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Socio-histoire d'une offre alternative de transport urbain: etude du cas des «woro-woro» de yopougon (abidjan, cote-d'ivoire)


par Yerehonon Jean Zirihi
Université Alassane Ouattara (Ex Université de Bouaké) - Doctorat  2015
  

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3.1.3 Une offre formelle dominée par les liaisons domicile-travail

Entre 1970 et 1980, l'expansion très forte de Yopougon s'est réalisée sans que ne se créent à la périphérie de cette cité dortoir des zones d'emploi correspondantes. Ce qui rend la possibilité d'obtenir un emploi salarié sur place incertaine. Les industriels ont préféré investir les surfaces vides de Vridi et de Koumassi, à cause de la proximité du port, du centre-ville et de leur accès facile. La dissociation croissante qui s'est installée entre les périmètres industriels au sud de l'agglomération et Yopougon, l'une des plus grandes banlieues du nord de la ville d'Abidjan a bouleversé la vie quotidienne de nombreux travailleurs. Du point de vue fonctionnel, Yopougon reste fortement dépendante de l'ancien noyau originel de la ville mis en place au temps colonial à partir de 1934:Plateau, Treichville, Adjamé. Pour Jean-Fabien Steck, c'est,

«l'incapacité de Yopougon à atténuer les déséquilibres de l'agglomération abidjanaise n'est pas seulement l'une des conséquences de l'échec relatif de son développement économique. C'est aussi une des conséquences de son peuplement par des classes moyennes, fonctionnaires d'État pour beaucoup, et dont le travail restait situé dans le centre administratif du Plateau, lequel est caractérisé par une très faible population (un peu plus de 10 000 résidents) et par une forte concentration d'emplois (85 000, un peu plus qu'à Yopougon). De façon générale d'ailleurs, le projet «yopougonnaute», initialement conçu, rappelons-le, avec un souci de mixité sociale, a été récupéré en partie par des citadins de longue date, salariés moyens et aisés et travaillant pour beaucoup d'entre eux au sud et au centre de l'agglomération, qui ont utilisé le quartier dans le cadre de stratégies résidentielles et locatives qui ne se justifiaient que par rapport à l'agglomération dans son ensemble, au risque d'induire un biais dans la réalisation du projet initial»(Steck 2008)

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L'évolution des systèmes de déplacement est fortement liée aux changements des modes de vie et aux transformations des formes urbaines. Pour (Masson 2000),les villes se développent sur des périphéries de plus en plus lointaines. L'expansion urbaine de l'habitat et des activités entraîne une modification de la géographie des déplacements qui leur sont liés. Mais réciproquement, ce mouvement d'étalement urbain a été en partie entretenu par l'accroissement des facilités de transports à destination des zones périphériques (acceptation des gbaka en 1977 dans les déplacements à côté des bus et des taxis compteurs). Le tableau suivant indique la typologie fonctionnelle des pôles urbains de la ville d'Abidjan en 1977 et montre comment les territoires d'attraction font écho directement à une offre en infrastructures de transports.

Tableau 5:Situation des populations d'Abidjan et de l'emploi en 1977

Zone

Populations

Emploi

Plateau

18 000

60 000

Treichville-Marcory

197 000

80 000

Adjamé

215 000

41 000

Koumassi-Zone 4

176 000

26 000

Banco-Yopougon

168 000

18 000

Abobo-Anoukoua

-

_

Kouté

206 000

11 000

Cocody-riviera

83 000

23 000

Vridi-Port-Bouët

76 000

17 000

Total

11 39 000

276 000

Source: Chegaray, cité par Bonnacieux in «l'autre Abidjan: histoire d'un quartier oublié (page 65)», Fraternité-Matin, 27 février 1980.

Ceci montre que Yopougon est essentiellement une zone résidentielle et véhicule une identité de quartier dortoir qui lui est spécifique. Cela a rendu le fonctionnement de Yopougon très dépendant des déplacements domicile-travail. Des études menées pour comprendre les choix modaux des travailleurs en matière de mobilité, accordent une importance particulière aux autobus de la SOTRA. Le tableau suivant est extrait des travaux de (Diahou 1981). Il indique clairement l'importance des liaisons domicile-travail dans le fonctionnement de Yopougon.

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Tableau 6: les moyens de transport domicile-travail

Moyens de transport

Nombre d'usagers

Car d'entreprise

22 (20

%)

Bus

35(31,

82 %)

Bus ou gbaka

25 (22,

73 %)

Voitures particulières

17 (15,45 %)

Deux roues

2 (2,82

%)

Pieds

9(8,18

%)

Ensemble

110 (100, 00 %)

Source(Diahou 1981)

Pour rester collé à la demande sociale de mobilité orientée pour l'essentiel vers les liaisons domicile-travail, la SOTRA a entrepris des actions d'envergure. Le nombre des bus de la SOTRA est passé de 200 en 1979 à 1075 en 1980. Des bateaux bus amènent de citadins vers différents rivages lagunaires. Des voies express ont été ouvertes (Bonnassieux 1987). Mais pour ce qui concerne le cas spécifique de Yopougon, seulement 60 à 70 bus répartis sur 5 lignes ont été affectés entre 1979-1980 (Diahou 1981). Ainsi, malgré ces progrès accomplis, tous les maux liés aux problèmes de déplacement des populations ne semblent pas avoir trouvé de solutions. Dans «L'autre Abidjan: histoire d'un quartier oublié», Alain Bonnassieux rapporte même la situation d'un habitant de Yopougon, employé du port confronté à la quotidienneté contraignante des déplacements et des aléas des autobus de la SOTRA en 1978.

«Kouakou un jeune Baoulé de vingt-trois ans, est manutentionnaire depuis 1978 dans un établissement agroalimentaire situé sur la frange lagunaire de la presqu'île [...] Auparavant, Kouakou est resté quelques mois à Yopougon chez son grand frère. À ce moment, le jeune ouvrier se levait au plus tard à 5 h, afin d'être à l'aube à l'arrêt de la SOTRA où la foule de travailleurs venait s'agglutiner. Il lui fallait jouer des coudes pour pénétrer dans le véhicule au milieu des cris, des bousculades. Puis la traversée de la partie majeure de l'agglomération s'effectuait dans l'atmosphère étouffante d'un bus bondé.[...] En cas de retard, Kouakou ne pouvait guère compter sur la compréhension d'un chef de personnel d'autant plus rigoureux sur le respect des horaires que nombre de ses collègues étaient confrontés au même problème» (Bonnassieux 1987).

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Les habitants de Yopougon se déplaçant quotidiennement avec difficultés vers le sud de la ville d'Abidjan deviennent les figures de la «défaite» de la capitale ivoirienne en matière de transport public. Cette situation est mise à profit d'abord par les gbaka, puis petit à petit par les taxis collectifs.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo