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Le BIM: enjeux juridiques et contractuels

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par Stanislas Audibert
ENSAPVS - Architecte 2018
  

Disponible en mode multipage

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Stanislas AUDIBERT ENSAPVS

Février 2018

MEMOIRE DE FIN D'ETUDES

Séminaire MN2BIM : De la maquette Numérique au BIM

Le BIM : enjeux juridiques et contractuels

Les problèmes juridiques et contractuels qu'engendre l'arrivée du BIM sont-ils justifiés?

Sous la direction de Monsieur O. BOUET

Encadré par Monsieur T. SEHAD & Monsieur N. BOUTROS

Ce mémoire est rattaché au Laboratoire EvcAu

3

Remerciements

La rédaction de mon mémoire a été possible grâce aux interviews de plusieurs personnes qui ont eu le temps de me donner leur opinion sur le sujet. Je souhaite particulièrement remercier Maître Benoît-Renaudin (avocate au Barreau de Paris), Monsieur Trehen (Directeur BIM chez Egis), Monsieur Darremont (Directeur BIM à la Fédération Française du Bâtiment) et Monsieur Celnik (Architecte DPLG, enseignant à l'ENSAPVS et directeur du Mastère spécialisé BIM à l'ENPC et ESTP).

Je souhaite également remercier mes professeurs référents de mémoire : Monsieur Bouet (Professeur à l'ENSAPVS), Monsieur Sehad (Professeur à l'ENSAPVS) et Monsieur Boutros (Professeur à l'ENSAPVS). Ils m'ont guidé tout au long de ce travail.

Avant-propos

C'est en participant au séminaire : De la maquette numérique au BIM1 dispensé dans mon école d'architecture et en discutant avec des acteurs spécialisés au BimWorld 2017 de La Défense à Puteaux que j'ai commencé réellement à m'intéresser au BIM. En effet, ce sujet me tient particulièrement à coeur puisqu'il représente selon moi l'avenir aussi bien du monde de l'architecture, de la construction et de l'immobilier. Les étudiants en architecture étant peu informés sur ce domaine, cela été une chance pour moi de le découvrir et d'apprendre plus à son sujet. Par conséquent, j'ai souhaité m'interroger, dans le cadre de mon mémoire de Master d'architecture, sur la problématique du BIM, son avancée en France et particulièrement sous l'angle du droit.

En parallèle de mes études d'architecture à l'ENSAPVS2, je suis des cours de droit de l'immobilier à ICH-CNAM3 à Paris. Ainsi, je voulais une problématique qui englobe les deux domaines de compétences : Architecture et Droit.

Ce mémoire est destiné aux architectes, et non aux juristes ou autres praticiens du droit, qui veulent mieux comprendre les freins juridiques du BIM.

Le monde du Droit étant quelque chose d'extrémement changeant, ce mémoire est amené à évoluer.

4

1 [Voir glossaire page 103]

2 Ecole Nationale Supérieure d'Architecture de Paris Val-de-Seine

3 Institut de droit et d'économie appliqués à l'immobilier appartenant au Conservatoire National des Arts et Métiers

Résumé & Mots-clés

Après avoir rappelé les différentes généralités concernant le BIM et notamment les niveaux de développement de la maquette numérique qui aura des répercutions sur les droits de propriété de celle-ci et les responsabilités des acteurs. Dans un deuxième temps, j'ai étudié le cadre légal actuel en France en terme de BIM et je l'ai comparé avec ce qui se fait dans les autres pays. Le France a voulu ne pas l'imposer dans ces marchés de contrats de travaux contrairement à d'autres, comme Singapour, les pays scandinaves et la Grande Bretagne. Dans la dernière partie j'ai essayé de montrer que le BIM pouvait s'adapter aux contrats actuels en les adaptant.

Mots-clés:

5

BIM/Contrat/Juridique/Responsabilités/Propriété intellectuelle/BIM Manager/Protocole

6

Sommaire

Remerciements 3

Avant-propos 4

Résumé & Mots-clés 5

Introduction 7

I - Le BIM : Généralités 9

A- Les origines 9

B - Signification du terme «BIM» 9

C - L'interopérabilité 12

D - Les niveaux d'informations ou de maturité du BIM 14

E - Les niveaux de détails du BIM ou LOD (anglais) 16

F - Les atouts du BIM 17

H - Les freins à la progression du BIM en France 20

II - Constat Législatif du BIM en France 22

Introduction 22

A - Constats législatifs 25

1 - Constat Législatif en France 25

2 - Et les autres pays: où en sont-ils ? 32

3 - La France en retard ? : Analyse critique 35

B - Les sources d'interrogations du BIM 41

1 - Notion de propriété intellectuelle et de droits d'auteur 41

2 - La traçabilité des informations et traitement des données 46

3 - Les responsabilités 48

III - Vers un « contrat BIM » ' 55

A - Les modalités contractuelles 55

B - Le Protocole BIM (ou convention BIM) 59

C - Un nouvel acteur: Le BIM Manager - responsable du BIM Management 63

D - Exemple des Contrats MAF : opinions 70

Conclusion 73

Annexes 74

Les entretiens 74

A - Monsieur Jean Paul TREHEN 74

B - Maître Cécile Benoît-Renaudin 81

C -Monsieur Didier DARREMONT 87

D - Monsieur Olivier CELNIK 91

Table des iconographies 101

Glossaire technique 102

Glossaire juridique 106

Bibliographie 111

7

Introduction

L'architecte a toujours essayé de trouver des moyens de représenter ses idées et concepts par le dessin de représentation et le dessin technique lors de la conception (en 2 dimensions ou 3 dimensions que cela soit par le dessin, les maquettes, à la main ou au moyen des outils informatiques). Ces différentes modes de représentations permettent de promouvoir son projet auprès de son client mais également de concevoir le projet au fur et à mesure de son avancée et de communiquer ses intentions aux autres intervenants (Bureaux d'études techniques, constructeurs, client, etc.). Le problème est que la représentation faite par l'architecte doit changer en fonction des différents acteurs. Le client souhaitera des vues d'ensemble afin de se rendre compte du bâtiment final alors qu'un bureau d'étude voudra des détails techniques, coupes, plans à différentes échelles afin de concevoir le projet. Les projets devenant de plus en plus complexes (nombres d'intervenants grandissants, normes de plus en plus complexes, etc.), les différents acteurs cherchent à diminuer les coûts en améliorant la communication entre eux et à réduire les erreurs lors de la conception du bâtiment. Pour cela, une nouvelle façon de travailler a vu le jour: le BIM, dans le but de faciliter ces échanges par l'intermédiaire d'une maquette numérique en trois dimensions utilisable et partageable par tous les acteurs. Cette maquette numérique est une solution idéale pour faciliter le travail de l'architecte afin de montrer ses intentions aux clients le plus précisément possible mais également de concevoir le bâtiment avec les autres acteurs de la construction afin d'éviter les erreurs dès la conception. Elle est presque une représentation parfaite de ce que sera le projet construit. Le BIM n'est pas seulement un outil technique, il ne se réduit pas à une maquette numérique, mais est également une nouvelle façon de travailler et de collaborer entre les acteurs toujours plus nombreux dans les projets de construction.

Suite à mes recherches, j'ai remarqué que le BIM était freiné par le scepticisme certes mais aussi par un régime juridique encore incertain qui n'incite pas ou n'oblige pas les acteurs à l'utiliser. En effet, le changement de législation reste global c'est à dire à l'échelle du domaine de la construction, de l'architecture et de l'immobilier et ne s'adaptent donc pas aux projets alors que les contrats s'adaptent à chaque projet et à chacune de ses particularités.

Le droit doit donc évoluer certes par l'amélioration des lois à l'échelle de l'Etat afin d'inciter l'utilisation du BIM dans tous les domaines mais ces évolutions seront plus efficaces si les

8

contrats de constructions et de marchés de travaux sont adaptés. Ce ne sera pas la loi qui fixera un cadre unique et rigide, mais au contraire le contrat, plus souple, qui devra prendre en compte les spécificités de chaque projet avec son contexte et les relations avec ses acteurs. C'est grâce à l'amélioration de l'outil contractuel que les tâches, les missions, le travail collaboratif inhérent au BIM seront précisés et qu'en cas de difficultés, leur origine et la recherche des responsabilités pourront être établis. Je me suis donc intéressé à répondre à la problématique suivante:

Les problèmes juridiques et contractuels qu'engendre l'arrivée du BIM sont-ils justifiés ?

Afin de répondre à cette question, je me suis tout d'abord intéressé à expliciter ce qu'était le BIM, ses grandes particularités. Dans un second temps, je m'attarderai sur le constat juridique actuel (législatif) dans son ensemble afin de comprendre ce qui bloque sur sa bonne avancée et voir ce qui pourrait être amélioré. De plus, je ferai la liste des interrogations qu'engendre l'arrivée de ce nouvel outil collaboratif. Dans un dernier temps, j'effectuerai une analyse contractuelle afin de voir à quoi pourrait ressembler un contrat dans un projet BIM.

Ce mémoire sera articulé des avis recueillis par différents acteurs du bâtiment qui ont bien voulu répondre à toutes mes questions.

9

I - Le BIM : Généralités

A- Les origines

Le BIM trouve ses origines dans le monde de l'aviation. En effet, les entreprises comme Dassault System a développé depuis plus de 20 ans un logiciel appelé CATIA permettant de concevoir une maquette en trois dimensions de l'avion (le produit) avec tous ses détails jusqu'aux plus petites pièces. Pourquoi ne pas l'envisager pour un bâtiment? C'est à l'initiative de l'architecte Franck Gehry qui utilise ce concept afin de concevoir le premier bâtiment au monde construit entièrement par modélisation : le «Poisson de Barcelone».

Fig. 1 Le poisson de Barcelone de l'architecte F. Gehry [ https://misskaparis.wordpress.com/tag/frank-gehry/]

B - Signification du terme «BIM»

BIM est un acronyme venant de l'anglais dont les deux premières lettres signifient «Building Information» pour les deux premières lettres. Le «M» a quant à lui plusieurs facettes : «Model» (Modélisation), «Modeling» (collaboration) ou «Management» (gestion de projet).

· Le «Model» représente la maquette numérique. Il s'agit donc du modèle de représentation en trois dimensions qui représente le futur bâtiment avant sa construction avec l'ensemble des objets volumiques (plafonds, dalles, poteaux, poutres, conduites de ventilation, etc.) et leurs caractéristiques permettant de représenter le plus fidèlement le bâtiment construit. Ceux-ci sont renseignés dans une base de données unique. Il s'agit donc de la construction et l'utilisation de la

10

maquette de façon isolée. Le «Model» permet donc d'anticiper la construction du bâtiment et diminue ainsi les erreurs avant la construction.

· Le «Modeling» représente les différentes collaborations possibles entres les acteurs ayant des logiciels de simulations différents. En effet, chaque logiciel à un ensemble d'objets intelligents ayant chacun des caractéristiques propres et permettant de modéliser des phénomènes comme le comportement d'une structure, le comportement acoustique et thermique d'un mur. Il s'agit de l'acte de construire avec tous ces comportements associés. Dans ce cas, se pose la question de l'interopérabilité des logiciels spécialisés entre eux. Par exemple, le logiciel TEKLA4 permettant de calculer une structure et ClimaWIN5 permet de simuler le comportement thermique d'un bâtiment. En effet, ces deux logiciels sont dissociés, ne simulent pas les mêmes phénomènes et auront besoin de données pour résoudre les problèmes d'interopérabilités. Toutes les caractéristiques incorporées dans les objets de la maquette permettent donc de simuler le comportement d'un bâtiment. Il s'agit de l'acte de construire, de dessiner sur ordinateur avec des comportements associés. Analyser le comportement du bâtiment avant sa construction permet d'améliorer les choix et d'optimiser les éléments qui composeront le futur bâtiment avant sa construction.

· Enfin le «Management» représente une nouvelle façon de gérer le projet. Il s'agit de la collaboration entre les différents acteurs du projet BIM. Ce management qui permet de donner une autre ampleur au BIM en donnant une grande importance du côté «humain» au projet. Les erreurs sont réduites en structurant la collaboration et en gérant plus efficacement les échanges et les données du bâtiment modélisé. Les acteurs ne travaillent plus de façon dissociés mais de façon collaborative autour de la maquette numérique. Travailler ensemble dès la phase de conception permet de réduire les coûts, d'améliorer le projet dans son ensemble...

Contrairement à ce que beaucoup de personnes pensent le BIM n'est pas seulement de la 3D, ni un logiciel. C'est en partie une maquette numérique où le professionnel ne manipule plus de simples lignes (comme auparavant avec le logiciel AutoCAD) mais des «objets

4 Tekla est une société finlandaise développant des logiciels à destination de la construction et de l'ingénierie.

5 ClimaWin est le logiciel intégré qui réalise tous les calculs nécessaires à une étude thermique d'un bâtiment.

sémantiques» qui ont leurs propres caractéristiques. La maquette numérique est donc associée à une base de données de tous ces objets intelligents. Le BIM ne se réduit ainsi pas à un logiciel de 3D mais englobe aussi le côté managériale d'un projet de construction. Il révolutionne la manière de travailler et de collaborer au sein d'un projet.

11

Fig. 2 La gestion des documents dans un projet avant et après l'arrivée du BIM [ https://www.bimportal.be/fr/bim_fr/general/caracteristiques/]

Un récent rapport publié par le PTNB en Décembre 2017, redéfinit plus clairement la notion de BIM : «Stratégie française pour les actions de pré-normalisation et normalisation BIM appliqués au bâtiment»6. Celui-ci essaie de donner une approche de la futur normalisation du BIM et crée une nouvelle définition non plus basé sur cette notion tripartie : Model, Modeling et Management mais l'étend aux «acteurs», «Machines» et «Terminologie». Je ne m'étendrai pas sur cette notion sachant ces nouvelles terminologies n'impacteront pas la suite de mon mémoire.

6 Rapport publié par le PTNB : Stratégie française pour les actions de pré-normalisation et normalisation BIM appliquées au bâtiment, Décembre 2017

12

Fig. 3 "Schéma à étages de la nouvelle normalisation du BIM appelé «Big Picture» [ http://www.cohesionterritoires.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_mission_numerique_batiment.pdfJ

C - L'interopérabilité

Avant de parler d'interopérabilité, nous parlons de maquette numérique en closed BIM (BIM fermé). Il s'agit du BIM défini en format propriétaire. Lorsqu'il y a partage de la maquette numérique sous format IFC (nous y reviendront par la suite) on parle d'open BIM (BIM Ouvert, ne pas confondre avec «OpenBIM» qui est une association d'éditeurs de logiciels de modélisation qui la production des échanges IFC7) afin que les autres utilisateurs interopèrent sur celle-ci. Le problème de cette collaboration est l'opérabilité entre tous les acteurs et donc entre les différents logiciels utilisés. En effet, «l'association de disciplines complémentaires dans un travail collaboratif assumé pose les termes d'un processus ouvert capable d'intégrer de nouvelles propositions, constructives et architecturales, dégagées de l'intérêt unique du porteur d'une maquette intégrée : c'est l'open BIM»8. Un format informatique d'échange permettant de partager les fichiers venant de logiciels différents a

7 [Voir glossaire page 103]

8 HOYET Nadia, DUCHENE Fabien & DE FOUQUET Marc, BIM et Architecture, Editions Dunod, p14

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été mis en place afin d'assurer cette «interopérabilité : le format IFC9 (Industry Foundation Classes) créé par l'association BuildingSMART10. Il est le format le plus utilisé dans le monde et est maintenant une norme appelée ISO 16739 : 2013. Les soucis récurrents faits suite à l'utilisation de ce format sont les conversions faites lors d'échanges de maquettes entre les différents logiciels. En effet, le passage d'un logiciel à un autre en passant par le format IFC s'effectue en deux temps:

Fig. 4 Schéma d'interopérabilité des IFC entre les logiciels les plus utilisés sur le marché [ https://www.scoop.it/t/genie-civil]

L'un convertissant le format d'origine du premier logiciel en IFC (export) et l'autre convertissant l'IFC en format du deuxième logiciel (import). Ce double flux crée beaucoup de risques d'erreurs et reste encore un problème majeur. Ce format est encore en développement par BuildingSMART et les acteurs utilisant le BIM sont en attente d'une interopérabilité véritable.

9 [Voir glossaire page 103]

10 [Voir glossaire page 103]

14

D - Les niveaux d'informations ou de maturité du BIM

D'après l'Ordre des architectes11, Le BIM est «un processus de gestion collaboratif du projet reposant sur les échanges et l'enrichissement de la maquette numérique par les acteurs du projet»12. Il existe plusieurs niveaux de ce processus en fonction du nombre d'informations présentes, en fonction de leur maturité. Ces niveaux permettent d'arriver petit à petit au processus collaboratif BIM. La compréhension de ces différents niveaux est très importante puisqu'ils vont nous permettre de comprendre dans les parties suivantes les questions de responsabilité en fonction du niveau de BIM sur lequel on résonne. Il s'agit d'un niveau d'information non graphique.

Le Niveau 0

On ne parle pas encore de BIM puisque c'est le niveau CAO13 en deux dimensions. C'est celui qui est encore très utilisé dans le monde. Il existe des normes de dessin mais chacun les utilise de façon différentes ce qui rend complexe la juxtaposition des informations. Un cabinet d'architecture utilisera des calques, des couleurs et des épaisseurs de traits par exemple qui ne seront pas en adéquation avec le bureau d'étude avec qui il travaille. « Saisir l'essentiel du BIM passe a minima par l'exposé de sa définition. La définition du BIM va de pair avec le niveau du BIM ou l'indicateur du niveau de collaboration du procédé »14.

Niveau 1 - BIM dit «isolé» ou «lonely BIM»

Il s'agit du niveau où la maquette numérique est créé par un seul acteur pour son usage unique (un architecte qui crée des plans par exemple et en extrait des livrables pour le client ou le constructeur afin qu'il édifie le bâtiment. Il s'agit de représentations 2D ou 3D qui ne sont pas modifiables par personne d'autre que celui qui l'a crée. Il n'y a donc pas de collaboration à ce niveau.

11 [Voir glossaire page 103]

12 Auteurs?, Le BIM un atout pour l'architecture, publié par l'ordre des architectes en Juillet 2015, www.architectes.org

13 Conception Assistée par Ordinateur [Voir glossaire page 103]

14 D. Richard, «BIM : analyse et perspectives de l'immeuble numérique», Construction-urbanisme N°12, Décembre 2017

15

Niveau 2 - BIM dit «collaboratif ou partagé»

Ce niveau représente des documents créés par plusieurs acteurs du projet et ceux-ci sont ensuite comparés, complétés et enrichis. Il peut s'agir par exemple de l'architecte qui fait une proposition de structure avec des plans au bureau d'étude qui lui-même le compare avec ses plans de structure. C'est le travail qui a été effectué lors du projet de séminaire de la maquette numérique au BIM. Chacun produisait une maquette numérique et l'aller-retour s'est fait en modifiant la maquette structure de l'architecte par exemple en prenant en compte les remarques des ingénieurs. Une détection de clashs était effectuée à partir d'un logiciel spécialisé afin de comparer les deux maquettes et de voir leurs discordances.

Niveau 3 - BIM dit «intégré ou centralisé»

Celui-ci représente un processus de conception encore plus élevé dans le BIM avec la réalisation d'une maquette qui est mise sur un serveur et accessible à tous les acteurs concernés du projet avec des droits d'accès bien déterminés afin de ne pas empiéter sur les ajouts ou modifications de chacun sur la maquette. Il s'agit maintenant d'une maquette dite «concourante et collaborative» alors qu'elle n'était que «séquentielle» sans le BIM. La collaboration s'effectue plus en amont grâce au BIM. La conception d'un bâtiment à ce niveau de BIM n'est techniquement pas encore possible sauf dans un environnement où chaque acteur utilise le même logiciel. Ce niveau pose de sérieuses questions de responsabilités en cas de fautes effectuées sur la maquette qui se répercute sur le chantier. J'y reviendrai dans la suite de ce mémoire.

Fig. 5 Les différents niveaux d'informations ou de maturité du BIM [ https://www.islean-consulting.fr/fr/transformation-digitale/definition-bim/]

16

E - Les niveaux de détails du BIM ou LOD15 (anglais)

La maquette numérique étant composée d'objets, ceux-ci possèdent des niveaux de définitions de description dite de «granularité», une échelle de définition évoluant au fil de l'avancée du projet. Chaque LOD possède un niveau de détail de données et définit une phase de développement du projet bien précise. Par conséquent, le niveau de détail des objets va augmenter en fonction de l'avancée du projet. Ce niveau de détail peut également varié en fonction de l'intervenant qui a dessiné l'objet. On parlera ici des «vues métiers». Par exemple, un architecte s'intéressera à la partie visible d'un élément d'une fenêtre alors que le fournisseur de celle-ci à l'assemblage des pièces qui la composent. Il définit donc le degré de définition géométrique de la représentation graphique des objets. On parlera de ND1 (Niveau de Développement 1 en français pour un LOD100 en anglais. Le graphique suivant montre bien le niveau de définition augmentant en fonction de l'avancée du projet et des livrables établis.

Fig. 6 Niveau de détails BIM en fonction de l'avancée du projet https://www.isleanQconsulting.fr/fr/transformationQ digitale/definition-bim/

15 Level Of Detail (Anglais), Niveau de Détail (Français) [Voir glossaire page 103]

17

F - Les atouts du BIM

Le BIM profite à tous les acteurs du secteur de la construction, de la maitrise d'ouvrage (immobilier), de la maintenance et de l'architecture et procure à chacun des avantages si ils sont bien mis en oeuvre. En voici quelques atouts:

· Meilleure collaboration entre les acteurs du projet et la production de documents

Un des grands avantages du BIM est qu'il met en place une nouvelle façon de travailler entre tous les acteurs d'un projet de construction. En effet, le fait de réunir les informations sur une seule et même maquette permet de réduire le temps de conception du projet de façon considérable. «Cette somme d'études accumulées devient plus riche que la somme des études isolées car son existence sous-entend que les problèmes ou conflits qui ont pu apparaître au sein de l'équipe de maîtrise d'oeuvre ou entre les divers corps d'états sont résolus»5.

Par conséquent, le fait de résoudre des problèmes en amont grâce à une meilleure communication permet de réduire les erreurs et donc augmenter le temps pour la réalisation. De plus, cela permet à l'architecte de mieux communiquer avec les autres acteurs et permet de réduire les erreurs en mettant en place des détections de «clash».

Fig. 7 Comparaison de l'impact effectuée par le BIM par rapport à la CAO [ http://www.bimperform.com/besoin-de-muter-vers-bim/]

· 18

Un atout pour redynamiser le métier d'architecte

Le BIM permet à l'architecte tout d'abord de mieux maitriser la conception de son projet puisqu'il peut modifier plus rapidement les données qui se répercutent immédiatement sur les rendus à fournir aux autres acteurs : coupes, plans, détails techniques... Les rendus sont donc plus cohérents entre eux et présentent moins d'erreurs (dimensionnelles, techniques, etc.). Cette maquette numérique permet également d'essayer plusieurs solutions architecturales bien plus facilement et rapidement lors de la conception. Cela permet également à l'architecte de vérifier plus rapidement le projet dès la conception par rapport aux réglementations en vigueur (incendie, personnes à mobilités réduites, etc.) et de créer des bâtiments plus performants notamment énergétiquement. C'est comme si l'architecte ne se contentait plus de concevoir le bâtiment mais aussi de convaincre le client et surmonter les obstacles plus en amont.

· Un atout pour multiplier les compétences de l'architecte de l'architecte

Le BIM permet également d'étendre le domaine de compétence de l'architecte sur des missions autres que la conception et le suivi de projet. L'architecte se voit dorénavant proposer des missions qui vont au delà de la réalisation de l'ouvrage c'est à dire suivre un bâtiment tout au long de son cycle de vie.

o Missions de Maitrise d'oeuvre:

Il va notamment appartenir à l'architecte de concevoir la maquette numérique certes mais également de la gérer. Cela donne lieu à de nouveaux métiers pour l'architecte tel que le BIM Manager: chef d'orchestre collaboratif de la maquette entre tous les acteurs (j'en reparlerai dans la partie III).

o Missions de post-maitrise d'oeuvre:

Maintenant que la maquette numérique existe, les Dossiers des Ouvrages Exécutés (DOE) et le Dossier des Interventions Ultérieures sur l'Ouvrage (DIUO) sont maintenant extraits numériquement de celle-ci. L'architecte peut se voir proposer de gérer le bâtiment après sa construction et de le suivre numériquement. Le Maitre d'ouvrage peut être

19

intéressé par ce genre de prestations de l'architecte : acteur qui connait le mieux le projet puisque c'est lui qui l'a conçu.

o Missions d'exploitation et de maintenance:

L'architecte peut se voir proposer des prestations de service après la construction, lors de l'exploitation et de la maintenance du bâtiment. Il peut mettre à jour la maquette et permet au Maitre d'ouvrage d'avoir un vrai conseiller «technique» lui informant sur son patrimoine construit. Il peut le conseiller notamment sur les performances énergétiques, les métrés... «La qualité des données de la maquette numérique sera un enjeu dans les années à venir».

· Garantir les performances énergétiques, acoustiques...

En effet, la maquette numérique est composée d'éléments ayant chacun leurs caractéristiques techniques bien précises. En évaluant la maquette numérique sur des logiciels de simulations thermique, acoustique, etc., cela permet de voir comment le bâtiment se comporte et évaluer ses performances techniques. Le bâtiment peut être optimisé dès la conception et donc réduire les coûts des changements, d'autant plus coûteux que l'on est avancé dans le projet.

· Gain de temps à toutes les étapes du projet grâce à une connaissance technique de l'ouvrage

Le projet est «construit» virtuellement en trois dimensions. Dans le domaine de la construction, plus un problème survient en amont d'un projet, plus vite il est résolu et plus il y a un gain de temps. Anticiper les erreurs de conception permet ainsi de mieux connaître techniquement le bâtiment dès le commencement du projet et donc gagner du temps tout au long du projet.

20

Réduction de sinistralité

La maquette numérique du bâtiment permet ainsi de réduire les sinistres par la modélisation des comportements du bâtiment avant qu'il soit construit. Elle permet d'anticiper les problèmes et donc réduire la sinistralité du projet.

Communication plus facile aux utilisateurs non-experts

Bien évidemment, cela permet de montrer aux personnes non-expertes une maquette qui représente l'intégralité du projet. C'est donc un outil de communication permettant de faire comprendre le projet à des non-sachants plus facilement que les simples coupes ou plans.

Meilleure gestion de la construction

La maquette numérique va également être utile pour la phase travaux. En effet, celle-ci va permettre de corriger à l'avance les conflits géométriques et sémantiques qui auraient pu intervenir lors de la construction. On va pouvoir simuler entièrement le chantier. Le fait que la maquette numérique soit réalisée avec précision, crée une plus grande confiance pour tous les acteurs et évite de faire des erreurs quantitatives et qualitatives. Tous les clashs seraient sûrement intervenus sur le chantier donc leur résolution est une manière de réduire le coût des erreurs techniques et humaines. De plus, les sous traitants peuvent travailler ensemble grâce à cette unique maquette et être sûrs de commander les quantités exactes de matériaux à acheter et ainsi réduire leurs pertes par erreur.

H - Les freins à la progression du BIM en France

Avant d'aborder les freins juridiques, il me parait important de décrire les autres freins qui empêchent sa bonne évolution.

Les architectes restent souvent sceptiques vu le coût que requiert la mise en place du BIM au sein des agences. En effet, il faut d'abord que les architectes soient convaincus et passent le pas puis qu'ils choisissent les logiciels qu'ils veulent utiliser. En effet, ils sont relativement nombreux sur le marché (ArchiCAD et REVIT pour les plus connus) et sont proposés à des prix onéreux puisqu'ils sont jusqu'à environ 5000/6000€ par poste informatique. La somme n'est pas négligeable et doit donc être vite rentabilisée si on ne veut

21

pas perdre en productivité. Les plus petites agences qui représentent la majorité des agences en France sont plus pénalisées que les autres qui ont des budgets plus importants.

Il faut également former les architectes qui sont généralement déjà dans l'agence et qui ont appris des méthodes de travail très ancrées et qui ne connaissent pas du tout ces nouveaux outils informatiques et cette nouvelle façon de travail collaboratif. Leur formation induit une perte de production des architectes dans l'agence et donc une perte de temps dans les projets en cours. Celles-ci sont proposées en lignes (les moins chers) ou étalées sur plusieurs jours dans des centres de formation spécialisés mais elles représentent un surcoût non négligeable.

Fig. 8 Les freins à l'adoption du BIM dans les entreprises

[ https://www.lemoniteur.fr/article/le-bim-c-est-maintenant-ou-presque-25511986]

22

II - Constat Législatif du BIM en France

Introduction

La bonne avancée du BIM est avant tout une histoire de collaboration et une nouvelle façon de travailler. Après avoir explicité les généralités concernant le BIM, je vais décrire les problèmes inhérents du BIM sous un volet juridique et contractuel. En effet, une nouvelle façon de travailler induit de nouvelles interrogations d'ordre juridique.

Les deux prochaines parties seront illustrées par les avis de professionnels de professions différentes que j'ai interrogé tout au long de ce semestre:

· Maître Benoit-Renaudin : Docteur en droit, avocate collaboratrice dans le cabinet Martin & Associés spécialisé en droit immobilier, et plus particulièrement en droit de la construction et en droit de l'urbanisme.

· Monsieur Trehen : Architecte DPLG16 et responsable BIM au sein de la multinationale Egis (Maitrise d'ouvrage et conseil).

· Monsieur Darremont : chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (représente les principaux constructeurs et maîtres d'ouvrages français).

· Monsieur Celnik : architecte DPLG, directeur du Mastère spécialisée BIM à l'ENPC17/ESTP18 et auteur de plusieurs ouvrages spécialisé en la matière.

Afin de mieux comprendre le fil conducteur de mon mémoire, il m'a semblé important de développer certaines notions juridiques de base:

· Toutes les règles de droit suivent une échelle hiérarchique bien déterminée. Elle est décrite dans la pyramide de la hiérarchie des normes (ci-dessous). Elle permet de garantir la cohérence de l'Etat de Droit qu'est la France. Toutes les normes supérieures prévalent sur celles qui leur sont inférieures. Par exemple, un contrat ne devra pas déroger à une loi qui lui est supérieure. Cette pyramide des règles de droit

16 Diplômé Par Le Gouvernement

17 Ecole Nationale des Ponts et Chaussées

18 Ecole spéciale des TZravaux Publics

23

a été créé par Hans Kelsen (1881-1973), théoricien de droit. Ainsi, durant la suite de mon développement, je suivrai cette hiérarchie des règles de droit en commençant par décrire les problèmes juridiques à l'échelle européenne (cf sur le schéma ci-dessous droit international et communautaire) et française (lois, décret, etc.) puis je terminerai par les problèmes d'ordre contractuel situé en bas de celle-ci.

CONTRAT

Fig. 9 Pyramide des Normes simplifiée [ http://stephanebernhard.franceserv.com/wp-content/uploads/2015/11/pyramide.jpg]

· Il existe deux grandes branches qui régit les personnes entres eux:

o le Droit privé19 : régit les relations entre personnes privées20 (particuliers, entreprises privées, etc.).

o le Droit public21 : régit les relations entre personnes publiques22 (l'état, les collectivité territoriales, etc.) entres-elles et entre les personnes publiques et personnes privées.

Lors de mon mémoire je ferai généralement référence au droit public car le droit privé dans le milieu de la construction y est beaucoup moins exigeant.

· Je ferai aussi référence à différents codes juridiques où sont inscrites les lois:

o Le Code Civil23 (abrégé C. Civ. ou CC) : Ce code régit l'ensemble des règles qui déterminent le statut des personnes (livre Ier), celui des biens (livre II) et celui

19 [Voir glossaire page 103]

20 [Voir glossaire page 103]

21 [Voir glossaire page 103]

22 [Voir glossaire page 103]

des relations entre les personnes privées (livres III et IV). Il a été promulgué sous l'Empire Napoléonien le 21 Mars 1804.

o Le Code de la Construction et de l'Habitation24 (abrégé CCH) : ce texte regroupe les dispositions législatives et réglementaires relatives à la construction, à la promotion immobilière, aux logements sociaux et à d'autres questions relatives à l'immobilier.

o Le Code de la Propriété Intellectuelle25 (abrégé CPI) : Il regroupe les lois régissant les deux branches de la propriété intellectuelle, que constituent la propriété industrielle et la propriété littéraire et artistique. Il est souvent mis à jour par le Parlement puisque nous sommes au coeur de la transition numérique du pays, et donc, les protections évoluent sans cesse.

· La jurisprudence26 qui est une source de règles de droit. Je tiens à préciser qu'elle est aujourd'hui inexistante concernant le BIM. Je n'y ferai donc pas référence.

24

23 [Voir glossaire page 103]

24 [Voir glossaire page 103]

25 [Voir glossaire page 103]

26 [Voir glossaire page 103]

25

A - Constats législatifs

1 # Constat Législatif en France

a - Directive27 européenne du 26 Février 2014

La législation en France relative au BIM et à l'encadrement de son utilisation dans les marchés de travaux est encore très floue. Il n'existe aucun texte français mentionnant explicitement l'utilisation du BIM dans les marchés de travaux. Les marchés privés de travaux ne sont pas réglementés au terme de BIM puisque les personnes privées entre elles restent libres d'utiliser les outils qu'elles veulent. Ce type de marché n'obligera donc jamais l'utilisation du BIM.

En marché public, une directive européenne 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE a vu le jour. Celle-ci dans son chapitre II, relative aux règles générales, cite dans son article 22 sur les règles applicables aux communications:

«1. Les États membres veillent à ce que toutes les communications et tous les échanges d'informations effectués en vertu de la présente directive, et notamment la soumission électronique des offres, soient réalisés par des moyens de communication électroniques, conformément aux exigences du présent article. Les outils et dispositifs utilisés pour communiquer par des moyens électroniques, ainsi que leurs caractéristiques techniques, ne sont pas discriminatoires, sont communément disponibles et compatibles avec les TIC généralement utilisées, et ne restreignent pas l'accès des opérateurs économiques à la procédure de passation de marché.

Nonobstant le premier alinéa, les pouvoirs adjudicateurs ne sont pas tenus d'exiger l'utilisation de moyens de communication électroniques lors du processus de soumission dans les cas suivant:

a) en raison de la nature spécialisée du marché, l'utilisation de moyens de communication électroniques nécessiterait des outils, des dispositifs ou des formats de fichiers particuliers qui ne sont pas communément disponibles ou pris en charge par des applications communément disponibles;

b) les applications prenant en charge les formats de fichier adaptés à la description des offres utilisent des formats de fichiers qui ne peuvent être traités par aucune autre application ouverte ou communément disponibles ou sont soumises à un régime de licence propriétaire et ne peuvent être mises à disposition par téléchargement ou à distance par le pouvoir adjudicateur;

4. Pour les marchés publics de travaux et les concours, les États membres peuvent exiger l'utilisation d'outils électroniques particuliers tels que des outils de modélisation électronique des données du bâtiment ou des outils similaires. Dans ces cas, les pouvoirs adjudicateurs offrent d'autres moyens d'accès, selon les dispositions du paragraphe 5, jusqu'à ce que ces outils soient devenus communément disponibles au sens de paragraphe 1, premier alinéa, deuxième phrase.»28

27 [Voir glossaire page 103]

28 http://www.marcheCpublic.fr/Directive0144CUE/22CreglesCapplicablesCauxCcommunications.html

26

Ainsi, à l'échelle européenne, il s'agit du seul texte mentionnant implicitement l'usage du BIM dans les marchés publics. Les états «peuvent exiger l'utilisation» seulement c'est à dire que chaque état membre a le choix d'imposer ou non l'utilisation du BIM dans leurs marchés publics de travaux. Cette directive reste donc très large et fait indirectement référence au BIM et à la maquette numérique. De plus, elle se réduit aux maîtres d'ouvrages publics et non au maîtres d'ouvrages privés, ce qui réduit son champ d'application de manière importante à tous les types de marchés de travaux.

S'agissant d'une «directive européenne», comme son nom l'indique, a été instauré à l'échelle européenne c'est à dire que «ce texte lie les États destinataires de la directive quant à l'objectif à atteindre, mais leur laisse le choix des moyens et de la forme pour atteindre cet objectif dans les délais fixés par elle»29. Elle a donc une force obligatoire dans chaque pays membre mais chacun modifie leurs textes de leur propre manière.

b # La transposition de cette directive dans le droit français

S'agissant d'une directive européenne, la France a dû ainsi la transposer dans son droit. Il s'agit donc de l'ordonnance30 du 23 Juillet 2015 relative aux marchés publics et de son décret31 d'application du 25 Mars 2016.

Comme j'ai pu le dire précédemment, la directive n'est pas directement relative au BIM puisqu'elle se limite à l'utilisation «d'outil électronique d'échanges et de communication»32. S'agissant d'une directive, l'état français pouvait transposer celle-ci de sa propre façon tant que les objectifs y soient réalisés. Les praticiens du droit ont ainsi voulu transposer directement celle-ci en mentionnant «la faculté des pouvoirs adjudicateurs de recourir à l'utilisation d'outils électroniques tels que des outils de modélisation du bâtiment ou des outils similaires pour les marchés de travaux et les concours»33. Ils mentionnent donc la possibilité aux maîtres d'ouvrage public d'obliger l'utilisation du BIM indirectement pour des projets d'ordres publics. C'est donc chaque maître d'ouvrage public qui a le choix d'imposer ou non son usage.

29 http://www.vieCpublique.fr/decouverteCinstitutions/unionCeuropeenne/action/textesCjuridiques/quCestCceCquCdirective.html

30 [Voir glossaire page 103]

31 [Voir glossaire page 103]

32 http://www.marcheCpublic.fr/Directive0144CUE/22CreglesCapplicablesCauxCcommunications.html

33 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, p.9

27

Ce texte étant réduit à «l'appel d'offre et aux concours» cela oblige soit les acteurs déjà utilisant le BIM dans leur structure à participer, ce qui réduit le choix des participants soit obliger les autres structures qui n'ont pas encore installer le BIM à s'y mettre dans un futur proche afin de pouvoir concourir à ce genre d'offre de marché de travaux.

Ci-dessous, l'article 42 du décret:

«I. - Les dispositifs utilisés pour communiquer par des moyens électroniques ainsi que leurs caractéristiques techniques ne sont pas discriminatoires et ne restreignent pas l'accès des opérateurs économiques à la procédure de passation. Ils sont communément disponibles et compatibles avec les technologies de l'information et de la communication généralement utilisées.

Les outils et les dispositifs de communication et d'échanges d'information par voie électronique répondent à des exigences minimales déterminées par arrêté du ministre chargé de l'économie.

II. - L'acheteur assure la confidentialité et la sécurité des transactions sur un réseau informatique accessible de façon non-discriminatoire selon des modalités fixées par l'arrêté mentionné au I. Les frais d'accès au réseau restent à la charge de l'opérateur économique.

Les communications, les échanges et le stockage d'informations sont effectués de manière à assurer l'intégrité des données et la confidentialité des candidatures, des offres et des demandes de participation et à garantir que l'acheteur ne prend connaissance de leur contenu qu'à l'expiration du délai prévu pour leur présentation.

III. - L'acheteur peut, si nécessaire, exiger l'utilisation d'outils et de dispositifs qui ne sont pas communément disponibles, tels que des outils de modélisation électronique des données du bâtiment ou des outils similaires. Dans ce cas, l'acheteur offre d'autres moyens d'accès au sens du IV, jusqu'à ce que ces outils et dispositifs soient devenus communément disponibles aux opérateurs économiques.

IV. - L'acheteur est réputé offrir d'autres moyens d'accès appropriés dans tous les cas suivants:

1° Lorsqu'il offre gratuitement un accès sans restriction, complet et direct par moyen électronique à ces outils et dispositifs à partir de la date de publication de l'avis d'appel à la concurrence ou de la date d'envoi de l'invitation à confirmer l'intérêt ou, en l'absence d'un tel avis ou d'une telle invitation, à compter du lancement de la consultation. Le texte de l'avis ou de l'invitation à confirmer l'intérêt précise l'adresse internet à laquelle ces outils et dispositifs sont accessibles;

2° Lorsqu'il veille à ce que les opérateurs économiques n'ayant pas accès à ces outils et dispositifs ni la possibilité de se les procurer dans les délais requis, à condition que l'absence d'accès ne soit pas imputable à l'opérateur économique concerné, puissent accéder à la procédure de passation du marché public en utilisant des jetons provisoires mis gratuitement à disposition en ligne;

3° Lorsqu'il assure la disponibilité d'une autre voie de présentation électronique des offres.»34

Ce décret un peu «timide» dans l'utilisation du BIM dans les marchés publics est du à plusieurs raisons. En effet, les outils numériques permettant l'utilisation du BIM et la

34 https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/3/25/EINM1600207D/jo#JORFSCTA000032296577

28

création de la maquette numérique ne sont pas «communément disponibles». Les outils ne sont pas encore suffisamment développés et coûtent chers à l'achat et l'utilisation. Ce serait discriminatoire d'obliger l'utilisation de matériel informatique que tout le monde ne pourrait obtenir car certains marchés seraient seulement accessibles par les grosses structures qui ont les moyens de payer ce genre de nouveaux outils informatiques. Les textes n'obligent pas l'utilisation du BIM mais ne l'interdit pas non plus. Chaque maître d'ouvrage public est donc libre ou non d'obliger son utilisation.

c#La Loi MOP

La loi MOP35 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée est une loi française qui régit les relations entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre. Elle très importante dans le droit français. Mais faudrait-il la modifier pour faire avancer l'apparition de ce nouvel outil de travail dans les marchés de construction publics?

Elle n'interdit en aucun cas l'utilisation du BIM. C'est pour cela, qu'il existe déjà plusieurs cas d'opérations publiques qui ont vu le jour en France. «Lors de la phase de mise en concurrence qui est régit par de forts principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement et de transparence des procédures»36 ne peut obliger tous les candidats à recourir au BIM lors de cette phase car cela créerait des discriminations. Ce qui n'incite pas forcément les acteurs qui veulent postuler à des offres de se mettre au BIM.

La modifier permettrait sans doute d'améliorer plusieurs points afin d'incorporer cette nouvelle façon de procéder. La loi MOP a 30 ans. Lui apporter une certaine souplesse juridique serait sûrement judicieux afin de l'adapter aux nouvelles technologies:

· Tout d'abord cela permettrait de l'adapter aux types de rendus attendus avec le BIM et à prendre en compte une plus grande complexité des acteurs induite par cette nouvelle façon de travailler. En effet, dans un processus BIM les exigences de rendu sont différentes et la phase de conception y est beaucoup plus poussée et arrive plus tôt dans le processus contrairement à un processus non «Bimé». «Les textes doivent

35 [Voir glossaire page 103]

36 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.14

29

donc être assouplis pour éviter une distorsion entre les exigences réglementaires et la réalité du processus de conception».37

· La loi MOP n'adapte pas son application à des marchés qui demandent des livrables autres que des plans 2D. Or, ici nous parlons de niveaux de détail (se référer à la première partie). Avant les livrables étaient séquencés de ESQ à DET. La loi MOP indiquait donc le rapport entre les acteurs en fonction de la phase d'exécution du marché. Avec l'arrivée du BIM, nous parlons de séquençage par niveau de détail, ce qui change beaucoup de choses quant à la succession des tâches et rend le rapport entre les acteurs bien plus complexe.

· De plus, certains législateurs estiment important de réglementer la mission de BIM Manager38. En effet, il s'agit du nouveau chef d'orchestre du processus BIM et il faut donc régulariser au moins dans ses grandes lignes, ses responsabilités et ses limites de «pouvoir» dans un projet pour qu'il n'y ait pas d'immixtion fautive39 en cas de problème. Je reviendrai plus précisément sur ce nouvel acteur dans ma dernière partie.

· De plus, elle doit être adaptée afin de rendre possible le rendu exclusif en BIM sur un projet, ce qui est difficile à l'heure actuelle.

d # Les autres initiatives de l'état français

De grands acteurs du secteur de la construction (Maîtres d'ouvrage, constructeurs, etc.) se sont mobilisés avec la demande de certains ministères afin d'aider et d'accélérer en quelques sortes l'émergence du BIM dans la filière. Il en existe un certain nombre dont je vais faire l'état des lieux:

· Rapport de la mission «Numérique du Bâtiment» de 2014

Ce rapport de mission lancé à l'initiative du plan de relance de la construction lancé par Sylvia Pinel, Ancienne Ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité divulgué le 2 Décembre 2014 et dirigé par Monsieur X. Delcambre (Président du CSTB40) nommé «ambassadeur du numérique» a été lancé. Ce rapport partait du constat que la

37 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.15

38 [Voir glossaire page 103]

39 [Voir glossaire page 103]

40 [Voir glossaire page 103]

30

construction de logement devait être améliorée, en particulier par l'utilisation du numérique pour produire des logements de meilleure qualité et satisfaisants aux enjeux environnementaux actuels. Ce rapport a permis à plusieurs dizaines d'acteurs, qu'ils viennent du secteur privé ou public, de donner leurs avis. Tous les acteurs attendent de l'état français qu'il mette en oeuvre une mécanique afin de faciliter l'utilisation du BIM dans le secteur. Il faut qu'il «fixe le cap en montrant la voie, l'Etat peut mobiliser et entraîner l'ensemble des acteurs dans une voie de progrès majeure pour le monde du bâtiment»41. L'état doit donc être un chef d'orchestre dans la bonne avancée du secteur. Il s'agit en quelque sorte d'un état des lieux et d'une feuille de route permettant aux différents acteurs de savoir comment avancer dans le numérique au niveau de leur structure. Il permet de définir «les perspectives de gains liés à l'usage du numérique dans le bâtiment en matière d'économie pour les travaux de construction, d'entretien, de maintenance et d'exploitation des bâtiments, de productivités liées à une meilleure maîtrise de l'information, et de création d'emplois»42.

Ce rapport suit quatre axes:

· Convaincre et donner envie à tous les acteurs

· Répondre aux besoins d'équipement et de montée en compétences numériques des acteurs, notamment des TPE/PME

· Développer des outils adaptés à la taille de tous les projets

· Installer la confiance dans l'écosystème du numérique Français

Grâce à ce rapport, le plan Transition Numérique dans le Bâtiment (PNTB) vise donc à accélérer le déploiement des outils numériques à l'échelle de l'ensemble du secteur du bâtiment et ainsi convaincre les acteurs sceptiques de s'y mettre. Il correspond donc à une première initiative du gouvernement dans le but de lancer la révolution numérique dans le bâtiment en France. L'année 2014 peut donc être considéré comme l'année «0» du BIM en France.

41 B. Delcambre, Rapport Delcambre, Mission Numérique du Bâtiment, 2 Décembre 2014, p.5

42 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.11

31

Le rapport de la mission «Droit du Numérique & Bâtiment» de 2016

Ce rapport, plus conséquent que le précédent, a été lancé en 2009 et a été publié le 31 Janvier 2016. Il a été présenté par le groupe de travail constitué par Xavier Pican, Avocat Associé chez Lefèvre Pelletier et Associés et présenté au Président du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique et au Président du Plan Transition Numérique du bâtiment. Ce rapport s'inscrit dans la continuité du plan Transition numérique du bâtiment mais «se fixe plus précisément sur les implications juridiques de l'entrée du secteur du bâtiment dans le numérique»43. L'étude de ce rapport est importante pour la suite de mon mémoire puisqu'il fait l'état des lieux des problèmes juridiques du BIM quant aux règles contractuelles, aux données de la maquette numérique, aux responsabilités, etc.

Le PUCA44

La Plan Urbanisme Construction Architecture est un organisme d'état dépendant du ministère de la transition écologique et solidaire et du ministère de la cohésion des territoires qui oeuvre beaucoup sur la question du BIM. Il a été créé en 1998 et développe à la fois des programmes de recherche incitative, des actions d'expérimentation et apporte son soutien à l'innovation et à la valorisation scientifique et technique dans les domaines de l'aménagement des territoires, de l'habitat, de la construction et de la conception architecturale et urbaine. Concernant le BIM, il oeuvre depuis 2013 à proposer des cadres de référence contractuels visant à sécuriser les échanges dans les processus Bimés, le programme « BIM - Maquette numérique » entre dans une phase où il s'agira de démontrer l'apport du BIM sur l'amélioration du ratio coût/bénéfice du projet et sur le développement du travail collaboratif.

Le MIQCP45

Il s'agit de la Mission Interministérielle pour la Qualité des Constructions Publiques composé d'architectes conseils et initié par le PTNB. Ils ont mis au point un rapport servant de guide aux maîtres d'ouvrages publics souhaitant se lancer dans le BIM dans leurs projets de construction. Il a pour objectif, en plus de mettre en avant les nombreux intérêts qui

43 F. Hovorka et P. Mit, Plan Bâtiment Durable, Rapport groupe de travail BIM et Gestion du patrimoine Mars 2014, Un avatar numérique de l'ouvrage et du patrimoine au service du bâtiment durable: le « Bâtiment et Informations Modélisés » (BIM)

44 [Voir glossaire page 103]

45 [Voir glossaire page 103]

32

doivent conduire un maître d'ouvrage à mettre en place une démarche BIM sur les

opérations qu'il lance, de donner des éléments pragmatiques des actions qu'il doit mener à cette fin.

· Charte d'engagement volontaire de la filière du bâtiment «Objectif BIM 2022»

Le PTNB porté depuis 2015, a largement initié la transition vers le numérique avec l'ensemble de la filière autour de trois axes essentiels:

· Faire connaître et donner envie de recourir au numérique,

· Accompagner les acteurs dans leur montée en compétences,

· Donner et créer un écosystème de confiance.

La charte marque l'engagement volontaire opérationnel de l'Etat et de l'ensemble de la filière du bâtiment à viser la généralisation du BIM en 2022 pour la construction neuve. L'objectif est aussi d'accorder une attention particulière à l'adaptation du BIM à toutes les tailles d'entreprises pour une durée de 5 ans.

· L'association Medi@construct

MediaConstruct représente l'association BuildingSMART en France. Elle s'occupe de généraliser le partage de données dématérialisées dans la construction (Open-BIM) et facilite l'émergence de nouvelles méthodes de travail collaboratives. Elle a mise en place une «convention BIM» type permettant les acteurs à préparer leurs projets BIM.

2 - Et les autres pays : où en sont#ils?

Les pouvoirs publics français ont été un peu « timides » et aurait pu aller beaucoup plus loin dans cette transposition en s'inspirant de ce qui se fait dans d'autres états membres comme le Royaume-Uni, Les Pays-Bas, le Danemark, etc. En effet, certains d'entres eux ont «voulu rendre l'utilisation du BIM obligatoire pour les projets de constructions publics»46 de grandes envergures, permettant ainsi de donner l'exemple.

46 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p.

33

Les pays du monde ont ainsi adoptés différentes stratégies dans la mise en place du BIM au sein de leur territoire.

· En ce qui concerne les pays scandinaves, connus pour être souvent plus en avance dans de nombreux secteurs, imposent le BIM depuis plusieurs années, chacun de manières différentes:

o La Finlande a rendu obligatoire son utilisation dans toutes les constructions (privés et publics) qui ont un coût supérieur à 2 millions d'euros depuis 2007.

o En Norvège, le ministère s'occupant de la gestion du patrimoine l'a imposé en 2010 pour tous les projets de construction.

o Les Pays-Bas ont rendu obligatoire le BIM depuis 2011 dans tous ces grands projets publics.

· Le Royaume Uni, considéré comme le leader en Europe, a rendu obligatoire législativement le BIM Niveau 2 depuis 2016 pour tous les projets gouvernementaux (marché public) et a mis en place un protocole national «contrairement au guide Medi@Construct, qui relève, lui, d'une initiative essentiellement privée»47 afin de montrer que l'on peut diminuer le coût des construction de 20% en utilisant le BIM. Mais cet objectif est encore loin d'être atteint.

· D'autres pays, hors Europe, sont également plus avancés qu'en France:

o Hong Kong, le BIM a été rendu obligatoire en 2014 pour tous les marchés publics.

o Singapour a rendu obligatoire le BIM dans toutes les constructions. Pour cela, l'état a mis en place des subventions, des formations et depuis 2011 la soumission électronique du permis de construire.

o En Corée du Sud, le BIM est obligatoire pour tous les projets de plus de 50 millions d'Euros.

o Les Etats-Unis, depuis 2007, impose son utilisation pour tous les projets d'ordre public. La ville de New-York, par exemple, a créé son propre «guide BIM».

47 D. Richard, «BIM : analyse et perspectives de l'immeuble numérique», Construction-urbanisme N°12, Décembre 2017

· Concernant les autres pays comme l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne et les pays d'Europe de l'Est ils sont plus en retard que la France mais commencent à se rendre compte de l'importance d'effectuer cette transition numérique dès maintenant.

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Évolution du pourcentage des entreprises e la construction avec pus de 30 % de projets BM

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Australie

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Singapour

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Pays-Bas

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Hong Kong

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Royaume-Uni

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Suè Suisse

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34

Fig. 10 Série de schémas tirés du Manifeste «conduire la transformation digitale» publié par MediaConstruct

35

3 - La France en retard? : Analyse critique

Comme j'ai pu le dire précédemment, la directive européenne de 2014 laisse le choix aux états membres de l'Union d'imposer ou non le recours au BIM dans leurs marchés de travaux. Les législateurs français n'ont rien imposé et laissent une totale liberté quant à son utilisation ou non. Malgré le fait qu'il n'y ait pas de cadre juridique particulier spécifiant explicitement l'utilisation du BIM dans les marchés de travaux, son utilisation reste possible puisqu'il s'agit seulement d'une nouvelle façon de travailler fondée sur la collaboration des acteurs autour d'une maquette numérique. Cela ne doit absolument pas conduire à écarter cette méthode de travail car les lois n'y sont pas incompatibles. Certaines dispositions, de la loi MOP et de la commande publique (très vieilles maintenant), restent obsolètes et ne sont pas optimalement adaptées aux outils numériques notamment sur les règles de transmission des documents qui est différents sous la méthode BIM.

L'état français a donc fait le choix de ne pas imposer. Il a principalement émis des rapports (Pican, Delcambre, etc.) qui sont des sortes « d'audit » de l'état actuel du BIM, cela a permis de se poser des questions sur cette nouvelle méthode de travail et voir les problématiques que pose son apparition. Toutes ces initiatives, en relation directe avec le gouvernement, montrent une volonté d'effectuer cette transition numérique du bâtiment mais non dans la voie de la contrainte législative. La France n'a pas choisi de forcer son utilisation qui serait sûrement un peu périlleuse et aurait sûrement engendré des problèmes liés à la concurrence. C'est une approche plus évolutive dans le but d'habituer petit à petit le marché jusqu'à 2022. "La faiblesse du cadre légal ne traduit pas un manque d'intérêt pour le BIM»48. Cette approche reste cependant très contradictoire face à l'état de droit qu'est la France entouré du Code Civil et de son millefeuille administratif et où l'utilisation de normes est souvent sans limite.

Voyons maintenant les avis des différents professionnels que j'ai pu interrogé concernant la faiblesse du cadre légal en France:

· Selon les propos recueillis par Monsieur Trehen : « Je ne sais pas pourquoi on évolue pas plus vite juridiquement. En effet, je suis arrivé en 2012 et avant j'étais à l'étranger chez AutoDESK qui est une société américaine et qui ne s'occupe pas que d'un seul pays.

48 D. Richard, «BIM : analyse et perspectives de l'immeuble numérique», Construction-urbanisme N°12, Décembre 2017

36

Quand je suis arrivé chez EGIS, c'est la première chose que j'ai remarquée. J'étais vraiment étonné qu'il ne fasse pas plus de loi pour que cela avance parce que si cela reste au bon vouloir des uns et des autres on sera prêt en 2035. Et oui, c'est très français ! Je ne sais pas ce que l'Etat attend. C'est dans la culture française à mon avis. Cela ne se fait pas de faire la version 2 de quelque chose qui a été fait en version 1 par quelqu'un d'autre. En fait, si un tel fait quelque chose, cela ne viendrait pas à l'idée de faire la version 2 de celui qui a fait la version 1. C'est ça le fond du problème en France, c'est totalement sidérant, alors que dans tousles autres pays du monde lorsque quelque chose est bien faite les gens le prenne et l'enrichisse. En France, lorsque une chose est bien faite, tout le monde va commencer à dire que ce qui a été fait est mauvais et on va recommencer nous-même. C'estfou mais c'est comme ça ! [...] Inspirer, faire connaître, solliciter, conseiller mais au bout du compte, on a rien. Le manifeste qu'ils viennent de créer et signer en début d'année avec le gouvernement, c'est une charte numérique dans le cadre de la transition numérique qui inscrit en dur que d'ici 2022 : on ne fera rien ! C'est vraiment une catastrophe numérique pour la France. Ce rapport s'intitule «Objectif BIM 2022». Ce qui est étonnant c'est que tout le monde est content de cela et tout le monde se réjouit de cela. Cela montre encore une fois que cela impose que chacun fasse ce qu'il veut en matière de BIM. [...] On va évoluer mais chacun dans son coin. On est encore chez les Gaulois. Cela augmente le fait qu'il y a encore rien de normalisé. Voilà le fond du problème. Au jour d'aujourd'hui des gens se plaignent parce que tel BIM Manager fait ceci, tel BIM manager fait cela, telle assurance veutfaire ceci, telle assurance veutfaire cela, tel syndicat veutfaire ceci, tel syndicat veutfaire cela, etc. Il y a donc rien de cohérent, tout le monde fait ce qu'il veut. Un maître d'ouvrage peut dire ce BIM manager il est bien mais celui là l'est moins. Il ne peut pas puisque de toute façon chacun fait ce qu'il veut. C'est donc du copinage, cela induit des erreurs et on perd du temps. [...]

- Stanislas Audibert : La France n'impose donc rien alors que d'autres pays le font dans les marchés publics selon certains critères. On ne pourrait pas obliger par exemple les constructions de plus de 10 millions d'euros à utiliser le BIM. C'est ce que je trouve étonnant au niveau de l'Etat français. Qu'en pensez-vous?

- Monsieur TREHEN : La notion d'imposer le BIM selon certains critères est toujours délicat. On ne peut pas l'imposer en France parce qu'on ne l'a toujours

37

pas définit. Pour imposer quelque chose il faut le définir. En Angleterre par exemple, ils disent il faut travailler de telle façon mais vous devez nous fournir un format commun, vous devez fournir la base de données dans ce format là. Et pour le fournir dans ce format là, je vous incite à travailler en BIM. En France, c'est ni l'un ni l'autre c'est à dire que l'on ditjuste «on fait du BIM». C'est vrai que l'on ne peut pas l'imposer parce que on ne sait pas de quoi on parle.

- Stanislas Audibert : De grands rapports sont sorties (Rapport Pican, etc.) sont-ils, selon vous, importants pour l'avancée du BIM en France?

- Monsieur TREHEN : Oui bien sûr ! Il faut quand même reconnaitre ce qui est bon de ce qui a été fait. Pour autant, le PTNB est passé à côté de certaines choses. Certains rapports sont initiés par le PTNB qui est en quelques sortes la voie de la France sur le sujet. Et on a besoin d'avoir la voie de la France. Parce que tout le monde a son opinion. C'est un bon début, c'est un référentiel. Il faut lire le rapport de la MIQCP venant de l'état et soutenu par le PTNB qui prend en compte la loi MOP. C'est un outil de référence et on attend cela dans tous les domaines ».

· Propos recueillis par Maître C. Benoît Renaudin : « En France il y a tout simplement des lobbies. En France, on ne peut pas faire ce que l'on veut, parce que cela n'arrange pas tout le monde. Vous auriez été en études d'avocats vous aurez eu des questions sur: est ce que c'est la pratique qui précède le droit ou l'inverse ? En l'occurrence, le législateur, dans le BIM se dit faites comme vous voulez et on verra dans quelques années. Ce n'est pas sa priorité. On soutient l'initiative privée et après on verra si l'on impose quelque chose au niveau public. Par exemple, la loi MOP a mis des années à être créé. Je crois que cela a duré une vingtaine d'année avant que la loi MOP définitive sorte en 1985. Pour faire une loi il faut coordonner tout le monde et cela prend beaucoup de temps de mettre d'accord tout le monde autour d'un texte. Surtout dans des milieux aussi sensible que le bâtiment qui est moteur dans l'économie. Faire une loi, c'est très compliqué. »

· Propos recueillis par Monsieur D. Darremont : « On est en train de faire un benchmark (de l'anglais référence), c'est à dire un audit sur tous les pays européens afin de corriger tous ces discours qui diffèrent. C'est donc un recensement de ce qui se fait en ce moment

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et les différentes visions du numérique en fonction des différents états. On va le sortir d'ici quatre mois. C'est une vraie étude en dehors de tous les lobbies commerciaux des uns et des autres. Pour savoir réellement comment les actions existantes ont été faites et comment elles s'y sont mises. On dit par exemple que l'Angleterre est plus en avance mais pas tant que ça. Ce qui a été réellement touché par le BIM en Angleterre ce n'est même pas 5% de leur marché, lorsqu'on parle d'obligation bien sûr. Un document officiel est sorti: «charte engagement volontaire de la filière du bâtiment pour la construction numérique: objectif 2022». La France a prise une démarche de long terme. Elle ne voulait pas d'engagement volontaire. Toute la filière du bâtiment est concernée avec des acteurs privés, grands groupes et la FFB qui s'y engagent. En France, on ira vers l'avant par le volontariat. Au niveau de l'état, c'est donc un engagement au long terme jusqu'à 2022 puisqu'il la signé.

- Stanislas Audibert : Les lois ne vont pas être changées par conséquent?

- Monsieur Darremont : Ah non ! Il n'y aura aucune modification de la loi ni de la loi MOP en particulier. En tous cas ce n'est pas du tout prévu. On fait bien du BIM sans modifier la loi donc la loi n'a pas à être modifié pour faire du BIM. [...] La plupart des maîtres d'ouvrage ont signé notre charte pour l'horizon 2022. Si cela marche nous seront en avance sur les anglais par exemple et pourtant on n'aura pas fait de loi.

- Stanislas Audibert : Et concernant les pays scandinaves, où en sont-ils?

- Monsieur Darremont : Alors c'est différent, le Danemark par exemple a légiféré en 2005 pour inciter les pouvoirs publics à y aller. Ils obligent à utiliser le BIM dans les contrats publics mais seulement si cela coûte moins cher que sans l'utiliser, une démarche très intelligente. »

Selon les propos recueillis par Monsieur O. Celnik :

- Stanislas Audibert : « J'ai lu que beaucoup de pays européens essayaient déjà d'imposer le BIM sur certains projets publics. Et pourquoi la France n'impose rien? On voit même maintenant des objectifs à 2022. Quand pensez-vous?

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- Monsieur Celnik : La loi en France ne les impose pas. Du moins, ce n'est pas imposé par la loi mais la loi permet aux acteurs qui le souhaitent de l'imposer. C'est le sens de la directive européenne. Je suis un peu sceptique par rapport à cela. Cécile Duflot disait ce sera obligatoire en 2017 mais le PTNB ne le rend finalement pas obligatoire. Le PTNB veut avant tout convaincre et donner envie, renforcer les compétences, développer les outils adaptés, créer la confiance sans l'imposer. Mais ce ne sont que des bonnes intentions qui n'engagent personnes. Même les signataires ont dit qu'ils vont faire du BIM en 2022.

- Stanislas Audibert : On reste donc au même point, tout le monde fait ce qu'il veut?

- Monsieur Celnik : Oui exactement, il ne se passera rien avant 2022. C'estjuste un engagement moral. Alors que si on avait dit, pour des opérations de plus de 10 millions ou 5 millions, pour les bailleurs sociaux, les collectivités locales...même cela aurait pu faire avancer les choses. La RT 2012 par exemple, a été imposé par la loi. Tout le monde à ce moment là a grogné en disant que c'est un truc de plus, c'est juste administratif, cela ne sert à rien... Mais cela oblige à se remuer. Donc avoir un seuil minimal comme la Grande Bretagne n'aurait pas été mal je trouve. Qu'on n'oblige pas les petits acteurs mais pour un gros projet pourquoi pas. Mais il faut prouver les réels avantages du BIM sur les projets.

La France a donc fait le choix de ne pas imposer le BIM et tous les acteurs interrogés le regrettent un peu. Ils reviennent souvent sur le côté bien typique des « gaulois » qui évolue toujours de leurs propres manières : « En France, lorsque une chose est bien faite, tout le monde va commencer à dire que ce qui a été fait est mauvais et on va recommencer nous< même. »49 ou bien « en France il y a des lobbies »50. « La France a fait exprès de prendre une démarche au long terme [...] En France, on ira vers l'avant par le volontariat. Au niveau de l'état, c'est donc un engagement au long terme jusqu'à 2022 puisqu'il la signé [...] et si cela marche nous seront en avance sur les anglais par exemple et pourtant on n'aura pas fait de loi.»51.

49 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

50 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

51 Entretien avec D. Darremont, Chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (FFB), janvier 2018

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L'état français aurait pu l'imposer comme tout le monde avec certains critères déterminés et moins contraignants mais selon Monsieur Trehen « la notion d'imposer le BIM selon certains critères est toujours délicat. On ne peut pas l'imposer en France parce qu'on ne l'a toujours pas définit. Pour imposer quelque chose il faut le définir. » Cela aurait pu mettre une première vraie vitesse. C'est normalement à l'état de montrer l'exemple surtout pour des révolutions aussi importantes que la Transition écologique et numérique que l'on vit dans tous les secteurs. Monsieur Celnik donne un très bon exemple de la RT 2012 permettant d'expliciter le fait de mettre un critère d'obligation: « Tout le monde à ce moment là a grogné en disant que c'est un truc de plus, c'est juste administratif, cela ne sert à rien... Mais cela oblige à se remuer »52. Maître C. Benoît Renaudin a un avis plus pragmatique en matière de droit. En effet, selon elle « les législateurs soutiennent l'initiative privée et après ils verront si ils imposent quelque chose au niveau public. Pour faire une loi il faut coordonner tout le monde et cela prend beaucoup de temps de mettre d'accord tout le monde autour d'un texte. Faire une loi, c'est très compliqué »47. Les lois ne sont donc pas prêtes à être modifiées.

La France n'a tout de même pas rien fait mais a sorti depuis 2014 une succession de rapports qui ont été initié autour du PTNB. Ceux-ci sont des « référentiels ». « Il faut quand même reconnaître ce qui est bon de ce qui a été fait »46.

En comparaison avec les pays d'Europe, on ne peut pas encore savoir si le cas typique français et des autres pays est finalement mieux ou pas. Nous n'avons pas encore assez de retour sur expérience. La France aurait certes pu mieux faire mais il faut quand même raisonner comme un français. Le Gaulois n'aime pas aller trop vite, il est indépendant d'esprit, il faut lui laisser le temps d'agir. Et personnellement je trouve que ce n'est pas une mauvaise chose. On n'est pas tant en retard que ça finalement en matière de BIM. Attendons 2022 pour en juger réellement. Selon Monsieur darremont : « La plupart des maîtres d'ouvrage ont signé notre charte pour l'horizon 2022. Si cela marche nous seront en avance sur les anglais par exemple et pourtant on n'aura pas fait de loi »53.

52 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

53 Entretien avec D. Darremont, Chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (FFB), janvier 2018

41

B - Les sources d'interrogations du BIM

Après fait vu le constat législatif du BIM en France et dans les autres pays du monde, je vais essayer de décrire les sources d'interrogations qu'engendre l'arrivée du BIM. En effet, le BIM est nouveau dans ses aspects collaboratifs par conséquent il apporte de nouvelles interrogations en terme de propriété intellectuelle de la maquette numérique, de responsabilités, etc. et oblige à se réinterroger sur les façons de travailler et de communiquer avec les autres intervenants.

1 - Notion de propriété intellectuelle et de droits d'auteur a - Dans un processus classique

Il me semble important de définir quelques notions juridiques inhérentes au droit d'auteur afin de comprendre ce qu'est au sens de la loi une oeuvre d'architecture et ce qui peut être protégé lors de la création d'une oeuvre et par la suite essayer de comprendre comment l'adapter dans le processus BIM.

Le droit d'auteur d'une oeuvre est définie dans le code de la propriété intellectuelle (CPI54) et fait partie de la propriété intellectuelle et artistique. Le droit d'auteur est« le droit des créateurs, de ceux qui pensent, imaginent, conçoivent, formalisent et développent ce qui va être qualifié d'oeuvre de l'esprit, compte tenu de leur apport personnel et particulier»55. Cette création de l'esprit donne donc des droits de propriété incorporelle à son auteur afin de le protéger et évite toute copie de son oeuvre. Cependant, une création qui peut être définie comme «oeuvre» et ainsi acquérir automatiquement les caractéristiques juridiques des droits d'auteur doit être premièrement suffisamment formalisé et réalisé mais doit surtout avoir un caractère «original». En effet, cette originalité doit être une création qui a certaines caractéristiques qui révèlent l'empreinte de son auteur.

De plus, une oeuvre peut avoir un ou plusieurs auteurs. Il existe plusieurs types d'oeuvres en fonction de ses auteurs:

54 [Voir glossaire page 103]

55 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.96

·

42

L'oeuvre simple c'est à dire celle qui associe un auteur unique à une oeuvre (par exemple, le Corbusier et son oeuvre La Villa Savoye)

· L'oeuvre est dite collective lorsqu'une personne a eu l'initiative de la création et d'autres personnes ont participé à sa réalisation. Seul l'initiateur a un droit d'auteur sur celle-ci et est divulgué en son nom (par exemple, l'artiste Anish Kapoor56 qui lance une idée d'oeuvre artistique et ce sont ces salariés qui s'occupe de la réaliser sous sa direction. L'oeuvre est divulguée en son propre nom et non au nom des autres participants). Ce type d'oeuvre est défini à l'article L.113-2 alinéa 3 du CPI.

· L'oeuvre dite collaborative où il existe plusieurs auteurs lors de la création de l'oeuvre, on parlera de coauteurs (par exemple, le centre Pompidou réalisé par Richard Rogers et Renzo Piano, c'est une coréalisation où les deux architectes possèdent les droits d'auteurs de manières indissociables). Ce type d'oeuvre est défini par l'article L.113-2 alinéa 1 du CPI.

· Enfin, l'oeuvre dite dérivée ou composite lorsqu'une oeuvre est ajoutée à une oeuvre qui existe déjà créées par deux auteurs différents.

Expliciter ces distinctions permettra par la suite de voir de quel type d'oeuvre rentre la maquette numérique lors de sa création et de son utilisation et ainsi mieux comprendre qui possèdent les droits d'auteurs sur celle-ci.

De plus, lorsqu'une oeuvre d'architecture est créée, il faut bien distinguer également celui qui possède les droits patrimoniaux (c'est à dire d'exploitation), définis aux Articles L.122 du CPI, c'est à dire celui qui peut exploiter le bâtiment, l'utiliser sans le dégrader, en l'occurrence le Maître de l'ouvrage (le commanditaire de l'ouvrage) et l'architecte qui possède les droits dit moraux, définis aux articles L.121 du CPI, et possède donc les droits d'auteurs sur le bâtiment. Les droits moraux sont incessible57, perpétuel58 et imprescriptible59.

Cette distinction est également importante afin de savoir qui possède les droits moraux et les droits patrimoniaux de la maquette numérique.

56 Anish Kapoor, né le 12 mars 1954 à Bombay en Inde, est un artiste plasticien (principalement sculpteur) britannique mondialement connu.

57 [Voir glossaire page 103]

58 [Voir glossaire page 103]

59 [Voir glossaire page 103]

43

De plus, lorsqu'on parle d'oeuvre «architecturale» la loi la définit à l'article L.112-2 du CPI par «les oeuvres de dessin, de peinture, d'architecture, de sculpture, etc., mais également les oeuvres graphiques, les plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l'architecture, etc.» Par conséquent, une oeuvre architecturale rassemble la construction en elle-même mais également ces plans, coupes et la maquette numérique qui définit le bâtiment et a permis de le construire. Les droits d'auteur s'appliquent donc à tous ces éléments. Les droits patrimoniaux (d'exploitation) et moraux portent sur tous ces points là.

b - Dans un processus BIM

Dans le cadre d'un processus BIM, on se pose la question des droits inhérents de propriété intellectuelle de la maquette numérique mais également de sa base de données et de sa protection. Celle-ci doit posséder donc des systèmes juridiques de protection et donne des droits aux auteurs de celle-ci. Le BIM est avant tout un nouvel outil collaboratif et qui dit collaboration dit partage de données entre les différents acteurs. Le BIM n'est pas encore encadré sur ces questions de droits d'auteur en particulier.

Ce qui rend plus complexe la question de droit d'auteur de la maquette est l'interopérabilité, les niveaux de définitions et la phase dans lequel on est dans le projet (phase conception, travaux et exploitation). Il faut également distinguer les droits d'auteurs des rendus exigées mais qui semble, selon moi, inchangée car imposée par la loi (loi MOP en particulier) et de la maquette numérique qui est un problème en fonction du niveau d'information dans lequel on se situe.

De plus, nous avons vu que le droit d'auteur était applicable seulement si il y avait la notion d'originalité. Chaque projet d'architecture étant unique, la maquette numérique et le processus BIM l'est également. Ce principe semble respecté et le droit d'auteur semble applicable à la maquette. La maquette numérique présente plusieurs auteurs puisqu'ils vont venir petit à petit rajouter leur «oeuvre intellectuelle». Par conséquent, en fonction de son degré de collaboration et d'interaction numérique, la maquette numérique pourra être une oeuvre collaborative, collective ou composite. Le contrat devra notifier de quel régime la maquette numérique appartient.

·

44

En BIM niveau 2, sachant qu'il n'y pas encore de collaboration sur la maquette numérique, c'est l'oeuvre dite composite qui pourrait être la plus adaptée. En effet, «l'oeuvre créé par le premier intervenant sera incorporée dans l'oeuvre nouvelle du second. Seul le dernier contributeur aura la qualité d'auteur de l'oeuvre composite, mais chaque intervenant gardera la qualité d'auteur sur sa propre contribution prise individuellement»60.

· En BIM niveau 3, nous pourront parlé d'oeuvre collaborative puisque plusieurs acteurs travaillent en collaboration et participe à celle-ci mais ce régime de droit commun61 est «difficile à gérer en présence de nombreux intervenants»62. Il peut également être prévu que l'oeuvre soit collective. Ce cas pourrait être possible lorsqu'un promoteur, personne physique63 ou morale64, qui coordonne tous les acteurs et se verra donc attribuer le droit d'auteur de la maquette finale. Ce cas sera possible lorsqu'un groupe d'immobilier par exemple et qui s'occupe de la conception au sein de son groupe. L'entreprise se verra attribuer les droits d'auteurs de la maquette finale.

En phase exploitation, il faudra que le contrat notifie que la maquette soit cessible par exemple au syndic de copropriété ou au maitre de l'ouvrage à titre onéreux ou gratuit. Cela lui permettra d'utiliser la maquette numérique lors de l'exploitation et l'entretien du bâtiment sans devoir contacter les acteurs initialement auteurs de la maquette lors de la conception du bâtiment.

C'est le contrat qui devra définir les auteurs de la maquette et ceux qui peuvent la modifier. La maquette numérique étant par nature évolutive, le contrat devra également spécifier les cessions et concessions de droits patrimoniaux sur celles-ci notamment lors de la phase exploitation où d'autres acteurs devront intervenir sur la maquette alors qu'ils ont pas participé initialement à sa création.

Ces soucis de droits d'auteur doivent être gérés contractuellement car chaque projet et ses acteurs sont différents. La protection des données de la maquette numérique devra être spécifié dans le contrat également un responsable et les conditions de sa protection d'après «l'article 34 de la loi «informatique et libertés», le responsable du traitement, qui devra être

60 Cyril Croix et Danielle Da Palma (Avocats Seban & Associés), «travailler en mode BIM : Quels risques juridiques?», publié en Octobre 2016 sur www.lemoniteur.fr/opeCimmo

61 [Voir glossaire page 103]

62 Cyril Croix et Danielle Da Palma (Avocats Seban & Associés), «travailler en mode BIM : Quels risques juridiques?», publié en Octobre 2016 sur www.lemoniteur.fr/opeCimmo

63 [Voir glossaire page 103]

64 [Voir glossaire page 103]

45

désigné en amont et qui pourra être le BIM Manager, devra prendre toute précaution utile afin de garantir la sécurité des fichiers, de leur accès et de leur stockage»65. Nous y reviendrons plus tard sur les spécificités du contrat.

ci-dessous, un tableau tiré du rapport Pican sorti en Janvier 2016 qui résume parfaitement la situation explicitée précédemment:

Niveau de BIM utilisé/ Type de protection

BIM de niveau 0

BIM de niveau 1

BIM de niveau 2

BIM de niveau 3

Protection par

le droit des

bases de
données

Ne répond pas à la définition de la base de données

Ne répond pas à la définition de la base de données

Protection sui generis de la base de données

Protection de la structure et de

l'organisation de la

base de données

Protection sui generis de la base de données

Protection de la structure et de

l'organisation de la

base de données

Protection par

OEuvre protégeable

OEuvre protégeable

OEuvre composite :

OEuvre de

le droit

par le droit d'auteur :

par le droit d'auteur :

 

collaboration:

d'auteur

 
 
 
 
 

Il s'agit d'une oeuvre

Il s'agit d'un fichier 2D

 
 
 

créée par l'assistance

ou 3D. Cette oeuvre est

L'auteur de la première

Régime de

 

d'un ordinateur. Cette

protégeable au titre du

contribution conserve

copropriété entre les

 

oeuvre est protégeable au titre du droit

droit d'auteur selon l'article L.121-1 du

ses droits sur sa contribution qui est

auteurs,

l'exploitation totale

 

d'auteur selon l'article

CPI. Le créateur de

incorporée dans la

de l'oeuvre n'est

 

L.121-1 du CPI. Le

fichier est titulaire des

seconde contribution et

possible qu'avec le

 

créateur de l'image est

droits d'auteur sur ce

ainsi de suite. Les

consentement de

 

titulaire des droits

fichier. Il peut céder les

contributeurs peuvent

chacun des auteurs.

 

d'auteur sur cette

droits patrimoniaux sur

céder leurs droits

 
 

image. Il peut céder les

le fichier et donc le

successivement pour

 
 

droits patrimoniaux sur

droit d'exploitation et

plus de simplicité.

 
 

l'image et donc le droit

le droit de

L'oeuvre composite

 
 

d'exploitation et le

reproduction, mais il

devient alors la

 
 

droit de reproduction, mais il restera toujours

restera toujours titulaire des droits moraux. Une

propriété du dernier contributeur. Les

 
 

titulaire des droits

atteinte à ses droits

cessions de droit

 
 

moraux. Une atteinte à

moraux est imaginable

peuvent intervenir au

 
 

ses droits moraux est

s'il n'est pas fait

fur et à mesure. Les

 
 

imaginable s'il n'est

référence à son nom

cessions doivent

 
 

pas fait référence à son

dans le projet final

respecter le formalisme

 
 

nom dans le projet

(atteinte à son droit de

prévu à l'article L.131-

 
 

final (atteinte à son

paternité) ou si son

3 du Code de la

 
 

droit de paternité) ou si son oeuvre est dégradée (atteinte à l'intégrité de l'oeuvre).

oeuvre est dégradée (atteinte à l'intégrité de l'oeuvre).

Propriété Intellectuelle.

 
 

OEuvre collective (si

OEuvre collective (si

OEuvre collective (si

OEuvre collective (si

 

divulgation de

divulgation de

divulgation de

divulgation de

 

l'oeuvre par un BIM

l'oeuvre par un BIM

l'oeuvre par un BIM

l'oeuvre par un

 

Manager ou par un

Manager ou par un

Manager ou par un

BIM Manager ou

 

tiers en son nom et

tiers en son nom et

tiers en son nom et

par un tiers en son

 

pour son compte

pour son compte

pour son compte

nom et pour son compte

 

65 Cyril Croix et Danielle Da Palma (Avocats Seban & Associés), «travailler en mode BIM : Quels risques juridiques?», publié en Octobre 2016 sur www.lemoniteur.fr/opeCimmo

46

2 - La traçabilité des informations et traitement des données

Comme la maquette numérique est modifiée par plusieurs acteurs, cela pose également la question de la traçabilité des modifications des informations contenues dans celle-ci. En effet, en BIM niveau 2, la question ne se pose pas particulièrement car il y a une maquette par intervenant et on sait par conséquent qui la faite et qui peut la modifier. En BIM niveau 3, c'est une réelle question car une maquette unique sera placée sur un serveur unique et pourra être modifié par plusieurs acteurs (simultanément ou successivement). Plusieurs spécialistes parlent d'un problème résolvable par les éditeurs. En effet, si l'éditeur fournit un outil performant avec des codes permettant de tracer efficacement l'information il n'y aura pas réellement de problème. Les acteurs pourront également « définir un cadre de bonnes pratiques qui pourra être intégré à l'environnement juridique et administratif de

l'opération »66. Il s'agit donc de définir rigoureusement ces modes de gestions collaboratives. C'est donc l'approche contractuelle qui permettra de définir encore une fois ces spécificités en fonction du projet.

De plus, les données misent sur le serveur peuvent être de deux natures différentes:

· Personnelles lorsque les personnes sont directement identifiables. Ce type de donnée est définit par l'article 2 de la loi « informatique et libertés » comme les données qui permettent « d'identifier directement ou indirectement une personne physique ». Ces données sont utilisables par les personnes qui sont inscrit à la CNIL67 pour tel projet. Si une personne doit accéder aux informations, elle devra être notifiée au sein de cette organisme. Un responsable de ces données pourra être désigné, il s'agira du BIM Manager. Il sera le garant, le protecteur de la maquette numérique. J'y reviendrai par la suite dans la partie III relative au rôle de ce nouvel acteur).

· Non personnelles : il faut également qu'elles soient protégées. Il s'agit dans ce cas du ou des créateurs de la base de donnée de la maquette numérique. L'article L. 341-1 du CPI dit que : « le producteur d'une base de données, entendu comme la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d'une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la

66 N. Hoyet, F. Duchene & M. De Fouquet, BIM et Architecture, Editions Dunod, 2016, 224p.

67 [Voir glossaire page 103]

47

présentation de celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel ».

Les avis des professionnels interrogés:

· Selon Maître C. Benoît Renaudin : «Concernant la protection des données personnelles, le BIM ne pose pas tant de souci que cela. En effet, si j'interviens sur un espace protégé et que vous pouvez intervenir sur tout et n'importe quoi et que les modifications cause des problèmes, là cela peut être dangereux. Si dans le cloud vous intervenez sur une maquette numérique et que l'ordinateur vous indique que vous sortez de votre zone de modifications possibles sur la maquette, l'ordinateur devra vous indiquer que vous avez violé votre domaine d'intervention. Le logiciel vous indiquant cette violation, tous les acteurs en seront au courant et le problème devra être résolu. Tout est donc un problème de logiciel et de cloud qui soit bien développé et sûre en terme de d'utilisation»68.

· Selon Monsieur O. Celnik : « Il fautjuste rappeler ce qu'est la propriété intellectuelle. Pour moi donner des plans AutoCAD et une maquette numérique c'est pareil. C'est simplement plus facile. Le droit d'auteur, que l'on donne des plans papiers ou une maquette. Le droit d'auteur et le droit de propriété intellectuel font que l'on n'a pas le droit de faire n'importe quoi. Le maitre de l'ouvrage qu'il ait des plans papiers ou une maquette, un maitre de l'ouvrage n'a pas le droit de dénaturer le projet de l'architecte, n'a pas le droit de le construire ailleurs... La maquette numérique appartient à celui qui la paie tout simplement! Quand on regarde les caractéristiques des droits moraux, il est incessible. L'auteur d'un bâtiment ou l'auteur d'une oeuvre artistique, c'est celui qui la créé. Il ne peut pas vendre se droit moral. Par contre, il peut vendre ses droits de reproduction ou qui les cède. Je vous donne le droit de dupliquer, d'interpréter... C'est le contrat qui le notifie. C'est le maitre de l'ouvrage qui dit qu'on livrera une maquette à chaque étape qui aura telles caractéristiques... Mais la question est qu'est qu'ils ont droit d'en faire en rappelant les droits d'auteur ? Je la cède mais le maitre d'ouvrage peut l'utiliser seulement pour la gestion de l'immeuble par exemple. L'un des critères du droit d'auteur, c'est l'originalité. La maquette a aussi son côté original car elle à une

68 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

48

valeur ajoutée et à ses spécificités. Il y a une façon originale de fabriquer cet objet maquette numérique»69.

3 - Les responsabilités

a# Les acteurs et les missions

Une opération de construction est toujours composée de trois grands acteurs:

· Le Maitre de l'ouvrage : celui pour lequel l'ouvrage est construit (le commanditaire).

· Les Maitres d'oeuvre: représentent ceux qui s'occupent de concevoir le projet architecturalement (architectes), et techniquement (Bureaux d'études techniques).

· L'entrepreneur ou entreprise générale: celui qui construit l'ouvrage.

Les deux derniers ont des missions de conception et réalisation de l'ouvrage, ils vont donc avoir des rôles et responsabilités majeures dans la création de la maquette numérique et dans le processus BIM. Le Maître d'ouvrage est également important mais il aura un rôle plus satellitaire dans la conception de la maquette numérique. Il faut savoir, que l'on soit en projet BIM ou pas, que les rôles et missions dans leurs contenus de chaque intervenant reste globalement inchangés.

· Selon Monsieur Trehen : « le BIM ce n'est pas faire le métier des autres »70.

· Selon Maître C. Benoît Renaudin : « Les missions de chaque acteur ne se retrouvent pas particulièrement modifiées. En tous cas dans ses limites car chacun garde ses compétences propres »71.

Mais il faut quand même les déterminer préalablement et précisément. En effet, les acteurs ne peuvent aller au-delà de leurs compétences propres. Le BIM est avant tout un nouvel outil de travail sur lequel les acteurs doivent se former mais ne change en aucun cas leur missions propres : «les moyens, les outils utilisés pour produire, diffuser et partager les études, plans,

69 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

70 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

71 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

49

documents, etc. qui évoluent, dans le sens d'une efficacité accrue sans modifier la répartition des tâches et des fonctions»72.

En BIM niveau 3, c'est principalement l'échelonnement des tâches autour de la maquette numérique qui est différente avec le processus des interventions qui seront simultanées ou collaboratives. Ceux-ci dépendront du niveau d'informations de la maquette. Cette collaboration ne modifie pas les limites de compétences des acteurs mais elle change donc plutôt «les moyens mis à disposition pour gérer et traiter les échanges classiques et traditionnels nécessaires entre les différents professionnels au fil de l'évolution du projet»73. Ces questions de tâches collaboratives qu'apporte le processus BIM induit une traçabilité des auteurs des tâches plus compliqué à délimiter. Ce qui provoque en conséquence des problèmes de responsabilités. Si une erreur est détectée il va falloir savoir qui en ait le ou les responsables.

b - Les responsabilités en processus BIM

Une opération de construction induit des responsabilités selon chaque acteur du projet et selon leurs compétences. Si une faute est commise lors de la construction, en processus BIM ou non, il faut savoir à qui revient la faute et sous quel régime de garantie celle-ci doit être réparée. Si nous partons sur le principe que le BIM permet de diminuer très en amont les erreurs de conception sur une maquette numérique bien précise, nous pouvons en déduire d'un certain point que les responsabilités des acteurs seront identiques voire atténuées : «La cause et conséquence des performances et des atouts de la maquette est de nature à appréhender différemment les responsabilités des intervenants»74. Pour bien connaître les responsabilités de chaque acteurs du projet, il faut déterminer précisément, dès le début du projet, les limites de compétences de chacun, l'enchaînement des prestations et des intervenants et de décrire leur actions dans le processus et les tâches collaboratives. C'est la convention BIM (que l'on verra en partie III) qui permettra de mettre au clair les relations entre les acteurs et leur collaboration (nous y reviendront plus précisément en troisième partie). Cela permettra de connaître les responsabilités de chacun et ainsi les bénéficiaires des garanties mise en jeu en cas de sinistre. Certaines tâches seront donc effectuées par un seul acteur et d'autres de manière collaborative ce qui entrainera des

72 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.49

73 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.53

74 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.69

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soucis de recherche du fautif si un problème intervient et mettre en oeuvre les garanties associées. Les différents intervenants devront répondre des fautes ou des erreurs par rapport aux caractéristiques des contrats qu'ils ont signés et donc notamment des erreurs effectuées sur la maquette numérique si cela était indiqué sur le contrat. Leur responsabilité contractuelle peut être donc encourue.

La question est également de savoir si ceux qui modifient la maquette ont une obligation de moyen75, c'est à dire qu'il doit mettre en oeuvre tous les moyens pour une mission en particulier ou une obligation de résultat76, c'est à dire qu'il doit obtenir le résultat décrit contractuellement pour satisfaire à obligations. Cette question est à déterminer dans le contrat et dépendra de chaque intervenant. Le contour exact des responsabilités que vont engendrer l'utilisation du BIM qu'il soit en niveau 2 ou 3 est encore flou et incertain.

De plus, d'après Maîtres Bellenger et Blandin, montre dans leur livre également que le devoir de conseil des intervenants est très important notamment. «Celui-ci résulte qu'indirectement des tâches confiées et relève plutôt de la connaissance que le professionnel a de l'opération et du projet, compte tenu de l'exécution de cette mission, et qui doit le conduire à alerter et conseiller le maître d'ouvrage quand il détecte, ou devrait détecter, des particularités susceptibles de conduire à des prises de décisions ou des choix faute desquels des retards et/ou des préjudices sont prévisibles»77. La responsabilité des contractants peut donc être mise en jeu par le Maître d'ouvrage s'il prouve la faute relative à un manque de devoir de conseil. La précision de la maquette numérique en trois dimensions induit que ce devoir de conseil intervient certes tout au long du projet mais arrive bien plus tôt et peut conseiller plus précisément le Maître de l'ouvrage avant la construction.

c - Les garanties légales et autres régimes de responsabilités sous le BIM

Rappelons quelques notions concernant les responsabilités dans le droit français et ainsi voir ce qu'induit le BIM sur celles-ci. Chaque intervenant du projet sont tenus à deux types de responsabilités : celles dites de droit commun (contractuelle, délictuelle et pénale) et des responsabilités spécifiques liés aux « constructeurs », au sens de la loi, dites garanties légales des constructeurs.

75 [Voir glossaire page 103]

76 [Voir glossaire page 103]

77 Anne-Marie Bellenger et Amélie Blandin (2016), Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 192p., p.71

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Les responsabilités légales sont composées de trois types de garantie:

· La garantie décennale définie à l'article 1792 du code civil : « Tout constructeur d'un ouvrage en est responsable de plein droit, envers le maître de l'ouvrage ou l'acquéreur de l'ouvrage; des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ». Elle concerne tous les constructeurs, le désordre doit avoir une certaine gravité et dure 10 ans après la date de réception des travaux.

· La garantie de bon fonctionnement (ou biennale) définie à l'article 1792-3 du code civil par : « les autres éléments d'équipement de l'ouvrage font l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée minimale de deux ans à compter de sa

réception ». Les constructeurs en sont redevables.

· La garantie de parfait achèvement (GPA) est définie par l'article 1792-6 alinéa 2 du Code Civil par : « La garantie de parfait achèvement, à laquelle l'entrepreneur est tenu pendant un délai d'un an, à compter de la réception, s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître d'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception ».

Vont-elles être modifiées avec l'utilisation du processus BIM ? Tout d'abord, « toute évolution dans l'acte de construire, ses méthodes et ses techniques, se traduit donc par une interrogation en terme de responsabilités et d'assurances des constructeurs »78.

· Concernant les responsabilités contractuelles elles dépendent de la précision des tâches et de leurs limites afin de voir les limites de responsabilités des acteurs. Les responsabilités dépendent donc du contrat relatif à chaque projet.

· Les responsabilités délictuelle et pénale n'ont pas à être fondamentalement être modifiées.

78 J. Roussel, «Quelles responsabilités et quelles assurances pour les intervenants dans le cadre d'une opération BIM?', J.Roussel, Balises N°21, Octobre 2017

·

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En ce qui concerne les garanties légales des constructeurs, elles n'ont pas été modifiées avec l'arrivée du BIM mais elles pourront par la suite l'être en fonction des cas de sinistralités rencontrées.

· En effet selon Maître C. Benoit-Renaudin: « Elles vont être modifiées mais plus tard. Cela va dépendre de la sinistralité. Le but du BIM c'est d'améliorer la construction. Moi quand j'expliquais le BIM à mes collègues qui font que des désordres et des conflits liés à des post-construction,je leur avais dit, vous allez voir il y aura plus de désordres. Ils m'ont regardé bizarrement en me répondant que ce sont quand même des hommes et il y aura donc toujours des problèmes et des personnes qui vontfaire n'importe quoi. Le but est donc d'améliorer la chose. Le but du BIM c'est d'améliorer la qualité. Donc si vous améliorez la qualité vous diminuez le risque de contentieux»79.

· Selon Monsieur TREHEN : « Oui elles vont être profondément modifiées. En BIM 2.0, on est encore en fichiers séparés donc la source de la responsabilité est parfaitement identifiable. En 3.0 le problème est que la responsabilité sera déléguée et cela peut être très grave. C'est comme la responsabilité qui est déployée lorsqu'on installe un logiciel. Lorsqu'on l'installe, on a toujours un texte qui nous demande si on a compris. Je ne suis pas propriétaire du logiciel mais j'ai simplement le droit d'usage. La data que vous allez rentrer dans le logiciel, j'en suis le seul responsable et que la solidité de l'information mise dans le logiciel n'est pas de la responsabilité de l'éditeur. Donc si je ne suis pas capable de la relire, ce n'est pas de sa faute »80.

d - La traçabilité des données ou comment connaître le fautif

La traçabilité des données (data) est très importante pour savoir à qui retourne la faute. Plus cette traçabilité sera efficace plus les limites de responsabilités de chacun seront cadrées et permettra de protéger le bon fonctionnement du processus collaboratif.

79 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

80 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

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Il faut savoir si la faute «incombe à celui qui donne le fichier erroné ou à celui qui le traite sans voir que l'erreur existe déjà»81.

Il faut également savoir ce qui incombe si l'erreur provient d'une mauvaise manipulation du logiciel ou d'un mauvais choix technique. Si c'est dans le premier cas, cette faute engage la responsabilité contractuelle de la personne responsable et dans le deuxième, met en oeuvre les garanties légales (notamment décennale qui porte sur la solidité de l'ouvrage). Mais en pratique, cela reste peu probable qu'une faute grave arrive. En effet, le BIM sert en principe à réduire les erreurs en aval de la construction et donc diminue les sinistres.

e - Une mauvaise interopérabilité : L'éditeur responsable?

Se pose également la question de responsabilités concernant l'interopérabilité entre le logiciel et l'éventuelle responsabilité des éditeurs de logiciels.

Les éditeurs qui fournissent des logiciels aux utilisateurs permettant de créer la maquette numérique peuvent connaître des problèmes lors de son utilisation et ainsi avoir des répercutions sur l'ouvrage construit au regard notamment de la garantie de performance énergétique ou acoustique par exemple.

Un bonne «interopérabilité des données est ainsi essentielle pour permettre l'utilisation optimale du BIM et la fluidité des échanges. Cette interopérabilité est également une

garantie supplémentaire pour les acteurs dans leurs relations contractuelles».82 Le BIM est un échange de données. Pour passer d'un logiciel à un autre, il faut convertir les fichiers sources en un fichier type IFC. On parle ici d'interopérabilité. Par exemple, le passage entre une maquette ArchiCAD vers Revit se fera en deux conversions successives. La première sera la conversion du fichier ArchiCAD sous le format .pln vers .ifc et la deuxième conversion du fichier .ifc vers Revit. Cette étape en deux temps pose des problèmes car peut créer des erreurs. Il faut tout d'abord savoir si l'erreur de conversion vient de la première conversion ou de la deuxième. L'éditeur peut-il être responsable?

81 Marie-Alexandra Vankemmelbeke et Wanda Bellaiche, « les craintes juridiques autour du BIM sont elles justifiées ?, Batiactu, février 2017

82 Manifeste: «Conduire la transformation digitale pour la construction, l'immobilier et l'aménagement urbain», publié par l'association MediaConstruct, www.mediaconstruct.fr, 2016

·

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Selon les propos recueillis par O. Celnik : «Si on prend un logiciel comme ArchiCAD qui est très au point sur l'IFC, est ce que les utilisateurs d'ArchiCAD y compris aguerri savent correctement paramétrer en import et en export le configurateur en IFC, le réponse est plutôt non mais c'est un peu paradoxale car c'est un langage universel et quand on fait importé en IFC, on nous dit, tu veux de l'IFC pour Tekla, pour REVIT...? Comme si on me disait qu'il faut me traduire ton texte en anglais mais tu le veux pour l'Angleterre, l'Australie...? Et ce ne sera pas le même anglais car on change les mots, les accents... Il y a déjà le fait que cela soit compliqué. Le langage et la norme JFC évolue de version en version ne contiennent pas toute l'information utile et que certains logiciels ne savent pas correctement utiliser ce langage et notamment REVIT. Pendant longtemps, on importait même assez mal un IFC qu'il avait lui-même produit. REVIT exporte pas trop mal et encore il faut beaucoup de soin. Il a des bugs d'imports dans certains cas »83.

· Selon Monsieur Trehen : « C'est comme la responsabilité qui est déployée lorsqu'on installe un logiciel. Lorsqu'on l'installe, on a toujours un texte qui nous demande si on a compris. Je ne suis pas propriétaire du logiciel mais j'ai simplement le droit d'usage. La data que vous allez rentrer dans le logiciel, j'en suis le seul responsable et que la solidité de l'information mise dans le logiciel n'est pas de la responsabilité de l'éditeur. Donc si je ne suis pas capable de la relire, ce n'est pas de sa faute. [...] En cliquant sur la charte d'utilisation en installant un logiciel, l'éditeur se dédouane de toutes responsabilités même en cas de bug du logiciel qui entraine des retards sur le projet »84.

83 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

84 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

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III - Vers un « contrat BIM » ?

A - Les modalités contractuelles

La législation étant encore un peu bancale et incertaine en terme d'utilisation du BIM, les spécialistes du BIM sont d'accord sur le fait que le «contrat85» serait le moyen le plus efficace afin de résoudre les interrogations qu'il pose et même si cela « complique une appréhension du BIM par le juriste, dont le raisonnement se structurerait plus facilement autour d'une loi »86. «L'effort doit porter sur l'appropriation par la filière de nouvelles pratiques contractuelles. La pratique immobilière doit se transformer et se familiariser avec de nouvelles règles et pratiques pour permettre sa transition numérique tout en respectant les règles de droit classique»87. Le contrat est un outil efficace afin de répondre à tous les questionnements qu'engendre l'arrivée de ce nouvel outil (propriété intellectuelle de la maquette numérique, de responsabilités des acteurs, de rôle des acteurs et leur processus d'organisation autour de la maquette numérique, etc.). Il faut adapter le schéma contractuel actuel aux spécificités techniques du BIM.

Le BIM est légal et son utilisation n'est interdit par aucune loi ni code en France. Le « Contrat BIM » a proprement parlé n'existe pas. Comme il s'agit d'un nouvel outil de travail, il est adaptable dans les contrats de Maîtrise d'oeuvre et de marchés de travaux existants. Il faut donc adapter ce qui existe afin qu'il puisse bien fonctionner.

Encore faut il savoir sur quel cadre contractuel se référer pour incorporer ce nouvel outil. Il existe plusieurs solutions possibles :

· « insérer au sein du contrat principal les aspects afférents au BIM

· ériger un document contractuel propre intitulé : protocole BIM

· prévoir un protocole BIM, sans pour autant le prévoir dans la hiérarchie des documents contractuels

· ou bien prévoir un contrat spécifiquement consacré au BIM »88

85 [Voir glossaire page 103]

86 D. Richard, «BIM : analyse et perspectives de l'immeuble numérique», Construction-urbanisme N°12, Décembre 2017

87 X. Pican, Rapport de mission de X. PICAN : "Droit du numérique & bâtiment", Janvier 2016, 77p.

88 L. Bouneghida, «Comment sécuriser le recours au BIM dans le bâtiment?», L'usine nouvelle, Juillet 2015

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Un contrat est régi par le droit des obligations et des contrats qui a eu une évolution majeure suite à l'ordonnance du 10 Février 2016. Le contrat BIM devra donc répondre à l'article 1128 du Code Civil et ainsi comporter:

· Le consentement des parties c'est à dire que ceux qui contractent le contrat BIM devront être sains d'esprit (majeures ou mineurs émancipés).

· L'objet du contrat c'est à dire l'ouvrage à construire conforme à la maquette numérique. Il y ici une dualité de l'objet entre la volonté d'avoir une maquette conforme aux exigences prévus dans le contrat et un bâtiment conforme à la maquette numérique.

· La cause du contrat: par exemple, «la livraison d'un ouvrage ayant une performance énergétique garantie en fonction d'un usage déterminé, ce qui a pour conséquence de rendre indissociable l'ouvrage de son modèle virtuel avec l'obligation de mise à jour de la maquette numérique. La théorie de la cause est le meilleur ciment pour laisser unies de façon indissociable la réalité virtuelle et la réalité concrète»89.

Le contrat est avant tout fait pour protéger ces contractants et « permet à tous les acteurs du projet de rester maître de leur relations contractuelles avec les autres contributeurs de la maquette numérique »90. Cela permet également aux acteurs de faire évoluer leur relations durant tout un projet car un contrat a par nature une grande flexibilité que l'on appelle la liberté contractuelle91. En effet, chaque projet de construction étant différent cela permet à chaque partie de négocier chaque point entre cocontractants. Un contrat est donc là pour s'adapter en fonction des particularités de chaque projet, ce qui n'est pas le cas pour une loi.

Or, lorsque certains maîtres d'ouvrage veulent utiliser le BIM dans leurs marchés, ils ne savent pas encore à quoi se référer et ne se protègent pas en conséquence. Si des

contentieux voient le jour lors de la construction du à un dysfonctionnement quelconque du processus BIM ils pourraient se trouver attaquer et avoir de lourdes sanctions. Si un contrat est bien mis en place, il sera là pour protéger ses contractants et résoudre plus efficacement les litiges.

89 Olivier Celnik et Éric Lebègue (2015), BIM & Maquette Numérique pour l'architecture, le bâtiment et la construction, deuxième édition, coédition Eyrolles/CSTB, p.638

90 X. Pican, Rapport de mission de X. PICAN : "Droit du numérique & bâtiment", Janvier 2016, 77p.

91 [Voir glossaire page 103]

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Selon le rapport Pican, plusieurs options ont été discutées afin de savoir sous quelle forme il pourrait naître:

· soit la mise en place d'un protocole BIM (nous y reviendrons par la suite)

· soit la diffusion de modèles de contrats en ligne par des organismes extérieurs (Ex : Contrats types de maîtrise d'oeuvre de la MAF)

· La diffusion de « bonnes pratiques contractuelles » ou guides permettant d'aider les acteurs voulant se lancer dans un projet BIM puisse s'y référer (Ex : BIM et maquette numérique : guide de recommandation à la maîtrise d'ouvrage publié par la PTNB et le MIQCP)

· Aucun modèle imposé

Il y a donc une liberté mais le rapport Pican « recommande la création de référentiels contractuels non contraignants pour aider les acteurs du BIM dans la contractualisation de leur accord »92.

Comme on a pu le voir précédemment, le BIM étant un nouvel outil, cela ne change rien aux missions des différents acteurs mais offre seulement de nouveaux moyens et opportunités.

Les interlocuteurs que j'ai interrogés ont beaucoup parlé de l'importance de bien codifier, hiérarchiser et connaître la terminologie des termes utilisés dans le langage BIM: Protocole BIM, charte BIM, convention BIM... Elle est garante de la sécurité des contractants pour que les choses soient clairement définies. C'est au Maître d'ouvrage de les clarifier. Cette terminologie est encore un peu flou et certains acteurs comme la FFB ou le PTNB s'occupe en ce moment de mettre de l'ordre à ce niveau.

· Selon Maître C. Benoît-Renaudin : « le Plan de Transition Numérique voulait proposer des conventions types, non pas pour quelles s'imposent, mais pour que les gens qui n'ont pas les moyens d'aller voir un avocat, aient des conseils juridiques et un outil de base et de référence [...], C'est juste au maître de l'ouvrage de l'imposer. Aujourd'hui le BIM n'est pas imposé, c'est juste une faculté. Il ne fait pas ce qu'il veut

92 X. Pican, Rapport de mission de X. PICAN : "Droit du numérique & bâtiment", Janvier 2016, 77p.

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mais il faut quand même respecter les règles de la commande publique. Aujourd'hui c'est la loi MOP qui s'impose »93.

· Selon Monsieur Darremont : « Le défaut du langage BIM est de confondre un peu tout. Pour clarifier un peu les choses et vous donnez une idée par exemple la charte BIM. Un document a été créé au sein du PTNB qui est le document appelé: BIM et maquette numérique : guide de recommandations à la maitrise d'ouvrage. A la fin de ce rapport il y a un lexique. La charte BIM c'est ce que veut le maitre d'ouvrage, la convention BIM c'est comment les gens travaillent ensemble. La charte c'est ce que veut le maitre d'ouvrage, c'est son cahier des charges et la convention c'est la réponse. Une charte c'est forcément dans l'appel d'offre par rapport à sa maitrise d'oeuvre. Il faut avoir la charte dans les dossiers d'appels d'offres »94.

· Monsieur TREHEN : « Le BIM aura une réelle importance le jour où l'on pourra faire une recherche en responsabilité sur le BIM. Or pour faire une recherche en

responsabilité sur la maquette numérique il faut voir comment les contrats

s'enchaînent. Si une personne me dit: «de quoi vous me parler? En effet vous me citez des documents mais ceux-là ne font pas parti de mon contrat...». Aujourd'hui, chacun fait ceux qu'il veut. Des BIM Manager vont arriver vers un maître d'ouvrage de nos jours et lui dire «je vais au moins vous mettre un protocole BIM. Ah bon parce que on m'avait parlé d'une charte. Les uns appellent cela une charte et d'autres les protocoles. Ils vont dire que c'est la même chose alors que c'estfaux. En ce moment ils disent «mais Monsieur c'estjuste une convention? Ah mais non vous avez utilisé un guide donc cela ne peut pas marcher !». On ne sait pas de quoi on parle en ce moment car on ne sait pas sur quels documents s'appuyer et on ne sait pas non plus ce qu'il y a dedans. Ce qui donc important c'est donc l'enchainement des pièces contractuelles du BIM qui ne sont pas définit aujourd'hui »95.

· Selon Monsieur Celnik : « Il y a une terminologie aujourd'hui à respecter. Par exemple, côté maîtrise d'ouvrage on parle d'une charte pour le document général stratégique, le cahier des charges, c'est le cahier des charges d'une opération. La convention estfaite

93 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

94 Entretien avec D. Darremont, Chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (FFB), janvier 2018

95 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

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par la maîtrise d'oeuvre ou l'équipe de conception-réalisation et ensuite l'entreprise (on peut aussi appelé cela protocole même si les deux termes sont impropres, c'est dans le langage courant). Les usages commencent quand même à se conforter un peu. Souvent on trouve des glossaires pour essayer de préciser le vocabulaire. Peu importe mais il faut dire sur quel référentiel on s'applique »96.

L'étape qui va être crucial va donc être de bien rédiger la succession des contrats spécifiques sur lequel intervient le BIM:

· Le cahier des charges BIM du maître d'ouvrage : document qui définit les volontés du maitre de l'ouvrage concernant le BIM dans le projet. Le maitre d'ouvrage peut se faire aider d'un assistant à la maitrise d'ouvrage si il n'a pas les compétences pour le faire lui-même. Cet assistant pourra avoir la casquette d'AMO BIM (Assistant à la Maitrise d'ouvrage spécialisé dans le BIM).

· La charte BIM (non obligatoire mais conseillée) : qui définit les principes et méthodes à respecter dans la modélisation de la maquette numérique. Elle permet d'uniformiser les méthodes de travail sur celle-ci. Elle peut être incorporé dans le protocole BIM.

· Le protocole BIM ou convention BIM qui régit la collaboration entre les différents acteurs autour de ou des maquettes numériques (document primordial dont je développerai les caractéristiques par la suite). Elle prend en compte chacune des particularités d'un projet, chose qui n'est malheureusement pas encore le cas sur des projets où certains acteurs recopient bêtement des conventions types.

· Contrat entre les éditeurs de logiciels et les utilisateurs

· Contrat relatif au stockage des données

B - Le Protocole BIM (ou convention BIM)

Utiliser ce nouvel outil collaboratif qu'est le BIM, nécessite de prévoir et organiser cette collaboration autour de la maquette numérique. Tous ces processus seront inscrits dans un document contractuel appelé « protocole BIM » ou « convention BIM ». Il est donc très important de bien le rédiger car il permet d'avoir une approche coordonner et cohérente

96 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

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entre les acteurs. Les acteurs doivent se mettre d'accord sur toutes les formalités sur celle-ci afin qu'elle soit créée dans les meilleures conditions. « Le BIM suppose la définition de principes et de règles qui vont gouverner l'organisation et l'usage de la maquette numérique BIM : c'est l'objet du protocole BIM ou convention BIM, qui va formaliser les règles de production et de gestion de la maquette BIM et/ou des maquettes métiers, tout au long du projet »97.

Elle définit donc les règles de gestion et de production de la maquette numérique. C'est en quelque sorte, une feuille de route du processus BIM tout au long du projet. Elle doit être unique à chaque projet en prenant les particularités de chacun d'eux et des exigences du maître de l'ouvrage en terme de BIM. Elle doit être claire et précise. Il est en principe rédigé par le responsable du BIM Management: Le BIM Manager. Il sera par la suite présenté au maître d'ouvrage et vérifiera si elle est en conformité avec son cahier des charges BIM. Il la signera si il en est d'accord ce qui la rendra opposable par les autres acteurs du projet. Le protocole BIM est un document primordial qui doit être incorporé au contrat principal. Ce protocole BIM servira de preuve et de traçabilité du rôle de chacun en cas de contentieux.

Le protocole BIM permet donc de savoir : qui fait quoi, quand et comment dans la maquette? Qui a accès à la maquette, comment et combien de temps?

Il doit incorporer tous les éléments suivants:

· « une définition claire de l'ensemble des termes utilisés, afin d'éviter les confusions pouvant exister car il n'existe pour l'instant aucune nomenclature officielle.

· Les modalités et exigences concernant la maquette numérique (conditions d'organisation de la collaboration):

o niveaux de développement98

o niveaux de détail99

o Le choix des technologies (logiciels, versions, etc.)

o processus de développement de la maquette (Délais dans lequel les modèles doivent être mis à disposition et le degré d'achèvement requis à chaque étape)

o Tâches de chaque acteur et modalités de leur rendu en fonction de l'avancée du projet

97 A.M. Bellenger & A. Blandin, Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 2016, 192p.

98 Cf Partie I

o

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Format (interopérabilité et format IFC), modalités et fréquence des échanges

o Conditions d'accessibilité et d'utilisation de la maquette par chaque acteur (lecture seule, modifications de certaines partie, etc.)

· une répartition précise des missions et un partage de responsabilité (clauses de limitation de responsabilités) en cas de défaillance

· des éléments quant aux évolutions de la maquette et la manière dont chaque intervenant devront s'y conformer

· le rôle précis du BIM Manager (nommé par le maître de l'ouvrage) (nous y reviendrons par la suite)

· Une procédure de « détection de clash » pour résoudre et prévenir les hypothèses de conflits

· La propriété intellectuelle de la maquette et de ses données

· Conditions d'utilisation de la maquette par le maître de l'ouvrage en phase exploitation-maintenance de l'ouvrage. En effet, Une clause pourra être notifiée permettant de prévoir le régime de cession des droits d'auteur de la maquette une fois la construction terminée. Mais ce type de clause existe déjà dans les contrats de maitrise d'oeuvre. Cette clause s'adapte juste à ce nouvel outil qui apporte une dimension virtuelle d'un projet de construction.

· Encadrement du processus collaboratif et la documentation des échanges, ainsi les processus de validation et de décision

· ordre de priorité des documents BIM dans la hiérarchie des documents contractuels

· Les obligations de chaque intervenant sur la maquette (répartition des tâches de chacun)

· Les sanctions en cas d'inexécution du contrats et hors contrat (délictuelle et quasi-délictuelle) et mettant en cause les responsabilités énumérées en deuxième partie.

· Les clauses contractuelles qui sont les dispositions particulières d'un contrat en fonction du projet.

Voici les avis recueillis par les différents intervenants interrogés concernant le contrat et le protocole BIM:

· Selon Maître Benoit-Renaudin : « Il n'y a pas de « contrat BIM », a proprement parlé, c'est à dire que dans votre marché de travaux, l'entreprise qui devait rentrer les spécifications selon la convention BIM. Il faut qu'il y ait quelque chose dans son marché

de travaux qui indique cette convention et la façon de procéder. 1... ]Moi j'ai déjà fait des conventions BIM. Mais c'est moi qui les ai créé. L'avocat est là pour construire le contrat en fonction du client. En droit, il n'y a pas un modèle de contrat pour une activité. C'est le but de mon métier de m'adapter aux projets, aux demandes des clients. Donc les contrats MAF sont un exemple parmi d'autres. Il y a que les petits architectes qui prennent le contrat de la MAF mais dès qu'on a un projet qui dépasse 10 000 euros on prend des avocats qui savent s'adapter. Il y a bien sûr une base commune. Si le contraty est mal adapté parles avocats, nous engageons notre responsabilité. Des personnes ont pour métier de fabriquer des modèles de contrats (de location par exemple). Mais c'est pas parce qu'il y a un modèle que l'on y adhère forcément. Moi, je suis là pour protéger mon client et qu'il est le moins de contentieux possible. Je suis donc là pour trouver des solutions et pour faire un document qui fonctionne. Les clauses dans les contrats sont là pour adapter les contrats aux projets. Le contrat est un acte de prévision. On est donc là pour anticiper les problèmes et trouver des solutions. Dans le BIM, il y a beaucoup à créer car il y a rien. Il n'y a donc pas de solution unique. Il y a beaucoup d'effet de nouveauté mais cela se gère assez facilement »99.

· Selon Monsieur Celnik : «On commence à avoir les idées assez claires sur certains projets. Si le maitre d'ouvrage n'a pas formalisé correctement le BIM dans un cahier des charges, vous ne pouvez rien demander en face. Dire que je veux du BIM cela veut rien dire. Dans la convention BIM, vous répondez au cahier des charges du maitre d'ouvrage. Vous vous engagez à exposer ces questions et vous donnez vos réponses et nous au nom de la maîtrise d'ouvrage on dit si cela nous correspond ou pas et on signe en conséquence. Ces deux documents signés engagent les parties. La semaine dernière nous étions plusieurs AMOA à immobilière 3F pour les aider à mettre en place un nouveau cahier des charges, du moins une synthèse des différents cahiers des charges qu'on a pu faire avec eux sur plusieurs projets depuis 3 ans. Le maitre d'ouvrage donnait son point de vue: «je demande une convention BIM bien entendu et on dit ce qu'il y a dedans et en disant que la convention BIM n'est pas contractuelle». Si tu dis que ce n'est pas contractuel, cela veut dire que cela sert à rien car cela ne sera pas opposable. C'est la règle du jeu de bâtir cette convention BIM mais c'est aussi la réponse de la maîtrise d'oeuvre au regard de la demande de la maîtrise d'ouvrage si on dit que c'est pas

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99 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

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contractuel il n'est pas garanti de la bonne réalisation de son projet et il se tire une balle dans le pied. Dans le contrat de maîtrise d'oeuvre et ensuite dans le contrat avec les entreprises, on dit que le maitre d'ouvrage demande du BIM et que celles-ci sont décrites dans son cahier des charges et que l'équipe de conception ou conception< réalisation devra produire une convention qui l'engage en décrivant ses réponses. Il faut que le maitre de l'ouvrage s'engage à respecter cette convention et dans les contrats de marchés de travaux idem»100.

C - Un nouvel acteur: Le BIM Manager - responsable du BIM Management

Un nouveau type de mission intervient avec l'arrivée de ce nouvel outil: Le BIM

Manager ou Information Manager. Il s`agit du responsable du BIM, du chef d'orchestre de la collaboration. Le BIM étant avant tout un processus de collaboration, c'est lui qui s'occupera de bien la gérer et aura donc un rôle principalement de gestionnaire.

Le BIM Manager n'étant pas encore réglementé, je vais essayer de le définir de la manière la plus précise possible. Il existe déjà des BIM Manager mais le contour de leurs responsabilités reste encore flou « notamment quand il s'agit de déterminer quel

intervenant est le plus qualifié pour assurer cette fonction »101.

Les assureurs souhaitent créer une nouvelle fonction permettant de le cadrer

juridiquement et d'autres comme dans le rapport Pican ne le souhaite pas. L'avenir nous le dira.

Quoi qu'il en soit, le BIM Manager doit avoir l'expérience de projet. En effet, il doit connaître les outils numériques mais également connaître l'expérience de terrain de toutes les phases d'un projet de la conception à l'exécution. Il peut être une personne au sein de la maitrise d'oeuvre (architecte), maitrise d'ouvrage ou bien un intervenant extérieur. Le rapport Pican et d'autres spécialistes s'accordent sur « la fonction de BIM Management plutôt que sur la création d'un poste de BIM Manager ».

100 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

101 C. Croix & D. Da Palma, «travailler en mode BIM: Quels risques juridiques?», www.sebanCassocies.avocat.fr, Octobre 2016

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Pour essayer de définir son rôle revient sur la question des responsabilités. Comme on a pu le voir dans la partie II, Les responsabilités de droit commun n'auront pas de répercution avec l'usage du BIM sur un projet contrairement aux garanties légales des constructeurs qui impacteront ceux qui sont « constructeurs ». Cette question de « constructeur » est importante car elle permet de connaître les limites de responsabilités de ce nouvel acteur. Un «constructeur» au sens de la loi est défini par l'article 1792-1 du Code Civil par : « est réputé constructeur de l'ouvrage:

· tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage;

· toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire;

· toute personne qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de
l'ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage ».

Encore beaucoup hésitent sur les limites de responsabilités de ce nouvel acteur:

· Soit il ne peut intervenir sur la construction de l'ouvrage et donc seulement gérer la maquette numérique sans la modifier et ne sera donc pas un constructeur au sens de la loi et ne sera pas soumis aux responsabilités légales des constructeurs et notamment décennales. Sa responsabilité civile de droit commun sera mise en oeuvre si il perd des données de la maquette car il en est le garant. Il serait BIM-manager Non constructeur. Il sera dans ce cas un prestataire de service et n'aura pas d'obligation de résultats mais seulement de moyen. «Le BIM Manager, même si il est lié contractuellement au maître d'ouvrage, peut avoir son intervention limitée à une gestion pure et simple de l'outil informatique sans intervention sur la construction elle-même»102. Mais cette responsabilité ne pourra être que contractuelle et le BIM Manager ne sera pas considéré comme un constructeur et devra seulement gérer les intervenants entres eux et ne sera donc pas tenu des garanties légales des constructeurs.

102 Cyril Croix, Barbara Dufraisse et Francesca PAGGI (Avocats Seban & Associés), «construire avec le BIM: éléments d'analyse juridique».

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« Dans ce cas, le Bim Manager:

o ne prend pas de décisions techniques qui appartient aux intervenants (responsabilité inaliénable des entreprises ou de la maîtrise d'oeuvre)

o analyse les interférences identifiées par le logiciel et détecter toute autre interférence de présynthèse et en informer les intervenants

o propose (avec l'assistance de l'architecte, du maître d'oeuvre d'exécution et des BET concernés) des solutions pour les interférences identifiées».

o voire même signale au coordinateur des études les principaux conflits constatés, la présynthèse ne relevant pas de ses responsabilités »103.

· Soit il sera un BIM Manager technique-constructeur et sera qualifié de constructeur et sera redevable des responsabilités légales. Il ne pourra se défaire d'un litige seulement si il démontre l'existence d'une cause étrangère (article 1792 alinéa 2 du code civil). Si en revanche une erreur est de sa faute il faudra déterminer si celle-ci est du à une faute de conception ou une erreur de saisie informatique. En revanche, s'il doit s'occuper de la conception de la maquette et gère les clashs104, il pourra être assimilé de constructeurs et devra répondre de ces responsabilités légales des articles 1792 et suivant du code civil.

Ainsi la limite entre BIM Manager-constructeur et BIM Manager-non constructeur est encore floue et doit être définie contractuellement afin de délimiter ces responsabilités.

Le problème que peut poser l'arrivée de ce nouvel intervenant est la confusion lorsqu'il serait doté de plusieurs casquettes. En effet, il ne s'agit pas réellement d'un nouveau métier mais d'un intervenant extérieur, faisant partie de la maitrise d'oeuvre ou à la maitrise d'ouvrage ou assistance à la maitrise d'ouvrage. Aura-t-il le même rôle si il intervient en tant qu'architecte ou en tant que maître d'ouvrage ? Il ne faut pas qu'il y ait immixtion des fonctions et garde bien son rôle de BIM Manager. «Le BIM est un outil d'anticipation et de synthèse technique destinée aux maîtres d'oeuvre qui pour écarter toute méprise sur la responsabilité du BIM manager, nécessite des contrats explicites et correctement rédigés pour tous les intervenants. Le danger étant, pour l'architecte BIM Manager qui n'a pas la

103 Table ronde «Le BIM: quels enjeux, quels avantages, quels obstacles pour l'ingienerie et la MOA', organisé par l'OPQIBI, Juin 2017

104 [Voir glossaire page 103]

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mission de conception architecturale, de faire de la prescription pour laquelle il n'est pas missionné et d'engager sa responsabilité au-delà de ses obligations contractuelles»105.

Avis recueillis à propos de ce nouvel acteur:

· Selon Monsieur TREHEN : « Oui le BIM est un exercice à lourde responsabilité si il est fait comme un acteur de Maîtrise d'oeuvre. A partir du moment, où l'on manipule la Data directement, c'est à dire qu'elle est manipulé pour être mise ailleurs, on est susceptible d'être reconnu comme étant être l'auteur de cette data. La fondation du BIM, c'est la gestion de la data. La data circule par les uns et les autres et nous on est juste là pour vérifier que les autoroutes sont dégagées, que les péages sont encore là, savoir si la signalisation est toujours bien active... Mais on n'est surtout pas là pour prendre la voiture qui est en panne sur le côté, prendre le volant et terminer la route. Cela est strictement interdit. On n'est pas vérificateur. Je ne peux pas toucher à la maquette. Mon rôle est de dire «faites attention, parce que si vous êtes sur cette branche là, vous risquez d'avoir un problème plus loin». Mais ce n'est pas moi qui vais les conseiller d'aller sur telle ou telle branche. On reste dans la gestion de la data. Et donc la dangerosité de la responsabilité du BIM, c'est de mettre en place le processus dans lequel l'intervention du BIM Manager est indispensable »106.

· Selon Maître Benoit-Renaudin : « La question face à cette nouvelle profession de BIM Manager est de savoir si il est constructeur ou pas (juridiquement parlant). Tout d'abord vous n'avez pas de «contrat BIM». Vous avez des marchés de contrats de travaux et des contrats d'architectes. Le BIM y est intégré. Il n'est qu'un nouvel outil de travail. Donc il ne peut pas y avoir de contrat BIM a proprement parlé. Quand vous faites construire quelque chose, vous recourez au service d'un architecte. Vous faites un contrat d'architecte ou de maitrise d'oeuvre, ensuite vous concluez un contrat avec un promoteur par exemple mais il n'y a pas de contrat BIM a proprement parlé. Le BIM est juste intégré aux contrats existants. Ce sont donc des éléments qui sont intégrés. C'est pour cela que la nouveauté existe par petites touches.

105 «La MAF et le BIM: bien assurer, bien protéger les architectes», les architectes et le BIM, édité par l'UNSFA, Octobre 2016

106 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

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Pour revenir au BIM Manager. Le BIM Manager n'a pas à intervenir pour modifier la maquette numérique. Il est juste là pour orchestrer. Il n'est donc pas constructeurjuridiquement parlant. Son travail c'est du management, il doit juste orchestrer I Le BIM est un outil il est donc là pour vérifier que l'outil est bien utilisé. Il n'a pas à intervenir sur le contenu lui-même. Si il la modifie il est en immixtion fautive et il sortira de son domaine d'intervention. Il a un vrai rôle de coordination. Mais avec ça rien n'estfigé. Si votre BIM Manager est dans l'équipe de maitrise d'oeuvre, il voudra peut être mettre son petit grain de sel. Mais à mon avis il ne faudra pas qu'il le fasse parce que chacun doit garder son rôle.

Mais on ne va pas sortir l'architecte de sa mission?

Maître Benoit-Renaudin : Si mais l'architecte ne peut avoir plusieurs casquettes dans sa mission. Si sa casquette c'est d'être BIM Manager et dit qu'il fautfaire cela de cette manière c'est bon. Si il donne son grain de sel, il sortira sur sa casquette d'architecte. Donc selon les missions, il faudra bien connaître quelle obligation est en cause. Ce n'est donc pas forcément que du conseil puisqu'il doit absolument respecter la convention BIM. Conseiller quelqu'un, vous le laisser libre de faire quelque chose. Le BIM Manager est là pour faire respecter la charte, la convention, etc. »107

· Selon Monsieur Darremont : « Ce métier n'existe pas à proprement parler. Ce métier en tant que tel ne peut exister. Le BIM est seulement un nouvel outil, il n'engendre pas de nouveau métier. Ce sont des compétences à obtenir dans un métier ce qui est bien différent. Il fautjuste aller un peu plus loin. C'est une question de management. Tout le monde est à peu près au même point. Les plus grosses entreprises sont plus rapides par rapport aux plus petites. Mais cela ne veut pas dire que les plus petites iront dans le sens des plus grosses. C'est l'évolution du marché qui nous le dira. Il y a aussi l'impulsion des maitres d'ouvrage qui va être importante. La plupart des maitres d'ouvrage ont signé notre charte pour l'horizon 2022. Si cela marche nous seront en avance sur les anglais par exemple et pourtant on n'aura pas fait de loi »108.

107 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

108 Entretien avec D. Darremont, Chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (FFB), janvier 2018

· 68

Selon Monsieur Celnik : « La chose nouvelle qu'apporte ces contrats MAF c'est de dire que le BIM manager ou les acteurs qui font du BIM management sont des acteurs de la construction, idéalement c'est bien plus un rôle pris par les acteurs existants qu'un métier occupé par un nouvel acteur. Idéalement c'est un membre de l'équipe que quelqu'un rapporté de l'extérieur et ce n'est pas un maitre d'oeuvre, ce n'est pas un constructeur au sens de l'article 1792. Ça c'est nouveau. Avant les gens ne se prononçaient pas. Moi j'avais presque tendance avec ma casquette d'architecte et d'élu à l'ordre des architectes à au contraire revendiquer qu'il était un constructeur pour éviter que des gens qui ne soit pas du monde de la construction ne se mette là dedans alors qu'ils n'étaient pas compétent en construction et que c'était peut être que des consultants.

Vous avez déjà eu des cas où ce BIM manager était nommé constructeur au sens de la loi?

Monsieur Celnik : J'ai pas eu de cas où la question s'est posé mais j'ai des cas où l'ambiguïté était évidente. La seule vraie réponse sera apportée par les tribunaux lorsqu'il y aura eu des problèmes. C'est lorsqu'il y aura une jurisprudence, on verra comment un juge ou plusieurs juges auront tranché. Peut être qu'un juge dans 10 ans dira que contrairement à ce que dit l'agence X et son assurance, nous estimons que le BIM manager est constructeur ou pas. Souvent les architectes qui font du BIM sur des projets pensent que comme ils ont un BIM Manager dans la conception ils pensent qu'ils sont assurés à hauteur des heures passées en tant que BIM manager (1 à 2% du contrat de maîtrise d'oeuvre environ) comme un architecte et donc constructeur. La crainte de la MAF est qu'un projet arrive devant un juge avec des problèmes de retards alors qu'on a fait du BIM et peut être à cause des gens qui font du BIM et qui l'ont mal fait. Ils me collent sur la tête 5 à 10% de résolution du litige alors que j'ai cotisé qu'à hauteur d'1%. D'où le souci de la MAF qui résonne pour ces adhérents et pour elle-même d'essayer de s'évacuer. [...]

Vous avez donc un avis sur ces questions?

Monsieur Celnik : Je suis un peu entre les deux. J'ai quand même tendance à dire à mes étudiants HMO en école d'architecte, les responsabilités il faut les assumer et les

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valoriser. Là où il y a des ambiguïtés, soit le management est directement assuré par exemple par une agence d'architecte et il a les deux rôles, à la fois architecte du projet et BIM Manager. Depuis le début la MAF disait aux architectes, on a toujours couvert nos adhérents dans l'exercice de leur métier et aujourd'hui il passe par le BIM, vous êtes donc couverts d'office sans cotisation supplémentaire. C'est surtout d'amener à préciser qu'est que l'on fait réellement, qu'est qu'on demande et dire clairement qui fait quoi, quand et comment et puis après est ce qu'on a respecté ou pas le contrat. Il y a des cas d'ambiguïtés que j'ai vu à plusieurs reprises, notamment lorsque le maitre d'ouvrage ne confie pas la mission de BIM management à un membre de l'équipe initiale même si c'est un cotraitant mais de quelqu'un de complétement extérieur. J'ai en tête un projet privé où on a une équipe de maîtrise d'oeuvre, on a un AMO BIM qui nous aide à préparer notre cahier des charges et on va mandater un BIM Manager extérieur. Il y a quelques boîtes spécialisées qui font souvent à la fois de la maîtrise d'oeuvre d'exécution, de la synthèse et qui font du BIM. Dans cette mission, cette boite là avait une mission uniquement de BIM manager dont on cherche à définir le contour. Lorsqu'on a commencé à creuser un peu et on leur pose des questions, ils nous disent «on est BIM manager, on fait la convention, on s'assure que les architectes et les bureaux d'études travaillent bien entres eux, on s'assure que tout va bien mais bien sûr ce sont eux qui font tout». Là où il y a de l'ambiguïté c'est sur la synthèse car souvent on pense qu'avec le BIM il n'y a pas de synthèse. En tant que BIM manager c'est de créer les missions de la synthèse, de faire en sorte que parce que les maquettes existent, qu'elles répondent bien au cahier des charges, qu'elles sont bien positionnées les unes par rapport aux autres...

Mais est ce que le BIM manager peut modifier cette maquette numérique?

Monsieur Celnik : Justement! C'est évident qu'il ne faut pas qu'il puisse. Mais dans ce projet, j'ai fait exprès de leur poser la question.

- «Donc on est d'accord, vous assemblez les maquettes de façon à ce que la maîtrise d'oeuvre voit les incohérences éventuelles. Et est ce vous détectez les clashs?

- Oui on appuie sur le bouton qui permet de le faire. Et qu'est que vous faites si vous voyez un problème ? Comme on est quand même ingénieur à la base, on a des activités de synthèse par ailleurs si on voit un problème on va proposer des solutions de résolution.

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- Et la cela ne s'appelle pas de la maîtrise d'oeuvre ce que vous dites ? Vous lui confiez une mission de BIM management et pas de maîtrise d'oeuvre et dans ce cadre là ces honoraires ne correspondent pas à ça. Il n'est pas assuré sur ce projet là pour la maitrise d'oeuvre».

On est dans un cas concret où le rôle n'est pas correctement déterminé. C'est bien le but des contrats de la MAF et surtout le tableau à côté qui permet de répartir les rôles. On reparle à cette occasion des conventions de groupement de maîtrise d'oeuvre qui existe depuis toujours sans BIM. Ce tableau permet tout simplement de dire qui fait quoi. C'est mon avis global sur le BIM.

Cela peut être quelque chose de très précis. Dans l'absolu si on creuse sur le BIM, c'est de dire et on le voit sur beaucoup de projets. Quand le maitre d'ouvrage dit: «je veux cliquer sur la maquette etje veux connaître le numéro de la porte, l'état du parement de la porte et le degré coupe feu. Il y a une question technique qui dit comment on fait concrètement cette porte, comment on met cela dans la maquette et il y a la question méthodologique de dire: cette information là, dans ce projet là, est ce que c'est l'architecte ou l'économiste qui la définit dans le jeu des acteurs du BIM ? Comment ils se sont organisés sur ce projet là ? On fera en sorte que cela soit l'un ou l'autre et on dira que si c'est l'économiste qui est en charge de préciser ces points là. Par exemple, l'architecte exporte le tableau de portes en Excel puis le donne à l'économiste qui le remplit et le BIM manager le remet dans la maquette. Dès que l'on cliquera dans la maquette on aura une info de qui a fait quoi et qui a mal fait les choses si il y a un problème »109.

D - Exemple des Contrats MAF : opinions

Le seul assureur à avoir sorti des contrats « types » de maîtrise d'oeuvre est la Mutuelle des Architectes Français (MAF). Ils permettent de protéger les maitres d'oeuvre qui veulent utiliser le BIM dans leurs projets car beaucoup trop de maîtres d'oeuvre s'engagent dans une démarche BIM sans convention ou sans contrat. Selon ces contrats le BIM manager n'est pas un constructeur comme vu précédemment et n'est donc pas soumises aux articles 1792 et suivants du code civil.

109 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

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Ils ont sorti 4 outils:

· Conditions générales du contrat de BIM Manager (si il est distinct de la casquette de maitre d'oeuvre) qui précise la nature du contrat, la mission et la responsabilité du professionnel.

· Conditions générales de la mission complémentaire BIM Manager lorsqu'il est sous la casquette de maitre d'oeuvre cadre son rôle

· Conditions générales du contrat d'assistance à maitrise d'ouvrage BIM (AMO BIM) qui cadre la mission d'aide aux choix des acteurs assiste le maitre de l'ouvrage dans la rédaction d'un cahier des charges.

· Tableaux de répartitions des tâches qui décrivent l'environnement technique et collaboratif du BIM, ainsi que l'organisation et le rôle des acteurs de l'opération

Ils permettent de mettre une première idée de contrats BIM. Ils essaient de clarifier le rôle que joue chaque acteur et encadrent les relations entre la maitrise d'ouvrage et les acteurs du projet BIM.

· Selon Monsieur TREHEN : « Ils ne posent pas le problèmes dans le bon sens selon moi. Ils ont oubliés que le BIM manager n'était pas un synthétiseur de données. Ils se sont trompés sur son réel rôle. Il doit mettre en place toutes les infrastructures de process de données pour que tous les acteurs puissent faire la maquette numérique du projet. La maquette numérique à une échelle donnée c'est tout simplement n'importe quoi. Cela n'a aucun sens! »110

· Selon Maître Benoit-Renaudin : « Ils ont le mérite d'exister. La seule chose que je peux leur reprocher, c'est qu'ils donnent des généralités sur le BIM et ils ne sont pas dans l'action. Ce n'est pas assez complet à mon avis. Mais c'est toujours une base. Ils sont un bon exemple mais ils ne sont peut être pas assez protecteurs. Entre un contrat type qui existe et l'inexistence de contrat, il vaut mieux cela. Les architectes travaillaient avant sans contrat. Donc il vaut mieux un contrat qui les protège 1...]. Ils permettent d'aider les gens qui n'ont pas les moyens d'aller voir un avocat c'est à dire les petites structures. Et

110 Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

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c'est super car des personnes ont réfléchi à une trame assez simple avec un cas le plus général possible »111.

· Selon Monsieur Darremont : « Ce sont des contrats qui ont été fait par la MAF pour avoir des modèles de contrats pour les maîtres d'oeuvre. Si vous êtes par exemple un architecte assuré à la MAF et que vous voulez faire du BIM l'assureur propose ces contrats types. Cela permet de les assurer. La FFB a fait une démarche un peu différente, on a rédigé juridiquement l'ensemble en créant une chartre d'engagement long terme que l'on commence à diffuser en région. Cela permet de leur dire que si ils font du numérique regardez si vos contrats d'assurances assurent bien les risques. C'est un guide d'aide qui permet d'éviter qu'ils fassent des erreurs. Si les assureurs ont mal assuré leurs assurés en fonction des risques, c'est un risque pour l'assureur. Leurs contrats n'apportent pas toutes les protections à leurs assurés. Je ne suis pas sûr qu'ils couvrent toutes les situations »112.

· Selon Monsieur Celnik : « Nous les avons composé avec une vingtaine de personnes de métiers divers: avocats, experts, architectes, BIM manager, représentant d'agences en grandes réunions collégiales puis écrit à trois: un avocat, un expert construction et moi. On a un contrat AMO BIM, un contrat de BIM manager autonome et un troisième. La MAF donne ces contrats à ses assurés et leur disent que si ils ont des missions spécifiques BIM on peut bien vous assurer si vous suivez la marche à suivre. Il permettre de dire que en fonction du contexte il faut déterminer les contrats avec les responsabilités, il faut déterminer les rôles, le droit d'auteur, la garantie décennale, etc. Tout cela existe. Il faut tout d'abord rappeler ces fondements a des gens qui les ignorent et leur dire que sur un projet il faut un contrat, si on est d'accord on signe et si on n'est pas d'accord on discute et on ne signe pas ! [...] »113.

111 Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

112 Entretien avec D. Darremont, Chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (FFB), janvier 2018

113 Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

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Conclusion

Afin de répondre à la problématique, j'ai ainsi fonctionné en trois temps. J'ai premièrement rappelé les différentes généralités concernant le BIM et notamment les niveaux de développement de la maquette numérique qui aura des répercutions sur les droits de propriété de celle-ci et les responsabilités des acteurs. Dans un deuxième temps, j'ai étudié le cadre légal actuel en France en terme de BIM et je l'ai comparé avec ce qui se fait dans les autres pays. Le France a voulu ne pas l'imposer dans ces marchés de contrats de travaux contrairement à d'autres, comme Singapour, les pays scandinaves et la Grande Bretagne. C'est un choix mais pas une mauvaise idée car cela permet aux acteurs de s'habituer avant d'imposer par la loi son utilisation. Dans la dernière partie j'ai montré que le BIM pouvait s'adapter aux contrats actuels mais qu'il fallait plus de hiérarchisation et essayer de mieux clarifier les choses. «Les contraintes juridiques du BIM ne sont aucunement un frein à son expansion, bien au contraire, d'autant que le contrat est son allié privilégié»114. L'utilisation du BIM fait naître, certes, un certain nombre de problématiques juridiques et le contrat semble être, à l'heure actuelle, le meilleur moyen pour éviter aux acteurs de la maquette numérique de s'exposer aux risques juridiques que j'ai pu identifier. L'arrivée du BIM engendre par conséquent des interogations puisque c'est un nouvel outil qui vient perturber les échanges entre les acteurs d'un projet mais elles ne sont aucunement un frein à son développement.

114 Marie-Alexandra Vankemmelbeke et Wanda Bellaiche, « les craintes juridiques autour du BIM sont elles justifiées ?, Batiactu, février 2017

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Annexes

Les entretiens

A - Monsieur Jean Paul TREHEN

Directeur Building Information Management chez Egis Bâtiment Innovation Design & Informatique.

Vendredi 5 Janvier 2018 (10h30 - 11h15)

«- Monsieur TREHEN, merci de m'accueillir dans votre entreprise. Je suis ingénieur en bâtiment. Je suis des cours de droit au CNAM-ICH de Paris et je prépare en même temps dans le cadre de mon Master 2 d'architecture à l'ENSAPVS un mémoire sur les questions juridiques et contractuelles du BIM. Vous êtes le directeur BIM chez Egis, en quoi consiste votre travail?

Monsieur TREHEN : Bonjour Stanislas ! Je participe à l'élaboration de la stratégie de déploiement et d'adoption du BIM au sein du groupe EGIS pour la discipline dans lequel j'ai le plus d'expertise à savoir le bâtiment.

- Vous vous occupez de toute la France?

Monsieur TREHEN : Oui! Territorialement il n'y a pas véritablement de territoire, c'est même à l'international. C'est à dire qu'Egis est structuré de la façon suivante, c'est un groupe qui est représenté dans le monde où la maison mère est à Boulogne-Billancourt. Dans le cadre de la SA (Société Anonyme), il y a un sous groupe qui s'occupe du projet d'entreprises appelé «BIM By EGIS» qui de façon formelle, identifie et pilote, extrait, recherche tous aspects du BIM qui peut être déployé dans EGIS.

- J'ai vu que le groupe EGIS était extrêmement large, est ce que vous vous occupez que du BIM dans le bâtiment?

Monsieur TREHEN : Je m'occupe que du bâtiment. Il y a en effet d'autres disciplines qui sont couvertes par d'autres personnes. On est à la fois des experts et des référents. On est un peu des passages obligés c'est à dire que l'on ne connait pas tout mais l'idée d'avoir des référents

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Corporate, cela permet de concentrer de l'information pour permettre de ne pas refaire deux fois la même chose. Cela recouvre à la fois la technique, les process, les méthodes, les outils et la formation que j'assure directement moi-même.

- Votre entreprise est-elle très développée dans le BIM et dans quel secteur?

Monsieur TREHEN : Alors chez nous c'est principalement le bâtiment. L'histoire du BIM chez Egis, c'est 2010 et cela a commencé parle bâtiment. Moi je suis arrivé en 2012 donc on peut dire que le BIM a réellement débuté en 2012. Avant ils y avaient seulement quelques outils. Je suis en quelque sorte le pionnier du BIM chez Egis car il y avait que moi pour mettre réellement en place le BIM dans tous les domaines. Il s'est avéré rapidement, qu'au delà des grands principes, dès que l'on commence à descendre vers la pratique, on a besoin des expertises métiers. On ne peut pas prétendre tout savoir. Encore une fois, le BIM ce n'est pas faire le métier des autres, c'est d'articuler les métiers entres eux. Il faut donc des expertises métiers pour faire du BIM, il n'y a pas de secret.

- En parlant d'expertise métier, j'ai vu que vous avez été anciennement un BIM Manager?

Monsieur TREHEN : Oui, j'ai été moi-même BIM Manager. J'ai été architecte etj'ai fait des vrais projets avant de commencer à les faire de façon virtuelle. J'ai travaillé également huit ans chez AutoDESK avant d'arriver en 2012 chez Egis, où je faisais du déploiement afin de trouver des solutions BIM chez AutoDESK. J'avais mis en place une méthodologie pour adopter les outils BIM au sein d'AutoDESK. Je le fais maintenant chez EGIS et à l'international en plus, au Moyen Orient sur des «petits» projets d'un million de mètre carré plus précisément.

- Etes vous en contact avec les responsables BIM Egis d'autres pays ? En effet, j'ai remarqué que l'on été pas très évolué en France. Pourquoi eux avancent et pas nous?

Monsieur TREHEN : Je vais être clair, je ne sais pas pourquoi on évolue pas plus vite juridiquement. En effet, je suis arrivé en 2012 et avantj'étais à l'étranger chez AutoDESK qui est une société américaine et qui ne s'occupe pas que d'un seul pays. Quand je suis arrivé chez EGIS, c'est la première chose que j'ai remarquée en effet. J'étais vraiment étonné qu'il ne fasse pas plus de loi pour que cela avance parce que si au bon vouloir des uns et des autres on sera prêt en 2035. Et non, c'est très français ! Je ne sais pas ce que l'Etat attend. C'est dans la culture

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française à mon avis. Cela ne se fait pas de faire la version 2 de quelque chose qui a été fait en version 1 par quelqu'un d'autre. En fait, si un tel fait quelque chose, cela ne viendrait pas à l'idée de faire la version 2 de celui qui a fait la version 1. C'est ça le fond du problème en France, c'est totalement sidérant, alors que dans tousles autres pays du monde lorsque quelque chose est bienfait les gens le prenne et l'enrichisse. En France, lorsque une chose est bien faite, tout le monde va commencer à dire que ce qui a été fait est mauvais et on va recommencer nous< même. C'estfou mais c'est comme ça ! C'est comme le PTNB. J'adore le PTNB, il y a que des gens compétent mais la mission initiale du PTNB est quand même surréaliste c'est à dire que l'on va inciter les gens à faire connaître. Il n'avait pas vocation à imprimer quelque chose, à dire c'est comme ça qu'il faitfaire. Donc inspirer, faire connaître, solliciter, conseiller mais au bout du compte, on a rien. Le manifeste qu'ils viennent de créer et signer en début d'année avec le gouvernement. C'est une charte numérique dans le cadre de la transition numérique qui inscrit en dur que d'ici 2022 : on ne fera rien ! C'est vraiment une catastrophe numérique pour la France. Ce rapport s'intitule «Objectif BIM 2022». Il faut que vous le lisiez absolument! Ce qui est étonnant c'est que tout le monde est content de cela et tout le monde se réjouit de cela. Cela montre encore une fois que cela impose que chacun fasse ce qu'il veut en matière de BIM.

- On n'est donc pas prêt d'évoluer?

Monsieur TREHEN : Si on va évoluer mais chacun dans son coin. On est encore chez les Gaulois. Cela augmente le fait qu'il y a encore rien de normalisé. Voilà le fond du problème. Au jour d'aujourd'hui des gens se plaignent parce que tel BIM Manager fait ceci, tel BIM manager fait cela, telle assurance veutfaire ceci, telle assurance veutfaire cela, tel syndicat veutfaire ceci, tel syndicat veut faire cela, etc. Il y a donc rien de cohérent, tout le monde fait ce qu'il veut. Un maître d'ouvrage peut dire ce BIM manager il est bien mais celui là l'est moins. Il ne peut pas puisque de toute façon chacun fait ce qu'il veut. C'est donc du copinage, cela induit des erreurs et on perd du temps.

- En attendez-vous donc plus de l'évolution de la loi relative au BIM en France?

Monsieur TREHEN : Alors oui on devrait aller plus vite au niveau législation mais surtout faire évoluer les données contractuelles du BIM en France. Pour être clair, entre la convention BIM, charte BIM, protocole BIM, contrat BIM, plan d'exécution BIM...on est perdu. Il n'y aura jamais la solution puisque tout le monde aura un bon argumentaire pour défendre son point de vue

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donc moi la dessus j'ai pas mon avis puisqu'il aura peu d'intérêt. Puisque de toute façon c'est un argumentaire. C'est donc la responsabilité du gouvernement de donner l'ordonnancement des documents officiels du BIM.

- Pourquoi cet ordonnancement aurait-il une réelle importance?

Monsieur TREHEN : Le BIM aura une réelle importance le jour où l'on pourra faire une recherche en responsabilité sur le BIM. Or pour faire une recherche en responsabilité sur la maquette numérique il faut voir comment les contrats s'enchaînent. Si une personne me dit: «de quoi vous me parler? En effet vous me citez des documents mais ceux-là ne font pas parti de mon contrat...». Aujourd'hui, chacun fait ceux qu'il veut. Des BIM Manager vont arriver vers un maître d'ouvrage de nos jours et lui dire «je vais au moins vous mettre un protocole BIM. Ah bon parce que on m'avait parlé d'une charte. Les uns appellent cela une charte et d'autres les protocoles. Ils vont dire que c'est la même chose alors que c'est faux.

- C'est donc le contrat qui va résoudre en quelque sorte les choses?

Monsieur TREHEN : C'est quand même a un pays d'imposer les choses. Hors BIM, les choses sont légiférées. Tout le monde respecte les CCAG, CCTP... Des décrets les obligent. On ne se pose pas de question. Si on reste comme ça on pourra pas dire qui est réellement responsable.

- Et que disent les avocats en ce moment?

Monsieur TREHEN : Ils disent «mais Monsieur c'estjuste une convention? Ah mais non vous avez utilisé un guide donc cela ne peut pas marcher !'. On ne sait pas de quoi on parle en ce moment car on ne sait pas sur quels documents s'appuyer et on ne sait pas non plus ce qu'il y a dedans. Ce qui donc important c'est donc l'enchainement des pièces contractuelles du BIM qui ne sont pas définit aujourd'hui.

- La France n'impose donc rien alors que d'autres pays le fait dans les marchés publics à partir d'un certain coût par exemple. On ne pourrait pas obliger par exemple les constructions de plus de 10 millions d'euros à utiliser le BIM. C'est ce que je trouve étonnant au niveau de l'Etat français. Qu'en pensez-vous?

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Monsieur TREHEN : La notion d'imposer le BIM selon certains critères est toujours délicat. On ne peut pas l'imposer en France parce qu'on l'a toujours pas définit. Pour imposer quelque chose il faut le définir. En Angleterre par exemple, ils disent il faut travailler de telle façon mais vous devez nous fournir un format commun, vous devez fournir la base de données dans ce format là. Et pour fournir dans ce format là, je vous incite à travailler en BIM. En France, c'est ni l'un ni l'autre c'est à dire que l'on ditjuste «on fait du BIM». C'est vrai que l'on ne peut pas l'imposer parce que on ne sait pas de quoi on parle.

- De grands rapports sont sorties (PICAN, etc.) sont ils selon vous importants pour l'avancée du BIM en France?

Monsieur TREHEN : Oui bien sur ! Il faut quand même reconnaitre ce qui est bon de ce qui a été fait. Pour autant, le PTNB est passé à côté de certaines choses. Certains rapports sont initiés par le PTNB qui est en quelques sortes la voie de la France sur le sujet. Et on a besoin d'avoir la voie de la France. Parce que tout le monde a son opinion. C'est un bon début, c'est un référentiel. Il faut lire le rapport de la MIQCP venant de l'état et soutenu par le PTNB qui prend en compte la loi MOP. C'est un outil de référence et on attend cela dans tous les domaines. Mais ils auraient pu le faire pour la charte, la convention... Il aurait pu le faire comme le CCTP est légiféré ou au même titre Bimisé un CCTP pourquoi pas. Il y a plein de sujet là dessus.

- Et en terme de responsabilités qu'est que cela va changer selon vous?

Monsieur TREHEN : Oui le BIM est un exercice à lourde responsabilité si il estfait comme un acteur de Maîtrise d'oeuvre. A partir du moment, où l'on manipule la Data directement, c'est à dire qu'elle est manipulé pour être mise ailleurs, on est susceptible d'être reconnu comme étant être l'auteur de cette data. La fondation du BIM, c'est la gestion de la data. La data circule par les uns et les autres et nous on estjuste là pour vérifier que les autoroutes sont dégagées, que les péages sont encore là, savoir si la signalisation est toujours bien active... Mais on n'est surtout pas là pour prendre la voiture qui est en panne sur le côté, prendre le volant et terminer la route. Cela est strictement interdit. On n'est pas vérificateur. Je ne peux pas toucher à la maquette. Mon rôle est de dire «faites attention, parce que si vous êtes sur cette branche là, vous risquez d'avoir un problème plus loin». Mais ce n'est pas moi qui vais les conseiller d'aller sur telle ou telle branche. On reste dans la gestion de la data. Et donc la dangerosité de la

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responsabilité du BIM, c'est de mettre en place le processus dans lequel l'intervention du BIM Manager est indispensable.

- Les responsabilités légales dans le BIM 2.0 et 3.0 vont-elles être modifiées?

Monsieur TREHEN : Oui elles vont être profondément modifiées. En BIM 2.0, on est encore en fichiers séparés donc la source de la responsabilité est parfaitement identifiable. En 3.0 le problème est que la responsabilité sera déléguée et cela peut être très grave. C'est comme la responsabilité qui est déployée lorsqu'on installe un logiciel. Lorsqu'on l'installe, on a toujours un texte qui nous demande si on a compris. Je ne suis pas propriétaire du logiciel mais j'ai simplement le droit d'usage. La data que vous allez rentrer dans le logiciel, j'en suis le seul responsable et que la solidité de l'information mise dans le logiciel n'est pas de la responsabilité de l'éditeur. Donc si je ne suis pas capable de la relire, ce n'est pas de sa faute.

- Mais il peut y avoir d'autres problèmes autres que la saisie pour l'éditeur non?

Monsieur TREHEN : Non en cliquant sur la charte d'utilisation, l'éditeur se dédouane de toutes responsabilités même en cas de bug du logiciel qui entraine des retards sur le projet. C'est donc le problème du 3.0. Il va falloir trouver un moyen de savoir comment on peut prouver ce problème à cause des problèmes informatiques car la partie noyau d'information il sera nul part, sur un cloud. On aura je pense des assurances spéciales. Le 3.0 n'existe toujours pas de toute façon. On peut faire croire que le 3.0 existe lorsque tout le monde travaille sur un même logiciel comme REVIT. Mais ce n'est qu'une impression. Il existe seulement un environnement dans lequel on touche au 3.0, c'est PDMS qui est une solution de travail. Il touche au 3.0 car c'est une seule et unique base de donnée disponible par tous les acteurs plus les process qui vont avec. C'est à dire qu'il faut que l'information soit validée pour que une autre personne puisse toucher par la suite à la maquette numérique. On est dans un process de validation. Toute la chaine d'information doit être réalisée. C'est comme ça que l'on construit les centrales nucléaires, tous les bâtiments qui ne demandent aucune erreur.

- Pourquoi le BIM fonctionne pour confectionner des avions de chasse et pas pour un bâtiment alors que c'est plus simple?

Monsieur TREHEN : pour la simple et bonne raison est que l'avion de chasse va être décliné en plusieurs exemplaires. Le jour où Airbus va dire je vais sortir l'A380, il y aura pensé 15 ans à l'avance. Si vous dites à un maitre d'ouvrage, je vais mettre quinze ans à construire votre bâtiment, il va vous rigoler au nez. Et la masse n'est pas le même non plus.

- Avez vous vu les contrats MAF ? Quel est votre avis?

Monsieur TREHEN : Ils ne posent pas le problèmes dans le bon sens. Ils ont oubliés que le BIM manager n'était pas un synthétiseur de données. Ils se sont trompés sur son réel rôle. Il doit mettre en place toutes les infrastructures de process de données pour que tous les acteurs puissentfaire la maquette numérique du projet. La maquette numérique à une échelle donnée c'est tout simplement n'importe quoi. Cela n'a aucun sens !»

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- Monsieur Trehen, je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.

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B - Maître Cécile Benoît-Renaudin

Avocate au Barreau de Paris et au sein du cabinet Martin & Associés Vendredi 5 Janvier 2018 (15h30 - 16h15)

«Maître Benoit-Renaudin, merci de m'accueillir dans votre cabinet. Je suis ingénieur en bâtiment. Je suis des cours de droit au CNAM-ICH de Paris et je prépare en même temps dans le cadre de mon Master 2 d'architecture à l'ENSAPVS un mémoire sur les questions juridiques et contractuelles du BIM. Voici le questionnaire que j'ai préparé.

- Maître Benoit-Renaudin: Tout d'abord, il faut savoir que le BIM ne va pas profondément modifier les contrats et l'aspectjuridique du domaine de la construction. Je vais m'expliquer. Il faut tout d'abord être d'accord que les missions de chaque acteur ne se retrouvent pas particulièrement modifiées. En tous cas dans ses limites car chacun garde ses compétences propres. Concernant la protection des données personnelles, le BIM ne pose pas tant de souci que cela. En effet, si j'interviens sur un espace protégé et que vous pouvez intervenir sur tout et n'importe quoi et que les modifications cause des problèmes, là cela peut être dangereux. Si dans le cloud vous intervenez sur une maquette numérique et que l'ordinateur vous indique que vous sortez de votre zone de modifications possibles sur la maquette, l'ordinateur devra vous indiquer que vous avez violé votre domaine d'intervention. Le logiciel vous indiquant cette violation, tous les acteurs en seront au courant et le problème devra être résolu. Tout est donc un problème de logiciel et de cloud qui soit bien développé et sûre en terme de d'utilisation.

Vous dites que le BIM ne va pas profondément modifier les contrats de constructions mais je m'interpelle sur le fait que beaucoup d'articles sont sortis et qui interrogent les risques que va entraîner cette nouvelle façon de procéder. Tous ces changements, ne vont fondamentalement rien changer?

- Maître Benoit-Renaudin : Par exemple, je sais pas si vous avez vu les articles sorties par le cabinet BenSoussan sur la propriété du droit intellectuel ? Ils disent que cela ne va pas changer grande chose. En fait, c'est nouveau ! Quand c'est nouveau, on se dit est ce que cela ne va pas tout révolutionner ? A ce moment là, il y a un certain nombre de questionnements en effet et d'autres que l'on n'anticipe pas encore. Et en fait, c'est un peu le soufflet maintenant. Qu'est que Le BIM ? Au début, il faut savoir ce que c'est. Après avoir compris comment cela fonctionne, il

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faut se demander si ce mode de fonctionnement entre en perturbation avec les règles de droit. Et au final on se rend compte que non. C'est donc un peu décevant.

C'est donc un peu contradictoire...

- Maître Benoit-Renaudin : Non on pose seulement des questions après c'est pas pour ça que tout va être modifié. Donc on fait un peu monté la sauce en disant que dans les marchés publics cela va perturber les choses... Je pense qu'il ne va plus y avoir de précautions à prendre.

Le BIM est donc, selon vous, plus de peurs que de mal?

- Maître Benoit-Renaudin : Oui je pense. Je pense que ce sont des interrogations légitimes parce que c'est un problème nouveau. Maintenant, si on essaie de trouver des solutions on se rend compte qu'il y a pas grand chose à modifier. Je pense qu'on est encore un peu dans l'effet de nouveauté. De plus, concernant les responsabilités légales, il faut savoir qu'elles ne peuvent pas être modifiées car elles sont d'ordres publiques.

Mais elles vont bien être modifiées dans quelques années?

- Maître Benoit-Renaudin : Alors oui, elles vont être modifiées mais plus tard. Cela va dépendre de la sinistralité. Le but du BIM c'est d'améliorer la construction. Moi quand j'expliquais le BIM à mes collègues qui font que des désordres et des conflits liés à des post-construction,je leur avais dit, vous allez voir il y aura plus de désordres. Ils m'ont regardaient bizarrement en me répondant que ce sont quand même des hommes et il y aura donc toujours des problèmes et des personnes qui vont faire n'importe quoi. Le but est donc d'améliorer la chose. Le but du BIM c'est d'améliorer la qualité. Donc si vous améliorez la qualité vous diminuez le risque de contentieux. Les assurances vont être contentes enfin de compte. C'est pour cela qu'ils sont en train de voir au niveau du BIM Manager.

Oui c'est une question importante. Quel est son rôle juridique selon vous?

- Maître Benoit-Renaudin : La question face à cette nouvelle profession de BIM Manager est de savoir si il est constructeur ou pas (juridiquement parlant). Tout d'abord vous n'avez pas de «contrat BIM'. Vous avez des marchés de contrats de travaux et des contrats d'architectes. Le

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BIM y est intégré. Il n'est qu'un nouvel outil de travail. Donc il ne peut pas y avoir de contrat BIM a proprement parlé. Quand vous faites construire quelque chose, vous recourez au service d'un architecte. Vous faites un contrat d'architecte ou de maitrise d'oeuvre, ensuite vous concluez un contrat avec un promoteur par exemple mais il n'y a pas de contrat BIM a proprement parlé. Le BIM est juste intégré aux contrats existants. Ce sont donc des éléments qui sont intégrés. C'est pour cela que la nouveauté existe par petites touches.

Pour revenir au BIM Manager. Le BIM Manager n'a pas à intervenir pour modifier la maquette numérique. Il estjuste là pour orchestrer. Il n'est donc pas constructeur juridiquement parlant. Son travail c'est du management, il doit juste orchestrer ! Le BIM est un outil il est donc là pour vérifier que l'outil est bien utilisé. Il n'a pas à intervenir sur le contenu lui-même. Si il la modifie il est en immixtion fautive et il sortira de son domaine d'intervention. Il a un vrai rôle de coordination. Mais avec ça rien n'estfigé. Si votre BIM Manager est dans l'équipe de maitrise d'oeuvre, il voudra peut être mettre son petit grain de sel. Mais à mon avis il ne faudra pas qu'il le fasse parce que chacun doit garder son rôle.

Mais on ne va pas sortir l'architecte de sa mission?

- Maître Benoit-Renaudin : Si mais l'architecte ne peut avoir plusieurs casquettes dans sa mission. Si sa casquette c'est d'être BIM Manager et qu'il dit qu'il fautfaire cela de cette manière c'est bon. Si il donne son grain de sel, il sera sur sa casquette d'architecte. Donc selon les missions, il faudra bien connaître quelle obligation est en cause. Ce n'est donc pas forcément que du conseil puisqu'il doit absolument respecter la convention BIM. Conseiller quelqu'un, vous le laisser libre de faire quelque chose. Le BIM Manager est là pour faire respecter la charte, la convention...

Mais si l'état n'impose pas cette hiérarchisation des documents BIM, qui va le faire?

- Maître Benoit-Renaudin : L'état n'est pas une bonne menace. Par exemple, les contrats privés ne recourent pas à l'état donc cela n'a pas réellement d'importance. Ce n'est pas important les sanctions de l'état. En revanche, si vous dites qu'il y a un retard sur mon chantier et que la personne responsable va payer 200 euros par jour de retard, là l'entreprise va réfléchir. C'est pour cela que l'on dit qu'il n'y a pas de contrat BIM c'est à dire que dans votre marché de travaux, l'entreprise qui devait rentrer les spécifications selon la convention BIM et qu'il ne le

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fait pas, il faut qu'il y est quelque chose dans son marché de travaux qui indique cette convention et la façon de procéder.

J'en conclus donc que chacun fait ce qu'il veut avec tous ces documents existants : protocole, charte, convention BIM...?

- Maître Benoit-Renaudin : C'estjuste au maître de l'ouvrage de l'imposer. Aujourd'hui le BIM n'est pas imposé, c'estjuste une faculté. Il ne fait pas ce qu'il veut mais il faut quand même respecter les règles de la commande publique. Aujourd'hui c'est la loi MOP qui s'impose.

Pourquoi la France n'impose rien contrairement aux autres pays?

- Maître Benoit-Renaudin : Parce qu'en France il y a tout simplement des lobbies. En France, on ne peut pas faire ce que l'on veut, parce que cela n'arrange pas tout le monde. Vous auriez été en études d'avocats vous aurez eu des questions sur: est ce que c'est la pratique qui précède le droit ou l'inverse ? En l'occurrence, le législateur, dans le BIM se ditfaites comme vous voulez et on verra dans quelques années. Ce n'est pas sa priorité. On soutient l'initiative privée et après on verra si l'on impose quelque chose au niveau public. Par exemple, la loi MOP a mis des années à être créé. Je crois que cela a duré une vingtaine d'année avant que la loi MOP définitive sorte en 1985. Pour faire une loi il faut coordonner tout le monde et cela prend beaucoup de temps de mettre d'accord tout le monde autour d'un texte. Surtout dans des milieux aussi sensible que le bâtiment qui est moteur dans l'économie. Faire une loi, c'est très compliqué.

Et si on revenait au contrat?

- Maître Benoit-Renaudin : chaque contrat sera adapté au BIM. On va y insérer du BIM tout simplement. Par exemple, en terme de propriété intellectuel, le cabinet Bensoussan, a sorti des notes qui disent bien que les droits de la propriété intellectuelle ne vont rien changer. Pensez vous que l'on se pose la question: «qui est le propriétaire des droits d'auteur ?'. Non, en réalité cette question ne se pose jamais. Il y a toujours une clause de propriété intellectuelle dans les contrats. On le gère déjà cela. Dans le BIM, on a qu'à dire que tout profite au maître d'ouvrage: la maquette numérique et le bâtiment construit.

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Et les contrats MAF qu'en pensez-vous?

- Maître Benoit-Renaudin : Ils ont le mérite d'exister. La seule chose que je peux leur reprocher, c'est qu'ils donnent des généralités sur le BIM et ils ne sont pas dans l'action. Ce n'est pas assez complet à mon avis. Mais c'est toujours une base.

Connaissez vous d'autres contrats comme cela?

- Maître Benoit-Renaudin : Moi j'ai déjà fait des conventions BIM Manager. Mais c'est moi qui les ai créé. L'avocat est là pour construire le contrat en fonction du client. En droit, il n'y a pas un modèle de contrat pour une activité. C'est le but de mon métier de m'adapter aux projets, aux demandes des clients. Donc les contrats MAF sont un exemple parmi d'autres sinon on prendrait des ordinateurs. Il y a que les petits architectes qui prennent le contrat de la MAF mais dès qu'on a un projet qui dépasse 10 000 euros on prend des avocats qui savent s'adapter. Il y a bien sûr une base commune. Si le contraty est mal adapté par les avocats, nous engageons notre responsabilité. Des personnes ont pour métier de fabriquer des modèles de contrats (de location par exemple). Mais c'est pas parce qu'il y a un modèle que l'on y adhère forcément. Moi, je suis là pour protéger mon client et qu'il est le moins de contentieux possible. Je suis donc là pour trouver des solutions et pour faire un document qui fonctionne. Les clauses dans les contrats sont là pour adapter les contrats aux projets. Le contrat est un acte de prévision. On est donc là pour anticiper les problèmes et trouver des solutions. C'est normal que vous vous posiez toutes ces questions mais c'est légitime. Dans le BIM, il y a beaucoup à créer car il y a rien. Il n'y a donc pas de solution unique. Il y a beaucoup d'effet de nouveauté mais cela se gère assez facilement.

Pour conclure vos propos, on peut faire facilement du BIM si le maître d'ouvrage le souhaite?

- Maître Benoit-Renaudin : Oui, bien évidemment! On n'attend pas que le législateur se prononce sinon on n'y arrivera pas. Même maintenant, il y a déjà pas mal de projetfait en BIM. Pourquoi le gouvernement s'intéresse à un modèle de contrat ? Pour aider les gens qui n'ont pas les moyens d'aller voir un avocat c'est à dire les petites structures. Et c'est super car des personnes ont réfléchi à une trame assez simple avec un cas le plus général possible. Et donc le Plan de Transition Numérique (PTNB) voulait proposer des conventions types non pas pour

quelles s'imposent mais pour que les gens qui n'ont pas les moyens d'aller voir un avocat, des conseils juridiques puissent avoir un outil de base et de référence. Parce que c'est un des secteurs qui possède le plus de petites et moyennes entreprises. Mais cela reste un «modèle».

Ces contrats sont donc un bon exemple?

- Maître Benoit-Renaudin : Oui bien sur! Mais ils sont peut être pas assez protecteurs. Entre un contrat type qui existe et l'inexistence de contrat, il vaut mieux cela. Les architectes travaillaient avant sans contrat. Donc il vaut mieux un contrat qui les protège.

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Maître Benoit-Renaudin, je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.

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C #Monsieur Didier DARREMONT

Chef de département Transition Numérique Bâtiment et BIM - Direction des Affaires Techniques de la Fédération Française du bâtiment (FFB)

Lundi 15 Janvier 2018 (13h30 - 14h15)

«Monsieur Darremont, merci de m'accorder du temps pour répondre à mes questions. Je suis ingénieur en bâtiment. Je suis des cours de droit au CNAM-ICH de Paris et je prépare en même temps dans le cadre de mon Master 2 d'architecture à l'ENSAPVS un mémoire sur les questions juridiques et contractuelles du BIM. Tous d'abord je voulais savoir quel rôle avait la FFB dans l'avancée du BIM?

- Monsieur Darremont : Bonjour Stanislas! Tout d'abord pour rappeler ce que fait la FFB dans la partie numérique. Je suis chef de département Transition Numérique Bâtiment et BIM. Ce poste a été créé il y a deux ans afin de réfléchir plus précisément sur les nouvelles technologies. Elle a donc créé un service dédié complet à cette approche même si elle y réfléchissait déjà lorsqu'elle faisait partie de l'association MédiaConstruct. La FFB est partie il y a deux ans pour participer à la partie PTNB essentiellement.

Vous avez donc participez à tous ces rapports?

- Monsieur Darremont : Exactement! Nous participons à toutes les actions sur le numérique. On a également créé une nouvelle association: «ADN Construction» l'été dernier qui englobe toutes les opérations qui sont présentes au PTNB. Le siège étant à la FFB.

Vous avez donc un certain poids pour inciter le BIM?

- Monsieur Darremont : Oui car on travaille avec toutes les entreprises de bâtiments. Cela permet de les réunir et éviter que chacun soit de sont côté. On peut savoir ce que font les uns et les autres et on met tout en commun. On traite de tous les sujets y compris la partie juridique du bâtiment. Et c'est un sujet qui est loin d'être simple.

Pourquoi la France n'avance pas aussi vite que les autres pays européens selon vous ? En Grande Bretagne, par exemple, ils imposent le BIM sur de gros projets.

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- Monsieur Darremont : Justement, on est en train de faire un benchmark (de l'anglais référence) sur tous les pays européens qui est en train de corriger tous ces discours qui diffèrent. C'est donc un recensement de ce qui se fait en ce moment et les différentes visions du numérique en fonction des différents états. On va le sortir d'ici quatre mois. C'est une vraie étude en dehors de tous les lobbies commerciaux des uns et des autres. Pour savoir réellement comment les actions existantes ont été faites et comment elles s'y sont mises. On dit par exemple que l'Angleterre est plus en avance mais pas tant que ça. Ce qui a été réellement touché par le BIM en Angleterre ce n'est même pas 5% de leur marché, lorsqu'on parle d'obligation bien sûr. Un document officiel est sorti: «charte engagement volontaire de la filière du bâtiment pour la construction numérique: objectif 2022». La France a pris une démarche de long terme. Elle ne voulait pas d'engagement volontaire. Toute la filière du bâtiment est concernée avec des acteurs privés, grands groupes et la FFB qui s'y engagent. En France, on ira vers l'avant par le volontariat. Au niveau de l'état, c'est donc un engagement au long terme jusqu'à 2022 puisqu'il la signé.

Les lois ne vont pas être changé par conséquent?

- Monsieur Darremont : Ah non ! Il n'y aura aucune modification de la loi ni de la loi MOP en particulier. En tous cas ce n'est pas du tout prévu. On fait bien du BIM sans modifier la loi donc la loi n'a pas à être modifié pour faire du BIM.

Avez-vous entendu parlé de contrats types comme ceux de l'assureur MAF ?

- Monsieur Darremont : Ce sont des contrats qui ont été fait par la MAF pour avoir des modèles de contrats pour les maîtres d'oeuvre. Si vous êtes par exemple un architecte assuré à la MAF et que vous voulez faire du BIM l'assureur propose ces contrats types. Cela permet de les assurer. La FFB a fait une démarche un peu différente, on a rédigé juridiquement l'ensemble en créant une chartre d'engagement long terme que l'on commence à diffuser en région. Cela permet de leur dire que si ils font du numérique regardez si vos contrats d'assurances assurent bien les risques. C'est un guide d'aide qui permet d'éviter qu'ils fassent des erreurs. Si les assureurs ont mal assuré leurs assurés en fonction des risques, c'est un risque pour l'assureur. Leurs contrats n'apportent pas toute les protection à leurs assurés. Je ne suis pas sûr qu'ils couvrent toutes les situations.

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Y a t-il d'autres assureurs qui ont sorti des contrats comme cela?

- Monsieur Darremont : Pour l'instant ce sont les seuls mais cela ne veut pas dire que les autres n'y pensent pas. Et comme tous les maîtres d'oeuvre ne peuvent pas payer un avocat, nous on propose une charte d'engagement.

Et concernant le BIM Manager?

- Monsieur Darremont : Ce métier n'existe pas à proprement parler. Ce métier en tant que tel ne peut exister. Le BIM est seulement un nouvel outil, il n'engendre pas de nouveau métier. Ce sont des compétences à obtenir dans un métier ce qui est bien différent. Il fautjuste aller un peu plus loin. C'est une question de management. Tout le monde est à peu près au même point. Les plus grosses entreprises sont plus rapides par rapport aux plus petites. Mais cela ne veut pas dire que les plus petites iront dans le sens des plus grosses. C'est l'évolution du marché qui nous le dira. Il y a aussi l'impulsion des maitres d'ouvrage qui va être importante. La plupart des maitres d'ouvrage ont signé notre charte pour l'horizon 2022. Si cela marche nous seront en avance sur les anglais par exemple et pourtant on n'aura pas fait de loi.

Et concernant les pays scandinaves, où en sont-ils?

- Monsieur Darremont : Alors c'est différents, le Danemark par exemple a légiféré en 2005 pour inciter les pouvoirs publics à y aller. Ils obligent à utiliser le BIM dans les contrats publics mais seulement si cela coûte moins cher que sans l'utiliser.

Mais le BIM apporte forcément des gains de coûts sur le long terme... Non?

- Monsieur Darremont : Alors il faut le démontrer tout ça. Mais le processus BIM je ne suis pas sûr qu'il apporte des gains par rapport au numérique classique avec des échanges

traditionnels. Cela marche aussi bien mais le problème c'est qu'on collabore très mal. La collaboration il y a en pas ou peu en ce moment. Le BIM forcerait à collaborer. Le BIM améliore cette collaboration.

Quand vous parlez de Benchmark, cela permet de rassembler tous les documents contractuels?

- Monsieur Darremont : Non c'est ce que font les différents états pour aller vers le BIM. Il n'y a pas de loi qui impose le BIM. Il y a eu la directive européenne et ils l'ont adopté dans leurs états. L'Angleterre ontfait un plan avec des propositions de normes. L'état central impose le BIM, par voie de contrat à l'intérieur de leur projet. Mais cela n'est pas aussi simple.

Comment on peut se repérer avec tous les documents qui existent déjà : convention, charte

BIM...?

- Monsieur Darremont : Le défaut du langage BIM est de confondre un peu tout. Pour clarifier un peu les choses et vous donnez une idée par exemple la charte BIM. Un document a été créé au sein du PTNB qui est le document appelé: BIM et maquette numérique : guide de recommandations à la maitrise d'ouvrage. A la fin de ce rapport il y a un lexique. La charte BIM c'est ce que veut le maitre d'ouvrage, la convention BIM c'est comment les gens travaillent ensemble. La charte c'est ce que veut le maitre d'ouvrage, c'est son cahier des charges et la convention c'est la réponse. Une charte c'estforcément dans l'appel d'offre par rapport à sa maitrise d'oeuvre. Il faut avoir la charte dans les dossiers d'appels d'offres. La convention sera en réponse aux appels d'offres. Mais on ne peut pas m'imposer une marque ou un éditeur en particulier, ce que l'on peut voir dans certains appels d'offres. Mais c'est strictement interdit. On applique tout simplement l'article 42 du nouveau code des marchés publics. Il faut rester dans l'ouverture à la concurrence. Ils le font parce qu'ils ont pas connaissance de la loi. Après il y a le marché privé mais ils font ce qu'ils veulent.

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Monsieur Darremont, je vous remercie d'avoir répondu à mes questions.

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D - Monsieur Olivier CELNIK

Architecte, Directeur du cabinet d'architecte Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM à l'école des Ponts ParisTech et ESTP

Mercredi 24 Janvier 2018 (12h - 13h15)

«Bonjour Monsieur Celnik, merci de m'accueillir dans votre cabinet d'architecture. Je suis ingénieur en bâtiment. Je suis des cours de droit au CNAM-ICH de Paris et je prépare en même temps dans le cadre de mon Master 2 d'architecture à l'ENSAPVS un mémoire sur les questions juridiques et contractuelles du BIM. Pouvez-vous vous présenter s'il vous plait?

- Monsieur Celnik : Bonjour Stanislas, je suis directeur du Mastère Spécialisé BIM depuis sa création à l'école des ponts et ESTP. J'ai également co-écrit le livre «BIM et Maquette numérique» en 2014 et avec mes collaborateurs dans mon cabinet, nous sommes architectes-maître d'oeuvre. Nous réfléchissons beaucoup sur les outils numériques dans le monde de l'architecture et de la construction et depuis 3 ans nous avons une forte activité liée au BIM en assistance à maitrise d'ouvrage, en formation et en BIM Management sur différents projets. Dans mon livre, nous avons fait intervenir plusieurs personnes qui ont pris la parole aux acteurs qui nous entourent qui étaient compétents sur la question du BIM. Sur la première version nous avions 140 contributions et nous sommes à 200 sur la dernière version mais comme les choses évoluant vite surtout sur ces questions juridiques et contractuelles nous faisons évoluer le livre. Pour plusieurs personnes et moi, l'an 0 du BIM en France est 2014 car à partir de cette date beaucoup de choses ce sont mises en place et se sont cristallisées. En 2014, beaucoup d'avocats ont commencé à s'y intéresser mais en se posantjuste des interrogations et commencer à avoir des réponses. Il y a eu également le rapport PICAN.

J'ai rencontré il y a quelques jours une avocate qui m'a dit qu'il n'y avait pas tant de souci que ça concernant les contrats liés au BIM et que ce serait seulement une modification des contrats et marchés de travaux actuels en incorporant ce nouvel outil. Qu'en pensez-vous?

- Monsieur Celnik : Il faut tout d'abord se méfier des gens trop affirmatifs. Ce domaine là va rester aussi diverse que le monde de la construction. Donc dire il y a ou il n'y a pas, il faut ou il ne faut pas mais il n'y a pas de réponses exactes. Il faut essayer de dégager des jurisprudences et d'éviter d'être péremptoire sauf sur des grands principes au risque d'être contredit après.

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Monsieur Celnik, attendez-vous plus de la loi?

- Monsieur Celnik : Au niveau de la loi, il y aura sans doute rien. Je le dis depuis longtemps, sur les questions juridiques et contractuelles, on peut soit assister à des journées deformations au Mastère BIM ou au CSTB, soit lire le livre «Le BIM sous l'angle du droit» écrit par deux avocates ou vous expliquer en trois minutes en vous disant, il y a rien de neuf c'est tout comme avant. En disant qu'en fonction du contexte il faut déterminer les contrats avec les responsabilités, il faut déterminer les rôles, le droit d'auteur, la garantie décennale, etc. Tout cela existe. Il faut tout d'abord rappeler ces fondements a des gens qui les ignorent et leur dire que sur un projet il faut un contrat, si on est d'accord on signe et si on n'est pas d'accord on discute et on ne signe pas... Typiquement ce que l'on voit avec la MAF est que selon les contextes c'est soit des contextes, soit des contrats soit des clauses en plus. La semaine dernière nous étions plusieurs AMOA à immobilière 3F pour les aider à mettre en place un nouveau cahier des charges, du moins une synthèse des différents cahiers des charges qu'on a pu faire avec eux sur plusieurs projets depuis 3 ans. Le maitre d'ouvrage donnait son point de vue: «je demande une convention BIM bien entendu et on dit ce qu'il y a dedans et en disant que la convention BIM n'est pas contractuelle». Je l'ai bien entendu réfuté, en me basant sur ce que j'ai entendu à la MAF notamment. Si tu dis que ce n'est pas contractuel, cela veut dire que cela sert à rien car cela ne sera pas opposable. C'est la règle du jeu de bâtir cette convention BIM mais c'est aussi la réponse de la maîtrise d'oeuvre au regard de la demande de la maîtrise d'ouvrage si on dit que c'est pas contractuel il n'est pas garanti de la bonne réalisation de son projet et il se tire une balle dans le pied. Dans le contrat de maîtrise d'oeuvre et ensuite dans le contrat avec les entreprises, on dit que le maitre d'ouvrage demande du BIM et que celles-ci sont décrites dans son cahier des charges et que l'équipe de conception ou conception-réalisation devra produite une convention qui l'engage en décrivant ses réponses. Il faut que le maitre de l'ouvrage s'engage à respecter cette convention et dans les contrats de marchés de travaux idem.

Quel est l'intérêt de ces contrats MAF ?

- Monsieur Celnik : Alors nous les avons composé avec une vingtaine de personnes de métiers divers: avocats, experts, architectes, BIM manager, représentant d'agences en grandes réunions collégiales puis écrit à trois: un avocat, un expert construction et moi. On a un contrat AMO BIM, un contrat de BIM manager autonome et un troisième. La MAF donne ces contrats à

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ses assurés et leur disent que si ils ont des missions spécifiques BIM on peut bien vous assurer si vous suivez la marche à suivre.

Dans ces contrats MAF, vous parlez beaucoup de BIM manager mais vous les catégorisez. Pourquoi?

- Monsieur Celnik : La chose nouvelle qu'apporte ces contrats MAF c'est de dire que le BIM manager ou les acteurs qui font du BIM management sont des acteurs de la construction, idéalement c'est bien plus un rôle pris par les acteurs existants qu'un métier occupé par un nouvel acteur. Idéalement c'est un membre de l'équipe que quelqu'un rapporté de l'extérieur et ce n'est pas un maitre d'oeuvre, ce n'est pas un constructeur au sens de l'article 1792. Ça c'est nouveau. Avant les gens ne se prononçaient pas. Moi j'avais presque tendance avec ma casquette d'architecte et d'élu à l'ordre des architectes à au contraire revendiquer qu'il était un constructeur pour éviter que des gens qui ne soit pas du monde de la construction ne se mette là dedans alors qu'ils n'étaient pas compétent en construction et que c'était peut être que des consultants.

Vous avez déjà eu des cas où ce BIM manager était nommé constructeur au sens de la loi?

- Monsieur Celnik : J'ai pas eu de cas où la question s'est posé mais j'ai des cas où l'ambiguïté était évidente. La seule vraie réponse sera apportée par les tribunaux lorsqu'il y aura eu des problèmes. C'est lorsqu'il y aura une jurisprudence, on verra comment un juge ou plusieurs juges auront tranché. Peut être qu'un juge dans 10 ans dira que contrairement à ce que dit l'agence X et son assurance, nous estimons que le BIM manager est constructeur ou pas. Souvent les architectes qui font du BIM sur des projets pensent que comme ils ont un BIM Manager dans la conception ils pensent qu'ils sont assurés à hauteur des heures passées en tant que BIM manager (1 à 2% du contrat de maîtrise d'oeuvre environ) comme un architecte et donc constructeur. La crainte de la MAF est qu'un projet arrive devant un juge avec des problèmes de retards alors qu'on a fait du BIM et peut être à cause des gens qui font du BIM et qui l'ont mal fait. Ils me collent sur la tête 5 à 10% de résolution du litige alors que j'ai cotisé qu'à hauteur d'1%. D'où le souci de la MAF qui résonne pour ces adhérents et pour elle-même d'essayer de s'évacuer. Un de mes amis BIM manager trouve que les contrats MAF sontfades d'une certaine façon en disant que si on suit plus les contrats de la MAF, on fait rien, on a pas de responsabilité.

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- Vous avez donc un avis sur ces questions?

- Monsieur Celnik : Je suis un peu entre les deux. J'ai quand même tendance à dire à mes étudiants HMO en école d'architecte, les responsabilités il faut les assumer et les valoriser. Là où il y a des ambiguïtés, soit le management est directement assuré par exemple par une agence d'architecte et il a les deux rôles, à la fois architecte du projet et BIM Manager. Depuis le début la MAF disait aux architectes, on a toujours couvert nos adhérents dans l'exercice de leur métier et aujourd'hui il passe par le BIM, vous êtes donc couverts d'office sans cotisation supplémentaire. C'est surtout d'amener à préciser qu'est que l'on fait réellement, qu'est qu'on demande et dire clairement qui fait quoi, quand et comment et puis après est ce qu'on a respecté ou pas le contrat. Il y a des cas d'ambiguïtés que j'ai vu à plusieurs reprises, notamment lorsque le maitre d'ouvrage ne confie pas la mission de BIM management à un membre de l'équipe initiale même si c'est un cotraitant mais de quelqu'un de complétement extérieur. J'ai en tête un projet privé où on a une équipe de maîtrise d'oeuvre, on a un AMO BIM qui nous aide à préparer notre cahier des charges et on va mandater un BIM Manager extérieur. Il y a quelques boîtes spécialisées qui font souvent à la fois de la maîtrise d'oeuvre d'exécution, de la synthèse et qui font du BIM. Dans cette mission, cette boite là avait une mission uniquement de BIM manager dont on cherche à définir le contour. Lorsqu'on a commencé à creuser un peu et on leur pose des questions, ils nous disent «on est BIM manager, on fait la convention, on s'assure que les architectes et les bureaux d'études travaillent bien entres eux, on s'assure que tout va bien mais bien sûr ce sont eux qui font tout». Là où il y a de l'ambiguïté c'est sur la synthèse car souvent on pense qu'avec le BIM il n'y a pas de synthèse. En tant que BIM manager c'est de créer les missions de la synthèse, de faire en sorte que parce que les maquettes existent, qu'elles répondent bien au cahier des charges, qu'elles sont bien positionnées les unes par rapport aux autres...

- Mais est ce que le BIM manager peut modifier cette maquette numérique?

- Monsieur Celnik : Justement! C'est évident qu'il ne faut pas qu'il puisse. Mais dans ce projet, j'ai fait exprès de poser la question.

- «Donc on est d'accord, vous assemblez les maquettes de façon à ce que la maîtrise d'oeuvre voit les incohérences éventuelles. Et est ce vous détectez les clashs?

- Oui on appuie sur le bouton qui permet de le faire. Et qu'est que vous faites si vous voyez un problème ? Comme on est quand même ingénieur à la base, on a des activités

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de synthèse par ailleurs si on voit un problème on va proposer des solutions de résolution.

- Et la cela ne s'appelle pas de la maîtrise d'oeuvre ce que vous dites ? Vous lui confiez une mission de BIM management et pas de maîtrise d'oeuvre et dans ce cadre là ces honoraires ne correspondent pas à ça. Il n'est pas assuré sur ce projet là pour la maitrise d'oeuvre».

On est dans un cas concret où le rôle n'est pas correctement déterminé. C'est bien le but des contrats de la MAF et surtout le tableau à côté qui permet de répartir les rôles. On reparle à cette occasion des conventions de groupement de maîtrise d'oeuvre qui existe depuis toujours sans BIM. Ce tableau permet tout simplement de dire qui fait quoi. C'est mon avis global sur le BIM.

Cela peut être quelque chose de très précis. Dans l'absolu si on creuse sur le BIM, c'est de dire et on le voit sur beaucoup de projets. Quand le maitre d'ouvrage dit: «je veux cliquer sur la maquette etje veux connaître le numéro de la porte, l'état du parement de la porte et le degré coupe feu. Il y a une question technique qui dit comment on fait concrètement cette porte, comment on met cela dans la maquette et il y a la question méthodologique de dire: cette information là, dans ce projet là, est ce que c'est l'architecte ou l'économiste qui la définit dans le jeu des acteurs du BIM ? Comment ils se sont organisés sur ce projet là ? On fera en sorte que cela soit l'un ou l'autre et on dira que si c'est l'économiste qui est en charge de préciser ces points là. Par exemple, l'architecte exporte le tableau de portes en Excel puis le donne à l'économiste qui le remplit et le BIM manager le remet dans la maquette. Dès que l'on cliquera dans la maquette on aura une info de qui a fait quoi et qui a mal fait les choses si il y a un problème.

- Vous parliez au début de l'entretien de la jurisprudence. Mais quand y en aura t'il ?

- Monsieur Celnik : Lorsqu'il y aura des litiges et des sinistres. A notre connaissance, il n'y a pas encore eu de sinistres. Il y a eu des projets bien sûr comme la fondation Louis Vuitton de Gehry et d'autres ils ont été fait relativement à la bonne franquette, sans vrai contrat, sans convention BIM et il y a pas eu de vrai problèmes grâce à la bonne volonté de chacun. Quand il y a eu des amorces de contrats ou de conventions c'est ce que disaient les contrats de la MAF qui avait étudié des documents qui étaient transmis par les membres du groupe de travail. Mais dans certains nombres de cas cela servait à rien et dans d'autres c'était contre productif et vous croyez que cela vous protège mais au contraire cela vous dessert.

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- Donc on n'est pas prêt à avoir des cas de jurisprudence?

- Monsieur Celnik : Dans un projet d'hôpital que l'on a, on est dans un marché public, le maitre de l'ouvrage a demandé du BIM et a payé une mission de BIM management et des honoraires spécifiques liées à la maitrise d'oeuvre. Ils ne jurent que par REVIT, bien que dans les marchés et conventions on donne des livrables IFC qui ne satisfont pas. On essaie d'éviter le clash qui pourrait se traduire de sa part, par une rupture de contrat sur l'aspect BIM car le maitre d'ouvrage n'a pas ce qu'il veut. Il dit vouloir imposer le BIM parce qu'il a REVIT mais ce n'est pas son travail. On passe par des formats IFC qui sont ce qu'ils sont. Mais ce n'est pas mon problème de savoir si le maitre de l'ouvrage utilise tel logiciel ou un autre. Moi je me suis juste engagé à livrer un fichier IFC avec dedans des informations du projet. C'est tout! Il faut savoir tout préciser ce qui est difficile.

- L'avocate que j'ai rencontrée me disait également qu'il y avait des problèmes de hiérarchisation des documents dans le contrat. Quand pensez vous?

- Monsieur Celnik : On commence à avoir les idées assez claires sur certains projets. Si le maitre d'ouvrage n'a pas formalisé correctement le BIM dans un cahier des charges, vous ne pouvez rien demander en face. Dire que je veux du BIM cela veut rien dire. Dans la convention BIM, vous répondez au cahier des charges du maitre d'ouvrage. Vous vous engagez à exposer ces questions et vous donnez vos réponses et nous au nom de la maîtrise d'ouvrage on dit si cela nous correspond ou pas et on signe en conséquence. Ces deux documents signés engagent les parties.

- Mais y a t'il une hiérarchisation des documents contractuelles à effectuer?

- Monsieur Celnik : Il y a une terminologie aujourd'hui à respecter. Par exemple, côté maîtrise d'ouvrage on parle d'une charte pour le document général stratégique, le cahier des charges, c'est le cahier des charges d'une opération. La convention estfaite par la maîtrise d'oeuvre ou l'équipe de conception-réalisation et ensuite l'entreprise (on peut aussi appelé cela protocole même si les deux termes sont impropres, c'est dans le langage courant). Les usages commencent quand même à se conforter un peu. Souvent on trouve des glossaires pour essayer de préciser le vocabulaire. Peu importe mais il faut dire sur quel référentiel on s'applique.

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- Pour revenir sur un sujet plus général. J'ai lu que beaucoup de pays européens essayaient déjà d'imposer le BIM sur certains projets publics. Et pourquoi la France n'impose rien ? On voit même maintenant des objectifs à 2022. Quand pensez-vous?

- Monsieur Celnik : La loi en France ne les impose pas. Du moins, ce n'est pas imposé par la loi mais la loi permet aux acteurs qui le souhaitent de l'imposer. C'est le sens de la directive européenne. Je suis un peu sceptique par rapport à cela. Cécile Duflot disait ce sera obligatoire en 2017 mais le PTNB qui ditje ne rend pas cela obligatoire. Le PTNB veut avant tout convaincre et donner envie, renforcer les compétences, développer les outils adaptés, créé la confiance sans imposer. Mais ce ne sont que des bonnes intentions qui n'engagent personnes. Même les signataires ont dit qu'ils vont faire du BIM en 2022.

- Donc on reste au même point, tout le monde fait ce qu'il veut?

- Monsieur Celnik : Oui exactement, il ne se passera rien avant 2022. C'estjuste un engagement moral. Alors que si on avait dit, pour des opérations de plus de 10 millions ou 5 millions, pour les bailleurs sociaux, les collectivités locales, etc., même cela aurait pu faire avancer les choses. La RT 2012 par exemple, a été imposé par la loi. Tout le monde à ce moment là a grogné en disant que c'est un truc de plus, c'est juste administratif, cela ne sert à rien... Mais cela oblige à se remuer. Donc avoir un seuil minimal comme la Grande Bretagne n'aurait pas été mal je trouve. Qu'on n'oblige pas les petits acteurs mais pour un gros projet pourquoi pas. Mais il faut prouver les avantages réélles du BIM sur les projets.

- Pensez vous maintenant que les garanties légales, les responsabilités, la propriété intellectuelle...vont changer?

- Monsieur Celnik : Non pas nécessairement. Il fautjuste rappeler ce qu'est la propriété intellectuelle. Pour moi donner des plans AutoCAD et une maquette numérique c'est pareil. C'est simplement plus facile. Le droit d'auteur, que l'on donne des plans papiers ou une maquette. Le droit d'auteur et le droit de propriété intellectuel font que l'on n'a pas le droit de faire n'importe quoi. Le maitre de l'ouvrage qu'il ait des plans papiers ou une maquette, un maitre de l'ouvrage n'a pas le droit de dénaturer le projet de l'architecte, n'a pas le droit de le construire ailleurs... La maquette numérique appartient à celui qui la paie tout simplement!

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Quand on regarde les caractéristiques des droits moraux, il est incessible. L'auteur d'un bâtiment ou l'auteur d'une oeuvre artistique, c'est celui qui la créé. Il ne peut pas vendre se droit moral. Par contre, il peut vendre ses droits de reproduction ou qui les cède. Je vous donne le droit de dupliquer, d'interpréter... C'est le contrat qui le notifie. C'est le maitre de l'ouvrage qui dit qu'on livrera une maquette à chaque étape qui aura telles caractéristiques... Mais la question est qu'est qu'ils ont droit d'en faire en rappelant les droits d'auteur ? Je la cède mais le maitre d'ouvrage peut l'utiliser seulement pour la gestion de l'immeuble par exemple. L'un des critères du droit d'auteur, c'est l'originalité. La maquette a aussi son côté original car elle à une valeur ajoutée et à ses spécificités. Il y a une façon originale de fabriquer cet objet maquette numérique.

- En terme de BIM 2.0 et 3.0 quels bouleversements cela peut provoquer?

- Monsieur Celnik : Le BIM est il une maquette unique sur un serveur ? On en sait rien pour l'instant. Cela n'existe pas pour le moment. Mais c'est bien plus simple pour l'instant de faire chacun nos maquettes dans notre coin. Et régulièrement avec un système accordéon, on bosse tout seul, on compare les maquettes et on regarde ce que cela donne, on se resépare. Mais cela ne veut pas dire qu'on travaille ensemble, en même temps. Il apparait depuis peu de temps, des personnes qui m'ont montré un modèle sous l'éditeur CYPE qui englobe des logiciels de thermique, d'acoustique, de fluide et vaguement un logiciel de modélisation qui sert plutôt d'interface et qui m'ont montré une démo. Les personnes travaillent sur des logiciels différents en étant raccordé tous les trois sur un serveur dans lequel l'archi a publié la maquette, chacun avec son outil fait ses calculs peut modifier le projet et est informé de l'information des autres. Par exemple, l'architecte agrandit un balcon, regardez l'écran chez les deux autres, ça clignote chez les deux autres pour leur dire qu'il faut se mettre à jour sur ce balcon par rapport à leur domaine de compétence. Ça c'est du Bim niveau 3 selon moi ! Ce n'est pas qu'un logiciel unique. Mais est ce que cela marche au-delà de la démo. C'est une interopérabilité dans ce cas quasi automatique. En niveau 2, on met chacun nos maquettes sur un serveur. On sait par conséquent qui la faite et la traçabilité est donc facile à déterminer. Dans le BIM niveau 3 comment fait-on ? Si je mets une maquette commentfait on la traçabilité de modifications si tout le monde travaille sur la même maquette?

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- Pourquoi arrive- t-on à faire une maquette unique pour un avion de chasse par exemple pour prendre le cas de l'entreprise Dassault alors qu'un bâtiment est nécessairement plus simple à réaliser?

- Monsieur Celnik : Le cas du bâtiment se rapproche plus des navires. C'est pour cela que l'on fait intervenir des élèves des chantiers STX en Mastère. Tout d'abord parce qu'ils fait des «bâtiments» comme nous, ce sont aussi a priori unique car il n'y a pas deux paquebots pareils comme dans le domaine de la construction. De plus en plus, on dit que la maquette c'est elle le prototype c'est la maquette et celui sur le chantier c'est le premier de série. On n'en fait pas d'autres derrières mais on pourrait. Mais je pense vraiment qu'il faut, que ce soit sur l'aspect technique, est ce que demain on fera tous du BIM niveau 3, c'est comme si on disait est ce que demain on fera tous des PPP (partenariat publics-privées)?Non, il y aura certains projets en PPP, d'autres en conception-réalisation, d'autres en loi MOP, avec ou pas des dérogations, certains en entreprises générales, d'autres en lots séparés et cela fait 100 ans que cela dure. Donc BIM niveau 2 ou 3 cela sera pareil. Chacun fera ce qu'il veut. Que cela aide le marché à se structurer je suis d'accord et c'est une chance. Cela m'énerve aussi quand on me pose la question «mais pourquoi on fait du BIM à la française ?». Un dirigeant d'entreprise me disait: «il faut arrêter de parler de BIM à la française, cela veut dire qu'on veut pas bouger, qu'on est dans notre petit village gaulois». Moi je répondais que oui on faisait du BIM à la française car il y a la loi MOP, les bureaux de contrôle, les agences d'architectes de petites tailles. C'est comme ça que cela se passe en France et on ne va pas changer du jour au lendemain ! Ce n'est pas forcément à la française mais au moins avec une organisation du monde professionnel, d'une culture latine qui n'est pas anglo-saxonne qui existe.

- Pour revenir sur l'interopérabilité, pourquoi les logiciels ne travaillent pas plus ensemble? Qui a inventé l'IFC ?

- Monsieur Celnik : Si on écoute AutoDesk, c'est eux qui l'ont inventé. Si on prend un logiciel comme ArchiCAD qui est très au point sur l'IFC, est ce que les utilisateurs d'ArchiCAD y compris aguerri savent correctement paramétrer en import et en export le configurateur en IFC, le réponse est plutôt non mais c'est un peu paradoxale car c'est un langage universel et quand on fait importé en IFC, on nous dit, tu veux de l'IFC pour Tekla, pour REVIT...? Comme si on me disait qu'il faut me traduire ton texte en anglais mais tu le veux pour l'Angleterre, l'Australie...? Et ce ne sera pas le même anglais car on change les mots, les accents... Il y a déjà le fait que cela

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soit compliqué. Le langage et la norme IFC évolue de version en version ne contiennent pas toute l'information utile et que certains logiciels ne savent pas correctement utiliser ce langage et notamment REVIT. Pendant longtemps, on importait même assez mal un IFC qu'il avait lui< même produit. REVIT exporte pas trop mal et encore il faut beaucoup de soin. Il a des bugs d'imports dans certains cas. Après il y a les discours d'entreprises qui veulent avoir le maximum de client possibles. Par exemple, je suis depuis toujours utilisateur MAC et j'ai toujours mon adaptateur VGA parce que le monde est en VGA. C'est à nous de faire l'effort si on est marginal. Soit je suis majoritaire, j'emmerde tout le monde et puis les gens se débrouillent soitje suis marginal etje fais l'effort pour me faire comprendre, accepter les autres parce que sinon je meurs.

- Pour conclure, on peut dire que c'est le domaine du contrat qui va faire évoluer les choses?

- Monsieur Celnik : Oui c'est sure!

- Monsieur Celnik, merci d'avoir répondu à mes questions.

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Table des iconographies

Fig. 1 www.misskaparis.wordpress.com/tag/frankCgehry [Consulté le 14/12/2017]

Fig. 2 www.bimportal.be/fr/bim fr/general/caracteristiques [Consulté le 14/12/2017]

Fig. 3 www.cohesionterritoires.gouv.fr/IMG/pdf/rapport mission numerique batiment.pdf

[Consulté le 18/01/2018]

Fig. 4 www.scoop.it/t/genieCcivil [Consulté le 14/12/2017]

Fig. 5 www.isleanCconsulting.fr/fr/transformationCdigitale/definitionCbim

[Consulté le 14/12/2017]

Fig. 6 www.isleanCconsulting.fr/fr/transformationCdigitale/definitionCbim

[Consulté le 14/12/2017]

Fig. 7 www.bimperform.com/besoinCdeCmuterCversCbim [Consulté le 14/12/2017]

Fig. 8 www.lemoniteur.fr/article/leCbimCcCestCmaintenantCouCpresque5511986

[Consulté le 01/02/2018]

Fig. 9 www.stephanebernhard.franceserv.com/wpCcontent/uploads/2015/11/pyramide.jpg

[Consulté le 19/12/2017]

Fig. 10 www.bimCw.com/manifeste [Consulté le 01/02/2017]

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Glossaire technique

BIM

En Anglais, selon les cas, Building Information Model, Building Information Modeling ou Building Information Management. C'est cette dernière définition plus globale qui trouve le plus d'écho aujourd'hui. La traduction officielle française est Bâtiment et Informations Modélisées. Ensemble structuré d'informations sur un bâtiment qui décrit les objets, le composant, leurs caractéristiques et les relations entre ces objets. Ces informations complètent la description géométrique et sémantique du bâtiment produite par certains logiciels.

BIM Manager

Le BIM Manager développe et met en place le processus BIM ("Building Information Modeling" - Maquette numérique) afin de faciliter la conception, coordonner les différentes phases de construction et optimiser l'exploitation de l'ouvrage tout au long de son cycle de vie. Il assure la communication et le travail collaboratif entre les acteurs du projet à travers la mise en commun d'une plateforme.

BuildingSMART

Association fondée en 1994 (à l'origine IAI International Alliance for Interoperability) par un consortium d'industriels invités par AutoDesk, AT&T, Primavera et HOK, qui s'est donnée pour objectif de définir et de promouvoir une norme commune de format d'échange interopérable pour le BIM (le format IFC) afin de supporter le cycle de vie complet du bâtiment et d'améliorer radicalement l'interopérabilité des applications utilisées par les professionnels de la construction. La branche française de cette association est Medi@Construct.

CAO

La conception assistée par ordinateur, ou CAO, rassemble des outils informatiques (logiciels et matériels) qui permettent de réaliser une modélisation géométrique d'un objet afin de pouvoir simuler des tests en vue d'une fabrication.

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Cahier des charges BIM

A ne pas confondre avec convention BIM. Document du maître d'ouvrage (MO) précisant pour le projet les exigences et objectifs des intervenants successifs du projet, incluant éventuellement ceux de la charte BIM du MO, qui lui précise ses attentes liées au BIM.

Convention BIM

Document décrivant les méthodes organisationnelles et de représentation graphique d'un projet spécifique ainsi que les process, les modèles, les utilisations. Elle est élaborée par le BIM Management à n'importe quelle étape du cycle de vie de l'ouvrage mais idéalement le plus tôt possible. Elle est soumise à chacune des parties lors du démarrage du projet BIM, de préférence en début de phase.

Interopérabilité

Capacité d'un système ou d'un produit à travailler avec d'autres systèmes ou produits, sans intervention particulière ou complexes de la part de l'utilisateur. L'interopérabilité permet aux acteurs de la construction d'accéder simultanément, via leurs logiciels métiers, à une information centralisée du projet, en évitant les saisies redondantes.

Maquette numérique

Représentation géométrique d'un projet ou produit, généralement en 3D, réalisée sur ordinateur en vue de l'analyser, de le contrôler et d'en simuler certains comportements (thermiques, acoustique, etc.). Il existe des maquettes numériques sans autres informations que celles de la géométrie. Quand la maquette numérique d'un bâtiment décrit tous les objets utilisés et leurs relations pour le concevoir, on peut alors parler de BIM.

Niveau de développement

Niveau nécessaire d'informations liés aux objets en matière de détails, de coordination et d'information.

C'est la somme des deux niveaux:

- de détail (LOD ou Level of detail) : description des granularités de la propriété géométrique des maquettes numériques qui seront attendues aux différents stades du projet de construction,

- d'information: description de la granularité des données des données et propriétés incluses dans le modèle 3D.

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Il existe plusieurs niveaux de développement, de plus en plus précis en fonction des besoins de l'avancement du projet.

Norme IFC (Industry Foundation Classes)

Format de fichier ouvert, orienté «objet», utilisé par l'industrie du bâtiment pour échanger et partager des informations entre logiciels métier de type BIM. Pour chaque élément du bâtiment (murs, portes, fenêtres), les IFC donnent des indications sur la forme, les caractéristiques, les relations avec les autres objets. Ce standard, véritable norme internationale du BIM, est né de l'initiative de BuildingSMART International (autrefois IAI) qui associe des entreprises de la construction et des éditeurs de logiciels. Les expressions maquette numérique-IFC ou BIM-IFC sont une interprétation française désignant un BIM normalisé au format IFC.

Objet BIM

Représentation virtuelle en 3D, d'un composant physique d'un bâtiment en cours de construction, de rénovation ou d'exploitation (mur, porte, dalle, gaine de ventilation). L'objet BIM est formellement identifié avec ses propriétés.

Open BIM (projet de recherche)

L'Open BIM est un programme de coopération universel reposant sur des standards et des

processus de travail ouverts et destiné au domaine de la conception, de la construction et de

l'utilisation de bâtiments. Open BIM est une initiative de buildingSMART et de plusieurs

autres éditeurs de logiciels leaders du marché utilisant le modèle de données ouvert

buildingSMART. L'Open BIM garantit l'interopérabilité des logiciels dans le cadre de la

maquette numérique « libre » normalisée. Grâce à l'Open BIM et aux IFC, tous les acteurs du

projet sont capables de travailler autour d'une même maquette numérique, quel que soit le

logiciel qu'ils utilisent.

Open BIM

Désigne l'interopérabilité pour le BIM. C'est la possibilité d'échanger des données entre logiciels BIM d'éditeurs différents, grâce à un standard d'échanges. La norme reconnue d'interopérabilité BIM est l'IFC, développée par l'association buildingSMART.

105

Processus BIM

Ensemble d'opérations, d'actions ou d'événements mis en oeuvre pour atteindre un ou plusieurs objectifs BIM.

Protocole BIM

Il regroupe un ensemble de règles et de procédures à respecter, qui définissent les axes principaux du processus BIM de l'entreprise. Il peut servir de socle pour l'élaboration d'une convention BIM (il convient de différencier protocole et convention).

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Glossaire juridique

Clause

Phrase ou ensemble de phrases contenues dans le texte d'un acte juridique (tels un contrat, un acte unilatéral, un jugement, une loi ou un règlement administratif) où sont définis les droits et les obligations des personnes concernées par cet acte. Le mot vient du verbe latin "claudere" (fermer), ce qui laisse à penser que pour la compréhension des dispositions qu'elle contient, la clause doit se suffire à elle même.

CNIL

La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) de France est une autorité administrative indépendante française. La CNIL est chargée de veiller à ce que l'informatique soit au service du citoyen et qu'elle ne porte atteinte ni à l'identité humaine, ni aux droits de l'Homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques. Elle exerce ses missions conformément à la loi no 78C17 du 6 janvier 1978 modifiée le 6 août 2004.

CSTB

Le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) est un établissement public français à caractère industriel et commercial (EPIC). Il est placé sous la tutelle du ministère de la Cohésion des territoires, du ministère de la Transition écologique et solidaire et du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

La mission du CSTB est de garantir la qualité et la sécurité des bâtiments, et d'accompagner l'innovation dans le domaine de la construction. Cette mission s'accomplit au travers de ses activités : la recherche et expertise, l'évaluation, la certification et la diffusion des connaissances. Appui aux pouvoirs publics, le CSTB accompagne les mutations du secteur du bâtiment, en lien avec les transitions énergétique et numérique. Il répond aux enjeux de performance énergétique, environnementale, mais aussi de santé, d'accessibilité et de confort du bâtiment en lien avec l'évolution sociétale et les attentes des citoyens.

Code civil

Le Code civil est un code juridique réunissant les dispositions législatives et réglementaires relatives au droit civil qui régit les relations juridiques des personnes entre elles (physiques ou morales) et de leurs biens.

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Contrat

Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose. Le contrat est ainsi source d'obligations entre les personnes, sujets de droit (Article 1101 du Code civil).

Décret

Un décret est un acte exécutoire émis par le pouvoir exécutif. C'est une décision qui ordonne ou règle quelque chose. Le décret, dont les effets sont analogues à ceux d'une loi, est l'une des manifestations du pouvoir réglementaire de l'exécutif. Sa portée peut être générale, lorsqu'il formule une règle de droit, ou individuelle lorsqu'il ne concerne qu'une seule personne (exemple : une nomination).

Directive

La directive est un acte juridique européen pris par le Conseil de l'Union européenne avec le Parlement ou seul dans certains les cas. Elle lie les États destinataires de la directive quant à l'objectif à atteindre, mais leur laisse le choix des moyens et de la forme pour atteindre cet objectif dans les délais fixés par elle. Les États membres doivent donc transposer la directive dans leur droit national. Il s'agit de rédiger ou de modifier des textes du droit national afin de permettre la réalisation de l'objectif fixé par la directive et d'abroger les textes qui pourraient être en contradiction avec cet objectif. La non-transposition d'une directive peut faire l'objet d'une procédure de manquement devant la Cour de justice de l'Union européenne. Les États membres ont le devoir d'informer la Commission sur les mesures prises pour l'application de la directive.

Droit privé

Ensemble des règles de droit qui régissent les rapports entre les personnes privées qu'elles soient physiques (particuliers) ou morales (entreprises, associations...). Il traite des actes et de la vie des particuliers comme le mariage, le divorce, l'héritage, l'adoption, la propriété, les contrats, etc.

Droit Public

On appelle "droit public" l'ensemble des règles de droit qui régissent l'organisation et le fonctionnement de l'Etat, de l'administration, des collectivités territoriales et des institutions

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rattachées à l'Etat (personnes morales de droit public), ainsi que leurs relations avec les personnes privées.

Immixtion

Acte accompli avec ou sans droit, dont l'auteur doit supporter toutes les conséquences.

Jurisprudence

La jurisprudence est l'ensemble des décisions habituellement rendues par les différents tribunaux relativement à un problème juridique donné et qui permettent d'en déduire des principes de droit.

Législatif

Qui a le caractère d'une loi. Exemple : une disposition législative qui a le pouvoir de légiférer, de promulguer des lois. Exemple : une assemblée législative.

Législateur

Personne qui légifère, qui fait partie d'une assemblée législative, qui fait des lois, ou la loi au sens général, qui donne des lois à un peuple, à une civilisation. Exemple : un député, Moïse pour les tables de la loi, etc.

Liberté contractuelle

La liberté contractuelle est le postulat selon lequel les individus doivent être libres de définir eux-mêmes les termes de leurs propres contrats, sans aucune interférence d'autrui. Le principe directeur est celui d'autonomie de la volonté d'où découlent 3 conséquences:

· Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter;

· Chacun est libre de choisir son cocontractant;

· Chacun est libre de déterminer le contenu de son contrat.

Loi MOP

La loi N°85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, dite loi MOP est une loi française qui met en place, pour les marchés publics, la relation entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre.

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Elle constitue une des bases du droit de la construction publique en France, avec le Code des marchés publics. Son rôle est de déterminer les attributions de ces deux acteurs principaux de l'acte de construire dans le cadre d'une commande publique que sont la Maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre.

MIQCP

Il s'agit de la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques. La Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques (MIQCP), créée par décret le 20 octobre 1977 et placée auprès du ministre chargé de l'architecture, a pour vocation de promouvoir la qualité architecturale dans le domaine des constructions publiques. Qu'il s'agisse d'ouvrages neufs ou à réhabiliter, ce domaine englobe les bâtiments, les infrastructures, les espaces publics, qui sont sous la responsabilité de l'Etat ou des collectivités territoriales. Pour répondre à l'objectif assigné, la MIQCP s'est engagée dans une politique associant réflexion, participation à l'élaboration des textes législatifs et réglementaires, recommandations, conseil et assistance aux maîtres d'ouvrage publics.

Ordonnance

Une ordonnance est ce qui est prescrit par une autorité compétente ou une personne ayant le droit ou le pouvoir de le faire : acte législatif émis par le pouvoir exécutif.

Pouvoir adjudicateur

Au sens de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014 on entend par pouvoirs adjudicateurs : l'État, les autorités régionales ou locales, les organismes de droit public ou les associations formées par une ou plusieurs de ces autorités ou un ou plusieurs de ces organismes de droit public.

PTNB

Il s'agit du Plan Transition Numérique dans le Bâtiment. Créé officiellement le 20 janvier 2015 avec la nomination de Bertrand Delcambre au poste de Président du Plan Transition Numérique dans le Bâtiment, le PTNB poursuit trois objectifs:

· expérimenter, capitaliser, convaincre et donner envie de s'approprier le numérique dans le quotidien de l'acte de construire;

· permettre la montée en compétences des professionnels du bâtiment autour du numérique et le développement d'outils adaptés à tous les chantiers en privilégiant

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les objectifs de massification pour le déploiement et en accordant une attention toute particulière aux solutions BIM pour les petits projets;

développer un écosystème numérique de confiance en encourageant les travaux de normalisation et permettre ainsi l'interopérabilité des outils et logiciels.

PUCA

Le Plan Urbanisme Construction Architecture (Puca) est une agence interministérielle créée en 1998 afin de faire progresser les connaissances sur les territoires et les villes et éclairer l'action publique. Le Puca initie des programmes de recherche incitative, de recherche-action, d'expérimentation et apporte son soutien à l'innovation et à la valorisation dans les domaines de l'aménagement des territoires, de l'urbanisme, de l'habitat, de l'architecture et de la construction.

Réglementaire

Le pouvoir réglementaire est le pouvoir dont disposent les autorités exécutives pour édicter des règlements, c'est-à-dire des actes exécutoires, de portée générale et impersonnelle. Il s'oppose au pouvoir législatif.

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Bibliographie

Livres

· E. Lebègue & J.A. Cuba Segura, Conduire un projet de construction à l'aide du BIM, coédition Eyrolles/CSTB, 2015, 80p.

· A.M. Bellenger & A. Blandin, Le BIM Sous L'angle Du Droit, Eyrolles CSTB Éditions, 2016, 192p.

· O. Celnik & E. Lebègue, BIM & Maquette Numérique pour l'architecture, le bâtiment et la construction, 2ème édition, coédition Eyrolles/CSTB, 2015, 768p.

· F. d'Orso, Le BIM et la maquette numérique: dans la maison individuelle et le logement collectif en zone urbaine et périurbaine, Editions PC, 2014

· N. Hoyet, F. Duchene & M. De Fouquet, BIM et Architecture, Editions Dunod, 2016, 224p.

· M. Huet, L'architecte auteur, pratiques quotidiennes du droit d'auteur en architecture, paysage et urbain, Editions Le Moniteur, 2006

Rapports

· X. Pican, Rapport de mission de X. PICAN : "Droit du numérique & bâtiment", Janvier 2016, 77p.

· B. Delcambre, Rapport Delcambre «Mission Numérique du Bâtiment», Décembre 2014, 54p.

· F. Hovorka & P. Mit, Plan Bâtiment Durable, Rapport groupe de travail BIM et Gestion du patrimoine, un avatar numérique de l'ouvrage et du patrimoine au service du bâtiment durable : le « Bâtiment et Informations Modélisés » (BIM), Mars 2014, 64p.

· Contrats BIM, La Mutuelle des Architectes Français (MAF), Septembre 2017

· Manifeste: «Conduire la transformation digitale pour la construction, l'immobilier et l'aménagement urbain», publié par l'association MediaConstruct, www.mediaconstruct.fr, Avril 2016

· Manifeste: «Conduire la transformation digitale pour la construction, l'immobilier et l'aménagement urbain», publié par l'association MediaConstruct, www.mediaconstruct.fr, 2017

·

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B. Delcambre, « BIM et maquette numérique : guide de recommandation à la maîtrise d'ouvrage », Juillet 2016

· La MAF assurance, les contrats BIM (versions Bêta): Contrats AMO BIM, BIM Manager et missions complémentaires BIM Manager

· Rapport «Charte d'engagement volontaire de la filière du bâtiment pour la construction numérique: objectif 2022', publié par le Ministère de la cohésion des Territoires, Novembre 2017


·

Textes de loi

· Loi MOP, Loi n° 85C704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, www.legifrance.fr

· JORF 24 Juillet 2015, ordonnance 2015C899 du 23 Juillet 2015 relative aux marchés publics JORF n°0074 du 27 Mars 2016, décret d'application n°2016C360 du 25 Mars 2016 relatif aux marchés publics

· Directive eur@opéenne du 26 Février 2014, 2014/24/UE sur la passation des marchés publics

Articles

· J.Nicolas, «Le PUCA recense les bonnes pratiques sur le BIM', Le Moniteur, Juin 2014

· «BIM & Maquette numérique - Contenu et niveau de développement', Le Moniteur, Mai 2014

· C. Croix, B. Dufraisse & F. PAGGI (Avocats Seban & Associés), «construire avec le BIM: éléments d'analyse juridique',

· C. Croix & D. Da Palma, «travailler en mode BIM: Quels risques juridiques?», www.sebanCassocies.avocat.fr, Octobre 2016

· F. Gillion, P. Masons, «Comment adapter les contrats de construction au BIM?», Le Moniteur Hebdo, Septembre 2014

· A. Bem, «Les droits de l'architecte sur son oeuvre architecturale et la liberté de panorama limitée», www.legavox.fr, Août 2017

· L. Bernart, «BIM, quels impacts juridiques?', Revue qualité construction, Mai 2017

· C. Valente, «la loi peut elle imposer le BIM?', BIM & BTP, Mai 2017

· S. Michelin, «BIM : l'épineuse question des responsabilités', Le Moniteur, Octobre 2016

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D. Richard, «BIM : analyse et perspectives de l'immeuble numérique', Construction< urbanisme N°12, Décembre 2017

· Table ronde «Le BIM: quels enjeux, quels avantages, quels obstacles pour l'ingienerie et la MOA', organisé par l'OPQIBI, Juin 2017

· J. Roussel, «Quelles responsabilités et quelles assurances pour les intervenants dans le cadre d'une opération BIM?', J.Roussel, Balises N°21, Octobre 2017

· C. Croix, B.Dufraisse & F. Paggi, «Construire avec le BIM: eléments d'analyse juridique', Revue du cabinet Seban & Associés, Octobre 2016

· A. Cassart, «BIM et Protocole BIM: quels challenges juridiques?', Actualités Lexing Avocats, Septembre 2017

· L. Bouneghida, «Comment sécuriser le recours au BIM dans le bâtiment?', L'usine nouvelle, Juillet 2015

· Auteur inconnu, «Des outils contractuels pour travailler en BIM», des cahiers techniques du bâtiment, Septembre 2017

· «La MAF et le BIM: bien assurer, bien protéger les architectes', les architectes et le BIM, édité par l'UNSFA, Octobre 2016

· «BIM : la MAF met au point des outils pour les concepteurs', les architectes et le BIM, édité par l'UNSFA, Octobre 2016

· F. Gorriez & F. Jouanneau, «Le BIM dans la loi MOP (maitres d'ouvrage publics)', Cabinet Alain Bensoussan Avocats, Juin 2017

· F. Jouanneau, «Enjeux juridiques du BIM dans la construction immobilière, cabinet Alain Bensoussan Avocats, Mars 2017

· Auteur inconnu, «BIM : le bâtiment imaginaire, les droits d'auteurs', Cabinet Alain Bensoussan, Mars 2017

· Marie-Alexandra Vankemmelbeke et Wanda Bellaiche, « les craintes juridiques autour du BIM sont elles justifiées ?, Batiactu, février 2017

Sites internet

· www.mediaconstruct.fr, site français de l'association BuildingSMART

· www.batimentCnumerique.fr, Site du Plan Transition Energétique pour le Bâtiment

· www.citae.fr, société de conseils et services innovants en bâtiment, qui accompagne les maîtrises d'ouvrage dans leur démarche du BIM

· www.cstb.fr, Centre scientifique et techniques du bâtiment

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www.planbatimentdurable.fr

Conférence & entretiens

· Conférence-Débat: L'Immobilier, entre numérique et nouveaux usages, à l'Hôtel des Arts et Métiers (Paris), Septembre 2017

· Entretien avec Maître C. Benoît Renaudin, avocate au Barreau de Paris et dans le cabinet Martin et Associés (Paris), Janvier 2018

· Entretien avec J. P. Trehen, Directeur BIM chez EGIS bâtiment, Janvier 2018

· Entretien avec D. Darremont, Chef de département transition numérique bâtiment et BIM à la Fédération Française du Bâtiment (FFB), janvier 2018

· Entretien avec O. Celnik, Architecte, Directeur du cabinet d'architecture Z-Studio, professeur et directeur du Mastère Spécialisé BIM de ENPC/ESTP, Janvier 2018

Mémoires & Thèses

· A. Taloud, Mémoire de fin d'études à l'ENSAPVS : «la pertinence de l'exploitation du BIM dans la mise à jour 2.0 de bâtiments, encadré par S. Balez, N. Hanachi Belkadi, D. Hamani, R. Arlot & P. Alluin, 94p.

· J. Benillouche, Mémoire de fin d'études à l'ENSAPVS, «Le BIM un incontournable?», sous la Direction de N. Boutros, Mars 2017

· M. Brossette, Mémoire de fin d'études à l'ENSAL : «BIM Manager: Missions et compétences pour un nouvel expert de la maîtrise d'oeuvre», sous la direction de J.A. Segura

· M. FRIGELLI, Mémoire de fin d'études à l'ENSAPVS : «L'arrivée du BIM dans les agences d'architecture en France», sous la direction de N. Boutros, 73p.

· S. Roméo, Thèse professionnelle du Mastère Spécialisé Immobilier et Bâtiment Durable à l'ENPC : «L'impact des transitions environnementales et numériques sur le marché de l'assurance construction», sous la direction de P. Pelletier et O. Celnik

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand