs engagé des procédures administratives pour évincer l'auguste Majesté. Fort heureusement pour lui, les arguments avancés n'étaient pas jugés assez convaincants par l'Autorité Administrative. Toutes choses étant égales par ailleurs, ces cas déviants sont légions et s'amplifient le plus souvent à cause de la pauvreté de certains Chefs qui sont obligés à se livrer à de telles pratiques pour pouvoir survivre.

    Conclusion partielle

    Au terme de ce chapitre, il était question pour nous d'élucider les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet et surtout évaluer leur pesanteur à l'ère de la libéralisation politique. Force pour nous est de constater que toute l'organisation politico- administrative de la Chefferie traditionnelle dans l'Arrondissement de Nkol-Metet trouve ses fondements dans les lignages issus de la postérité de MbarTsogo. Il est donc logique qu'avec l'avènement des Chefferies de groupement à Nkol-Metet, que ce soit toujours les descendants de MbarTsogo qui soient à la tête de celles-ci. Cependant, avec la libéralisation politique, la Chefferie traditionnelle BENE de Nkol-Metet connaît une mue parce que, ses Chefs sont devenus les promoteurs du développement local et se font de plus en plus aider par des élites philanthropiques, et certaines associations qui donnent opportunément à la Chefferie une nouvelle vigueur.

    Deuxième partie : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique

    La libéralisation politique marque relativement la renaissance de la Chefferie traditionnelle au Cameroun ; mieux, du `'retour des rois'' (voir Perrot et Fauvelle Aymar, 2003). Cette renaissance de la Chefferie traditionnelle dépend d'un regain d'intérêts combinés des détenteurs du pouvoir traditionnel et des élites toutes, obédiences confondues.

    A Nkol-Metet, ce dynamisme est assez perceptible. Dans ce terroir la Chefferie traditionnelle est devenue une entreprise politique, où les politiciens investisseurs injectent d'importants capitaux pour la requinquer. Cet activisme se traduit par une flopée d'activités socioéconomiques et sociopolitiques, qui participent du développement local de cette unité administrative.

    Toutefois, la mobilisation de ressources par ces acteurs sociaux réalisant des actes concrets, s'inscrit dans l'optique à produire du pouvoir ; et dans une perspective Goffmanienne, elle relève de la grammaire de l'interaction ; mieux, pour ces acteurs, de `'sauver la face'' (work face). En d'autres termes, cela signifie pour ces acteurs sociaux de se comporter conformément aux attentes des populations, qui sont des attentes normatives sociales, exprimant ce que c'est de se comporter normalement dans telle ou telle situation (voir Cécile Bonicco, 2006 : 31-48). Ainsi dit, derrière la recherche du bien pour le village se tramerait des calculs politiques assez précis ; en l'occurrence, le contrôle de la Chefferie et la confortation des assises politiques. C'est pourquoi Miaffo affirme empiriquement :

    «  Toutes les croisades actuelles en direction des Chefferies où les principaux acteurs sont des ministres ; d'hommes d'affaires  et de hauts fonctionnaires acquis à la cause du Rdpc, répandant en dons, des sanctuaires et établissements comme s'ils cherchaient à se dédouaner de quelques mauvaises consciences, cherchent à transformer celles-ci en instruments de manipulation des populations » (Miaffo cité par Mouiche, 2005a :18).

    Au demeurant, pour mieux décrypter ces dynamismes à Nkol- Metet, deux chapitres meubleront notre argumentaire dans cette partie. Le premier chapitre, intitulé : Les ressorts stratégiques delaChefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, nous permettra d'examiner les compétitions pour la détermination des Chefs comme lutte de pouvoir ; de mesurer leur niveau de pouvoir dans les jeux de la décentralisation ; toutefois, en ressortant les enjeux pour le contrôle du développement local.

    Le deuxième chapitre éponyme à cette partie, est intitulé : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, a pour objectif de démontrer que les Chefs traditionnels de Nkol-Metet ne sont pas étrangers aux dynamismes apportés par la libéralisation politique ; tout au contraire, ils promeuvent eux aussi, les activités socioéconomiques et sociopolitiques dans leur terroir respectif. Enfin, nous démontrerons également que l'implication grandissante des Chefs traditionnels consiste pour eux, à façonner leur personnalité politique, dans la mesure où ils sont politiquement engagés dans de diverses compétitions électorales.

    Chapitre 3 : Les ressorts stratégiques de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique

    A l'ère de la libéralisation politique de l'institution de la Chefferie traditionnelle est mise en jeu, comme partie prenante de la décentralisation, et du coup constitue désormais un enjeu pour son contrôle au sein des classes élitaires et des autres acteurs sociaux. C'est dans cette veine que G. Bailey voit la politique nationale comme locale, en termes de jeux où se confrontent et s'affrontent des acteurs sociaux autour de leaders et de faction (voir G.Bailey cité par Paul Nuembissi, 2007 :31). Autrement dit, la Chefferie traditionnelle connaît un activisme retentissant, car des forces politiques84(*) l'ont investi et les transforment progressivement en un vaste cadre d'activités socio économiques, sanitaires et culturelles ; bref, l'action de ces forces politiques s'inscrit dans la dynamique du développement local et contribue, peu s'en faut, à poser les jalons de leur reviviscence.

    Le présent chapitre est structuré autour de deux sections. La première section intitulée, les Chefferies traditionnelles comme lieu de pouvoir sous contrôle bureaucratique et élitaire, a pour objectif d'examiner les compétitions pour la détermination des Chefs comme lutte de pouvoir. C'est dans ce cadre que nous cernerons autant que faire se peut, les jeux de conservation des Chefferies traditionnelles. La deuxième section intitulée, Les Chefferies Bene comme arène et marché politiques, nous permettra d'une part, de mettre en lumière les Chefferies traditionnelles comme arène de compétition pour le contrôle du développement local ; d'autre part, il nous permettra de mesurer le niveau des pouvoirs de la Chefferie traditionnelle dans les jeux de la décentralisation.

    Section 1 : Les Chefferies traditionnelles comme lieu d'un pouvoir sous contrôle bureaucratique et élitaire

    Les Chefferies traditionnelles en général, et en particulier les Chefferies traditionnelles Bene, sont sous contrôle bureaucratique et élitaire. Autrement dit, celles-ci sont de plus en plus investies par des élites (toutes obédiences confondues), qui veulent leur donner un certain sens par leurs investissements sociopolitiques et socioéconomiques. Pour Geshiere (1996), sans l'action des élites, les Chefferies semblent être vidées de leur substance ; par contre avec celles-ci, elles reprennent leur vigueur. Cela signifie tout simplement que l'action des élites impacte manifestement et de façon variable dans la trajectoire développementale d'un village ou d'une Chefferie traditionnelle.

    A Nkol-Metet, l'action de ces élites est mesurée en fonction de leur nombre dans une Chefferie, qui lui-même dépend de la démographie du village et aussi du taux de scolarisation ; toujours est-il que leur présence ou leur absence dans un village se fait presque toujours ressentir ; car le niveau de développement d'un village ou d'une Chefferie dépend manifestement de leur présence. C'est dans cette logique qu'Agodi Patrice85(*) nous relate que : 

    « lors des visites de prise de contact de Madame le Sous-Préfet de l'Arrondissement de Nkol-Metet avec les populations de cet Arrondissement, nous avons constaté que partout dans les villages où l'on notait la présence d'une élite ou de plusieurs élites, ce village présentait une envergure plus importante que ceux des villages dépourvus d'élites. Les réceptions offertes dans ces villages n'en démentaient pas ».

    Quoique les élites jouent un rôle exaltant pour le développement de leur communauté, les finalités de leurs actions traduisent à souhait des attitudes de "domination" dans leur communauté. C'est dans cette veine que Ndombet André affirme :

    « les élites scolarisées et universitaires investissent en masse à leur tour l'espace politique ; elles ne se réfèrent aux Chefs traditionnels que pour faire aboutir ou légitimer leurs ambitions personnelles, aux dépens de la communauté ethnique qu'elles prétendent représenter » (Ndombet André in Perrot et Fauvelle, 2003 :12).

    Au demeurant, il nous échoit dans le cadre de cette section de mettre en lumière que le déploiement pour développement local des élites politico-administratives et politico-traditionnelles à Nkol-Metet s'inscrit dans l'optique de posséder la Chefferie traditionnelle, afin de mieux la contrôler. Eu égard à ce qui précède, il nous apparait opportun d'analyser d'une part, la compétition pour la détermination des Chefs comme lutte de pouvoir ; d'autre part, de mieux saisir les jeux de pouvoir pour la conservation des Chefferies traditionnelles.

    Paragraphe 1 : Compétition pour la détermination des Chefs comme lutte de pouvoir

    La libéralisation politique a relativement contribué au regain d'intérêts des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet, mieux, elle a libéré des énergies positives qui, de plus en plus, permettent de requinquer les Chefferies traditionnelles de ce terroir. Ce regain d'intérêts qui prend des allures philanthropiques, laisse transparaître en filigrane leurs ambitions personnelles. Aussi, à Nkol-Metet, les élites et d'autres forces politiques tissent des ficelles pour contrôler les Chefferies traditionnelles, mais le font généralement de façon latente. C'est cet état de choses, qui a souvent contribué à rendre âpre la désignation des Chefs traditionnels dans ce terroir.

    A- La main invisible de l'élite politico - administrative

    A Nkol-Metet, les élites politico-administratives et d'autres élites de Nkol-Metet par leurs investissements sociaux, ont un droit de regard sur la Chefferie traditionnelle de leur terroir. Même si ces dernières se tapissent dans l'ombre, leur spectre se fait ressentir ; dans la mesure où elles tiennent souvent les manettes organisationnelles des Chefferies. C'est dans cette optique qu'Owona Nguini86(*)  considère les élites comme  des individus ou des groupes d'individus qui possèdent des attributs ou des ressources éminentes leur permettant de dominer la scène sociale.

    Par exemple, à Nkol-Metet, d'après nos investigations, il appert que l'arrêté n°13/A/MINAT/DCT du 15 Janvier 1982, déterminant les Chefferies traditionnelles de 2e degré dans le Département du Nyong et So'o, Province87(*) du Centre-Sud, a eu du mal à être effectif à Nkol-Metet, parce que l'élite politico-administrative dominante88(*) de ce terroir n'était pas d'accord de la façon dont a été effectué le découpage des Chefferies de groupement à Nkol-Metet.

    S'agissant toujours, de ces Chefferies de groupement à Nkol-Metet, une fois annoncées leur effectivité dans la moitié de l'année 2004, il a fallu encore attendre quatre années pour finalement voir la concrétisation de celles-ci. En effet, il s'est constitué des groupes d'élites favorables à certains candidats de leurs préférences. Dans la Chefferie Bene-Nord-Est, cela a été plus manifeste. La configuration ethnographique de cette Chefferie dominée par les Mvog Amougou a vu émerger les tendances au sein même de ce groupe ethnique. Autrement dit, les principales élites politico-administratives ; politico religieuses ; politico économiques se sont divisées ; car chacune de ces tendances voulait faire triompher ses vues à travers le soutien d'un candidat89(*)déterminé.

    Au demeurant, cette lutte de positionnement des candidats par des élites sous des auspices latents a souvent rendu âpre la désignation des Chefs traditionnels à Nkol-Metet.

    B- De l'âpreté de la compétition pour la détermination des Chefs

    A Nkol-Metet, la classe élitaire influente trouve principalement ses ressorts au sein des élites politico-administratives, des élites traditionnelles, des élites religieuses et des élites militaires. En d'autres termes, c'est dans ces cercles élitaires que se définissent les activités socioéconomiques et sociopolitiques de ce terroir. C'est dans ce sillage, lorsqu'il faut désigner des Chefs traditionnels, que certaines élites pèsent souvent de leur poids à la fois politique et économique.

    Par exemple, dans la Chefferie de groupement Bene- Nord-Est, les candidatures de leurs Majestés Mbala Zangana Benjamin et Mbala Messi Manfred ont occasionné un schisme au sein de l'élite Mvog Amougou, car les deux sont des personnalités ressources.

    En effet, Mbala Messi Manfred et Mbala Zangana Benjamin 90(*)sont tous Mvog Amougou du village Metet-centre. Les deux jouissent d'une notoriété importante à Nkol-Metet, notamment au sein de la grande famille Mvog Amougou. Mbala Messi tirait surtout sa notoriété de sa légitimité traditionnelle, parce qu'il était d'abord Chef traditionnel de son village, et surtout était un homme très charismatique ; mais était un très mauvais diplomate91(*). Il a par ailleurs fait des études jusqu'au niveau de la licence à l'Université de Yaoundé, où il obtint une licence en Sciences Economiques et de gestion. Il est à Metet-Centre l'un des pionniers à avoir fait les études universitaires92(*).Il a été Directeur Commercial à la SEMRY (Société d'Expansion et de la Modernisation du Riz à Yagoua). Par contre, Mbala Zangana Benjamin jouit beaucoup plus d'une légitimité légale rationnelle ayant été Maire de Mbalmayo pendant seize ans, il a une bonne maîtrise de la sociologie du Département du Nyong et So'o. Leur candidature à la tête de la Chefferie de groupement a donc contraint pendant un bon moment l'élite Mvog Amougou, quelle soit économique, administrative, militaire, religieuse, ou traditionnelle à vivre dans un manichéisme forcé ; ceci s'explique par le fait que leur candidature aura contribué à éclipser celle des autres prétendants et a fait naître deux tendances.

    Cependant, faut-il le souligner, que ces clivages élitaires dans cette Chefferie connaissent quelques atténuations. Car, avec la création de l'association des ressortissants de l'ethnie Mvog Amougou dénommée Ekoan Mvog Amougou (EKMA), qui a pour but la défense et la promotion de l'identité Mvog Amougou, a fait revenir les uns et les autres à la raison ou à des meilleurs sentiments. Compte tenu de la particularité de la Chefferie Bene-Nord- Est, conduite par Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, qui est quasiment constituée par le groupe ethnique Mvog Amougou. Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin se sert d'ailleurs d'elle, pour colmater les brèches des déchirures intervenues au sein des élites Mvog Amougou lors de la quête du trône de celle- ci. Ceci est d'autant plus pertinent que son statut de Chef de groupement lui octroie, à Nkol-Metet, le rang de la première personnalité traditionnelle Mvog Amougou. C'est à ce titre que depuis son accession au trône, il ne s'est plus tenu une réunion sans que l'ordre du jour ne prévoit le mot du Chef de groupement93(*). Ainsi dit, la reconnaissance de la préséance de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin au sein de la famille Mvog Amougou atténue les clivages incessants et impertinents de son leadership. Pour lui, L'EKMA est : «  Un espace médiatique, où l'on cultive la notion de Chef au sein des Mvog Amougou ».94(*)

    En définitive, quoique des élites dans la compétition pour la détermination des Chefs à Nkol-Metet feignent d'être manifestes, affichent plutôt des attitudes ostentatoires en matière de développement local. Ces élites inscrivent leurs actions soit dans des registres collectifs ; soit alors dans des registres individuels.

    Tableau 12 :  Principales élites influentes à Nkol-Metet95(*)

    Noms

    Ethnie

    Village

    Fonction occupée

    ELITES POLITICO -ADMINISTRATIVES

    Ndi Samba Joseph

    Mvog-Ndi

    Ayéné

    Actuel Maire de Nkol-Metet et Homme d'affaires ; PDG du Groupe Scolaire Ndi Samba Formation

    Mbarga Nguélé Martin

    Mvog- Amougou

    Mengueme-Bane

    - Délégué Général à la Sûreté Nationale

    - Ex Ambassadeur du Cameroun au Zaïre ; Brésil ; Espagne

    Etoundi Oyono

    Mvog-Nnomo

    Nkolya II

    -Directeur Général du Port autonome de Douala

    - Membre du Comité central du RDPC

    Omgbwa Asssembe

    Mvog Zambo

    Ngoantet II

    - Inspecteur d'Impôt

    - Ex Maire de Nkol-Metet ( 2002-2007)

    Anaba Mbarga Solange

    Mvog-Amougou

    Mengueme-Bane

    - Cadre supérieur au Mindaf

    - Présidente section OFRDPC Nyong et So'o

    Ndi Mboh François

    Mvog- Zambo

    Ngoantet II

    - Attaché d'Ambassade

    - Secrétaire particulier de l'Ambassadeur du Cameroun en Italie

    Obada Isaac Daniel

    Yembäe

    Nkol-Metet- Yembaë

    Actuel Ier Adjoint au Maire de Nkol-Metet

    Zambo Amougou Jean Marie

    Mvog Amougou

    Efoulan

    Président National de la Confédération des syndicats travailleurs du Cameroun

    Ndi jean Claude

    Mvog Amougou

    Oveng

    - Journaliste Radio à la CRTV

    - Président de l'ASFRADO

    Nnom Ndoé

    Mvog Amougou

    Efoulan

    Magistrat et actuel Procureur de la République au Tribunal de première instance de Ngaoundéré

    Mveng Bikono

    Mvog Amougou

    Yop

     

    Mbarga Assembe

    Mvog Zambo

    Ngoantet II

    Membre du comité Central du RDPC

    ELITES MILITAIRES

    Colonel Amougou Nguélé Emmanuel

    Mvog-Amougou

    Obout

    Chef d'Etat Major Particulier du Président de la République

    Colonel Nguélé Amougou Philemon

    Mvog-Amougou

    Bizock

    Colonel retraité ; ex Intendant au Ministère de la Défense

    Colonel Ndi Minyae

    Mvog-Amougou

    Oveng

     

    Colonel Onana Bene

    Mvog Zambo

    Ngoantet II

     

    ELITES POLITICO -TRADITIONNELLES

    S.M Mbala Zangana Benjamin

    Mvog-Amougou

    Metet-centre

    Actuel Chef de Groupement Bene-Nord-Est ; ex Maire de la Commune rurale de Mbalmayo (1980-1996) ; ex sous préfet de plusieurs localités du Cameroun

    S.M Ondoua Menyié Paul Aimé

    Mvog-Essissima

    Nkol-Ekabili

    Actuel Chef de Groupement Bene-Sud-Est ; ex Député (2002-2007) ; ex Membre du Comité central et Président fondateur de l'ACTRAN

    S.M Ondoua Ndi

    Mvog-Amougou

    Mengueme-Bane

    Actuel Chef de son village ; Commissaire de Police et actuel Commissaire du Commissariat spécial de Monatélé

    S.M Oyono Owono Joseph

    Mvog -Zambo

    Awäe

    Actuel Chef de son village ; Ier Maire de Nkol-Metet (1996-2002) et Ier Ingénieur Agronome de Nkol-Metet

    ELITES RELIGIEUSES, INTELLECTUELLES ET ECONOMIQUES

    Rév Mveng Owono Luc Bruno

    Mvog-Amougou

    Metet-Centre

    Ier Prélat de Nkol-Metet ; Pasteur protestant à l'EPC depuis 1964 ; Docteur ès lettres

    Pr. Abessolo Yves

    Yembäe

    Nkol-Metet- Yembäe

    Professeur agrégé en sciences économiques (Ier agrégé à Nkolmetet) en fonction à l'Université de Yaoundé II-Soa

    Mbida Mbida François

    Mvog-Amougou

    Ebomsi II

    Homme d'affaires et Président de l'EKMA

    Tétron Abeng Salomé

    Mvog -Amougou

    Oveng

    Femmes d'affaires et Fondatrice du complexe scolaire les Bambis

    Source : enquêtes

    Paragraphe 2 : Les jeux de Pouvoir pour la conservation des Chefferies

    La libéralisation politique survenue au Cameroun au début des années 1990, en entraînant l'ouverture de la vie politique, a aussi favorisé l'entrée des mouvements sociaux. Selon Guy Rocher, le mouvement social est comme une organisation nettement structurée et identifiable ayant pour but explicite de grouper les membres en vue de la promotion de certains objets précis, à connotation sociale (Guy Rocher cité par Mbébi, 2011 :1). Pour Neveu, le mouvement social est une forme d'action collective en faveur d'une cause (Neveu cité par Mbébi, 2011 : 5).

    A Nkol-Metet, ces mouvements sociaux ont pris la forme des associations qui ont contribué à donner du poil de la bête aux Chefferies traditionnelles de ce terroir. Cependant il faut relever ici que dans la plupart des cas, que ce sont les élites qui s'y trouvent, qui leur donnent une certaine vitalité.

    Il nous échoit, d'interpréter les stratégies des élites de Nkol-Metet sur l'emprise des Chefferies de leur terroir à travers des stratégies collectives d'une part, et d'autre part, par des stratégies individuelles émanant concomitamment des actions isolées de certaines élites et de certaines associations émergentes dans cette localité.

    A- Des Stratégies collectives pour la conservation des Chefferies traditionnelles

    A Nkol-Metet, les Chefs traditionnels adoptent des postures des politiciens investisseurs en essayant autant que faire se peut de combler leurs déficits de ressources imminentes en accroîtrant leur capital social par l'établissement des relations bénéfiques pour le village avec les élites du terroir. Dans cette circonscription administrative, les Chefferies de 3e degré d'Obout et d'Oveng sont témoins d'un tel dynamisme à travers l'impact de leur association ; notamment Nkul Mbida Nga Mballa à Obout et l'ASFRADO (Association des Frères et Amis d'Oveng).

    1- La Chefferie traditionnelle d'Obout et le Nkul Mbida Nga Mballa

    Obout est un village situé à cinq kilomètres au Nord Ouest de Nkol-Metet et fait partie de la Chefferie de groupement BENE-Nord-Est. Ce village représente une grande symbolique pour les Mvog- Amougou de Nkol-Metet car, il représente le siège des institutions mystico-traditionnelles de cette ethnie. Ce village a à sa tête Sa Majesté Amougou Jean- Marie qui est en effet le septième Chef de ce village96(*).

    A côté de Sa Majesté Amougou Jean- Marie, son représentant, Amougou Ada Albert est également l'une des figures de proue de cette Chefferie et c'est même lui, qui s'assure de l'administration quotidienne de la Chefferie d'Obout.

    Dans le souci de revitaliser la Chefferie traditionnelle d'Obout, Sa Majesté Amougou Jean- Marie créera une association dénommée NKUL MBIDA NGA MBALLA97(*). Ce dernier est son président, et comme dans la gestion de la Chefferie, il est secondé par Amougou Ada, qui est le premier Vice-président de ladite association. Cette association comporte une branche féminine, et au niveau du bureau de l'association98(*), les femmes occupent deux postes : le poste de deuxième vice Président occupé par madame Amougou Olive et le poste de Trésorier Général n°1 occupé par Mboé Louise. Ladite association, comporte aussi une branche de la jeunesse, et au niveau du bureau, deux jeunes assurent les postes de Trésoriers n°3 et n°4 ; il s'agit respectivement d'Owono Jean et Meyong Pierre. Le NKUL MBIDA NGA MBALLA conformément au préambule de leur association a pour but, de rassembler toutes les familles Mvog Meyié d'Obout sans distinctions de sexe et de religion, en vue de s'unir autour de leur Chef de village, pour consolider les liens fraternels entre les membres. Cette association promeut également le développement économique, social et culturel afin de lutter contre la pauvreté.

    Cette association compte 80 membres dont 50 sont actifs99(*). Et est fortement appuyé par l'élite majeure d'Obout, le Colonel Amougou Nguelé Emmanuel, qui est le Chef d'Etat Major du Président de la République du Cameroun Monsieur Paul Biya, et Conseiller de ladite association. L'action de ce dernier dans cette association, a donné un nouveau visage à la Chefferie traditionnelle d'Obout et a pris un tournant décisif lorsqu'il a octroyé un crédit de huit millions de francs Cfa, pour financer les projets communautaires en 2010. Dans le domaine de l'agriculture, ce financement, a permis la création des champs de piments100(*), les champs de maïs ; des champs d'arachides ; des champs de tomates et des plantations des bananiers plantains. Dans le domaine de l'élevage, ce crédit à permis la création de cinq porcheries à Obout. Dans le cadre des nouvelles techniques de l'information et de la communication (NTIC) à Obout, on a pu créer un secrétariat informatique dirigé par Amougou Ada Albert, le représentant du Chef. Il convient de souligner ici que ce sont 34 personnes qui ont bénéficié de ces crédits. Ces bénéficiaires doivent reverser un montant de 10.000 francs Cfa dans les caisses de l'association, et le remboursement de leur crédit est mis à la disposition des autres membres n'ayant pas bénéficié de la première phase.

    La vente des produits récoltés de ces exploitations ne pose pas un problème à Obout. L'association NKUL MBIDA NGA MBALLA se sert du marché périodique101(*) d'Obout pour écouler en grande masse ses produits. Nonobstant sa grande propension agro économique, sur le plan sportif, l'association NKUL MBIDA NGA MBALLA s'estactivée à organiser entre le mois de juillet et août 2011 un championnat de football de vacances dont le montant était estimé à 400.000 francs Cfa.

    A côté de ce déploiement communautaire et associatif, le Colonel Amougou (nous reviendrons succinctement sur l'action de ce dernier plutard) mène aussi des actions personnelles qui ont toujours des incidences positives sur la reviviscence de la Chefferie d'Obout.

    2- La Chefferie d'Oveng et l'ASFRADO : une synergie d'actions vers l'essor du terroir

    Oveng est un des villages de l'Arrondissement de Nkol-Metet situé à une dizaine de kilomètres à l'Ouest de Nkol-Metet, et fait partie de la Chefferie de groupement BENE Nord Est. On estime que ce village couvre une superficie de huit à dix kilomètres carrés. (Bassemeg, 2000 :2). Ses populations se reconnaissent être les descendants de Mballa Messolo. En d'autres termes, les populations d'Oveng sont issues du clan des Mvog Amougou et d'une petite minorité ethnique constituée des Yembama. Bala Bala Francis est son deuxième Chef. Contrairement aux villages précédents, les populations d'Oveng font individuellement leurs petits champs et leur petit élevage. Pour donner une impulsion coordinatrice aux activités isolées, est née le 24 décembre 1989 l'ASFRADO : l'Association des Frères et Amis pour le développement d'Oveng. Cette association a pour but de regrouper les natifs et tous ceux qui sont convaincus des idées de ladite association, de susciter l'esprit d'entreprise, la prise en main des problèmes de développement d'Oveng, la lutte contre l'exode rural, réaliser une symbiose entre les natifs d'Oveng résidant en ville et ceux du village, encourager l'épargne, l'investissement, l'entraide et le bien- être de ses adhérents ; en un mot, cette association est un cadre de retrouvaille, de réflexion, de concertations, d'ententes et d'initiatives des fils d'Oveng.

    Dans l'ASFRADO, trois élites se démarquent, et selon l'imagerie populaire des populations d'Oveng, ce sont ces trois personnes qui font bouger ladite association. Il s'agit, de son Président, le Journaliste Jean Claude Ndi, de la Promotrice scolaire et le mécène Salomé Abeng Tétron 102(*) et du Colonel de Gendarmerie Ndi Minyae. Cette association compte trois cellules, une à Oveng, une à Yaoundé et une à Douala. La cellule de Yaoundé est la plus dynamique. L'ASFRADO n'exclut pas la Chefferie traditionnelle. Sa Majesté Bala Bala Francis en est son conseiller. A son actif, depuis sa création, cette association organise chaque année les journées d'excellence académique. Dans un premier temps, c'est Salomé Abeng Tétron qui était le mécène principal de cette activité. Et depuis Cinq ans, le Colonel Ndi Minyae a pris le relais. A côté de ces journées d'excellence, l'ASFRADO, apporte du matériel didactique à l'Ecole Publique Primaire d'Oveng. Cependant les oeuvres les plus déterminantes de cette association sont la construction de nouveaux bâtiments à l'Ecole Primaire d'Oveng (oeuvre, qu'on attribue principalement à la personne de Salomé Abeng Tétron) et à côté de cette oeuvre, l'ASFRADO, en partenariat avec l'Eglise Catholique notamment le Diocèse de Yaoundé a réalisé cinq puits d'eau potable à motricité humaine.

    En définitive, en dépit de quelques dysfonctionnements et des rivalités tacites, l'ASFRADO a réussi à les transcender pour favoriser l'essor social des populations d'Oveng. Ces deux exemples nous ont permis de voir comment les élites se sont servies des associations pour impulser le développement, mieux, de contrôler les dynamiques du développement local dans leur village.

    B- Des stratégies individuelles pour la conservation des Chefferies traditionnelles

    Le présent point consiste à mettre en lumière d'une part, les actions essentiellement individuelles de certaines élites qui ont un impact dans le champ social de Nkol-Metet et qui participe à la consolidation de leur leadership institutionnalisé. Le leadership institutionnalisé renvoie à ce que, les positions qu'occupent ces élites dans leur communauté leur autorise et même les oblige de prendre les initiatives et des décisions, en vue de l'obtention des buts de leur collectivité, avec le droit d'engager leur collectivité comme totalité. (Parsons, 1960 cité par Mouiche, 2005 : 66). Dans le cas d'espèce, nous ferons référence aux leaderships institutionnalisés de Ndi Mboh François à Ngoantet II et du Colonel Amougou Nguélé Emmanuel. D'autre part, il nous semble opportun de mettre en exergue l'activité de certaines associations qui s'inscrivent aussi dans l'actionnariat pour le développement local. Nous ferons ici référence à la JAME (Jeunesse Active de Metet en évolution) à Metet-centre et au RDPC à Ngoantet et à Metet-centre.

    1- Des leaders institutionnalisés : Ndi Mboh François et le Colonel Amougou Nguélé Emmanuel

    1-1- Le leadership institutionnalisé de Ndi Mboh François

    Dans la décennie 90, une élite économico administrative a considérablement occupé la scène sociale de Ngoantet en la personne d'Omgbwa Assembe, 103(*)alors Inspecteur des impôts à Douala. Son action s'est beaucoup inscrite dans un cadre ludique ; notamment avec l'organisation des championnats de vacances de renommée nationale et même sous régionale.

    Plus récemment, dans le même village, à la fin de la décennie 90 et au début des années 2000, a émergé une élite administrative en la personne de Ndi Mboh François104(*). Ndi Mboh François, est un diplomate chevronné et est également le frère aîné de Sa majesté Tsoungui Emmanuel. Le tact acquis de son expérience diplomatique, lui a permis de toujours associer son frère Chef au centre des différents projets qu'il a eu à initier.

    De façon concrète, Ndi Mboh François a, sur le plan sanitaire, été l'un des leaders déterminants pour la réhabilitation du dispensaire de santé de Ngoantet II, qui est devenu en 2006 Centre Médical de Santé Intégré de Ngoantet II105(*). Ce Centre de Santé est spécialisé en ulcères de brûlis et en chirurgie. Sur le plan économique, ce dernier a créé à titre personnel une ferme d'élevage de poulets, une porcherie, et deux palmeraies qui ont permis d'employer plusieurs jeunes de ce village et des villages voisins. L'oeuvre de Ndi Mboh François, a surtout contribué à rehausser l'image de Ngoantet II, mieux encore, a permis à requinquer la posture de Sa Majesté Tsoungui Emmanuel qui est en fait, le premier partenaire dudit mécène et a- t-il aussi fait de la Chefferie, le centre d'impulsion du développement à Ngoantet II, car toutes ces oeuvres se trouvent localisées au siège même de la Chefferie de Ngoantet II.

    1-2- Le leadership institutionnalisé du Colonel Amougou Emmanuel

    Le Colonel Amougou Emmanuel est la figure de proue d'Obout. Ce dernier en dehors de son engagement actif dans le Nkul Mbida Nga Mballa qui est l'association majeure de son village, il a créé à Obout, un complexe commercial et hôtelier 106(*)dénommée Dibang Charlotte dans lequel, certains jeunes d'Obout ont trouvé un emploi. Toujours est-il que sur le plan personnel cette élite possède plusieurs exploitations agricoles où les jeunes d'Obout, effectuent continuellement des stages rémunérés. De même au mois d'octobre 2012, il a amélioré la distribution du courant électrique à Obout, en remplaçant la connexion monophasée par la connexion triphasée. Bref, le soutien qu'apporte le Colonel Amougou Emmanuel pour sa communauté à travers ses actions tant dans l'association NKUL MBIDA NGA MBALLA, que sur le plan personnel redonne incontestablement une envergure respectable à la Chefferie d'Obout. D'où le zèle de Monsieur A quand il affirme :

     «  notreChefferie mérite d'être une Chefferie de 2e degré. A Obout, nous avons un marché construit, un centre de santé, des écoles primaires et secondaires, un complexe hôtelier commercial, une cathédrale catholique, une chapelle Protestante de l'Eglise Presbytérienne Camerounaise, un centre spécial d'Etat civil... que faut-il encore de plus pour qu'on érige Obout en Chefferie supérieure ? ».

    2- L'action de la JAME et du RDPC pour le développement local

    Les actions de la JAME et du RDPC sont ici principalement répertoriées dans les villages de Metet- centre et de Ngoantet.

    S'agissant de leur présentation sommaire, Metet- Centre, comme son nom l'indique, est situé à trois kilomètres du centre de Nkol-Metet. C'est un village essentiellement constitué par l'ethnie Mvog -Amougou. Ce village a été fondé au XIXe siècle par Mbala Zangana107(*) fils de Zambo Nsa. Ce village a la particularité d'abriter deux Chefferies. La Chefferie de Groupement BENE Nord Est et la Chefferie de 3e degré 108(*)(celle qui fait l'objet de notre réflexion ici). Pour ce qui est de Ngoantet, il est l'un des grands villages de l'Arrondissement de Nkol-Metet. Il est situé à 9 kilomètres à l'Est de Nkol-Metet. Il fait partie de la Chefferie de groupement BENE- Sud- Est. Ses populations sont essentiellement de l'ethnie BENE Mvog Zambo de la souche d'Atangana Mengue, descendant de Zambo Melunu. A la fin de la décennie 80, vu son étendue et sa démographie, la Chefferie de Ngoantet sera éclatée en deux Chefferies : les Chefferies de Ngoantet I 109(*)et Ngoantet II. Dans le cadre de notre étude de cas, nous nous appesantissons sur la Chefferie traditionnelle de Ngoantet II. Cette Chefferie a à sa tête, Sa Majesté Tsoungui Emmanuel qui succéda à son père Ohanda André.

    Dans le cadre de ce sous paragraphe, nous examinerons deux points. Le premier consiste à examiner l'action de la JAME à Metet-centre, et ensuite, l'immixtion du RDPC dans le développement communautaire à Metet- Centre et Ngoantet II.

    2-1- L'Action de la JAME

    La JAME est une association qui a pour but le développement social, la fraternité et la solidarité entre les jeunes de la contrée et des environs. Cette association existe de façon officielle depuis le 30 avril 2009, et sa déclaration porte le N°18/RDA/J10/BAPP. Son président Ndi Ndi Anicet, entend avec ses camarades faire de Metet-Centre, the bestway of life. Pour réaliser un tel objectif, en 2009, cette association, du 02 au 08 août 2009, a organisé à l'Ecole Publique Primaire de Metet-Centre, une semaine de portes ouvertes au cours de laquelle, grâce à l'appui de ses partenaires, a organisé des séminaires de recyclage en techniques agricoles ; des sensibilisations sur les fléaux tels que le SIDA et les méfaits des consommations des drogues110(*), qui constituent un frein pour le développement local de Metet-Centre. Or, comme nous l'indique le porte parole statutaire de cette association, Abega Abessolo 111(*)

    «  le développement de leur localité, ne saurait s'appuyer sur des populations malades ou moribondes économiques ».

    Sur un plan éducatif, la JAME a organisé le 19 décembre 2009 toujours à l'Ecole Publique Primaire de Metet-Centre, une journée d'excellence où elle a primé les vingt neuf(29) meilleurs élèves112(*) de cette école et la meilleure élève féminine de la même école par l'octroi d'un certain nombre de fournitures. Le corps enseignant n'était pas en reste car la JAME a offert au cours de la même cérémonie un complément du matériel didactique. Sur le domaine sportif, depuis sa date de création, la JAME a déjà organisé trois championnats de football dans l'optique de combattre l'oisiveté des jeunes pendant les vacances scolaires.

    2-2- La Contribution du RDPC pour le développement local

    Le RDPC qui est le parti au pouvoir au Cameroun, est également le parti dominant à Nkol-Metet, mieux, Nkol-Metet est une Banque à votes pour ce parti. Ce parti pour davantage entretenir la ferveur partisane de ses militants à décider de poser leur pierre dans la réalisation du développement. A Nkol-Metet, de tels actes dans les villages de Metet-centre et de Ngoantet ont été effectués par l'intermédiaire des Présidents des sous- sections113(*) RDPC Metet et Ngoantet.

    2-2-1- la contribution de la sous- section RDPC Metet-centre pour le développement local

    Sous la houlette du Président de la Sous-Section RDPC de Metet-Centre, Zambo Amougou Engelbert, Metet-Centre est devenu un vaste espace semencier. L'activisme politique de ce dernier, a permis de convaincre l'Honorable Nomo Bengono, Député RDPC, du Nyong et So'o à créer des champs semenciers communautaires pour davantage encourager les activités agricoles et surtout faire profiter aux populations de Metet-Centre des semences sélectionnées, afin d'accroître la production agricole. Pour donner une ampleur plus communautaire, et pour éviter les cas d'ostracisme pour les non militants du RDPC, Zambo Amougou Engelbert, en partenariat avec le programme national du développement participatif (PNDP), a créé en 2011 à Metet-Centre le CODEMEC (comité de développement de Metet-Centre). De façon plus concrète, la coalition associative (RDPC-PNDP-CODEMEC) qu'a créé Zambo Amougou Engelbert a permis d'avoir un champ semencier, de 60.000 plants d'ananas ; un champ semencier, de 10.000 boutures de Manioc ; une pépinière de 50.000 plants de Cacao qui correspondent à une surface cultivable de 42 hectares114(*) ; une plantation d'un hectare de bananiers plantains. On estime tout cet investissement à près d'un million de francs Cfa et cela augure des lendemains meilleurs pour l'agriculture dans ce village, mieux, d'occuper les hommes et les femmes désoeuvrés.

    2-2-2-La contribution de la sous- section RDPC Ngoantet pour le développement local

    L'action du RDPC à Ngoantet II est l'oeuvre du président de la Sous-Section RDPC, Zambo Assembe Emile. Ce dernier a su faire profiter à sa communauté des initiatives de développement local amorcé par ce parti politique. Afin de lutter contre l'exode rural, ladite sous -section a créé un champ semencier de cacaoyers de sept hectares responsabilisant à la fois, femmes et jeunes de Ngoantet II. De même, il a alloué à l'ensemble des vingt cinq comités de base de sa Sous Section 1250 kilogrammes de semences de maïs, soit 50 kilogrammes par comité de base115(*). Même si, cette action peut être analysée à une sorte de potlach116(*), pour bénéficier des suffrages des populations de Ngoantet, cette action profite d'abord à ces populations Mvog Zambo et contribue à revivifier la Chefferie traditionnelle de Ngoantet II.

    Section 2 : Les Chefferies Bene comme arène et marché politique

    Les Chefferies traditionnelles Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, sont devenues des cadres d'expression de l'offre et de la demande. Dans le cas d'espèce, l'offre renvoie à des stratégies mises sur pied par des forces politiques présentes dans les Chefferies traditionnelles pour leur donner une certaine vitalité. La demande par contre, fait référence au soutien apporté par les bénéficiaires des actions pour le développement local à leurs mécènes. Autrement dit, les Chefferies se présentent comme les espaces où se pratiquent les dons et les contre dons (voir Marcel Mauss, 1924) ; ce qui revient à dire que les actions posées par les promoteurs du développement local dans les Chefferies de Nkol-Metet participent davantage à `'sauver la face''.

    La marchandisation des Chefferies traditionnelles à l'ère de la libéralisation politique sied bien avec le processus de la décentralisation, qui fait un point d'honneur au développement local. La Loi n° 2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation de la décentralisation administrative au Cameroun le renchérit en son article 2 alinéa 2 en stipulant :

    «  La décentralisation constitue l'axe fondamental de promotion du développement, de la démocratie et de la bonne gouvernance au niveau local ».

    Dans le même sillage Yves Poulin affirme :

    « la décentralisation accroîtrait la compétition entre gouvernements locaux et encouragerait de ce fait l'innovation » (Yves Poulin, 2004 :3).

    A Nkol-Metet, cela se fait ressentir dans les Chefferies par la multiplicité des projets communautaires orchestrés et impulsés par les forces politiques toutes obédiences confondues.

    Il nous échoit, dans cette section d'examiner les Chefferies traditionnelles Bene comme arène pour le contrôle du développement local et aussi évaluer la Chefferie traditionnelle comme un niveau des pouvoirs dans les jeux de la décentralisation.

    Paragraphe 1 : Les Chefferies comme arène de compétition pour le contrôle du développement local

    Les Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet, sont relativement en pleines mues depuis l'implémentation de la décentralisation, qui exige la prise des initiatives pour le développement local. En d'autres termes, les Chefs traditionnels sont de plus en plus les promoteurs du développement local. Dans cette noble tâche, d'autres acteurs comme les élites, les associations apolitiques et politiques leur apportent un soutien absolument nécessaire, dans l'optique de revigorer la Chefferie traditionnelle dans cette aire culturelle.

    Le présent paragraphe, qui a pour objectif d'étayer la dynamique compétitive des Chefferies comme arène pour le contrôle du développement local à Nkol-Metet, sera évalué à travers deux points cardinaux. Le premier point, consiste à analyser l'impact de l'association des Chefs traditionnels de Nkol-Metet (ACTRAN) comme un cadre théorico- pragmatique du développement local des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet ; le deuxième point, consistera à analyser l'implication responsable des Chefs traditionnels pour le développement local.

    A- L'ACTRAN : un catalyseur théorico-pragmatique du développement local des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet

    L'ACTRAN est une association créée en 1998 par Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé. Au-delà de ses missions régaliennes qui sont l'information et la formation des Chefs traditionnels, la promotion du développement économique, et la revalorisation de la tradition. L'ACTRAN est d'abord avant tout un espace de dialogue et de rencontre des Chefs traditionnels de Nkol-Metet. Cette association est reconnue comme légitime par tous les Chefs traditionnels de Nkol-Metet, dans mesure où ces derniers sont tous des adhérents ; en d'autres termes, cette association compte trente trois (33) Chefs traditionnels117(*). C'est fort de ce regroupement des Chefs traditionnels que Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé considère l'ACTRAN comme la véritable Chefferie de groupement à Nkol-Metet.il affirme que :

    « Loin d'être prétentieux, avant l'avènement des Chefferies de groupement à Nkol-Metet, j'étais déjà dans la peau d'un Chef de groupement ».

    Il convient cependant de relever que l'adhésion massive des Chefs traditionnels à ce mouvement  a plutôt des enjeux économiques. En effet, dans l'ACTRAN, les pratiques telles que les tontines, les prêts d'argent, le secours en cas d'événements heureux ou malheureux, obligent, loin s'en faut, l'adhésion des Chefs traditionnels. Ainsi dit, l'ACTRAN se présente comme un foyer de la mobilisation collective, mieux, de l'incitation à l'action collective. Et au regard des rivalités entre certains Chefs de ce mouvement, cette mobilisation à l'action collective peut être interprétée selon Mancur Olson(1966) qui affirme :

    «  Qu'un individu ne s'engage spontanément dans l'action collective qu'à condition d'y trouver un avantagepropre ».(Mancur Olson cité par Braud, 2008:397).

    Même si l'adhésion massive des Chefs traditionnels dans l'ACTRAN peut être analysée sous le prisme du mimétisme ou l'intérêt individuel, elle oblige néanmoins ceux-ci à surseoir quelque peu à leurs clivages, pour redonner du poil de la bête à leur pouvoir et à leurs Chefferies respectives.

    B- Implication responsable des Chefs traditionnels pour développement local

    Le développement local est devenu l'une des priorités majeures des Chefs traditionnels de Nkol-Metet et ceux-ci sont encouragés par l'ACTRAN. Certains Chefs traditionnels se sont activés pour requinquer leur Chefferie traditionnelle. Nous l'avons davantage observé dans les Chefferies où les élites étaient très peu nombreuses ou désorganisées. Dans le présent point, nous ferons référence à deux Chefferies de 3e degré qui ont été relativement revigorés par l'engagement ostentatoire de leur Chef traditionnel. Dans le cas d'espèce, nous analyserons autant que faire se peut, le rôle de la Chefferie d'Awäe pour le développement local et aussi la Chefferie de Bikoko et la relance de l'association Renaissance de Bikoko.

    1- La Chefferie d'Awäe au service du développement local

    Le présent point est organisé autour de trois articulations : l'exemplarité de Sa Majesté Oyono Owono Joseph, son activisme communautaire au service du développement local à Awäe et enfin le développement du service sanitaire.

    1-1- Exemplarité de Sa Majesté Oyono Owono Joseph

    Après 27ans de carrière comme Ingénieur Agronome (1967-1994 nous reviendrons dans le prochain chapitre sur sa biographie), Sa Majesté Oyono Owono Joseph, une fois rentré au village de façon définitive, va se consacrer pleinement à l'agriculture. Son implication dans cette activité est également motivée par l'ACTRAN, qui invite les Chefs traditionnels à sortir de leur pauvreté ambiante en les exhortant à pratiquer entre autre chose l'agriculture. C'est donc fort de ces objectifs, que Sa Majesté Oyono Owono Joseph va créer deux plantations agricoles depuis 1997. La première plantation est une cacaoyère, qui couvre une superficie de quatre hectares. La seconde, est une palmeraie d'une superficie d'un hectare. Ainsi, hors mis sa pension de retraité, Sa Majesté, nous fait savoir que les ventes des produits de ses exploitations lui ont permis de prendre soin de sa trentaine d'enfants, et surtout, lui ont permis de bâtir sa maison de retraite. C'est au regard d'une telle réussite personnelle comme dans le `'mythe de la caverne de Platon'' que Sa Majesté Oyono Owono Joseph, va impulser les activités communautaires à Awäe.

    1-2 - L'activisme communautaire au service du développement personnel et local à Awäe

    A Awäe, le secteur le plus florissant en termes de développement local et économique est le secteur agricole. Ce village est l'un des greniers de la commercialisation des vivres à Nkol-Metet. Dans ce village, on trouve de très grands cultivateurs de macabo, de patates et de bananes plantains qui s'assemblent de plus en plus en groupes d'initiatives communes (GIC). Ce faisant, à Awäe, un seul GIC bénéficie du soutien réel du Chef Oyono Owono Joseph qui est le conseiller dudit groupe. Ce GIC se dénomme, Sangoula mot ane ngul a monyan. L'on peut traduire la dénomination de ce GIC en langue française : `'l'union fait la force''. Ce GIC a opté pour la culture de rente du palmier à huile. La plantation de ce GIC, couvre une superficie de 10 hectares et son président est Amougou Mfomo Jean, lui aussi Ingénieur des Postes et Télécommunications retraité.

    Ce GIC a donné naissance à une tontine. Celle-ci a pour vocation de discipliner la gestion des ressources financières obtenues de la vente de l'huile de palme, et surtout favoriser l'essor personnel des individus. C'est ainsi, que tous les membres de ce GIC sont ex officio, de cette tontine. Cette tontine a un caractère obligatoire pour les membres du GIC et limite de ce fait, le désir de dilapidation de l'argent obtenu de leur dur labeur dans les débits de boisson. A côté de cette vie agricole, la bonne collaboration de Sa Majesté Oyono Owono Joseph, avec les élites de son village a permis de donner une plus-value au domaine scolaire et sanitaire dans le Village d' Awäe.

    1-3- Le développement du secteur scolaire et sanitaire à Awäe

    A Awäe, les bonnes relations élites- Chef traditionnel ont permis d'améliorer le secteur scolaire et sanitaire dans ce village. Jusqu'en 2009, les écoliers ayant fraîchement obtenus leurs certificats d'études primaires (CEP), étaient contraints de faire leurs études secondaires soit au lycée d'Efoulan- Metet par Nkol-Metet soit alors au lycée de Zoétélé. Ceci est devenu un lointain souvenir, car l'école s'est rapprochée d'eux depuis 2010, Awäe bénéficie d'un collège d'enseignement général (CES). Sur le plan de l'éducation de base, depuis 2000 Awäe a une école maternelle qui, en 2011, s'est vue doter de nouveaux bâtiments. Enfin, sur le plan sanitaire, Awäe possède désormais un dispensaire depuis 2011, pour la santé de ses populations et celles des villages voisins.

    Il en ressort qu'à Awäe, l'agriculture est le levier principal dont s'est servi Sa Majesté Oyono Owono Joseph pour actionner le développement local dans sa Chefferie. C'est à l'aide de ce même levier que Sa Majesté Mva Kouma Emmanuel s'est servi à Bikoko, mais cette fois-ci à une ampleur très réduite.

    2- La Chefferie de Bikoko et la relance de l'association `' Renaissance de Bikoko''

    Bikoko est l'un des trois villages Yembäe de l'Arrondissement de Nkol-Metet, qui fait partie de la Chefferie de groupement BENE- Sud- Est. Il est situé à cinq kilomètres à l'Est de Nkol-Metet. Mva Kouma Emmanuel est l'actuel Chef de ce village et il est en effet, le troisième dudit village depuis sa création. Il succéda à son père Sa Majesté Kouma Mva Louis, qui succéda lui-même à Owono Joseph, premier Chef de Bikoko. Du temps de sa Majesté Kouma Mva Louis, sera créée une association en 1973, dénommée `'Confiance deBikoko''. A cette époque, Ngono Mina était la Présidente, et avait pour Secrétaire Général Sa Majesté Kouma Mva Louis. Ladite association axait ses activités principalement dans l'agriculture notamment, dans les cultures du manioc et du macabo ; et dans le petit commerce à travers la vente du pétrole et de l'essence. Cette association, au regard du vieillissement de ses membres et de la mort de certains, a connu une forte décrépitude. Avec le rajeunissement de la population de Bikoko et l'intronisation de Sa Majesté Mva Kouma Emmanuel, confiance de Bikoko, sera rebaptisée en 2005, `'Renaissance de Bikoko''. Dans le cadre de ce paragraphe, nous éluciderons le leitmotiv de la résurrection de `'Renaissance de Bikoko'' avant d'en dégager l'impact de ladite association dans la Chefferie de Bikoko.

    2-1- Le leitmotiv de Renaissance de Bikoko

    Lors de notre entretien du 16/08/2011 avec Sa Majesté Mva KoumaEmmanuel à Bikoko, ce dernier a dégagé la quintessence du retour de l'association Renaissance de Bikoko en ces termes :

    «  Chez nous à Bikoko, nous sommes considérablement dépourvus d'élites importantes ; or, notre village ne doit pas être à la remorque d'autres ou de se complaire dans sa petitesse. Ainsi, bien que peu nombreux, nous avons relancé les activités de notreassociation, qui jusqu'alors commençait à battre de l'aile ; c'est pourquoi, nous l'avons rebaptiséRenaissance de Bikoko. Nous voulons nous servir d'elle pour faire émerger notre village ».

    C'est au regard d'une telle ambition que les membres de ladite association se sont mis en action. Depuis son retour en 2005, cette association a déjà connu trois présidentes de 2005 à 2008 Mballa Evelyne ; de 2008 à 2011  Nteme Orchelle ; et actuellement son nouveau Président depuis 20 12 c'est Mbang Kouma Jeanne. Et depuis sa renaissance, Sa Majesté Mva KoumaEmmanuel occupe le poste de secrétaire général de ladite association.

    Une fois ayant apporté un éclairci sur l'association Renaissance de Bikoko, il nous incombe d'analyser son impact sur sa sphère locale.

    2-2- Impact de `'renaissance de Bikoko'' sur sa sphère locale

    L'association dénommée Renaissance de Bikoko, est une association qui compte trente cinq membres (35), les trois quarts sont des femmes. Cette association, depuis sa renaissance se consacre essentiellement dans l'agriculture. Par exemple, en 2010, elle créera deux champs communautaires : un hectare de manioc et un demi-hectare de maïs. Les premières ventes des produits de ces champs leur ont donné 50.000 francs Cfa pour le manioc et 30.000 francs Cfa pour le maïs. Ces revenus ont été redistribués en partie aux différents membres et l'autre partie a servi de base de financement pour l'achat du pagne. En dehors du soutien que cette association apporte à ses différents membres, depuis 2005, malgré ses moyens modiques, Renaissance de Bikoko encourage les meilleurs élèves du village en leur octroyant quelques fournitures scolaires à chaque rentrée scolaire.

    Depuis fin 2010, ladite association entend accroître ses espaces cultivables et est entrain d'étendre ses activités à l'élevage des poulets.

    Au demeurant, il ressort de ces deux expériences que la reviviscence de la Chefferie amorcée est probante et a emprunté principalement les méandres de l'agriculture. Cette reviviscence dans ces deux cas, est bien orchestrée par ses Chefs traditionnels.

    Paragraphe 2 : la Chefferie traditionnelle comme niveau des pouvoirs dans les jeux de la décentralisation

    L'arrivée de Joseph Ndi Samba comme Maire de la Commune de Nkol-Metet en 2007 a eu un double impact. Le premier impact, concerne les missions régaliennes de la Mairie qui ont transformé l'Arrondissement deNkol-Metet en un véritable chantier118(*). Le second impact, qui fait l'objet de notre attention, est l'implication grandissante des Chefs Traditionnels de Nkol-Metet dans le processus de la décentralisation. Cette sollicitation des Chefs Traditionnels dans ce processus peut-être analysé à deux niveaux : le premier niveau, est lié au fait que Joseph Ndi Samba est l'un des pro défendeurs des traditions BENE,119(*) le second niveau d'analyse, résulte d'une conséquence logique, dans la mesure où, pour élaborer une politique efficace et efficiente de la décentralisation, les Chefs Traditionnels sont mieux placés pour fournir les informations adéquates au regard de leur proximité avec les populations locales.

    La présente section est organisée autour de deux paragraphes : le premier paragraphe consiste à mettre en exergue l'enrôlement des Chefs Traditionnels dans le processus de la décentralisation àNkol-Metet. Le deuxième paragraphe, quant à lui, analyse l'action des Chefs Traditionnels dans la mise en scène de la décentralisation dans les villages deNkol-Metet.

    A- Enrôlement des Chefs traditionnels de par la Mairie

    Nous analyserons, dans le cadre de ce paragraphe, le rôle consultatif des Chefs traditionnels dans le processus de la décentralisation à travers leur participation lors des Conseils Municipaux et lors de la survenue de certains événements conjoncturels comme les séminaires d'imprégnation sur la décentralisation et des fléaux sociaux comme l'inceste et la sorcellerie.

    1- Assistance des Chefs traditionnels lors des conseils municipaux

    De 2007 à 2012, les Chefs Traditionnels ont participé à quatre conseils municipaux (1 conseil ordinaire, et 3 conseils extraordinaires).

    S'agissant des Conseils Municipaux ordinaires, les Chefs Traditionnels n'ont pris part qu'à un seul. Ce qui n'enlève en rien l'importance de leur présence significative à cette instance plénière.

    En effet, le Conseil Municipal de Juin 2010 avait parmi ses points à l'ordre du jour, le développement de l'habitat dans les villages de Nkol-Metet, en promouvant la construction des bâtiments avec les briques120(*) de terre qui sont très économiques pour les ménages à revenus limités. C'est ainsi que pour passer à l'acte, le Conseil Municipal deNkol-Metet dota à chaque Chefferie un moule de briques de terre pour encourager les constructions à l'aide de ce matériel, ce qui correspond à un total de trente deux (32) moules de briques de terre. L'usage de ces moules est gratuit pour toute personne les sollicitant dans le village, pour une durée maximum de deux (02) mois. Le conseiller municipal de chaque village respectif, est chargé de veiller au bon usage de cet appareil, et est sommé de rendre compte de l'emploi dudit matériel lors des sessions ordinaires du Conseil Municipal. A défaut des personnes sollicitant ces moules, la Mairie a incité les Chefs à créer des fabriques de briques de terres dans leur Chefferie respective.

    S'agissant des Conseils Municipaux extraordinaires, les Chefs Traditionnels ont été sollicités à trois reprises au cours de l'année 2011. Mais cette fois- ci leur convocation émane du partenariat PNDP-Mairie qui s'est réunis pendant trois trimestres qui correspondaient aux trois phases121(*) du Plan de Développement Communautaire (PDC), qui s'est achevé le 26 novembre 2011. Le PDC deNkol-Metet ne pouvait se faire sans l'intervention des Chefs Traditionnels qui devaient fournir à leur municipalité les besoins réels des populations qui sont sous leur autorité, afin de solutionner spécifiquement leurs attentes. Il ressort de cette action la fourniture d'une dizaine de puits d'eau potable à motricité humaine, estimée à plus de quatre vingt millions de francs Cfa, et l'extension du réseau électrique122(*) dans l'ensemble des villages deNkol-Metet, étant encore dépourvue de courant électrique, cette activité a été estimée a plus de cinq cents millions de francs Cfa. Tout ceci pour le bien-être des populations.

    Les Chefs Traditionnels dans cet exercice ont su recenser de manière optimale les besoins les plus indispensables de leur population123(*).

    2- Sollicitations des Chefs lors de la survenue des événements conjoncturels

    En dehors des séminaires d'imprégnation sur le processus de la décentralisation, qui sont constamment organisés par la Mairie de Nkol-Metet et animés par les organismes comme le PNDP. Au mois de Juin 2010, Joseph Ndi Samba a interpellé le Chef de groupement BENE Nord Est, Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, afin d'estomper l'inceste qui se développe de plus en plus dans l'ethnie BENE Mvog Amougou. Au cours de la même année, cette fois -ci dans un cadre plus global, ensemble avec les Chefs Traditionnels, ils ont essayé de trouver une solution pour se débarrasser d'une panthère sorcière124(*) àNkol-Metet qui tuaient caprins, moutons, porcs et volaille, et causait une véritable entrave pour l'élevage dans cette localité. On ne sait comment, à l'issue de cette rencontre, la panthère a disparu, certainement les Chefs ont su relayer cette information aux `'sorciers''du village. Du reste, on se rend compte qu'àNkol-Metet la décentralisation informelle traditionnelle, a précédé la décentralisation formelle. C'est pourquoi, les Chefs Traditionnels de Nkol-Metet ont su s'adapter à ce nouveau processus.

    B- Les Chefs traditionnels metteurs en scène du processus de la décentralisation dans les Chefferies de Nkol-Metet

    Quand on regarde les orientations qu'entrevoit l'article 55 de la loi n°96/06 du 18/01/1996, pour les collectivités territoriales décentralisées dans les missions de promotion du développement économique, social, sanitaire, éducatif, culturel et sportif de ces collectivités, on se rend compte que ces missions à Nkol-Metet trouvent leur centre d'impulsion au niveau de la Chefferie traditionnelle. La présente section sera bâtie autour de deux points. Le premier point analyse la catalyse du processus de la décentralisation par les Chefs Traditionnels de Nkol-Metet. Le deuxième point quant à lui, analyse leur rôle dans le relais des informations aux populations.

    1. Catalyse du processus de la décentralisation à Nkol-Metet

    Dans le cadre de ce chapitre, nous avons vu le rôle déterminant joué par les Chefs Traditionnels à travers les associations de la Chefferie traditionnelle. On a par exemple vu le rôle de Nkul Mbiba Nga Mballa à Obout dans la promotion économique d'Obout, de l'ASFRADO à Oveng pour le développement éducatif et sanitaire...

    Au demeurant, l'association la plus illustre en termes d'impulsion du développement local au niveau de la Chefferie traditionnelle, est l'ACTRAN (Association des Chefs Traditionnels de l'Arrondissement deNkol-Metet).

    L'action de l'ACTRAN a des répercussions positives, car c'est à partir d'elle que beaucoup de Chefs Traditionnels BENE de Nkol-Metet se sont inscrits comme les acteurs du développement local125(*), en initiant des projets communautaires. En dehors de son action directe sur les Chefs Traditionnels à travers ses différentes réunions, l'ACTRAN incite les élites à les soutenir dans leurs actions, en les aidants à booster le développement en zones rurales. L'ACTRAN est également un cadre réflexif où les Chefs Traditionnels s'informent et se forment sur leurs rôles vis-à-vis de l'autorité administrative d'une part, et leurs administrés d'autre part. Mais aussi, sur les rôles qu'ils doivent jouer dans le processus de la décentralisation (Bassemeg, 2000 : 21).

    2. Le relais des informations aux populations sur le processus de la décentralisation  

    Quoique de manière formelle, la gestion des intérêts régionaux et locaux est reconnue aux Régions et aux Communes qui sont les instances appelées à jouer ce rôle, celles-ci apparaissent comme des cadres finaux d'impulsion de la décentralisation.

    En d'autres termes, à l'intérieur de ces Régions et Communes les Chefferies jouent un rôle très déterminant pour l'effectivité de ce processus, elles sont même le premier maillon de ce processus. C'est ce qui a certainement poussé Sa Majesté Oyono Owono Joseph à affirmer empiriquement :

    « Le Maire ne peut rien faire de probant sans le soutien des Chefs traditionnels».

    Ce soutien de la Mairie se traduit de façon concrète dans la transmission des informations aux populations sur toutes les activités concernant le processus de la décentralisation. C'est pourquoi à Nkol-Metet, le PNDP travaille en intelligence avec les Chefs Traditionnels pour que ces derniers incitent leurs populations à des actions collectives à travers la création des GICS qu'ils pourront financer. Cette sollicitation des Chefs Traditionnels, nous ne le dirons jamais assez, est étroitement liée à la proximité des Chefs Traditionnels par rapport à leurs populations respectives qui maîtrisent le mieux la sociologie du milieu.

    Conclusion partielle

    Au terme de ce chapitre, il était question pour nous d'élucider les ressorts stratégiques de la Chefferie traditionnelle Bene à l'ère de la libéralisation politique. Force pour nous est de constater, qu'on peut mieux les appréhender à travers l'action des forces vives de Nkol-Metet pour la revitalisation des Chefferies traditionnelles.

    Au demeurant, leur action n'est pas que philanthropique, dans la mesure où elles constituent les jalons de la construction de leur leadership et surtout pour mieux avoir une emprise certaine sur les Chefferies traditionnelles, qui avec leur intégration dans les conseils régionaux ont de facto, un rôle décisif à jouer lors des sénatoriales à venir.

    Chapitre 4 : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique

    La décentralisation au Cameroun impulsée par la libéralisation politique, a contribué à hisser les Chefs traditionnels parmi les promoteurs des activités socioéconomiques et sociopolitiques ; ceci dans l'optique d'améliorer les conditions de vies des populations de leur terroir respectif dans des domaines divers tels que : l'agriculture, la santé, l'éducation et le militantisme politique... C'est dans cet ordre d'idées, qu'Eko'o Afane (2009) voit en la décentralisation le moteur de ces dynamismes. C'est pourquoi il affirme :

    « La décentralisation est à coup sûr, l'une des réformes majeures de ces temps. C'est une onde de choc qui ébranlera les uns après les autres, tous les domaines de l'action publique, et la vie quotidienne des citoyens ». (Eko'o Afane, 2009 :13).

    A Nkol-Metet, des Chefs traditionnels ont su s'arrimer à cette nouvelle donne ; aussi, leur passif d'acteurs politico administratifs et leurs capitaux politico-économiques et politico-culturels ont davantage favorisé leur adaptation et ont fait d'eux, des entrepreneurs coutumiers du pouvoir. Aussi, leur investissement des Chefferies traditionnelles sont parfois des subterfuges qu'ils usent pour mieux opérer leurs calculs politiques.

    Tous ces dynamismes participent à mieux évaluer la place des Chefs et des Chefferies traditionnelles dans un contexte de libéralisation politique, mieux, de la décentralisation ; d'abord, par leur engagement politique qui se traduit par leur militantisme avéré, leur donne un certain zèle à être partie prenante des compétitions électorales telles que les législatives et les municipales ; ensuite par leur mobilisation dans les processus politiques et économiques de la décentralisation.

    Ainsi balisé les ressorts pragmatiques des Chefferies de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique, le présent chapitre repose sur deux sections : La première section nous permettra de décrypter les Chefferies traditionnelles comme lieu d'activités socioéconomiques ; la deuxième section, nous mènera à évaluer et à prospecter la place des Chefs et des Chefferies traditionnelles dans les activités de la libéralisation politique et de la décentralisation.

    Section 1 : Les Chefferies traditionnelles comme lieu d'activités socioéconomiques

    La libéralisation politique et mieux encore la décentralisation sont venues intensifiées les activités socioéconomiques dans les Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet. Cette entreprise s'est concrétisée par des Chefs politiciens investisseurs, mieux encore par des Chefs professionnels de la politique126(*). Ces derniers essayent autant que faire ce peut, de transformer les Chefferies traditionnelles en véritables pôles de développement sociopolitique et socioéconomique.

    Pour apporter une lumière à ces faits politico -conjoncturels et économico-conjoncturels, il nous échoit d'abord, d'examiner les trajectoires des Chefs traditionnels en tant qu'entrepreneur coutumier du pouvoir et ensuite d'analyser les Chefferies traditionnelles comme lieux d'investissements socioéconomiques.

    Paragraphe 1 : Les trajectoires des Chefs comme entrepreneurs du pouvoir coutumier

    L'examen des Chefs comme entrepreneurs coutumiers du pouvoir coutumier, nous contraint en quelque sorte à effectuer une identification sociopolitique des Chefs entrepreneurs. En effet, l'identification sociopolitique des acteurs trouve son fondement dans la méthode biographique, qui est très mobilisée par l'école de Chicago. Cette méthode permet de donner un sens aux interactions des acteurs dans leur champ social ; dans la mesure où, elle cherche à reconstituer l'histoire de vie d'un individu à partir de ses propres déclarations ou des documents fournis par l'individu lui-même (voir Alpe, 2005 :160). Aussi, si les Chefs entrepreneurs sont considérés comme faisant partie de la classe élitaire de Nkol-Metet, nous serons amenés à dégager essentiellement quatre aspects 127(*): leur origine sociale et leur recrutement politique, les qualités qui semblent assurer le succès et les modalités de leur carrière, la manière de penser et la cohérence des membres de cette catégorie.

    Dans le cadre de notre recherche, ce sont les entretiens semi-directifs qui nous ont essentiellement fournis ces informations. En s'inscrivant dans cette perspective, notre analyse va se limiter aux Chefs traditionnels à Nkol-Metet qui ont eu à occuper de très hautes fonctions politico-administratives et qui par leurs investissements sociaux sont devenus des personnalités ressources et des dignitaires assermentés du pouvoir politico- traditionnel et du pouvoir politico-administratif. Nous identifierons sur cette base Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin Chef de groupement Bene-Nord-Est; Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé Chef de groupement Bene-Sud-Est et enfin Sa Majesté Oyono Owono Joseph Chef de 3e degré de la Chefferie d'Awäe par Nkol-Metet.  

    A- Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin : De la carrière politico-administrative à la Chefferie traditionnelle

    Dans le présent point, il s'agit pour nous de faire l'identification sociopolitique de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin d'une part, et d'autre part il s'agira de présenter succinctement ses investissements sociaux avant son accession au trône de la Chefferie traditionnelle notamment la Chefferie de groupement Bene-Nord-Est sis à Metet-centre.

    1- Identification sociopolitique de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin

    Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin est né le 08 octobre 1938 à Metet-Centre. Il est de l'ethnie BENE Mvog Amougou. Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin fit les études primaires à la Mission Presbytérienne Américaine de Metet où il obtient son C.E.P.E en 1955. A l'Enseignement Secondaire il fréquenta tour à tour au Collège Protestant de Metet de 1955 à 1956 et de 1957 à 1958. De 1956 à 1957 au Collège Adventiste de Nanga Eboko ; à Douala au Collège de Bali de 1959 à 1960 et enfin au Collège Montaigne où il obtient son B.E.P.C en 1961 en classe de Seconde. Un an après, en classe de première, il mettra fin à ses études pour s'insérer dans la vie Socioprofessionnelle. Il sera recruté dans l'enseignement en 1962 ; ainsi de 1962 à 1966, il sera tour à tour enseignant à l'école primaire norvégienne de Dagai à Maroua128(*); à l'école primaire d'Ayéné par Nkol-Metet, où il sera même directeur ; au Collège Protestant de Metet, enfin à l'Ecole Normale des Instituteurs de Foulassi. C'est de là qu'en 1966, il réussit au concours des Adjoints d'Administration en étant neuvième sur les quarante admis. Il débute sa carrière administrative à la Sous préfecture de Nguelemendouga en 1966 dans la Région de l'Est, où il est chargé de la coordination des activités. En 1969, il sera affecté à la préfecture de Nkongsamba et occupera le poste de Chef de la section économique. En 1970 il fut affecté à la préfecture d'Abong Bang où il sera le Chef du Secrétariat particulier du Préfet. Au cours de l'année 1970, il sera promu Adjoint d'Arrondissement à Obala et sera chargé des affaires liées à la Chefferie traditionnelle et au monde rural. En 1971 il sera à nouveau promu comme Chef de District de Bikok129(*). En 1974, à l'issue de l'érection du District de Bikok en Arrondissement, il fut nommé comme le tout premier Sous Préfet de l'Arrondissement de Bikok. Ayant le vent en poupe toujours à Bikok, à la suite du décès du Maire de Bikok d'alors Mbala Yene Pierre en 1974, il fut nommé Maire cumulativement avec ses fonctions de Sous Préfet de l'Arrondissement de Bikok. Par la suite, son cumul de fonctions de Sous Préfet, Maire est devenu pour lui une particularité après Bikok. Il fut également Sous Préfet Maire des Arrondissements de Ntui en 1976, puis de Bot-Makak de 1977 à 1980 (où il a été victime d'une tentative d'empoisonnement). En 1980, il fut nommé Maire de la Commune rurale de Mbalmayo où il occupera le poste jusqu'en 1996 quand survient l'éclatement de cette Mairie de Mbalmayo en trois autres (Mengueme, Akoeman, Nkol-Metet). De 1996 à 2007 il fut Conseiller Municipal à la Commune de Nkol-Metet. En 2008, il est désigné Chef de groupement et devient de facto membre de l'ACTRAN. Il est aujourd'hui son vice Président. De même, au niveau de l'ACTRANSO, (Association des Chefs Traditionnels du Nyong et So'o), il est l'un des vices présidents. Il est également un membre actif de l'Ekoan Mvog Amougou. Nous ne saurions terminer cette présentation sans évoquer que Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin est un officier supérieur de réserve. Il fit son service militaire à Ngaoundéré alors qu'il était Sous Préfet Maire de Ntui, dans le Département du Mbam et Inoubou, Région du Centre. Aussi, il aura été en 1987, secrétaire de la section RDPC Nyong et So'o et Vice- Président de la Sous-section RDPC de Nkol-Metet de 1996 à 2002.

    2- Investissements sociaux de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin

    Avant 1996, la ville de Mbalmayo abritait en son sein deux communes : une commune urbaine constituée de quatre villages et une commune rurale 130(*)constituée de 85 villages qui étaient repartis dans les ex Districts de Mengueme, Akoeman et Nkol-Metet131(*). Le caractère cosmopolite et économique de cette ville, a vu l'émergence des Bamiléké dans cette ville qui démographiquement, économiquement et politiquement contrôlait peu à peu la ville de Mbalmayo au détriment des populations `'autochtones''. C'est au regard d'un tel état de choses que Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin entrera en concertation avec le Maire de la commune urbaine de Mbalmayo d'alors Stanislas Aba'a ; puis avec le Préfet du Nyong et So'o d'alors Yene Ossomba. En plus des arguments évoqués sur l'ethnicité, Mbala Zangana Benjamin fera savoir que la coutume administrative envisageait que pour chaque District ou Arrondissement, il fallait aussi la présence d'une Mairie. Or, les Districts de Nkol-Metet ; d'Akoeman et de Mengueme nouvellement créés en étaient dépourvus. C'est au regard de ses arguments probants que le Préfet Yene Ossomba transmettra les doléances de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin à sa hiérarchie qui eut par la suite gain de cause. Ainsi la carte communale dans le Département du Nyong et So'o sera reconfigurée132(*).

    Tableau 13 : Répartition des Communes après éclatement de la Commune de Mbalmayo

    Communes

    Nombres

    Villages

    Type de la commune

    Mbalmayo

    1

    27

    Commune Urbaine

    Nkol-Metet

    1

    32

    Commune Rurale

    Akoeman

    1

    12

    Commune Rurale

    Mengueme

    1

    18

    Commune Rurale

    Source : archives de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin

    Il n'existera désormais à Mbalmayo qu'une seule Commune qui est passée de quatre villages à vingt sept villages133(*) . Bref, l'avènement de la Commune rurale de Nkol-Metet, laisse transparaître l'action énergétique de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin qui a oeuvré pour que le commandement local soit une affaire des autochtones.

    Si l'action de Mbala Zangana Benjamin en tant que Maire de la commune Rurale de Mbalmayo a joué un rôle majeur pour la naissance d'une Commune rurale à Nkol-Metet, Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, en tant que Député et Président de la Section RDPC Nyong et So'o, par contre, a transformé l'Arrondissement de Nkol-Metet en une banque de votes.

    B- Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé : du capital politique à la Chefferie traditionnelle

    Dans le présent point, il s'agira aussi pour nous de faire l'identification sociopolitique de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé d'une part, et d'autre part il s'agira de présenter succinctement ses investissements sociaux avant son accession au trône de la Chefferie traditionnelle notamment la Chefferie de groupement Bene-Sud-Est sis à Nkol-Ekabili.

    1- De l'identification sociopolitique de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé 

    Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé est né le 17 Juillet 1955 à Nkol-Ekabili. Il est de l'ethnie BENE Mvog Essissima134(*). Il fait ses études primaires dans son village Nkol Ekabili puis à l'Ecole Rurale de Ngoantet, dans laquelle il obtiendra son CEPE (Certificat d'Etudes Primaires Elémentaires). Il poursuivit ses études secondaires au Collège Catholique Sacré Coeur de Makak, où il obtient son BEPC (Brevet d'Etude du Premier Cycle) en 1973, il obtient son Probatoire C en 1975, en 1976 son Baccalauréat C, et au cours de la même année il s'inscrit à l'Université de Yaoundé, dans la filière Maths Physique et ne fera que la première et la deuxième année. Son engagement chrétien notamment dans le Mouvement de l'Action Catholique où il était l'un des responsables, lui valut une bourse en 1978, pour l'Université de Laval Québec au Canada, où il sortit nanti en 1983 d'une licence en informatique appliquée, option gestion d'entreprise. A son retour au Cameroun au cours de la même année, il fut recruté le 03 octobre à L'ONCPB (Organisme National de la Commercialisation des Produits de Base) sis à Douala, dans le Service Informatique (Centre informatique et méthode), où il sera sous Directeur de l'Informatique jusqu'à la fermeture de ladite société en 1990. Après la fermeture de l'ONCPB il se lancera dans le monde des affaires de 1990à1992 où il ouvrit deux structures l'une à but lucratif, qui était spécialisée dans les constructions et livraisons des matériels de construction ; et l'autre structure à but ludique, le cabaret Eden. Ses accointances avec Grégoire Owona135(*) l'ont amené à s'engager pleinement dans la vie politique en 1992. En 1993, lors des renouvellements des structures du parti RDPC, il est élu Président de la Sous Section RDPC Douala Nord. En 1996, il fut nommé par le Président de la République et Président du RDPC136(*) membre du Comité Central dudit parti. En 1997 à la suite du décès de son père, il viendra s'installer à Mbalmayo, puis à Nkol-Metet, où il poursuivra son militantisme dont le capital politique acquis à Douala Nord lui permit de briguer en 2002 la Présidence de la Section RDPC du Nyong et So'o Centre, du même coup l'un des deux candidats naturels de son parti à la députation137(*) du Nyong et So'o qu'il briguera d'ailleurs avec beaucoup de succès. La mort de son père en 1997, obligera Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé à faire un retour au village, car son père étant Chef et lui étant l'aîné, était pressenti à devenir le nouveau Chef de village de Nkol Ekabili ; c'est ce qui fut concrétisé le 28 avril 1998. C'est du haut de son trône qu'il vit la méprise et la déchéance de l'institution de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, qu'il sera motivé à créer L'ACTRAN138(*), qui vit le jour au cours de la même année de son intronisation. Il est son président depuis sa création. Ce qui lui a donné l'envergure d'un Chef de groupement. Il le renchérit si bien en ces termes :

    «  En étant Président de l'ACTRAN, je me suis toujours senti dans la peau d'un Chef de groupement, car l'ACTRAN regroupe tous les Chefs traditionnels de Nkol-Metet ».

    2- Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé et investissements sociaux

    Certes, l'activité politique vise d'abord un intérêt personnel, parfois l'intérêt personnel commute vers l'intérêt collectif, c'est dans ce sens que nous appréhendons l'action politique de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, sur la vie politique à Nkol-Metet pendant sa députation de 2002 à 2007. Pour Weber (1968 : 29) :

     « tout homme qui fait la politique aspire au pouvoir soit parce qu'il considère comme un moyen au service des autres fins idéales, ou égoïstes, soit qu'il le désire pour lui-même, en vue de jouir du sentiment qu'il confère ».

    L'oeuvre politique la plus significative de Sa Majesté et Honorable Ondoua Menyié Paul Aimé, à Nkol-Metet, est le fait d'avoir transformé l'Arrondissement de Nkol-Metet en une véritable banque de votes pour le RDPC. En effet, dès son avènement à la tête de la section RDPC du Nyong et So'o, Nkol-Metet ne comptait que trois Sous Sections. Or, pour donner un poids politique à son Arrondissement d'origine, l'Honorable Ondoua Menyié Paul Aimé fit éclater ces trois (03) Sous Sections en neuf (09) Sous Sections. Ainsi, en termes de pondération politique, dans le Département du Nyong et So'o, seuls les Arrondissements de Nkol-Metet et de Mbalmayo139(*) bénéficiaient de neuf (09) sous sections. En d'autres termes, Nkol-Metet à l'issue de cet éclatement, est devenu un véritable marché électoral et une nouvelle destination politique prisée pour les candidats aux élections législatives dans le Département du Nyong et So'o.

    Quid de Sa Majesté Oyono Owono Joseph.

    C- Sa Majesté Oyono Owono Joseph : de la haute administration aux fonctions de Chef traditionnel et de premier Magistrat municipal de Nkol-Metet.

    Le présent paragraphe sera bâti autour de deux points. L'identification sociopolitique d'Oyono Owono Joseph, et le deuxième point consistera d'examiner le contexte sociopolitique de sa victoire puis d'évaluer succinctement son bilan d'action en tant que Maire de Nkol-Metet.

    1- L'identification sociopolitique de Sa Majesté Oyono Owono Joseph

    Né le 07 janvier 1939 à Awäe, Sa Majesté Oyono Owono Joseph, est Ingénieur Agronome retraité, Officier d'Etat-Civil et militant du RDPC. Il fit ses études primaires à la Mission Presbytérienne Américaine (MPA) de Metet, où il obtient son C.E.P.E. Entré au Collège Evangélique de Libamba, il obtient un Baccalauréat en Sciences expérimentales. En 1967, il sort nanti du diplôme d'Ingénieur Agronome de la première promotion de l'Institut d'Agronomie de Nkol-Bisson. Celui-ci compléta sa formation par deux stages, en Italie où il se spécialisa en Economie Rurale, puis en Israël, en Economie Rurale de Planification. Ainsi, il devint Ingénieur Agro Planificateur. Au début des années 1970, il est recruté au ministère de l'économie et est affecté au service de la Normalisation et le Contrôle de la Qualité des Produits de Base à Douala pendant trois ans. Puis, il sera à la caisse cacao du même ministère et sera nommé Chef Service de la normalisation et contrôle de la Qualité. En 1978, il est nommé Délégué Départemental de l'Agriculture à Sangmélima. De 1981 à 1982, il est professeur au Centre Régional d'Agriculture d'Ebolowa (CRA). En 1983, il est nommé au Ministère de l'Agriculture, Délégué Provincial du Centre-Sud. En 1994 il prit sa retraite professionnelle. En 1996 il est élu Maire de la Commune de Nkol-Metet. Depuis 1997, il est planteur et dispose d'une cacaoyère de quatre (04) hectares, une palmeraie d'un (01) hectare.

    Oyono Owono Joseph est depuis le décès de son père Sa Majesté Owono Zouga Justin en 1975, Chef de 3e degré d'Awäe. En 1976, il devient Officier d'Etat-Civil, cependant, compte tenu de ses lourdes responsabilités d'abord en tant que haut fonctionnaire des Ministères de l'Economie et de l'Agriculture, de 1967 - 1994, puis de Maire de 1996 - 2002, il fut secondé dans sa fonction de Chef par son frère Ombgwa Jacques, qui est le Sous-Chef d'Awâe depuis 1976.

    La présence d'Ombgwa Jacques à ses côtés comme Sous-Chef lui permettra pendant cinq ans de s'occuper de la gestion quotidienne de la mairie pendant son mandat.

    2- Identification sociopolitique de la victoire de Sa Majesté Oyono Owono Joseph aux élections municipales de 1996 et Bilan d'activités

    Plusieurs facteurs ont contribué à l'élection de Sa Majesté Oyono Owono Joseph. Ces facteurs se résument dans le cumul des capitaux culturel, social et économique.

    Dans le cas d'espèce, ce capital culturel de Sa Majesté Oyono Owono Joseph dépend fortement de sa carrière d'Ingénieur Agronome et surtout de sa qualité d'Officier d'Etat Civil. Dans l'imagerie populaire, on reconnaît davantage sa formation d'Ingénieur Agronome comme l'un des facteurs déterminant à sa réussite. Mais selon Sa Majesté Oyono Owono Joseph, sa réussite notamment celle ayant trait à son capital culturel dépend grandement de sa fonction d'Officier d'Etat Civil, où il a dressé gratuitement des milliers d'actes d'Etat Civil. C'est entre autre la reconnaissance des bénéficiaires de ses largesses qui lui ont permis d'avoir un capital social assez consistant.

    S'agissant des capitaux économiques et sociaux, ce sont eux qui ont été les plus prépondérants dans l'émergence de Sa Majesté Oyono Owono Joseph. Selon la déclaration de Sa Majesté Oyono Owono joseph, il acquit son capital économique quand il était fonctionnaire à Douala, notamment quand il occupait les fonctions de Chef Service de la Normalisation et de Contrôle de la Quantité. Ce dernier nous révèle avoir eu de nombreuses entrées économiques constituées d'une part, de son salaire, et d'autre part, de la reconnaissance140(*) des producteurs agricoles qui lui offraient souvent d'importantes sommes d'argent. Avec ce capital économique, il avait de quoi nourrir par jour des centaines de personnes chez lui, il nous le fait savoir en ces termes :

    « A mon domicile, je n'arrivais plus à identifier les résidents de ma maison. Une fois que quelqu'un me faisait savoir qu'il provenait de Nkol-Metet, il trouvait abri à mon domicile. Parfois le matin au réveil, je trouvais à mes salles de séjour endormis de trentaines d'individus qui venaient je ne savais pas toujours avec exactitude, mais je devinais qu'ils étaient les miens ».

    Ce capital économique de Sa Majesté Oyono Owono Joseph lui a également permis de constituer son capital social, qui a été le capital le plus déterminant pour son succès électoral.

    Les services rendus à plusieurs individus et à certains dignitaires alors qu'il occupait les postes d'Ingénieur Agronome et surtout d'Officier d'Etat Civil lui ont permis de constituer son capital social. Sa majesté Oyono Owono Joseph était devenu un homme très populaire à Nkol-Metet, et il fut soutenu par les élites administratives et économiques les plus importantes de cette localité. Il affirme à cet effet :

    « ma réussite à cette élection a fortement dépendu du soutien du richissime homme d'affaires Joseph Ndi Samba, et son Excellence Mbarga Nguélé Martin alors Ambassadeur du Cameroun au Brésil pour qui, j'ai célébré son mariage à l'Etat Civil ».

    La combinaison de ces trois capitaux a amené le Comité Central du RDPC à entériner la candidaturede Sa Majesté Oyono Owono Joseph.

    S'agissant de son bilan d'activités en tant que Maire, il n'est pas un bilan assez florissant. Ceci est aussi lié au caractère nouveau de cette institution dans l'Arrondissement de Nkol-Metet. L'oeuvre la plus concrète d'Oyono Owono Joseph à la Mairie de Nkol-Metet, est l'acquisition d'un camion à benne basculante. Les locations de ce camion ont fait passer les recettes de la Mairie de Nkol-Metet de sept millions à 1996 à cinquante millions à la fin de son mandat en 2002.

    Au niveau de sa Chefferie à Awäe, il a contribué à faire de son village l'un des trois pôles économiques141(*) majeurs de l'Arrondissement de Nkol-Metet, en accordant de nombreuses patentes pour l'acquisition de nombreuses échoppes Commerciales ; on en dénombre une dizaine et cela a contribué à l'épanouissement économique et à l'essor social des populations de son village.

    Si la Chefferie traditionnelle a été honorée à l'élection d'un Chef traditionnel comme le tout premier Maire de l'Institution Communale dans cette localité, depuis lors, l'implication des Chefs traditionnels à Nkol-Metet dans le processus de la décentralisation va crescendo.

    Paragraphe 2 : Les Chefferies traditionnelles comme lieux d'investissements sociopolitiques

    Les Chefferies traditionnelles sont de plus en plus investies par des Chefs traditionnels jouissant des capitaux à la fois symboliques, culturels, économiques et sociaux. Leurs investissements ne sont pas anodins et ont même une portée ambivalente. D'une part ils permettent principalement de conforter leurs assises politiques ; d'autre part ils permettent par ricochet à leur communauté d'engranger quelques dividendes de leur activité politique. Tout ceci participe de la grammaire de l'interaction (work face)142(*) ; et selon Goffman, pour établir sa face, il faut :

    «  satisfaire les attentes normatives des autres, ce qui revient à respecter leur personnalité puisqu'en satisfaisant leurs attentes, je rends hommage à la parcelle sociale qui est incarnée en eux, à leur aptitude à être eux- mêmes des acteurs sociaux compétents. Je ne peux établir ma face sans établir celle de l'autre et je ne peux établir celle de l'autre sans établir la mienne, dans la mesure où ce qui constitue la face d'une personne est l'ensemble des croyances sociales sur les exigences de telle ou telle situation » (Goffman cité par Céline Bonicco, 2006 :37)

    Les profils biographiques  des Chefs identifiés dans le paragraphe précédent posent les jalons probants d'une telle thèse dans la mesure où ces Chefs traditionnels sont d'abord des entrepreneurs politiques avant d'être des Chefs traditionnels.

    Le présent paragraphe est structuré autour de deux points. Le premier point abordera la question des Chefs et leur statut de relais de l'administration ; le deuxième point quant à lui, nous permettra de prospecter sur les calculs politiques de ces derniers.

    A- Les Chefs et leur statut de relais de l'Administration

    A l'ère de la libéralisation politique et mieux encore de la décentralisation, les Chefferies traditionnelles et les Chefs traditionnels continuent à être régis par le décret de 1977 portant organisation des Chefferies traditionnelles au Cameroun. Or, dans ce nouveau contexte socio politique et administratif, ils sont davantage interpellés dans la mesure où leur proximité avec les populations les inscrit parmi les acteurs du développement local. C'est dans ce sillage que Geshiere affirme :

    «  en dessous de la politique officielle des Etats, il existe des façons locales de faire la politique, et pour comprendre l'évolution des Etats modernes, il est indispensable de penser la continuité, qui relie les styles locaux, notamment, les transformations des formes néo traditionnelles aux conceptions modernes du politique ».C'est dans ce sillage que Nicodemeus Awasom déclarera : 

    «  lesChefs traditionnels dans leur vécu quotidien sont entre le marteau de l'Etat, et l'enclume de leurs sujets. De l'équilibre entre les deux, dépend leur survie » (Nicodemeus Awasom cité par Mouiche, 2005a : 20).

    Au demeurant, il faut noter qu'à Nkol-Metet, que les Chefs traditionnels qui sont les promoteurs des activités sociopolitiques et socioéconomiques sont ceux là, qui sont le mieux impliqués politiquement et qui possèdent des capitaux exorbitants ; alors que ceux des Chefs traditionnels moins impliqués et moins nantis, ont du mal à s'arrimer à cette nouvelle donne.

    Deux points meubleront notre argumentaire. Le premier point consiste à examiner la nécessité du redéploiement des Chefs traditionnels Bene. Le deuxième point quant à lui, nous permettra d'analyser comment les Chefs traditionnels se servent de leur collaboration avec l'autorité administrative pour asseoir leur domination. Dans le cas d'espèce, nous ferons référence à la Chefferie de groupement Bene-Nord-Est.

    1. La nécessité du redéploiement des Chefs traditionnels Bene

    Les Chefs traditionnels en tant que relais de l'administration, comme prévu par le décret de 1977, ils leur reviennent de s'imposer désormais comme des partenaires de l'Etat. Ceci parce que le pouvoir central veut toujours avoir la main mise sur le processus de la décentralisation. Même dans ce processus, les pouvoirs publics continuent à se servir des Chefs traditionnels, pour véhiculer leur message au regard de leur proximité avec les populations. Cependant, pour que les Chefs traditionnels deviennent des partenaires efficaces et efficients de la décentralisation, le développement économique et culturel qu'ils devaient assurer au profit de l'Etat sous l'ère jacobin, doit être purement inversé pour l'auto satisfaction directe des populations de leur terroir. C'est dans cet ordre d'idées que ces derniers doivent renforcer l'initiative de revalorisation de leur culture, en organisant ou en consolidant des montages de projets socioculturels d'attractions, et de distractions, pouvant être incorporés dans les bouquets touristiques intégrant les activités de tourisme culturel. De même, les Chefs traditionnels doivent accroître la systématisation d'initiatives communautaires de formation, et d'éducation, capables de renforcer et développer les savoirs et savoir-faire des populations. C'est en une telle posture qu'ils pourront être au niveau local des véritables leaders de leur communauté, et sur le plan central des partenaires incontestés de l'Etat.

    Les Chefs peuvent également se déployer au niveau régional à travers leur présence dans le conseil régional. En d'autres termes, ces derniers sont au coeur de la vie locale d'abord, en tant que membres, et ensuite, parce qu'ils peuvent êtres éligibles à la présidence dudit conseil, conformément à l'article 57, alinéa 3, de la loi fondamentale du 18 janvier 1996, qui stipule :

    «  le conseil régional est présidé par une personnalité autochtone de la région élue en son sein pour la durée du mandat du conseil ».

    Au demeurant, en attendant la mise sur pied desdits conseils, les autorités traditionnelles doivent prendre au sérieux leur rôle, afin de faire de la décentralisation un cens dévoilé, et non un `'cens caché''143(*), et tout ceci passe par leur introspection.

    2. La collaboration des Chefs de groupement avec le Sous-préfet : un gage de domination et une pérennisation des Chefs traditionnels comme Auxiliaire de l'Administration

    En principe, les Chefs de groupement n'ont aucune imposition à adresser aux Chefs au 3e degré, ces derniers ne doivent que répercuter les directives venant de l'Administration, notamment, celles émanant des Sous- Préfets. Mais, ce dernier peut procéder par trafic d'influence, surtout lorsque le Chef de groupement entretient de bonnes relations avec le Sous- Préfet qui, selon les articles 28 et 29 du décret de 1977, ont compétence d'apprécier positivement ou négativement les activités des Chefs traditionnels.

    Au demeurant, le Chef de groupement dans une localité, est le collaborateur le plus proche du Sous- Préfet. Le Sous- Préfet144(*) de Nkol- Metet nous le renchérit lorsqu'elle dit : « notre travail serait harassant, si on avait pas la présence des Chefs de groupement. Ils jouent le rôle d'éclaireurs et balisent la voie du bon déroulement de nos tournées administratives »

    Il est donc le relais entre le Sous- Préfet et les Chefs de 3e degré. Mais les Chefs de groupement semblent être les alliés incontestables des Sous- Préfets en ce sens que, ces derniers leur permettent d'asseoir leur autorité, car ne possédant pas une sphère de compétence bien déterminée.

    Dans l'Arrondissement de Nkol-Metet, notamment dans la Chefferie Bane Nord Est, l'on reproche au Chef de ce groupement d'être beaucoup plus proche de l'Administration centrale que ses pairs Chefs. Ceci parce que lui- même a été Sous- préfet. Amougou Ada Albert le renchérit : 

    «  notreChef de groupement se comporte comme un Sous-Préfet, il nous donne des directives sans nous consulter. Nous l'avons encore constaté lorsque nous devions recevoir madame le Sous- Préfet lors de sa tournée de prise de contact avec les populations d'Obout. Au lieu de nous demander comment nous nous sommes préparés à cette cérémonie, ce dernier nous a plutôt imposé un certain nombre de choses (...) si c'est cela le regroupement, je pense qu'à Nkol-Metet, vaudrait mieux le supprimer, et conserver tout simplement les rapports Sous- Préfets -Chefs de villages ».

    Les Chefs de groupement seraient donc des spectres de l'Administration, de part leur façon d'agir, et au regard des prérogatives qui leur sont dévolus. Par eux, l'Etat continue à garder une certaine main mise sur les affaires des populations locales ; mais il n'en demeure pas moins vrai que leur avènement à Nkol-Metet doit être lu et vu sous le prisme de la décentralisation, et que tout dépend du discernement des Chefs de groupement. Heureusement pour ces derniers à Nkol-Metet, même s'ils ont tendance à vouloir demeurer les suppôts de l'Administration, ils fournissent, autant que faire se peut des efforts, pour être les acteurs du développement local à travers leurs multiples investissements sociaux qui trahissent quelque peu leurs calculs politiques.

    B- Les calculs politiques des Chefs traditionnels

    Dans les interactions, les individus se trouvent sollicités par deux démarches théoriquement concevables. Soit il opère un calcul coûts/avantages ; soit ils se conforment à des rôles assignés (voir Braud, 2008 :751-752). Dans le cas des Chefs traditionnels de Nkol-Metet, leurs actions peuvent être analysées par la première configuration. Ceci s'explique par le fait que, ceux-ci ne se contentent pas uniquement de leur stature d'autorités traditionnelles ; tout au contraire elles se servent d'elles pour mieux se déployer politiquement. Les profils biographiques des Chefs traditionnels que nous avons déclinés plus haut nous donnent des arguments assez plausibles. Aussi, le caractère administratif des Chefferies traditionnelles de ce ressort, leur offre plus d'opportunités à s'engager politiquement dans l'optique de mieux asseoir et de conforter leur stature d'hommes politico-traditionnels.

    Pour mieux élucider les calculs des Chefs Bene, nous essayerons autant que faire se peut et succinctement, de décrypter leur comportement politique. Dans le cas d'espèce, nous ferons ici référence à leurs Majestés Ondoua Menyié Paul Aimé et Mbala Zangana Benjamin.

    1- Le militantisme ostentatoire de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé

    Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé est avant tout un homme politique avant d'être un Chef traditionnel. Ce dernier, et est un fervent militant du RDPC qui est le parti au pouvoir au Cameroun. Ceci étant, il n'a jamais caché ses ambitions politiques, d'ailleurs il a déjà été député au cours de la législature 2002-2007.

    Sur le plan sociopolitique il crée en 1998 l'ACTRAN qui est l'association regroupant les Chefs traditionnels. La création de cette association et son engagement dans celle -ci viserait à affiner sa stature symbolique et aussi augmenter son capital social dans la mesure où elle crée l'adhésion des Chefs autour de lui. Le fait pour lui d'avoir brigué aussi la Chefferie de groupement Bene-Sud- Est en 2008 consistait pour lui à continuer à jouer un rôle de premier plan à Nkol-Metet malgré sa déchéance politique en tant que député.

    D'après nos enquêtes et nos entretiens avec Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, il appert que Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé reste fasciné par la fonction de député qu'il veut briguer à nouveau. C'est certainement la raison pour laquelle dans l'optique de maîtriser l'information et dans une posture de marginal sécant, il réside principalement à Mbalmayo145(*).

    Au demeurant, même si Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé affiche délibérément son amour pour la fonction de député, sa présidence de l'ACTRAN fait aussi de lui, un candidat sérieux pour le Conseil Régional mieux encore du Sénat.

    2- La Chefferie traditionnelle et la renaissance politique de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin

    Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin de 1996 à 2008 a presque joué des rôles de second plan sur le plan politique de Nkol-Metet. Par exemple il n'a été conseiller que municipal de 1996 à 2007 à la Mairie de Nkol-Metet ; ce qui a permis de voir émerger d'autres acteurs dans le paysage sociopolitique de Nkol-Metet.

    Avec l'avènement de la Mairie de Nkol-Metet en 1996, beaucoup de ses contemporains le voyaient briguer celle-ci ; mais cette année coïncidait avec la baisse de son aura politique. Même si ce dernier semble trouver d'autres justificatifs lorsqu'il nous dit :

    «  après avoir été Maire de la grande commune rurale de Mbalmayo pendant 16ans, qui comptait 80 villages, pour moi c'était une régression de briguer à nouveau une mairie relativement d'une faible ampleur comme celle-ci qui ne compte que 32 villages ».

    Au demeurant, en briguant la Chefferie de groupement Bene -Nord-Est, il était question pour Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, de sortir de sa retraite politique anticipée ; aussi l'âpreté d'accès par lui à cette institution confirme l'hypothèse suivant laquelle c'était un moyen pour lui de naître politiquement de nouveau. Il nous déclarera au cours d'un entretien : « j'ai encore des ambitions politiques, mais Nkol-Metet ne constitue plus, mon point de mire ».

    En d'autres termes, Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, a des ambitions qui dépassent le cadre de l'Arrondissement de Nkol-Metet ; cela est d'autant plus pertinent dans la mesure où ce dernier ne s'est jamais véritablement investi dans les batailles électorales tant municipales que législatives. Selon une certaine opinion publique, on le range parmi les potentiels prétendants sénateurs de Nkol-Metet.

    Cependant, depuis son intronisation comme Chef de groupement, il s'est inscrit dans de l'ACTRAN et depuis 2010 il est vice président de ladite structure associative. Aussi pour avoir un aura encore plus important il s'active au sein de l'Ekoan Mvog Amougou (EKMA) qui est l'association défendant et valorisant l'identité Mvog-Amougou son ethnie. Son engagement dans l'EKMA est très stratégique dans la mesure où, les Mvog Amougou contrôlent à Nkol-Metet les jeux électoraux. Par rapport aux autres groupes ethniques Bene de Nkol-Metet les descendants de cette ethnie occupe à l'heure actuelle les postes politico-administratifs les plus influents tels que celui de Délégué général à la sûreté nationale et de Chef d'état Major particulier du Président de la République Paul Biya. Ainsi dit, se dernier se rapproche de cette entité déjà pour avoir l'assentiment des élites politico-administratives de son ethnie et surtout renforcer le tissu des relations sociales avec les autres Chefs traditionnels Mvog Amougou146(*). Ceci s'inscrit dans l'optique d'établir une certaine prépondérance au sein de l'ACTRAN afin de réduire l'ascendance de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé sur les Chefs traditionnels de Nkol-Metet.

    Quid de la place des Chefs et des Chefferies traditionnelles dans l'activité de la libéralisation et de la décentralisation ?

    Section 2 : La place des Chefs et des Chefferies dans l'activité de la libéralisation politique

    L'année 1996 marque un tournant décisif dans la vie sociopolitique camerounaise. Elle consacre en fait l'inscription de la gouvernance du Cameroun dans le processus de la décentralisation147(*). Contrairement à d'autres localités du Cameroun, où la décentralisation n'est pas encore effective, à Nkol-Metet, la décentralisation est inaugurée en 1996 par l'avènement de la Commune de Nkol-Metet qui s'inscrit, dans ce processus des foyers des Régions et des Communes. (Cf. Article 55 alinéa 1 de la loi n°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la loi du 02 juin 1972). La particularité de l'avènement de la Commune à Nkol-Metet est l'élection d'un Chef traditionnel Sa Majesté Oyono Owono Joseph, comme le tout premier Maire de la Commune de Nkol-Metet. La confiance faite au Chef traditionnel trouve une de ses raisons dans le fait que les Chefs traditionnels, tant dans le processus de la déconcentration que dans celui de la décentralisation sont davantage plus proches des populations qu'ils connaissent mieux et les réalités de leur terroir. Autrement dit, la décentralisation consacre les Chefs traditionnels comme de véritables entrepreneurs politiques et cela se manifeste dans les faits par leur militantisme ostentatoire.

    Par exemple, à Soa si lors de la rencontre de sondage avec les populations de ce village pour la succession148(*)de leur Chef décédé, Sa Majesté Mbala Zangana avait décliné ses préférences partisanes. Son ordre du jour portait sur la succession du Chef et l'élection présidentielle d'octobre 2011. S'agissant des élections présidentielles, Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin voulait savoir si toutes les personnes en âge de voter dans ce village étaient inscrites sur les listes électorales, afin d'apporter au Président Paul Biya un soutien sans faille. Il le dira en langue locale : « Mayi me yeme nge mot ase ane ntiliban a be listes, amu bia bese bia yiane tebe a mvus nti Biya.Amu a y'aneke Janle ve tyin jia149(*) ».

    Il nous échoit dans la présente section, d'expliciter l'engagement politique des Chefs dans les compétitions municipales et législatives à l'ère de la libéralisation politique et ensuite aborder sur un ton pragmatico-prospectif la mobilisation des Chefs dans les processus politiques et économiques de la décentralisation.

    Paragraphe 1 : L'engagement politique des Chefs dans les compétitions politiques municipales et législatives

    Nkol-Metet constitue l'un des bastions politiques pour le parti au pouvoir au Cameroun ; le RDPC. Par exemple à la dernière élection présidentielle du 09 octobre 2011, le candidat de ce parti Monsieur Paul Biya est venu en tête avec 95,46% des suffrages exprimés en sa faveur (Source : Rapport Elecam octobre 2011). Il convient aussi de rappeler que toutes les charges électorales dans cette unité administrative ont toujours été briguées par les partisans de cette formation politique. Les tableaux ci-dessous corroborent notre argumentaire.

    Tableau 14: Les Maires de Nkol-Metet depuis l'avènement de la Mairie en 1996

    Année

    Nom du Maire

    Formation politique

    1996-2002

    S.M Oyono Owono Joseph

    RDPC

    2002- 2007

    Omgbwa Assembe

    RDPC

    2007 à nosjours

    Ndi Samba Joseph

    RDPC

    Source: Enquêtes

    Tableau 15: Les députés du Nyong et So'o Natifs de Nkol-Metet depuis 1992

    Année

    Nom du Député

    Formation politique

    1992-1997

    Maze Jean Alfred

    RDPC

    1997- 2002

    Maze Jean Alfred

    RDPC

    2002-2007

    S.M Ondoua Menyié Paul Aimé

    RDPC

    Source: Enquêtes

    A Nkol-Metet, les Chefs traditionnels ne sont pas restés en marges de cette activité militante, au contraire, ils affichent ouvertement leur appartenance politique. Ces faits ne reflètent pas un particularisme Bene ; c'est plutôt un des effets induits du multipartisme. Mouiche (2005a) le faisait déjà remarquer dans son étude empirique dans certaines Chefferies de l'Ouest quand il affirma :

    « La majorité des autorités traditionnelles s'est engagée à soutenir les candidats du Rdpc, comme ils le firent souvent pendant l'ère du monolithisme » (Mouiche, 2005a :3).

    Les Chefs traditionnels ont donc, dans ce nouveau contexte politique trouver de nouveaux espaces d'expression dans la vie politique ; c'est pourquoi, crânement et sans complexes ils se sont engagés à Nkol-Metet dans les échéances électorales. Ce fut le cas de Sa Majesté Oyono Owono Joseph dans le cadre des élections municipales de 1996 et de 2002 et de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé dans le cadre des élections législatives de 2002 et de 2007.

    A- Sa Majesté Oyono Owono Joseph : de la cooptation à la déception

    Selon Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, l'émergence de Sa Majesté Oyono Owono Joseph comme le tout premier Maire de Nkol-Metet, est fortement lié à son capital culturel. Il affirme :

    « Sa Majesté Oyono Owono Joseph est le tout premier Ingénieur Agronome de l'Arrondissement de Nkol-Metet, il est également un Officier d'Etat-Civil chevronné. Ce qui lui fit gagner l'élection municipale de 1996, c'est sa grande générosité. En effet, lorsqu'il était travailleur à Douala, les ressortissants de Nkol-Metet bénéficiaient de ses largesses tant sur le plan alimentaire que financier, ce qui lui valu une grande popularité  d'où son surnom de Boula Mba » (Source : Ondoua Menyié, 57 ans, entretien du 01/02/2012).

    Dans le même ordre d'idées, pour Amougou Ada Albert, trois facteurs ont contribué à l'élection de Sa Majesté Oyono Owono Joseph :

    « Sa formation d'Ingénieur Agronome, sa disponibilité150(*), sa connaissance des besoins du peuple lié a sa fonction de Chef traditionnel ». (Source Amougou Ada Albert représentant du Chef d'Obout, entretien du 12-02-2012).

    Au demeurant, dans le cadre de ce paragraphe les années 1996 et 2002 constituent les balises de notre raisonnement. C'est dans ce sillage que notre argumentaire sera focalisé sur deux points : le premier point consacre l'année 1996 comme l'année du succès électorale Sa Majesté Oyono Owono Joseph, le deuxième point examine plutôt les causes de sa déchéance aux élections municipales de 2002.

    1- Les élections municipales de 1996 : un non lieu de la compétition électorale

    Sa Majesté Oyono Owono Joseph est entré en politique en 1996. Ce dernier a été coopté par les militants du RDPC grâce à son capital social, mais grâce à sa disponibilité, car en 1996, il est déjà un retraité depuis deux ans, et ne s'occupe que des ses fonctions de Chef traditionnel de son village Awäe.

    D'un point de vue strictement politique, Sa Majesté Oyono Owono Joseph a bénéficié de la non tenue des primaires au sein du parti RDPC. En d'autres termes, Sa Majesté Oyono Owono Joseph a été dispensé de la compétition interne au sein de son parti. Sa liste ne fut que purement et simplement validée par le Comité Central du RDPC. Le RDPC étant le parti majeur à Nkol-Metet et que ces élections étaient les premières élections post monopartisme à Nkol-Metet. La victoire de Sa Majesté Oyono Owono Joseph en était devenue une évidence.

    Les primaires organisées au sein du parti RDPC en vue des élections municipales de 2002 et d'autres facteurs entrés en jeu, n'ont pas favorisé la réélection de Sa Majesté Oyono Owono Joseph.

    2- 2002 et les raisons de la déchéance de Sa Majesté Oyono Owono Joseph

    Selon Sa Majesté Oyono Owono Joseph, les causes de son échec se trouvent être dans l'investissement du champ politique à Nkol-Metet, des hommes qui voudraient vivre pour la politique au détriment de ceux qui vivent de la politique (Max Weber 1968). Ce qui s'est justifié par l'achat des consciences et l'achat des voix aux élections municipales de 2002.

    Nous allons ici principalement évoquer deux raisons de l'échec de Sa Majesté Oyono Owono Joseph : une raison politique, des causes liées à la défection de ses capitaux sociaux et économiques

    S'agissant des causes politiques la tenue des élections primaires a entraîné l'échec d'Oyono Owono Joseph qui affrontait pour la première fois la compétition électorale, son principal challenger Omgbwa Assembe Inspecteur des Impôts avait acquis une certaine popularité, car pendant près de dix ans, il organisait pendant les vacances scolaires un championnat de football, qui était alors devenu, l'événement sportif majeur dans l'Arrondissement de Nkol-Metet. Sa cote de popularité combinée à son fort capital économique, et le soutien des élites majeures de Nkol-Metet, lui ont permis de damer le pion au tout premier Maire de Nkol-Metet dont le passé glorieux ne suffisait plus pour briguer un nouveau mandat.

    S'agissant de ces capitaux économiques et même sociaux, il faut souligner ici que lorsque survient l'élection de Sa Majesté Oyono Owono Joseph en 1996, son capital économique était encore consistant pour mener une bataille électorale. Ceci est d'autant plus pertinent qu'il était quasiment seul en lice. A l'élection de 2002, ses moyens financiers se sont avérés insuffisants face à ceux de son challenger Omgbwa Assembe. Son échec est aussi lié à la désolidarisation de ses principaux partenaires à l'instar de Joseph Ndi Samba, qui a joué la carte de la neutralité à cette élection. La logique du "njangui"151(*) très déterminante en politique a vu les principales élites soutenir massivement la candidature d'Omgbwa Assembe. Selon certains informateurs, la décrépitude du capital social d'Oyono Owono Joseph trouve aussi l'un de ses foyers dans le fait qu'il a géré les biens de la Mairie dans une logique néo-patrimoniale. Ce qui traduit, peu s'en faut, la nature mitigée de son bilan d'actions en tant que Maire de Nkol-Metet de 1996 à 2002, d'où la déception de ses "fans". Monsieur C nous le confirme en ces termes:

    « L'élection de Sa Majesté Oyono Owono Joseph avait suscité beaucoup d'espoir, car on savait qu'un Chef traditionnel était le choix idéal pour la fonction de Maire en zone rurale. En effet, la proximité du Chef avec ses populations lui permettent d'avoir des indicateurs proéminents sur les véritables attentes des populations. Mais au fur et à mesure que le mandat s'égrainait, on se rendit compte que Sa Majesté Maire, ne savait pas différencier l'homme Maire de l'homme Chef, de la gestion du patrimoine de la Mairie de la gestion du patrimoine de la Chefferie ».

    B- Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé et élections législatives de 2002 et de 2007

    Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé est le Chef traditionnel à Nkol-Metet qui affiche le plus ostentatoirement son engagement politique. Aussi en termes de prestige au sein de son parti politique le RDPC, il est le seul Chef traditionnel de Nkol-Metet à avoir été membre du comité central du RDPC et même Président de la section RDPC Nyong et So'o de 2002 à 2007.Toutes choses étant égales par ailleurs, il était donc logique de le voir briguer assez aisément la députation du Nyong et So'o en 2002. Cependant après avoir exercé ses fonctions de député au cours de la législature 2002-2007, en 2007 il essuya une défaite lors des primaires de son parti le RDPC.

    Pour plus d'une personne, l'éclatement de Nkol-Metet de trois (03) sous-sections en neuf(09) sous sections Rdpc a été l'une des causes majeures de la déchéance de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé. Ce dernier nous le fait aussi dire quand il affirme :

    « le fait pour nous d'avoir créé des nouvelles Sous-Sections à Nkol-Metet, visait de faire de l'Arrondissement de Nkol-Metet un contrepoids à l'Arrondissement de Mbalmayo. Malheureusement, cette initiative trahissait certainement les clauses de mes alliances politiques quand je fus élu Président de la Section RDPC Nyong et So'o152(*) ».

    Cependant pour les populations de Nkol-Metet, leurs attentes étaient focalisées ailleurs. Les plus récurrentes étaient celles des routes et de l'eau potable entre autres. Malheureusement, ses attentes n'ont pas été atteintes ; ce qui lui fit perdre les suffrages dans son fief à Nkol-Metet. La construction de quelques bâtiments pour le seul lycée que compte Nkol-Metet ne lui a pas permis de glaner à nouveau des suffrages pour une réélection. Son militantisme politique, ni même sa déchéance politique en tant que Député n'a nullement entamé son ambition de la revalorisation de l'institution de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, d'où son engagement inlassable au sein de L'ACTRAN.

    Paragraphe 2 : La mobilisation des Chefs dans les processus politiques et économiques de la décentralisation

    Dans le contexte de la décentralisation, la mobilisation des Chefs traditionnels dans les processus politiques et économiques nécessite un renforcement de leurs capacités économiques, symboliques et culturelles. A Nkol-Metet, il y a certains Chefs qui ne saisissent pas encore leur rôle dans cette nouvelle conjoncture politique. Sa Majesté Akoa Amougou Vincent nous le confirme lorsque nous voulions savoir comment il entendait se déployer dans la décentralisation, ce dernier nous fit savoir :

    « Dans la décentralisation, le Chef adresse les doléances de sa communauté aux autorités administratives afin que celles-ci viennent les solutionner » (entretien du 15 /07/2011 avec Sa Majesté Akoa Amougou Vincent).

    Ceci étant, le renforcement de leurs capacités consiste pour eux de quêter un certain nombre de capitaux pour être à la hauteur des mutations qu'imposent la conjoncture socio-politique dans laquelle ils s'y trouvent. Le capital, tel qu'envisagé ici, est appréhendé dans l'acception bourdivine. C'est-à-dire, l'ensemble des ressources mobilisables et utilisables par un individu, du fait de sa position dans l'espace social. On distingue à cet effet quatre types fondamentaux de capitaux : le capital économique, le capital culturel153(*), le capital social et le capital symbolique154(*). Bien entendu, que ceux-ci sont complémentaires ; mais pour des besoins heuristiques, nous allons principalement mobiliser le capital économique et subsidiairement le capital symbolique.

    A- Le renforcement des capacités des Chefs autour du capital économique

    Anthropologiquement, la fonction de Chef traditionnel était attribuée à des personnes qui possédait un certain nombre de capitaux, parmi lesquels le capital économique d'où les appellations de Nkukuma, de Mfan mot (voir Laburthe-Tolra, 1981 ; Fouda Ongodo, 2004).

    Aujourd'hui à Nkol- Metet les Chefs (notamment pour les Chefs de 3e degré) possèdent de moins en moins ce capital, et sont désormais à la merci des populations, à cause de leur paupérisation grandissante. Les Chefferies ne sont plus les lieux de ravitaillement155(*) des populations .Aussi, les Chefs sont-ils incapables de se bâtir des maisons dignes de leur statut ; incapables de conserver les structures d'accueil héritées de leur défunts parents. En d'autres termes, les Chefferies ne présentent plus des structures d'accueil. C'est la raison pour laquelle, lorsque les autorités administratives (préfet, sous-préfet, commandant de brigade de gendarmerie...) effectuent leurs tournées, au lieu d'être reçues dans les Chefferies traditionnelles, elles sont plutôt accueillies dans les villas des élites du terroir, qui financent même les réceptions de ces dernières. Parfois, indépendamment de leur volonté, ces élites fragilisent la position sociale des Chefs .Or chez les Béti, le prestige du Chef est étroitement lié à son capital économique.

    Il devient donc impérieux pour les Chefs traditionnels de corriger ce manquement, pour pouvoir être de véritables acteurs de la démocratisation ; car, pour parler de développement en escomptant les résultats, ils doivent d'abord être des modèles à l'instar des Chefs de groupement. Madame le Sous Préfet de Nkol-Metet nous le confirme quand elle dit :

    « dans la classe des Chefs traditionnels de Nkol-Metet, les Chefs de groupement sont incontestablement économiquement et matériellement au-dessus du lot » (source : entretien du 06/07/2011 à la sous-préfecture de Nkol-Metet).

    Autant le capital économique constitue un facteur de prestige pour les Chefs traditionnels, autant le capital symbolique ne vient que renforcer ce prestige.

    B- Le renforcement des capacités des Chefs autour du capital symbolique

    Fondamentalement, le pouvoir traditionnel comme le pouvoir de l'Etat, regorgent des aspects de la sacralité, au regard de la palette des rites que regorgent nos traditions c'est dans cet ordre d'idées que Halpougdou affirme :

    «  tout pouvoir traditionnel est dénué de sens et réalité sans l'investiture des ancêtres, c'est-à-dire sans la dimension sacrée et mystique attribuée au pouvoir dans les sociétés » (Halpougdou  cité par Ouedraogo Hubert, 2006 :14).

    Nous n'allons pas nous engager dans les méandres du sacré. La dimension symbolique que nous voulons mettre en exergue ici, réside en d'autres aspects, qui font du pouvoir du Chef, un pouvoir symbolique. Il s'agit en fait de la respectabilité, de l'honorabilité, la réputation et la compétence du Chef. Tous ces éléments constituent de façon générale les valeurs intrinsèques que doivent avoir les Chefs traditionnels.

    En effet, de plus en plus dans nos localités, les autorités traditionnelles sont méprisées. Ceci s'explique en grande partie par leur mauvais comportement. Ce qui ternit davantage leur image, c'est leur ivresse permanente. Ces derniers sont pour la plupart des adeptes incontestés du whisky artisanal (odontol ou akerpi). De même, la compagnie des Chefs traditionnels n'échappe pas à ce vice que constitue l'alcoolisme. Il devient difficile pour ces Chefs de juguler les fléaux tels que l'alcoolisme, qui de plus en plus, devient l'apanage des populations de Nkol-Metet, surtout que certains de ces Chefs sont des modèles représentatifs de cet état de choses.

    S'agissant de leur tenue vestimentaire, les Chefs sont généralement mal vêtus, et même lorsqu'ils arborent leur ténue d'apparat, elle est généralement le plus souvent mal entretenue. Ce qui fait que ces Chefs ne suscitent aucune admiration de par leur être et par leur manière d'être la Chefferie traditionnelle perd sa prestance symbolique156(*), faute de mise conséquente.

    Conclusion partielle

    Parvenu au terme de ce chapitre, où il était question pour nous de mettre en lumière les ressorts pragmatiques des Chefferies traditionnelles Bene de Nkol-Metet, force pour nous est de constater que, ceux-ci tiennent sur le dynamisme politique de certains Chefs traditionnels davantage les Chefs de groupement de cette localité, qui essayent autant que faire se peut, de niveler la Chefferie traditionnelle de Nkol-Metet vers le haut et surtout leur donner un poids politique.

    Ce chapitre nous a également permis de voir que la libéralisation politique a été le levain des Chefs Bene d'affirmer ouvertement leur appartenance politique, pour la plupart, à la famille politique du Rdpc, parti ultra dominant à Nkol-Metet.

    Au demeurant, pour une optimisation des activités de développement, il apparaît nécessaire pour les Chefs traditionnels de Nkol-Metet, notamment ceux de 3e degré, à quêter un certain nombre de capitaux, devant leur permettre de requinquer leur stature symbolique. Ceci est d'autant plus pertinent, qu'à l'ère de la libéralisation politique, la succession héréditaire ne suffit plus à elle seule pour pouvoir briguer le trône ; car d'autres paramètres sont désormais de plus en plus pris en compte. Autrement dit, le système capacitaire ronge de plus en plus le système héréditaire. C'est dans ce sillage que Paine se situe quand il affirme :

    «  Tous les hommes sont égaux, aucun d'eux n'a le droit de passer à sa famille le pouvoir de régner éternellement sur les autres ; car si lui-même peut mériter que ses contemporains l'honorent, ses descendants peuvent être tout à fait indignes de partager ses honneurs » (Paine cité par Héritier Mambi, 2010 : 3).

    CONCLUSION GENERALE

    La présente étude relative à la Chefferie traditionnelle BENE à l'ère de la libéralisation politique et de ses ressorts, le cas de l'Arrondissement de Nkol-Metet, a mobilisé et déployé diverses disciplines sous le prisme épistémologique de l'anthropologie politique. Ainsi, les rapports dynamiques et harmonieux de l'anthropologie politique et de la sociologie compréhensive à travers l'interactionnisme notamment dans sa double posture pragmatico-politique ou stratégique et symbolique nous ont permis de déterminer deux variables d'interactions. Lepremier, tient sur un calcul coûts avantages (Braud 2008 :751). C'est dans ce sillage qu'on peut analyser toute l'activité de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé au sein de l'ACTRAN, et dans une certaine mesure, de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin.

    La deuxième variable d'interaction, tient à la conformité de certaines élites et associations à des rôles dûment assignés. Leurs actions s'avèrent presqu'obligatoires dans leur communauté au regard de leur position sociale. C'est dans ce sillage qu'on a pu par exemple analyser les actions de Ndi Mboh François à Ngoantet II, de l'ASFRADO à Oveng... Dans une perspective stratégique, l'action de certaines élites pour le rayonnement de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet vise à engranger de nombreux capitaux, soit pour accroître leur aura politique, soit alors pour conforter leur assise politique. Partant de l'interrogation centrale, celle de savoir si l'on pouvait rattacher l'activisme socio politique et socio économique des Chefs traditionnels comme une conséquence de la libéralisation politique ? Autrement dit, qu'elle est le véritable leitmotiv de l'activité des Chefs Traditionnels de Nkol-Metet autour de la Chefferie traditionnelle ? Les objectifs de cette recherche étaient clairs : mettre en lumière les manifestations de la reviviscence des Chefferies traditionnelles BENE de Nkol-Metet, depuis l'inscription du Cameroun au processus de la décentralisation d'une part, et de comprendre les principaux enjeux et les mobiles du déploiement des Chefs Traditionnels , des élites politiques et des associations politiques et apolitiques pour la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, d'autre part ; intégrant tout ce dispositif analytique et réflexif, nous avons formulé nos questions de recherche. C'est l'heure de la vérification et de la validation de nos hypothèses en tant que réponses anticipées ou provisoires aux questions posées.

    S'agissant de l'hypothèse centrale suivant laquelle : Le dynamisme sociopolitique et socio économique observé autour de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, est loin s'en faut une conséquence de la libéralisation politique ; mieux, elle est venue amplifier et officialiser les ambitions socioéconomiques et sociopolitiques des Chefs traditionnels et des forces politiques pour la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet. Les faits étant têtus nous amènent à confirmer cette hypothèse. Dans un premier temps, au regard du niveau de la pauvreté ambiante et de la désacralisation du pouvoir traditionnel à Nkol-Metet, il devenait impérieux pour les Chefs Traditionnels, notamment dans un contexte de la décentralisation, de s'activer pour booster le développement et revaloriser le commandement traditionnel à Nkol-Metet. L'ACTRAN et l'Association de la Chefferie Nkul Mbida Nga Mballa d'Obout, illustrent bien cet état de choses. Dans une perspective stratégique, en filigrane de leurs actions, se trament des ambitions foncièrement politiques. L'activité de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé au sein de l'ACTRAN le démontre à suffisance. Ses actions au niveau de la Chefferie contribuent à requinquer sa stature d'homme politique. En d'autres termes, l'action de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé au sein de l'ACTRAN depuis sa création vise à conforter efficacement son assise politique qui a pris d'ailleurs une envergure plus importante avec son accession au trône de la Chefferie de groupement BENE Sud Est en 2008. Dans le cas de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, son accession à la Chefferie de groupement BENE Nord Est apparaît comme une renaissance vitalisante de ce dernier dans la vie politique qui le positionne désormais, comme un des prétendants sérieux des sénatoriales. Cet état de choses est davantage enrichi de faits probants entre autres la Chefferie de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin est essentiellement MVOG-AMOUGOU ; il est membre de l'Ekoan Mvog-Amougou, sa fonction de Chef de groupement lui permet d'avoir un avantage certain quoi que relatif, mais déterminant pour briguer un poste de Sénateur. Nous ne saurions clore ce volet sans dire un mot sur l'activité de l'Association Nkul Mbida Nga Mballa pour la revivification de la Chefferie traditionnelle d'Obout. En recoupant nos données, les actions des élites de cette Chefferie, qu'elles soient traditionnelles, militaires ou religieuses, trahissent leurs désirs trop osés de faire de la Chefferie d'Obout, une Chefferie de 2e degré, ces derniers disposent d'ailleurs de nombreux atouts pour une telle transformation. Mais la conjoncture actuelle ne permet pas aux Mvog Amougou d'avoir deux Chefs de groupement à Nkol-Metet157(*). On comprend dès lors que l'activité de certains Chefs traditionnels tant dans les domaines socio-économique que sociopolitique résulte d'une double volonté : contribuer au rayonnement socio-économique de leur terroir d'une part, et de se servir de leur activité comme un investissement gagnant pour conforter à la fois leur assise politique, et accroître également leur aura politique.

    La première hypothèse connexe est que, l'activisme sociopolitique et socioéconomique des Chefs traditionnels et les autres forces politiques (élites, associations apolitiques et politiques) peut-être analysée de manière ambivalente. D'abord, elle traduirait leur action dans l'optique d'un leadership institutionnalisée et/ou dans l'optique de `'sauver la face''158(*). . Ensuite, il se tramerait derrière tout cet activisme des ambitions politico administratives des protagonistes de la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet, qui viseraient des postes de Sénateur, Député et de Maire... Cette hypothèse est également justifiée ici. D'abord, nous pouvons analyser l'amorce de la collaboration Mairie- Chefferie qui résulte de l'incapacité de la Mairie à cerner toute seule avec précision les attentes des populations, en vue de mettre sur pied un plan de développement communautaire fiable, comme une conséquence logique d'une telle option. Toujours est-il que dans le cadre de ce plan de développement communautaire de la commune de Nkol-Metet, qui bénéficie heureusement et opportunément du partenariat du PNDP, les Chefs ont été interpelés franchement à prendre part aux trois conseils municipaux extraordinaires, qui les invitaient à recenser les besoins les plus urgents de leurs populations, afin d'améliorer leurs conditions de vies judicieusement. Dans les faits, cela s'est traduit manifestement par la création de nombreuses adductions d'eaux, et de l'électrification de nombreux villages qui n'en avaient pas. Aussi, l'action de l'élite et des Associations à Nkol-Metet est une contribution de la société civile et de la diaspora de la Chefferie traditionnelle pour la revitalisation de leur Chefferie. Cette action est également analysée dans le cadre d'un leadership institutionnalisé. Cette hypothèse est confirmée ; mais la réussite de ce dynamisme positif à Nkol-Metet, résulte considérablement de la complicité entre les Chefs Traditionnels et ses différents mécènes d'une part, mais aussi d'une prise de consciences de certaines élites et Associations d'annihiler certaines attitudes léthargiques de certains Chefs face aux défis conjoncturels auxquels sont confrontées les populations ;d'autre part, ceci contribue à sauver leur face et davantage se positionner comme des potentiels leaders politiques de l'Arrondissement de Nkol-Metet. C'est le cas de Ndi Mboh François à Ngoantet II, de la JAME, le RDPC, le CODEMEC et le PNDP à Metet-Centre.

    La seconde hypothèse connexe, qui faisait de l'investissement des Chefferies de groupements par les professionnels de la politique, répond au besoin de l'amélioration d'un système héréditaire de désignation des Chefs Traditionnels par un système capacitaire de désignation de Chef et conforte leur caractère de Chefferie en création. Cette hypothèse est également confirmée. En effet, leurs Majestés Mbala Zangana Benjamin de la Chefferie de groupement BENE- Nord- Est et Ondoua Menyié Paul Aimé de la Chefferie de Groupement BENE- Sud -Est, tirent grandement leur victoire de leur capital symbolique, qui pour le premier, trouve son fondement dans sa longue carrière politico administrative où, il a été plusieurs fois Sous -Préfet Maire. Pour le second, son capital symbolique est lié au caractère ambivalent de sa personnalité. C'est un homme politique qui a été déjà membre du Comité Central de son parti RDPC en 1996 et Député à l'Assemblée Nationale pendant la législature 2002-2007. C'est également un Chef traditionnel depuis 1998. Leur contestation et l'âpreté de leurs élections ont été des obstacles qu'ils ont pu transcender peu ou prou. Pour Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, contrairement à son pair de la Chefferie BENE -Sud- Est, il ne jouissait pas apparemment d'une `'légitimité traditionnelle'' ; par contre, pour Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, son ethnie était jugée minoritaire à Nkol-Metet pour prétendre diriger les grands ensembles ethniques comme les Mvog Zambo et les Mvog Nnomo... Le caractère nouveau de ces Chefferies à Nkol-Metet ne permettait pas de s'appuyer sur un fondement héréditaire, dans la mesure où tous les originaires de Nkol-Metet descendent de MbarTsogo. Leur victoire tient de ce fait sur leur présomption de compétence liée à leur passif d'hommes politiques. Leur présence à la tête des Chefferies de groupement rehausse l'image de la Chefferie à Nkol-Metet, car les deux, non seulement ils sont connus dans les grands cercles politiques de Nkol-Metet, mais également, ils font partie de la classe aristocratique de Nkol-Metet.

    Revenant sur les objectifs de cette recherche, nous pouvons considérer qu'ils ont été relativement atteints. Nous avons vu avec certitude que la Chefferie BENE à l'ère de la libéralisation politique est une Chefferie en pleine reviviscence. L'impact de cette conjoncture politique n'est plus à démontrer. Avec elle, on voit l'éveil du développement social économique, sanitaire et culturel des Chefferies BENE de Nkol-Metet. Cet éveil est tributaire d'une synergie d'actions positives des `'forces politiques'' et des Associations en présence à Nkol-Metet.

    Nous pouvons désormais répondre à la question centrale de ce travail : peut-on véritablement rattacher l'activisme socio politique et socio économique des Chefs traditionnels à la libéralisation politique ? En d'autres termes, quel est le véritable leitmotiv du déploiement généralisé des Chefs traditionnels de Nkol-Metet autour des Chefferies traditionnelles à cette ère de la libéralisation politique ?

    L'activisme des Chefs BENE de Nkol-Metet, tant dans le domaine socio économique que sociopolitique, a une double portée qui traduit la nature ambivalente de leurs actions ; il peut être analysé dans une perspective holiste ou individualiste. D'un point de vue de l'holisme, leurs actions émanent d'une prise de conscience effective des Chefs Traditionnels de cette aire culturelle à revivifier par le développement socio économique leur institution. La création de l'ACTRAN à Nkol-Metet est une réponse concrète à cet état d'esprit. D'un point de vue de l'individualisme méthodologique, les actions posées par certains Chefs résultent d'un certain nombre de calculs rationnels pour ces derniers. C'est pourquoi, leur action est analysée sous le prisme de la dialectique coûts/avantages. Cette dialectique est beaucoup plus fertile pour analyser les actions des Chefs de groupements qui sont d'abord des professionnels de la politique avant d'être des détenteurs du pouvoir traditionnel. Pour Weber, il n'y a pas d'action d'homme politique sans retour à investissement. Il affirme :

     «  tout homme qui fait la politique aspire au pouvoir soit parce qu'il le considère comme un moyen au service d'autres fins idéales ou égoïstes, soit qu'il le désire pour lui-même en vue de jouir du sentiment qu'il confère » (Weber, 1968 :29).  En d'autres termes, pas d'intérêts pas d'actions.

    Nous pouvons également intégrer comme élément de réponses à la question centrale que, les Chefs Traditionnels moins impliqués politiquement ont des actions qui sont essentiellement orientées vers le développement communautaire. Alors que ceux des Chefs Traditionnels étant impliqués grandement dans l'activité politique ont des actions duales. Elles visent bel et bien le développement socio économique de leur terroir d'une part, et elles contribuent à renforcer un tant soit peu leur capital symbolique, d'autre part.

    En dernière analyse, nous pensons que la libéralisation politique a véritablement impacté sur la vie politique locale à Nkol-Metet. Par son effet de libération des énergies, les différentes forces politiques de ce terroir ont contribué à revaloriser par leur action la Chefferie traditionnelle.

    Enfin, la reviviscence des Chefferies traditionnelles BENE à Nkol-Metet pourrait avoir des effets optimums lorsqu'on réussira de façon générale à concilier un système capacitaire de désignation de Chef Traditionnel au système héréditaire. Ce système héréditaire, quoique légitime, entrave considérablement la reviviscence de la Chefferie traditionnelle BENE. De même, dans ces Chefferies, les Chefs doivent se débarrasser de certains tabous, qui contribuent à marginaliser la participation des Femmes et des Jeunes, à toutes les activités sociopolitiques et associatives ; car ceux-ci, réellement et efficacement sont au centre des dynamiques du développement local qui méritent tout simplement à encourager, afin d'escompter un développement plus florissant. C'est pourquoi pour Ngnepi (2007), il serait important dans nos Chefferies traditionnelles de replacer la personne avec ses droits au centre du développement. Aussi, les valeurs traditionnelles après avoir fortement été dépouillées pour l'essentiel par le christianisme colonial méritent d'être réévaluées. Le pasteur Nguélé Désiré 159(*) affirme : « nous avons bêtement accepté le christianisme ». Dans un ton plus acerbe Sa Majesté Oyono Owono Joseph affirme : «  le christianisme est entré en cabale contre nos us et coutumes, pourtant, ce dernier est le reflet de la tradition judaïque, j'allais dire judéo-chrétienne 160(*)». Or dans les traditions Béti et BENE en particulier, tout n'était pas négatif. En d'autres termes, il ne s'agit pas de faire un retour quasi systématique à toutes nos valeurs culturelles ; mais plutôt d'exhumer celles qui ont des aspects positifs pour une meilleure reviviscence des Chefferies BENE de Nkol-Metet, qui sont d'abord traditionnelles avant d'être des Chefferies administratives. D'où l'assertion de Nach Mback selon laquelle, les Chefs sont des : « auxiliaires déconcentrés d'essence traditionnelle » (Nach Mback, 2000 : 88-94). Il poursuit affirmativement que : 

    «  le vrai mal dont souffre la Chefferie traditionnelle se trouve dans le dévoiement des valeurs qui fondent sa respectabilité » (Nach Mback, 2000 :113).

    En somme, la reviviscence des Chefferies traditionnelles BENE de Nkol-Metet sera complète quand ces Chefs réussiront à concilier les exigences de leur modernisation (qui sont déjà déclenchées avec le processus de la démocratisation) et les exigences de la tradition longtemps délaissées par eux. Au demeurant, nous pensons que la décentralisation ne peut se faire au Cameroun sans le rôle à jouer effectif et efficient de nos Chefferies traditionnelles. C'est pourquoi elles doivent être insérées au rang de démembrements territoriaux de l'Etat ; autrement dit, il importe de clarifier et de consolider leur statut politico constitutionnel, en tant que collectivités territoriales décentralisées des questions locales et régionales. /-

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    Levi, Strauss, Anthropologie structurale, Plon, 1961.

    Louis, Segond, La Nouvelle Bible Segond, Alliance Biblique universelle, 2002.

    Mair, Lucy, Primitiv governement, London, 1962.

    Mbébi Ndema, Raymond,  Libéralisation politique, minorités ethniques et nouveaux mouvements sociaux au Cameroun : le cas du ya-kamata, Mémoire de DEA en Science Politique, Université de Yaoundé II-Soa, 2010.

    Meyer, Fortes et Evans, Pritchard, Systèmes politiques africains, Paris, PUF, 1964.

    Montesquieu, De l'esprit des lois, Nouveaux classiques Larousse, Paris, 1969.

    Morgan Lewis, Ancient society, 1877.

    Ngoh, Victor Julius, Cameroun 1884-1885.Cent ans d'histoire, CEPER, Yaoundé, 1990.

    Nuembissi Kom, Paul, Elites urbaines et politique local au Cameroun. Le cas de Bayangam, Mémoire de DEA en Science Politique, Université de Yaoundé II-Soa, 2007.

    Owona Nguini, Eric Mathias, « Juristes-Savants, Droit de l'Etat et l'Etat de Droit au Cameroun : l'énonciation professorale et doctorale du Droit de la souveraineté et Droit de l'Homme au crible d'une sociologie politique du champ juridique », Polis/ R.C.S.P/C.P.S.R. vol 6, N°2, 1998, Pp 31-79.

    Schmitt, Carl, La notion de politique. Théorie du partisan, Flammarion, 1992.

    Sindjoun, Luc, «  Cameroun : le système politique face aux enjeux de la transition démocratique (1990-1993) », l'Afrique politique, 1994 Pp143-165.

    Tang Essomba, Augustin Claude ; Forbah Tanjong, Martin ; Ndongo, André Marie, «  La décentralisation au Cameroun un grand chantier démocratique », Télescope, vol 11, n°3, juin 2004 Pp 18-21.

    Weber, Max, Le savant et le politique, union générale d'éditions, 1919.

    Yves Alpe, Alain Bertonne, Christine Dollon Jean Renault Lambert, Sandrine Panayre, lexique de sociologie, Dalloz, 2005.

    III- OUVRAGES SPECIALISES SUR LE POUVOIR TRADITIONNEL

    Djateng, Flaubert, « Le développement des Chefferies incontournables » Ecovox, le Magazine de l'écologie et du développement durable, n°38, Juillet - décembre 2008.

    Foaleng, Michel, «  Néo notabilité et retraditionalisation », Ecovox, le magazine de l'écologie et du développement durable n°38, juillet - décembre 2007.

    Fopoussi, Fotso, Faut-il brûler les Chefferies traditionnelles ? Yaoundé, Sopecam, 1991.

    Fopoussi, Fotso, «  Plaidoyer pour la Chefferie traditionnelle », Ecovox, le magazine de l'écologie et du développement durable, n°38 juillet - décembre2007.

    Geshiere, Peter, «Chiefs and the problem of witchcraft varying patterns in south and west Cameroon», in journal of legal pluralism, 1996 n°37-38,Pp 307-327.

    Geshiere, Peter, « Sorcellerie et politique : les Pièges du rapport élite village » in PolitiqueAfricaine n°63 p82 - 96.

    Geshiere, Peter, « Sorcellerie et modernité : retour d'une étrange complicité », in Politique Africaine n°79, octobre 2000, Pp17-32.

    Goeh-Akue, N'bueke Adovi, « Relations entre autorités traditionnelles et pouvoir public moderne au Togo » revue Cames Sciences et humaines, série B- vol.01, 1999, Pp. 45-51.

    Jean Claude, Barbier, « Mais qui est Chef ? Esquisse de la Chefferie coutumière »,                   Journal oflégal pluralism, n°s 25 &26, 1987, Pp327 - 339.

    Jean Claude, Barbier et Nchoji Nkwi Claude, Essai sur la définition de la Chefferie                   en pays bamiléké. Grassfields Kings and chiefs and modern politics, Yaoundé,                    ONAREST, ISH, Centre des Sciences économiques et sociales, 1977.

    Jean Pierre Bat, « le retour des rois en Afrique. L'exemple du " Roi - pot" au                    Cameroun, lavie des idées, 06 juillet 2009.

    Jean Pierre, Olivier de Sardan, « Chefs et projets au village (Niger) » bulletin de l'APAD, 15,  1998.

    Jean Pierre, Olivier de Sardan ; Bireschenk Thomas, «  Les courtiers locaux de developpement », bulletin de l'APAD, 5, 1993.

    Mambi, Tunga-Bau, Pouvoir traditionnel et pouvoir d'Etat en RépubliqueDémocratique du Congo, esquisse d'une théorie d'hybridation des pouvoirspolitiques, Mediaspaul, 2010.

    Mappa, Sophia, Pouvoirs traditionnels et Pouvoir de l'Etat en Afrique. L'illusionuniversaliste, Paris, Karthala, 1998.

    Mback, Nach, « La Chefferie traditionnelle au Cameroun.  Ambigüités juridiques et dérives politiques » in Africa développement, volume xxv, n°3 et 4, 2000, Pp 77-117.

    Mouiche, Ibrahim, Autorités traditionnelles et démocratisation au Cameroun entrecentralité de l'Etat et Logiques du terroir, Lit Verlag Munster, 2005.

    Mouiche, Ibrahim, « Mutations sociopolitiques et replis identitaires en Afrique : le cas du Cameroun » in Revue africaine de science politique ; vol 1, n°2, décembre 1996, pp 176 -201.

            Mouiche, Ibrahim, « Chefferie traditionnelle, culture et développement locale au Cameroun ». Maputo, Condesria, 2005 b.

    Mveng Owono, Luc Bruno, Mes Mémoires, Yaoundé, Imprimerie Saint Paul, 2004.

    Ngnepi, Guillaume, « Et si les Chefferies étaient transformées en Communes », Ecovox, le Magazine de l'écologie et de développement durable, n°38, juillet décembre 2007.

    Nyam, Simb, Calvin, La Revalorisation du Pouvoir traditionnel, Yaoundé, 2004.

    Ouedraogo, Hubert, « Décentralisation et pouvoirs traditionnels : le paradoxe des légitimités locales », Mondes en développement, 2006/1-n°133 Pp 9-29.

    Perrot Hélène Claude, Fauvelle, Francois Xavier, Le retour des rois : les autorités traditionnelles et l'Etat en Afrique contemporaine, Karthala, 1999.

    Pierre, Jacquemot, «  Chefferies et décentralisation au Ghana », Afrique contemporaine, 2007/1 n°221, Pp 55-74/.

    Towa, Marcien, «  La Chefferie traditionnelle est une négrerie qu'il faut supprimer », in Pouala culture, mensuel n°28, Août 2006.

    Yves, Poulin, « La décentralisation qu'avons-nous appris ? », Télescope, vol 11, n°3, 2004, Pp 2-6.

    Wim Van Binsbergen, « les Chefs royaux Nkoya et l'association culturelle Kazamga en Zambie. Résistance, déclin ou folklorisassions de la fonction du Chef traditionnel » ? Pp 489 - 510.

    Zognong, Dieudonné et Mouiche, Ibrahim, « Démocratisation et rivalités ethniques au Cameroun », Yaoundé, Centre Interafricain de Recherche Pluridisciplinaire sur l'Ethnicité, 1997.

    IV- OUVRAGES SPECIALISES SUR LES BETI

    Atangana, Emmanuel, Le positionnement politique des élites éwondo de Yaoundé, Mémoire de DEA en Science Politique, Université de Yaoundé 2, 2010.

    Fouda, Ongodo, Maurice, « Valeurs culturelles des Pahouins d'Afrique centrale et management des organisations » in le mangement face à l'environnement socioculturel, colloque Beyrouth, 28 et 29 octobre 2004, Pp 19-34.

    Franqueville, André, « Persistance et évolution des coutumes Béti : l'enterrement d'un vieux Eton », Cahiers d'Etudes Africaines, volume 12, n°47, 1972, P 524 - 528.

    Kpwang, Robert, «  La vie chez les Ekang avant l'arrivée des Occidentaux en Afrique Centrale », Studio Africana, N°18, 2007, P 69 - 80.

    .Laburthe-Tolra, Philippe, Les Seigneurs de la forêt, Paris, Publication de la

                     Sorbonne, 1981.

    Laburthe-Tolra, Philippe, « de la conversation chez les Béti du Cameroun, Ambigüité dans le transfert d'une réligion à l'autre », Culture et Développement, volume 15, n°1983, P 3 - 10.

    Ombollo, Jean Pierre, Les Eton du Cameroun, Yaoundé, septembre 1978.

    Quinn, Fréderick, «Beti in nineteen century», Africa journal of the international Africaninstitute, volume 50, n°3 1980 Pp 293 - 304.

    V- TEXTES JURIDIQUES

    Loi N°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 02 juin 1972.

    Décret N°77/245 du 15 juillet 1977, portant organisation des Chefferies traditionnelles au Cameroun.

    Décret n°2005/104 du 13 avril 2005 portant organisation du Ministère de l'Administration Territoriale et de la Décentralisation.

    Décret N°2008/376 du 12 novembre 2008 portant organisation administrative de la République du Cameroun.

    Décret N° 2010/198 du 16/juin/2010 portant érection des Districts en Arrondissements.

    Loi n° 2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation de la décentralisation administrative au Cameroun.

    Loi n°79/17 du 30 juin 1979 relative aux contestations soulevées à l'occasion de la désignation des Chefs Traditionnels.

    Loi n°80/31 du 27 novembre 1980 dessaisissant les juridictions des affaires relatives aux contestations soulevées à l'occasion de la désignation des Chefs Traditionnels.

    Arrêté n°13/A/MINAT/DCT du15 janvier 1982, déterminant les Chefferies traditionnelles de deuxième degré dans le département du Nyong et So'o, province centre-sud.

    Arrêté conjoint n°82/MINAT/DOT/MINFI/B fixant les taux de la prime d'efficacité à attribuer aux Chefs Traditionnels.

    Arrêté N°57/A/MINAT/MINFI du 26 Février 1983 fixant le taux d'allocation fixe à attribuer aux Chefs Traditionnels.

    VI- WEBOGRAPHIE

    www.cairn.info /revue- Afrique contemporaine, 2007-1-page 55.htm.

    www.enap.Ca/enap-fra/observatoire/obs-telescope.html.

    www.laviedesidées.fr : le retour-des rois-en-Afrique45-51.

    www.uqac.uquebec.CA/ zone 30/ classiques des sciences sociales/index.html.

    www.increvableanarchistes.org/articles.

    www.prc.cm consulté le 16/11/2011.

    VI- SOURCES ORALES

    NOMS

    FONCTIONS

    AGE

    DATES ET LIEUX DES ENTRETIENS

    ABEGA ABESSOLO 

    Chargé de la Communication de la JAME 

    31ans 

    12/02/2012 et le 24/02/2012 à Metet-Centre et à Yaoundé.

    AGODI Patrice

    Adjudant Chef, commandant de brigade de la gendarmerie de Nkol-Metet.

    51ans

    30/05/2011 à la brigade de gendarmerie de Nkol-Metet.

    AKOA MBARGA Benoît

    Jeune de Ngoantet et Militant RDPC

    30 ans

    23/02/2012 à Mbalmayo.

    AMOUGOU ADA Albert

    Fonctionnaire retraité et Représentant du Chef du village d'Obout

    62ans

    04 /06/2011 et le 12/02/2012 à la Chefferie traditionnelle d'Obout.

    AMOUGOU Augustin Jean Marie

    Chef Traditionnel d'Obout et homme d'affaires

    55ans

    04 /06/2011 à la Chefferie traditionnelle d'Obout.

    AMOUGOU Jean

    Instituteur retraité et Représentant du Chef traditionnel de Ngoantet II

    63ans

    16/07/2011 à la Chefferie traditionnelle de Ngoantet.

    AMOUGOU MBARGA Fidèle

    Fonctionnaire retraité et Représentant du Chef de village Metet-centre

    65ans

    01/06/ 2011 à son domicile sis à Metet-centre.

    AKOA AMOUGOU Vincent

    Zomloa et Chef traditionnel de Nkolya III

    70ans

    15/07/ 2011 à la Chefferie de Nkolya III.

    BALA BALA FRANCIS

    Chef traditionnel d'Oveng

    66ans

    30/05/ 2011 et le 11/02/2012 à la Chefferie d'Oveng.

    EMGBWANG MBALLA Daniel Jöel

    Jeune d'Oveng et lauréat de l'ASFRADO (2003)

    24 ans

    07/02/2012 à Metet-Centre

    MBALA MESSI Manfred

    Haut- fonctionnaire retraité, Zomloa et Chef traditionnel de Metet-Centre

    72 ans

    Entretien du 30/07/ 2011 à la Chefferie de Metet-Centre.

    MBALA MANGA Gallus

    Vice - Président de la jeunesse active de Metet en évolution (JAME)

    30ans

    15/07/2011 à la mairie de Nkol-Metet.

    MBALA ZANGANA Benjamin

    Ancien Sous-Préfet et Maire de Mbalmayo, actuel Chef de groupement BENE Nord-Est

    73ans

    Entretiens préliminaires : mai, juin, juillet, septembre, août 2011 et le 19 mars 2012 à la Chefferie de groupement sis à Metet- centre et à sa résidence de Mbalmayo.

    OWONO MBIDA Christian

    Jeune Mvog Essissima de Nkol Ekabili

    30 ans

    11 février 2012 à Nkol-Ekabili

    OWONO MBARGA Armand

    Jeune d'Oveng et lauréat de l'ASFRADO (2000)

    22 ans

    07/02/2012 à Metet-Centre

    OWONO OWONO Hugor

    Jeune de Renaissance de Bikoko

    25 ans

    Bikoko le 13/09/2011 à la Mairie de Nkol-Metet.

    MVA KOUMA

    Cultivateur et Chef Traditionnel de Bikoko

    53ans

    16/08/2011 et 10/02/2012 à la Chefferie de Bikoko.

    MVENG OWONO Luc Bruno

    Docteur es lettres, Pasteur et Professeur retraité

    75ans

    Entretiens successifs : mai, juin, juillet, septembre, août 2011 à la à sa résidence à Nkolndongo-Yaoundé.

    NDI NDI Anicet Julien

    Président de la JAME

    29 ans

    11/02/2011 à Metet-Centre

    NDI NDI François

    Fonctionnaire, Chef par intérim de soa si

    53ans

    25/08/2011 à la Chefferie de Soa si

    NGUELE Désiré

    Pasteur à l'Eglise Presbytérienne orthodoxe (EPCO)

    60ans

    17/08/2011 à son domicile à Ebomsi I

    OBADA Isaac

    Ier Adjoint au Maire de Nkol-Metet

    55ans

    11 novembre 2012

    OYONO OWONO Joseph

    Ier Maire de Nkol-Metet, actuel Chef Traditionnel de Nkol-Metet.

    72ans

    04 /06/2011 et le 11/02/2012 à la Chefferie traditionnelle d'Awäe.

    OWONO ZAMBO Nathanäel,

    Entrepreuneur, Menuisier

    78 ans

    entretien du 12/02/2012 à Metet-Centre

    ONDOUA MENYIE Paul Aimé

    Ancien député, actuel Chef de Groupement BENE Sud-Est et Chef traditionnel du village Nkol-Ekabili.

    57ans

    01/02/2012 et 09/02/2012 à Mbalmayo

    Madame LOMBO Marthe

    Sous-Préfet de Nkol-Metet

    40ans

    19/07/2011 à la sous-préfecture de Nkol-Metet.

    M. le Secrétaire Particulier de Joseph Ndi Samba.

     

    42ans

    10/02/2012 à la Mairie de Nkol-Metet.

    TSOUNGUI OHANDA Emmanuel

    Professeur d'éducation physique et Chef traditionnel de Ngoantet II

    54ans

    16/07/2011 à la Chefferie traditionnelle de Ngoantet.

    ZAMBO ASSEMBE Emile

    Cadre administratif à l'université de Yaoundé II-Soa et Président sous-section RDPC Ngoantet

    40ans

    22/10/2011 et le 24/02/2012 à Soa

    ZAMBO AMOUGOU Engelbert

    Président sous-section RDPC Metet-Centre

    47ans

    10/02/2012 à Metet-Centre

    ANNEXES

    Annexe 1 

    Protocole d'entretien avec Sa Majesté .................................................... Chef de Groupement BENE.......................................

    I- BIOGRAPHIE ET EXERCICE DU METIER POLITIQUE

    1. Eléments de Biographie :

    - Date et lieu de naissance

    - Village

    - Ethnie.

    2. Cursus scolaire et académique

    - Ecoles fréquentées

    - Diplômes obtenus

    - Autres formations

    3. Parcours professionnel et politique

    - Les étapes marquantes de votre carrière professionnelle

    - Les étapes marquantes de votre carrière politique

    - Quelle est l'année de votre premier engagement politique et votre motivation à cette époque.

    4. Actions au plan politique et local pour votre communauté

    - Vos fonctions politico-administratives ont-elles été bénéfiques pour les membres de votre communauté ?

    - Avez-vous contribué au développement de votre Arrondissement, mieux de votre village ?

    - Avez-vous inséré les gens de votre communauté dans la vie active socio professionnelle ?

    5. Quelles ont été vos affinités avec l'UNC et puis le RDPC ? Avez-vous eu d'autres affinités avec d'autres partis politiques ?

    6. Avez-vous occupé les postes de responsabilités dans des partis politiques ?

    II- LA DYNAMIQUE DE LA CHEFFERIE TRADITIONNELLE A NKOL-METET

    7. Qu'est ce qui justifie l'effectivité tardive des Chefferies de groupement à Nkol- Metet pourtant celles-ci étaient prévues depuis 1982 ?

    8. Qu'est ce qui vous a motivé à conquérir la Chefferie de groupement ?

    9. Selon vous, qu'est ce qui a justifié l'âpreté de votre élection à la tête de la Chefferie de groupement ?

    10. Avez-vous affronté d'autres candidats et quel en était leur nombre ?

    11. Votre victoire n'est elle pas liée à votre passif socioprofessionnel ?

    12. Votre engagement dans la vie politique ne cause t'il pas une entrave pour le bon fonctionnement de votre Chefferie ?

    13. Si l'un de vos sujets affiche ostentatoirement son engagement politique avec une formation politique qui n'est pas la vôtre, comment allez vous vous comporter avec ce dernier ? ne sera-t-il pas frappé d'ostracisme ?

    14. Au demeurant, quelles sont les missions des Chefferies de groupement ? ont-elles des missions spécifiques par rapport aux Chefferies de 3e degré ?

    15. Comment gérez-vous le cumul de vos diverses fonctions et de vos activités ? ces cumuls sont ils bénéfiques pour le rayonnement de votre Chefferie ou servent ils uniquement votre intérêt personnel ?

    III. RAPPORT DE LA CHEFFERIE DE GROUPEMENT AVEC LES AUTRES INSTITUTIONS PRESENTES A NKOL-METET.

    16. Quels sont l'état de vos rapports avec votre compère Chef de groupement ; laMairie et la Sous- Préfecture de Nkol-Metet ?

    17. Que représente pour vous les associations citées ci-dessous ? Et en quoi elles sont bénéfiques pour la reviviscence de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet :

    - RDPC (Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais)

    - ACTRAN (Association des Chefs Traditionnels de Nkol-Metet)

    - ACTRANSO (Association des Chefs Traditionnels du Département Nyong et So'o)

    - ADENSO (Association des élites du Nyong et So'o)

    - EKOAN MVOG-AMOUGOU

    - Et autres ...

    18. Quel est votre degré d'implication dans ces associations ?

    IV. GENERALITES SUR LA VIE POLITIQUE A NKOL-METET DEPUIS 1996.

    19. Quel a été l'impact de l'éclatement de la Mairie de Mbalmayo dans la vie politico- administrative à Nkol-Metet ?

    20. Quel regard portez-vous sur la vie politique locale à Nkol-Metet depuis 1996 ?

    21. A votre avis, qu'est ce qui a favorisé l'élection de Sa Majesté Oyono Joseph Chef traditionnel comme premier Maire de Nkol-Metet aux élections de 1996 ?

    22. Qu'est ce qui explique le fait qu'à Nkol-Metet les Chefs engagés politiquement non jamais été réélus après un mandat ?

    23. Comment analysez-vous le militantisme politique des Chefs traditionnels de Nkol-Metet.

    24. Qu'est ce qui motive aujourd'hui les Chefs de Nkol-Metet à promouvoir le développement local à travers les champs communautaires, les GICS...

    25. Qu'est ce qui explique le recul de la tradition Bene à Nkol-Metet ? pourquoi à Nkol-Metet les Chefferies traditionnelles n'organisent t-elles pas des activités valorisant la culture Bene ? existe-t-il encore une culture Bene ?

    26. En dernière analyse, pouvez nous dire substantiellement ce que représente pour vous la Chefferie traditionnelle Bene ? Et comment pensez-vous de manière spécifique à revivifier votre Chefferie ou du moins les Chefferies de votre groupement ?

    Annexe 2 : Protocole d'entretien avec Sa Majesté (Chef de 3e degré)

    I- DE LA CHEFFERIE

    A- CHEFFERIEGENERALITES SUR LA CHEFFERIE

    1- Qu'elle est l'année de création de votre Chefferie ?

    2- Vos prédécesseurs ont-ils connu l'impérialisme occidental à travers la colonisation par les Allemands, les Anglais les Français ? Et quels étaient leurs rapports avec ces différentes administrations ?

    3- Que fait-on pour devenir Chef traditionnel ; y'a-t-il des conditions précises ou alors tout le monde peut devenir Chef traditionnel ?

    4- Combien de Chefs ont-ils déjà été à la tête de votre Chefferie depuis sa création et qu'est-ce qu'ils ont laissé à la postérité comme héritage ?

    5- Quelles ont été les circonstances de leur départ ?

    B- LES INSTITUTIONS DE LA CHEFFERIE

    6- Dans votre Chefferie existe- t-il un conseil de notables, si oui qu'elle est le rôle qui lui est dévolu ?

    7- Comment devient-on un notable ? Autrement dit, y'a-t-il des conditions bien déterminées que doivent remplir les individus pour devenir un notable au sein de votre Chefferie ? (ailleurs on parle du phénomène des Big men le constat est-il perceptible ici) ?

    8- Quelle est le sens de ces notions : MVOG, Nkukuma ?

    9- Quelles différences faites-vous entre Njobot, Nkukuma et Zomloa ?

    10- Quelle est la nature de vos relations avec les différents Mvog de votre                       village ?

    II- De la décentralisation

    11- Pour vous, que signifie décentralisation ?

    12- Pouvez-vous faire un parallèle entre la Chefferie et ce processus ?

    13- Quelle est la nature de vos rapports avec les services déconcentrés de l'Etat                        (Préfecture, Sous Préfecture...) ?

    14- Quelle est la nature de vos rapports avec la Mairie (plus précisément la Mairie de Nkol-Metet) ?

    15- Quelle est la nature de vos rapports avec la Chefferie de groupement de votre ressort, la Chefferie de groupement ne fait-elle pas ombrage au fonctionnement de votre Chefferie ou alors vous avez des missions distinctes ?

    16- Quelle est la nature de vos rapports avec les élites de votre village ?

    III- De la démocratisation

    17- S'il vous arrivait de définir le régime politique de votre Chefferie, comment le définirez-vous ?

    18- Dans le passé, les femmes et les enfants ont été marginalisés dans la société béti pourtant ils sont un pilier essentiel de celle-ci ; qu'est-ce qui peut à votre avis justifier un tel désenchantement ? Et comment pensez-vous réhabiliter ces derniers ?

    19- Que pensez-vous de la désignation du Chef par la voie des élections ?

    20- Pour vous quels sont les critères qui doivent présider à la désignation d'un Chef ?

    21- Pensez-vous que votre Chefferie, mieux, les Chefferies traditionnelles de Nkol-Metet ont-elles un rôle à jouer dans le processus de développement de votre unité administrative ?

    22- Pensez- vous réellement que les Chefs traditionnels ont un rôle majeur à jouer dans le développement politique, économique et culturel de notre pays. Et quelles sont vos perspectives pour le développement de votre village ?

    IV- De la culture

    23- Y'a-t-il dans votre fonctionnement une mission spécifique en rapport avec la culture et les traditions locales ?

    24- Pensez- vous qu'on doit bannir les Chefferies et en particulier les Chefferies Bene de votre environnement sociopolitique et socio culturel ?

    25- Pour vous qu'est-ce qui explique le fait que les Chefs traditionnels Béti/Bene soient moins respectés par leurs sujets pourtant, dans les grassfields et dans les lamidats ils sont très craints et vénérés.

    26- Pour vous que doit on faire pour remédier à cela ?

    27- Les Bene ont-ils encore des valeurs culturelles ? si oui quelles sont-elles ?

    28- Pourquoi des cérémonies de mariage, de funérailles ne sont-elles plus les cadres d'expressions de nos traditions ?

    29- Quelle est la place qu'accordez vous à la sorcellerie ? En d'autres termes, peut-on être Chef sans être sorcier ?

    30- Comment pensez-vous mieux vendre la culture de vos Chefferies ? à l'Ouest, ils ont le Nguon, au Littroral le Ngondo, et chez les Bene alors?

    31- Avant le christianisme les Bene de Nkolmetet avaient-ils une religion ?

    Annexe 4 : Protocole d'entretien (réservés aux élites de Nkol-Metet)

    Madame, Monsieur :

    - Elites politiques

    - Elites intellectuelles

    - Elites religieuses

    - Elites jeunes

    - Elites féminines

    1- Que représentent pour vous de façon générale les Chefferies traditionnelles et en particulier les Chefferies de l'arrondissement de Nkol-Metet ?

    2- Que pensez-vous de la mise effective des Chefferies de groupements dans l'arrondissement de Nkol-Metet ?

    3- Etes-vous d'avis avec ceux qui pensent qu'on doit supprimer nos Chefferies ?

    4- Selon vous, les Chefferies ont- elles un rôle à jouer dans le processus de la décentralisation ?

    5- Partagez-vous l'idée selon laquelle l'on doit transformer les Chefferies en communes en ce sens qu'elles sont les piliers du développement local notamment en zone rurale ?

    6- Comment appréhendez-vous l'impact de la Démocratisation sur les Chefferies traditionnelles dans l'arrondissement de Nkol-Metet ?

    7- Quelles solutions pouvez-vous proposer pour que les Chefferies traditionnelles de Nkol-Metet soient davantage des moteurs de développement pour leurs communautés et de l'Etat du Cameroun en général ?

    8- Pour vous, qu'est-ce qui justifie la dévalorisation des Chefferies traditionnelles Béti par rapport à celles de l'Ouest du Cameroun ou du Nord Cameroun ?

    9- Pensez-vous que l'élite à un rôle à jouer dans la revalorisation des Chefferies à Nkol-Metet.

    Annexe 4 : Décret n°77/245 du 15 juillet 1977 portant organisation des  Chefferies Traditionnelles au Cameroun

    REPUBLIQUE UNIE DU CAMEROUN PAIX - TRAVAIL - PATRIE

    DÉCRET N°77/245 du 15 juillet 1977 PORTANT ORGANISATION DES CHEFFERIES TRADITIONNELLES AU CAMEROUN.

    LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,

    VU la Constitution du 2 juin 1972 modifiée et complétée par la loi n°75 du 9 mai 1975 ;

    VU la Loi n° 7/SC du 10 décembre 1960 sur la reconnaissance des Chefs Traditionnels, ensemble les textes modificatifs subséquents ;

    VU le Décret n°72/349 du 24 juillet 1972 portant organisation Administrative de la République Unie du Cameroun ;

    VU le Décret n°72/422 du 26 août 1972 modifié et complété par le Décret n° 76/147 du 10 avril 1976 fixant les attributions des Chefs des Circonscriptions Administratives et les Organismes Administratifs chargés de les assister dans l'exercice de leurs fonctions, ensemble les textes modificatifs subséquents ;

    VU l'Arrêté n°244 du 4 février 1933 fixant le statut des Chefs Coutumiers ensemble les textes modificatifs subséquents ;

    D E C R E T E :

    CHAPITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

    Article 1er: Les Collectivités Traditionnelles sont organisées en Chefferies conformément aux dispositions du présent Décret.

    Article 2 : La Chefferie Traditionnelle est organisée sur une base territoriale. Elle comporte trois degrés hiérarchisés suivants :

    - Chefferie de 1er degré ;

    - Chefferie de 2ème degré ;

    - Chefferie de 3ème degré.

    Article 3 : Est de 1er degré, toute Chefferie dont le territoire de compétence recouvre celui d'au moins deux Chefferies de 2ème degré. Ses limites territoriales n'excèdent pas en principe celles d'un Département.

    Est de 2ème degré, toute Chefferie dont le territoire de commandement englobe celui d'au moins deux Chefferies de 3ème degré. Ses imites n'excèdent pas en principe celles d'un Arrondissement.

    La Chefferie de 3ème degré correspond au village ou quartier milieu rural, et au quartier en milieu urbain.

    Article 4 : Nonobstant les dispositions de l'article 3 ci-dessus, l'Autorité compétente peut classer une Chefferie Traditionnelle au 1er ou 2ème degré, raison notamment de son importance démographique et économique.

    Article 5 : Chaque Chefferie porte la dénomination consacrée par la tradition. Toutefois, l'Autorité compétente peut lui conférer, le cas échéant, une nouvelle dénomination.

    Article 6 : Toute Chefferie Traditionnelle est placée sous l'Autorité d'un Chef, assisté d'un conseil de notables, formé selon la tradition locale.

    Le Chef désigne au sein du Conseil, un notable qui le représente en cas d'absence ou d'empêchement. Le Chef peut mettre fin à ses fonctions.

    Article 7 : Les Chefferies de 1er degré sont créées par Arrêté du Premier Ministre, celles de 2ème degré par le Ministre de l'Administration Territoriale et celles de 3ème degré, par le Préfet.

    CHAPITRE II : DESIGNATION DES CHEFS

    Article 8 : Les Chefs Traditionnels sont, en principe, choisis au sein des familles appelées à exercer coutumièrement le Commandement Traditionnel. Les candidats doivent remplir les conditions d'aptitude physique et morale requises, et savoir autant que possible, lire et écrire.

    Article 9 : La vacance d'une Chefferie Traditionnelle intervient par suite de décès, de destitution, de démission ou d'incapacité physique ou mentale permanente du titulaire, dûment constatée par un médecin public requis à cet effet.

    Article 10 : En cas de vacance d'une Chefferie, l'Autorité Administrative procède sans délais aux consultations nécessaires, en vue de la désignation d'un nouveau Chef.

    Article 11 : Les notabilités coutumières compétentes, sont obligatoirement consultées pour la désignation d'un Chef.

    Article 12 : Les consultations prévues aux Articles 10 et 11 qui précèdent ont lieu au cours d'une réunion présidée par le Préfet pour les Chefferies de 1er et 2ème degrés, et par le Sous-Préfet pour les Chefferies de 3e degré.

    Le déroulement des consultations est consigné sur un procès-verbal signé du Président de la Réunion.

    Article 13 : Le Préfet transmet par voie hiérarchique aux Autorités compétentes, le procès-verbal de consultation accompagné des pièces suivantes 

    - un extrait de casier judiciaire du candidat (bulletin n°3) ;

    - une copie d'acte de naissance de l'intéressé ou du jugement supplétif en tenant lieu ;

    - un certificat médical d'aptitude physique établi par un médecin public ;

    - une copie s'il y a lieu de l'acte officiel prouvant la vacance de la Chefferie (acte de décès, démission ou destitution, rapport médical).

    Article 14 : Le Sous-préfet compétent transmet au Préfet, un dossier similaire à celui prévu à l'Article 13 ci-dessus.

    Article 15 : Les Chefs de 1er degré sont désignés par le Premier Ministre ; ceux de 2ème degré par le Ministre de l'Administration Territoriale et ceux de 3ème degré par le Préfet.

    Article 16 : Les contestations soulevées à l'occasion de la désignation d'un Chef sont portées devant l'Autorité investie du pouvoir de désignation qui se prononce en premier et en dernier ressort.

    Toutefois, la Décision prise peut être rapportée, s'il est établi que l'Autorité compétente a été induite en erreur.

    Article 17 : (1) Le Chef doit nécessairement résider sur son territoire de commandement.

    (2) Les fonctions de Chef Traditionnel sont incompatibles avec toute autre fonction publique. Toutefois, l'Autorité investie du pouvoir de désignation peut autoriser le cumul de fonctions, notamment lorsque la personne intéressée réside sur le territoire de la Chefferie concernée.

    Article 18 : (1) Le Chef peut démissionner de ses fonctions.

    (2) Sa démission est acceptée par l'Autorité investie du pouvoir de désignation.

    CHAPITRE III : ATTRIBUTIONS ET AVANTAGES ATTACHES AUX FONCTIONS DE CHEF TRADITIONNEL

    Article 19 : Sous l'Autorité du Ministre de l'Administration Territoriale, les Chefs Traditionnels ont pour rôle de seconder les Autorités Administratives dans leur mission d'encadrement des populations.

    Article 20 : Auxiliaires de l'Administration, les Chefs Traditionnels sont notamment chargés :

    1- de transmettre à la population les directives des Autorités Administratives, et d'en assurer l'exécution ;

    2- de concourir, sous la direction des Autorités Administratives compétentes, au maintien de l'ordre public et au développement économique, social et culturel de leurs unités de commandement ;

    3- de recouvrer les impôts et taxes de l'Etat et des autres Collectivités Publiques, dans les conditions fixées par la réglementation ;

    Indépendamment des tâches qui précèdent, les Chefs Traditionnels doivent accomplir toute autre mission qui peut leur être confiée par l'Autorité Administrative locale.

    Article 21 : Les Chefs Traditionnels peuvent, conformément à la coutume et lorsque les lois et règlements n'en disposent pas autrement, procéder à des conciliations ou arbitrages entre leurs Administrés.

    Article 22 : (1) Les Chefs de 1er et 2ème degrés perçoivent mensuellement

    - une allocation fixe, calculée sur la base de l'importance numérique de leur population ;

    - une indemnité pour charges spéciales.

    (2) L'allocation fixe et l'indemnité pour charges spéciales prévues au présent Article sont fixées par Arrêté conjoint du Ministre de l'Administration Territoriale et du Ministre des Finances.

    (3) L'allocation fixe est soumise à retenue pour impôt ; elle ne peut être inférieure au salaire du travailleur de la première catégorie échelon 1 du secteur public de la zone où est installée la Chefferie.

    Article 23 : (1) Les Chefs Traditionnels peuvent prétendre au paiement des remises sur l'impôt forfaitaire collecté par leurs soins, dans les conditions fixées par le Code Général des Impôts.

    (2) Ils peuvent également prétendre à des primes d'efficacité octroyées par Arrêté du Ministre de l'Administration Territoriale sur proposition des Autorités Administratives, en raison de leur dynamisme et de leur efficacité dans les opérations de développement économique et social de la nation.

    (3) Les taux de cette prime sont fixés dans les mêmes conditions que ceux de l'allocation fixe et de l'indemnité pour charges spéciales.

    Article 24 : (1) L'allocation fixe et l'indemnité pour charges spéciales ne peuvent se cumuler avec les indemnités parlementaires, le traitement de fonctionnaire ou d'Agent des Administrations Publiques.

    (2) En cas de cumul de fonctions dûment autorisé, l'intéressé doit opter, avant sa désignation par l'Autorité compétente, soit pour le maintien de son traitement ou salaire, soit pour le bénéfice des émoluments de Chef Traditionnel.

    Article 25 : (1) Tout Chef Traditionnel victime d'une incapacité permanente imputable au service peut prétendre :

    1- à une rente viagère lorsque cette incapacité entraîne son dégagement de ses fonctions ;

    2- à une indemnité dans les autres cas.

    (2) Le montant des allocations prévues ci-dessus est déterminé par arrêté conjoint du Ministre de l'Administration Territoriale et du Ministre des Finances.

    Article 26 : Les Chefs Traditionnels portent un insigne distinctif, et éventuellement une tenue dont les caractéristiques sont déterminées par Arrêté du Ministre de l'Administration Territoriale. L'acquisition de cet insigne et de cette tenue est à leur charge.

    CHAPITRE IV : GARANTIES ET DISCIPLINE

    Article 27 : (1) L'Etat est tenu d'assurer au Chef la protection contre les menaces, outrages, violences, voies de fait, injures ou diffamation dont il peut être l'objet en raison ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions.

    (2) Il est tenu, le cas échéant, de réparer le préjudice subi par le Chef du fait de ces Actes. Dans ce cas, l'Etat est d'office subrogé aux Droits de la victime, pour obtenir du ou des auteurs des faits incriminés, la restitution des sommes versées par lui au Chef à titre de dédommagement, indépendamment des sanctions pénales encourues.

    Article 28 : Les Autorités Administratives portent chaque année leur appréciation sur l'activité des Chefs Traditionnels de leurs circonscriptions Administratives, compte tenu notamment de leur efficacité, de leur rendement et du développement économique et social de leur territoire de commandement.

    Article 29 : En cas de faute dans l'exercice de leurs fonctions, en cas d'inefficacité, d'inertie ou d'exactions à l'égard des populations, les Chefs Traditionnels encourent les sanctions suivantes :

    - rappel à l'ordre ;

    - avertissement ;

    - blâme simple ;

    - blâme avec suspension pendant 3 mois au plus de la totalité des allocations ;

    - destitution ;

    Les sanctions disciplinaires qui précèdent ne peuvent être infligées que si le Chef a été préalablement appelé à donner des explications sur son comportement, son inefficacité ou son inertie.

    Article 30 : (1) Le rappel à l'ordre, l'avertissement et le blâme simple sont infligés :

    a- aux Chefs de 3ème degré par le Sous-préfet territorialement compétent ;

    b- aux Chefs de 2ème degré par le Préfet, d'office ou sur proposition du Sous-Préfet ;

    c- aux Chefs de 1er degré par le Gouverneur, d'office ou sur proposition du Préfet ;

    (2) Le blâme avec suspension pendant 3 mois au plus de la totalité des allocations est infligé par le Ministre de l'Administration Territoriale.

    (3) La destitution des Chefs de 3ème degré est prononcée par le Ministre de l'Administration Territoriale, celle des Chefs de 1er et 2ème degrés est prononcée par le Premier Ministre.

    CHAPITRE V : DISPOSITIONS DIVERSES

    Article 31 : Par dérogation aux dispositions de l'Article 7 ci-dessus, certaines agglomérations urbaines peuvent être organisées en zones, quartiers et blocs par Arrêté du Ministre de l'Administration Territoriale, sur rapport des Autorités Administratives locales, compte tenu de leur importance démographique et lorsque les nécessités d'encadrement l'exigent.

    Toutefois, le Ministre de l'Administration Territoriale peut décider qu'une zone constituant antérieurement une Chefferie Traditionnelle soit maintenue en tant que telle ; dans ce cas, la zone considérée bénéficie de la réglementation applicable aux Chefferies de son degré de classement.

    Article 32 : (1) Les zones, quartiers et blocs sont des structures hiérarchisées, placées sous l'Autorité des responsables appelés : Chefs de zones, Chefs de quartiers, Chefs de blocs.

    (2) Leurs fonctions peuvent se cumuler avec toute autre activité salariée, à condition que les intéressés résident effectivement dans leur territoire de commandement.

    Article 33 : (1) Les zones et les quartiers sont assimilés, du point de vue de leur fonctionnement et de leur Administration, aux Chefferies de 2ème et 3ème degrés.

    (2) Le mode de désignation des Chefs de zones, de quartiers et de blocs est déterminé par Arrêté du Ministre de l'Administration Territoriale.

    Article 34 : (1) Les Chefs de zones et de quartiers peuvent prétendre à la prime de rendement et aux remises sur l'impôt forfaitaire, dans les mêmes conditions que les Chefs Traditionnels. Ils n'ont droit ni à l'allocation fixe ni à l'indemnité pour charges spéciales.

    (2) Les Chefs de blocs peuvent prétendre à une remise sur l'impôt forfaitaire s'ils ont été désignés en qualité de collecteurs d'impôt.

    Article 35 : Les Chefs Traditionnels qui exercent leurs fonctions dans les agglomérations urbaines réorganisées conformément aux dispositions de l'Article 31 Alinéa 1er ci-dessus, mais auxquelles ne s'applique pas l'Article 31 Alinéa 2 du présent Décret, conservent leur statut coutumier à titre personnel.

    Article 36 : Les avantages prévus au présent Décret ne s'appliquent qu'aux Chefferies Traditionnelles dûment reclassées, conformément aux dispositions de l'Article 2 ci-dessus.

    Article 37 : Les contestations en matière de désignation des Chefs non tranchées à la date de dissolution de la "Chieftancy Advisory Commission", instituée par la Loi n°7/SC du 10 décembre 1960 sont réglées conformément aux dispositions de l'Article 16 du présent Décret.

    Article 38 : Les dispositions financières prévues aux Articles 22 et 23 ci-dessus, entreront en vigueur à compter du 1er juillet 1977.

    Article 39 : Sont abrogées toutes les dispositions antérieures au présent Décret.

    Article 40 : Le présent Décret sera enregistré et publié au Journal Officiel en Français et en Anglais.

    YAOUNDE, le 15 JUILLET 1977

    POUR COPIE CERTIFIE CONFORME LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE ;

    YAOUNDE, le 30 JUILLET 1977 (é) AHMADOU AHIDJO

    LE DIRECTEUR DE L'ORGANISATION

    DU TERRITOIRE ;

    (é) Isaac NJOMGANG

    SOURCE : Archives de sa Majesté MBALA ZANGANA Benjamin Chef de groupement      Bene Nord - Est.

    Annexe 5 : ARRETE N°13/A/MINAT/DCT Déterminant les chefferies traditionnelles de 2e degré dans le Département du NYONG-ET-SO,  Province du Centre-Sud.

    Source : Archives de Sa Majesté MBALA ZANGANA Benjamin Chef de groupement Bene Nord - Est.

    Annexes 6 : Images de quelques Chefferies de Nkol-Metet

    Chefferie de groupement Bene -Nord-Est à Metet-Centre.

    Source : Cliché de Sylvain Charles Amougou Mveng, Metet- Centre le                  27/07/2012.

    Chefferies de groupement BENE Sud-Est et de 3e degré de Nkol Ekabili.

    Source : Cliché de Sylvain Charles Amougou Mveng, Nkol- Ekabili le   27/10/2012.

    Chefferie traditionnelle de 3e degré d'Obout

    Source : Cliché de Sylvain Charles Amougou Mveng, Obout le   10/02/2012.

    Chefferie traditionnelle de 3e degré de BIKOKO.

    Source : Cliché de Sylvain Charles Amougou Mveng, BIKOKO le  27/10/2012.

    Table des matières

    Sommaire.....................................................................................................i

    Dédicaces iii

    REMERCIEMENTS iv

    RESUME vi

    ABSTRACT vii

    INTRODUCTION 1

    Première partie : Les ressorts normatifs et affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 33

    Chapitre1 : Les ressorts normatifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 34

    Section 1 : La prévalence maintenue des normes juridiques à l'ère de la libéralisation politique 35

    Paragraphe 1 : La persistance du décret de 1977 comme référentiel juridique organisant la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique 36

    A- Le Décret de 1977 et la consécration du Chef traditionnel comme Auxiliaire de l' Administration 36

    B- Obsolescence du Décret de 1977 à l'ère de la libéralisation politique 38

    Paragraphe 2 : La Constitution de 1996 et la faible institutionnalisation de la Chefferie Traditionnelle 39

    Section 2 : Le caractère récessif des normes coutumières de la Chefferie traditionnelle à l'ère de la libéralisation politique 40

    Paragraphe 1 : La coutume comme cadre de dévolution et d'exercice de Traditionnelle 41

    A- La coutume comme cadre de dévolution du pouvoir traditionnel 41

    B- L'exercice du pouvoir traditionnel chez les Bene 45

    Paragraphe 2 : La relativisation de la norme coutumière à l'ère de lalibéralisation politique 49

    A- Le caractère administratif des Chefferies traditionnelles 50

    B- Le désir du trône hors des familles à exercer coutumièrement commandement traditionnel 51

    Conclusion partielle 51

    Chapitre 2 : Les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 53

    Section 1 : Les ressorts affectifs de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet entre communalisation et sociation 54

    Paragraphe 1 : Genèse de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet entre communalisation et sociation 54

    A- La Chefferie Traditionnelle Bene de Nkol-Metet et l'option de communalisation 55

    B- La Chefferie Traditionnelle Bene de Nkol-Metet et l'option de sociation 56

    Paragraphe 2 : L'avènement des Chefferies de Groupement à Nkol-Metet : des ressorts ataviques dans un contexte de la libéralisation politique 58

    A- La Chefferie de Groupement Bene -Nord- Est 58

    B- La Chefferie de Groupement Bene- Sud- Est 59

    Section II : La fragilisation de la grâce des Chefs 60

    Paragraphe 1 : De la légitimité controversée de la Chefferie traditionnelle à Nkol-Metet 61

    A- Les ressorts ethniques de la controverse de la légitimité des Chefs 61

    B- La controverse de la légitimité liée aux critères de désignation des Chefs traditionnels 63

    Paragraphe 2: le désamour vis-à-vis des Chefs par les élites et par les populations 67

    A- Le management fantaisiste des Chefferies de Groupement 67

    B- La Chefferie traditionnelle Bene entre laxisme et déviances 68

    Conclusion partielle 68

    Deuxième partie : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 69

    Chapitre 3 : Les ressorts stratégiques de la Chefferie traditionnelle Bene de Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 71

    Section 1 : Les Chefferies traditionnelles comme lieu d'un pouvoir sous contrôle bureaucratique et élitaire 71

    Paragraphe 1 : Compétition pour la détermination des Chefs comme lutte de pouvoir 72

    A- La main invisible de l'élite politico - administrative 73

    B- De l'âpreté de la compétition pour la détermination des Chefs 74

    Paragraphe 2 : Les jeux de Pouvoir pour la conservation des Chefferies 77

    A- Des Stratégies collectives pour la conservation des Chefferies traditionnelles 78

    B- Des stratégies individuelles pour la conservation des Chefferies traditionnelles 81

    Section 2 : Les Chefferies Bene comme arène et marché politique 86

    Paragraphe 1 : Les Chefferies comme arène de compétition pour le contrôle du développement local 87

    A- L'ACTRAN : un catalyseur théorico-pragmatique du développement local des Chefferies traditionnelles à Nkol-Metet 87

    B- Implication responsable des Chefs traditionnels pour développement local 88

    Paragraphe 2 : la Chefferie traditionnelle comme niveau des pouvoirs dans les jeux de la décentralisation 92

    A- Enrôlement des Chefs traditionnels de par la Mairie 92

    B- Les Chefs traditionnels metteurs en scène du processus de la décentralisation dans les Chefferies de Nkol-Metet 94

    Conclusion partielle 96

    Chapitre 4 : Les ressorts pragmatiques de la Chefferie traditionnelle Bene à Nkol-Metet à l'ère de la libéralisation politique 97

    Section 1 : Les Chefferies traditionnelles comme lieu d'activités socioéconomiques 98

    Paragraphe 1 : Les trajectoires des Chefs comme entrepreneurs du pouvoir coutumier 98

    A- Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin : De la carrière politico-administrative à la Chefferie traditionnelle 99

    B- Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé : du capital politique à la Chefferie traditionnelle 102

    C- Sa Majesté Oyono Owono Joseph : de la haute administration aux fonctions de Chef traditionnel et de premier Magistrat municipal de Nkol-Metet. 104

    Paragraphe 2 : Les Chefferies traditionnelles comme lieux d'investissements sociopolitiques 107

    A- Les Chefs et leur statut de relais de l'Administration 107

    B- Les calculs politiques des Chefs traditionnels 110

    Section 2 : La place des Chefs et des Chefferies dans l'activité de la libéralisation politique 113

    Paragraphe 1 : L'engagement politique des Chefs dans les compétitions politiques municipales et législatives 114

    A- Sa Majesté Oyono Owono Joseph : de la cooptation à la déception 115

    B- Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé et élections législatives de 2002 et de 2007 ............................................................................................... 117

    Paragraphe 2 : La mobilisation des Chefs dans les processus politiques et économiques de la décentralisation 118

    A- Le renforcement des capacités des Chefs autour du capital économique 119

    B- Le renforcement des capacités des Chefs autour du capital symbolique 120

    Conclusion partielle 121

    CONCLUSION GENERALE 122

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 128

    ANNEXES 138

    Table des matières..............................................................................................................157

    * 1Dans de nombreux pays africains au lendemain des indépendances, les Chefferies traditionnelles ont été bannies. C'est le cas du Ghana sous le Président Nkrumah 1956-1966 et sous le Président Jerry Rawlings en 1980. Nkrumah estimait que les Chefferies traditionnelles s'étaient compromises avec le pouvoir colonial et qu'elles étaient un obstacle à la modernisation du pays. Pour lui, il fallait libérer le peuple : « de l'esclavage dans lequel le maintenait le colonialisme étranger, la tyrannie du despotisme féodal local » (voir, Jacquemot, 2007 :57).  Le Ghana n'est pas le seul pays à avoir mis les Chefferies en quarantaine, on l'a également vu au Burkina-Faso sous le Président Thomas Sankara. En Côte d'Ivoire avec le Président Félix Houphouët Boigny. La logique politique qui prévalait dans ces pays était le monolithisme et par ce procédé, les gouvernants s'insurgeaient contre toutes les forces centripètes. Au Cameroun les Chefferies n'ont pas été bannies, mais ont été fragilisées car elles devaient leur survie à leur allégeance, mieux, à leur loyauté au parti unique. En d'autres termes, les Chefs traditionnels sous le Président Ahidjo étaient contraints à un certain militantisme (voir, Bayart, 1989 :189). Dieudonné Oyono relève à cet égard : « Ahmadou Ahidjo, dont le crédo était unité nationale, avait bâti son système sur une hostilité à tout, eût risqué de démembrer et d'affaiblir l'Etat » (Dieudonné Oyono in Eko'o Akouafane, 2009 : 14).

    * 2 Au Cameroun, c'est le décret du 15/07/1977 portant organisation des Chefferies traditionnelles qui reconnait les Chefferies comme des circonscriptions administratives et de ce fait, consacre les Chefs traditionnels comme des auxiliaires d'administration.

    * 3 S'agissant des dynamiques du dedans certains juristes politistes l'ont situé à l'accession du Président Paul Biya à la tête du Cameroun qui a baptisé son régime de Renouveau. Le promoteur du Renouveau à l'entame de la direction du pays exhortait ses compatriotes, mieux, ses partisans de se préparer aux élections à candidatures multiples au sein de son parti ; mais aussi au multipartisme. C'est pourquoi le Pr Owona Joseph affirme avec autorité que : « Le Renouveau est fille aîné de la Perestoïka » (OwonaJoseph cité par Owona Nguini 1998 : 50).

    * 4 Les dynamiques du dehors sont appréhendées ici, comme l'ensemble d'événements ayant favorisé la libéralisation politique de plusieurs Etats africains. Nous pouvons citer ici l'arrivée de la gauche au pouvoir en France, en 1981, la chute des partis communistes en Europe de L'Est, la libération de Nelson Mandela, au Cameroun avec les villes mortes qui ont finalement débouché à une conférence nationale tripartite, qui était pour les pouvoirs publics un moyen de contourner les conférences nationales souveraines qui se faisaient dans la plupart des pays de l'Afrique francophone. (Voir Mouiche, 1996 : 178).

    * 5Les forces politiques peuvent être appréhendées icicomme les groupes, les individus, les partis politiques qui ont une influence certaine dans la vie politique du pays ou d'un terroir respectif.

    * 6Les objectifs de ladite association sont presque semblables avec ceux de l'association nationale des Chefs traditionnels qui tint son premier forum du 28 au 29 mars 2010 au Palais de congrès. Et avait pour objectif, de rassembler tous les Chefs traditionnels du Cameroun, consolider leur esprit de solidarité, revaloriser l'institution de la Chefferie traditionnelle, promouvoir les droits de l'homme, de la femme et de l'enfant. Ce conseil devrait également oeuvrer pour assurer le bien- être des Chefs traditionnels et des populations et promouvoir la protection de nos traditions et cultures et contribuer à rendre plus visibles auprès des populations, les programmes de développement des pouvoirs publics, bref faisant de la Chefferie traditionnelle un partenaire efficace pour le développement culturel, économique et social du Cameroun.

    * 7 En effet, les Chefferies de groupement qui virent le jour en 2008 à Nkol-Metet, sont prévues par l'arrêté n°13/A/MINAT/DCT du 19 janvier 1982, portant création des Chefferies de 2e degré dans le département du Nyong et So'o. Bref, les Chefferies de groupement sortent de leur caverne à l'ère de la décentralisation.

    * 8 A la Chefferie de groupement BENE Nord-Est, Mbala Zangana a été élu. Ce dernier a été Sous-Préfet et Maire dans plusieurs localités du Cameroun pendant 31 ans. Et dans le Département du Nyong et So'o il a été Maire de la commune mixte de Mbalmyo pendant 17ans. Dans la ChefferieBENE Sud Est, Ondoua Menyié Paul Aimé bénéficie déjà d'une légitimité traditionnelle parce qu'il est Chef du village Nkol-Ekabili et est un politicien avéré et militant du RDPC. En 1996 il a été Membre du comité central du RDPC et de 2002 à 2007,Député RDPC à l'Assemblée Nationale du Camroun.

    * 9La loi n° 2004/017 du 22 juillet 2004 qui présente la loi d'orientation de la décentralisation fixe les règles générales applicables en matière de décentralisation territoriale.
    Dans sonarticle 2 alinéa 2, elle précise de façon formelle, les enjeux de développement et de démocratie que se fixe la décentralisation en stipulant : «  La décentralisation constitue l'axe fondamental de promotion du développement, de la démocratie et de la bonne gouvernance au niveau local.

    * 10cf., www.prc.cm consulté le 16/11/2011.

    * 11C'est au regard d'une telle propension des Chefferies la quête de leur développement intégrale que Ngnepi et Towa envisagent la transformation de certaines Chefferies en Communes. Pour Ngnepi, même si, les communes ressortent du processus de la décentralisation et les Chefferies du processus de la déconcentration, la question d'efficacité dispose à interroger en direction des structures pour déterminer laquelle serait plus propice à la participation populaire. En d'autres mots, le passage des Chefferies en communes supposerait une participation populaire ; ce qui pourrait entraîner l'élection des Chefs traditionnels. Ce qui mettrait fin à la succession héréditaire. NGNEPI affirme à cet effet que:« Le sous développement repose essentiellement sur la perte de la liberté et le procédé en débat, dépouillant les peuples de leur libre arbitre». (NGNEPI : 2007).

    * 12 A côté du culte de la personnalité, l'autre critère prépondérant dans le pouvoir coutumier est la culture de l'oralité et c'est dans ce registre que les Chefs BENE sont plus en vue.

    * 13D'après nos enquêtes on peut situer la création des Chefferies à Nkol-Metet à l'année 1900.

    * 14Au Cameroun, les Provinces ont été substituées par les Régions. De même, en 1984, un décret présidentiel éclatait la province du Centre Sud en deux Provinces : la Province du Centre ayant pour capitale Yaoundé et la Province du Sud ayant pour capitale Ebolowa. Les provinces devenues Régions, leurs capitales restent inchangées.

    * 15Cf. ; La sainte Bible dans Ecclésiaste chapitre 1 verset 9.

    * 16Les Chefferies ayant fait l'objet d'étude de cas par cet auteur sont celles de Banka, Bangou, Bandjoun et Le Royaume Bamoun.

    * 17 Il faut préciser ici que Barbier fait référence ici à la Chefferie Bamiléké. Les Bassa constituent l'un des groupes ethniques que compte le Cameroun.

    * 18 Les Bassa constituent l'un des groupes ethniques que compte le Cameroun. On les retrouve principalement dans la Région du Centre notamment dans le département de la Nyong Ekéllé et dans la Région du littoral.

    * 19Le golfe de Guinée correspond à la bande côtière africaine allant de la Côte- d'ivoire à l'Angola.

    * 20 Le RDPC c'est le parti politique au pouvoir au Cameroun. Ses partisans préfèrent souvent qualifié leur formation politique de parti politique proche du pouvoir. Ceci expliquerait leur volonté à dissocier l'activité partisane de celle de l'Etat.

    * 21Le Colonel Amougou Nguélé Emmanuel est l'actuel Chef d'Etat major du Président de la République du Cameroun Son Excellence Paul Biya. Ndi Mboh François est un attaché d'ambassadeen fonction et actuel Secrétaire Particulier de son Excellence Awana Essama, Ambassadeur du Cameroun auprès de la République d'Italie.

    * 22 Les big men sont des personnes que les gens suivent dans la mesure où elles peuvent leur procurer des bénéfices. (Mouiche, 2005 :122).

    * 23 Erving Goffman nous fait savoir que sauver la face est un impératif dans l'interaction sociale, pour atteindre ce résultat, les individus doivent bénéficier de la collaboration des autres acteurs qui manifestent leur acceptation de la face construite par ceux avec lesquelles ils interagissent. Un individu garde la face lorsque la ligne d'action qu'il suit, manifeste une image de lui-même consistante, c'est-à-dire appuyée par les jugements et les indications venues des autres participants, et confirmée par ce que révèle les éléments impersonnels de la situation ( Alpe etal, 2005 : 95).

    * 24 Source : Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé (entretien du 01/02/2012).

    * 25On retrouve les Bene principalement dans deux Régions du Cameroun : dans la Région du Centre et dans la Région du Sud. Dans la Région du Centre on les retrouve dans les Départements de la Mefou et Afamba et du Nyong et So'o. Dans la Région du Sud, on les retrouve dans les Départements de la Mvila et de l'Océan.

    * 26Les quatre autres lignages issus de la postérité de Mbartsogo sont :Mvog Owono Ndzuli, Mvog Zuga, Mvog Ngene, Mvog Kwodo.

    * 27 L'Honorable Maze Jean Alfred de Regretté mémoire, a été doyen d'âge à l'Assemblée Nationale à la session parlementaire de juin 2001, à son 2e mandat.

    * 28 Le RDPC c'est le parti au pouvoir au Cameroun. Ce parti a été créé en 1985 par le Président Paul Biya au congrès de Bamenda. Depuis lors, le Président Paul Biya est à la fois Président de la République du Cameroun et Président de ladite formation politique. Toutefois, il impérieux de souligner que le RDPC est né de la dissolution de l'Union nationale Camerounaise (UNC) parti politique unique fondé par le premier Président de la République du Cameroun Ahmadou Ahidjo en 1966.

    * 29 Ce folklore se manifeste de la sorte : quand le SDF tient un meeting les populations arborent les couleurs de ce parti. Ce rituel s'observe avec toutes les formations politiques non dominantes à Nkol-Metet. Ce folklore a déjà désillusionné de nombreux leaders de l'opposition à Nkol-Metet.

    * 30 Il faut noter qu'à Nkol-Metet à ces élections, l'effectif des inscrits était de 12 344 ; l'effectif des votants était de 11 058. Ainsi dit, le taux de participation était de 89,58% et le candidat victorieux M. Biya Paul a obtenu 10 904 de suffrages. Source : ELECAM/ Rapport général sur le déroulement de l'élection présidentielle du 09 octobre 2011.

    * 31 Source : Inspection des enseignements primaires et secondaires de l'Arrondissement de Nkol-Metet.

    * 32 Kamto Maurice (1994), « la dynamique constitutionnelle du Cameroun indépendant » in revue juridiqueafricaine 1994,n°1, 2,3.

    * 33 Peter Geshiere le renchérit en ces termes :   «The frenches, the germans and Belgians as the britishes opted to create such traditional institutions in order to solve their urgent administrative problems»(Geshiere, 1996 :307 ).

    * 34 C'est à cet effet que les Chefferies traditionnelles sont hiérarchisées en Chefferies de Ier degré ; les Chefferies de 2e degré ; les Chefferies de 3ième degré.Ainsi est de 1er degré, toute Chefferie dont le territoire de compétence recouvre celui d'au moins deux Chefferies de 2ème degré. Ses limites territoriales n'excèdent pas en principe celles d'un Département. Est de 2ème degré, toute Chefferie dont le territoire de commandement englobe celui d'au moins deux Chefferies de 3ème degré. Ses limites n'excèdent pas en principe celles d'un Arrondissement.

    * 35Dans presque tous les villages de Nkol- Metet, les Chefs traditionnels s'activent à créer des groupes d'initiatives communes. Par exemple, à Bikoko, Sa Majesté Mva Kouma nous fait savoir qu'il a impulsé la création d'un groupement d'initiative commune dénommée : Renaissance de Bikoko un groupe de 34 personnes qui a créé en cette année 2011  deux champs communautaires de maïs et de manioc de 4 hectares (propos recueillis le 16/08/2011 à Bikoko. De même dans le village Awäe, Sa Majesté Oyono joseph, nous informe qu'il a également impulsé la création dans son village de trois grands champs communautaires dont le plus important est la cacaoyère nouvellement créée de trois hectares ; il nous révèle aussi la création de plusieurs tontines qui permettent l'épanouissement des individus ayant souscris. (Propos recueillis le 04/07/2011 à Awäe). A Obout on note également un réveil, mais dans ce village, c'est plutôt une collaboration synergique entre l'élite et l'association de la Chefferie dénommée Nkul Mbida Nga Mbala , qui a octroyé une somme de 8 millions au groupe ayant des projets viables et fiables. Il convient aussi de rappeler que l'association des Chefs traditionnels de Nkol-Metet oblige les Chefs traditionnels de son ressort d'être propriétaire d'au moins une cacaoyère, ceci en vu de leur épanouissement personnel.

    * 36Pour Parsons, les valeurs constituent avec les normes, le fondement principal de l'action sociale (Parsons cité par Grawitz, 2004 :412).

    * 37Il est important de souligner ici que le Conseil Régional et le Président du Conseil Régional constituent les deux organes de la Région (Cf. article 57 alinéa 1).

    * 38 A Nkol-Metet à la Chefferie de Groupement Bene Sud Est la légitimité de son Chef Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé est souvent contestée car pour ses détracteurs il est issu d'une ethnie démographiquement minoritaire(les Mvog Essissima). Sa Majesté pour faire face à cette contestation à l'habitude d'affirmer : «  la loi du nombre est une loi démocratique, alors que, lorsqu'on parle de Chefferie traditionnelle, on est tout simplement dans le champ de la tradition. Or chez les Béti en général, c'est l'aîné qui est bénéficiaire du pouvoir traditionnel. De toute évidence, Essissima Nkoa était l'aîné des fils de MbarTsogo (Zambo Melunu, Mbarga Ba'ana, Zambo Ba'ana....). Il était donc nécessaire de rétablir avec la Chefferie de Groupement l'ordre naturel des choses (Source entretien du 11/02/2012 à Mbalmayo avec Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé).

    * 39On assimile l'aspect consensuel de l'autorité du leader à un mirage démocratique.

    * 40 (Alpe, Beitone, Dollo, Lambert, Parayre, 2005:26).

    * 41 Le charisme de fonction ici peut être synonyme à la notion du capital symbolique, au sens de Bourdieu, qui est l'ensemble des signes distinctifs et des symboles du pouvoir acquis, ou hérité par un agent. Ce peut être la respectabilité, l'honorabilité...

    * 42 Chez les Bene MVOG AMOUGOU de Metet Centre, la qualité qu'ils appréciaient beaucoup chez leur Chef, Sa Majesté MBALA MESSI (décédé en février 2012), c'était son don oratoire et sa grande maîtrise des proverbes béti. Propos recueillis lors d'un focus groupe à Metet Centre, le 30 Août 2012.

    * 43Nnë bodo aurait permis la traversée des groupes ethniques tels que les Yemesum, Mvog Ebo'o, Oyek, Angok, Yemedu, Yanda, Osa Angon Woa, Obege, Oka'a, Fong, Elende, Ewondo, Ngui, Yembama, Yenke (Laburthe-Tolra, 1981 :54).Ainsi dit, lesBene par l'entremise de leur ancêtre seraient un peuple guide ayant permis à l'ensemble du groupe ethnique Béti, de traverser la Sanaga.

    * 44 Un proverbe Béti dit : « owog na akuma : ve bod »ou « mot ane mot abele bot » cela signifie que la richesse n'est rien d'autre que les Hommes.

    * 45 Pour Bourdieu, le capital économique est l'ensemble des ressources (revenus et patrimoine) d'un ménage, qui lui permet de défendre ou d'améliorer sa position sociale et celle de ses enfants. Tandis que le capital social, est l'ensemble des facilités sociales qu'un ménage ou un individu est capable de mobiliser à son profit ou au profit des autres.

    * 46Les sociétés à souveraineté diffuse se caractérisent par l'absence de pouvoir centralisé, mais aussi par l'existence des mécanismes qui suffissent la permanence du groupe. Elles sont profondément marquées par les structures égalitaires et reposent essentiellement sur la solidarité à l'intérieur du groupe, qui est la seule unité assurant la protection des individus. On distingue dans ce type de société, la bande à gouvernement minimal, elle est constituée d'unité de taille restreindre démographiquement et occupant un territoire commun ou elle pratique généralement de façon plus ou moins nomade, la chasse, la pêche et la cueillette ; c'est le cas des pygmées dans l'Est et Sud Cameroun. On retrouve enfin les sociétés lignagères ou l'unité de solidarité est représentée par un segment de lignage lui-même en opposition avec le segment voisin. C'est le cas des Bene de Nkol-Metet et l'ensemble des groupes Béti ; mais également des Nuers tels que présenté par Evans pritchard.

    * 47L'arrêté de 1925 stipule que le conseil des notables devrait être considérablement consulté mais n'impliquait nulles obligations que les avis qu'il émettait fussent suivis.A Obout, par exemple, ce conseil compte 32 notables alors qu'à Oveng il ne compte que 10 notables. La taille du Conseil de notables dépend fortement du poids démographique du village, mieux, du nombre de grandes familles présentes dans un village.

    * 48Dans l'Arrondissement de Nkol-Metet à l'heure actuelle, il est du pouvoir discrétionnaire du Chef de désigner ses notables, mais ces derniers sont issus des principales familles de la Chefferie. Cependant, il peut arriver que le Chef exige aux familles de désigner un notable devant représenter leur famille au sein de ce conseil.

    * 49Interview réalisée avec Amougou Mbarga Fidèle, 65 ans, sous-Chef du village Metet-Centre, le 01/06/2012 à 06h45 à Metet centre.

    * 50 La réparation d'un litige entre un cadet et son aîné, dans la société Bene est constituée d'une dame-jeanne de 20 litres de vin rouge et d'un Cabri

    * 51MBALA Gallus Achille, 30 ans, vice président de l'une des associations des jeunes la plus importante de Nkol-Metet dénommée : Jeunesse Active de Metet en Evolution (J.A.M.E). Propos recueillis lors de l'interview réalisée avec les responsables de la dite association 15/07/2011 à Metet-Centre.

    * 52 Le Représentant du Chef à Obout par Nkol-Metet a été désigné sous ce mode.

    * 53Dans les Chefferies traditionnelles du Togo, les Zomloa portent le nom d'Avetoet Congo celui denganga. Ce sont les autorités craintes et respectées pour leur relation avec les dieux, ainsi que leur faculté vraies ou supposées d'implorer le ciel en cas de calamité et donc pour leur pouvoir spirituel et leur capacité à conjurer, le mauvais sort (voirGoeh-Akue N'bueke Adovi, 1999 :46).

    * 54 Sa Majesté Akoa Amougou vincent, 72 ans, est le Chef traditionnel du village Nkolya III et Zomloa du même village.

    * 55 Sorcier dans le sens anthropologique, désigne une personne qui se distingue du groupe dont il fait partie, ou il est considéré comme lié aux puissances maléfiques. La sorcellerie permet aux zomloa de réduire les tensions, lorsque les moyens rationnels échouent.

    * 56A Nkol- Metet, à l'heure actuelle, il y a très peu de Zomloa, parce la crainte de certains Chefs à leur égard, a conduit à la suppression de cette institution.

    * 57 Pour Shaperalà où il y'a l'Homme, il y'a la société et là où la société existe, le système politique se développe. 

    * 58Lesbig men sont des personnes que les gens suivent dans la mesure où elles peuvent les procurer des bénéfices (Mouiche, 2005 : 122).

    * 59Il convient de rappeler ici, que les Chefferies de groupement qui virent le jour en 2008 à Nkol-Metet, sont prévues par l'arrêté n°13/A/MINAT/DCT du 19 janvier 1982, portant création des Chefferies de 2e degré dans le département du Nyong et So'o. A Nkol-Metet, on dénombre deux Chefferies de Groupement. La Chefferie de Groupement Bene -Nord -Est, dirigée par Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, et la Chefferie de Groupement Bene-Sud-Est, dirigée par Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé.

    * 60Dans la Chefferie de Groupement Bene -Nord- Est il y avait principalement deux lobbies. Le premier lobby était constitué des Chefs de troisième degré ; le second par contre était représenté par l'élite politico-Administrative. Bien que ce soit les Chefs traditionnels qui constituaient le corps électoral Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin a vaincu Sa Majesté Mbala Messi Manfred, parce qu'il a su avoir du soutien dans ces deux lobbies contrairement à son principal challenger qui s'est fortement appuyé sur le Lobby que constituaient ses pairs.

    * 61A côté de la Chefferie traditionnelle, les autres foyers de l'assimilation réciproques des élites sont l'idéologie, la bureaucratie, les élections, le parti (Voir Bayart, 1989 : 208).

    * 62Dernièrement au mois de juin 2012, les populations de Chefferie traditionnelle de 3e degré d'Oveng par Nkol- Metet ont essayé par tous les moyens d'évincer leur Chef traditionnel Sa Majesté Bala Bala Francis pour le remplacer par Jean Claude Ndi, célèbre journaliste à la Radio Nationale camerounaise. Malheureusement, les populations d'Oveng n'ont pas réussi leur coup, car les élites les plus importantes de ce village soutenaient vivement leur Chef et Madame le Sous- Préfet de Nkol-Metet s'est impartialement alliée aux élites de ce village.

    * 63Ces épouses sont : Baana ; Ekindi ; Melunu ; Nkoa ; Engodo ; Ndzuli ; Kwodo ; Enembe.(Laburthe-Tolra, 1981 :147).

    * 64MBALA Messolo était grand guerrier Bene, et petit-fils de MbarTsog ancêtre des Bene de Nkol-Metet. Il vécu de 1795 à 1845. Source : Laburthe-Tolra, 1981 : 153-155.

    * 65 Amougou Baana eût 19 fils parmi lesquels Mbala Messolo. Source : Laburthe-Tolra, 1981 : 150.

    * 66 Le village Metet- Centre est un grand village qui est subdivisé en quatre quartiers : Mbama, Nkong Mekak, Ngoantet Nkomfum et Oban Si.

    * 67 Avant cette période, ceux qui faisaient figures c'étaient des grands leaders charismatiques, qui avaient surtout un rôle de protection pour le groupe.C'est dans ce sillage que les BENE ont connu des leaders tels que Nnebodo, Kode Oloa, MbarTsogo, Mballa Messolo, Zambo Nsa, Mballa Zangana.. Cette première origine de la Chefferie peut être datée de 1700 à 1900. Autrement dit, chaque groupe ethnique ou chaque village à Nkol-Metet avait ses leaders charismatiques à cette période.( Voir Laburthe-Tolra,1981 : 143-157).

    * 68 D'un point de vue héréditaire, la Chefferie Mvog Amougou a muté de la descendance de Nguélé Nsa à la descendance de Zambo Nsa. Néanmoins il convient de rappeler que Zambo Nsa et Nguélé Nsa étaient tous des frères, fils de Mballa Messolo.

    * 69Selon le révérend docteur Mveng Luc, Owono David était le véritable Chef, car c'est lui qui s'occupait de l'administration quotidienne de la Chefferie, il prélevait l'impôt et allait le reverser auprès de l'Administration coloniale à Mbalmayo. Propos recueillis au cours de l'entretien avec le révérend docteur Mveng Luc, 75 ans patriarche Mvog-Amougou, premier prélat originaire du département du Nyong et So'o et de l'Arrondissement de Nkol-Metet, Le 10 juin 2011 à Nkolndongo-Yaoundé.

    * 70 Source : entretien réalisé avec Sa Majesté Oyono Owono Joseph, 72 ans le 04/06/2011 à la Chefferie de 3e degré d'Awae par Nkol-Metet.

    * 71 On peut citer ici :Atangana Ohanda Rudolph à Ngoantet ; à Bikoko, Owono Joseph ; à Nkol Ekabili, Ondoua Menyié. Ces derniers furent les tous premiers Chefs traditionnels de leur village respectif. Source : Amougou Jean 63 ans,représentant du Chef de Ngoantet II, entretien réalisé par nous le 16/07/2011.

    * 72 Source : Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, entretien du 01/02/2012).

    * 73 Tsoungui Emmanuel, 54 ans, Chef du village Ngoantet II. Propos recueillis le 15/07/ 2011 à la Chefferie de Ngoantet II. Son point de vue est partagé par le Révérend pasteur Nguélé Désiré( 1951-2012) 60 ans, pasteur de l'Eglise Presbytérienne camerounaise orthodoxe (EPCO), lors de l'entretien du 17/08/2011 à Ebomsi I.

    * 74Les minorités ethniques sont des groupes d'individus possédant un trait culturel ethnique commun (culture, langage, origine), sur lequel repose la distinction avec un groupe représentant la culture dominante et qui conduit à stigmatiser leur position sociale par rapport au groupe dominant (Alpe, 2005 : 162). En science politique, la minorité désigne un groupe occupant une position d'infériorité (numérique, ethnique, politique, économique, culturelle ou linguistique) par rapport aux groupes dominants, qui plus ou moins volontairement les excluent de la participation entière à la vie sociale (Grawitz, 2004 : 276).

    * 75Confère Arrêté n° 00135/A/MINATD/DOT/SDOA/SCT du 29/05/2009 homologation de désignation de M. Ondoua Menyié Paul Aimé en qualité de Chef de 2e degré Bane Sud Est,district de Nkol-Metet Arrondissement de Mbalmayo Département Nyong et So'o Région du Centre.

    * 76Source : Sa Majesté Ondoua MenyiéPaul Aimé, entretien du 01/02/2012 àMbalmayo.

    * 77 Source : Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, entretien du 10/02/2012 à Metet-Centre.

    * 78Le père de Mbala Zangana Benjamin, Owono Mbala David a été sous Chef à la Chefferie de Mbala Messolo Offele. Ceci revient à dire qu'il n'est pas totalement extérieur aux valeurs de la Chefferie traditionnelle.

    * 79La victoire de Mbala Zangana Benjamin tient sur une combinaison de plusieurs capitaux. Les plus déterminants sont  son capital symbolique et son capital économique. Du point de vue du capital symbolique, Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, bénéficie d'une certaine respectabilité et d'une honorabilité. De même, le fait d'avoir été plusieurs fois Sous Préfet-Maire lui confère une réputation de compétence. A le comparer à un Mbala Messi Manfred à Metet-Centre, il a construit la maison la plus spacieuse de ce village. Or, son adversaire jusqu'à sa mort se servait d'un entrepôt, comme lieu d'habitation et entrainait comme conséquence une absence à la Chefferie de structures d'accueils en cas d'éventuelle arrivée d'Autorités Administratives à Metet- Centre. Toujours est-il que dans ce registre du capital symbolique, Sa Majesté Mbala Messi bien qu'intellectuellement nanti de parchemins académiques était un disciple de "Bacchus" et l'affichait ostentatoirement, ce qui a quelque peu décrédibilisé sa candidature. Car malgré son charisme, son absence d'habitat digne de l'auguste Majesté doublée de sa passion pour les boissons alcooliques a considérablement entaché sa respectabilité et surtout sa réputation.S'agissant du capital économique de Sa majesté Mbala Zangana Benjamin, c'est celui là qui lui a permis d'améliorer sa stature symbolique. Sa Majesté a beaucoup investi dans l'immobilier : des villas à Mbalmayo et à Yaoundé. Il possède aussi plusieurs véhicules et entretient dans sa concession beaucoup d'enfants, par alliance et par la consanguinité. Enfin,il fait partie de la haute classe des Big-men ; mieux, de l'aristocratie de Nkol-Metet. Dans un cadre restrictif, à Metet-Centre, il demeure le seul jusqu'à présent à avoir eu une carrière de Chef de Terre.

    * 80 Source : entretien réaliser le 04/06/2011 à Obout.

    * 81Source : entretien réalisé avec Madame le Sous Préfet le 06/07/11. A la sous préfecture de Nkol-Metet.

    * 82Sa Majesté Mballa Messi est mort le 02 février 2012 et ses funérailles ont eu lieu du 08 au 09 février à Metet- Centre.

    * 83Nous avons été informés à ce sujet, par l'observation participante.

    * 84Selon Bipoum Woum, les forces politiques désignent l'ensemble des groupes sociaux sur lesquels repose le pouvoir politique dans un pays donné (...) à ce titre, tout groupe social qui atteint un degré minimum de consistance, constitue une force politique, pourvu qu'il ait un certain niveau de conscience de lui-même et de ses intérêts. Dans notre étude de cas, ce qui constitue les forces politiques sont : les Chefs traditionnels, les élites politico-administratives et les associations, quelles soient politiques ou apolitiques.

    * 85 Agodi patrice, 51ans, Adjudant Chef, Commandant de brigade de la gendarmerie de Nkol-Metet. Interview réalisée le 30 mai 2011 à la gendarmerie de Nkol-Metet.

    * 86 Propos recueillis par le journal le jour en date du 27 juin 2009.

    * 87Au Cameroun, les Provinces ont été substituées par les Régions. De même, en 1984, un décret présidentiel éclatait la Province du Centre Sud en deux Provinces : la Province du Centre ayant pour capitale : Yaoundé et la Province du Sud ayant pour capitale : Ebolowa. Les Provinces devenues Régions, leurs capitales restent inchangées.

    * 88 Selon Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, c'est l'ex Député et l'ex Secrétaire d'Etat Amougou Nguélé Paul qui était à l'origine de ce blocage. Amougou Nguélé jusqu'à sa mort au mois de juillet 2004 s'obstinait à la configuration actuelle des Chefferies de groupement ; il jugeait insuffisant le nombre de Chefferies de groupement à Nkol-Metet. Pour ce dernier il fallait à Nkol-Metet au-moins cinq Chefferies de groupement pour rendre efficace et efficient cet appareil Cheffal et a voulu peser de son poids politique pour faire triompher ses vues, mais hélas! La mort lui arracha la vie et cet arrêté fût appliqué tel quel en l'an 2008. (Source : entretien du 01/02/2012 avec Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé à Mbalmayo). Il faut également souligner qu'Amougou Nguélé Paul, était jusqu'à sa mort, le porte parole des originaires de Nkol-Metet et davantage des Mvog Amougou.

    * 89 Il faut noter ici que dans le cas d'espèce, qu'il n'y a pas eu d'unicité des clivages idéologiques Mvog Amougou ; dans la mesure où chaque candidat (voir candidats en lice chapitre précédent) avait ses adeptes dans chacune des tendances. La victoire dépendait donc de la capitalisation du plus grand nombre d'adeptes.

    * 90 Leurs Majestés Mbala Messi et Mbala Zangana Benjamin sont tous les deux petits fils de Mbala Zangana fils de Zambo Nsa et arrière petit fils de Mbala Messolo.

    * 91 Sa Majesté Mbala Messi Manfred avait souvent l'habitude de rabrouer les Autorités Administratives et parfois refusait de répondre à leurs convocations

    * 92 A Metet-Centre, les deux premières personnes à avoir fait les études universitaires sont, Mveng Owono Luc Bruno, qui sortinanti d'un doctorat ès lettres et est de la première promotion des docteurs de l'Université du Cameroun et Mbala Messi Manfred qui obtient une licence en sciences économiques et de gestion.

    * 93 Source : Mbarga Mengue, Secrétaire Général de L'EKMA entretien du 27/08/ 2011 à Metet- Centre.

    * 94 Source : Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin, entretien du 07/04/ 2012 à Metet- centre.

    * 95 Nous n'occultons pas la présence d'autres élites, mais cependant, celles énumérées ici se démarquent par leurs investissements sociopolitiques et socioéconomiques qui ont un impact au-delà de leur village et qui s'étendent dans tout l'Arrondissement de Nkol-Metet. Aussi faut-il noter, que d'autres jeunes cadres commencent à poindre à l'horizon. Bientôt on parlera d'eux sans ambages.

    * 96Il succéda à Mbida Jean, qui succéda à Amougou Mbida Jean, qui succéda à Mbida Akong, qui succéda à Mbida Edouard (qui fut destitué), qui succéda à Amougou Ada, qui succéda à Mbida Nga Mballa le tout premier Chef d'Obout

    * 97Cette association porte le nom du tout premier Chef d'Obout, Sa Majesté Mbida NGa Mballa et son récépissé de déclaration porte le numéro 12/RDA/J10/BAPP avril 2009.

    * 98L'association Mbida Nga Mballa est constituée d'un bureau de 16 membres.

    * 99Source, Amougou Ada, premier vice président de NKUL MBIDA NGA MBALLA, entretien du 12/02/2012.

    * 100 La culture de piment a échoué faute de suivi. D'autres projets ont connu de telles issues à Obout à cause de l'octroi fantaisiste des crédits.

    * 101Dans l'Arrondissement de Nkol-Metet, on dénombre trois Marchés périodiques. A Nkol-Metet, le vendredi, à Ndick le samedi et à Obout le dimanche.

    * 102Salomé Abeng Tétron est la fondatrice du complexe scolaire les Bambis sis à Yaoundé dans les quartiers Biyem-assi (école primaire et maternelle) et à Ahala (collège bilingue d'enseignement général)

    * 103Omgbwa Assembe, a été le deuxième Maire de Nkol-Metet de 2002 à 2007.

    * 104 Sa générosité, lui a valu le pseudonyme de Paris cadeau. A la suite d'Omgbwa Assembe, il a organisé trois éditions du championnat à Ngoantet II de 2006 à 2009.

    * 105Selon certains informateurs de Ngoantet II, ce centre de santé s'est spécialisé en ulcères de brûlis par l'action de l'infirmier Chef dudit centre Abemo Samuel, qui par le passé avait l'habitude d'envoyer les patients affectés de cette maladie à l'hôpital d'Ayos où à titre de récompense il recevait à chaque fois 25.000 francs Cfa par patient. C'est de là qu'il eût l'envie de créer à Ngoantet ce type de centre. Faute de moyens, il entra en contact avec une ONG Suisse et au niveau local, avec Ndi Mboh Fançois pour réaliser ce projet d'envergure de santé publique.

    * 106Ce complexe commercial et hôtelier comprend : une grande quincaillerie, dépôt de boisson, un service de location chaises, tentes, tables, couverts pour diverses cérémonies...

    * 107Mbala Zangana est celui qui offrit le site sur lequel la Mission presbytérienne américaine a fondé sa station missionnaire (MPA) à Metet en 1897.

    * 108La cohabitation des deux Chefferies à Metet-Centre a posé un dysfonctionnement. A cause du passif ayant trait l'avènement de la Chefferie de groupement. En effet, l'élection du Chef de groupement a opposé deux fils de Metet-Centre, sa Majesté Mballa Messi Manfred, alors Chef de 3e degré dudit village et du big-man Mbala Zangana Benjamin vainqueur de l'élection.Sa Majesté Mballa Messi Manfred, n'avait jamais voulu faire allégeance à son cousin Mbala Zangana Benjamin et a même boycotté sa cérémonie d'intronisation.

    * 109A Ngoantet I, son Chef actuel est Ohanda Emmanuel.

    * 110À Nkol-Metet, on note une forte recrudescence des consommations des drogues trivialement appelées Banga ;A Nkol-Metet ses consommateurs l'appellent « messep »ou « tish »,et est devenu l'apanage des jeunes désoeuvrés en général et des motocyclistes, en particulier.

    * 111Source : entretien du 12/02/2012 à Metet-Centre.

    * 112En 2009, l'Ecole Primaire de Metet- Centre avait un effectif de 144 élèves. Ainsi du cours élémentaire première année au Cours moyen deuxième année, l'associationprimait les 3 meilleurs élèves et de la SIL au Cours préparatoire, les cinq premiers étaient récompensés. Source : Ndi Ndi Anicet 29ans, Président de la JAME, entretien du 11/02/2012 à Metet- Centre.

    * 113 Le RDPC à Nkol-Metet compte neuf (09) sous sections. (Source : enquêtes).

    * 114En termes de prévisions on estime la production d'un hectare de cacao à 10 tonnes. Or, à l'heure actuelle, le prix du Kilogramme de Cacao est estimé à 1400 francs Cfa.

    * 115Source : Akoa Mbarga Benoît, 30 ans, militant entretien du 23/02/2012 à Mbalmayo.

    * 116C'est Mauss Marcel (1924) dans son ouvrage intitulé : `'Essai sur le don'' qui a théorisé le concept de potlach. En effet, le potlach est un don cérémoniel pratiqué chez les indiens d'Amérique du Nord-Ouest où les Chefs échangeaient des objets précieux et rituels afin de distribuer les titres et charges honorifiques au plus généreux. Cet échange se caractérise par la rivalité ; car le don est suivi d'un contre-don immédiat et supérieur afin de gagner en prestige (Debbash ,2001 :199).

    * 117Le nombre de Chefs traditionnels devrait être de 34. Compte tenu du cumul de fonctions de Chef de 3e degré et de Chef de groupement par Ondoua Menyié Paul Aimé, ce nombre est ramené à 33. On note également que l'adhésion de Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin à cette association a conduit à une restructuration dudit mouvement en faisant de lui le vice Président. Aussi, dès son entrée dans l'ACTRAN Sa Majesté Mbala Messi Manfred son principal opposant était sorti de cette association.

    * 118 De 1996 à 2007, la Mairie de Nkol-Metet n'avait pas des locaux propres. Avec l'arrivée de Ndi Samba comme Maire, la Mairie fut construite. Le MaireNdi Samba a également construit les locaux de la Gendarmerie de Nkol-Metet, le Poste des Eaux et Forêts devenus les services provisoires de la Sous Préfecture deNkol-Metet. Il construit une antenne de sa radio et une maison de micro finance, il a réaménagé les locaux du marché d'Obout, créé un marché à Ndick...

    * 119 Ndi Samba est l'un des derniers remparts et patriarche de la tradition BENE. Dans sa chaîne de télévision privée, Radio Télévision Lumière, il consacre plusieurs émissions promouvant et valorisant la culture BENE.

    * 120 La Mairie de Nkol-Metet a été bâtie principalement à l'aide des briques de terre.

    * 121 La première phase ayant donné lieu à la tenue de la première session extraordinaire correspond à la phase de lancement et d'imprégnation des Chefs sur le PDC ; la deuxième phase correspondait à la validation des attentes des populations, la troisième phase consistait à octroyer les financements pour la réalisation des projets validés.

    * 122 Les principaux villages ayant bénéficié de l'électrification sont Ebomsi I, Oveng, Soa si, Endégué, Mengueme Bane, Bizock, Mbega, Nkoltombo.

    * 123 Les routes sont également prévues. Les financements sont déjà disponibles. Cependant la Mairie n'a pas encore trouvé des prestataires sérieux. Sources : Secrétaire particulier du Maire Joseph Ndi Samba entretien du 10/02/2012 à la Mairie deNkol-Metet.

    * 124 Cette panthère ne dévorait que les organes internes des bêtes moribondes, poumons foies, intestins.

    * 125 Parmi les Chefs de Nkol-Metet, il y'a certains qui ne cessent de tarir d'éloges sur les bienfaits de L'ACTRAN dans l'initiative des projets communautaires dans leur village. On peut citer ici, leurs Majestés Mva Kouma Emmanuel de Bikoko, de Bala Ndi Christian d'Oveng.

    * 126Un professionnel de la politique, c'est quelqu'un qui exerce l'activité politique touten vivant. C'est également une personne qui exerce l'activité politique dans l'optique d'avoir une certaine rétribution qu'elle soit matérielle ou immatérielle. (Voir Weber 1968).

    * 127C'est Raymond Aron qui dégagé ces critères selon lui, l'étude empirique des élites comporte essentiellement quatre aspects : leur origine sociale et leur recrutement politique, les qualités qui semblent assurer le succès et les modalités de leur carrière, la manière de penser et la cohérence des membres de cette catégorie(Raymond Aron cité par Nuembissi Paul, 2007 : 31).

    * 128Maroua est l'actuel Chef lieu de la Région de l'Extrême Nord au Cameroun.

    * 129 Bikok est un Arrondissement de la Région du Centre et appartient au département de la Mefou et Akono.

    * 130Les villagesque couvrait la Commune urbaine de Mbalmayo sont : Ngallan ; Nseng Nlong ; Ngok  et Oyak.

    * 131 Ces ex Districts ont été érigés en Arrondissements en la faveur du Décret n°2010/198 du 16 juin 2010 portant érection des Districts en Arrondissements.

    * 132Il faut noter que cette reconfiguration était une sorte de limitation de l'expansion Bamiléké afin de donner aux autochtones plus d'opportunités à conduire les affaires de leur communauté. La configuration avant l'éclatement, en cas de pondération électorale était favorable aux Bamiléké. Le gerrymandering ainsi employé par Sa Majesté Mbala Zangana Benjamin bien que ethniciste était salutaire pour les élites intérieures du Nyong et So'o.

    * 133 Avec l'urbanisation, ces villages sont devenus les quartiers de Mbalmayo. Nous pouvons les citer ici : Mbedoumou I;Ovangoul ; Zamakoé ;Nseng-nlong II;III ;IV ;Nkolnguet, Ekombitié ; Assazon ; Akomyada I ;II, Fakele I, II ; Akometam ; Ngat Bane ; Memiam ; Bokomo ; Biyan ; Nkolmyada, Ekounda.

    * 134Les Mvog Essissima ont pour ancêtre Essissima Nkoa, fils aîné de Mbatsogo. En dehors de Nkol-Metet où on les retrouve ils sont aussi présents dans le Département de la Mefou Afamba, notamment dans les villages de Messeng ; Oban Si et Alara (source : Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé entretien du 01/02/2012.

    * 135 Grégoire Owona est l'actuel Ministre Camerounais de l'Emploi et de la Sécurité Sociale il est également secrétaire général adjoint du parti RDPC depuis une décennie. Selon Amougou Ada Albert, l'une des causes de réussite en politique de SaMajesté Ondoua Menyié Paul Aimé dépend de son bon apprentissage de la politique auprès de Grégoire Owona (Propos recueillis lors de notre denier entretien du 12 Février 2012 à Obout).

    * 136 Selon les usages du parti RDPC il y a deux qualités de membre du Comité Central, il y a ceux qui sont élus par les différents délégués du parti lors du Congrès du parti et d'autres nommés par le Président du Parti, ce fut le cas de Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé en 1996.

    * 137 D'après le découpage des circonscriptions électorales, le Département du Nyong et So'o n'a que droit à deux députés c'est ce qui justifie l'âpreté de ses élections dans ce Département qui compte cinq Arrondissements : Akoeman, Mbalmayo, Mengueme, Ngomedzap et Nkol-Metet.

    * 138 Sa Majesté Ondoua Menyié Paul Aimé, nous fait savoir que pendant le dîner offert à ses compairs à la suite de l'intronisation en concertation avec eux, s'entendaient à se rencontrer ultérieurement pour débattre sur l'avenir de la Chefferie à Nkol-Metet (sources S.M. Ondoua Menyié Paul Aimé 01/02/2012).

    * 139Avant l'éclatement des trois sous sections de Nkol-Metet en 09 sous sections, Mbalmayo était le bastion le plus décisif pour la victoire finale aux élections législatives.

    * 140Cette reconnaissance est une sorte de pourboire. Dans un contexte camerounais on ne lui tiendra pas rigueur car un adage camerounais justifie bien ce type de comportement en ces termes : « la chèvre broute où elle est attachée » (Bayart 1989 :288) « I chop you chop ».

    * 141 A Nkol-Metet, il existe trois pôles économiques en émergence. Le centre commercial de Nkol-Metet, le centre commercial d'Obout, et le centre commercial d'Awäe.

    * 142 Ce concept est introduit et développé dans E. Goffman, Les rites de l'interaction. (Voir aussi Céline Bonicco, 2006 :36).

    * 143Gaxie dit : il y a un lien étroit entre les niveaux de politisation (investissement dans les affaires politiques) et de compétences politiques, comme l'autorité, que chacun se reconnaît pour agir dans le champ politique. Le sentiment de compétence est double : à la fois être fondé à intervenir, en même temps que suffisamment informé pour le faire de manière pertinente. Et l'adhésion des spectateurs à une des visions du monde qui circule sur les marchés politiques donnent à ceux des spectateurs qui ont les moyens de les approprier à la fois, des schèmes de perception, de classification et d'évaluation, permettant d'accumuler des informations et de donner un sens politique au champ politique (voir, Gaxie, 1978).

    * 144 Propos recueillis, lors de l'entretien réalisé, le 06/07/2011 à la sous-préfecture de Nkol-Metet.

    * 145Mbalmayo est le Chef lieu du département du Nyong et So'o et par conséquent le centre d'impulsions des activités politico administratives.

    * 146 On dénombre au sein de l'ACTRAN dix huit Chefs traditionnels Mvog Amougou sur un total de trente trois (33) Chefs traditionnels.

    * 147(Cf. article 1er alinéa 2 de la loi n°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 2 juin 1972).

    * 148La succession du Chef est disputée entre les Kombé et les Mvog Amougou. Le temps nous dira lequel des deux clans sera vainqueur.

    * 149La rencontre àSoa si a eu lieu le 15 Août 2011. A celle-ci, nous y étions et nous y avons été invités par sa Majesté Mbala Zangana Benjamin et il nous fit, secrétaire de séance de ladite rencontre.

    * 150Sa disponibilité était surtout liée au fait, qu'il était déjà à ce moment en retraite dans son village. Selon Amougou Ada Albert, Sa Majesté Maire, Oyono Joseph, est le seul Maire depuis l'avènement de la mairie à Nkol-Metet à être présent quotidiennement à la mairie. Les autres maires qui l'ont succédé étaient beaucoup plus préoccupés par leurs activités personnelles.

    * 151 Le concept de Njangui est un terme pidgin, introduit dans le vocabulaire politicien camerounais par Achidi Achu (Premier Ministre de 1992-1997) lors d'un meeting quand il affirme "Politics na Njangui". En d'autres termes, l'activité politique est l'un des foyers privilégiés de l'usage du don et du contredon.

    * 152 L'actuel président de la section RDPC Nyong et So'o est le Maire de Mbalmayo M. Zang Mgbwa.

    * 153 Le capital social est l'ensemble des facilités sociales (réseaux de relations sociales familiarité avec les lieux de pouvoir etc.) qu'un individu est capable de mobiliser à son profit .C'est encore l'ensemble des ressources auxquelles un acteur peut accéder grâce à l'ensemble de ses relations directes (ses propres contacts) ou indirectes (les relations de ses contacts).

    * 154Le capital symbolique renvoie à l'ensemble des signes distinctifs et des symboles du pouvoir acquis ou hérité par un individu. Cet ensemble inclut la respectabilité, l'honorabilité et la réputation de compétences qui sont aisément convertis en capital social.

    * 155 Anthropologiquement, chez les Béti, les Chefferies étaient les lieux par excellence des `'Atak mvam'' ; lieux où les populations pouvaient se restaurer en temps de disette et en cas de famine. Chez le Chef on trouvait boisson nourriture et même des cadeaux pour les éventuels hôtes.

    * 156 A Ray Bouba par exemple, on remarque encore, la non obsolescence des symboles distinctifs traditionnels : vêtements important, turban qui emballe la tête et ne laisse voir que difficilement les yeux, de nombreux chevaux, un entourage impressionnant qui l'accompagne des parures, bref tout ce qui transforme l'individu en un véritable démiurge. (Perrot et Fauvelle, 2003 :286).

    * 157Selon l'article 4 du décret de 1977, l'autorité compétente peut classer une Chefferie traditionnelle au 1er ou 2ième degré, à raison notamment de son importance démographique et économique. Malheureusement à l'ère du Premier Ministre Inoni Ephraim, la création des Chefferies traditionnelles a été suspendue.

    * 158 Erving Goffman nous fait savoir que sauver la face est un impératif dans l'interaction sociale, pour atteindre ce résultat, les individus doivent bénéficier de la collaboration des autres acteurs qui manifestent leur acceptation de la face construite par ceux avec lesquelles ils interagissent. Un individu garde la face lorsque la ligne d'action qu'il suit, manifeste une image de lui-même consistante, c'est-à-dire appuyée par les jugements et les indications venues des autres participants, et confirmée par ce que révèle les éléments impersonnels de la situation ( Alpe etal, 2005 : 95).

    * 159 Nguélé Désiré, 60 ans, pasteur à l'Eglise Presbytérienne Camerounaise Orthodoxe (EPCO), lors de l'entretien du 17/08/2011 à Ebomsi I

    * 160Source : entretien réalisé avec Sa majesté Oyono Owono Joseph, 72 ans le 04/06/2011 à la Chefferie d'Awae.






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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry