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L'achat public responsable a-t-il vocation à  soutenir la performance globale du système de santé ?

( Télécharger le fichier original )
par Emilie POMMIER
Institut Léonard de Vinci - MBA Management Responsable et Performance des Organisations 2015
  

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L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ?

Application aux marchés publics de produits de santé

Mémoire rédigé par Emilie POMMIER

Sous la direction d'Isabelle NICOLAÏ

MBA Management Responsable et Performance des Organisations
Promotion 2014 - 2015

 

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

Sommaire

Synthèse 3

Mots clés 3

Introduction 4

Chapitre I : L'inclusion de clauses environnementales et sociales dans les marchés publics :

naissance, évolution et perspectives en matière d'achats publics responsables 6

Partie 1 : L'inclusion de clauses environnementales et sociales dans les marchés publics 6

1. a. Historique et contexte 6

1. b. Les différentes possibilités d'inclusion de clauses sociales et environnementales dans les

marchés publics 10

Partie 2 : Etat des lieux et tendances en matière d'achats publics responsables 17

Partie 3 : Limites et carences de la politique actuelle d'achats publics responsables 23

Partie 4 : Quelles perspectives en matière d'achats publics responsables ? 26

Chapitre II : La performance globale : enjeux, mesure, limites et risques associés 29

Partie 1 : Le concept multidimensionnel de performance globale 29

Partie 2 : La performance globale, exercice de la responsabilité sociétale ou indicateur de mesure ? 35

Partie 3 : Limites et débats portant sur la performance globale et son évaluation 43

Partie 4 : Quels risques encourus à ne pas inscrire ses activités dans une logique de performance

globale ? 45

Chapitre III : L'achat public responsable comme soutien à la performance globale du système de

santé, mythe ou réalité ?

47

Partie 1 : La commande publique doit encourager et développer la performance globale

47

Partie 2 : La réglementation des marchés publics et les injonctions du système de santé limitent

considérablement le potentiel de l'achat public responsable

52

Partie 3 : Et si les achats publiques responsables étaient l'une des composantes de la démocratie

sanitaire ?

56

Conclusion

59

Glossaire

61

Bibliographie

62

Annexes

67

 

2

3

 

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

Synthèse

La commande publique est estimée, en France, à 100 milliards d'euros par an environ - soit près de 10% du PIB national - ce qui lui confère un pouvoir d'influence considérable. En ce sens, le Code des Marchés Publics invite depuis 2004 l'acheteur à s'interroger sur les moyens de concilier achats et développement durable, considérant que la protection de l'environnement, l'efficacité économique et le progrès social contribuent à la performance globale du service public. Pourtant, dans la pratique, concilier principes fondamentaux du droit communautaire et intégration de clauses sociales et environnementales dans les marchés n'est pas une mince affaire. Nombreux sont les acheteurs confrontés aux injonctions contradictoires et force est de reconnaître que tous n'ont pas reçu de formation adéquate. Aussi, chacun est aujourd'hui en droit de s'interroger sur les objectifs portés par la politique publique d'achats durables. La commande publique responsable est-elle une fin en soi ou un moyen d'atteindre des objectifs économiques ? Est-elle un indicateur de la performance globale ? Ou une forme d'incitation positive adressée au marché afin de faire émerger des offres responsables, créatrices de valeur - et pas uniquement économique ? L'achat responsable figure probablement parmi les ingrédients de la démocratie sanitaire, en tant que vecteur de dialogue et de confiance entre les parties, et dénote d'une vision stratégique d'intégration de la responsabilité sociétale dans les marchés publics français.

Mots clés

Commande publique, Code des Marchés Publics, achats publics responsables, achats publics durables, clauses sociales et environnementales, critères d'attribution, critère de jugement des offres, conditions d'exécution, spécifications techniques, marchés réservés, définition du besoin, performance globale, performance intégrée, performance RSE, évaluation, responsabilité sociétale d'entreprise, reporting extra-financier, notation extra-financière, parties prenantes, création de valeur partagée, démocratie sanitaire.

4

 

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

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Introduction

 

Les autorités publiques ont par essence vocation à servir l'intérêt général. A ce titre la commande publique1, si elle est un acteur majeur de la bonne gestion et de la modernisation de l'administration, est également un levier pour la croissance économique et pour la promotion des clauses sociales et environnementales. Désormais, outre le domaine économique, en grande partie couvert par la réglementation, la commande publique met en effet de plus en plus l'accent sur le respect de l'environnement, des droits fondamentaux de la personne et des règles d'éthique ; devenant ainsi une « commande publique responsable ». Une évolution qui n'est pas sans conséquences, lorsque l'on sait que les marchés publics en France sont estimés à 100 milliards d'euros par an environ, soit près de 10% du PIB national2 et 16 à 19 % du PIB de l'Europe3.

Le développement durable couvre, quant à lui, différents domaines et repose sur une série de principes : la précaution, la prévention, l'économie et la bonne gestion, la responsabilité de tous, la subsidiarité. Ce concept recouvre également les valeurs défendues par les établissements publics de santé et médico-sociaux que sont l'humanisme, l'accessibilité, la solidarité, l'universalité et l'égalité. Dès 2004, en invitant l'acheteur à s'interroger sur les moyens de concilier achats et développement durable, le Code des Marchés Publics considère que la protection de l'environnement, l'efficacité économique et le progrès social contribuent à l'efficacité et à la performance du service public. Une " petite révolution ", en somme.

Ces dernières années, nombreuses sont les grandes directions d'achats privées à avoir ajouté des exigences relatives à la RSE dans leurs cahiers des charges, afin d'être elles-mêmes en conformité avec un impératif de responsabilité sociétale : ne pas faire travailler des fournisseurs peu scrupuleux et donner la préférence aux fournisseurs plus responsables. Mais qu'en est-il des acteurs publics ?

Ils ne sont pas en reste, mais doivent avancer tout en respectant certains principes fondamentaux du bloc constitutionnel (Droit communautaire et du Code des Marchés Publics). Pour autant, d'après la 6ème édition du Baromètre HEC Ecovadis, « l'intégration des critères de RSE dans la sélection des fournisseurs a progressé de façon très impressionnante. Alors qu'en 2007, 25 % des entreprises déclaraient ne pas prendre en compte la performance RSE de leurs fournisseurs, elles ne sont plus que 4 % aujourd'hui.4 »

1 La commande publique regroupe l'ensemble des contrats que les pouvoirs publics passent afin de répondre à leurs besoins.

2 Stéphane SAUSSIER et Jean TIROLE, Les notes du Conseil d'analyse économique n°22 (avril 2015).

3 NAVEZ (2005).

4 HEC Ecovadis, AT Kearney, «Sustainable Procurement: Time to measure value creation» - Sustainable procurement barometer 6th edition (2013).

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Des chiffres confortés par le Baromètre Santé Durable 2015, qui indique que les trois priorités identifiées par les établissements de santé en matière de développement durable sont la réduction de l'empreinte environnementale de leurs activités (81 % des répondants), le bien-être et la qualité de vie au travail (71 % des répondants) et la réalisation d'achats durables (73 % des répondants). Le sujet est donc au coeur de toutes les attentions.

Dans sa définition officielle, l'achat public responsable intègre des dispositions en faveur de la protection de l'environnement, favorise le progrès social et le développement économique ; mais il prend également en compte l'intérêt de toutes les parties prenantes concernées par l'acte d'achat, permet de réaliser des « économies intelligentes », le tout en considérant chacune des étapes du cycle de vie du marché. Le périmètre de l'achat public durable est donc beaucoup plus vaste que le seul acte d'achat, et les liens d'interdépendance entre l'acheteur public et ses parties prenantes sont un point essentiel de la relation. Dans ce contexte et au regard des objectifs fixés à travers le programme PHARE5 sur la période 2012-2014, chacun est en droit de s'interroger sur les ambitions portées par la politique publique d'achats durables, en France : a-t-elle vocation à optimiser les coûts ? à contribuer au progrès social en santé ? à réduire l'empreinte environnementale des établissements de santé et médico-sociaux de France ? ou encore à servir un objectif bien plus large de performance globale ?

Dans l'optique de répondre à cette question, ce mémoire porte d'abord un regard critique sur l'intégration des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics français, depuis leurs prémices jusqu'à nos jours ; avant d'approfondir le concept de performance globale, à travers ses caractéristiques, ses avantages, mais aussi ses limites et risques associés. Au-delà d'objectifs nobles et ambitieux inscrits dans les textes réglementaires, nous verrons comment, dans la pratique, les acteurs du système de santé concilient des intérêts qui ne semblent pas toujours compatibles et la façon dont ils appréhendent cette notion d'achats publics responsables.

5 « Performance hospitalière pour des achats responsables » (PHARE) : programme lancé par la Haute Autorité de Santé, fin 2011, visant un potentiel de gains de 910 milliards d'euros au plan national, sur 3 ans.

6

 

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Chapitre I : L'inclusion de clauses environnementales et sociales dans les marchés publics : naissance, évolution et perspectives en matière d'achats publics responsables

Partie 1 : L'inclusion de clauses environnementales et sociales dans les marchés publics

1. a. Historique et contexte

Impulsée par l'Agenda 21, adopté à l'issue du Sommet de la Terre, l'idée d'une politique nationale d'achats publics durables remonte au début des années 90 : « les gouvernements eux-mêmes jouent (...) un rôle dans la consommation, notamment dans les pays où le secteur public représente une part importante de l'économie, et peuvent avoir une influence considérable tant sur les décisions des entreprises que sur les perceptions du public. Ils devraient donc réexaminer les politiques d'achat de fournitures de leurs organismes et départements afin d'améliorer si possible l'élément environnemental de leurs procédures d'acquisition, sans préjudice des principes du commerce international » 6 . Certaines collectivités françaises adoptent alors un Agenda 21 local au sein duquel les marchés publics sont perçus comme un moyen de faire évoluer les comportements d'achat et de donner une nouvelle direction à l'économie. Les effets de ces politiques éparses dites « de verdissement » de l'administration, où le prix ne serait plus le seul critère de choix, s'avèrent cependant très limités.

Il faudra attendre près d'une décennie pour que la Commission européenne fixe les conditions d'intégration des considérations environnementales dans les procédures de passation des marchés publics7. Une année supplémentaire pour que les chefs d'Etat, lors du Sommet mondial pour le développement durable de Johannesburg (2002) et forts d'une prise de conscience des dangers engendrés par l'activité économique mondiale, évoquent à leur tour l'opportunité de « marchés publics écologiques ».

Le 3 juin 2003, à travers sa Stratégie Nationale de Développement Durable, la France propose une vision plus exhaustive et adopte un programme d'actions " Vers un Etat exemplaire ", reflet d'une volonté d'éco-responsabilité de l'Etat. Il est fait référence à « l'achat public durable » en tant qu'un ensemble d'exigences, spécifications et critères en faveur de la protection et de la mise en valeur de l'environnement, du progrès social et favorisant le développement économique, notamment par la recherche de l'efficacité, d'amélioration de la qualité des prestations et d'optimisation complète des coûts.

L'année suivante, alors que le Parlement européen et le Conseil de l'UE complètent et renforcent le cadre juridique existant, en appuyant fortement l'intégration des critères

6 Paragraphe 4.23, inscrit au chapitre 4 « Modification des modes de consommation ».

7 Communication interprétative de la Commission du 4 juillet 2001 sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d'intégrer des considérations environnementales dans lesdits marchés.

7

 

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environnementaux8, le Code des Marchés Publics français rend enfin possible l'intégration de critères environnementaux et sociaux aux différents stades de la passation d'un marché public. En 2006, la notion de « développement durable » est quant à elle explicitement intégrée au CMP9.

Dès 2004, l'acheteur public français est donc tenu de prendre en compte les objectifs du développement durable, lors de la définition des besoins (article 5 du CMP) et dans les conditions d'exécution d'un marché ou d'un accord-cadre (article 14 du CMP). Afin de l'accompagner dans cette démarche, l'article 132 du CMP prévoit la possibilité de créer des groupes d'étude des marchés (dits « GEM »). Le Groupe d'étude des marchés Développement durable-Environnement (ou GEM-DDEN) voit ainsi le jour, avec pour mission d'élaborer des documents pratiques, juridiquement sûrs, destinés à aider l'acheteur public à intégrer ces enjeux - essentiellement environnementaux - dans ses marchés. Concernant le volet social, le Code des Marchés Publics reprend en 2006 les dispositions introduites par la Loi de Programmation pour la Cohésion sociale, dite « Loi Borloo »10, et offre au pouvoir adjudicateur la possibilité de faire prévaloir les questions d'insertion professionnelle lors de l'évaluation des offres.

Cette même année, la France adopte son 1er Plan National d'Action pour des Achats Publics Durables11, réaffirmant sa volonté d'inscrire le développement durable au sein de la commande publique.

Deux ans plus tard, à travers l'adoption du Grenelle de l'environnement12, le gouvernement français élargit le débat écologique et responsable à l'ensemble de la société. Le sujet se démocratise, en quelque sorte.

Plusieurs Conventions d'engagement mutuel volontaire voient le jour, co-signées par le Ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables, et des représentants sectoriels. En octobre 2009, la Fédération Hospitalière de France - aux côtés de la Fédération des cliniques et hôpitaux privés de France (FHP), de la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne (FEHAP) et du groupe Unicancer - s'engage ainsi dans une démarche volontaire pour promouvoir le développement durable au

8 « Les pouvoirs adjudicateurs peuvent contribuer à la protection de l'environnement et à la promotion du développement durable tout en leur garantissant la possibilité d'obtenir pour leurs marchés le meilleur rapport qualité/prix » (Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services ; et Directive 204/17/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 portant coordination des procédures de passation de marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux).

9 Directive n°2006-975 du 1er août 2006 portant Code des Marchés Publics, JO 4 août 2006.

10 Loi de Programmation pour la Cohésion sociale du 18 janvier 2005.

11 Adopté le 1er août 2006.

12 La Loi Grenelle I prévoit un recours croissant, dans les marchés publics des administrations, aux critères environnementaux et aux variantes environnementales, ainsi qu'un certain nombre d'objectifs par familles d'achats.

8

 

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sein des établissements de santé et médico-sociaux, en tant que composante de leur management et de leurs relations avec leurs parties prenantes.

Une partie de ces acteurs n'en est pas à ses débuts, puisqu'à travers la création du Baromètre du développement durable en santé13, les fédérations hospitalières offrent aux établissements de santé et médico-sociaux la possibilité de mesurer gratuitement, via une autoévaluation annuelle, leur performance en matière de pratiques responsables. Et ce, à travers neuf grands thèmes : le pilotage de leur démarche DD ; leur communication ; leur responsabilité sociale ; leur politique d'achats ; la construction et la rénovation des bâtiments ; leur gestion de l'eau et de l'énergie ; l'informatique verte ; leur gestion des déchets ; les transports et déplacements.

Le véritable tournant dans l'évolution et la structuration des pratiques des établissements de santé français n'a lieu qu'en 2010, lorsque la Haute Autorité de Santé (HAS) décide d'intégrer une série d'injonctions vers des pratiques dites « responsables » dans son Manuel de certification - V2010. Dans le cadre de l'évaluation externe des établissements de santé publics et privés14, ces derniers doivent soumettre leurs pratiques à un audit portant sur le niveau des prestations et soins délivrés aux patients, ainsi que sur la dynamique d'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins mise en oeuvre.

Largement inspirée du contexte réglementaire européen et national et afin que la procédure de certification puisse attester l'existence de pratiques efficientes et pérennes, la HAS inscrit le développement durable dans huit critères du Chapitre 1 - « Management de l'établissement ».

Références

Critères

Dénomination

Référence 1

Stratégie de l'établissement

Critère 1b

Engagement dans le développement durable

Référence 3

La gestion des ressources humaines

Critère 3d

Qualité de vie au travail

Référence 6

La gestion des fonctions logistiques et des infrastructures

Critère 6f

Achats éco-responsables et approvisionnements

Référence 7

La qualité et la sécurité de l'environnement

Critère 7a

Gestion de l'eau

Critère 7b

Gestion de l'air

Critère 7c

Gestion de l'énergie

Critère 7d

Hygiène des locaux

Critère 7e

Gestion des déchets

Tableau récapitulatif des injonctions responsables dans le Manuel de certification V2010 de la HAS

13 Le Baromètre du développement durable en santé - aujourd'hui « Baromètre Santé durable » - a été créé en 2007 par la FHF, la FEHAP, l'EHESP et la société PG Promotion.

14 La certification des établissements de santé étant pratiquée depuis 1999.

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En octobre 2011, pour porter la dynamique nécessaire à l'essor et à la structuration de la fonction achats au sein des établissements de santé et médico-sociaux en France, un programme national est lancé par la Direction Générale de l'Offre de Soin (DGOS). Baptisé " Performance hospitalière pour des achats responsables " (PHARE), ce programme a pour objectif de dégager des « économies intelligentes », c'est-à-dire mieux acheter pour donner des marges de manoeuvre supplémentaires aux hôpitaux, dans un contexte général de réduction budgétaire. Tout cela, en conservant bien entendu le niveau de qualité de prise en charge des patients et de sécurité des soins.

Parce qu'ils ne sont pas contradictoires avec la performance économique et partagent au contraire le même objectif15, les achats éco-responsables ont toute leur place dans ce programme et sont même aujourd'hui au coeur de la 5ème vague du projet Armen, lancée en octobre 201516. Ils sont également l'enjeu clé du Guide pour les achats durables appliqués aux produits de santé, qui compte parmi les principaux référentiels en matière d'intégration du développement durable dans les marchés publics et qui a été rédigé par le Groupe d'Etude des Marchés de Produits de Santé (GEM-PS)17.

Ce qu'il faut retenir

Si l'Europe et la France se sont engagées en faveur de l'intégration du développement durable dans la commande publique, ces efforts ont été dispersés sur une vingtaine d'années, avec une accélération notable sur cette dernière décennie.

Quant à la confusion récurrente entre ambitions d'achats dits « environnementaux » et injonctions à réaliser des achats « responsables et durables », force est de constater que les autorités manquent de clarté voire d'objectivité sur leurs intentions et les moyens qu'elles sont réellement prêtes à allouer à l'atteinte de ces objectifs.

15 DirectHopital, « Achats hospitaliers : la performance économique et les critères sociaux et environnementaux ne sont pas "contradictoires » (article par Morgan Bourven, 15 octobre 2015)

16 Le projet Armen consiste, dans le cadre du programme PHARE, à identifier des opportunités de gains, par vagues de 10 domaines sur une durée de 3 mois.

17 La version 1.0 du Guide GEM-PS a été publiée en juillet 2011. La dernière version de ce référentiel (3.0) a été publiée en mars 2013.

 

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1. b. Les différentes possibilités d'inclusion de clauses sociales et environnementales dans les marchés publics

Comme vu précédemment, le Code des Marchés Publics français a évolué - dès 2004, sur impulsion du droit communautaire - en faveur de la prise en compte de considérations durables et responsables (appelées « clauses sociales et environnementales » dans le CMP). Pour autant, les différentes composantes du développement durable ne sauraient être intégrées de la même façon dans un marché public et doivent respecter trois principes essentiels : l'égalité de traitement des candidats, la liberté d'accès à la commande publique et la transparence des procédures de passation.

A date, le Code des marchés publics permet d'intégrer le développement durable :

? lors de la définition de l'objet du marché et dans les conditions d'exécution du marché

? à travers les articles 5, 6, 14, 15 et 50 du CMP [Phase I]
? lors de la passation complète du marché

? à travers l'article 45 du CMP (pour l'examen des candidatures) [Phase II]

? à travers l'article 53 du CMP (pour l'examen de l'offre) [Phase III]

Sanction éventuelle en cours d'exécution du marché

10

Schéma récapitulatif des possibilités d'inclusion de critères sociaux et environnementaux dans les marchés publics

(Annexe 1)

11

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?Cinq articles du CMP représentent ce qu'il convient d'appeler ici la PHASE I. Ils permettent l'inclusion de critères sociaux et environnementaux lors d'une phase amont, exclusivement centrée sur le pouvoir adjudicateur, et indépendante de toute réflexion portant sur les compétences du candidat ou les caractéristiques de l'offre que ce dernier pourra présenter.

La PHASE I peut être assimilée à une forme d`introspection : l'acheteur public se pose sur son/ses besoin(s) et sur l'environnement dans lequel son futur marché sera déployé. Ainsi, c'est bien la considération du contexte - notamment le niveau de risques encourus - qui doit permettre au pouvoir adjudicateur de positionner son niveau d'exigences durables, tantôt en formalisant des exigences sociales et environnementales (SE) dans le cahier des charges, tantôt en rappelant la prise en compte de critères SE dans le choix de l'offre.

La définition du/des besoin(s) est une étape déterminante pour tout achat public responsable et durable. Il s'agit pour le pouvoir adjudicateur de savoir comment il consomme (actuellement) et de s'interroger sur la façon dont il pourrait satisfaire son/ses besoin(s) tout en consommant mieux (demain). A ce titre, l'acheteur public n'est autorisé à lancer un marché insérant des clauses sociales et environnementales qu'après avoir mené une étude de marché, permettant de vérifier l'adéquation de sa demande avec l'offre existante.

Pour rappel, en application de l'article 5 du CMP18, l'acheteur public est tenu d'intégrer une/des clause(s) sociale(s) et environnementale(s) dans ses marchés. A défaut, il doit pouvoir justifier l'absence de telles considérations (c'est le sens de l'étude de marché mentionnée ci-dessus). « La nature et l'étendu des besoins à satisfaire sont déterminées avec précision avant tout appel à la concurrence ou toute négociation non précédée d'un appel à la concurrence en prenant en compte des objectifs de développement durable. Le ou les marchés ou accords-cadres conclus par le pouvoir adjudicateur ont pour objet exclusif de répondre à ces besoins ».

Malgré son existence, le reproche qui peut toutefois être adressé à cette disposition est qu'elle entérine une obligation de moyens à défaut d'une obligation de résultats. En ce sens, aucune jurisprudence n'a jamais sanctionné l'absence de prise en compte du développement durable dans la définition d'un marché public (où cette considération aurait pu/dû apparaître), là où des organismes publics ont déjà pu être sanctionnés pour leur recours, même modéré, à des critères sociaux dits trop éloignés de l'objet du marché19.

Même après la réalisation d'une étude de marché, il peut arriver que l'acheteur public ne soit pas certain qu'il existe des solutions responsables et durables recevables pour les produits, services ou travaux qu'il souhaite acquérir ou réaliser. En cas d'incertitude, le recours aux variantes permet de stipuler des exigences minimales assorties d'alternatives, telle qu'une meilleure performance environnementale : le pouvoir adjudicateur « peut

18 Article 5 du CMP, portant sur la définition du besoin du marché.

19 CAA Douai, 29 novembre 2011, Région Nord Pas-de-Calais, réq. n°10DA01501.

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préciser qu'il est disposé à accueillir des offres répondant à certaines variantes plus écologiques »20. Une variante peut ainsi être définie comme une offre de produit ou service qui répond aux besoins de l'acheteur, qui est même susceptible de proposer une alternative qualitativement supérieure à la solution imaginée par ce dernier, mais qui diffère cependant de la description faite dans les documents de la consultation.

Le recours à l'article 50 du CMP et à cet outil flexible que sont les variantes sociales et/ou écologiques permet à l'acheteur public d'intégrer la protection de l'environnement et des Hommes dans le règlement de la consultation, en formulant un ensemble minimal de spécifications techniques en la matière. Toutefois, l'usage de variantes est aujourd'hui très peu utilisé par l'acheteur public, par crainte d'introduire un nouveau critère d'attribution des

offres « non défini », susceptible d'engendrer une discrimination entre les
soumissionnaires21.

Intégrées au Cahier des charges et généralement transcrites dans le Cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché, les conditions d'exécution sont des prescriptions que toute offre devra respecter afin d'être conforme à l'objet du marché. L'article 14 du CMP22 dispose ainsi que « la définition des conditions d'exécution d'un marché dans les cahiers des charges peut viser à promouvoir l'emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d'insertion, à lutter contre le chômage ou à protéger l'environnement. (...) Ces conditions d'exécution ne peuvent pas avoir d'effet discriminatoire à l'égard des candidats potentiels.» A travers les conditions d'exécution, l'acheteur public peut imposer la livraison ou le conditionnement en vrac plutôt qu'en emballages individuels, la récupération ou la réutilisation des emballages ou encore la livraison des marchandises dans des conteneurs réutilisables - pour illustrer quelques aspects environnementaux. Mais les conditions d'exécution peuvent également favoriser l'insertion professionnelle, allant même jusqu'à désigner des marchés dits « réservés » - aux secteurs adapté et protégé, notamment - grâce à l'article 15 du CMP23. Selon le niveau de maturité de sa démarche responsable et durable, le pouvoir adjudicateur pourra combiner injonctions écologiques et sociales.

Bien entendu, l'article 14 du CMP doit avoir pour corollaire la définition de procédures de contrôle et de sanctions précises, en cas de non-respect des conditions d'exécution. Car si la mauvaise exécution d'un marché ne saurait être sanctionnée au stade de l'attribution, elle peut l'être en cours d'exécution et entraîner la résiliation dudit marché. En 2010, près de 30 % des acheteurs publics déclaraient s'engager dans cette voie qui, selon eux, garantit ou renforce la prise en compte d'exigences de développement durable24. Mais, à moyen terme,

20 Circulaire d'application du Code des marchés publics du 3 août 2006 (art. 50 du CMP, portant sur la possibilité d'admettre des variantes).

21 Cabinet SCP Charrel et Associés, « L'environnement et les marchés publics : quels critères pour quelles conditions de prise en compte ? » (Support de formation, décembre 2014).

22 Article 14 du CMP, portant sur les conditions d'exécution du marché.

23 Article 15 du CMP, portant sur les marchés réservés.

24 Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011).

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il semblerait que les difficultés liées au contrôle des modalités d'exécution aient eu raison de leurs ambitions.

L'article 6 du CMP25 autorise l'acheteur public à se référer à des spécifications techniques pour définir la prestation attendue (i.e. l'objet du marché), lui offrant ainsi la possibilité de traduire son/ses besoin(s) en caractéristiques techniques - éventuellement de portée sociale et/ou environnementale - requises pour un produit ou un service26. Dans sa version 2004, le Code des Marchés Publics faisait référence « aux normes homologuées ou à d'autres normes applicables en France en vertu d'accords internationaux27 » et sa version 2006 a élargi les possibilités à la définition de spécifications techniques et d'exigences fonctionnelles fondées sur la performance. Les caractéristiques techniques requises doivent correspondre à l'usage auquel l'objet du marché est destiné. Elles constituent des critères de conformité minimum et déterminent un certain niveau de compétitivité, sans pour autant « créer des obstacles injustifiés à l'ouverture des marchés publics à la concurrence28 ».

Dans son étude sur l'achat public durable, l'Observatoire Economique de l'Achat Public rapportait que seuls 25 % des acheteurs publics exerçaient concrètement leur droit à la rédaction des spécifications techniques afin d'y inscrire le développement durable ; là où les autres se contentaient d'un simple copié-collé des marchés antérieurs29.

L'examen des candidatures et l'examen des offres (opérations dites de « passation du marché ») constituent deux phases successives et indépendantes, qui précèdent « l'attribution du marché ». Les grandes étapes de la procédure de passation doivent être définies en amont, dès la préparation de la consultation publique.

Aussi, il est extrêmement important de ne pas confondre :

? les critères de sélection (aptitude et capacités30 du candidat à réaliser le marché)

? critères qualitatifs

? et les critères d'attribution (performances du produit/service proposé par le candidat)

? critères quantitatifs.

25 Article 6 du CMP, portant sur les spécifications techniques de l'objet du marché.

26 Niveaux de qualité ou de performance environnementale ; conception pour tous les usages (y compris par

des personnes en situation de handicap) ; évaluation de la conformité, de l'utilisation du produit, de sa sécurité ou de ses dimensions (y compris les prescriptions applicables au produit en ce qui concerne la dénomination de vente, la terminologie, les symboles, les essais et méthodes d'essais, l'emballage, le marquage et l'étiquetage les instructions d'utilisation, les processus et méthodes de production, ainsi que les procédures d'évaluation de la conformité).

27 Dans les conditions prévues par le décret n° 84-74 du 26 janvier 1984 fixant le statut de la normalisation.

28 Code des Marchés Publics français - version 2004 (article 6, portant sur les spécifications techniques de l'objet du marché).

29 Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011).

30 Capacités économiques, financières et techniques.

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D'après le Code des Marchés Publics français, toute intégration de critères sociaux et/ou environnementaux aux étapes de passation d'un marché doit être expressément mentionnée dans l'Avis d'Appel Public à la Concurrence ou dans le Cahier des Clauses Particulières31. De telles clauses, dites sociales et environnementales (SE), doivent être en rapport avec l'objet du marché et définies de façon suffisamment claire pour ne pas offrir une liberté de choix illimitée au pouvoir adjudicateur.

?L'examen des aptitudes et capacités durables du candidat, lors de la passation des marchés : critères de sélection qualitatifs (PHASE II).

En dehors de la faute professionnelle grave, pour crime environnemental ou toute forme d'atteinte aux Droits fondamentaux de la personne32, aucune candidature à un marché public ne saurait être exclue lors de cette phase. Au contraire, le Code des Marchés Publics issu du décret du 7 janvier 2004 permet de prendre en compte les capacités techniques minimales des entreprises en matière sociale et environnementale, en prévoyant en son article 45 qu'« au titre des capacités professionnelles, peuvent figurer des renseignements sur le savoir-faire des candidats en matière de protection de l'environnement ». Dans la mesure où « il ne peut être exigé que des niveaux minimaux de garanties et de capacités, qui sont liés et proportionnés à l'objet du marché », il est indispensable que l'élément de preuve illustrant la capacité technique (responsable et durable) du candidat ait un impact sur la qualité du bien ou du service, ou qu'il influence la capacité dudit candidat à exécuter un marché avec des exigences sociales ou environnementales (par exemple, une gamme de produits d'hygiène & désinfection éco-labellisée, pour être utilisée dans les services d'un établissement de santé HQE ou certifié EMAS). L'article 45 du CMP33 prévoit en ce sens que l'acheteur public peut « demander aux opérateurs économiques qu'ils produisent des certificats de qualité » ; normes de garantie qui doivent bien sûr être délivrées par un organisme tiers indépendant et fondées sur des normes européennes ou internationales. A titre indicatif, l'OEAP révélait dans son étude sur l'achat public durable que seul 1 acheteur public sur 5 fixait de tels seuils minimum de capacité techniques responsables et durables pour ses candidatures34.

? L'examen des performances responsables et durables d'une offre, lors de la passation des marchés : critères de sélection quantitatifs (PHASE III).

31 Cahier des Clauses Administratives Particulières (CCAP) et Cahier des Clauses Techniques Particulières (CCTP).

32 Développée dans le Chapitre I - Partie 2.

33 Article 45 du CMP, portant sur les capacités techniques (minimales) du candidat au marché.

34 Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011).

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Dans sa communication interprétative du 4 juillet 2001, la Commission Européenne stipulait que le choix des critères d'attribution d'un marché doit être dicté par la recherche de l'avantage économique ; induisant au passage que les critères sociaux et environnementaux n'étaient pas susceptibles de servir, à eux seuls, un tel objectif35. Quelques mois plus tard, la Cour de Justice Européenne donnait une interprétation différente, offrant la possibilité de recourir aux clauses sociales et environnementales en tant que critères d'attribution à part entière, aux côtés des critères dits « traditionnels ». C'est cette dernière interprétation qui a été reprise à travers les Directives du 31 mars 2004 et l'article 53 Code des Marchés Publics français36. D'après cette lecture, le sens des critères d'attribution est de détecter « l'offre économiquement la plus avantageuse » : en ne résumant pas la performance financière à la logique court-termiste du « moins-disant37 », mais en ouvrant sur la question du coût global d'utilisation et la notion de performance globale (concept du « mieux-disant38 »).

L'acheteur public peut donc prendre en compte des considérations responsables et durables au stade du jugement de l'offre, en veillant toutefois à respecter quatre conditions cumulables :

? les critères SE doivent être en lien avec l'objet du marché ;

? les critères SE doivent être objectivement quantifiables (afin de ne pas donner au pouvoir adjudicateur une liberté illimitée de choix, ni un pouvoir discrétionnaire39) ;

? les critères SE doivent être mentionnés expressément dans l'Avis d'Appel Public à la Concurrence et dans le Cahier des Clauses Particulières (conformément au principe de transparence des marchés publics) ;

? la formulation des critères SE doit respecter les principes fondamentaux du droit européen : non-discrimination et égalité de traitement.

Mais, attention, il ne s'agit pas d'une obligation pesant sur le pouvoir adjudicateur. Celui-ci peut, s'il le souhaite, évaluer les offres reçues selon le seul critère Prix (« moins-disant ») ; il peut établir un ensemble de critères d'attribution dits « classiques40 » ; ou bien choisir de compléter ces critères d'attribution en intégrant différentes facettes du développement

35 Communication interprétative de la Commission du 4 juillet 2001 sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d'intégrer des considérations environnementales dans lesdits marchés.

36 Article 53 du CMP, portant sur les critères d'attribution du marché (jugement de l'offre).

37 L'offre économiquement la plus avantageuse est l'offre la moins chère à l'achat (« moins-disant »).

38 L'offre économiquement la plus avantageuse est l'offre la plus performante sur l'ensemble du cycle de vie du produit/service et celle qui permet de gérer au mieux l'ensemble des externalités liées au produit/service (« mieux-disant »).

39 Article 52 de l'Ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, qui transpose en droit français les Directives marchés publics européennes de 2014.

40 En général, il s'agit des critères Prix / Qualité / Logistique & Délais.

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durable41. Dans son étude sur l'achat public durable, l'Observatoire Economique de l'Achat Public rapportait d'ailleurs que seul 1 acheteur public sur 4 fixait, en 2010, des critères d'attribution...strictement environnementaux42 !

Si le pouvoir adjudicateur privilégie toutefois cette option et parce que l'intégration de considérations responsables et durables doit impérativement être transcrite à travers des critères objectivement quantifiables, l'acheteur public est tenu de hiérarchiser et de pondérer les critères d'attribution retenus. Conformément au CMP 2006, il détermine d'abord l'importance relative de chaque critère par rapport aux autres, puis attribue à chacun une pondération43 (coefficient ou nombre de points). Même lorsqu'elle n'est pas obligatoire, la pondération est néanmoins recommandée : plus pratique que la hiérarchisation, elle facilite le choix de « l'offre économiquement la plus avantageuse » et donne plus de garanties quant au respect de l'égalité des chances des candidats44. Une fois établie la liste des critères d'attribution et leur pondération, l'acheteur public a défini sa grille de notation des offres, dont le détail doit figurer dans l'Avis d'Appel Public à la Concurrence ou dans les documents de consultation.

Ce qu'il faut retenir

Le Code des Marchés français propose dans sa version actuelle au moins cinq possibilités différentes - et cumulables - d'intégration des clauses sociales et environnementales, en plus de l'obligation légale de considérer le développement durable lors de la définition du/des besoin(s). [Voir Annexes 2 et 5]

Faut-il y voir la volonté d'inscrire des considérations responsables tout au long du cycle de vie d'un marché, dans une perspective durable ?

« En lien avec l'objet du marché », « objectivement quantifiable », « respectant les principes de transparence, de non-discrimination et d'égalité de traitement » : les conditions et modalités accompagnant l'intégration du développement durable dans les marchés publics sont toutefois nombreuses et illustrent bien la complexité des débats sur le sujet.

41 Performances en matière de protection de l'environnement, performances en matière de développement des approvisionnements directs et locaux, performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté, coût global d'utilisation, coût global du produit (tout au long du cycle de vie)...

42 Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011).

43 « Pour les marchés passés selon une procédure formalisée [Appel d'offres, procédures négociées, concours et système d'acquisition dynamique] et lorsque plusieurs critères sont prévus, le pouvoir adjudicateur précise leur pondération ». « Le pouvoir adjudicateur qui estime pouvoir démontrer que la pondération n'est pas possible notamment du fait de la complexité du marché, indique les critères par ordre décroissant d'importance. »

44 Vademecum des marchés publics, édition 2015.

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Partie 2 : Etat des lieux et tendances en matière d'achats publics responsables

Les clauses sociales et environnementales dans les marchés publics se développent de façon continue en France, depuis que la réforme du Code des Marchés a rendu obligatoire la réflexion sur le sujet par le pouvoir adjudicateur45. Selon l'Observatoire Economique de l'Achat Public, entre 2009 et fin 2010, les marchés de plus de 90 000 euros comportant une clause environnementale ont augmenté de 350 % (6,7 % à fin 2010 VS 1,9 % en 2009) et ceux comportant une clause sociale, de 234 % (6,1 % à fin 2010 VS 2,6 % en 2009)46.

Des scores impressionnants mais associés, il faut bien le rappeler, à un stade de démarrage et qui confirment un certain amalgame entre injonctions au développement durable et injonctions strictement écologiques. Par ailleurs, l'OEAP observe que les clauses SE se retrouvent essentiellement dans les marchés de travaux, de fournitures & services et dans les achats de fournitures courantes ; et de façon bien moindre dans les marchés portant sur des biens et services standards.

Extrait des résultats de l'enquête « L'achat public durable » (Observatoire Economique de l'Achat Public, 2011)

45 Au 1er septembre 2006.

46 Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011).

 

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Extrait du 8ème Baromètre « Santé durable » (Squaremetric, 2015)

?Critères DD dans la politique d'achats : quels domaines ? quels types d'achats ?

 

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Le niveau d'intégration du développement durable : ce qui se fait en général

D'autres études récentes, notamment la 8ème édition du Baromètre « Santé Durable » et le Baromètre 2014 « Achats responsables » co-piloté par le ds et AFNOR Solutions Achats47, révèlent que -dans son principe- l'achat responsable et durable est plébiscité48, mais qu'un décalage perdure entre l'adhésion au principe et la réalité, complexe, de sa mise en oeuvre. Ainsi, 75 à 82 % des établissements de santé affirment avoir aujourd'hui mis en oeuvre une politique d'achats durables, mais seuls 25 à 31 % d'entre eux en ont réellement fait un critère de choix dans leur sélection des offres.

47 Présentation des premiers résultats en cercle fermé, lors d'une journée thématique organisée par le ds.

48 Réaliser des achats durables est la priorité n°2 des répondants à la 8ème édition du Baromètre Santé durable, à 73 % ; après la réduction de l'impact environnemental de l'activité (81 %) ; et avant le bien-être et la qualité de vie au travail des salariés (71 %) (SQUAREMETRIC, 2015).

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Dans le cadre de la 5ème vague du projet Armen49, une analyse des 450 actions identifiées a montré que « plus d'une centaine peuvent être considérées comme durables et éco responsables alors qu'elles n'avaient pas été identifiées comme telles au départ »50, démontrant qu'il est désormais possible de concilier exigences environnementales et performance économique. Pour autant, ce constat met surtout en exergue la difficulté - partagée par les établissements de santé et, fait plus inquiétant, les entreprises soumissionnaires - à identifier ce qui relève du développement durable et ce qui ne rentre pas dans ce spectre. Constat soutenu par les chiffres du Baromètre « Santé Durable » 2015 : seuls 23 % des établissements de santé et médico-sociaux répondants (sensibilisés aux thématiques durables, soit dit au passage) ont fait le choix de dispenser des formations en matière d'achats durables51.

Malgré les apports bénéfiques des considérations responsables et durables dans la relation B to B, la majorité des soumissionnaires confirment la prédominance des critères de choix qualité-coûts-délais dans l'attribution des marchés - cantonnant les clauses sociales et environnementales à un statut d'argument « nice to have52 ». Marc Bouche, adjoint au chef du Programme de performance hospitalière pour des achats responsables (PHARE) à la Direction Générale de l'Offre de Soin, définit pourtant l'achat durable selon quatre critères : « des "économies intelligentes", la prise en compte de l'intérêt des parties prenantes, la protection de l'environnement et l'intégration de toutes les étapes du marché et de la vie du produit53 ». Une définition qui considère bien les clauses sociales (« les intérêts des parties prenantes ») et les clauses environnementales (« la protection de l'environnement ») comme deux principes d'égale valeur. Or jusqu'à présent, non seulement la commande publique n'a eu que très peu recours à l'achat durable mais elle a, en plus, montré bien plus d'aisance avec l'intégration de dispositions environnementales qu'avec son pendant social.

N'importe quel soumissionnaire pourrait légitimement s'interroger sur la corrélation éventuelle entre l'intégration du développement durable dans son offre et le nombre de marchés qu'il a remportés. Mais, en tout état de cause, le lien n'est pas évident à établir. Selon l'interprétation faite du Code des Marchés Publics, les clauses sociales et environnementales ne constituent pas un critère déterminant54 et ne doivent surtout pas

49 Le projet Armen consiste, dans le cadre du programme PHARE, à identifier des opportunités de gains, par vagues de 10 domaines sur une durée de 3 mois.

50 DirectHopital, « Achats hospitaliers : la performance économique et les critères sociaux et environnementaux ne sont pas "contradictoires » (article par Morgan Bourven, 15 octobre 2015).

51 SQUAREMETRIC, 8ème édition du Baromètre Santé durable (2015).

52 « Un plus » « Un élément sympa à avoir, mais qui n'est pas essentiel ».

53 DirectHopital, « Achats hospitaliers : la performance économique et les critères sociaux et environnementaux ne sont pas "contradictoires » (article par Morgan Bourven, 15 octobre 2015).

54 En raison de la faible valorisation du développement durable dans l'évaluation de l'offre.

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devenir un critère discriminant55 dans le choix d'une offre. Dans ce cas, peuvent-elles représenter un motif d'exclusion ? Les Directives européennes, au même titre que la plupart des législations nationales sur les achats durables, énoncent une liste précise de conditions d'exclusion d'un candidat. Ces critères excluent, par exemple, les entreprises en faillite ou en liquidation judiciaire ; celles qui n'ont pas payé leurs impôts ou leurs cotisations sociales ; ou encore les entreprises ayant commis des crimes environnementaux et/ou ayant porté atteinte aux droits fondamentaux de la personne, et qui ont été condamnées à ce titre56. Lors de la phase d'examen des candidatures (et non lors de l'examen des offres), l'acheteur public peut donc écarter un soumissionnaire ayant commis une faute professionnelle grave, en lien avec un enjeu de développement durable. Cependant, un tel motif d'exclusion est difficile d'application en l'absence de condamnation, sanction économique ou amende administrative.

Différentes enquêtes menées auprès de fournisseurs des organismes publics corroborent l'ensemble de ces constats. Ces enquêtes prouvent que les entreprises soumissionnaires interrogées ne sont tout bonnement pas en mesure de citer d'exemple de marchés qu'elles n'ont pas obtenus, faute d'inclusion du développement durable, ou à l'inverse qu'elles auraient obtenus grâce à une offre performante en la matière57. Il semble donc que l'achat public responsable et durable reste, à date, très largement porté par une approche de gestion des risques.

Cette approche « risques » est intimement liée à la notion de conformité réglementaire, notamment le respect des principes fondamentaux de la commande publique, énoncés dans les Directives du Parlement européen et du Conseil de 2014. Ainsi, les cas de jurisprudence58 en matière d'inclusion de clauses sociales et environnementales rappellent-ils davantage la nécessité de respecter ces dispositions (concurrence, non-discrimination, transparence, lien avec l'objet du marché, offre économiquement la plus avantageuse) plus qu'ils ne rappellent au pouvoir adjudicateur l'obligation de moyens qui pèse sur lui (considérer le développement durable lors de la définition de son/ses besoin(s)). La portée juridique de cette obligation reste tellement imprécise qu'« à l'évidence, tous les acheteurs n'ont pas perçu le caractère obligatoire du questionnement » selon Patrick Loquet, Maître de conférences en Droit et consultant, dédié aux clauses sociales dans les marchés publics59.

55 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la Directive 2004/18/CE.

56 Articles 53 et 54 de la Directive 2004/17/CE et article 45 de la Directive 2004/18/CE.

57 http://www.patrickloquet.fr

58 Arrêt Wienstrom du 4 décembre 2003, arrêt Concordia du 17 septembre 2002 et arrêt Beentjes du 20 septembre 1988.

59 http://www.patrickloquet.fr

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Le schéma ci-dessous illustre l'évolution des clauses sociales et environnementales, à travers un suivi sur trois ans de leur intégration aux documents de la consultation publique de produits de santé ; marchés pour lesquels l'entreprise B. Braun Medical était soumissionnaire. La période 1 (octobre 2012 - septembre 2013) correspondant à la mise en place de cet indicateur, une certaine marge d'incertitudes doit être considérée. Pour autant, les grandes tendances sont pleinement représentatives de la réalité, ainsi que le détail des pondérations du critère développement durable.

Suivi de l'intégration des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics pour lesquels B. Braun Medical était soumissionnaire (Annexe 3)

L'analyse de cet indicateur sur trois années consécutives permet de dégager quelques tendances fortes en matière d'intégration des clauses SE dans les marchés publics.

?Tendance n°1 : Le développement durable n'est plus une option.

Dans plus de 80 % des marchés publics de produits de santé observés sur la période 3, cette mention figure bien (stricto sensu ou sous une dénomination environnementale) dans l'un des documents de la consultation.

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?Tendance n°2 : Le développement durable se fait progressivement une place parmi les critères de jugement d'une offre (art. 53 du CMP)...mais avec de grandes disparités observées dans sa pondération (et son rattachement60).

?Tendance n°3 : La variété de pondérations peut être le signe de positionnements plus affirmés de la part des établissements de santé.

Et ce, dans les deux sens : qu'il s'agisse de positionnements « pro DD » (critère DD pondéré entre 8 et 15 % de la note globale) ou plus détachés (critère DD pondéré entre 0,5 et 4 % de la note globale). Dans les deux cas, le pouvoir adjudicateur semble confirmer sa position et assumer ses choix.

?Tendance n°4 : Les clauses sociales et environnementales ne constituent pas un critère déterminant dans le jugement des offres.

Ce qu'il faut retenir

En moyenne, le développement durable compte pour 5 % de la note globale attribuée. Une valorisation, certes, mais trop faible pour pouvoir être qualifiée de « déterminante ».

Les clauses SE, puis le développement durable ont été respectivement inscrits au Code des Marchés Publics en 2004 et 2006. Dix ans plus tard face aux amalgames, aux disparités entre types de marchés, aux principes reconnus mais pas ou peu appliqués, devant les différents niveaux d'expertise ou encore face l'absence de "rappel à l'ordre"...certains estiment qu'il serait temps de changer la logique de « ce qui est permis » pour passer à une logique de « ce qui est exigé ».

En France, si le développement durable n'est pas un critère déterminant61, s'il doit veiller à ne pas être discriminant et s'il est (très) peu excluant, il se crée progressivement une place dans la commande publique. En comparaison, les pays scandinaves - malgré leur avance prise sur le sujet - intègrent les clauses SE dans seulement 36 % de leurs marchés et pondèrent en moyenne ce critère à 3,3 % de la note globale62.

60 Critère DD en propre ou intégré, comme sous-critère, à un critère d'attribution plus large (ex : Performance fournisseur, Valeur technique, etc).

61 5 % en moyenne de la note globale attribuée à une offre.

62 MARTY Frédéric, « Les clauses environnementales dans les marchés publics : perspectives économiques » (working paper, 2012) faisant référence à une étude de Parrika-Alhola et al. (2006).

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Partie 3 : Limites et carences de la politique actuelle d'achats publics responsables

Si l'achat responsable et durable répond à un véritable mouvement de société, ce n'est pas chose aisée que de trouver le bon équilibre entre introduction d'un critère devenu réglementaire et sa mise en pratique. A date, la commande publique durable semble toutefois " patiner " et avoir du mal à décoller, signe de certains dysfonctionnements ou, tout du moins, d'un fonctionnement à deux vitesses. Focus sur les écueils du système.

La législation sur les marchés publics présente en matière de développement durable des limites intrinsèques et révèle des incertitudes, notamment quant à la compatibilité légale et la faisabilité opérationnelle d'insérer de tels critères. En effet, un marché public doit pouvoir être exécuté par tout type de soumissionnaire, sans discrimination - notamment géographique. Or, certaines conditions d'exécution63 durables peuvent entraîner une forme de préférence locale, si l'on tient compte - par exemple - des réductions d'émissions occasionnées (un soumissionnaire dont le centre de distribution est situé à proximité de l'établissement de santé-adjudicateur sera naturellement favorisé). Dans quelle mesure l'acheteur public ne se trouve-t-il pas face à des injonctions contradictoires ? D'un côté, les politiques publiques ne doivent pas être l'outil d'un protectionnisme « vert » ou « bleu » et, de l'autre, l'intégration de conditions d'exécution à visée sociale et/ou environnementale pourrait constituer un moyen efficace de garantir la performance durable d'un soumissionnaire, sur le long terme64. Individuellement, chaque pouvoir adjudicateur doit aujourd'hui trancher ce débat et relever le défi d'une évaluation équitable, à l'équilibre entre respect des principes fondamentaux de la commande publique, incitation à l'innovation responsable et éthique de l'acheteur.

Dans les faits, l'acheteur public manque cruellement de soutien politique et administratif. En 2011, l'étude menée par l'Observatoire Economique de l'Achat Public révélait qu'un peu plus d'1/3 des acheteurs était en mesure d'identifier une personne portant la démarche développement durable au sein de son organisation. D'après le Baromètre « Santé durable » 2015, 2 établissements de santé sur 3 identifieraient aujourd'hui au moins une personne chargée de ces questions...mais son positionnement dans les services recouvre des réalités très différentes, d'un établissement à l'autre65. Devant l'ampleur du chantier, ces chiffres sont malheureusement trop faibles. D'autant plus quand on sait la place que les achats responsables et durables occupent dans le nouveau Plan National d'Action pour les Achats Publics Durables 2015-2020 (2ème chantier prioritaire). Il conviendrait donc d'inciter les

63 Article 14 du Code des Marchés Publics

64 Proposition n° 5 du Rapport fait au nom de la commande publique, par Philippe Bonnecarrère et Martial Bourquin

65 SQUAREMETRIC, 8ème édition du Baromètre Santé durable (2015).

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décideurs à repenser le positionnement du processus achat dans leur organisation et, d'une certaine façon, les encourager à " se donner les moyens de leurs ambitions ".

Par ailleurs, l'acheteur public manque temps. Si elle est nécessaire, l'évaluation de la performance durable d'un soumissionnaire est un processus chronophage, tant pour le pouvoir adjudicateur que les candidats. Dans un contexte déjà extrêmement contraint, où il dispose de peu de ressources (financières et humaines), difficile pour un acheteur de nier cette sensation de saturation et de dispersion dans des tâches qui semblent si éloignées de l'acte d'achat, tel qu'il lui a été enseigné. Certains pourront également avoir l'impression d'un ratio temps passé-bénéfice dégagé peu efficace, consacrant ainsi du temps à des questions " accessoires " sur des marchés dont l'impact environnemental ou social reste minime. Pourtant, il est indispensable non seulement de prendre le temps de cette évaluation, mais aussi de piloter la démarche d'achats publics responsables et durables. Car seuls la mesure, le suivi et le pilotage permettront de mesurer les gains liés à l'inclusion de clauses sociales et environnementales à la commande publique. A date, selon les résultats de la 8ème édition du Baromètre « Santé durable », seul 1 établissement de santé sur 3 calcule le retour sur investissement de ses actions de développement durable66. C'est dire si la démarche est confrontée à une réalité forte de scepticisme !

Mais le bilan économique net de l'insertion des clauses environnementales et sociales est également complexe à établir, parce que l'achat responsable et durable est encore vécu comme un surcoût. Plus de démarches, plus de temps, plus de budget...pour un marché finalement réduit, voire une qualité douteuse : les clichés ont la peau dure. Pour beaucoup, minimiser le coût d'acquisition et réduire l'impact environnemental et/ou social d'un bien ou service acquis sont deux objectifs antagonistes, entre lesquels l'acheteur public doit arbitrer67. Or, le défaut d'informations quant au prix de revient réel de ce bien ou service (i.e. son coût global, tout au long du cycle de vie) ne permet pas fondamentalement à l'acheteur d'effectuer son choix en considérant l'ensemble des éléments... Un autre aspect da la problématique est que, pour réfléchir en coût complet, il faut pouvoir rendre compte les gains réalisés sur une base pluriannuelle ; mais les établissements de santé ont un cadre comptable et budgétaire calé sur un rythme annuel. Enfin, en ces temps caractérisés par de fortes tensions budgétaires, tout surcoût à court-terme - même s'il garantit des économies globales sur le moyen ou le long-terme - reste controversé.

La plupart des acheteurs publics continuent d'être considérés comme de seuls opérateurs économiques. A ce jour, ce ne sont des experts ni en environnement ni en pratiques socialement responsables. Et les agents techniques en charge de ces questions ou encore les

66 SQUAREMETRIC, 8ème édition du Baromètre Santé durable (2015).

67 MARTY Frédéric, « Les clauses environnementales dans les marchés publics : perspectives économiques » (working paper, 2012) faisant référence à une étude d'Appoloni et al., (2011).

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directions juridiques des établissements de santé n'ont, quant à eux, pas de réelle vision globale des implications d'une démarche d'achats responsables sur l'ensemble de l'organisation. En d'autres termes, un déficit de connaissances et de formation caractérise la commande publique durable. Au vu du cadre rigoureux de l'achat public, en l'absence de formation initiale ou de " mode d'emploi unique " pour les achats responsables, nul ne saurait reprocher aux représentants du pouvoir adjudicateur une certaine modération, voire un attentisme sur le sujet. Pour autant, cela ne doit pas être un prétexte à l'inaction. Et à l'image du guide élaboré par le GEM-PS, des supports pédagogiques existent déjà, présentant des exemples concrets et le droit en vigueur. « L'achat durable va bien au-delà de l'impact positif sur les plans environnemental et social. Il valorise le travail de l'acheteur et représente une vraie source de motivation supplémentaire pour [contribuer à la performance globale de l'organisation].68 »

Ce qu'il faut retenir

Il ne suffit pas d'inscrire le développement durable dans le droit de la commande publique pour que les établissements de santé du territoire pratiquent, du jour au lendemain, les achats responsables. Face à un tel changement de paradigme, il est indispensable d'accompagner les acheteurs publics (cycles de formation continue et intégration au cursus initial), de procéder à une mise en cohérence des intentions et de la politique d'allocation des ressources (temps, Homme, cycles de formation), et de fixer des objectifs opérationnels, par familles de produits de santé.

68 (voir réf. ci-dessus)

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Partie 4 : Quelles perspectives en matière d'achats publics responsables ?

La complexité de la commande publique n'est pas une fiction. Lors d'une enquête menée par le Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique69, auprès d'entreprises privées, ces dernières ont exprimé un niveau de complexité ressentie relativement fort, lors de l'exécution d'une réponse à une consultation publique70. Les difficultés pointées du doigt étant la redondance des informations demandées et le sentiment d'inutilité des démarches à accomplir. De ce constat est née l'idée de fascicules71 regroupant les bonnes pratiques que les acheteurs publics doivent observer pour simplifier leurs procédures d'achat. Une initiative française inscrite en cohérence avec l'ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, qui transpose en droit national les Directives européennes72 sur la simplification des marchés publics et constitue une première étape vers la création d'un Code unique.

L'article 30 de cette ordonnance, relatif à la définition préalable du/des besoin(s), enrichit les différents objectifs de développement durable susceptibles d'être poursuivis par l'acheteur, lors de cette étape clé : « La nature et l'étendue des besoins à satisfaire sont à présent déterminés avec précision [...] en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale73. » Un souci d'exhaustivité rappelant que la démarche d'achats publics responsables et durables répond également à une logique sociale.

Ainsi, les marchés réservés aux structures d'insertion par l'activité économique (SIAE) font leur apparition dans le CMP. Ces marchés pourront être réservés aux opérateurs économiques dont le but est l'intégration sociale et professionnelle des personnes défavorisées : entreprises adaptées ou ESAT74 employant moins de 50 % de personnes handicapées ou de travailleurs défavorisés, selon un seuil sera fixé par décret.

Afin de garantir plus d'équité dans la représentativité des entreprises soumissionnaires et soutenir les principes de non-discrimination et d'égalité de traitement, cette ordonnance prévoit également un accès facilité aux PME et TPE. En 2013, ces deux catégories d'entreprises ne représentaient en effet que 30 % des contrats publics, en valeur75.

69 Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique, « Etude par événements de vie sur la complexité - volet entreprises » (2013)

70 Cumul des réponses « assez compliqué » et « très compliqué » : 54 % des répondants.

71 Direction des Affaires Juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances, « Acheteurs publics : 10 conseils pour réussir » « Acheteurs publics : simplifiez-vous l'achat ! » (fascicules, juin 2015).

72 Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics, abrogeant la Directive 2004/18/CE.

73 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, transposant les Directives européennes sur la simplification des marchés publics.

74 Etablissements et services d'aide par le travail.

75 BatiJournal, « Plus de commande publique pour les PME » (article du 27 juillet 2015).

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Mais les évolutions apportées par ce projet de simplification de la commande publique ne s'arrêtent pas là. En réunissant toutes les règles relatives aux marchés publics dans un seul et même texte, en d'autres termes, en ayant recours à l'unification des documents (et non « l'unification des règles »), l'Etat entend donner au pouvoir adjudicateur la possibilité de passer moins de temps à vérifier qu'un dossier de candidature est complet...et plus de temps à analyser son contenu. L'un des aspects de cette démarche de simplification, prévu par l'ordonnance n°2015-899, est la dématérialisation du dossier de consultation. A l'avenir, une plateforme documentaire de type coffre-fort numérique permettra à l'acheteur et aux soumissionnaires de déposer et partager l'ensemble des données essentielles au marché, sous un format ouvert et réutilisable. Ainsi, l'acheteur ne sera plus tenu de demander des documents qu'il aurait déjà obtenus lors d'une consultation antérieure et qui seraient toujours valides, conformément au programme « Dites-le nous une fois ».

Parce que les marchés publics comptent parmi les instruments en capacité d'encourager fortement l'innovation, qu'elle soit sociale et/ou environnementale, cette ordonnance prévoit enfin de transformer la commande publique hospitalière en un véritable moteur de croissance : « L'innovation apparaît aujourd'hui comme un facteur déterminant de la performance du système de santé. » L'une des actions proposées dans l'axe 3 - « Des modalités innovantes d'achat pour une commande publique performante » - consiste à introduire un critère spécifique dans les appels d'offres publics ; au carrefour entre innovation, traçabilité et transparence, et portant à la fois sur le lieu et les conditions de fabrication du produit de santé. Quant à l'axe 4 - « Impliquer pleinement les acheteurs publics hospitaliers » - il vise entre autres à « abandonner la logique d'approvisionnement et [à] sortir d'une logique juridique pour structurer une stratégie [achats] fondée sur le coût global et la maîtrise budgétaire...».

La France vient également de lancer son 2ème Plan National d'Action pour les Achats Publics Durables (PNAAPD 2015-2020), sous la supervision de la Direction Générale Environnement de la Commission européenne 76 , afin de soutenir toujours plus l'intégration du développement durable à la commande publique. Sans être le pays le plus en pointe, la France se situe toutefois dans les cinq premiers États membres en nombre d'acheteurs publics ayant inclus des clauses sociales et environnementales dans au moins 50 % de leurs marchés.

76 Cette instance anime et cordonne un Comité dédié à l'achat public durable (the Green Public Procurement Advisory group), favorise au sein de cette instance l'échange sur les bonnes pratiques, suit la mise en oeuvre des plans d'action nationaux et formule des préconisations auprès de la Commission, qui élabore des guides à destination des acheteurs publics.

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Ce nouvel opus comprend 11 chantiers phares (voir ci-après) et s'est fixé des objectifs ambitieux, organisés autour de 3 axes majeurs : mobiliser les décideurs, accompagner les acheteurs et rendre compte des progrès réalisés.

Chantier 1

Rappeler les obligations ou outils et les faire appliquer

Chantier 2

Inciter les décideurs à repenser le processus achat dans leur organisation

Chantier 3

Montrer les réussites et les avantages pour donner envie de développer les achats durables

Chantier 4

Etudier les conditions juridiques et techniques de certains sujets nouveaux ou complexes

Chantier 5

Sensibiliser les agents au développement durable et à l'achat public durable

Chantier 6

Développer la formation des acheteurs publics à l'achat public durable

Chantier 7

Soutenir et développer les réseaux d'acheteurs publics permettant de développer les bonnes pratiques sur l'achat public durable

Chantier 8

Améliorer la plate-forme, le site portail Internet national dédié à l'achat public durable ainsi que l'assistance téléphonique aux acheteurs publics

Chantier 9

Mettre à disposition des outils pour les acheteurs publics

Chantier 10

Piloter le dispositif dans une perspective d'amélioration continue sur plusieurs années

Chantier 11

Impliquer les parties prenantes

Détail des 11 chantiers du 2ème Plan National d'Action pour les Achats Publics Durables 2015-2020

Pour respecter la feuille de route établie dans le cadre de ce Plan, la France devra enregistrer d'ici à 2020 25 % de marchés publics comprenant au moins une disposition sociale et 30 % comprenant au moins une disposition environnementale. Tous les marchés devront respecter l'article 5 du CMP (renforcé par l'article 30 de l'ordonnance n°2015-899) et faire l'objet d'une analyse approfondie, en matière d'objectifs de développement durable.

Des objectifs ambitieux, traduisant une volonté de l'Etat de déployer largement la commande publique responsable et durable.

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Chapitre II : La performance globale : enjeux, mesure, limites et risques associés

Partie 1 : Le concept multidimensionnel de performance globale

Aujourd'hui, dans un contexte global d'hyper-information, la performance des organisations est au coeur des attentes des parties prenantes. Mise sur le devant de la scène, décryptée, analysée, sans cesse commentée : elle apparaît comme un antidote au climat économique morose.

Dans sa définition anglo-saxonne, la performance renvoie au « résultat optimal qu'une machine peut obtenir ». Selon les domaines envisagés - la santé, par exemple - la logique de rendement sous-jacente à cette définition sera parfaitement inappropriée77. On lui préfèrera de loin sa version en ancien français, parformer78, et l'idée de « parfaire, améliorer, mener à bien ». Toutefois, la performance a longtemps été appréhendée sur un plan strictement financier, avant que sa signification ne s'élargisse progressivement... Au début des années 1980, tous les modèles financiers de mesure de la performance sont critiqués : l'entreprise n'est pas uniquement au service de ses actionnaires et de ses clients (vision exclusivement externe), elle doit également satisfaire de façon équilibrée l'ensemble de ses parties prenantes - notamment la société civile. Ainsi, dans les années 1990, de nombreux efforts sont menés pour optimiser la mesure de la performance de l'entreprise, en étendant le champ d'analyse bien au-delà des limites financières et en développant le champ temporel, afin d'éviter les seules analyses à court terme.

Les temps ont donc changé. Aujourd'hui, la pérennité d'une entreprise ne dépend plus uniquement de l'impact financier de ses activités ; elle est également liée à ses comportements et à son exercice de l'éthique des affaires. Dans ce cadre, le champ des responsabilités de l'entreprise s'élargit : il ne se limite plus aux seuls actionnaires, mais intègre également des associations, ONG, syndicats, clients, fournisseurs... ; parties prenantes très puissantes de par leur nombre et/ou leur niveau d'influence sur l'organisation. Ces nouveaux acteurs exigent d'être entendus et tout processus d'écoute mis en oeuvre devient une condition essentielle de la performance et de la pérennité de l'entreprise.

77 Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), « En quoi les usagers et les citoyens peuvent-ils contribuer à la performance du système de santé ? » (Actes des Universités d'été de la performance en santé, Tours, 28-29 août 2015).

78 Signifiant « parfaire, améliorer, mener à bien » (Le Petit-Robert).

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Afin de bien comprendre comment les modèles théoriques de performance ont accompagné la mutation des Sociétés occidentales, décrypter l'influence relative de ces courants et appréhender la transition - d'un modèle de performance stricto sensu à un modèle de performance globale - il convient de suivre l'évolution de la dimension partenariale, à travers le tableau de synthèse présenté ci-après.

Synthèse des théories sur la RSE79

Théorie

Type de modèle

Brève description

Références clés

THEORIES
INSTRUMENTALES

Obtenir des résultats
économiques à travers les
activités sociétales

Valeur pour l'actionnaire

Maximisation de la valeur long terme

Friedman, 1970 Jensen, 2000

Avantage stratégique compétitif

Investissement social en contexte de compétition

Porter et Kramer, 2002

Stratégies fondées sur les ressources naturelles et la capacité dynamique de l'entreprise

Hart, 1995 Lizt, 1996

Stratégies du bas de la pyramide économique

Prahalad et Hammond, 2002 Hart et Christensen, 2002 Prahalad, 2002

Marketing de causes

Activité altruiste reconnue par la société comme instrument de marketing

Varadarajan et Menon, 1988

Murray et Montanari, 1986

THEORIES
POLITIQUES

Viser un usage responsable
de l'influence politique des
entreprises

Corporate Constitutionalism

La responsabilité sociétale des entreprises provient de l'importance leur influence sur la société

Davis, 1960, 1967

Contrat social

Un contrat social entre entreprises et société

Donaldson et Dunfee,

1994, 1999

Citoyenneté d'entreprise

L'entreprise est conçue comme un citoyen qui a un certain engagement dans et vis-à-vis de la communauté

Wood et Logson, 2002 Andriof et McIntosh, 2001

Matten et Crane, 2004

79 Garriga, et al. (2010).

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Théorie

Type de modèle

Brève description

Références clés

THEORIES
INTEGRATIVES

Intégrer la demande
sociétale

Management par les enjeux

La réponse des entreprises aux problématiques sociales et politiques qui peuvent les impacter de façon significative

Sethi, 1975 Ackerman, 1973 Jones, 1980 Vogel, 1986 Wartick et Mahon, 1994

Responsabilité publique

Loi et processus des politiques publiques pris comme référence pour la performance sociétale

Preston et Post, 1975, 1981

Management des parties prenantes

Prendre en compte les intérêts des parties prenantes de l'entreprise

Mitchell et all, 1997 Agle et Mitchell, 1999 Rowley, 1997

Performance sociétale

Légitimité sociale et processus donnant des réponses appropriées aux enjeux sociétaux

Carroll, 1979 Wartick et Cochran, 1985

Wood, 1991 Swanson, 1995

THEORIES ETHIQUES

Intégrer ce qui est juste pour construire une bonne société

Théorie normative des parties prenantes

Obligations vis-à-vis des parties prenantes de l'entreprise, en référence à des théories morales (Kantiennes, Utilitariste, théorie de justice...)

Freeman, 1984, 1994 Evant et Freeman, 1988 Donaldson et Preston, 1995

Freeman et Phillips, 2002

Phillips et Al, 2003

Droits universels

Cadre fondé sur les Droits de
l'Homme, le droit du travail et
le respect de l'environnement

Global Sullivan Principles, 1999 UN Global Compact, 1999

Développement durable

Vise le développement humain, considérant les générations présentes et futures

Brundtland, 1987 Gladwin et Kennelly, 1995

Biens communs

Orienté vers les biens communs de la société

Kaku, 1997

Alford et Naughton, 2002

Melé, 2002

Conformément à la définition proposée par la Commission européenne, « la responsabilité sociétale d'entreprise est un concept qui désigne l'intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes80. »

Pour être qualifiée de « sociétalement responsable », l'entreprise doit impérativement aller au-delà des obligations imposées par les conventions collectives et au-delà des exigences légales en vigueur.

80 Livre Vert (juillet 2001, page 8).

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Une entreprise sociétalement responsable se singularise par le fait, notamment, de :

- se projeter dans l'avenir et de bâtir des stratégies à moyen terme (plutôt que sur le

court terme) ;

- faire participer ses salariés à sa construction, à son évolution, à sa stratégie, à ses

processus de décision ;

- concevoir les ressources humaines comme un domaine stratégique avec des

préoccupations fortes d'épanouissement et d'employabilité des salariés ;

- développer de manière structurée le dialogue avec et entre ses différentes parties

prenantes ;

- fonder la relation client-fournisseur sur un socle de valeurs équitables et durables ;

- mettre l'innovation au coeur de sa stratégie ;

- respecter son écosystème ;

- avoir une forte préoccupation de la société civile et favorise l'implication de ses

représentants dans la vie de la cité.

Les composantes de la RSE (Mercier, 2004 ; Carroll, 1991)

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Schéma de la performance globale (Reynaud, 2003)

Une entreprise sociétalement responsable propose une combinaison de facteurs humains, organisationnels, techniques et financiers qui ne s'avère efficace que dans un contexte donné. En effet, l'expérience révèle que les trois objectifs du développement durable - la prospérité économique, la justice sociale et la qualité environnementale - ne s'harmonisent pas spontanément.

De fait, viser la performance suppose de concilier des intérêts souvent opposés, donc de trouver des arbitrages et des compromis susceptibles de satisfaire les différentes catégories de parties prenantes concernées. Perceptible à travers toute la chaîne de valeur, cet impératif de conciliation répond à une logique transversale ; à l'opposé de l'approche classique verticale, qui découpe l'entreprise en centres de profit. La performance se construit alors dans la coopération, avec le souci de ne présenter aucune défaillance dans la chaîne de valeur.

?Plus que jamais, la performance globale est donc un processus transversal d'arbitrage.

Les domaines couverts par la performance globale, son périmètre, son niveau d'intégration et les indicateurs clés (KPI) sensés la piloter sont intimement liés à la vision et à la place accordée à la responsabilité sociétale au sein de l'entreprise - depuis une vision traditionnelle financière (i.e. une vision « shareholders ») jusqu'à une vision intégrative des parties prenantes (i.e. une vision « stakeholders »). Pour atteindre une performance globale, les indicateurs clés doivent être reconnus tant pas les dirigeants que par les parties prenantes de l'entreprise, suite à une décision obtenue par consensus.

?La performance globale est un processus stratégique intégrateur.

Ce qu'il faut retenir

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?Parce qu'elle naît d'un compromis entre les différentes parties prenantes, la performance globale relève d'une convention sociale co-construite et négociée. Elle peut être rapprochée de la théorie des « communs81 » - développée, notamment, par Elinor Ostrom - qui considère un ensemble de ressources partagées, jugées essentielles à la Société et qui constituent un point de ralliement consensuel de tous les acteurs (par ex : l'air, l'eau, la biodiversité, le savoir, la culture, la santé...).

L'usage veut que la mesure de la performance soit principalement abordée sous l'angle « business case ». Aussi les approches comptables de la performance globale s'efforcent de rapprocher la dimension économique à l'une des deux autres dimensions - sociale ou environnementale (intégrant du « human case » ou du « green case »82). En résultent des approches dites de " comptabilité sociale " ou " écologique ", qui tendent à mettre en lumière les coûts et les investissements liés aux domaines sociaux et environnementaux : coûts cachés83 ; coûts ou investissements visant à améliorer la qualité sociale ou environnementale ; balance coûts-bénéfices qui en découle...

Dans le cadre du Protocole de Kyoto, par exemple, le mécanisme des externalités liées aux émissions de CO2 et autres gaz à effet de serre 84 a fait rentrer directement cet aspect de la performance environnementale dans la performance comptable et financière des entreprises. La bottom line du compte de résultat représentant ainsi une performance financière résiduelle, après la prise en compte de l'ensemble des coûts sociétaux. Ce type d'approche positionne ainsi la performance globale comme une contribution à l'amélioration du couple valeur créée/coûts engendrés85. Mais l'instrumentation comptable de la performance globale reste encore embryonnaire et sujette à de nombreux débats, à commencer par sa compatibilité difficile avec la théorie des communs évoquée précédemment.

81 Ressource partagée par une communauté d'individus et collectivement gérée selon des règles propres.

82 Bieker et Gminder (2001).

83 Savall, 1987.

84 Mécanisme du marché des permis d'émission, réintroduit à partir de 2005.

85 Prolongement de la théorie d'Ernult (2005).

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Partie 2 : La performance globale, exercice de la responsabilité sociétale ou indicateur de mesure ?

Dans la littérature relative à la responsabilité sociétale d'entreprise, les principaux auteurs86 ne définissent pas la notion de « performance sociétale ». La performance est ainsi amalgamée à l'exercice de la responsabilité sociétale, sans que la question de son évaluation ne soit réellement abordée.

Pour autant, le terme « performance » englobe bien aujourd'hui tant la notion d'accomplissement d'un processus, avec les effets qui en découlent (i.e. performance action), que la reconnaissance d'un niveau de réalisation des objectifs (i.e. performance résultats, avec l'idée d'une étape franchie). Cette deuxième définition, largement répandue, présente la performance telle une donnée relative : elle ne présente d'intérêt qu'adossée à la concurrence, dans une logique de comparaison. Certains87 vont même jusqu'à affirmer qu'elle n'existe pas de fait : elle émerge de l'évaluation relative à une référence ou à un objectif.

Force est de constater que les dispositifs actuels d'évaluation de la performance globale sont relatifs aux attentes des parties prenantes et mesurés par des agents extérieurs à l'entreprise : notation extra-financière, classements et prix, enquêtes de réputation (voir tableau ci-dessous). Un phénomène logique, étant entendu que l'évaluation de la performance globale doit permettre l'intégration cohérente des trois dimensions du développement durable, sur des frontières plus larges que le seul périmètre juridique de l'entreprise.

CREATION DE VALEUR DESTINATAIRE DE L'EVALUATION

Pour le(s) actionnaire(s)

Pour les parties prenantes

Destinataires externes :

Comptabilité financière
Reporting financier

Notation extra-financière
Reporting extra-financier

Investisseurs, analystes...

(fonction de rendre compte)

Destinataires internes :

Comptabilité et contrôle de
gestion

Analyse de matérialité

Dialogue social et avec les
autres parties prenantes

Direction, Managers...

(fonction de pilotage)

86 Caroll (1979) et Wood (1991).

87 Bourguignon (1997).

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Différents outils et acteurs partagent l'évaluation de la performance globale. Le présent document n'entend pas établir un recensement exhaustif de ces dispositifs, mais explorer les plus reconnus et utilisés.

Le Balanced Scorecard88 (BSC)

Présenté par ses concepteurs89 comme un tableau de bord facilitant l'évaluation de la stratégie et la mesure de la performance, le BSC est une combinaison de mesures financières et opérationnelles, classées selon quatre dimensions :

? les résultats financiers ; ? la satisfaction des clients ;

? les processus internes ; ? et l'apprentissage organisationnel.

Lors que le Balanced Scorecard est lancé, en 1992 aux Etats-Unis, l'outil est le premier à mettre en exergue l'importance d'indicateurs non-financiers dans l'évaluation de la performance. Un véritable changement de paradigme, pour l'époque ! Pourtant, on reprochera au BSC de créer une hiérarchie entre les quatre dimensions, subordonnant les trois derniers axes aux résultats financiers, et de rester ainsi très orienté résultat : les compétences humaines (axe apprentissage organisationnel) permettent d'améliorer la productivité et la qualité des services (axe processus internes) qui, à leur tour, contribuent à la satisfaction des clients et servent les objectifs financiers de l'entreprise. Plusieurs versions optimisées du modèle verront le jour : depuis le Sustainability Balanced Scorecard90 (SBSC) jusqu'au Total Balanced Scorecard91 (TBSC), en intégrant au passage un cinquième axe - l'axe sociétal92.

?Malgré ses évolutions successives, le Balanced Scorecard se trouve confronté à une réalité : la mesure effective d'une performance intégrée (ou performance globale), qui ne soit pas exclusivement orientée vers les résultats financiers, reste très problématique. Les pratiques restent focalisées sur les indicateurs faciles à renseigner, d'autres aspects plus qualitatifs sont mal pris en compte et les liens de causalité ne sont presque jamais analysés. Selon certains, par ailleurs, « considérer qu'une organisation se comportant en entreprise citoyenne influencera favorablement sa valeur actionnariale, tel que le supposent Kaplan et Norton, constitue pour le moins une assertion restant à démontrer93. »

88 http://balancedscorecard.org/Resources/About-the-Balanced-Scorecard

89 Kaplan et Norton (1998).

90 Hockerts (2001) : extension du BSC initial, composée en partie d'indicateurs mesurant la performance environnementale et sociale des entreprises.

91 Supizet (2002) : le TBSC repose sur une série de relations causales entre les six parties prenantes en jeu : les actionnaires, les clients, les usagers, l'entreprise elle-même en tant que personne morale, les partenaires, le personnel et la collectivité.

92 Bieker (2002).

93 Germain et Trébucq (2004).

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La Triple Bottom Line94 (TBL)

Développée par John Elkington, l'approche anglo-saxonne de la performance globale reprend l'idée d'une triple contribution de l'entreprise à la prospérité économique, à la qualité de l'environnement et capital social, illustrée à travers un triple bilan - social, environnemental et comptable. Ce modèle est aujourd'hui mondialement connu pour son concept des « 3 P » : people, planet, profit.

?Dans la pratique, la TBL reste encore un bilan segmenté en trois parties établies de manière séparée, pour être ensuite compilées, sans tenir compte des corrélations existant entre elles. Un schéma de causalité fait défaut à ce modèle, afin de l'ancrer dans une dynamique intégrative de performance globale.

ISO 2600095

La norme ISO 26000 est un référentiel international qui vise à fournir aux organisations des lignes directrices pour la mise en oeuvre d'une démarche de responsabilité sociétale. Etabli par consensus, ce document donne un cadre de comportement à tout type d'organisation (entreprise, collectivité, ONG, syndicat...) - quelle que soit sa taille ou ses domaines d'actions - dans le respect des grands textes fondateurs.

L'ISO 26000 invite les organisations à articuler leur démarche autour de sept questions

centrales :
· la gouvernance de l'organisation ;
· les droits de l'Homme ;

· les relations et conditions de travail ;
· l'environnement ;

· les bonnes pratiques des affaires ;

· les questions relatives aux consommateurs ;

· et l'engagement sociétal.

La manière dont une entreprise s'inscrit au coeur de la Société et de son environnement, la façon dont elle contribue à la bonne santé et au bien-être de son écosystème, sont autant de facteurs décisifs pour la poursuite de ses activités. C'est la raison pour laquelle ces paramètres sont regardés de près, lors de l'évaluation de la performance globale.

?Si la portée internationale et universelle de la norme ISO 26000 constitue un atout de taille, le fait qu'elle ne soit pas certifiable génère de nombreux débats. Aussi le rôle de l'ISO 26000 est - à date - essentiellement pédagogique, mais il s'agit d'un guide méthodologique dont s'inspirent beaucoup d'autres référentiels. Par ailleurs, cette norme volontaire est souvent considérée comme un référentiel ISO en plus, si ce n'est le référentiel "de trop", du fait qu'elle englobe de nombreux systèmes de management pour lesquels certaines entreprises ont déjà obtenu une certification.

94 http://www.ibrc.indiana.edu/ibr/2011/spring/article2.html

95 http://groupe.afnor.org/animation-iso26000/index.html

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La Global Reporting Initiative96 (GRI)

Né en 1997, de la collaboration entre le Coalition for Environmentally Responsible Economies (CERES) et le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), la GRI réunit des ONG, cabinets de conseil et d'audit, collectivités territoriales, associations et bien sûr, des entreprises. Fidèles au schéma des « 3 pétales du développement durable », les premières versions de la GRI ont pu être critiquées pour leur absence d'indicateurs de mesure des interactions entre les différentes sources de performance.

Fin 2013, l'organisation répond à ces critiques avec le lancement de la GRI-G4, qui développe ou introduit de nouveaux concepts. Parmi eux, la notion de « Matérialité » ou une incitation forte à focaliser son reporting sur les enjeux RSE les plus pertinents et les plus matériels par rapport à son secteur d'activité. La GRI-G4 met également l'accent sur « l'approche managériale97 », dont la vocation est de fournir des informations détaillées quant au mode d'identification, d'analyse et de réponse de l'entreprise pour ses impacts économiques, environnementaux et sociaux - réels et potentiels - et ce pour chaque enjeu matériel identifié. Une manière de passer d'une logique de transparence et de reporting extra-financier pur à une logique de performance et de pilotage du reporting extra-financier.

?Si la GRI est l'outil de reporting RSE par excellence, dans le monde, il souffre du même écueil que la norme ISO 26000 : il s'agit d'une démarche volontaire, donc non imposée. L'autre difficulté majeure de la GRI est que ce référentiel entre parfois en conflit avec des réglementations légales nationales qui présentent, elles, un caractère obligatoire et dont les consignes de reporting - tant en termes d'indicateurs qu'en termes de méthodologie - n'insufflent pas le même élan que la Global Reporting Initiative.

Les indices boursiers socialement responsables

Apparus en Europe vers la fin des années 1990, les indices boursiers socialement responsables sont des indices tournés vers l'éthique sociale, le développement durable et la préservation de l'environnement.

Les grands indices boursiers socialement responsables en Europe sont : FTSE4Good, Euronext Vigeo, ESI (Ethibel Sustainability Index), Gaïa Index et le DJSI (Dow Jones Sustainability Index World). Tous ces modèles de notation se singularisent par leur choix de méthodologie, des critères d'évaluation ciblés, les zones géographiques considérées, la taille des entreprises comparées ou encore le nombre de titres inclus.

D'après Jean-Philippe Rayssac (Institut RSE management) qui le perçoit comme le questionnaire le plus challengeant, « le DJSI s'appuie sur une analyse approfondie d'un certain nombre de critères tels que la gouvernance de l'entreprise, la ges on des risques, la lu e contre la corrup on ou les normes rela ves à la chaine d'approvisionnement et les

96 https://www.globalreporting.org/standards/g4/Pages/default.aspx

97 DMA pour disclosure of management approach.

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conditions de travail ». Les items à renseigner afin d'intégrer cet indice boursier responsable sont mis à jour régulièrement et la méthode d'analyse fournie par l'agence de notation RobecoSAM est très orientée sur la matérialité des enjeux, avec une approche économique étayée. « [Le DJSI] est reconnu, car il sort de la vision classique de la RSE pour s'intéresser vraiment à la durabilité du business de l'entreprise, ce qu'on ne retrouve pas forcément chez d'autres agences de notation. »

?La principale limite des indices boursiers socialement responsables est que le gage d'évaluation de performance globale qu'ils apportent est exclusivement réservé aux sociétés...cotées en bourse ! La tendance à réduire le paysage économique français aux seules entreprises du CAC 40 est pourtant loin de la réalité. En France en 2013, les PME représentaient 99,8 % de la population des entreprises nationales et près de 60 % de la valeur ajoutée98, avec seulement 562 entités juridiques cotées en bourse ! Qui plus est, en l'absence d'un consensus méthodologique, la portée de ces indices - pourtant reconnus - semble discutable. Cela pourrait être intéressant, par exemple, que les agences attribuant ces indices précisent le niveau de pluralisme des points de vue pris en compte dans leur évaluation.

La notation extra-financière

Le rôle des agences de notation extra-financière consiste à évaluer les politiques environnementales, sociales et de gouvernance (critères dits « ESG ») des entreprises. Ces notations, qui permettent de comparer entre elles les politiques ESG des émetteurs de titres, sont utilisées par les sociétés de gestion - en plus des critères de performance économique habituels - pour composer les fonds ISR99 que celles-ci proposent à leurs clients. Une notation extra-financière peut ainsi être effectuée à la demande d'investisseurs qui veulent estimer la responsabilité sociale d'une entreprise avant de l'intégrer à leur portefeuille. Dans ce cas, la notation est qualifiée de « déclarative » : elle donne lieu à une analyse réalisée à partir de documents publics portant sur l'entreprise ciblée.

Mais la notation extra-financière peut également être sollicitée par une entreprise désireuse d'évaluer sa propre performance globale (ou performance sociétale), indépendamment de toute démarche visant à rejoindre un fond ISR. Il s'agit alors d'une notation dite « sollicitée » ou « approfondie », reposant sur une analyse documentaire " de proximité " : enquêtes terrain, interview des dirigeants, audit auprès des filiales mais aussi auprès des clients et fournisseurs.

98 http://www.bpifrance-lelab.fr/Ressources/Ressources-Bpifrance-Le-Lab/Rapport-sur-l-evolution-des-PME-2014

99 Investissement socialement responsable.

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C'est la comparaison des scores, par secteur, qui permet de dégager un classement global et d'attribuer un rating pour l'entreprise.

Les agences de notation extra-financière, dans la mesure où elles analysent un certain nombre d'organisations selon des critères ESG couvrant les différents volets de la RSE, disposent d'un ensemble de données extra-financières extrêmement qualitatives. Aussi, certaines ont décidé de créer leur propre indice boursier socialement responsable et proposent un accompagnement personnalisé aux entreprises qui souhaiteraient le rejoindre100.

?Comme évoqué dans le cas précédent, la diversité des méthodes employées et les différences de périmètre du champ d'analyse ne permettent pas de dégager un consensus en matière de performance globale. De plus, dans le cas d'une notation « déclarative », le processus d'analyse ESG ne se concentre pas explicitement sur les parties prenantes (contrairement à la notation « sollicitée »). Enfin, si la quasi-totalité des organisations passées au crible des critères ESG sont des sociétés cotées en bourse, la démarche reste parfaitement accessible à une entreprise non cotée qui souhaiterait, par exemple, procéder à une notation « sollicitée », en vue de mieux se comparer à ses concurrents.

La plateforme SaaS101 d'évaluation de la performance globale

Autre acteur sur le marché : les sociétés proposant un outil d'évaluation de la performance globale et de dialogue 2.0. entre acheteurs et fournisseurs. L'un d'eux - EcoVadis102 - se présente comme une plateforme d'évaluation des organisations, au service de pratiques d'achats responsables. Réalisant entre 12 000 et 14 000 évaluations par an, sur 150 secteurs et dans 140 pays, Ecovadis dispose d'un cadre méthodologique inspiré des standards internationaux du développement durable - dont la GRI, le Global Compact et la norme ISO 26000.

Cette méthodologie consiste en un questionnaire comptant entre 20 et 90 questions, adapté selon le secteur d'activités de l'entreprise ciblée ; dont les réponses seront enregistrées depuis la plateforme en ligne puis analysées, avant attribution d'une note sur 100 (valable 1 an). Cette approche s'organise autour quatre thèmes : l'environnement, le social, l'éthique des affaires et les achats responsables. La note obtenue par l'entreprise répondante correspond à la moyenne pondérée de ses quatre notes, par thème103. Pour chacun des thèmes précités, sept indicateurs de management sont analysés, chacun étant évalué selon trois dimensions (les Politiques mises en oeuvre, les actions menées et le pilotage des

100 Toutefois, ce n'est pas le cas de toutes les agences de notation extra-financières, dont certaines ont fait le choix de concentrer leurs activités sur cette seule prestation de services.

101 Software as a service.

102 http://fr.ecovadis.com/what-we-do/

103 Pour information, la note moyenne obtenue sur la plateforme Ecovadis, tous secteurs d'activités confondus, est de 42/100.

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résultats). Ainsi, l'évaluation de la performance globale des entreprises repose sur un ensemble de 84 critères transversaux, adaptés aux caractéristiques du marché considéré. Cette mesure de la performance globale permet à l'entreprise de piloter de façon autonome sa responsabilité sociétale, grâce à un tableau de bord interactif ; d'exploiter et de communiquer ses indicateurs de performance à quiconque la solliciterait sur le sujet104 ; et de visualiser rapidement les axes d'amélioration.

? Outre le fait qu'une entreprise doive payer (certes, une somme minime) pour se soumettre à cette évaluation, il est regrettable que le détail de l'analyse de sa performance ne soit pas disponible, gratuitement, pour tout autre adhérent Ecovadis qui souhaiterait le consulter. Cela permettrait à plusieurs donneurs d'ordre examinant la performance d'un même fournisseur de prendre connaissance des informations RSE le concernant, dans une logique de mutualisation et d'optimisation des coûts.

Parmi les cadres méthodologiques balayés, aucun ne semble apporter de réponse claire à la question complexe de la performance globale ; ni se distinguer de façon unanime et consensuelle comme référentiel " labellisable " de cette mesure.

?Beaucoup peinent à intégrer concrètement les trois volets du développement durable (performance partielle), d'autres proposent une approche sciemment segmentée et orientée (performance dirigée) ; certains sont accessibles à tout type d'acteurs économiques, tandis que d'autres sont implicitement réservés aux organisations les plus matures... On rencontre bien quelques tentatives d'évaluation des interfaces économique-social ou économique-environnemental, mais aucune initiative capable d'intégrer de manière harmonieuse les trois domaines du DD à la fois. Ce serait également un leurre que d'envisager la mesure de la performance globale comme une simple juxtaposition d'un ensemble de « sous-performances thématiques », même selon une logique inclusive.

?La théorie des parties prenantes, quant à elle, ne semble pas compatible, à date (trop prématurée ?), avec la mesure de la performance globale. A l'heure où certaines entreprises s'engagent timidement dans le co-développement de leur stratégie ou de leurs actions RSE, aux côtés des parties prenantes, envisager d'atteindre un compromis sur les indicateurs clés de pilotage de cette performance globale semble illusoire.

?Comme dans toute approche multicritères, l'équilibre entre les différentes dimensions du développement durable dépend des priorités des décideurs et peut évoluer, au fil du temps,

104 Y compris à un autre donneur d'ordres désireux de connaître son niveau de performance globale - tout en bénéficiant de la caution « Ecovadis-checked ».

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selon les acteurs et leurs rapports de force. L'évaluation de la performance globale ne peut donc pas être déconnectée du jeu des acteurs qui la mettent en oeuvre.

Et là encore, pour assumer son rôle de façon optimale, un système de mesure de la performance globale doit s'inscrire dans le prolongement de la mission que s'est fixée l'entreprise, des objectifs stratégiques qui en découlent et des moyens mis en oeuvre pour les atteindre. « Vouloir évaluer la performance d'un système d'exploitation quand l'outil de mesure a été créé dans le vide, c'est-à-dire en l'absence de données sur la planification stratégique, ferait prendre le risque de déconnecter la mesure et la stratégie. Autrement dit, de passer à côté du but recherché.105 »

Ce qu'il faut retenir

Il est, aujourd'hui, légitime de se demander si la performance sociétale est réellement un but en soi ou s'il s'agit d'un moyen permettant de servir d'autres objectifs - financiers, par exemple. En témoigne le développement des méthodes de monétarisation des externalités ou de calcul des actifs immatériels, fortement sollicitées par des entreprises qui ne tentent pas uniquement de chiffrer le coût global de leurs impacts mais également de mesurer le ROI106 de leurs actions RSE. La réponse à cette interrogation tient probablement à la dimension temporelle envisagée, selon que l'on évolue dans une organisation court-termiste, constamment rivée sur la bottom line du bilan comptable, ou que l'on bénéfice de la confiance et du soutien d'une équipe dirigeante prête à accepter - dans une certaine mesure - la logique du coût global et du « retour sur investissements différé »... Une certitude : l'échange et le dialogue sont des éléments clés de la performance globale. Pour preuve, le panorama des attentes croisées de la société civile et de la communauté économique - réalisé en 2015 par l'Institut du Management RSE - révèle des décalages significatifs entre l'appréhension des enjeux RSE par les acteurs économiques (plutôt pro-environnementaux) et le grand public (qui exprime nettement une attente sociale)107.

105 Atkinson et al. (1997).

106 Retour sur investissements.

107 Institut Management RSE / CSR Metrics France, « L'Observatoire des enjeux RSE 2015 : état des attentes RSE en France, vues par la société civile et la communauté économique, et leur utilisation dans l'analyse de la matérialité des enjeux RSE des entreprises » (février 2015).

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Partie 3 : Limites et débats portant sur la performance globale et son évaluation

Nous vivons une époque charnière, « où l'ancien monde ne veut pas mourir et où le nouveau monde ne parvient pas à naître108. » Dans ce contexte, les enjeux RSE sont autant de risques et opportunités qui expriment les attentes et les besoins de la société civile à l'égard des entreprises. Des enjeux devenus éminemment stratégiques et présentant une grande variété dans leur niveau de criticité, leur portée géographique, leur degré de spécificité et leur dynamique (selon qu'ils régressent ou qu'ils augmentent) ; ils occupent aujourd'hui une sphère d'activités et d'influence de plus en plus large ; et sont à la fois globaux, régionaux, sectoriels et évolutifs109.

Pour autant, la demande formulée aujourd'hui aux entreprises est claire : d'abord ne pas nuire110, puis contribuer à la vie sociale.

Observatoire des enjeux de la RSE / Institut de la RSE (mars 2015)

108 Commissariat Général au Développement durable, « Penser autrement les modes de vie ».

109 Etude Global Risks (2015).

110 « Primum non nocere... », parallèle avec les premiers mots du serment d'Hippocrate.

Ce qu'il faut retenir

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Dans ce contexte, la notion de « performance globale » renferme beaucoup de subjectivité. Une subjectivité liée non seulement aux approches de la responsabilité sociétale, rarement exhaustives ; mais également au double niveau d'interprétation du concept : la performance en tant qu'action et la performance en tant que résultat. L'appréciation de la performance globale étant d'autant plus partiale que « chacun voit midi à sa porte » et jauge le niveau de performance RSE d'une organisation à la lumière de sa propre vision et, a fortiori, des avantages dont il/elle pourrait bénéficier dans le cadre d'une collaboration. Ainsi, mesurer la performance globale répond à une logique parcellaire.

Comme évoqué précédemment, le concept de performance globale souffre d'un manque de consensus ou, tout du moins, d'un référentiel éprouvé en la matière proposant un cadre méthodologique intégratif. A défaut, les entreprise dissocient les mesures de performance et maintiennent artificiellement le mythe d'une possible conformité simultanée de divers intérêts conflictuels, en assurant une forme d'équilibre entre eux111. Dans les faits, pourtant, la performance économique est presque toujours privilégiée : les individus confrontés à des injonctions contradictoires ayant tendance à négliger un des deux messages émis, généralement celui qui engendre le moins d'impacts négatifs pour leur organisation112.

Enfin, la performance globale est un processus actif, inscrit dans le temps et en perpétuel mouvement. Toute la difficulté de son appréciation est de ne pas tomber dans l'écueil de " l'image à l'instant T " et de trouver un équilibre réaliste entre évaluations intermittentes et évaluation en continu.

Si un consensus ne saurait être établi par l'ensemble des acteurs externes, une organisation peut néanmoins soigner sa performance globale en adoptant une stratégie RSE holistique et cohérente. En d'autres termes, en bannissant tout décalage entre le « dire » et le « faire » [Voir Annexe 4]. Dans la pratique, l'exercice est plus complexe qu'il n'y paraît113, mais il permet de réduire certains déséquilibres ou frustrations ressentis par les parties prenantes - qui ont parfois le sentiment d'être réduites au statut de variable d'ajustement. Or l'un des principaux leviers d'action de la performance globale est la notion de « contrat », à savoir les objectifs de progrès co-construits avec ses parties prenantes en vue d'apaiser, d'innover et de nourrir des démarches de durabilité114.

111 N. Antheaume (2005).

112 Le Roy (1996).

113 La mise en oeuvre d'un système de performance globale dépend du degré de volonté des dirigeants pour confronter leur stratégie de conformité, voire d'évitement, aux intérêts de leurs parties prenantes (Oliver, 1991).

114 Institut Management RSE / CSR Metrics France, « L'Observatoire des enjeux RSE 2015 : état des attentes RSE en France, vues par la société civile et la communauté économique, et leur utilisation dans l'analyse de la matérialité des enjeux RSE des entreprises » (février 2015).

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Partie 4 : Quels risques encourus à ne pas inscrire ses activités dans une logique de performance globale ?

La responsabilité sociétale de l'entreprise repose avant tout sur une démarche volontaire. Le droit en la matière est souvent qualifié de mou (ou « soft law »), c'est-à-dire qu'il est peu contraignant et ne prévoit pas - ou peu - de sanction en cas d'inaction. Aussi la RSE peut, au premier abord, donner à penser qu'elle ne répondre d'aucun mécanisme de contrôle des risques. Pourtant, certains aspects de la responsabilité sociétale - notamment plusieurs enjeux sociaux - ainsi que plusieurs jurisprudences récentes contraignent peu à peu les entreprises à respecter au minimum leurs engagements - y compris ceux décrits dans des documents internes tels que leurs codes éthiques, leurs accords sociaux, leurs brochures commerciales ou marketing. En outre, les sanctions liées à des enjeux de responsabilité sociétale peuvent porter préjudice aux entreprises, de façon directe mais aussi indirecte. Elles affectent essentiellement la réputation de la marque et son attractivité sur les marchés, sans compter les impacts négatifs recensés au niveau de leurs produits et services (baisse des ventes, mauvaise presse, boycott...).

Sans équivoque, il existe bien un lien fort entre les principes, les objectifs et la gestion des indicateurs de la responsabilité sociétale, et les risques légaux associés.

En 1997, Nike a vu ses ventes dégringoler suite à la dénonciation par Amnesty International de l'exploitation d'enfants pour fabriquer ses chaussures et ballons de foot. Shell a, pour sa part, subi un boycott aux Pays-Bas après que le groupe ait décidé de couler une de ses plateformes de pleine mer. Dans les années qui ont suivi, les dérives se sont poursuivies, notamment dans les pays pauvres transformés en ateliers textiles à bas coût. Avant la catastrophe du Rana Plaza, survenue en avril 2013, qui a impliqué plusieurs marques de textile - dont certaines enseignes françaises. Autant de scandales qui, bien sûr, ont alerté l'opinion publique sur des pratiques et dérives inacceptables. Les réactions massives se sont transformées en pression forte sur les marques...qui n'ont pas eu d'autres choix que de rectifier ces écarts, d'optimiser leurs pratiques et de devenir exemplaires. « Un mal pour un bien », en quelque sorte.

Force est de constater qu'entre ces deux extrêmes - absence de sanction et situation de crise sociétale internationale - se trouve un ensemble d'entreprises, qui ne savent plus vraiment à quel Saint se vouer.

Pour répondre à leurs interrogations, l'agence Vigeo a publié en mai 2015 un Rapport portant sur le coût de l'inaction responsable à travers le monde 115 . Le principal enseignement de ce document est que l'inaction sociale et environnementale représente un coût plus élevé que l'achat responsable - et ce, en termes de responsabilité vis-à-vis des

115 VIGEO, « Responsabilité sociale d'Entreprise : le coût des sanctions » (Rapport publié en mai 2015).

Ce qu'il faut retenir

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générations, de management, de gains économiques et même d'image. Un coût non-négligeable, d'ailleurs, puisqu'entre 2012 et 2013 le non-respect de facteurs RSE aurait coûté plus de 95 milliards d'euros aux entreprises dans le monde, prenant la forme de condamnations judicaires, de sanctions administratives ou transactionnelles avec les autorités de régulation.

La frontière entre la responsabilité sociétale des entreprises et leur responsabilité légale est donc ténue et de plus en plus mouvante. Bien sûr, la judiciarisation de la responsabilité sociale reste très contrastée selon les régions, les secteurs et les domaines d'activités considérés. Durant la période étudiée, 1/3 des entreprises nord-américaines se sont vues sanctionnées pour non-respect de clauses sociales et/ou environnementales, contre 1/5 en Europe, à peine 1/10 dans la zone Asie-Pacifique et 0,8/10 dans les pays émergents108.

15 secteurs ressortent comme particulièrement exposés aux poursuites légales, notamment la distribution d'eau et la gestion des déchets (50 % des poursuites), l'industrie automobile (43 % des poursuites), l'alimentation (23 % des poursuites), l'industrie pharmaceutique (34 % des poursuites) et les banques (21 % des poursuites)116.

Une autre étude, menée cette fois auprès de 2 300 entreprises américaines cotées117, a démontré que l'action des sociétés performantes selon les critères ESG jouissait d'un bien meilleur cours que les entreprises ayant été moins bien notées. Il existerait donc une corrélation entre la responsabilité sociétale de l'entreprise et la performance financière, obtenue grâce à un meilleur pilotage des risques ? Une troisième analyse118 semble confirmer un tel lien de causalité : 88 % des entreprises américaines ayant adopté une démarche RSE robuste font preuve d'une meilleure performance opérationnelle, qui se traduit dans les flux de trésorerie.

Responsabilité sociétale et rentabilité ne seraient donc pas incompatibles.

Il n'existe pas de "recette" pour atteindre un niveau de performance sociétale digne des « best in class ». Pour autant, il serait malvenu d'avancer le manque de consensus, les difficultés à construire un cadre méthodologique intégré ou encore les coûts engendrés par la mise en oeuvre d'actions RSE...comme autant d'éléments de justification pour NE PAS se lancer dans une telle démarche.

Il est de notoriété publique que la majorité des approches sociétales responsables sont la volonté d'un ou plusieurs individu(s), portant à bout de bras un ensemble de valeurs durables. Des rapports d'analyse confirment même que la performance globale constitue aujourd'hui un "garde-fou" bien plus vaste, limitant un certain nombre de risques : réputationnel, éthique, commercial et bien évidemment, économique.

Pis, elle assurerait une meilleure performance - et pérennité - financière, sur le long terme.

116 VIGEO, « Responsabilité sociale d'Entreprise : le coût des sanctions » (Rapport publié en mai 2015).

117 Robert G. ECCLES et Ioannis Ioannou George SERAFEIM, « The impact of a corporate culture of sustainability on corporate behavior and performance » (Harvard Business School, 2011).

118 Gordon L. CLARK, Andreas FEINER et Michael VIEHS, « How sustainability can drive financial outperformance » (University of Oxford and Arabesque Partners, 2014).

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Chapitre III : L'achat public responsable comme soutien à la performance globale du système de santé, mythe ou réalité ?

Partie 1 : La commande publique doit encourager et développer la performance globale

S'il est un domaine pour lequel les notions de bien commun119 et de bien public mondial sont particulièrement pertinentes, c'est en effet la santé. Chacun d'entre nous bénéficie du système de santé et en retour, sa responsabilité nous incombe collectivement : l'accès au meilleur état de santé possible et la protection de la santé constituent des droits fondamentaux applicables à tout être humain ; chacun est solidaire du maintien de la qualité de notre environnement de vie et de la pérennité du système de santé ; sa gestion et sa mise en oeuvre reposent sur la coopération et la responsabilité de l'ensemble des acteurs (pouvoirs publics, citoyens, professionnels ou établissements du secteur de la santé, du social et du médicosocial, entrepreneurs et industriels, associations, chercheurs, etc). La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme entérine d'ailleurs son caractère inaliénable : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires... » (art. 25).

La commande publique en matière de santé, dont l'un des objectifs est de protéger ce bien commun, peut apporter un soutien d'autant plus fort qu'elle prend place dans un marché pour lequel elle représente une part significative de la demande. De longue date, les effets d'entraînement de la commande publique sur l'innovation et de façon globale sur le démarrage de certaines industries, font partie de la littérature économique et permettent à ces dernières d'atteindre rapidement une taille critique, bénéficiant ainsi d'économies d'échelle. Il s'agit du modèle du public demand push, théorisé par Burmeister120 : les marchés publics constituent un levier de politique technologique particulièrement favorable au début du cycle de vie, « quand le secteur public dispose d'un pouvoir de monopsone121 qu'il utilise à travers une stratégie d'acheteur simultanément exigeant et bienveillant, et quand la technologie développée est générique ou adaptable aux besoins du secteur privé ». Faire de la commande publique un levier privilégié de la politique sociale et environnementale peut ainsi être rapproché des politiques de soutien à l'innovation des années 1950-1980, illustrées par de grands programmes technologiques ou des investissements des entreprises publiques122.

119 Ressource partagée par une communauté d'individus et collectivement gérée selon des règles propres.

120 BURMEISTER Antje (1994) http://www.persee.fr/doc/rfeco_0769-0479_1994_num_9_2_956

121 Régime de formation des prix dans lequel un acheteur unique trouve en face de lui une multitude de vendeurs.

122 « Les clauses environnementales dans les marchés publics », MARTY Frédéric (1999).

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Ce modèle de soutien par l'achat public responsable contribue à la levée des risques pour les entreprises proposant des biens et services plus respectueux de l'environnement et des Hommes ; il leur permet de tirer profit de certaines économies d'échelle favorisant la diffusion de leur offre ; et, dans une certaine mesure, d'augmenter leurs capacités de prescription - notamment vers les marchés privés.

Mais l'achat public responsable est également un outil de gestion des risques et une forme de réponse à la démultiplication des sources de pression. Quand on sait qu'en moyenne, 30 % des développements produit présentant une amélioration environnementale sont imputables à des stimuli externes115, on comprend combien l'achat de produits de soin auprès de fournisseurs responsables peut être complexe. La commande publique en santé étant située au carrefour d'un bloc constitutionnel (droit de l'Union Européenne et Code de la Santé Publique), du Code de l'Environnement et du Code du Travail...pour ne citer qu'eux.

En marge de ces impératifs réglementaires, l'accroissement ces dernières années de scandales sanitaires portés en justice grâce à des lanceurs d'alerte ou encore la perspective de potentielles class actions en santé123 - actions de groupe menées par des associations de patients - illustrent bien le pouvoir des parties prenantes, tant sur les offres et solutions proposées par les industriels de santé que sur la responsabilité des professionnels de soin qui les mettent en oeuvre. Là où, seul, le citoyen est contraint au silence, les associations d'usagers s'engagent à le rendre visible, audible et lui permettent d'agir face aux professionnels et aux institutions qui n'auraient pas assumé pleinement leur responsabilité sociétale124. Ces class actions à la française, dans la mesure où elles constituent un excellent moyen de mutualiser les coûts, permettent par ailleurs au patient/usager un accès plus équitable et plus aisé aux procédures légales.

Enfin, si les différents classements des hôpitaux et cliniques de France n'intègrent aujourd'hui aucun critère relevant formellement de la RSE, il est fort à parier que plusieurs de ces sujets se fraieront progressivement un chemin vers le devant de la scène. Il faudra alors que l'ensemble des acteurs de système -industriels de santé et établissements de soin-soient en mesure d'apporter une réponse collective, cohérente et économiquement acceptable à ce nouveau type d'exigences. Exigences en termes de qualité et de sécurité de l'offre de soin, en matière d'éthique et de dispositif de sécurisation des données patients, vigilance quant à la bonne gestion sociale de l'établissement de santé ou encore quant à ses impacts environnementaux...

123 Action judiciaire qui serait engagée par une association agréée, afin que les usagers de santé puissent solliciter la réparation de leurs dommages corporels auprès d'un défendeur pour le manquement de ce défendeur à ses obligations légales ou contractuelles. » (selon Maître Charles-Henri Caron, avocat au sein du cabinet Hogan Lovells).

124 Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), « En quoi les usagers et les citoyens peuvent-ils contribuer à la performance du système de santé ? » (Actes des Universités d'été de la performance en santé, Tours, 28-29 août 2015).

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Le patient, s'il ne devient pas souverain, continue d'exercer une pression grandissante, et le défi que le système de santé devra relever consiste à garantir à tous une combinaison optimale solution de santé/pratique des soins. Il faudra, de fait, inscrire les relations entre pouvoir adjudicateur et fournisseurs d'une logique de « donneur d'ordre » à une logique de synergie : toute offre socialement et/ou écologiquement performante étant conditionnée aux pratiques vertueuses et responsables de l'établissement dans lequel elle sera mise en place.

De façon concomitante à cet ensemble de stimuli externes, la professionnalisation de l'acheteur public est un élément indispensable à la performance globale du système de santé. Un mouvement déjà en marche, illustré par le rassemblement spontané de plusieurs centres hospitaliers universitaires en France, désireux de partager leurs bonnes pratiques et leurs difficultés. Donnant vie au proverbe africain « seul on va plus vite, ensemble on va plus loin », ce cercle privé constitue désormais le Cercle « Performance Achats », sous l'égide de l'ANAP125, et compte plusieurs nouveaux membres. Confirmant cette tendance de la professionnalisation de l'achat, la dernière édition du Baromètre « Santé durable » révèle que le développement durable figurait en 2015 parmi les priorités du plan de formation dans près de 1 établissement de soin sur 5 - ce qui reste trop peu, malgré une nette inflexion des chiffres. Les trois cycles de formation phares étant : les gestes et postures au travail (78 % des établissements répondants), la gestion des déchets (47 %) et les achats durables (23%)126.

Or un acheteur bien formé, c'est un acheteur qui maîtrise les subtilités de la commande publique responsable et sait manier les différentes options d'intégration des clauses sociales et environnementales, afin de les adapter au mieux à son/ses besoin(s) et à la maturité des offres disponibles sur le marché.

Ainsi, dans une optique de performance globale, l'acheteur public de produits de santé pourra par exemple définir des conditions d'exécution127 qui imposeront aux fournisseurs de respecter des engagements de performance RSE pendant toute la durée du contrat (par exemple : livrer les produits de santé dans des cartons labellisés FSC ou PEFC ; garantir la reprise des palettes et/ou des cartons, après livraison, par le personnel d'un ESAT128 qui en assurera la valorisation...), en plus d'intégrer le développement durable parmi ses critères d'attribution129. Cette possibilité d'inscrire le développement durable à plusieurs étapes du « cycle de vie d'un marché public » est une véritable opportunité de confirmer le choix responsable de l'acheteur et, pour le candidat retenu, de démontrer l'authenticité de ses

125 Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux.

126 DirectHopital, « Plus de 8 établissements sur 10 intègrent le développement durable dans leur projet stratégique » (article du 21 mai 2015).

127 Article 14 du Code des Marchés Publics.

128 Etablissement de service et d'aide par le travail.

129 Article 53 du Code des Marchés Publics.

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engagements responsables (cohérence et pérennité). A la recherche de la fameuse harmonie entre le « dire » et le « faire ». Une harmonie envisageable à condition, toutefois, d'inscrire son règlement de consultation et ses clauses techniques en cohérence avec l'ensemble de ces exigences, en veillant notamment à bien équilibrer le niveau de pondération du critère développement durable avec le niveau de complexité des fiches techniques à compléter.

Mais l'acheteur public pourrait également, dans une volonté d'intégrer davantage les clauses sociales et environnementales à ses marchés, teinter chacun des critères de jugement de l'offre d'une dimension responsable : 20 à 25 % du critère « Logistique » réservés à la description d'une solution de Green Supply Chain ou de mobilité douce, incluse lors de la livraison des produits ; 20 à 25 % du critère « Technique » réservés à une analyse documentée des avantages de l'offre en matière d'ergo-conception, de simplification de manipulation du produit ou de contribution à la réduction des troubles musculo-squelettiques; 20 à 25 % du critère « Prix » réservés à une analyse exhaustive du coût complet du produit... Ainsi, la différenciation responsable de l'offre (le cas échéant) serait manifeste et sans équivoque, puisqu'observable sur chacun des critères essentiels de jugement et argumentée de façon tangible. Une opportunité de distinguer plus facilement les offres 100 % durables et de leur attribuer une forme de bonus RSE ayant une réelle valeur déterminante dans le choix final, en phase avec le concept du « mieux-disant ».

Les responsables de la commande publique pourraient enfin rejoindre ou créer leur propre système centralisé et collaboratif d'évaluation de la performance et de dialogue fournisseur130 en l'adaptant, par secteurs. A l'image de la plateforme « Together for Sustainability » (TfS)131, dont le but est de développer et implanter un programme d'évaluation et d'audit global pour évaluer et perfectionner les pratiques responsables des acteurs de la supply chain de l'industrie chimique, les représentants de la commande publique pourraient imposer à tous leurs fournisseurs de se soumettre à une évaluation régulière de leur performance RSE via ce type de plateforme en ligne. Accessible 24/24, 7 jours sur 7, un tel système permettrait aux candidats de compléter une sorte de « méta-questionnaire RSE » correspondant à leur profil et à leurs services (universels) mais de renseigner également des évaluations bien plus courtes et ciblées visant à qualifier les bienfaits sociaux et/ou environnementaux de leur offre, par gamme.

Cette évaluation initiale serait certes plus exhaustive - donc plus longue à compléter - qu'un questionnaire développement durable joint à la consultation d'un établissement de santé, mais le candidat n'aurait ensuite à la renseigner qu'une fois par an, ou plus selon les mises à

130 Ecovadis : http://fr.ecovadis.com/supplier-solutions/

Acesia : http://groupe.afnor.org/pdf/ACESIA-afnor-solutions-achats.pdf Enablon : http://enablon.fr/solutions-fr/performance-des-fournisseurs Correl : http://correl.fr/evaluer.phtml

131 http://www.arkema.com/fr/media/actualites/detail-actualite/Arkema-rejoint-Together-for-Sustainability-TfS-une-initiative-pour-une-supply-chain-responsable/

Ce qu'il faut retenir

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jour qu'il souhaiterait apporter132. Ramené à l'année, cela représenterait en définitive un gain considérable, quand on sait le temps Homme consacré à l'élaboration de réponses aux injonctions sociales et environnementales, dans le cadre des consultations publiques ! Un gain de temps observé également chez l'acheteur qui, à l'occasion de chaque marché, n'aurait plus qu'à interroger le système afin de voir si l'évaluation RSE du candidat X est disponible et, selon la réponse du logiciel, il n'aurait plus qu'à visualiser cette évaluation ou à solliciter le candidat pour que ce dernier se soumette à l'évaluation initiale. Pour l'acheteur, le premier avantage d'une telle plateforme d'évaluation en ligne serait donc la réduction du « temps administratif » au bénéfice du « temps utile », offrant la possibilité de focaliser sur l'analyse qualitative de l'offre responsable. Le second avantage de ce système centralisé collaboratif, accessible à tout établissement de santé adhérent, serait l'alternative d'une vision matricielle - transversale - sur l'un des aspects de la performance du candidat (par exemple, les économies d'énergie liées à ses produits). Un détail qui pourrait finalement ne pas en être un, si tant est qu'il puisse avoir une incidence sur un ou plusieurs des chantiers stratégiques de l'établissement de santé (par exemple, si la réduction de ses consommations d'énergie, par ailleurs source d'économies substantielles, figurait parmi ses priorités). Enfin, l'acheteur public aurait la possibilité de visualiser en un clin d'oeil la performance relative de chaque candidat soumissionnaire, sur une matrice globale. Ce qui ne le dispenserait pas, pour autant, de creuser les sources de performance de tel ou tel candidat.

Les idées ne manquent pas pour développer la performance globale au sein du système de santé. Toutes n'induisent pas, d'ailleurs, de changement majeur dans le système actuel...mais certains ajustements et, indéniablement, de créer une impulsion forte en ce sens. La commande publique peut et doit initier ce mouvement : non seulement elle est capable de générer des effets d'entraînement forts, mais elle est plus que concernée par le partage de responsabilité vis-à-vis de la santé, ce bien commun si cher à chacun d'entre nous. En outre, le poids des injonctions réglementaires et légales se trouve aujourd'hui décuplé par la pression - légitime - exercée par les patients et usagers des produits de santé. La réponse à l'ensemble de ces directives se trouve probablement dans la construction d'un système de soin responsable, intégratif et cohérent, capable de créer de la valeur et des bénéfices partagés, encourageant la professionnalisation des acheteurs et permettant à ces derniers d'explorer certains outils collaboratifs en vue de mutualiser leurs efforts.

C'est à ces conditions et à ces conditions seulement que la commande publique de produits de santé pourra espérer atteindre les objectifs ambitieux fixés à travers le 2ème PNAAPD133. Car ce qui a changé, c'est le discours de preuve, la mesure des résultats, la conviction qu'on ne peut plus faire « sans » le développement durable et que ce qui était, hier, une exhortation à penser le changement est aujourd'hui devenu une exigence de le conduire, de façon concrète.

132 Nouvelles informations RSE, mises à jour d'une certification, mise à jour de la consommation électrique de tel ou tel produit, etc.

133 25 % de marchés comportant au moins une disposition sociale et 30 % comportant au moins une disposition environnementale, d'ici à 2030.

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Partie 2 : La réglementation des marchés publics et les injonctions du système de santé limitent considérablement le potentiel de l'achat public responsable

S'ils sont institutionnalisés, les principes fondamentaux de lien avec le besoin à satisfaire134 et de non-discrimination semblent toutefois représenter la première des barrières à l'évolution de la commande publique vers un modèle de performance globale. Dans une certaine mesure, ils ralentissent aujourd'hui considérablement la transition d'un régime d'autorisation (« ce qui permis ») vers un régime de stimulation (« ce qui est exigé »), qui aurait le pouvoir de favoriser les innovations sociales et environnementales. L'acheteur public est tenu de se concentrer sur l'objet du marché. A ce titre, en dehors des conditions d'exclusion et des articles 15 et 45 du Code des Marchés Publics, portant respectivement sur les marchés réservés135 et l'examen du savoir-faire social et/ou environnemental du candidat, une majeure partie de la commande publique a les yeux rivés sur le « besoin à satisfaire ». Toute information abordant l'objet du marché de façon indirecte, sans être interdite, prête aujourd'hui à débats. Le produit a-t-il fait l'objet d'une évaluation environnementale tout au long de son cycle de vie ? Le site de fabrication dudit produit est-il détenteur de telle ou telle certification volontaire ?... Autant de questions longtemps jugées inappropriées et sans lien avec l'objet du marché mais qui, au sens de la norme ISO 14062 sur l'éco conception relèvent bien du périmètre du produit ou service. Depuis quelques années, grâce à la professionnalisation des outils et de leur cadre méthodologique, la notion de cycle de vie et ses étapes clés sont toutefois rentrés dans les moeurs des acheteurs publics, qui tolèrent désormais des questions portant sur la présence de composants recyclés, la recyclabilité du produit ou encore sur les éventuels labels officiels apposés sur les emballages produit ou de transport. Mais le chemin à parcourir est encore long...

En adoptant cette vision quelque peu parcellaire, la commande publique se coupe nécessairement d'une vision globale et holistique de l'objet du marché et du contexte dans lequel la réponse à ce besoin a été développée : « the big picture ».

Selon les principes fondamentaux du droit communautaire, encourager la performance globale pourrait également constituer un frein à l'égal accès au marché. Une idéologie liée à la crainte que la responsabilité sociétale puisse attiser des élans de protectionnisme « vert ))136 ou « bleu ))137, exprimés à travers des conditions d'exécution ou des spécifications techniques très, voire trop, précises. Certes, la diversité du paysage économique induit que tous les acteurs en présence ne sachent pas répondre avec le même niveau de maturité à ce type d'injonctions. Pour autant, l'acheteur public est sensé étudier son marché, avant toute

134 Ou, dit autrement, l'objet du marché public.

135 Seules les structures qui accueillent des personnes en situation de handicap sont alors autorisées à se porter candidates.

136 Environnemental.

137 Social.

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rédaction d'une consultation. Le cas échéant, s'il constate que les offres responsables sur ce marché sont trop rares - si ce n'est monopolistique - il lui revient de ne pas inscrire dans les documents de sa consultation des exigences ou spécifications techniques particulières en ce sens et d'autoriser les variantes. Les candidats disposant d'une offre « pro RSE » pourront ainsi soumissionner, sans pour autant léser les autres fournisseurs.

Ce point relève, semble-t-il, de la rigueur et du discernement de l'acheteur plus que d'une éventuelle « menace » portée par un ou plusieurs candidats aux offres vertueuses. Et c'est précisément en encourageant les best players que la commande publique se donne une chance de stimuler, de tirer vers le haut ses marchés.

Pour les raisons évoquées ci-dessus et afin d'éviter à l'acheteur public tout risque de contentieux, le système actuel cantonne plus ou moins le critère développement durable à l'article 53 du Code des Marchés Publics, en tant que critère de jugement des offres. Une alternative conventionnelle, limitant la portée des débats - certes - mais réduisant considérablement le poids relatif de cet enjeu dans la note globale attribuée.

Qui plus est, étant donné les sources de pression pesant sur le système de santé, et plus spécifiquement les établissements de soin, il est compréhensible que ces derniers - confortés par un ensemble de réglementations européennes et nationales - cèdent à la tentation du " transfert de responsabilités ", en redirigeant la majeure partie des injonctions à des pratiques plus vertueuses vers les fabricants. Si les industriels - en tant que metteurs sur le marché et parce qu'ils ont l'initiative de certaines orientations fondamentales pour le produit telles que le choix des matières premières - doivent évidemment assumer leur part de responsabilités vis-à-vis de l'environnement et des Hommes, cela ne doit pas dispenser pour autant les établissements de santé d'endosser la leur. Ni même d'ailleurs les empêcher de s'interroger sur l'intégration du développement durable dans leur organisation et leur Plan stratégique pluriannuel.

Pourtant, à quelques exceptions près (largement célébrées et relayées), l'intégration du développement durable dans les marchés publics de santé répond davantage d'une volonté de conformité réglementaire et d'un acte symbolique que de convictions personnelles. En l'absence d'un tel stimulus et à défaut d'une compréhension globale de la RSE, nombre d'acheteurs voient dans la commande publique responsable un moyen de répondre à des objectifs de normalisation et de standardisation, là où d'autres ont compris la portée stratégique des clauses sociales et environnementales. Une dichotomie qui a toujours existé et qui se creuse chaque année un peu plus, entre les « établissements pionniers » et les autres...

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Au-delà des exigences en vigueur, un ensemble de pratiques - admises - limitent considérablement le développement de l'achat public responsable et la stimulation de la performance globale.

L'obstination à circonscrire le développement durable à des thématiques purement écologiques, par exemple, en est une. Si elle découle du principe communautaire de lien avec l'objet du marché, cette injonction à réduire les impacts du produit/service sur l'environnement permet surtout de visualiser rapidement et de façon quantitative ces effets positifs. Une démonstration simple et efficace, souvent chiffrable, parfois " vitrine ", qui retient de loin la préférence de l'acheteur public, contrairement à la clause sociale. Devancés par les aspects écologiques depuis plusieurs années, les enjeux sociaux devraient gagner progressivement en représentativité grâce, notamment, à la refonte du Code des Marchés Publics et l'intégration des fameux « marchés réservés ». Toutefois, il est fort à parier que ces efforts de rattrapage ne suffiront pas à hisser les problématiques sociales sur le haut de la pile. Car comme le révélait le panorama des attentes croisées de la société civile et de la communauté économique - réalisé en 2015 par l'Institut du Management RSE - là où le grand public exprime nettement une attente sociale138, les acteurs économiques formulent une attente de nature pro-environnementale.

Concrètement, l'intégration du développement durable dans les marchés publics est probablement envisagée par la majorité des acheteurs comme un moyen de répondre à une forte incitation économique. Etant donné le niveau des objectifs « d'économies intelligentes » fixé aux établissements de santé français, à travers le programme PHARE139, il s'agit même d'une théorie plausible... Ainsi, l'acheteur public sera particulièrement réceptif aux solutions de réduction des déchets ou de reprise des emballages, qui permettent à son établissement de dégager rapidement des économies (et de l'espace disponible !).

Mais les échanges acheteur-fournisseur restent fondés sur une vision court-termiste, ne laissant que peu de place au débat sur le coût complet, et pour lequel l'acheteur public ne dispose pas - a priori - de cadre méthodologique précis. Une tendance annoncée dès 2011, par l'enquête de l'Observatoire Economique de l'Achat Public, qui révélait que moins de 10 % des acheteurs publics reconnaissaient adopter cette démarche.

Il semble que conjuguer « développement durable » au pluriel (économique, social et sociétal, écologique) et à moyen terme (dans une logique de coût complet) soit plus complexe dans la pratique qu'en théorie...remettant en question la capacité du système de santé d'évoluer vers un modèle de performance intégrée.

138 Institut Management RSE / CSR Metrics France, « L'Observatoire des enjeux RSE 2015 : état des attentes RSE en France, vues par la société civile et la communauté économique, et leur utilisation dans l'analyse de la matérialité des enjeux RSE des entreprises » (février 2015).

139 Programme de performance hospitalière pour des achats responsables.

Ce qu'il faut retenir

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En marge de ces injonctions contradictoires, le débat sur l'achat public responsable doit également être recentré autour de l'acheteur et s'inscrire dans le cadre de sa relation avec les acteurs présents sur le marché.

A date, l'absence d'accompagnement de l'acheteur public est à la fois pénalisante et incompatible avec toute forme d'aspiration à un système globalement performant.

La commande publique responsable peinera à gagner en maturité si les directions d'établissement ne s'engagent pas à allouer davantage de ressources - temps, Hommes, budget - à leurs acheteurs, mais elles devront également lui assurer un parcours de formation adapté, permettant de gagner en compétences et en domaines d'expertise. Le système de santé devra également apporter un certain nombre d'éléments de réponses à des questions qui restent aujourd'hui non-traitées : comment motiver l'acheteur public ? (par le conseil, par l'incitation, par la récompense, par l'obligation ?) Comment sécuriser, juridiquement, l'acheteur, toujours hanté par le risque de contentieux ? Comment faire en sorte que les clauses sociales et environnementales soient respectées et correctement appliquées ?... Le guide des bonnes pratiques en matière de Marchés Publics140 - élaboré avec l'appui de la Direction des affaires juridiques du ministère de l'Économie, de l'Emploi et de l'Industrie, et du ministère du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique - apporte des premiers éclairages sur ces différentes questions.

Les établissements de soin précurseurs, aujourd'hui, sont ceux qui ont fait le choix de dédier des ressources à la RSE. Ceux-là même qui, hier, furent les premiers à dégager du temps utile pour que certains personnels se rassemblent en Commission développement durable, mènent des actions sur le terrain (audits déchets, par exemple), organisent des événements internes autour de sujets RSE, challengent la performance des offres des fournisseurs ou encore organisent avec ces derniers des rendez-vous afin de construire des solutions concrètes...

Dans un monde qui fonctionne déjà à deux vitesses, creuser l'écart entre les établissements de santé précurseurs et le reste des opérateurs, sur le territoire, représente un risque : celui de ne pas prendre le train en marche, de ne pas amorcer le virage qui redessinera complètement le paysage sanitaire français et, en définitive, d'être évincé d'un nouveau système reposant sur la co-construction et la création de valeur partagée.

140

http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publics/conseil_acheteurs/guides/g uide-bonnes-pratiques-mp.pdf

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Partie 3 : Et si les achats publiques responsables étaient l'une des composantes de la démocratie sanitaire ?

Petit retour en arrière.

Dès 1945, avec la création de la Sécurité sociale, le système de santé français est placé dans la sphère de la démocratie sociale, qui relève de la légitimité des partenaires sociaux. En 1997, lorsque paraît le premier palmarès des hôpitaux, l'intention est de permettre à chacun de connaître les très bons (et non les meilleurs) services hospitaliers en France, dans un souci de partage de l'information avec le grand public.

Cette lame de fond que l'on appelle aujourd'hui démocratie sanitaire est un mouvement directement hérité de ces mutations et si le concept est encore en phase de construction, il doit d'ores et déjà relever de nombreux défis dans un contexte de crises sanitaires successives et de difficultés majeures en matière d'accès aux soins141. Inventée dans les années 1990, l'expression démocratie sanitaire traduit la volonté d'encourager l'adhésion et la contribution des patients-usagers et des associations qui les représentent, à l'ensemble de l'écosystème de la santé. Signe d'une volonté de transparence vis-à-vis de l'usager, notamment le patient expert142, la démocratie sanitaire s'efforce de créer les conditions d'une participation effective du citoyen aux politiques de santé dont il est justement le destinataire et d'instaurer un climat de confiance mutuelle, dans un cadre géographique stable. Signée en mai 2015, la Convention portant création de l'Institut pour la Démocratie en Santé (IPDS) entérine d'ailleurs un certain nombre de missions en ce sens : former les responsables du système de santé aux enjeux, méthodes et outils afférents143 ; créer un centre de ressources permettant de regrouper, partager et diffuser les connaissances144 ; initier les projets de recherche dans le domaine de la participation des usagers et des citoyens.

Au sein de cette démocratie sanitaire, la place des professionnels de soin doit encore être clarifiée et confortée, de même que celle des industriels. Une certitude demeure : la performance est l'affaire de tous et la responsabilité de chacun. En plaçant l'usager au coeur du système - en tant qu'acteur de sa santé, à titre individuel et collectif - celui-ci se voit offrir la possibilité de démontrer sa performance et son aptitude à s'impliquer145. Calquant son comportement sur ses agissements en tant que consommateur, il est tout à fait

141 Déserts médicaux, obstacles financiers, complexité de la prise en charge des maladies chroniques...

142 Le patient qui, atteint d'une pathologie chronique, développe une connaissance pointue de sa maladie

143 Pour permettre une plus grande implication des citoyens dans la définition des politiques publiques, comme dans l'adaptation des organisations en santé.

144 Et impliquer les citoyens dans la définition des politiques publiques comme dans l'adaptation des organisations en santé.

145 Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), « En quoi les usagers et les citoyens peuvent-ils contribuer à la performance du système de santé ? » (Actes des Universités d'été de la performance en santé, Tours, 28-29 août 2015).

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envisageable que le patient de demain interpelle de façon indirecte les industriels de santé et impulse certaines (r)évolutions dans la chaîne d'approvisionnement.

L'acheteur public de santé tient donc, aujourd'hui, un rôle bien plus actif et transversal que celui qui lui incombe dans une approche purement standard, au point de vue économique du terme. Il doit assumer pleinement son statut de coordinateur de la co-construction pour et avec les usagers, mais aussi pour et avec ses fournisseurs. Car si le système de santé entend travailler de façon collaborative avec le patient-usager (en aval), cette démarche sera naturellement étendue à la relation acheteur-fournisseur (en phase amont), de façon à créer un système vertueux, intégratif et cohérent.

Incarnant, à sa façon, les changements observés dans le rapport de force acheteur-fournisseur, l'acheteur public de demain sera donc un promoteur, un acteur majeur de la performance globale. La cheville ouvrière d'une démarche intégrée à la stratégie de l'établissement de santé, porteuse de sens et créatrice de valeur partagée.

Promoteur d'un dialogue ouvert et interactif permettant de pérenniser la relation, l'acheteur aura une double vocation : celle d'accompagner les fournisseurs vers un meilleur niveau de performance, tout en souscrivant à des solutions durables venant parfois troubler son propre équilibre146. Consolidée autour de valeurs partagées, d'une ambition de performance assumée et d'une reconnaissance des responsabilités individuelles et communes, la relation acheteur-fournisseur devrait générer une confiance réciproque et constituer un terreau fertile de co-création. Dans ce cadre, la conduite par l'acheteur d'audits terrain ou de contrôles auprès des fournisseurs fera partie intégrante de la relation. La responsabilité sociétale d'entreprise est sans nul doute au coeur de la relation acheteur-fournisseur : il s'agit d'un critère de confiance, de transparence, marqueur (le cas échéant) d'une relation pérenne, inscrite dans une logique de fidélisation - y compris dans un contexte de crise. L'acheteur public perçoit en effet de façon très nette les bénéfices d'une démarche RSE sur la maîtrise des différents niveaux de risque. Si un industriel de santé propose à l'acheteur une solution dont le caractère durable ne fait aucun doute, ce dernier pourra à son tour devenir « promoteur de la confiance » auprès des patients-usagers. La confiance devenant alors, de manière tout à fait officieuse, une forme de critère de sélection des offres.

Mais l'acheteur public de demain tiendra également un rôle de promoteur du territoire. Les établissements publics de santé sont des acteurs économiques et sociaux importants, au coeur des territoires. Ils sont bien souvent les premiers employeurs d'une ville, disposent d'une large sphère d'influence et détiennent un potentiel éducationnel extrêmement fort en direction des personnels qui y travaillent, mais aussi vis-à-vis des millions de patients et résidents qu'ils accueillent. A ce titre, la relation acheteur-fournisseur sera d'autant plus bonifiée qu'elle s'inscrit dans un rapport privilégiant cette dimension économique locale, dans une perspective de partenariat sur le long terme. Certains industriels de santé, à

146 Etant entendu dans une logique positive d'optimisation de ses processus.

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l'image de B. Braun Medical, tentent déjà d'accompagner leurs clients sur des chantiers sources d'économies intelligentes et de valeur partagée147 pour les réseaux territoriaux148. Il s'agit alors d'envisager la RSE comme une incitation à la création de valeur partagée entre l'entreprise et la société civile, à savoir « cette valeur qui permet de "reconnecter" la compétitivité de l'entreprise avec les besoins de la société en matière de progrès social149. » Le secteur de l'industrie pharmaceutique se révèle être un terrain de recherche opportun pour aborder ces questions des relations entre société civile et entreprise, étant donné le contexte de défiance envers les industriels et la complexification des enjeux environnementaux et socio-économiques150.

Au sein de la démocratie sanitaire, la commande publique peut donc jouer un rôle essentiel. A condition de construire un système où éthique des affaires, transparence et relations de confiance seront de mise, il s'agit même d'un élément central, source de création de valeur pour tous, au-delà de la qualité des soins et de la bientraitance. Au sein d'un tel système, l'acheteur public jouira d'une fonction transversale et stratégique, servant la performance de l'établissement de santé.

147 Le concept de création de valeur partagée, développée par Porter et Kramer, répond à 5 critères essentiels : la définition d'un objectif social et/ou environnemental, l'existence d'un besoin bien défini, le suivi d'indicateurs de mesure de la valeur créée, le déploiement d'une structure d'innovation pertinente et la mise en oeuvre d'un processus de co-création.

148 Voir leaflet Ecoflac? [Annexe 6].

149 Porter, Kramer (2011).

150 http://www.leem.org/les-entreprises-du-medicament-publient-leur-10eme-rapport-de-responsabilite-societale

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Conclusion

 
 

Si la vocation première des achats publics responsables n'est probablement pas de mener à la performance globale, il s'agit toutefois un important contributeur à ce mouvement. En effet, l'achat responsable constitue - quoi qu'on en dise - une forme d'incitation positive adressée au marché ; incitation qui crée un cercle vertueux et contribue peu à peu à l'émergence d'offres responsables construites (produit et service) tangibles, créatrices de valeur et économiquement avantageuses. Evidemment, le niveau de " couverture " des enjeux du développement durable est relativement disproportionné, fonction des volets considérés, mais force est de constater que l'évolution de l'inclusion des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics, ces dix dernières années, constitue un signal relativement positif. Un stimulus d'autant plus fort qu'il pourrait être démultiplié grâce aux effets d'entraînement de la commande publique, capable de démocratiser cette pratique dans les années à venir - qui plus est en matière de produits de santé.

Il convient davantage d'envisager les achats publics responsables comme l'un des maillons de la démocratie sanitaire, dont le mot d'ordre est l'instauration d'un dialogue constructif. En convertissant la thématique des achats d'un statut de défiance à un statut de confiance, la commande publique a ainsi toutes ses chances de gagner en maturité, de se structurer au sein des établissements de santé et de soutenir -in fine- la performance globale.

Toutefois, la réglementation des marchés publics - du fait qu'elle propose à la fois des modalités variées d'intégration du développement durable et pèse, en même temps, de tout le poids du droit communautaire et du risque de contentieux - restreint considérablement les éventuels élans dans le sens de la RSE. On observe ainsi un système à deux vitesses régenté par des injonctions contradictoires ; un système qui semble parfois un peu "dépassé" et pas toujours disposé à se donner les moyens de ses ambitions.

Alors, certes, le propre de la performance globale est qu'elle propose de concilier des intérêts souvent opposés, quitte à procéder à des arbitrages...mais en matière d'achats publics responsables, les amalgames sont encore très (trop) fréquents et les arbitrages, orientés dans une seule et même direction. Le développement durable dans la commande publique de produits de santé est quasi exclusivement réduit au seul volet environnemental. La logique de coût complet n'est clairement pas acquise ni parfaitement assimilée, au sein de la communauté des acheteurs publics. Quant aux volets social (démarches RSE encourageant la performance interne) et sociétal (démarches RSE encourageant la performance externe), ils ne sont pas considérés comme partie intégrante du périmètre d'actions, au nom du principe fondamental de lien avec l'objet du marché.

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La marche vers des clauses sociales et environnementales intégrées à toutes les consultations, de façon homogène et systématique, prendra encore du temps. Un temps qu'il faudra consacrer à l'accompagnement du changement, à la formation professionnelle des acheteurs publics et à la mise en place de structures organisationnelles dédiées aux achats responsables - y compris en termes de ressources.

La performance intégrée, comme son nom l'indique, dénote une vision stratégique et politique d'intégration de la responsabilité sociétale. Une vision dont découle ensuite des objectifs et priorités en matière de développement durable. La véritable question que doit aujourd'hui se poser la communauté des acheteurs publics est finalement celle de la place qu'ils sont prêts et en mesure d'accorder au dialogue qualitatif avec les parties prenantes, à la co-construction de solutions RSE, à la création de valeur partagée, etc... dans leurs marchés. Et la réponse à cette question ne tient pas tant à des exigences réglementaires ni à des valeurs morales, qu'à la volonté propre de leur direction d'établissement. En effet, en matière d'achats publics responsables, la véritable performance consiste à challenger ses fournisseurs sur les thématiques qui constituent les priorités stratégiques et figurent, à ce titre, dans son Plan d'établissement et dans aucun autre. Les efforts RSE des uns (fournisseur) serviront ainsi les objectifs RSE des autres (acheteur), dans une logique de synergie et de performance partagée. Dans cette perspective, il conviendra également de s'interroger sur la place attribuée au développement durable dans l'établissement de santé, afin de respecter une certaine cohérence entre ce qui est exigé des candidats et la réalité de son organisation. Enfin, lors de la définition des indicateurs de pilotage, l'ensemble de ses réflexions devra aider l'acheteur public à déterminer le ou les but(s) que sert sa démarche responsable, autrement dit : la responsabilité sociétale est-elle une fin en soi ou sert-elle exclusivement des objectifs économiques ?

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Glossaire

ANAP : Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux BSC : Balanced Scorecard (aussi SBSC : Sustainability Balanced Scorecard / TBSC : Total Balanced Scorecard)

CCTP : Cahier des clauses techniques particulières

CMP : Code des Marchés Publics

Commande publique : regroupe l'ensemble des contrats que les pouvoirs publics passent afin de répondre à leurs besoins

[Clauses] ES : [Clauses] environnementales et sociales

DD : Développement durable

DJSI : Dow Jones sustainable index

ESAT : Etablissement de service et d'aide par le travail

[Critères] ESG : [Critères] Environnemental, social et de gouvernance

FSC : Forest Stewardship Council

GEMP-PS : Groupe d'étude des marchés de produits de santé

GRI : Global reporting initiative

HAS : Haute Autorité de Santé

PEFC : Pan European Forest Certification

PHARE : Programme de performance hospitalière pour des achats responsables

PME : Petites et moyennes entreprises

PNAAPD : Plan national d'action pour les achats publics durables

Pouvoir adjudicateur : acheteur public

OEAP : Observatoire économique de l'achat public

RSE : Responsabilité sociétale d'entreprise

SaaS : Sytem as a service

SIAE : Structures d'insertion par l'activité économique

TBL : Triple bottom line

TPE : Très petites entreprises

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Bibliographie

· AdDen avocats pour le compte de la CAHPP, « Guide juridique des achats hospitaliers » (octobre 2014)

· Agence LUCIE sous l'égide de la Plateforme nationale RSE, « Panorama de la mise en oeuvre de la RSE dans les entreprises françaises » (4 février 2014)

· Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), « En quoi les usagers et les citoyens peuvent-ils contribuer à la performance du système de santé ? » (Actes des Universités d'été de la performance en santé, Tours, 28-29 août 2015)

· Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), « Responsabilité sociétale des établissements de santé et médico-sociaux » (Actes de la Journée Nationale, 22 janvier 2015)

· AOUN Elisabeth, « Développement durable et produits de santé : 2005-2015 » (Présentation PPT, 26 juin 2015)

· Atelier de réflexion sur les aspects sociaux de la commande publique, « Commande publique et accès à l'emploi des personnes qui en sont éloignées » (guide et recommandations, Version 2.1, octobre 2015)

· BatiJournal, « Plus de commande publique pour les PME » (article du 27 juillet 2015)

· BOURQUIN Martial au nom de la Mission commune d'information sur la commande publique, « Rapport d'information fait au nom de la mission commune d'information sur la commande publique » (Rapport n°82, 14 octobre 2015)

· Cabinet SCP Charrel et Associés, « L'environnement et les marchés publics : quels critères pour quelles conditions de prise en compte ? » (Support de formation, décembre 2014)

· Campagne pour l'achat public responsable, « Pour un achat public responsable et économiquement avantageux » (Manuel Procura+, 2ème édition, 2007) ( http://www.procuraplus.org/fr/accueil-fr/le-manuel-procura)

· CHAKROUN Wafa et TOUNES Azzedine, « Performance sociale des entreprises et dispositifs de mesure : un panorama théorique » (ESC Chambéry, 2013)

· CHARLIER Raphaële, « Les critères environnementaux dans les marchés publics » (mémoire, 2007)

· CLARK Gordon L., FEINER Andreas et VIEHS Michael, « From the stockholder to the stakeholder : How sustainability can drive financial outperformance » (2014, mise à jour mars 2015)

· Code des Marchés Publics : http://www.marche-public.fr/CMP-2006/Clauses-sociales-
environnementales.htm

· Comité du Développement Durable en Santé (ds) en collaboration avec AFNOR Certification, « Santé durable et responsable - Guide à l'usage des établissements de santé » (2015)

· Comité du Développement Durable en Santé (ds), « Santé durable et responsable - Guide à l'usage des établissements de santé » (Dossier de presse de lancement du 11 juin 2015)

63

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

 

· Commission des Communautés Européennes, Communication interprétative de la Commission des Communautés Européennes sur le droit communautaire applicable aux marchés publics et les possibilités d'intégrer des considérations environnementales dans lesdits marchés » (rapport, 4 juillet 2001)

· De COURTIVRON C., LEMAIRE F. et GAUDIN A., « Achat de dispositifs médicaux : quelle place pour le développement durable ? » (restitution post-enquête pour l'Institut Gustave Roussy, août 2013)

· CSR Europe, « Get value : guide your company's sustainability journey » (2015)

· DARRODES M., De COURTIVRON C., LEMARE F. et GAUDIN A., Poster Europharmat « Achats de dispositifs médicaux et développement durable : comment aider les pharmaciens hospitaliers ? » (octobre 2015)

· DirectHopital, « Achats : une réglementation unique souple va être mise en place pour les hôpitaux et les Espic » (article, 9 juillet 2015)

· DirectHopital, « Achats hospitaliers : la performance économique et les critères sociaux et environnementaux ne sont pas "contradictoires » (article par Morgan Bourven, 15 octobre 2015)

· DirectHopital, « Plus de 8 établissements sur 10 intègrent le développement durable dans leur projet stratégique » (article du 21 mai 2015)

· Direction des Affaires Juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances, « Acheteurs publics : 10 conseils pour réussir » (fascicule, juin 2015)

· Direction des Affaires Juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances, « Acheteurs publics : simplifiez-vous l'achat ! » (fascicule, juin 2015)

· Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances, « Vade-mecum des marchés publics » (édition 2015)

· Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « L'achat public durable en 2010 » (synthèse des résultats, octobre 2011)

· Direction des affaires juridiques du Ministère chargé de l'Économie et des Finances - Observatoire Economique de l'Achat Public, « Le développement des clauses sociales dans la commande publique » (actes du colloque, 17 octobre 2008)

· Ecovadis - Médiation Inter-Entreprises, « Comparatif de la performance RSE des entreprises françaises avec celles des pays de l'OCDE et des BRICs » (étude, 23 mars 2015)

· Etudiants du MBA Management de la Performance Durable de l'ISCP sous l'impulsion du Label LUCIE, « La RSE : quels apports et perspectives dans les relations B to B ? » (mémoire, Février 2014)

· GERMAIN Christophe et TREBUCQ Stéphane, « La performance globale de l'entreprise et son pilotage : quelques réflexions » (Semaine sociale Lamy, 18 octobre 2004)

· GIMENES Nathalie, « Créer une valeur partagée et un nouveau contrat social avec la société : le nouveau défi des entreprises du médicament en France : une réflexion autour du potentiel de transformation de la RSE » (thèse, septembre 2013)

· Groupes d'Etude des Marchés (GEM), Programme 2015 des publications des groupes d'étude des marchés

64

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

 

· Groupe de Formation et de Recherche en Comptabilité, Contrôle, Audit, Reporting -(anciennement Crefige), « Mesure de la performance globale des entreprises » (2009)

· Helpevia (Centrale de référencement), Courrier adressé à B. Braun Medical dans le cadre de l'évaluation de la performance RSE des fournisseurs, sur le marché des « Spécialités pharmaceutiques et dispositifs de diagnostic in-vitro » (Document confidentiel, 8 décembre 2014)

· HISSEIN Hassan Ahmat, « L'intégration de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans le droit des marchés publics » (thèse, Novembre 2010)

· Hospimedia, « L'idée d'un guichet unique sur l'achat public innovant en santé fait son chemin » (Article, 9 septembre 2015)

· Hospimedia, « Seuls 2 % des projets développement durable ont un budget dédié dans les établissements » (article du 19 mai 2015)

· Institut Management RSE / CSR Metrics France, « L'Observatoire des enjeux RSE 2015 : état des attentes RSE en France, vues par la société civile et la communauté économique, et leur utilisation dans l'analyse de la matérialité des enjeux RSE des entreprises » (février 2015)

· JACQUET Stéphane, « Management de la performance : des concepts aux outils »

· KROEMER M., CHOLLEY T., POURCELOT C., VOIDEY A. et GRUMBLAT A., Poster Europharmat « Achats de dispositifs médicaux : quelle place pour le développement durable ? » (octobre 2015)

· La Gazette des Communes, « Marchés publics : quelles simplifications ? pour qui ? » (dossier, mai-juin 2015)

· La Gazette des Communes, « Ordonnance des marchés publics : un pragmatisme séduisant qui permet d'avancer » (article du 28 juillet 2015)

· La Gazette des Communes, « Ordonnance des marchés publics : une réforme en profondeur » (dossier spécial `décryptage' du 27 juillet 2015)

· La Gazette des Communes, « Simplification des marchés publics : de bonnes intentions à confirmer pour les associations » (article du 9 juin 2015)

· Les Ateliers de l'Eco-Département - Yvelines, « Les critères environnementaux et les clauses sociales dans les marchés publics » (Mini-guide, 3 mai 2012)

· MARTY Frédéric, « Les clauses environnementales dans les marchés publics : perspectives économiques » (working paper, 2012)

· Médiateur national des Marchés publics, « Faire de la commande publique un vrai moteur de croissance des achats hospitaliers innovants » (rapport, mai 2015)

· MIANKENDA Astride, « Le développement durable dans les affaires publiques : l'insertion des critères écologiques » (mémoire, 1er décembre 2013)

· Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, Plan national d'action pour les achats publics durables 2015-2020

65

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

 

· Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, « Réforme de la commande publique » (Dossier de présentation, juillet 2015)

· Ministère de l'économie et des finances, « Marchés publics : comment les critères sociaux et environnementaux sont-ils pris en compte ? » Site internet www.economie.gouv.fr/cedef/marches-publics-criteres-sociaux-environnementaux (extrait)

· MIT Sloan Management Review, « Sustainability ratings can capture value that financial system reporting systems overlook » (article du 7 août 2015)

· Newsmanagers, « Le non-respect de facteurs RSE coûte plus de 95 milliards aux entreprises dans le monde » (article, 13 juillet 2015)

· ObsAR-CDAF, « Forum sur les achats responsables » (Compte-rendu des tables-rondes par Emilie Pommier, 10 mars 2015)

· Observatoire de la Performance Responsable, « Les enjeux RSE les plus rentables plébiscités par le grand public » (3ème édition, février 2015)

· Office des publications officielles des Communautés européennes, « Acheter vert : un manuel sur les marchés publics plus écologiques » (guide, 2005)

· ORSE - MEDEF, « Pratique des entreprises dans le domaine des achats responsables : questionnaires RSE adressés par les donneurs d'ordre à leurs fournisseurs » (Etude, février 2013)

· PILON Anthony, « Marchés publics : un outil au service des considérations sociales » (mémoire de Master de Droit Immobilier Public, UVSQ, 2013-2014)

· QUAIREL Françoise, « Contrôle de la performance globale et responsabilité sociale de l'entreprise » (2006)

· RADISSON Laurent, « Les marchés publics pourront faire référence au cycle de vie des produits » (article paru sur le site Actu Environnement, en date du 23 juillet 2015)

· Réseau Enterprise Europe Network de la CCI de Lyon, Note de synthèse du 3 avril 2013 http://www.lyon.cci.fr/upload/docs/application/pdf/2015-05/le__developpement_durable_dans_les_marches_.pdf

· Secrétariat Général de l'Administration, Actes du 3ème colloque ministériel des achats responsables (15 mai 2014)

· Secrétariat général pour la modernisation de l'action publique, « Etude par événements de vie sur la complexité - volet entreprises » (2013)

· SNITEM, « Les marchés publics de produits de santé » (Présentation PPT, 27 juillet 2015)

· Socialement Responsable (blog), « Achats publics responsables : le nouveau plan 2015-2020 » (article, 28 mai 2015)

· SQUAREMETRIC, 8ème édition du Baromètre Santé durable (2015)

· TAHIRI Azedine, « Innovation par la responsabilité sociétale dans la gestion de projet d'ingénierie pharmaceutique » (thèse, 2013)

66

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

 

· TRUDEL Jean-Sébastien, « Le développement durable est-il vraiment rentable ? En voici la preuve » (extrait) http://jeansebastientrudel.com/2014/04/le-developpement-durable-est-il-vraiment-rentable-en-voici-la-preuve.html

· VIGEO, « Responsabilité sociale d'Entreprise : le coût des sanctions » (Rapport publié en mai 2015)

· www.marchéspublicspme.com, « Vers des critères de pondération RSE systématiques dans les marchés publics » (article du 24 avril 2013)

Sites internet consultés

· Site internet www.cci.fr « Lancer et valoriser votre démarche RSE » : http://www.cci.fr/web/developpement-durable/lancez-et-valorisez-votre-demarche-rse

· Site internet www.cnrs.fr - questions parlementaires « Objectif de développement durable et définition du besoin » (réponse du 11 janvier 2007) (extrait)

· Site internet www.economie.gouv.fr « Marchés publics : comment les critères sociaux et environnementaux sont-ils pris en compte ? » (extrait)

· Site internet www.ecoresponsabilite.environnement.gouv.fr/faq.php?cat=1&theme_menu=1 (Portail internet Administration éco-responsable)

· Site internet http://www.economie.gouv.fr/dajoeap-liste-des-guides-gem (Portail Centre de documentation Economies-Finances)

· Site internet http://www.marches-publics.legibase.fr/newsletter/136

· Site internet http://www.patrickloquet.fr (Maître de conférences en droit et consultant, dédié aux clauses sociales dans les marchés publics)

67

 

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

Annexes

Annexe 1 : Schéma récapitulatif des possibilités d'inclusion de critères sociaux et environnementaux dans les marchés publics

Annexe 2 : A quelle disposition du Code des Marchés Publics recourir pour intégrer le DD dans la commande publique ?

Annexe 3 : Suivi de l'intégration des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics pour lesquels B. Braun Medical était soumissionnaire

Annexe 4 : La performance globale sous l'angle de la triple injonction « dire-faire-évaluer »

Annexe 5 : Exemples d'intégration du développement durable dans les marchés publics de produits de santé

Annexe 6 : Leaflet Ecoflac? - solution valorisation matière

 

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

Sanction d'exécution

éventuelle du en

cours

marché

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Annexe 1

Schéma récapitulatif des possibilités d'inclusion de critères sociaux et environnementaux dans les marchés publics

69

 

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

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Annexe 2

A quelle disposition du Code des Marchés Publics recourir pour intégrer le DD dans la commande publique ?

 

Pour le pouvoir adjudicateur

Commentaires

Intégrer des clauses sociales et environnementales dans la définition de l'objet du marché (art.5)

Il s'agit de la façon la plus rapide, la plus directe, mais surtout la plus transparente pour signifier aux fournisseurs qu'une politique d'achats responsables sera appliquée au marché considéré.

L'engagement (social et environnemental)

demandé aux soumissionnaires devrait également être précisé, au sein des clauses techniques (CCTP) ou des critères d'attribution (art.53) => Jurisprudence pas réellement disposée à sanctionner l'absence de prise en compte du DD dans la déf° du marché

=> Jurisprudence sanctionne le recours à des critères sociaux, dits trop éloignés avec l'objet du marché

Définition de spécifications techniques mesurables (art.6)

Il s'agit de définir

-des normes techniques environnementales ou sociales, ou équivalent (critères écolabels ou labels sociaux)

-des exigences de performance précises

- des méthodes et processus de production.

Les spécifications techniques permettent au pouvoir adjudicateur d'énoncer les exigences minimales que le produit ou service doit remplir afin d'être considéré.

Grande technicité / expertise requise pour l'acheteur !!

Les spécifications techniques ne pouvant être discriminatoires, il conviendra de préciser systématiquement « ou équivalent », lorsqu'il sera fait référence aux normes techniques

Prévoir dans le CCAP une ou des condition(s) sociale(s) et/ou environnementale(s) d'exécution (art. 14), par exemple un nombre minimum d'heures d'insertion professionnelle de tous les publics bénéficiaires assortie de clauses de contrôle et de sanction.

Permet d'imposer aux entreprises soumissionnaires de s'engager à réaliser une action d'insertion correspondant à un volume déterminé d'heures de travail.

Permet d'imposer aux entreprises soumissionnaires des exigences environnementales (ex : tous les soumissionnaires devront s'engager à collecter les emballages ainsi que les produits arrivés en fin de vie, fournis dans le cadre du marché)

Implique de connaître au préalable la situation locale en matière d'emploi et l'offre d'insertion professionnelle de tous les publics éloignés de l'emploi effectivement mobilisable pour exécuter le marché.

Implique de connaître les compétences particulières en lien avec l'environnement et nécessaire à la réalisation du marché.

L'engagement (social et/ou environnemental) demandé aux soumissionnaires doit être précisément fixé, au sein des clauses techniques (CCTP) ou des critères d'attribution (art.53)

Eviter les clauses « fourre-tout » (trop générales), les clauses « parfaites » (trop exigeantes), les clauses « incohérentes » (voire contradictoires avec l'objet du marché), les clauses

« invérifiables » (fondées sur du non-tangible, non-mesurable, non-vérifiable) ou encore les clauses « déplacement de pollution ».

Réserver certains marchés à des structures d'insertion professionnelles de

Permet de réserver des marchés ou des lots : - à des entreprises adaptées (EA) ;

- aux établissements et services d'aide par le travail (ESAT) ;

Implique une bonne connaissance des fournisseurs potentiels de ces catégories et de leurs capacités de production.

70

« L'achat public responsable a-t-il vocation à soutenir

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- à des structures équivalentes employant principalement des personnes handicapées. Favorise à moyen terme le développement de ces structures.

 

personnels handicapés (art. 15)

Variantes (art. 50)

Permet de bénéficier de propositions plus

La variante doit être prévue dès l'avis de publicité.

 

innovantes que celles proposées par l'acheteur

Les documents de la consultation doivent prévoir

 

public (art. 14 et 53).

les éléments nécessaires à l'appréciation de la pertinence de la variante. L'ouverture de la commande publique aux variantes est un facteur de complexité de l'analyse des offres sur la base des critères annoncés.

 
 

Il convient de mettre en place une méthodologie d'analyse transparente.

 
 

? C'est une option très utile lorsque les acheteurs publics ne sont pas sûrs de la disponibilité de certains services/travaux/produits sur le marché.

Prévoir un critère social

Peut inciter de manière transparente les

La jurisprudence assoupli le lien entre l'objet du

et/ou environnemental

entreprises soumissionnaires à présenter des

marché et l'insertion professionnelle, mais le

parmi les critères

offres performantes en matière d'insertion

marché doit être susceptible d'être exécuté, au

d'attribution des

professionnelle et/ou d'environnement.

moins en partie, par des personnels engagés dans

marchés (art. 53)

Mise en place d'une pondération favorisant les

une démarche d'insertion.

 

offres performantes en matière d'insertion

Pas d'obligation de combiner l'article 53 I. 1° avec

 

professionnelle et/ou d'environnement.

une clause d'exécution de l'article 14.

 
 

Attention :

 

Ces critères d'attribution permettent au

- affecter au critère un poids raisonnable pour ne

 

pouvoir adjudicateur d'indiquer ce qu'il serait

pas être discriminatoire, mais suffisamment

 

préférable...mais pas à n'importe quel prix.

important pour être significatif ;

 
 

- annoncer dès l'avis de publicité de marché le critère des performances en matière d'insertion professionnelle de tous les publics en difficulté ;

 
 

- indiquer clairement dans le règlement de la consultation les éléments qui seront pris en compte pour l'appréciation des offres ;

 
 

- être en mesure d'apprécier objectivement les offres grâce à une grille d'indicateurs de performances en matière d'insertion professionnelle, de contrôler le respect des engagements pris et prévoir dans le CCAP les sanctions.

 

Favorise à moyen terme le développement des

 
 

entreprises adaptées ou structures équivalentes au sens des directives

Objet limité

Privilégier certaines structures au moment de l'attribution des marchés (droit de préférence de l'art. 53

2004/17/CE et 2004/18/CE.

 

IV)

 
 
 

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Annexe 3

Suivi de l'intégration des clauses sociales et environnementales dans les marchés publics
pour lesquels B. Braun Medical était soumissionnaire

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Annexe 4

La performance globale sous l'angle de la triple injonction « dire-faire-évaluer »

 

L'organisation

Ses parties prenantes

L'organisme
tiers-indépendant

DIRE

Façon dont la

performance globale est évoquée

Intentions, allégations

Rendre compte des actions
RSE réalisées

Partagent leur propre expérience
auprès de la communauté

Partagent les bonnes et les
mauvaises pratiques RSE dont ils
ont pu avoir connaissance

Peut être amené à partager les bonnes pratiques qu'il a

lui-même observées

(pas systématique)

FAIRE

Façon dont la

performance globale est pratiquée

Projets RSE en cours

Challengent et stimulent la
stratégie RSE de l'organisation

Audite le système de
management de la RSE de
l'organisation

EVALUER

Façon dont la

performance globale est mesurée / validée

Suivi des KPI de la stratégie

RSE

Analyse et retour
d'expérience sur les actions
RSE réalisées

Possibilité de se rassembler afin de mener des « class actions » (pouvant entraîner une décision de justice)

Rôle de lanceurs d'alerte auprès d'associations de défenses des consommateurs/patients...

Valide ou invalide la
performance globale au sein
de l'organisation

Pouvoir d'influence sur la stratégie RSE de l'organisation

73

 

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Annexe 5

Exemples d'intégration du développement durable dans les marchés publics de produits de santé
(consultations reçues par B. Braun Medical et référencées selon leur n° Eurydice)

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75

 

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76

 

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la performance globale du système de santé ? » | MBA MARPO 2014-2015

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Annexe 6

Leaflet Ecoflac? - solution valorisation matière

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore