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La stratégie de Marvel Studios : de la faillite à  l?avènement

( Télécharger le fichier original )
par Fanny Bonnemayre
Université Paris Diderot - Paris 7 - Master Etudes Cinématographiques  2015
  

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Partie I. Un parcours hors norme - l'histoire derrière la naissance d'un empire

Toute histoire, de fiction ou non, est forcément dotée d'un commencement. En ça, rien de surprenant. Cependant, ce qui peut être plus intrigant et passionnant pour une personne à laquelle on la raconte, c'est de connaître le déroulement de cette dite histoire et les péripéties qui surviennent. Comme peu de personnes auraient pu prédire le futur de Timely Publications, peu de personnes auraient pu également prévoir les incroyables tourments qui secoueraient la petite entreprise, donnant à ces années de lutte une issue qui n'est pas sans rappeler les dénouements heureux des contes de fées. À travers ce récapitulatif -non exhaustif- des aventures de la compagnie Marvel, nous allons découvrir à quel point la maison d'édition, est passée tout près d'un tout autre destin, plus funeste.

A) La naissance de Marvel

1. L'émergence : Timely Publications

Timely Publications naquit en 193310. Son fondateur Moe Goodman, plus connu sous le nom de Martin Goodman, exerçait auparavant en tant qu'éditeur de magazines Pulp, des revues peu coûteuses et très célèbres aux États-Unis apparues au début du XXe siècle. Par la suite, Martin Goodman se détacha des Pulps pour se lancer dans un nouveau genre de publications en vogue à l'époque : les comic books. À la différence des Pulps, les comics contiennent un plus grand nombre d'images que de texte [ANNEXE 1]. Une toute nouvelle clientèle s'offrait dès lors : la jeunesse. Le premier comics de l'histoire, Action Comics #1, fut publié en juin 1938 par Detective Comics, Inc, la maison plus connue de nos jours sous le nom de DC Comics. Puis c'est en 1939 que Timely Comics, filiale de Timely Publication marqua son lancement dans le monde des comics et de l'édition avec la sortie de Marvel Comics #1.

Très vite cette route pris un tournant très sérieux et surtout politique. En effet, outre l'émergence de Timely Comics sur le marché des comics, l'année 1939 marqua le début de la Seconde Guerre mondiale, un événement qui allait fortement bouleverser le monde entier mais également le monde des comic books.

Les États-Unis d'Amérique ne sont pas rentrés en guerre dès 1939 mais certains concitoyens ont quand même participé au conflit d'une certaine façon. En effet, les maisons d'édition, pour la plupart basées à New York City, comptaient de nombreux artistes et écrivains de confession juive

10 - B. Bell et Dr M. J. Vassallo, The Secret History of Marvel Comics, Seattle, Fantagraphics, 2012, p.7.

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car, comme de nos jours, la Big Apple compte une très large communauté juive. Sensibilisés par les événements néfastes en Europe et par les persécutions subies par les Juifs, les scénaristes et dessinateurs rentrèrent plus tôt en guerre à leur manière grâce à leurs créations. Leurs opinons furent, en effet, grandement relayées via les super-héros et notamment grâce à une création en particulier : Captain America. Le personnage du soldat au bouclier fut créé en réponse aux attaques des Nazis. En effet, après la sortie dans Look d'une histoire spéciale de Superman11, Joseph Goebbels ministre de la Propagande sous Adolf Hitler, qualifia l'un des créateurs, de confession juive, de « type circoncis» et d'« Israélite inventif 12». Après ces attaques, les dessinateurs et écrivains, Joe Simon et Jack Kirby, tous deux de confession juive, décidèrent de créer le héros au bouclier étoilé en réponse au nazisme en Europe. Ils publièrent en décembre 1940, soit un an avant l'attaque de Pearl Harbor, attaque qui signera l'entrée en guerre des États-Unis, la première aventure du personnage au bouclier qui rentrera dans l'histoire en devenant un symbole de l'Amérique combattante. La couverture de cette première parution resta très célèbre dans l'histoire des comics puisqu'elle montre Captain America décochant son poing dans la figure d'Adolf Hitler [ANNEXE 2]. Ce numéro, publié à près d'un million d'exemplaires, fut vite en rupture de stock, montrant ainsi la farouche passion du public pour ce héros mais aussi pour ces publications. Par la suite, lorsque les États-Unis rentrèrent en guerre suite à l'attaque de l'armée japonaise à Pearl Harbor, Cap' supporta de façon logique l'armée américaine à travers ses futures publications mais aussi de façon plus profonde, car les comics furent ajoutés au paquetage des G.I. américains13.

On constate ainsi que les comics eurent une importance cruciale sur le moral des citoyens en cette période sombre de l'Histoire.

La Seconde Guerre mondiale, malgré la tristesse de l'événement, fut malgré tout une période prospère et même bénéfique pour l'industrie des comics. Les ventes ne cessèrent d'augmenter jusqu'à atteindre un million d'exemplaire par mois. Par ailleurs, Timely Comics s'entourait de grands noms. Outre Jack Kirby et Joe Simon, il est à noter que le rédacteur en chef n'était autre que Stan Lee alors âgé de 19 ans14. C'est pourquoi, on qualifia cette ère d'âge d'Or.

En revanche, l'histoire était amenée à s'arrêter puisqu'après l'Armistice, les ventes chutèrent et de nombreux personnages tombèrent dans l'oubli comme le soldat Steve Rogers qui n'avait plus de raison d'être. De plus, au vu du salaire médiocre versé par Goodman à ses artistes, ces derniers, à l'exception de Stan Lee, quittèrent au fur et à mesure l'aventure pour rejoindre d'autres maisons

11 - J. Siegel et J. Shuster, How Superman Ended The War, in Look du 27 février 1940.

12 - Traduction de l'anglais - « circumcised chap » et « inventive Israelite » Source : http://research.calvin.edu/german-propaganda-archive/superman.htm (consulté le 1/5/2015).

13 - Comic Book Superheroes Unmasked, Steve Kroopnick, 2003 (19 mn 20).

14 - Source : http://www.discoveryuk.com/web/stan-lees-superhumans/about/stan-lee-biography/ (consulté le 4/3/2015).

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d'édition. Pour réagir à cette baisse de notoriété, le fondateur de Timely, décida de diversifier les productions de sa société qu'il renomma dans le même temps : Atlas Comics.

2. Atlas Comics

Cet âge d'Or des comics donna naissance à Atlas Comics en novembre 1951. Cette société aura, pendant les 10 ans suivants, la particularité de produire tous types de comics, de tous les genres. Atlas délaissa même les super-héros, qui étaient alors dans le creux de la vague, et se lança dans des publications aux thèmes plus différents les uns que les autres comme les histoires d'horreur, de western ou encore de sport. Les personnes de tous âges pouvaient y trouver leur bonheur mais aussi les hommes et les femmes étant donné qu'Atlas Comics produisait également des comics romantiques.

Mais cette prospérité apparente n'allait pas perdurer. En effet, de nombreuses personnes réprouvèrent les comics car ils y voyaient une mauvaise influence sur la jeunesse américaine. Ce courant de pensée fit suite aux accusations portées par le Dr. Fredric Wertham dans son livre Seduction of the Innocent.

Ce psychiatre qui officiait dans les prisons constata une recrudescence des délits chez les jeunes. Il en déduisit que ces derniers étaient influencés par leurs lectures à savoir les comics. Le docteur mena donc un combat pour interdire les bandes dessinées américaines. Sa lutte, dans un premier temps marginale, gagna de nombreux soutiens jusqu'à se muer en un débat qui arriva jusqu'au gouvernement américain qui ouvrit une commission d'enquête sénatoriale en octobre 1954. Le Dr. Fredric Wertham y déclara : « Je pense qu'Hitler était un débutant comparé à l'industrie des comics. »15 Cette lutte contre les maisons d'éditions de comics eut un impact néfaste pour toute l'industrie notamment au niveau des ventes. Atlas Comics ne fut pas épargnée par cette affaire. Si bien que pour prendre de court toute sanction qui aurait pu s'opérer dans les mois suivant cette audience, les maisons d'éditions s'unirent pour créer le « Comics Code Authority » (CCA). Ce label certifiait, entre autres, des comics sans violence, sans sexualité, ni vulgarité et avec le triomphe du Bien contre le Mal dans chaque numéro. Toutes les parutions étaient scrupuleusement vérifiées par cette organisation agissant ainsi comme un organisme de censure. Il faudra attendre l'année 2011 pour que le CCA, jugé obsolète, soit dissous.

Une fois cette crise passée, la compagnie put retourner à son occupation première : la production de comics. Malgré tout, face aux nombreux changements qui secouèrent les

15 - Traduction de l'anglais - «I think Hitler was a beginner compared to the comic-book industry.» Dr F. Wertham, Hearings before the Subcommittee to Investigate Juvenile Delinquency of the Committee on the Judiciary United States Senate. Source : https://archive.org/stream/juveniledelinque54unit#page/94/mode/2up, p. 95 (consulté le 20/2/2015).

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publications, l'industrie des comics déclina progressivement et connut son premier changement d'ère : l'âge d'Or laissant sa place à l'âge d'Argent.

En 1957, un nouveau distributeur oblige Atlas à réduire drastiquement le nombre de ces titres [ANNEXE 3]. Ce qui pouvait dans un premier temps être un mauvais coup pour la maison d'édition se révéla en fait bénéfique. En effet, après le retour de Jack Kirby au sein d'Atlas Comics, ce dernier lança avec Stan Lee en 1959 la série Tales of Suspense. Cette nouvelle série de science-fiction ne connut pas un succès énorme dès sa parution. Mais elle poussa Stan Lee à reconsidérer la politique éditoriale de l'entreprise et à envisager un retour aux histoires de super-héros. Et ainsi, toujours dans une logique d'évolution et de remise en question, la compagnie changea pour la deuxième fois de son histoire son nom en Marvel Comics, la fameuse entreprise que nous connaissons de nos jours.

3. Les débuts d'un géant : Marvel Comics

C'est en 1961 que Marvel Comics, vu le jour. Son nom fut tiré de la série Marvel Comics dont nous avons évoqué l'origine précédemment. Seulement, un simple changement de nom ne suffit évidemment pas au renouveau d'une société. Il fallut trouver de nouvelles sources d'attrait pour reconquérir le public. Goodman suggéra l'idée à Stan Lee de créer une équipe qui pourrait concurrencer l'équipe phare de DC Comics, la Ligue de justice d'Amérique. Avec l'éternel Jack Kirby, Stan Lee créa le premier groupe de super-héros Marvel : Les Quatre Fantastiques. Ce comics tient une part cruciale dans l'histoire de Marvel car cette série déclencha le retour des super-héros sur le devant de la scène, une route que la Maison des Idées, ne quittera plus. A la suite du succès que connurent Les Quatre Fantastiques, les deux artistes héros de l'entreprise, Stan Lee et Jack Kirby, mais également Don Heck et Steve Ditko développèrent de nouveaux super-héros qui allaient devenir des figures mythiques avec notamment la création de Spider-Man, Hulk et Thor en 1962. Et c'est à travers les pages de la série Tales of Suspense évoquée plus haut, que Tony Stark devint Iron Man en 1963. Cette année vit aussi la création des deux équipes qui deviendront culte : les Avengers et les X-Men. Cette liste non exhaustive montre à quel point les artistes de la Maison des Idées révolutionnèrent Marvel Comics, en à peine trois ans, en apportant des personnages qui aujourd'hui encore font rêver petits et grands.

Comme les personnages créés, les thèmes vont aussi définir l'empreinte Marvel. Moins présent chez son concurrent DC Comics, les sujets de société vont inonder les pages des petits ouvrages. Racisme, guerre du Viêt Nam, essais nucléaires... autant de sujets d'actualité qui se

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retrouvent pour la première fois au coeur des histoires des super-héros ouvrant ainsi le genre à un public plus mûr.

En 1968, Martin Goodman vend son petit empire dont Marvel Comics à Perfect Film & Chemical Corporation qui deviendra cinq ans plus tard Cadence Industries.

En 1973, la mort de la petite amie de Spider-Man, Gwen Stacy, déclencha une onde de choc dans le milieu de la B.D. Avant la parution du numéro The Night Gwen Stacy Died (The Amazing Spider-Man #121) il aurait été inconcevable de voir un personnage principal mourir. Même si les avis divergent sur la fin de l'âge d'Argent, le Dr. Arnold Blumberg marque ce numéro comme mettant fin à la période de l'âge d'Argent et donnant naissance à l'âge de Bronze16. Une nouvelle période reconnue comme plus sombre.

B) Les années noires

1. Les solutions de la dernière chance

Les années 80 marquèrent des temps durs pour Marvel dans tous les sens du terme. Non seulement elles furent synonymes d'une perte de vitesse pour les ventes de comics. Mais aussi au niveau de leurs récits qui se trouvaient être plus réalistes et moins utopistes. Comme par exemple, en 1979, où l'on peut découvrir Tony Stark lutter avec son alcoolisme dans un numéro devenu culte : Le Diable en bouteille. La couverture traduit tout particulièrement ce sentiment de noirceur où l'on découvre un homme maladif au visage terrorisé par ce qu'il est devenu ainsi qu'une bouteille de whisky jouxtant le célèbre masque de l'homme de fer.

16 - Dr. A. T. Blumberg, 'The Night Gwen Stacy Died:' The End of Innocence and the Birth of the Bronze Age, in Reconstruction : Studies in contemporary culture, vol. 3, no 4, 2003.

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En dépit des thèmes novateurs et du succès toujours présent des X-Men qui continuait à rester en tête des ventes, l'exécutif de Marvel constatait une baisse de ses ventes. Pour pallier ce manque à gagner, la stratégie adoptée à cette époque fut d'augmenter le prix de leurs comics. Ainsi, le numéro passa de 0,40 c en 1980 à 1$ en 198817. De plus, pour relancer les ventes, les maisons d'édition créèrent les variant covers [ANNEXE 4], une couverture alternative pour le même numéro ouvrant ainsi le marché à un nouveau public : les spéculateurs. Il est vrai que lorsqu'on constate qu'une édition du premier numéro de Superman Action Comics #1 s'est vendue aux enchères sur le site internet Ebay pour près de 3 millions de dollars18, on comprend l'intérêt que pouvait avoir les comics pour certaines personnes. Malheureusement, dans les années 80, les collectionneurs achetaient des caisses entières de numéros qui étaient eux-mêmes tirés à des milliers d'exemplaires. Leur rareté n'équivalait pas ceux de l'âge d'Or et leur valeur n'était pas aussi grande que ces derniers l'avaient espéré.

Comme James Palmiotti, dessinateur chez Marvel, le souligne, mélanger des procédés commerciaux avec l'aspect créatif revient à "perdre l'âme de ce travail"19. Une leçon que le personnel créatif de Marvel retiendra et c'est pourquoi la société se dissocia en deux parties : le personnel créatif et l'exécutif. En effet, suite à cette vague de spéculations, le monde des affaires situé à Wall Street s'empressa de se pencher sur cette "apparente" mine d'or. Et c'est pour cette raison qu'en 1989, Ronald Perelman, un homme qualifié de « discret et intelligent », racheta Marvel pour 82,5 millions de dollars à New World Entertainment qui avait racheté l'entreprise à Cadence Industries20. En près de cinq ans, l'homme d'affaire, P.-D.G. de MacAndrews & Forbes Holdings, Inc., va progressivement plonger Marvel dans un déclin qui aboutira inéluctablement à la faillite.

La première étape de cette descente aux enfers fut l'introduction en bourse de la société en 1991. L'action mise sur le marché au prix de 16$ atteignit 18$ à la clôture21. Ce scénario sera malheureusement de courte durée car Ron Perelman n'était pas le moins du monde intéressé par l'univers Marvel. Pour preuve, comme le raconte Mark Waid, Ron Perelman croyait que Superman était un personnage inventé par Marvel et s'attendait donc à l'acheter avec le catalogue Marvel22.

La gérance de Ron Perelman coûta au groupe Marvel près de 500 millions de dettes bancaires ainsi que des millions de dettes boursières.

Une des dernières solutions pour essayer d'équilibrer les finances de la compagnie fut d'appeler les super-héros à la rescousse de leur maison. Marvel qui, à l'époque, était encore loin de

17 - Source : http://www.comichron.com/vitalstatistics/mediancoverprices.html (consulté le 10/3/2015).

18 - Source : http://cc.ebay.com/action-comics/ (consulté le 12/2/2015).

19 - Marvel Renaissance, P. Guedj et P. Roure, 2014 (3 mn 50).

20 - Source : http://www.bloomberg.com/bw/stories/2002-05-05/marvels-misery (consulté le 13/2/2015).

21 - Source : http://www.tcj.com/sean-howe/ (consulté le 12/2/2015).

22 - Marvel Renaissance, P. Guedj et P. Roure, 2014 (6 mn 10).

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la production de film, décida de céder les droits de certaines de ses licences aux divers studios de Hollywood. Plusieurs films mettant en scène des personnages de Marvel furent sortis au cinéma la décennie précédente comme Howard The Duck en 1986 ou encore The Punisher en 1989. Mais ces incursions sur le grand écran se traduisirent par un cuisant échec. La compagnie se tourna donc vers un nouveau domaine à savoir les séries d'animations. Après le succès de la série X-Men, Ron Perelman, qui avait racheté Marvel ainsi que New World Entertainment, décida de développer les dessins animés basés sur leurs personnages.

En 1994, les séries animées Spider-Man, l'homme-araignée, Les Quatre Fantastiques et Iron Man furent lancée sur la chaîne Fox Kids. Les deux dernières séries constituaient un même programme appelé Marvel Action Hour. Suite à de mauvaises critiques et une audience médiocre, ce divertissement fut annulé au bout de deux saisons. Toutefois, cela ébaucha un semblant de riposte face au succès de son concurrent DC Comics. Face aux faibles résultats, l'entreprise ne toucha que très peu de bénéfices. Trop peu pour pouvoir sauver Marvel.

Il y eut alors une seconde occurrence de l'ingérence de l'exécutif dans les affaires du personnel créatif qui se solda également par un échec : pour combler le déficit de la société, on somma le personnel créatif de sortir plus de titres et d'augmenter les prix (1995 : 1,25 $ ; 1996 : 1,50 $23) pour générer plus de vente et par conséquent plus d'argent. Mais cette stratégie allait rendre la ligne éditoriale de Marvel floue pour tous les nouveaux lecteurs car cette abondance de titres allait empêcher ces derniers de trouver leurs repères. Sans conseils, il est très dur de commencer à suivre les aventures d'un héros. Par exemple, pour le cas d'Iron Man, il existe près de 150 histoires 24 entremêlées dans différentes périodes. Impossible donc pour un néophyte de discerner un point de départ.

Le rapport bénéfice/risque était défavorable et la société se mit encore en plus grande difficulté. Résultat, de nombreux employés quittèrent Marvel et Ron Perelman n'eut d'autre choix que de passer un accord avec les banques pour trouver une solution. Le P.-D.G. de Marvel souhaita alors placer la société en redressement judiciaire, ce qu'il fit grâce à l'invocation du titre 11 du Code fédéral américain. Marvel Comics était officiellement en faillite.

2. 1996 : la faillite

23 - Source : http://www.theawl.com/2012/05/how-much-do-comic-books-cost (consulté le 3/3/2015).

24 - Il existe en réalité près de 800 parutions d'Iron Man. Néanmoins, pour avoir une histoire complète, il faut rassembler en moyenne six parutions. Ce qui nous amène à environ 130 histoires auxquelles il faut rajouter environ 20 histoires hors-séries. Ce qui nous donne le chiffre de 150 histoires. Détails des publications : http://marvel.wikia.com/Iron_Man_Comic_Books (consulté le 3/5/2015).

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Marvel Entertainment fut déclaré en faillite le 27 décembre 1996. Le cours de l'action chuta de 19,50 $ à 7,75 $ en 199725. Un indicateur significatif pour apprécier la situation périlleuse dans laquelle se trouvait la compagnie. Survînt alors une bataille pour le contrôle de la société. Trois parties se déclarèrent : Ron Perelman P.-D.G. en poste, Carl Icahn, et un duo de potentiels repreneurs, Ike Perlmutter et son associé Avi Arad.

Outre Ron Perelman, un autre homme d'affaire était également intéressé par le sort de Marvel, Carl Icahn. Son passé restait assez flou et obscur. Les informations disponibles sur sa personnalité, loin d'être flatteuses, le décrivent comme un maître-chanteur. En ce qui concerne Ike Perlmutter et Avi Arad, leur curriculum vitae n'était pas étranger à Marvel puisque ces deux entrepreneurs étaient les propriétaires de l'entreprise Toy Biz, une société de jouets, filiale de Marvel qui produisait les produits dérivés sous licence de la Maison des Idées. De plus, comme nous l'avons vu plus haut, Avi Arad était déjà fortement impliqué dans le groupe. Par conséquent, l'annonce de la faillite de la compagnie sonnait comme une mauvaise nouvelle pour son entreprise qui dépendait exclusivement de la Maison des Idées. Avi Arad dit de son partenaire Ike Perlmutter que l'homme n'avait aucune affinité pour les comics mais était un homme d'affaire de génie26. Si Ike Perlmutter n'avait pas cette passion pour les super-héros, ce n'était pas le cas d'Avi Arad qui avait une grande expérience et admiration pour ces êtres surhumains. Ce dernier eut un rôle déterminant dans l'avenir de Marvel comme nous le verrons plus en détail par la suite.

Shirrel Rhoades, ancien vice-président de Marvel, déclara que « la plupart des présidents de Marvel n'ont jamais vraiment été intéressés par les comics. Ils géraient juste la société 27». Cette observation met bien en lumière le manque de passion qui animait les gestionnaires mais, surtout, le manque d'expérience dans un domaine qui n'est pas anodin et qui nécessite une certaine expertise. En 1997, Ron Perelman, qui n'avait jamais eu cette envie de contribuer à faire avancer l'entreprise, ne pensant qu'aux profits, abandonne la course et laisse Carl Icahn et les deux entrepreneurs se battre pour le contrôle de Marvel. Carl Icahn qui fut un temps pressenti pour l'emporter fut finalement débouté lorsque après un an et demi de bataille juridique, la cour de justice américaine annula le précédent jugement en faveur de Icahn et valida la fusion de Toy Biz et de Marvel.

C) La renaissance

1. Rachat par Toy Biz : création de la firme Marvel Enterprise

25 - Source : http://www.1stock1.com/1stock1_590.htm (consulté le 3/3/2015).

26 - Marvel Renaissance, P. Guedj et P. Roure, 2014 (16 mn 45).

27 - Marvel Renaissance, P. Guedj et P. Roure, 2014 (5 mn 35).

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C'est ainsi que le 31 juillet 1998, Marvel Enterprise vit le jour. A partir de ce jour, les deux nouveaux propriétaires de Marvel, Ike Perlmutter et Avi Arad, vont mettre en place les prémices de ce qui deviendra la stratégie de Marvel encore utilisée de nos jours puisque Ike Perlmutter est à l'heure actuelle toujours président de Marvel.

L'arrivé des deux hommes fut un vrai renouveau pour la Maison des Idées. Ces deux passionnés ont eux-mêmes tout sacrifié et tout investi dans leur propre société de jouet Toy Biz. Ainsi, lorsqu'il fallut prendre le contrôle de Marvel, ces derniers étaient les mieux placés pour parler du sujet et prendre les mesures nécessaires pour ramener l'entreprise à flot. Surtout lorsqu'on connaît l'influence qu'eut Avi Arad au sein de Marvel Films, l'ancien nom de Marvel Studios où il officiait en tant que président-directeur général28. Tandis que Bill Jemas, l'ancien président du pôle édition, s'occupait de remettre à flot la branche Marvel Comics, Avi Arad, lui, s'attela à faire décoller l'avenir des super-héros grâce aux productions cinématographiques. C'était le début de l'aventure pour Marvel, alors en route pour Hollywood.

2. La création de Marvel Studios

Les dessins animés, notamment X-Men, eurent un autre avantage, celui de lancer Avi Arad à la production cinématographique. Parallèlement à Ron Perelman, Avi Arad constata le succès de la série d'animation. Ce dernier eut l'idée de solliciter les studios de cinéma car au vue de l'audience suscitée par le dessin animé X-Men, un film était possible sur ce même sujet. Stan Lee et Avi Arad mirent près de deux ans pour convaincre la 20th Century Fox de lancer le projet. En juillet 1996, Bryan Singer et Tom DeSanto eurent l'accord de commencer l'écriture du scénario du film X-Men, un travail qui dura près de quatre ans. Marvel ayant un droit de regard sur leur création, aucun détail ne fut laissé au hasard. La firme voulait une histoire fidèle aux comic books, ce fut d'ailleurs une idée d'un certain Kevin Feige qui deviendra le vice-président de Marvel Films au côté de Arad29. Pendant que le scénario du premier film sur les mutants les plus célèbres du cinéma se construisait, Marvel sortit le film Blade qui obtint de bons scores laissant ainsi présager une réussite pour le film X-Men qui vit le jour en l'an 2000.

Le succès du film X-Men au cinéma fut le point de départ pour les films de super-héros au cinéma. Ce long-métrage fut suivi par d'autres films basés sur la licence Marvel comme Hulk, Daredevil et surtout le début de la trilogie Spider-Man.

28 -Source : http://www.thefreelibrary.com/MARVEL+ENTERTAINMENT+AND+AVI+ARAD+TO+DEVELOP+ MEDIA+PROJECTS-a013140213 (consulté le 22/3/2015).

29 - Source : http://www.bloomberg.com/bw/articles/2014-04-03/kevin-feige-marvels-superhero-at-running-movie-franchises#p3 (consulté le 22/3/2015).

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Sur le 1,6 milliard que rapportèrent les deux premiers volets de Spider-Man, Marvel ne toucha que 75 millions. Une goutte dans l'océan qui rendait Avi Arad livide. C'est pourquoi l'exécutif voulu se lancer eux-mêmes dans l'aventure. A la vue du retour en grâce de Marvel Comics et de la popularité des super-héros sur le grand écran, la banque Merrill Lynch, Pierce, Fenner & Smith, Inc. accorda, le 6 septembre 2005, un prêt de 525 millions de dollars au studio qui va marquer le point de départ de Marvel Studios30. Le groupe se rebaptise alors Marvel Entertainment.

A ce moment, la nouvelle maison n'avait ni studio, ni infrastructure, il ne s'agissait que d'un projet à long terme et d'un nom. Néanmoins, grâce à cet argent, Avi Arad pouvait commencer à produire des films et plus précisément deux : Iron Man et Hulk.

Avi Arad quitta Marvel Studios en 2006 car selon lui ses idées n'auraient pas pu trouver écho avec la nouvelle direction que représentait David Maisel31. Même si la compagnie venait de voir le départ de l'un de ses fondateurs et l'un de ses plus gros contributeurs, le studio n'était pas pour autant dans le flou car il restait Kevin Feige, le dauphin d'Avi Arad. Feige su mener la filiale de Marvel aussi bien, voire mieux qu'Avi Arad, créant un studio aux allures de nouvel outsider de l'industrie cinématographique. Ce récent statut, acqui grâce à leurs films, attira tous les regards dont un en particulier, celui de la plus célèbre des souris, Mickey Mouse.

D) La construction d'un succès

1. Le rachat par l'empire Disney

La Walt Disney Company est connue pour jeter son dévolu sur toute entreprise gagnant en popularité. C'est pourquoi, après avoir racheté Pixar en 2006, ils s'attaquent en 2009 au groupe Marvel suite à un accord conclu avec Ike Perlmutter et avec l'aide de David Maisel. L'annonce officielle est publiée le 31 août 2009. La transaction se fit pour un montant de près de 4 milliards de dollars32. Une somme conséquente pour une entreprise ne comptant que deux films à son actif. Cependant, comme Avi Arad le déclara "Spider-Man à lui seul vaut un milliard de dollars"33. Disney arriva à la même conclusion en acquérant le catalogue de près de 5 000 personnages que compose l'univers Marvel. Un bénéfice qui pouvait atteindre des sommets avec une bonne dose de

30 - Source : http://marvel.com/news/movies/158/marvel_launches_independently_financed_film_slate_with_closing_ of_525_million_non-recourse_credit_facility#ixzz3W52uFa3d (consulté le 2/4/2015).

31 - Source : http://www.aintitcool.com/node/23471 (consulté le 2/4/2015).

32 - Source : http://www.lemonde.fr/economie/article/2009/08/31/walt-disney-veut-acheter-marvel-pour-4-milliards-de-dollars_1234004_3234.html (consulté le 6/3/2015).

33 - Source : http://www.tcj.com/the-house-that-jack-built/ (consulté le 2/4/2015).

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médiatisation et une gestion judicieuse. Deux domaines que Disney maîtrise depuis de nombreuses années avec ses propres productions. L'association avec le premier groupe de divertissement au monde avec 45 milliards de dollars de chiffre d'affaires34 ne pouvait qu'être bénéfique et mener à la consécration.

2. Les années 2010 : l'avènement de Marvel Studios

Suite au rachat de Marvel par Disney, de nombreux changements s'imposèrent au niveau du studio. David Maisel quitta la présidence de Marvel Studios35 et laissa sa place à Kevin Feige. Un poste qui devait logiquement lui revenir de droit après les années passées à travailler sur les premiers films de Marvel. Une fois encore, on remarque que les leçons du passé ont servi puisque l'expérience est un trait que l'on retrouve désormais dans les nominations des dirigeants. A la manière de Mark Zuckerberg et Steve Jobs en son temps, Kevin Feige ne porte pas de smoking, loin de là. Sa seule signature, une casquette, souvent siglé du film Marvel du moment, qu'on attribuerait plus à un réalisateur qu'à un dirigeant de studio.

Depuis la sortie remarquée d'Avengers en 2012, Marvel Studios est devenu une attraction majeure à Hollywood transformant tous ce que le studio touche en or. Ce statut apporta une nouvelle vie pour l'entreprise. Désormais, Marvel Studios jouit désormais de ses propres locaux situés à Burbank, près du siège de la maison mère Disney. Une opulence qui permet à la Maison des Idées de mener son projet à bien. Mais quel projet ? Un pari fou : la mise en place d'un arc narratif jamais réalisé auparavant dans l'histoire du cinéma. Plus qu'une franchise, l'Univers Cinématique de Marvel est devenue une vraie série, utilisant les mêmes ingrédients que les feuilletons alliant suites, crossovers, spin-off...

La mise en place de cet arc narratif ne fut pas décidé avec hâte mais résulte au contraire d'une réflexion complexe qui nous livre un univers, jusqu'à présent cohérent et surtout qui séduit petits et grands.

34 - Source : http://fortune.com/global500/walt-disney-232/ (consulté le 14/04/2015)

35 - Source : http://latimesblogs.latimes.com/entertainmentnewsbuzz/2009/12/marvel-studios-david-maisel-to-step-down-afer-disney-deal-walks-away-with-huge-payday.html (consulté le 10/02/2015)

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