Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

Impact macroeconomique des fonds souverains


par Brolin Wilfried MBADINGA
Université d'Aix-Marseille - Master 2 Management des risques financiers 2020
Dans la categorie: Economie et Finance
   
Télécharger le fichier original

précédent sommaire suivant

1.2.1 Évolutions des fonds souverains

Selon Delacour (2009), on distingue deux types de fonds souverains : les fonds des rentes minières (exportation des matières premières) et les fonds des excédents commerciaux (réserves de change). Preqin (2018) a ajouté une troisième catégorie dans sa classification à savoir les fonds souverains provenant d'autres biens.

FIGURE 3 - Évolution des catégories des fonds souverains

5wf.png

 

Source : Preqin (2018)

La figure 3 montre l'évolution de la taille des fonds souverains en fonction de leurs origines. Nous observons que les fonds souverains issus exclusivement de l'exporta-tion du pétrole (Hydrocarbon) constituent plus de 50% de la taille des fonds, et cette proportion a fortement augmenté entre 2011 et 2018. Les fonds souverains issus des réserves de change (Non commodity) constituent la seconde grande catégorie, leurs parts ont fortement augmenté entre 2008 et 2018. Les autres fonds souverains, provenant essentiellement de l'exportation d'autres types de biens, constituent la part la plus faible.

19

1.2.2 Répartition géographique des fonds souverains

La configuration de la répartition géographique des fonds souverains n'a pas beaucoup changé au cours du temps. En 2012 par exemple (Figure 4), 43% des fonds

FIGURE 4 - Répartition géographique des fonds souverains

Source : CAMBIER (2012)

souverains étaient localisés au Moyen-Orient ce qui parait légitime vu la taille et le nombre des pays bénéficiant d'importantes rentes pétrolières et excédents commerciaux. L'Asie vient en seconde position avec 39% des fonds souverains, suivi de l'Europe avec 11% des fonds souverains, et les 7% restants sont constitués de l'Afrique et l'Amérique (Nord et Latine).

1.2.3 Investissement et transparence des fonds souverains

Depuis la crise financière de 2008, la question des fonds souverains a suscité beaucoup de débats suite aux importants investissements effectués durant la crise des subprimes. Ces questionnements proviennent essentiellement des objectifs réels de ces fonds souverains, mais aussi leurs transparences. Afin de créer un cadre de régulation des fonds souverains, faciliter la transparence et la circulation des capitaux de ces fonds souverains, le FMI a élaboré en 2008 les principes de Santiago. La figure 5 montre le degré de transparence des fonds souverains et leurs stratégies d'inves-

20

FIGURE 5 - Stratégie et transparence des fonds souverains

Source : CAMBIER (2012)

tissement. Nous voyons que certains pays ont un niveau de transparence moyen mais une stratégie d'investissement agressive c'est le cas par exemple du Qatar, de la Chine (CIC) et de Singapour (GIC). Le plus grand fonds souverain du monde, le fonds souverain norvégien a un niveau de transparence élevé et une stratégie d'in-vestissement plutôt passive.

En somme, les fonds souverains ont plusieurs objectifs différents dans chaque pays où ils sont mis en place. L'évolution de la mise en place des fonds souverains montre que 41% des fonds souverains ont été créés entre 2000 et 2009. Actuellement, les trois premiers fonds souverains sont respectivement le fonds souverain de Norvège, le fonds souverain de Chine et le fonds souverain des Émirats arabes unis. Constitués essentiellement des ressources pétrolières et des réserves de change, les fonds souverains sont souvent classés par stratégie d'investissement et niveau de transparence. Pour la suite, nous allons étudier l'évolution des agrégats macroéconomiques avant et après la mis en place des fonds, nous allons ensuite les comparer avec des pays n'ayant pas mis en place des fonds durant la même période.

21

2 Analyse économique et étude comparative

2.1 Analyse économique 2.1.1 Revue de la littérature

La littérature concernant les fonds souverains s'est fortement développée durant ces dernières années passant d'une analyse purement théorique aux vérifications empiriques Bahoo et al. (2020). L'une des premières approches consistait à montrer les déterminant de création des fonds souverains dans un pays. Dans leur article, Aizen-man et Glick (2009) utilisent les variables économiques pour analyser les conditions de création des fonds souverains pour un échantillon des pays. Ils montrent par exemple qu'un niveau élevé des réserves de change, du solde du compte courant, du PIB et des exportations des matières premières sont des critères essentiels au processus de création des fonds souverains dans plusieurs pays. Cependant,Gouett et al. (2020) ont montré les limites si on se basae sur l'utilisation des réserves de changes comme critère.Carpantier et Vermeulen (2018) ont par contre comparé des pays ayant des fonds souverains avec ceux n'ayant pas mis en place des fonds souverains afin de déterminer les conditions indispensables à la mise en place d'un fonds souverain. Les auteurs montrent que la qualité de la gouvernance, la capacité d'in-vestissement ainsi que la structure gouvernementale sont des facteurs qui favorisent la création des fonds souverains dans leur échantillon. La littérature concernant les fonds souverains s'est fortement diversifiée pour aborder les aspects géopolitiques, financiers et économiques.

Sur le plan géopolitique, les études visent principalement à étudier le rôle des investissements des fonds souverains dans les pays destinataires. Knill et al. (2012) montrent que les relations politiques ont un rôle important sur la décision d'inves-tissement, mais pas sur le poids des investissements, les investissements ne sont donc pas attirés par les facteurs financiers classiques comme le retour sur inves-

22

tissement.Goldkorn (2012) explique que l'investissement des fonds souverains ne serait pas nécessairement une stratégie géopolitique car pour la plupart, ils interviennent dans des domaines non stratégiques. Cependant Blancheton et Jégourel (2009) dans leur étude montrent qu'en 2006 le montant des participations des fonds souverains dans les sociétés occidentales était de 1.7 milliards de dollars, ce montant serait passé à 83 milliards de dollars en 2008, un investissement qui soulève des questions sur la stratégie d'investissement ou la volonté réelle des fonds souverains de sauver le système financier international. Ces questionnements restent pertinents dans la mesure où Aggarwal et Goodell (2018) montrent que la culture nationale d'un pays joue un rôle essentiel dans la gouvernance des fonds souverains et potentiellement dans les choix et les stratégies d'investissement.

Sur le plan financier, Kubo et Phan (2019) ont étudié la relation entre les fonds souverains et la performance des entreprises au Vietnam et montrent que la performance des entreprises s'améliore lorsque le capital de l'entreprise appartient à l'Etat sous forme de fonds souverains. Gangi et al. (2019) montre que selon l'origines des fonds souverains, la stratégie d'investissement se révèle différente. Les fonds souverains issus des exportations des matières premières ont tendance à investir dans des entreprises risquées, alors que les fonds souverains issus d'épargnes et de réserves de change investissent dans des entreprises performantes.Boubaker et al. (2018) en étudiant l'impact des investissements des fonds souverains sur les fonds propres des entreprises montrent que contrairement à d'autres entreprises de mêmes caractéristiques, les fonds souverains affectent positivement le coût de financement des entreprises dans les lesquelles ils sont investis. Cumming et al. (2020) vont plus loin en montrant que les fonds souverains affectent considérablement la gouvernance de l'entreprise dans laquelle ils sont investis.

L'aspect principale qui motive notre étude est l'impact macro-économique des fonds souverains. Das et al. (2010) expliquent que les fonds souverains pourraient affecter

23

l'économie d'un pays en passant par plusieurs canaux : les dépenses publiques; la demande agrégée; les conditions monétaires et le taux de change; le comportement du secteur privé; les rendements des ressources publiques au fil du temps; et enfin la vulnérabilité de l'économie. IMF (2008) explique également que les fonds souverains peuvent affecter la coordination des politiques économiques nationales d'un pays, à savoir la politique fiscale, la politique monétaire,le bilan du secteur public et la stabilité externe. En utilisant un modèle en panel dynamique, El-Baz (2018) cherche à comprendre quels rôles les fonds souverains jouent dans la stabilité externe de l'économie domestique. Avec un échantillon composé des pays ayant un fonds souverain et ceux n'ayant aucun fonds souverains, l'auteur a montré que les fonds souverains jouent un rôle essentiel dans la stabilisation à long terme de la balance du compte courant.

Pour la suite de notre analyse, nous allons comparer l'évolution des agrégats macroéconomiques avant et après la mise en place des fonds souverains. Nous allons ensuite comparer leurs évolutions avec ceux des pays n'ayant pas mis en place des fonds souverains, ces derniers constituent notre groupe de contrôle. Pour certains pays dont les agrégats augmentent de manière significatif (la dette par exemple) ou diminuent de manière drastique (les réserves), nous allons vérifier si des investissements dans le but d'améliorer les conditions de vie (IDH) ont été effectués.

précédent sommaire suivant