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La gestion des conflits fonciers entre autochtones et allochtones dans le département de Sinfra.


par Jean Noel PacàƒÂ´me KANA
Université Félix Houphouet Boigny d'Abidjan - Doctorat en Criminologie 2019
  

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5.1.4 Acteurs de gestion eux-mêmes acteurs de conflits

Nos investigations menées à Sinfra révèlent que dans de nombreuses contrées du département, les « élus locaux » autrefois sans terre, se retrouvent aujourd'hui avec des portions remarquables de terre et des champs aux dimensions étonnantes. En

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effet, pour certains autochtones de la tribu Progouri, ils useraient de leur position hégémonique pour intimider les propriétaires terriens gouro et s'approprier une partie de leurs terres. C'est dans ce cadre que l'enquêté F. de Djamandji (39 ans, cultivateur, entretien de Février 2016) affirme « quand les vâ de Sinfra demandent des terres à nos parents, ils ne peuvent pas refuser sinon....Ne me demande pas, toi-même tu sais ce qui va arriver. Donc, tous les planteurs leur ont donné des terres et maintenant, ils ont plus de terres que la plupart des kwênins et des champs d'hévéa, de cacao dans presque toutes les sous-préfectures de Sinfra ». De ces propos, il ressort que cette réquisition massive des terres des autochtones par les autorités, se présente comme une forme d'appropriation foncière symbolique c'est-à-dire celle s'effectuant avec la complicité de ces victimes autochtones qui, conscients de leur position sociale inférieure participent à leur propre appauvrissement foncier. Ceux-ci, aspirant au quotidien à leur protection individuelle et celle de leurs biens fonciers face à des allochtones jugés à la fois nombreux et corrupteurs, accordent des portions importantes de terres à ces autorités locales afin de s'insérer sous une forme de couvert protectionniste lors d'éventuels conflits fonciers avec d'autres ruraux allochtones.

Ainsi, à partir de cette appropriation foncière axée sur la promotion de l'influence locale et des pouvoirs y afférents, ces décideurs locaux ont acquis des nombreux espaces sur lesquelles ils y ont effectué pour quelques- uns, des champs d'hévéa, de cacao, de café, d'anacarde afin de mettre leurs familles à l'abri des besoins vitaux élémentaires et pour d'autres, la transhumance à grande échelle.

Par ailleurs, pour éviter les regards suspects, la plupart de ces plantations et pâturages que nous avons visités, se situaient sur des terrains reculés, à l'extrémité de chaque sous-préfecture (champs d'hévéa et d'anacarde situés sur l'axe routier Sinfra-Progouri, champs de coton, cacao et café, sur l'axe Sinfra-Bazré, cinq pâturages de cheptel à Zéménafla, Djamandji, tricata, Tiézankro II et Progouri ).

A cette situation de consolidation massive des terres, tandis que certains autochtones semblent dénoncer à voix basse et qualifier cette forme de consolidation comme étant politique, de nombreux ruraux semblent se complaire dans cette situation d'octroi incontrôlé des terres et vont plus loin pour demander à être des « gnananwouzan » ou « tréklé » permanents de ces élus, sans véritable contrepartie financière.

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Outre ce fait, un facteur non moins évoqué reste les possessions des chefs traditionnels en termes de cheptels, de pâturages,... qui traduisent leur souplesse mieux leur quasi inaction lorsque les boeufs dévastent les champs puisqu'il peut s'agir de leurs propres animaux.

Ainsi, un enquêté affirme « qu'avant quand un boeuf gâtait le champ de quelqu'un, les chefs étaient sévères et beaucoup d'amendes étaient fixées. Mais aujourd'hui, il n'y a plus rien, je dis bien rien. Prie seulement que les boeufs ne dévastent pas ton champ ». De là, il apparait dans un passé récent, les chefs traditionnels infligeaient des amendes importantes et d'autres mesures de sureté (interdiction de promener les animaux dans certaines zones champêtres) aux transhumants. Ceci a eu pour conséquence de réduire considérablement les cas de destruction de culture et créé un cadre social plus ou moins pacifique.

Mais l'enquêté affirme que par un processus corruptif bien ficelé et camouflé de dons en échanges de décisions pipées, les chefs traditionnels sont presque tous devenus des détenteurs de pâturages. Les décisions désormais prises dans un conflit foncier opposant un planteur à un pasteur sont connues d'avance (le pasteur a toujours raison) puisqu'il pourrait s'agir des animaux de l'acteur même qui gère le problème ou d'un collègue aussi membre de ce réseau clientéliste.

L'enquêté affirme également que dans quelques cas rares, les planteurs s'ils n'ont pas été soumis à une périlleuse procédure scientifique de recherche de preuves pour déterminer la responsabilité des transhumants, se font indemniser avec des sommes forfaitaires qui leur sont accordées dit-on pour estomper une procédure dans laquelle ils ne peuvent avoir raison.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon