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Stratégies électorales et démocratie locale - L'ambition politique au service du citoyen : le cas des Ateliers de l'Avenir à Aix-en-Provence

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par Guillaume SELLI
Institut d'Etudes Politiques d'Aix-en-Provence - Master II Ingénierie Politique 2007
  

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UNIVERSITE PAUL CEZANNE - AIX-MARSEILLE III

INSTITUT D'ETUDES POLITIQUES

STRATEGIES ELECTORALES

ET DEMOCRATIE LOCALE

L'ambition politique au service du citoyen :

le cas des Ateliers de l'Avenir à Aix-en-Provence

MEMOIRE

pour l'obtention du Diplôme de Master II Ingénierie Politique

M. Guillaume SELLI

Sous la direction de M. Philippe VOYENNE

Année universitaire 2006-2007

SOMMAIRE

Introduction p.5

Les politiques entre altruisme et opportunisme p.5

La démocratie participative à l'étranger p.9

La participation en France p.17

Le cas d'école d'Aix-en-Provence p.26

I Aix-en-Provence, entre jeux de scène locaux et dynamisme participatif p.29

1) Le contexte politique aixois p.31

a) Un peu d'histoire p.32

b) La situation politique aujourd'hui p.35

c) Un électorat difficile à cerner p.37

2) Le cas concret des Ateliers de l'Avenir, entre concertation et communication p.40

a) Une «Grande Consultation de tous les Aixois» p.40

b) Une stratégie de communication efficace p.44

3) Répercussions de la consultation p.50

a) Des répercussions politiques houleuses p.50

b) La réception par la population p.53

II Richesses et ambiguïtés

d'une telle initiative p.57

1) Des contributions citoyennes inégalement exploitables p.58

a) Une ambition pas toujours à la hauteur p.59

b) Un avenir teinté de présent p.62

2) Le suivi de la consultation p.65

a) Le suivi général p.66

b) Le suivi personnalisé p.68

3) A la recherche de l'intérêt général p.71

a) Le danger du clientélisme et de la démagogie p.72

b) Le cadre éthique des Ateliers de l'Avenir p.74

Conclusion p.76

Annexes p.79

Loïc Blondiaux, L'idée de démocratie participative : enjeux, impensés et questions récurrentes p.79

Les Ateliers de l'Avenir : brochure de consultation de tous les Aixois p.92

Brochure-Bilan de la consultation p.112

Liste des Grands Témoins de la consultation p.118

Article de La Provence du 17/09/2006 sur le lancement des Ateliers de l'Avenir p.120

Article de La Provence du 04/12/2006 sur le démarrage de la consultation p.121

Interview de Bruno Genzana dans La Provence du 16/04/2007 sur ses rapports avec Maryse Joissains p.122

Tract de soutien à Nicolas Sarkozy, diffusé par Bruno Genzana dans l'entre deux tours de la présidentielle p.123

Bibliographie p.124

Remerciements p.125

INTRODUCTION

Les politiques entre altruisme et opportunisme

Si le XXe siècle marqua pour la France l'achèvement de son processus démocratique avec l'obtention du droit de vote pour les femmes ainsi que la stabilisation des pouvoirs publics sous la Ve République, l'avènement récent du XXIe pourrait lui incarner pour notre pays l'émergence de la démocratie dite participative, dans laquelle les citoyens ne se contentent plus d'élire leurs gouvernants, mais de participer activement aux processus de prise de décision... Cela relève du constat global que les électeurs se montrent de plus en plus exigeants envers les politiques, avec lesquels un fossé s'est indubitablement creusé en France depuis les années 80, fossé dont le 21 avril 2002 fut le point d'orgue...

La politique est donc à réinventer en France : le citoyen n'est plus docile, désormais il s'abstient, décide ou change son vote au dernier moment, affiche ouvertement ses affinités avec des tendances politiques extrêmes, renverse souvent la majorité lors d'une nouvelle élection ; mais encore plus que ça, il manifeste, demande des comptes, s'implique dans la vie associative, le tout étant largement relayé par les médias, ces derniers eux-mêmes étant nettement plus indépendants du pouvoir que lors des débuts de la Ve République... C'était du moins la tendance observée dans notre pays jusqu'à ce que la dernière élection présidentielle ne permette l'arrivée au pouvoir d'une nouvelle génération de politiques, ce qui a commencé quelque peu à changer la donne...

La confiance à rétablir

La réponse apportée par les politiques pour remonter dans l'estime des citoyens ne s'est pas faite attendre : les mots clés de cette réponse sont concertation, gouvernance1(*), proximité, dialogue... Dans une société désormais de plein pied dans l'ère de la communication à outrance, chacun s'est mis à soigner son image d'«homme de terrain», à l'écoute des «vrais gens», ces énarques pour un grand nombre d'entre eux ayant beau jeu de dénoncer une certaine centralisation excessive, ils privilégient le bon sens et le pragmatisme, valeurs qui seraient l'apanage d'une certaine «France d'en bas»...

C'est alors tout naturellement que les idées de démocratie participative et d'ancrage local ont émergé, ce qui a profondément bouleversé les processus décisionnaires dans le monde politique : le gouvernement cède du terrain au profit de la gouvernance, la prise de décision par les autorités publiques n'est plus seulement le lancement d'un processus mais en est déjà l'aboutissement d'un autre, d'une concertation avec tout un panel d'acteurs publics et privés, concernés d'une façon ou d'une autre par le champ d'application de cette décision...

La démocratie participative est une notion élastique, qui peut recouvrir de larges possibilités : institutionnalisée avec la possibilité du référendum d'initiative populaire, formalisée avec les multiples consultations organisées par les élus locaux, mais aussi informelle avec les rencontres et interactions quotidiennes qui ont lieu entre les politiques et leurs administrés, tournées de quartiers, rencontres associatives, marchés ou même rencontres à l'improviste... La démocratie participative ne doit pas se limiter au référendum car elle relève avant tout d'un état d'esprit : inclure des personnes issues de la société civile dans une liste de candidature, lancer des structures de campagne en dehors des partis politiques, c'est permettre au citoyen non politicien de profession de s'engager politiquement, c'est donc aussi une forme de démocratie participative...

La France est un cas singulier dans la mesure où la démocratie participative est ancrée dans les esprits mais pas encore dans les textes, ni tellement dans les faits, à l'inverse de certains pays étrangers qui ont une longue pratique en la matière. Les dirigeants français tiennent encore trop à conserver l'intégralité de leurs prérogatives et rechignent à autoriser explicitement certaines mesure phares comme pourrait l'être le référendum d'initiative populaire, invoquant leur légitimité d'élus, faisant d'eux les seuls aptes à décider pour les autres. C'est donc bien plus au cas par cas, commune par commune, département par département, selon le bon vouloir des exécutifs locaux, que des formules de participation citoyenne sont mises en oeuvre... Cependant cette émergence est encore timide en France, pays dont la tradition d'un pouvoir fort et centralisé a la vie dure, quand bien même a-t-on voulu récemment préciser à l'article premier de notre Constitution que son «organisation est décentralisée2(*)». Cette décentralisation constitue indéniablement un corollaire quasi-indispensable à la mise en oeuvre de la démocratie participative, qui trouve l'essentiel de son application au niveau local : en effet la concertation, la proximité directe avec le citoyen sont plus aisées à réaliser à petite échelle, pour des enjeux touchant à la vie quotidienne... C'est ce que les citoyens ont su eux-mêmes parfaitement comprendre, notamment en s'organisant en instances représentatives ou censées l'être, comme les Comités d'Intérêt de Quartier (CIQ), désormais interlocuteurs privilégiés et incontournables de toutes les communes qui en comptent sur leur territoire...

Des motivations politiques ambiguës

Quelles que soient les réticences et les débats qu'a suscités et que suscite encore aujourd'hui la démocratie participative3(*), le thème est dorénavant incontournable et tend à gagner encore de plus en plus de terrain à l'avenir, à la fois parce qu'il représente une réelle opportunité d'expression pour les citoyens, et parce que les politiques commencent à entrevoir les avantages multiples que peut offrir un tel mode de gouvernance. Il est d'ailleurs difficile de déterminer si le concept de démocratie participative a fini par s'imposer en France parce que répondant à un besoin réel des citoyens, ou si ce ne sont pas les politiques eux-mêmes qui ont trouvé en lui une tentative de réponse à la crise de confiance entre eux et les électeurs...

En effet la démocratie participative n'aurait jamais pu émerger sans avoir été mise en oeuvre par les dirigeants politiques eux-mêmes, que ce soit par la loi ou des initiatives personnelles au niveau local, englobant tout moyen de se confronter directement à l'opinion des gens, que ce soit sur des considérations générales ou sur une question particulière...

La proximité est aujourd'hui une valeur essentielle sur laquelle nos hommes politiques sont jugés : favoriser la démocratie participative et plus généralement apparaître comme un interlocuteur directement à la portée du citoyen lambda permet à l'homme politique d'être en phase avec son temps, de créer ou de renforcer son capital nom4(*) et son capital réputation. En cela les slogans des deux principaux candidats à la dernière élection présidentielle sont assez révélateurs : que ce soit avec Ensemble tout devient possible de Nicolas Sarkozy, ou La France présidente de Ségolène Royal, qui se veut ainsi l'incarnation de tous les Français, l'accent est mis sur le fait que le président élu gouvernera avec tous ses concitoyens...

On peut alors légitimement se demander si cette nécessité de proximité et d'ancrage local n'a pas finalement été instrumentalisée par le politique aux fins de se faire élire ou réélire, sans que les citoyens n'en retirent beaucoup de profits. Consultés, ils le sont largement désormais. Mais leurs avis sont-il pour autant suivis, ou sont-ils seulement les maillons d'une ambition, d'une stratégie électorale ? Il est intéressant de noter qu'à ce jour il n'existe pas de réelle possibilité de référendum d'initiative populaire en France, et que donc les dirigeants politiques bénéficient encore d'une relative marge de sécurité : la participation oui, mais lorsqu'ils la décident...

Il est ainsi difficile de ne pas relever les ambivalences de cette volonté de proximité, et la plupart des citoyens ne sont pas dupes. Il est cependant frappant de constater que non seulement ils en jouent le jeu, mais sachant bien qu'entre la proximité et le clientélisme il n'y a qu'un pas, nombreux sont ceux qui le franchissent en exprimant des demandes on ne peut plus personnelles, moyennant ainsi leur vote. C'est cet aspect qui pose un doute sur l'objectivité des résultats des démarches entreprises par les politiques, et qui fait dire également que vox populi n'est pas systématiquement vox dei...

La démocratie participative à l'étranger

Si le champ lexical de la démocratie participative n'est apparu que récemment en France, il est assurément employé depuis bien plus longtemps dans de nombreux autres pays. Le fait que dans ces pays la démocratie participative soit institutionnalisée n'ôte pas pour autant totalement l'ambiguïté que nous avons pu relever pour la France, à savoir le fait que les hommes ou les partis politiques puissent instrumentaliser ces pratiques.

Le pays champion de la démocratie participative est d'abord la Suisse, où le référendum sous toutes ses formes est une pratique extrêmement courante et banalisée, tant au niveau fédéral qu'au niveau cantonal, ce qui n'est pas non plus sans susciter quelques interrogations...

Les Etats-Unis sont bien évidemment aussi un cas d'étude intéressant, notamment dans la mesure où la démocratie participative ne s'y effectue que dans le cadre des états. L'originalité de certaines procédures comme le recall ainsi que le pouvoir des divers lobbies et mouvements de pression peut poser quelques réserves sur l'importation éventuelle de ces méthodes en France...

Enfin l'Italie est également très portée en la matière, notamment par la pratique du référendum d'initiative populaire abrogatif, dont l'application n'a pas manqué d'être largement récupérée par la classe politique.

Ces trois pays ont un modèle bien loin du modèle unitaire français centralisé, chaque état américain ou canton suisse ayant leurs propres constitutions. Ces trois pays ont aussi réalise leur unité ou obtenu leur indépendance tardivement, ce qui explique naturellement un maintien fort de traditions locales et le fait que la démocratie participative au niveau local n'y soit pas un vain mot... Cependant les mêmes questions que celles que nous avons posées pour la France entourent ces pratiques : les classes politiques ou les organismes de lobbying de ces pays ont très bien su tirer profit de ces règlementations, sans oublier que de sérieuses réserves peuvent être émises sur certaines situations lorsque le peuple s'exprime directement...

La Suisse, championne du monde des référendums

La Confédération helvétique a organisé plus de référendums que tous les autres pays réunis. On dit souvent «c'est le référendum qui a créé la Suisse, et non l'inverse». Le premier référendum a même eu lieu en 1294, dans le canton de Schwyz. Le référendum d'initiative populaire est prévu dans la Constitution fédérale depuis 1891...

Dans la Constitution fédérale, le référendum se présente sous deux catégories, le référendum obligatoire et le référendum facultatif et suspensif. Le référendum obligatoire est prévu pour toute révision de la Constitution, ainsi que pour la ratification de certains traités internationaux, notamment ceux qui entraînent l'adhésion à une organisation internationale5(*).

Jusqu'en 2003, les référendums obligatoires les plus nombreux portaient sur des questions constitutionnelles, puisque c'était parfois un moyen de corriger des détails de la Constitution. A noter que ce type de référendum nécessite une double majorité : celle des citoyens et celle des cantons.

Le référendum facultatif et suspensif a pour objet de demander la suspension d'une loi ordinaire, de certains arrêtés fédéraux et traités internationaux, le temps que le référendum soit organisé et la question définitivement tranchée. Ce type de référendum peut être demandé soit par 50 000 citoyens, soit par 8 cantons. Il constitue indéniablement un moyen de contrôle non négligeable des politiques par les citoyens.

Depuis 2003, il en existe deux autres variétés de référendum d'initiative populaire, qui peut être en matière constitutionnelle, ou concerner un domaine plus général. Le peuple peut ainsi demander une révision totale ou partielle de la Constitution, qui sera adoptée par référendum. Mais le problème est qu'il n'y a pas de définition matérielle de la Constitution en Suisse et on a pu y intégrer des mesures qui n'avaient rien de constitutionnel. Certaines fois, les initiatives sont assez folkloriques, par exemple en 1996, sur l'utilisation des pigeons voyageurs dans l'armée Suisse.

Cent mille signatures doivent être recueillies dans un délai de 2 mois. Cette initiative se fait sous forme de voeu. C'est ensuite à l'Assemblée Fédérale de mettre au point le projet définitif, qui est soumis à un référendum adopté à la double majorité. Cependant la réforme peut aussi être entièrement rédigée par les citoyens auteurs de l'initiative. Dans ce cas, s'offrent deux possibilités : soit le projet est soumis tel quel au référendum, soit l'Assemblée propose un contre-projet, et dans ce cas les électeurs doivent répondre à trois questions :

- Etes-vous favorables à l'initiative populaire ?

- Le contre-projet est-il meilleur que la législation actuelle ?

- Si le « oui » l'emporte aux 2 premières questions, quel projet voulez-vous voir adopté ?

L'article 130a de la Constitution, introduit par la réforme de 2003, prévoit également que cent mille citoyens peuvent demander l'adoption ou la modification d'une loi fédérale. C'est ensuite à l'Assemblée Fédérale de mettre au point le projet définitif, avant que celui-ci soit soumis à un référendum adopté à la double majorité des votants et des cantons.

La Suisse possède donc un éventail de possibilités très larges en matière de référendum, conforme à ses traditions : une double majorité est souvent requise, des citoyens et des cantons, ainsi qu'une précision minutieuse dans les procédures, notamment dans les cas où un référendum d'initiative populaire comporte plusieurs questions. L'efficacité globale de ces pratiques est cependant quelque peu limitée. Sur un plan statistique, il y a une inflation des référendums depuis 1970 (cinq par an environ). Les initiatives populaires sont les plus nombreuses et les plus diversifiées : immigration, fiscalité, rapports Eglise/Etat... Depuis les années 70, l'environnement est un sujet très présent (trafic routier, protection de la nature, nucléaire...).

Mais ces initiatives aboutissent rarement : près de neuf référendums sur dix ne sont pas adoptées par le peuple qui ainsi contredit lui-même le «peuple» de ceux qui étaient à l'origine de l'initiative. Cependant, des réformes importantes ont été adoptées : la réforme du Code Pénal dans les années 30, la construction de centrales nucléaires en 1990, la nouvelle réforme du code pénal en 2004...

On constate, sur le long terme, un déclin de la participation moyenne : environ 60% avant la Seconde Guerre Mondiale, 55% dans les années 60' et 40% aujourd'hui. Mais même si les initiatives n'aboutissent pas, elles ont souvent le mérite de bousculer l'agenda politique, de soulever certaines questions, et il n'est pas rare que des initiatives rejetées soient reprises quelques années plus tard par les parlementaires. ...

La démocratie participative a influencé aussi bien le jeu politique suisse que les règles électorales. Le référendum entretient en Suisse une démocratie de concordance, qui absorbe les conflits entre partis politiques, qui organise le compromis, le consensus. Lorsqu'une minorité demande une réforme, le Gouvernement (où tous les partis sont représentés en permanence) et le Parlement recherchent le consensus le plus large possible, afin d'éviter que leur action ne soit entravée par les initiatives populaires. L'usage intensif du référendum incite les partis politiques suisses à s'entendre, à passer des compromis (démocratie de concordance, par opposition à la démocratie d'alternance à la française).

La démocratie participative à l'américaine, entre contrôle des citoyens et pouvoir des lobbies

Les pères fondateurs des Etats-Unis n'avaient aucun goût pour la démocratie directe, car ils redoutaient la tyrannie de la majorité. La Constitution fédérale a donc institué au début un système purement représentatif. Les formes de démocratie participatives sont ainsi apparues à la fin du XIXème siècle, hors du cadre fédéral. Certains états ont utilisé le référendum pour adopter leur propre Constitution.

Après la Guerre de Sécession, et plus généralement à la fin du XIXème siècle, les mouvements populistes5(*) ont commencé à proposer des réformes sociales importantes, et ont voulu introduire le référendum, le recall6(*) et l'initiative populaire. Aujourd'hui, la quasi-totalité des états disposent de procédures de référendum, 22 états admettent l'initiative populaire, 15 admettent le recall. La pratique de la démocratie participative s'est largement accentuée aux Etats-Unis depuis les années 80.

Outre les traditionnels référendums constitutionnels et législatifs, certains états américains proposent aussi la possibilité du «référendum de veto» : les électeurs peuvent s'opposer à une loi votée, avant même son entrée en vigueur. Selon les états, les référendums sont soumis à une initiative directe, lorsqu'un projet a recueilli un nombre de signatures minimum (ex : 10 000 dans le Dakota du Nord). Dans d'autres états, on pratique l'initiative indirecte : la pétition est adressée au Parlement de l'Etat, qui doit adopter une loi. S'il ne l'adopte pas, le référendum est alors organisé.

Une pratique originale aux Etats-Unis est celle du recall, qui peut aboutir à l'interruption d'un mandat en cours. Etabli en 1911 en Californie, treize états l'appliquent, dont certains même pour les juges. En octobre 2003, le gouverneur démocrate de Californie Gray Davis a ainsi été révoqué, remplacé par le républicain Arnold Schwarzenegger. Il fallait que 12% des votants lors du dernier scrutin signent une pétition pour que soit engagé un référendum sur la révocation ou le maintien du gouverneur, sachant que les électeurs se rendent aux urne le même jour à la fois pour décider du sort du gouverneur en place et pour élire son éventuel successeur...

Au départ, cette procédure était prévue pour révoquer les élus corrompus. Mais il peut désormais s'agir de manoeuvres plus politiciennes avec de gros enjeux financiers à la clé : c'est un parlementaire républicain, Darrel Issa, qui était à l'origine de cette procédure en 2003, ayant dépensé 3 millions de dollars pour récolter 1,7 million de signatures. Des ennuis avec la justice l'ont cependant amené par la suite à renoncer à présenter sa candidature...7(*)

La pratique de la démocratie participative aux Etats-Unis est en pleine effervescence depuis trente ans : dans l'ensemble des Etats fédérés, il y a environ 70 consultations les années impaires, et plus de 300 les années paires, couplées aux élections générales. Cependant nous sommes assez loin des objectifs préconisés à la fin du XIXème siècle, quand on avançait que la démocratie participative était un contrôle populaire des élus : il y a un désintérêt notable des électeurs pour les initiatives (40% maximum de participation). La démocratie participative a de plus largement été détournée au profit des groupes d'intérêt, au point que désormais des sociétés se sont spécialisées dans la collecte de signatures, dans l'organisation de campagnes électorales : les initiatives ne reflètent souvent que le point de vue d'un seul groupe de pression, ce qui a conduit à l'utilisation de l'expression «référendum d'initiative minoritaire.»

L'Italie et son référendum d'initiative populaire abrogatif

Comme la Suisse et les Etats-Unis, l'Italie est un Etat relativement récent, indépendant et unifié depuis le milieu du XIXe siècle, et par la même à forte vocation décentralisée, cinq régions italiennes bénéficiant même d'un statut d'autonomie spéciale...

En Europe, l'Italie est un cas particulier dans le domaine de la démocratie participative. La Constitution italienne prévoit diverses possibilités de démocratie participative au sein desquelles le référendum tient une place importante, même si la classe politique a souvent tenté de neutraliser son utilisation.

Le Parlement italien a mis 23 ans pour voter la loi nécessaire à la mise en oeuvre du référendum d'initiative populaire abrogatif, alors que celui-ci était prévu dans la Constitution dès 1948. C'est en 1970 que la Démocratie Chrétienne au pouvoir doit se résigner à accepter l'autorisation du divorce mais mets parallèlement en place le référendum abrogatif en espérant revenir sur l'autorisation du divorce, ce qu'un majorité de votants au référendum refusa de faire.

Prévue par l'article 75 de la Constitution, cette procédure permet donc à 500 000 électeurs ou cinq Conseils Régionaux de demander l'abrogation d'une loi ou d'une partie d'une loi. L'article 75 stipule cependant que le référendum abrogatif n'est valable que s'il y a une majorité des électeurs inscrits qui a participé au vote (il faut donc qu'il y ait plus de 50% de participation). L'abrogation de certaines lois est exclue : lois d'amnistie, lois de ratification des traités internationaux et lois fiscales et budgétaires.

Cette procédure, après des débuts difficiles, s'est révélée d'une grande efficacité entre 1987 et 1993, où dix-sept référendums abrogatifs ont ainsi été organisés, et une grande majorité ayant abouti. L'impact était d'autant plus fort que le Gouvernement et le Parlement interprétaient les résultats politiquement. Notamment en 1987, lorsque trois référendums ont été organisés contre les projets nucléaires, cela a abouti à l'arrêt complet du programme électronucléaire italien. En 1993, les Italiens ayant abrogé une loi concernant le mode d'élection des sénateurs (abrogation du système proportionnel), le gouvernement et le Parlement ont préféré changer toutes les lois électorales...

L'opération Mani Pulite8(*) a révélé les dysfonctionnements du système politique, et les référendums ont été utilisés pour mettre fin à la corruption de ce système. Le financement public des partis politiques a été supprimé, le système politique complètement changé à partir de l'imposition du scrutin majoritaire en 1993. La vie politique italienne s'est restructurée autour de deux pôles : un pôle de gauche (l'Ulivo, regroupant socialistes et communistes) et un pôle de droite autour de Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi. Une véritable alternance politique est devenue possible, après une longue domination de la Démocratie Chrétienne, complètement morcelée en petits partis après un tel séisme.

Si le référendum abrogatif a permis cette restructuration, il apparaît aujourd'hui à bout de souffle. Les référendums de mai 2000 pour un changement de mode de scrutin, qui ont été combattus par la droite, ont échoué à cause d'une trop faible participation. En effet les tenants du maintien de la loi ayant plus intérêt à s'abstenir qu'à voter non, cette pratique peine à mobiliser la majorité des Italiens, hormis lors de circonstances politiques très particulières.

Il existe également en Italie une possibilité d'initiative populaire des lois, prévue par l'article 71. Il s'agit de permettre au peuple de présenter une pétition sous forme de projet de loi, devant être déposé et soumis au vote du Parlement par au moins 50 000 citoyens. Cependant le Parlement n'étant jamais obligé de discuter le projet, cette pratique n'a pas connu de réelle efficacité.

La Suisse, les Etats-Unis et l'Italie proposent donc des méthodes originales de démocratie participative. Cependant aucun de ses modèles n'échappe à la critique et la même question de l'instrumentalisation par les politiques peut se poser pour les trois pays...

La participation en France

En France la fonction politique revêt un certain caractère «sacré», bien plus que dans les pays scandinaves notamment où les politiques sont perçus comme des citoyens comme les autres. Plusieurs facteurs peuvent jouer dans cette tradition française : le fait que la France a été une monarchie pendant des siècles, et que même l'instauration d'un régime républicain a perpétué cette sacralisation du pouvoir. Les dirigeants ont ainsi une très haute conception de leur rôle et n'entendent pas que l'on vienne dire que le moindre tout-venant serait autant qualifié qu'un élu pour prendre une décision touchant au bien commun.

Pourtant en 1793, la Constitution de l'An I prévoyait que les citoyens devaient se réunir en Assemblées Primaires, qui devaient donner leur accord sur les lois votées par le Parlement, ce qui constituait une forte forme de démocratie directe. Mais cette Constitution, qui prévoyait en outre le suffrage universel, ne fut jamais appliquée, et la pratique du plébiscite au sein des régimes bonapartistes a achevé les hommes d'Etat républicains de se méfier des consultations populaire...

La France peut alors apparaître comme largement en retard par rapport à nombre d'autres démocraties occidentales, dont la tradition de démocratie participative est nettement plus ancrée. La démocratie représentative a souvent servi dans notre pays à légitimer voire camoufler pendant la seconde moitié du XIXe siècle et la première du XXe le pouvoir des députés. Aussi, dès 1920, un constitutionnaliste classique, Raymond Carré de Malberg, dénonçait-il la souveraineté parlementaire et préconisait de l'équilibrer par le recours au référendum9(*)... Mais en France l'idée de l'appel au peuple a longtemps évoqué la pratique plébiscitaire des régimes impériaux : il a fallu attendre 1958 pour que le recours au référendum soit normalisé. Cela dit la grand-messe du référendum constitutionnel, telle qu'elle était pratiquée au temps du Général de Gaulle, s'avère bien moins audacieuse que les multiples pratiques de démocratie participative existant dans les pays que nous avons visités.

La participation directe des citoyens en France, sur le plan institutionnel, se limite alors bien souvent au sacro saint référendum, si emblématique de notre Ve République et pourtant si redouté de nos politiques. La dernière campagne présidentielle a cependant fait de la démocratie participative un sujet important de débat, notamment du fait de la mise en place par les deux principaux candidats de structures de soutien en dehors des partis traditionnels, afin de s'appuyer sur la société civile. Tout cela relève donc avant tout d'une pratique orchestrée par les politiques, qui cherchent auprès des citoyens un appui qu'ils obtiennent en les faisant participer... Certaines évolutions au cours des dernières années ont déjà eu lieu sur le plan juridique, et nul doute que celles-ci se poursuivront à l'avenir...

L'état actuel du droit en France

L'instrument phare de la démocratie participative, le référendum, tient au sein du système institutionnel français une place particulière et est considéré comme un instrument essentiel de l'exercice de la souveraineté du peuple français10(*). Longtemps marqué par l'usage qu'en faisait le Général de Gaulle, le référendum ne manque pas en France de susciter des très larges débats lorsqu'il en est organisé un, et bien souvent les Français se refusent à répondre strictement à la question qui leur est posée...

La Constitution française prévoit deux possibilités de référendum, le référendum législatif (art. 1111(*)) et le référendum constitutionnel (art. 8912(*)). Outre la différence de nature des textes soumis à ces référendums, il existe une différence de taille entre les deux procédures en cas d'initiative présidentielle : le Président n'a pas besoin d'un vote des deux assemblées pour lancer un référendum grâce à l'art. 11, tandis que l'utilisation du référendum par l'art. 89 requiert un vote favorable des deux assemblées au préalable.

Théoriquement, le recours au peuple n'est donc pas direct en cas de modification de la constitution. Il n'est même pas obligatoire dans la mesure où le Président peut également passer par le Congrès pour faire approuver toute réforme constitutionnelle13(*). Cependant le Général de Gaulle s'est servi à deux reprises de l'article 11 pour convoquer un référendum aux fins de modifier la constitution (ce qui n'a pas manqué de susciter de nombreuses controverses sur la légalité d'une telle procédure), sans avoir à passer par le Parlement au préalable : en 1962 pour l'élection du Président au suffrage universel direct et en 1969 pour la régionalisation et la réforme du Sénat, ce dernier ayant échoué et abouti au départ du Général de Gaulle. Cependant la conception gaullienne du référendum, qui passait plus pour une question de confiance et d'adhésion personnelle du peuple envers son président, que pour une simple question sur un point précis, faisait du référendum une arme à double tranchant et un exercice risqué duquel la plupart des successeurs du Général ont préféré se passer... Ainsi le seul cas d'utilisation de la procédure de référendum constitutionnel par l'art. 89 date de 2000 avec l'instauration du quinquennat : en dehors de cela ainsi que du référendum de 1962, toutes les modifications de la Constitution française ont été adoptées par le Congrès.

Le référendum a aussi présenté de sérieux risques pour la ratification de traités : le traité de Maastricht n'a été approuvé par référendum en 1992 que par 51% des Français, quant au traité constitutionnel européen, une majorité de 54,7 % l'a rejeté en 2005, ce qui a jeté un large discrédit sur la classe politique française, majoritairement partisane du « oui ».

Au final les référendums en France sont plutôt rares, les politiques préférant généralement la voie moins semée d'embûches du Congrès. Le fait est de plus que bien souvent les Français par leur vote ne répondent pas tellement à la question posée mais veulent avant tout profiter de l'occasion de la tenue du référendum pour exprimer un message à l'attention de la classe politique. Ainsi le « non » qui a triomphé en 1969 était bien plus un non à de Gaulle qui avait annoncé qu'il démissionnerait aussitôt en cas d'échec, ce qu'il a fait. Quant aux motifs du rejet du Traité européen, là encore ce sont en grande partie de vieilles rancoeurs générales envers l'Europe qui se sont exprimées, ainsi qu'une méfiance totale envers les institutions et la politique communautaires actuelles, plutôt qu'un rejet du traité stricto sensu.

Si le référendum a donc longtemps été l'instrument de démocratie participative privilégié en France, pour ne pas dire le seul, la loi a cependant connu un certain nombre d'évolutions significatives pour ne pas penser que le mouvement vers une diversification des méthodes de démocratie participative est en marche. La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a prévu un certain nombre de mesures favorisant la participation directe des citoyens à la vie publique.

Cette loi a ainsi permis la création de conseils de quartiers dans les communes de 20 000 habitants et plus, ces conseils de quartier étant obligatoires pour les villes au-delà de 80 000 habitants14(*). Institués par le conseil municipal, ils comprennent des élus municipaux, représentés à la proportionnelle, ainsi que des personnalités représentatives et des associations d'habitants. Ils doivent jouer un rôle consultatif auprès du maire, principalement dans le domaine de la politique de la ville. La formule retenue confère aux conseils un rôle de proposition et les associe aux décisions dans un esprit de concertation.

La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République est également porteuse de plusieurs innovations. Un référendum local décisionnel (nouvel article 72-1 de la Constitution15(*)), est désormais possible alors que jusqu'à présent, seul un référendum consultatif, au niveau communal, était autorisé. Cependant, seuls les élus, et non les citoyens, peuvent être à l'initiative du nouveau référendum décisionnel. La loi organique du 1er août 2003 relative au référendum local précise les modalités de sa mise en oeuvre.

Les citoyens bénéficient tout de même d'un droit de pétition et peuvent désormais demander (mais non obtenir avec certitude) l'inscription à l'ordre du jour d'une assemblée locale d'une question relevant de sa compétence, comme le stipule l'art. 72-1 de notre Constitution. Ce n'est donc pas un référendum d'initiative populaire dans la mesure où la pétition ne permet pas d'obtenir systématiquement un référendum mais que celui-ci est décidé par le conseil municipal.

Cette réforme constitutionnelle a également créé la possibilité d'organiser, lorsque la loi l'y autorise, des consultations locales : en cas de modification de l'organisation d'une collectivité territoriale à statut particulier, en cas de modification des limites des collectivités territoriales. Le 6 juillet 2003, 51% des électeurs corses se sont ainsi prononcés contre le nouveau statut qui leur était proposé pour leur île. Ces référendums ont toutefois valeur de simples avis16(*). En revanche si de telles question concernent un collectivité d'outre mer, la consultation est dans ce cas obligatoire et le résultat du référendum lie le législateur17(*).

L'état du droit actuel en France ne permet donc pas in fine de procédures particulièrement poussées en matière de démocratie participative, ni originales. Cependant le mouvement de ces dernières années est net : la participation directe des citoyens tend à être encouragée au niveau local, que ce soit par les conseils de quartier ou le droit de pétition. Ce mouvement est voué à se poursuivre au vu des débats politiques qui tournent actuellement autour de cette question.

Débats et perspectives

C'est notamment la dernière campagne présidentielle qui a été le théâtre de proposition innovatrices en terme de démocratie participative. La proposition la plus retentissante et qui n'a pas manqué de susciter de grandes polémiques est sans nul doute celle de Ségolène Royal concernant les «jurys citoyens.» Ces derniers, tirés au sort, devaient être chargés d'évaluer les politiques publiques des élus, et permettre ainsi de faire «émerger une sorte de richesse humaine spontanée18(*)».

La forme exacte de ces jurys citoyens est restée plus ou moins vague : «On retrouve un mélange de catégories sociales. On peut avoir un Rmiste, un ingénieur, des gens qui ne se connaissent pas et que l'on fait travailler en étant accompagnés par des élus et des experts sur un même sujet.» La question de la pertinence et de la qualification de citoyens tirés au sort à donner leur avis sur la vie publique se pose tout de même avec une certaine acuité.

L'idée est en fait déjà expérimentée à l'étranger. Sur le modèle des assises, un jury tiré au sort se réunit pour débattre pendant plusieurs jours sur des dossiers précis. Dans la plupart des cas, leur rôle reste consultatif, et ils interviennent en amont des décisions. Mais certains ont des prérogatives décisionnelles en matière budgétaire, à Berlin, ou Porto Alegre. En France, plusieurs expériences similaires ont déjà été menées : Ségolène Royal elle-même a expérimenté dans sa région le «budget participatif», chaque année, les lycées doivent décider de l'usage de 10 % du budget qui leur est affecté.

Les politologues ont généralement posé deux conditions préalables à la pertinence et l'efficacité d'une telle mesure : pour Bastien François, professeur de sciences politiques à l'université Paris-I, «C'est une tendance forte en Europe, une réponse possible à la crise de la représentation politique. Cela peut faire émerger des idées nouvelles car les citoyens sont plus diplômés qu'avant. Cela dit, pour que ce soit plus efficace qu'un sondage, il faut que ces jurys produisent un avis éclairé, qu'ils soient formés». Loïc Blondiaux19(*), chercheur à l'IEP de Lille, précise lui que «l'expérience prouve qu'il faut aussi que ces jurys soient transparents et indépendants de leur commanditaire politique. Les rôles doivent être bien délimités pour que les élus n'aient pas l'impression de se voir confisquer le pouvoir au profit des citoyens20(*)

Des citoyens compétents et indépendants, autant dire que l'on réclame d'eux les mêmes qualités que nos dirigeants, ce qui présente le risque d'une confusion entre la légitimité de l'élu et celle du simple citoyen. A ce sujet Ségolène Royal a précisé qu'il ne s'agissait pas de «sanctionner» les élus, et que ceux-ci garderaient toujours le dernier mot. A ce stade il ne serait pas inutile de relever ce propos du constitutionaliste Didier Maus : «Les élus sont légitimes pour juger de l'intérêt général, ils sont élus sur les programmes généraux et n'ont pas à être jugés sur des actions catégorielles. Par ailleurs, on ne peut pas remplacer la sanction d'une élection régulière par un happening permanent.» Finalement c'est Loïc Blondiaux qui résume assez bien toute la fragilité d'une telle mesure : «Le pari sera donc de savoir si, en l'absence de sanction, ces jury peuvent avoir un poids symbolique suffisamment fort pour s'imposer.» Au vu de l'accueil que les maires ont fait de cette proposition, on peut estimer que ce poids symbolique, en pratique, les jurys ne l'auraient pas eu...

La campagne de Ségolène Royal a d'ailleurs véritablement été menée en insistant sur la démocratie participative : Désirs d'Avenirs a constitué une plate-forme de propositions par tous les citoyens, indépendante du PS. Il est d'ailleurs significatif que le Président de la république actuel, naguère sceptique devant une telle façon de mener campagne, a laissé Jacques Attali créer une trentaine de blogs pour alimenter des propositions pour la commission qu'il préside sur les conditions de la libération de la croissance française. Il ne faut pas oublier non plus que lors de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, une structure de soutien indépendante de l'UMP, l'Association Nationale des Amis de Nicolas Sarkozy (ANANS), avait été mise en place : son but était de promouvoir le projet présidentiel de Nicolas Sarkozy tout en allant à la rencontre d'hommes de terrain, avec la volonté de privilégier l'homme et les idées au détriment de l'étiquette politique. Très dynamiques sur le net, les blogs des sections jeunes régionales de l'ANANS ont ainsi fourmillé de témoignages singuliers, de propositions et débats en tout genre, sans oublier l'organisation de rencontres assez informelles, plus décontractées que si elles avaient eu lieu dans le cadre de l'UMP...

Il est cependant impossible de nier la part de démagogie contenue dans ces propositions ou dans le lancement de ces structures. La phrase de Ségolène Royal «mes idées seront les vôtres» pose la question du rôle du décideur : doit-il se contenter d'écouter ou doit-il également jouer un rôle majeur d'impulsion, comme l'a tout de même répété Nicolas Sarkozy à plusieurs reprises ? Une critique récurrente faite envers Ségolène Royal a souvent été que sa volonté d'instaurer une démocratie participative au sein même de ses structures de campagne masquait le fait qu'elle-même n'avait que peu d'idées à proposer aux Français...

Nicolas Sarkozy promettait lui «d'associer» les citoyens au choix des réformes et de rendre compte «régulièrement» devant eux de son action. Ainsi il a été évoqué que 10 % du corps électoral puisse demander au Parlement de se prononcer sur un texte de loi, Ségolène Royal ayant également formulé une proposition similaire. Quant au référendum d'initiative populaire, pourtant promis par Jacques Chirac lors de la campagne de 2002, seule l'UDF et François Bayrou ont proposé en 2007 son adoption, ainsi que l'extension du champ référendaire de l'article 11, dans leur projet pour une VIe République, qui proposait également la possibilité de saisine du Conseil Constitutionnel par les citoyens. Cependant le référendum d'initiative populaire ainsi que la saisine du Conseil Constitutionnel constituent bien évidemment des thèmes sur lesquels la Commission pour la réforme des institutions présidée par Edouard Balladur ne va pas tarder à rendre ses décisions...

Après avoir tenu le haut du pavé pendant la dernière campagne présidentielle, l'idée de démocratie participative est désormais quelque peu en veilleuse, mais ne manquera pas de ressurgir lors de la publication des travaux de la Commission Balladur. Les Français ne se privent cependant pas de participer, notamment au niveau local et d'une manière non institutionnelle : l'exemple de la consultation de Bruno Genzana à Aix-en-Provence en est représentatif...

Le cas d'école d'Aix-en-Provence

Un exemple significatif d'une volonté de consultation de la population locale en toute proximité d'une part, mais sans être totalement dénué de toute stratégie électorale d'autre part, se trouve du côté d'Aix-en-Provence, ville ni trop petite ni trop grande avec ses 150 000 habitants, et dont la vie politique est fortement agitée... En effet, droite et gauche y sont divisées, sans oublier le centre, dont le leader local François-Xavier de Peretti suit pleinement depuis 2002 François Bayrou dans sa stratégie d'autonomie vis-à-vis de la droite, comme l'en témoigne sa posture « ni dans la majorité, ni dans l'opposition », ainsi que le lancement de sa structure l'Union pour Aix. En ce qui concerne l'UMP, le maire sortant Maryse Joissains s'est vu contesté par ses 2e et 5e adjoints, Stéphane Salord et Bruno Genzana, lequel a lancé en septembre 2006 Les Ateliers de l'Avenir - Aix 2008, vaste plateforme de projets comprenant notamment une «Grande Consultation de tous les Aixois», ce qui n'a pas tellement plu à Mme le Maire : le climat s'annonce pour le moins tendu pour les prochaines élections municipales...

Une opération stratégique

Cette initiative ne manqua pas de susciter de vives polémiques, que ce soit avec l'opposition ou même au sein de la majorité municipale. Les Ateliers de l'Avenir ont en fait constitué une excellente occasion pour Bruno Genzana de se démarquer de l'équipe sortante et d'affirmer son autonomie, face aux critiques non négligeables pesant sur Mme le Maire et son entourage, presque depuis le début de son élection à la tête de la ville en 2001. Bruno Genzana et son bouillonnant compère Stéphane Salord seraient ainsi tout à fait en mesure de se poser en hommes de «rupture», sans pour autant renier leur appartenance à la majorité municipale, s'inspirant ainsi du numéro d'équilibriste qu'a su parfaitement exécuter Nicolas Sarkozy lors de la dernière campagne présidentielle, lors de laquelle il a pu se démarquer substantiellement du gouvernement sortant et de l'ère Chirac, tout en étant soutenu par ce même gouvernement dont il était même le numéro 2, avec le titre de Ministre d'Etat...

Le moins que l'on puisse dire, c'est que les habitants aixois seront extrêmement attentifs au déroulement de la prochaine campagne municipale. Quant à ceux s'étant impliqués sans arrière-pensées dans Les Ateliers de l'Avenir, ils devraient sans aucun doute surveiller de près M. Genzana afin de voir quels enseignements celui-ci aura tiré de cette vaste consultation...

L'ambition pour le bien des gouvernants et des gouvernés

Le cas concret de l'initiative de Bruno Genzana à Aix-en-Provence est révélateur de l'ambiguïté d'une telle démarche : d'un côté l'exécutif local, souvent accusé de gouverner en vase clos, créé un mécontentement de certaines franges de la population. De l'autre, un adjoint au maire réputé pour son sérieux et son écoute offre enfin l'occasion à de nombreux habitants de s'exprimer, et d'élaborer tous ensemble une véritable vision d'avenir pour Aix... Sauf que par la même occasion cet adjoint devient de fait un acteur incontournable du paysage politique aixois, et peut légitimement se poser en candidat à la mairie lors des prochaines élections. Difficile pour le citoyen aixois lambda de ne pas voir a priori d'arrières pensées personnelles dans cette démarche, pourtant guidée par les meilleurs sentiments du monde, d'autant plus si le dit citoyen est connaisseur des moeurs politiques aixoises, plutôt singulières...

La question essentielle reste finalement de déterminer quel bénéfice la population concernée va tirer de cette démarche de consultation, à la fois sincère et stratégique : il a été en effet très difficile de synthétiser en projet les milliers de retour qu'ont eu une telle initiative, d'autant plus que la qualité des contributions effectuées y a été bien évidemment on ne peut plus variable. Un autre problème est aussi que le citoyen ne pourra véritablement s'assurer d'avoir été bien entendu que lorsque l'initiateur de la démarche de consultation aura les moyens de concrétiser en acte les projets établis : or pour cela il faudrait que M. Genzana soit élu Maire d'Aix-en-Provence. Au final une démarche de proximité telle que Les Ateliers de l'Avenir reste avant tout une question de confiance : l'ambition personnelle est présentée comme mise au service d'une ambition collective, l'opportunisme dont a fait preuve M. Genzana devient alors une opportunité pour les citoyens aixois...

I Aix-en-Provence entre jeux de scène

locaux et dynamisme participatif

Avant de décider de se porter candidat aux suffrages des électeurs, il est recommandé d'analyser le terrain sur lequel on se présente. Sa connaissance invite le candidat à adapter sa stratégie, le corps électoral «est un corps vivant qui réagit avec son instinct, le sens de ses intérêts, le poids de son passé21(*)

L'histoire politique en général est faite de surprises, ce qui constitue le risque (et le charme) de la vie publique. Théoriquement, mieux un homme politique est implanté dans son territoire d'élection, moins il a de chances de connaître de (mauvaises) surprises. Cependant la ville d'Aix-en-Provence semble quelque peu échapper à la règle, tant le comportement et les variations des électeurs aixois sont imprévisibles...

Aix-en-Provence, capitale historique de cette région contenue dans son propre nom, ville à dimension internationale sur le plan culturel et puissance économique régionale, célèbre pour ses représentations scéniques et son Festival d'Art lyrique, connaît une vie publique pour le moins agitée, avec une classe politique locale qui s'entredéchire, des associations vindicatives diverses et variées, des notables locaux influents, et une population relativement hétéroclite, dispersée entre les multiples quartiers et villages qui composent cette ville de province dont l'étendue est bien plus grande que celle de Paris22(*)....

La population aixoise en général est particulièrement exigeante envers ses dirigeants, ayant la plupart du temps une haute idée de sa ville et de la façon de la servir. Les politiques aixois affichent d'ailleurs tous un point de vue semblable, ayant beau jeu de s'accuser mutuellement de ne pas avoir de vision politique à la hauteur des ambitions légitimes que doit nourrir une ville telle qu'Aix-en-Provence. Cependant une figure du paysage politique aixois ressort particulièrement du lot lorsqu'il s'agit d'employer ce genre de vocabulaire  : Bruno Genzana, conseiller général du canton Aix Centre23(*) et actuel 5e adjoint au Maire, délégué au tourisme, au Festival d'Art lyrique et aux Relations internationales.

Ayant pris ses distances avec la majorité municipale actuelle, quoique ne l'ayant pas quittée, Bruno Genzana a lancé en septembre 2006 une vaste consultation recouvrant un large champ de domaines, orchestrée par une campagne de communication qui n'est point passée inaperçue... Le tout dans un but ouvertement avoué : l'ambition. Mais quelle ambition ? Une ambition «à la hauteur de notre ville», d'où la nécessité de construire un projet avec la contribution de tous les Aixois. Cependant il fallait compter aussi sur une ambition d'une autre nature, non encore avouée : ce projet d'avenir va de fait servir de tremplin à Bruno Genzana pour se placer en situation d'être un candidat crédible à la mairie d'Aix-en-Provence...

Un point sur le contexte politique aixois, caractérisé par divisions et luttes fratricides, est nécessaire afin de mieux comprendre les tenants et les aboutissants du projet des Ateliers de l'Avenir. Ce projet n'est d'ailleurs pas le seul moyen trouvé par Bruno Genzana d'accroître son capital nom : notre élu pratique la concertation depuis de nombreuses années sous d'autres formes. Cependant cette consultation n'a pas manqué de déclencher de nombreuses polémiques dans l'opposition municipale et aussi au sein du camp majoritaire...

1) Le contexte politique aixois

L'hétérogénéité architecturale du centre ville d'Aix-en-Provence ne fait aucun doute. Il suffit pour s'en convaincre de parcourir des yeux un plan du centre ville délimité par les boulevards périphériques et traversé par le Cours Mirabeau. Ce dernier sépare deux ensembles, deux secteurs urbains à la configuration bien différente. Au nord le vieux centre antique et médiéval se caractérise par son labyrinthe de rues, de forums et de places promptes à désorienter les esprits cartésiens24(*). Le caractère anarchique de la disposition des artères du vieux centre, fruit de plusieurs siècles d'histoire, a cependant tendance à s'atténuer au fur et à mesure que l'on se rapproche des boulevards qui matérialisent ses limites. Au sud du Cours Mirabeau s'étend un espace urbain structuré au contraire par des rues de largeur presque identique qui se coupent à angle droit : le quartier Mazarin. L'urbanisme qui s'y déploie paraît tout droit sorti de l'esprit d'un géomètre et les vicissitudes de l'histoire semblent n'avoir que peu perturbé cet ordonnancement25(*).

Aix est donc une ville de contrastes, et ce qui est valable en architecture l'est également en politique : si cette ville a généralement une image plutôt bourgeoise et conservatrice, il n'empêche que si l'on voulait schématiser les différents clans qui composent le paysage politique aixois, on serait tout autant désorienté que le touriste consultant le plan du centre ancien. La politique locale y a ici une saveur particulière, les journaux locaux ne se privant pas de rapporter une énième querelle ayant éclaté en plein conseil municipal, dont les séances sous la présidence de Maryse Joissains tiennent aussi bien du théâtre de boulevard que d'un combat de gladiateurs, sans parler du climat lors des élections...

Les électeurs aixois sont pour le moins aussi capricieux que leurs dirigeants locaux, et n'hésitent pas à le montrer lors du vote, ce qui fait d'Aix un ville où les élections municipales restent toujours relativement ouvertes, où le dynamisme des candidats lors de la campagne électorale peut faire la différence même si au départ ils ne partaient pas favoris. L'initiative de Bruno Genzana s'inscrit pleinement dans cette optique...

Cette caractéristique aixoise n'est pas récente : l'histoire politique d'Aix est faite de grandeurs et de décadences, de chutes et de rebondissements, de vertu et de trahison. Tout cela abouti au paysage politique aixois actuel, complètement divisé et éclaté, au sein même des partis, avec une large incertitude pesant sur les intentions réelles des uns et des autres, et sur les rapprochements ou éloignements possibles entre politiques.

Le problème est qu'aujourd'hui les Aixois demandent naturellement que leurs dirigeants s'occupent de leurs concitoyens en priorité et non de leurs querelles personnelles : il existe une réelle attente de la part de la population, car nombreux sont les problèmes que rencontre cette ville, ainsi que les défis qu'elle a à relever...

a) Un peu d'histoire

A Aix depuis près de trente ans, les luttes fratricides n'ont jamais manqué. Aux temps du socialiste Félix Ciccolini (maire de 1967 à 1978), Aix se distinguait déjà par une succession d'annulations des élections. Depuis 1983, année où le maire Alain Joissains n'avait pas pu se représenter pour cause de déboires avec la justice et avait propulsé tête de liste Jean-Pierre de Peretti della Rocca dans l'attente d'un éventuel retour, la division n'a cessé de régner à droite.

Quatre listes de droite se sont affrontées en 1983 : se sont notamment présentés Jean-Pierre de Peretti della Rocca (UDF), Charles de Peretti26(*) (RPR mais soutenu également par le Parti Républicain, composante libérale de l'UDF), et Charles Debbash, le célèbre et sulfureux juriste... Une fois élu, Jean-Pierre de Peretti a vite pris goût à la fonction. Mais ayant accepté de placer Maryse Joissains, l'épouse d'Alain, comme première adjointe, les rapports avec cette dernière furent rapidement tendus. En fin de mandat, il fut mis en minorité sur le vote du budget. La droite allait passer dans l'opposition pendant douze ans.

En 1989, deux listes, une UDF menée par Jean-Pierre de Peretti della Rocca, l'autre RPR menée par Jean-Pierre Bouvet, étaient candidates tandis qu'une liste du Front national se qualifiait pour le second tour. La bataille fut âpre entre les deux listes de droite et le soir du premier tour de Peretti devançait Bouvet d'à peine 26 voix : l'inversion des résultats des deux candidats dans un bureau de vote de la part d'un membre de l'équipe Bouvet fit qu'ainsi la liste RPR croyait avoir remporté la primaire à droite et le malentendu ne put se rectifier sans exacerber les tensions. A l'issue de très difficiles tractations, une entente fut trouvée pour faire fusionner les deux listes mais trop tard, la liste finale ayant été déposée quelques minutes après l'heure limite, elle fut invalidée par la sous-préfecture. Les deux candidats ayant déposé leurs propres listes auparavant, cela faisait quatre prétendants en lice au second tour, avec la liste socialiste et celle du Front National. Malgré le désistement de Jean-Pierre Bouvet et le retrait de sa liste, cette configuration offrait pour ainsi dire la mairie sur un plateau au socialiste Jean-François Picheral, ancien premier adjoint de Félix Ciccolini.

En 1995, nouvelles avanies, trois listes de droite n'arrivaient toujours pas à se mettre d'accord au premier tour. Une était menée par le député de la XIVe circonscription27(*) Jean-Bernard Raimond (RPR), ancien ministre des Affaires étrangères que l'on traitait volontiers de parachuté, une autre par l'ancien maire Alain Joissains (UDF) et une troisième par le jeune ambitieux François-Xavier de Peretti28(*), qui avait fraîchement rejoint l'UDF. Picheral fut réélu suite à une triangulaire opposant la gauche, la droite et le Front National. En 2001 à nouveau trois listes de droite, conduites cette fois-ci par Jean Chorro (RPR), François-Xavier de Peretti (UDF) et Maryse Joissains (sans étiquette). Ayant fait chacune environ 15%, celles-ci ont fusionné pour enfin remporter l'élection avec seulement 550 voix d'avance, l'extrême droite n'ayant pu cette fois-ci atteindre le second tour.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est au total la gauche qui a le plus longtemps exercé le pouvoir municipal à Aix ces quarante dernières années : pendant 23 ans et la droite seulement 17. Cela est dû essentiellement à trois facteurs : la division récurrente de la droite aixoise et ses déchirements internes, le poids relativement important de l'extrême droite à Aix jusqu'en 2001, et enfin le positionnement de certains leaders de la gauche, Jean-François Picheral en particulier, qui a su se faire reconnaître comme une personne de bon teint et modérée, ce qui a pu séduire une partie d'un électorat conservateur mais soucieux d'avoir un maire qui donne une bonne image de sa ville, tandis que le discrédit pesait quelque peu sur les leaders de la droite aixoise.

Aujourd'hui à Aix, l'histoire est un éternel recommencement, les divisions n'ont pas cessé, et celles de la gauche se sont ajoutées à celles de la droite...

b) La situation politique aujourd'hui

En mal de leader incontesté suite au retrait de Jean-François Picheral après sa défait de 2001, la gauche aixoise souffre elle aussi désormais d'un manque d'unité. Celui qui apparaît naturellement comme le chef de file de l'opposition aixoise, Alexandre Medvedowsky, a vu son statut de candidat socialiste potentiel aux prochaines municipales contesté par l'arrivée sur Aix de Michel Pezet, ancien bras droit de Gaston Defferre à Marseille et président de la Région PACA jusqu'en 1986, adoubé par l'ancien maire Picheral, qui désormais voue une haine farouche à Medvedowsky son ancien dauphin29(*). L'ancien maire et son ancien adjoint se sont d'ailleurs livrés à une querelle épistolaire plutôt polémique dont les destinataires étaient les adhérents aixois du PS, ce qui a fait largement désordre. Ces derniers devraient se prononcer dans les prochains jours pour désigner leur candidat investi et Medvedowsky devrait pouvoir s'en tirer sans problèmes, étant donné que Michel Pezet, totalement privé d'appuis au sein du PS aixois, vient tout juste de renoncer à se présenter à l'investiture30(*). Cependant il est fort probable qu'il maintienne sa candidature en dissidence, le soutien de Jean-François Picheral demeurant un atout non négligeable en sa faveur. Quant au socialiste André Guinde, conseiller général du canton Aix Sud-Ouest, après avoir commencé à soutenir Pezet tout en envisageant d'être lui-même candidat, il s'est finalement rallié à Medvedowsky...

En ce qui concerne la majorité de droite qui gère la mairie depuis 2001, son caractère hétéroclite (elle est issue de trois listes différentes) a bien vite provoqué de béantes fissures. La rupture entre Maryse Joissains et François-Xavier de Peretti est consommée dès 2002 à l'occasion des élections législatives31(*) : 3e adjoint à la culture, de Peretti s'est vu retirer ses délégations et vote régulièrement contre de nombreuses décisions prises en conseil municipal. La nette prise de distance de François Bayrou vis-à-vis de la droite, après sa campagne présidentielle et la création du Modem, recoupe tout à fait celle de de Peretti au niveau local : il ne fait aucun doute que de Peretti sera le candidat Modem aux municipales à Aix et cette fois-ci toute entente avec une liste de droite semble particulièrement difficile.

La division est aussi présente au sein de l'UMP : plusieurs adjoints et conseillers municipaux, Bruno Genzana et Stéphane Salord32(*) en tête, ont progressivement pris leurs distances avec ce qu'il est communément admis d'appeler le «système Joissains33(*)» et sa gestion en cercle fermé, les élus n'entrant pas dans les bonnes grâces de Mme le Maire se retrouvant bien souvent court-circuités. L'affrontement est pour l'instant larvé, les intentions des uns et des autres n'ayant pas été clairement dévoilées. Cependant le lancement par Bruno Genzana des Ateliers de l'Avenir n'a pas manqué de susciter la controverse au sein de la majorité municipale, et c'est très naturellement que Maryse Joissains, réélue député en 2007, a préféré changer de suppléant...

Nous sommes donc en présence de cinq listes potentielles de candidats aux prochaines municipales, toutes susceptibles d'accéder au second tour : la campagne électorale et les tractations d'entre-deux tours s'annoncent pour le moins musclées... De nombreux bruits et rumeurs circulent déjà sur les éventuelles tractations et alliances qui pourraient se conclure : le ticket Pezet - de Peretti a longtemps tenu la côte dans les comptoirs, sans que ces rumeurs n'écartent totalement un rapprochement entre de Peretti et Bruno Genzana. Le moindre électeur sera courtisé : or l'électorat aixois est justement réputé pour être versatile et relativement imprévisible...

c) Un électorat difficile à cerner

Aix-en-Provence a connu deux périodes de mutations et de renouveau démographique et urbanistique. L'arrivée des rapatriés d'Algérie a accéléré la construction du quartier d'Encagnane et le lancement de l'urbanisation du Jas de Bouffan, deux quartiers populaires. Les années 90 ont été fastes pour le développement économique qui a vu plus de 10.000 habitants s'installer à Aix et qui a permis de promouvoir une politique d'équipements structurants. L'essentiel des grands projets qui trouvent leur achèvement aujourd'hui (centre chorégraphique, salle de spectacles, musée Granet, Sextius-Mirabeau...) ont d'ailleurs été lancés dans ces années-là : leur aboutissement récent a largement modifié la composition de la population aixoise, sans oublier la construction d'un nouveau «village34(*)» à proximité du Pôle de l'Arbois (La Duranne)... Difficile de prévoir le comportement électoral de ces nouveaux venus, avec qui en général la «prime au sortant» fonctionne moins qu'avec les habitants déjà implantés auparavant, à condition qu'aujourd'hui Maryse Joissains bénéficie d'une réelle prime au sortant, ce qui n'est pas véritablement établi...

Ces aménagements ont ainsi provoqué une évolution de la population (et donc de l'électorat) considérable35(*), à laquelle les politiques se sont bien entendu montrés attentifs, et ce d'autant plus que certains en quelques années se sont largement repositionnés en terme de captation d'électorat. Ainsi si en 2001 Maryse Joissains, ayant mené campagne sans étiquette politique, avait largement recueilli les suffrages d'un électorat populaire avec un brin de démagogie36(*), son positionnement lors des prochaines élections devrait nécessairement évoluer dans la mesure où elle bénéficiera désormais de l'investiture de l'UMP et que la politique qu'elle a menée depuis six ans n'a pas tellement dû la favoriser auprès des quartiers sensibles et devrait la pousser à viser un électorat de droite plus traditionnel... Quant aux candidats de gauche, leur stratégie de campagne et leur positionnement électoral sera différent si seul Medevedowsky investit se présente ou si Pezet maintient sa candidature, ce dernier ayant plus tendance à lorgner vers le centre...

L'électorat aixois est versatile également dans la mesure où il est relativement composite et que de surcroît chaque catégorie de la population ne vote pas forcément comme on pourrait le penser a priori : cette ville volontiers étiquetée de droite a souvent donné sa confiance à un candidat de gauche modérée, de plus des candidats de droite ont déjà recueilli de très bons scores dans les quartiers populaires comme Maryse Joissains en 2001 qui avait été élue en déjouant tous les pronostics, tandis que Picheral faisait un meilleur score qu'elle dans le centre ville, pourtant d'un niveau social nettement plus élevé. Au sein même du centre ville l'électorat est disparâtre, les habitants du centre médiéval se prononçant souvent nettement en faveur de la gauche37(*), tandis que ceux du quartier Mazarin s'identifient beaucoup plus à un électorat de centre-droit modéré, tendance démocrate-chrétien.

La vie politique à Aix peut ainsi ressembler à un cercle vicieux ou vertueux selon les points de vue : l'électorat aixois, ayant réélu un maire de gauche en 1995 alors qu'il avait voté massivement pour Jacques Chirac un mois auparavant, par sa nature imprévisible ne peut qu'accentuer les tensions et rivalités qui pèsent entre les politiques locaux, et ces mêmes rivalités entachées de divisions accentuent cette tendance qu'ont les Aixois de déjouer les pronostics.

2) Le cas concret des Ateliers de l'Avenir,

entre concertation et communication

Le paysage politique aixois étant pour le moins fourni, nos hommes politiques locaux rivalisent d'imagination pour se construire un capital-nom. Certains optent pour la stratégie de l'opposition permanente, comme François-Xavier de Peretti, qui a commencé sa carrière politique en se présentant contre le candidat investi UDF Bruno Genzana aux cantonales de 1994, alors qu'il allait rejoindre ce parti quelques mois plus tard. Il s'est depuis présenté à chaque élection et a toujours perdu, son seul mérite étant sa contribution à la victoire des municipales de 2001 au cours desquelles il avait fait fusionner sa liste avec les deux autres de droite dans l'entre-deux tours, mais pour mieux rompre par la suite avec l'équipe municipale et tirer aujourd'hui à boulets rouges sur la politique mise en place par la majorité...

En revanche Bruno Genzana a choisi une démarche sans doute plus constructive, quoique non dénuée de risques pour autant. Fidèle au pacte victorieux de 2001, il exerce ses fonctions d'adjoint jusqu'au bout, mais il a également pris de fait ses distances avec l'entourage de Mme le Maire de par son initiative de consultation de la population lancée à titre personnel, le tout orchestré par une campagne de communication remarquée...

a) Une «Grande Consultation de tous les Aixois»

C'est le 15 septembre 2006 que devant un parterre de 1500 personnes environ, Bruno Genzana, accompagné de Stéphane Salord et Jean-Pierre Bouvet38(*), a frappé un grand coup en lançant au Pasino Les Ateliers de l'Avenir, plateforme de projets qui sera dotée d'une permanence dans le centre d'Aix et destinée à consulter les Aixois sur l'avenir de leur ville39(*).

A l'issue de cette réunion, un groupe de travail a été mis en place afin d'élaborer toutes sortes de propositions, à la fois concrètes et visionnaires, visant une meilleure gestion mais aussi porteuses d'un véritable projet. De décembre 2006 jusqu'au 30 janvier 2007, 60 000 documents40(*) ont été distribués dans les boites aux lettres des habitants, l'objectif étant que «chaque foyer aixois puisse répondre41(*)» les invitant à se prononcer sur les priorités de leur ville ainsi qu'à s'exprimer librement. Un site Internet a également été créé42(*) avec la possibilité de répondre en ligne.

Les propositions de Bruno Genzana et son équipe figurant dans la brochure sont assez nombreuses et recouvrent un très large panel de domaines : la vie quotidienne, le logement, la jeunesse, le social, la culture, le développement économique, la sécurité, le sport et les grands projets. Au sein de chaque domaine, quatre à cinq propositions ont été formulées, aux Aixois de retenir quelles sont les mesures prioritaires dans chaque catégorie.

Bien des propositions étaient d'ailleurs des propositions de bon sens touchant des domaines particulièrement sensibles dans cette ville et figurant au coeur des préoccupations quotidiennes de bon nombre d'habitants. Sont notamment proposés une réorganisation des services de nettoyage, la multiplication de pistes cyclables, une révision du Plan local d'Urbanisme pour qu'Aix ait règlement des sols digne de ce nom, l'achat de terrains pour construire de nouveaux logements l'ayant rendu nécessaire. N'oublions pas non plus l'augmentation des effectifs de la police municipale, un système de vidéosurveillance, la chasse aux tags, la volonté d'accueillir une grande expo sur le modèle de celle de Cézanne au musée Granet tous les deux ans, ainsi qu'une vraie vision d'aménagement pour le nouveau village de La Duranne.

Bruno Genzana avait présenté sa démarche comme indépendante de toute initiative partisane, incluant bon nombre de personnes issues de la société civile dans son projet. Insistant sur la réelle attente des Aixois à laquelle il a voulu répondre, il en veut pour preuve le succès de cette première réunion au Pasino, d'autant plus qu'à l'origine c'était un lieu en plein air qui avait été prévu, et que la pluie a dû l'amener à changer le site de la manifestation la veille, ce qui n'a pas empêché le public d'être présent au rendez-vous. Ce qui lui tenait également à coeur était d'instaurer un dialogue direct avec tous les Aixois, et non se contenter des relais avec la population que constituent les associations, les groupements d'entreprise... D'où l'appellation «Grande Consultation de tous les Aixois», dénomination ambitieuse à la hauteur d'un but ambitieux...

C'est en tout 2453 réponses qui sont parvenues à l'équipe des Ateliers de l'Avenir, par courrier ou par email. Un bilan de la consultation a été tiré et dévoilé au public au cours d'une autre réunion publique, s'étant tenue le 21 mars 2007 au Centre des Congrès, dans une salle aux trois-quarts pleine. Il est certain que la très grande majorité de ceux qui avaient répondu à la consultation et de ceux présents aux réunions étaient plutôt ravis de cette démarche, en témoigne les innombrables marques de reconnaissances exprimées dans les courriers43(*), ainsi que les nombreuses lettres de protestation de gens n'ayant pu se rendre à la réunion du 21 mars, ayant reçu leurs courriers d'invitation trop tard à cause d'une grève de la Poste.

Si les résultats de la consultation ont fait que les Aixois ont clairement privilégié trois thèmes sur lesquels la prochaine municipalité devra oeuvrer en priorité (la vie quotidienne, la sécurité et le logement), la réunion du 21 mars a cependant abordé tous les thèmes initialement présentés dans la consultation, plusieurs tables rondes s'étant succédées avec la présence de trente «Grands Témoins» en tout, personnes emblématiques du paysage citoyen et associatif aixois, pour des discussions à bâtons rompus sur des sujets parfois sensibles, comme la menace de la délocalisation de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, ou la fusion des universités... Ces personnalités aixoises, toutes reconnues dans leur milieu professionnel ou associatif, étaient venues prendre connaissance des résultats de la consultation et donner leur propre vision. Eux-mêmes ont apporté une contribution écrite...

Sur les 2453 réponses, si certains se sont contentés de cocher des cases pour définir les mesures prioritaires pour la ville, d'autres ont adressé à Bruno Genzana de véritables messages de soutien, sans compter ceux qui ont envoyé de véritables romans avec tout un ensemble de considérations allant de la défense de la culture à la protestation contre le manque de propreté : décortiquer toutes ces contributions fut un véritable travail de titan pour l'équipe des Ateliers de l'Avenir. Il faut dire qu'en réalité les Ateliers de l'Avenir ne sont ni une entreprise, ni une association, ni une quelconque entité officielle : il s'agit simplement d'une dénomination informelle n'ayant aucun soutien institutionnel pour que cette démarche soit nettement différenciée des activités de Bruno Genzana en tant qu'adjoint au maire ou conseiller général. A vrai dire, si une synthèse de l'ensemble des réponses a été élaborée pour la réunion du 21 mars, le travail de réponse personnalisée à tout Aixois ayant participé et d'examen approfondi de chaque revendication ou proposition n'est pas encore tout à fait terminé à l'heure d'aujourd'hui...

Un autre élément à prendre en compte est le fait que cette démarche initiée par Bruno Genzana s'inscrit en continuité d'une ligne de conduite basée sur l'écoute et la proximité depuis ses débuts en politique. Bruno Genzana se qualifie volontiers comme pour ainsi dire «le seul élu accessible et disponible aux Aixois», à la différence notamment de Mme le Maire et du 1er adjoint Jean Chorro, réputés difficilement abordables. Il est vrai que Bruno Genzana n'a pas attendu Les Ateliers de l'Avenir pour recevoir les Aixois dans le cadre de permanences assurées notamment dans les quartiers difficiles de la ville, Encagnane ou les quartiers nord, à la fréquence d'une fois par mois au minimum. Après avoir constaté de visu la situation de détresse vécue par de nombreuses personnes bien souvent à la recherche d'un logement décent (cela arrive fréquemment que certains s'effondrent en larmes devant Bruno Genzana), et entendu ces gens véritablement se plaindre de ne pas trouver d'interlocuteur disponible auprès de l'entourage de Mme le Maire ou de son premier adjoint, il ressort indéniablement que l'effort d'écoute de Bruno Genzana lui a assuré une réputation d'homme dévoué et proche des gens assez substantielle dans un certain nombre de quartiers...

b) Une stratégie de communication efficace

Il est impossible de nier que Les Ateliers de l'Avenir ont été en même temps une opération de communication rondement menée. Une campagne d'affichage en panneaux 4x3 lui a permis de s'afficher partout dans la ville, prenant la pose d'un penseur, à la Rodin, avec le slogan suivant : «Décidez de l'avenir d'Aix, Bruno Genzana, une équipe, un projet44(*).» Le moins que l'on puisse dire c'est que nous sommes ici très proches d'un slogan de campagne...

La question de la fidélité de Bruno Genzana et son équipe vis-à-vis de la municipalité à laquelle ils appartiennent ne peut manquer de se poser : comme l'écrit un article de La Provence en date du 4 décembre 2006, «si l'adjoint au Tourisme et aux Affaires Internationales de Maryse Joissains envisageait de conduire une liste dissidente pour la prochaine municipale, il ne s'y prendrait pas autrement44(*).» Il est vrai que Les Ateliers de l'Avenir ne font que très peu référence à la majorité municipale actuelle, et il est très clair qu'il s'agit d'une opération de consultation et de communication politique et non institutionnelle. Cependant lorsqu'on pose la question à l'intéressé, son discours est longtemps resté nuancé, laissant toutes les portes ouvertes : «La majorité municipale à laquelle j'appartiens a mené, en six ans, sous la conduite de Mme le Maire, de nombreuses actions nécessaires et positives. Vous êtes les témoins de ce dynamisme. Pour aller plus loin, je crois que nous avons besoin d'une perspective, d'un cap, de repères clairs, pour bien décider de la direction dans laquelle doit s'engager notre ville pour construire un vrai avenir44(*).» Le 15 septembre 2006 au Pasino, Bruno Genzana n'avait pas manqué de rendre hommage à Mme le Maire, en lui reconnaissant «le mérite exceptionnel de nous avoir fait gagner en 2001», et en proclamant son «respect sincère.»

Le fait est que Bruno Genzana ne claque pas la porte de la majorité municipale comme l'avait fait François-Xavier de Peretti en 2002, et qu'il assume le fait qu'il continue à exercer ses fonctions d'adjoint. Cependant son positionnement pourrait se résumer par la phrase suivante, toujours extraite de l'éditorial de la brochure de consultation : «ce dialogue ne s'inscrit pas en opposition avec l'action municipale. Bien au contraire, il est destiné à l'amplifier et la prolonger.» Or il apparaît clairement que Bruno Genzana se pose comme celui qui serait porteur d'un nouvel élan, l'amplification de l'action municipale devant plus venir de lui que de Mme le Maire. C'est d'ailleurs ce qu'il a implicitement exprimé au Pasino le 15 septembre 2006 en évoquant «ce pays d'Aix qui n'a toujours pas trouvé d'interprète à la hauteur des richesses qu'il déploie» sans se priver de préciser l'état d'esprit qui l'animait : «Je ressens au plus profond de moi qu'il est de ma responsabilité de prendre toute ma place à l'élaboration d'un grand projet.»

Pendant longtemps Bruno Genzana a toutefois laissé la porte ouverte à l'entourage de Mme le Maire : Alain et Sophie Joissains étaient d'ailleurs présents à la réunion du 15 septembre 2006 et notre adjoint a ainsi pu y déclarer qu'il n'était «pas étonné de voir [Mme le Maire] adhérer à la démarche.» Plus tard, alors que l'adhésion de Mme le Maire à la démarche n'était absolument plus d'actualité, il maintenait cependant que «le pacte de confiance qui nous unit depuis 2001 n'est pas rompu» et qu'il «restait confiant sur notre capacité à trouver ensemble un terrain d'entente pour conserver cette ville à droite45(*)

Bruno Genzana l'a d'ailleurs toujours répété au moment du lancement de sa consultation : «si le temps de la campagne électorale des municipales n'est pas arrivé, par contre, le temps de construire ensemble un projet pour Aix et le Pays d'Aix est venu.» Toutes ses déclarations et prises de position suivent un leitmotiv : parler du projet de fond, répondre aux attentes des Aixois et ne pas sombrer dans les querelles de personnes. Bruno Genzana a d'ailleurs clairement soutenu Maryse Joissains lors des législatives ayant suivi l'élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence de la République, ayant déclaré à La Provence : «Maryse Joissains et moi-même souhaitons la victoire de Nicolas Sarkozy. Si c'est le cas, il nous faudra travailler à lui donner une majorité, donc faire en sorte que Maryse Joissains soit réélue députée et j'y mettrai, là aussi, toute mon énergie. Ce n'est qu'après ces deux étapes qu'il sera temps de songer à la campagne municipale.» Effectivement lors des législatives, le soutien de Bruno Genzana envers Maryse Joissains fut sans ambiguïtés, à croire que notre adjoint aurait lancé les Ateliers de l'Avenir absolument sans aucune intention un peu plus personnelle...

Cependant justement la meilleure stratégie, non pas pour pouvoir être candidat aux prochaines municipales comme l'est à chaque fois François-Xavier de Peretti, mais pour pouvoir être un candidat potentiellement vainqueur, consiste exactement à tenir cette posture que Bruno Genzana s'était fixé : d'abord le projet, d'abord la concertation et des réponses concrètes aux problèmes formulés par les gens. L'intérêt d'une telle démarche est en effet que la candidature aux municipales n'est pas perçue avant tout comme le fruit d'une ambition personnelle, mais comme la volonté d'apporter sa contribution au développement et à l'avenir d'Aix-en-Provence et de ses habitants, parce qu'elle répond à une certaine nécessité.

Comme nous l'avons déjà évoqué, et comme la presse locale l'a elle-même ressentie, la stratégie de Bruno Genzana est similaire à celle, gagnante, de Nicolas Sarkozy aux dernières présidentielles, à un détail près : Jacques Chirac ne se représentait pas, et même soutenait Nicolas Sarkozy, tandis que Maryse Joissains ne manquera pas de se représenter aux prochaines municipales, investie par l'UMP. C'est pourquoi Bruno Genzana, par cette consultation et sa réputation d'homme de proximité bien plus accessible que Mme le Maire, ne manquera pas de se réclamer du soutien d'une grande partie de la société civile. Candidat non soutenu par un parti, mais fort de sa crédibilité et de son expérience politiques, avec un capital nom accru grâce au succès de sa consultation, soutenu tout de même par quelques adjoints, d'ailleurs parmi les plus jeunes de la majorité municipale actuelle, Bruno Genzana pourra finalement reprendre à son compte certains des éléments de la campagne qu'avait menée elle-même Maryse Joissains en 2001 : ouverture sur la société civile, renouvellement de génération46(*), homme n'ayant pas de tabous politiques, soutien de certaines forces vives... Bruno Genzana et son équipe ont actuellement tous les éléments en main pour faire de Maryse Joissains une émule de Jacques Chirac, tandis que lui incarnerait un Sarkozy local. Une certaine ressemblance physique entre les deux hommes est d'ailleurs à relever47(*). Pour la transformation de l'essai, rendez-vous en mars 2008 !!!

La lecture d'un message de soutien très amical de Jean-Claude Gaudin lors de la réunion du 15 septembre 200648(*) pouvait d'ailleurs être interprétée comme un soutien discret à cette initiative personnelle, d'ailleurs financée par des dons auprès de l'UMP : Jean-Claude Gaudin ayant toujours eu de bien meilleurs rapports personnels avec Bruno Genzana qu'avec Maryse Joissains, cette caution morale ainsi apportée peut tout à fait permettre à Bruno Genzana aujourd'hui de refuser l'étiquette de «dissident» que ses adversaires ne manqueront pas de lui accoler, et de se réclamer d'une certaine bienveillance à défaut d'un soutien officiel de nombreuses personnalités politiques qui comptent dans la région.

La démarche de Bruno Genzana a donc su ménager sincérité et stratégie : la meilleure façon finalement de remporter une élection reste avant tout de travailler pour les gens et non d'afficher ses ambitions sans qu'il n'y ait rien derrière. C'est pourquoi d'ailleurs la candidature de Bruno Genzana ne sera pas déclarée à l'emporte-pièce, mais lorsque que le projet municipal de son équipe, fortement inspiré des enseignements tirés de la consultation, aura été finement élaboré.

Sa candidature apparaîtra ainsi comme un prolongement naturel de son initiative de consulter la population pour une raison simple : Maryse Joissains s'en étant désintéressée, la conversion des idées développées lors de la consultation en projets concrets ne pourra s'effectuer que si Bruno Genzana est élu maire d'Aix. Les Aixois ayant participé aux Ateliers de l'Avenir et attentifs à l'issue concrète de leur contribution comprendront bien vite que s'ils veulent que cette acte participatif aboutisse, ils devront voter pour Bruno Genzana, sans que ce dernier l'ait tellement réclamé explicitement. D'ailleurs il arrive très souvent que des personnes qu'il a pu aider dans leur recherche de logement ou autre viennent lui dire qu'elles voteront pour lui pour le remercier : ce à quoi Bruno Genzana s'empresse systématiquement de préciser qu'il ne recherchait pas le clientélisme et que sa démarche s'était faite sans arrières pensées électoralistes, ce qui est encore la meilleure façon d'achever de convaincre ces mêmes personnes de voter pour lui...

Bien évidemment cette part de stratégie n'a pas échappé à la classe politique aixoise ainsi qu'à plusieurs habitants. Des Ateliers de l'Avenir - Aix 2008, certains ont plus retenu le Aix 2008 (il est vrai significatif) que Les Ateliers de l'Avenir : les répercussions de cette démarche de consultation sont donc de plusieurs natures, selon que ce soit auprès des politiques ou des citoyens aixois, de la majorité ou de l'opposition, des personnes défavorisées ou des catégories plus aisées...

3) Répercussions de la consultation

Cette démarche participative de Bruno Genzana, au vu des moyens qui y ont été mis et de la communication qui en a découlé, n'est bien évidemment pas passée inaperçue auprès de ses collègues élus, majorité et opposition comprises. Les Ateliers de l'Avenir ont même suscité un certain nombre de polémiques et controverses de tout ordre, souvent plus d'ailleurs au détriment final de ceux qui les avaient provoquées que de celui qui était visé.

La répercussion majeure sur le plan politique fut bien entendu le changement définitif des relations qui unissaient Maryse Joissains à Bruno Genzana et le reste de son équipe. N'allant pas d'emblée de soi, cette dégradation des rapports s'est avérée de plus en plus évidente au fil des jours.

Auprès des habitants, les répercussions furent naturellement nettement plus positives, les occasions d'être consultés sur l'avenir de leur ville ayant été plutôt rares ces derniers temps. Cependant plusieurs contributeurs ne manquèrent pas d'exprimer certaines interrogations et d'émettre quelques réserves au sujet de cette initiative. Bien consciente que ces belles paroles devaient être traduites en acte, la majorité des Aixois ayant participé a finalement eu le même mot d'ordre : nous sommes heureux d'avoir été consultés mais désormais nous attendons la suite !!!

a) Des répercussions politiques houleuses

Si lors du lancement des Ateliers de l'Avenir le 15 septembre 2006, Mme le Maire s'était tout de même fait représenter par ses deux directeurs de cabinet, la rupture a cependant bien vite été consommée entre Maryse Joissains et Bruno Genzana, malgré les efforts de celui-ci pour ne pas polémiquer en public, comme nous l'avons vu précédemment. Maryse Joissains a ainsi déclaré dans La Provence du 11 décembre 2006 : «je ne crois pas que le débat soit enrichi par la bobine de Bruno Genzana. Pour ce qui me concerne, je n'ai pas besoin de sondage et de questionnaire pour savoir ce que pensent les Aixois. Je les vois et je leur parle tous les jours depuis six ans, je connais donc très bien leurs problèmes.»

Il est certain que Bruno Genzana et Maryse Joissains n'ont pas la même vision des choses : «Au cours de ce mandat, j'ai eu le sentiment qu'on répondait à certaines attentes de la population. Mais j'ai aussi acquis la conviction qu'on n'avait pas une vision assez claire, assez définie pour notre ville. J'ai regretté qu'on ne fasse pas appel à des outils comme les enquêtes pour apprécier les attentes des Aixois. J'ai donc eu la volonté de prendre toute ma part à l'écriture de ce projet en mettant en place Les Ateliers de l'Avenir dont la vocation était de concrétiser et de transformer en projet les attentes des habitants de la ville d'Aix. Cela ne pouvait passer que par un dialogue direct avec les Aixois. Si Mme le Maire avait été animée de cet esprit de consultation, je ne l'aurais pas fait49(*).» Encore aujourd'hui Bruno Genzana insiste sur la démarche constructive de son projet, refusant de faire des Ateliers de l'Avenir un instrument de son ambition électorale a priori.

En revanche Maryse Joissains, elle, n'hésite pas à franchir le pas dans La Provence, au sujet du financement par l'UMP de la consultation : « Je suppose qu'il doit s'agir d'un coup de pouce de Jean-Claude Gaudin à quelqu'un qui lui a toujours été fidèle. Dans quel but ? Je l'ignore. Peut-être veut-on me déstabiliser au profit de quelqu'un qui, s'il était à ma place, serait plus proche et plus docile vis-à-vis de Marseille dans la gestion municipale.» Initiative désintéressée devenue intéressée par la force des choses d'un côté, tentative de manipulation depuis Marseille de l'autre... Cependant d'après Bruno Genzana, «le maire d'Aix a beaucoup hésité dans sa stratégie de réaction, en essayant de paraître associée à cette initiative. Ensuite elle a fait le choix d'ignorer la démarche, puis de la minimiser et enfin de la mépriser, puisqu'elle a affirmé ne pas avoir besoin de consulter les Aixois dans la mesure où elle sait très bien ce qu'ils attendent.» A chacun sa manière de savoir ce que désirent les Aixois...

La question du financement des Ateliers de l'Avenir par l'UMP là encore n'a pas manqué de faire réagir la droite aixoise, Maryse Joissains en tête qui ne cachait pas que «cela [l]'interpelle, dans la mesure où l'UMP ne m'a jamais donné un sou pour mes campagnes, y compris pour la législative de 2002, que j'ai financée par un emprunt personnel alors que j'étais investie par l'UMP.» Bruno Genzana précise cependant que celui-ci est issu de «dons de plusieurs de mes sympathisants auprès de l'UMP», précision qui a toute son importance dans la mesure où dans cette hypothèse les fonds propres de l'UMP n'auraient pas été utilisés pour soutenir ce que tout un chacun serait porté à juger comme un acte de dissidence.

Il reste cependant clair que cette initiative a bénéficié de la grande bienveillance de Jean-Claude Gaudin qui par son message rapporté plus haut y a apporté un soutien public. Mais ce soutien pour Bruno Genzana constituait bien la preuve qu'il ne s'agissait pas d'une démarche personnelle à but électoraliste, sans quoi l'UMP n'aurait pas accepté de cautionner, mais d'une opération utile pour la majorité en place, qui créerait un vivier d'idées très riches qui pourrait très bien servir lors des prochaines élections, à condition que Maryse Joissains s'y intéressât.

Bien entendu si l'initiative de Bruno Genzana a créé quelques remous au sein de la majorité, l'opposition n'a pas manqué non plus de se manifester à cette occasion. La question en fut même très largement débattue au Conseil Municipal en date du 9 juillet, particulièrement agité, notamment du fait de certaines interventions très polémiques du Radical de Gauche Lucien-Alexandre Castronovo, qui a avant tout reproché à Bruno Genzana de reproduire des clichés dans sa brochure de consultation qui seraient d'après lui des photographies présentes sur le site de l'Office de Tourisme aixois, sans aucune déontologie. Bruno Genzana ayant rapidement répliqué qu'en réalité les photos incriminées avaient été prises par un ami à lui et qu'il les avait gracieusement mises à disposition du site de l'Office, la critique fut quelque peu désamorcée, bien que Castronovo maintînt la globalité de ses critiques dans son blog internet50(*).

Surnommés «Les trois rigolos» (d'après le blog de Cyril Di Meo51(*)) par Maryse Joissains, Bruno Genzana, accompagné dans sa démarche de Jean-Pierre Bouvet et Stéphane Salord, n'ont pour autant pas manqué leur rendez-vous avec la population. Certains râlent, critiquent mais participent néanmoins à la démarche. Toutes les réactions diverses et variées montrent toutefois une grande attente, mêlée d'espoir et de scepticisme...

b) La réception par la population

Les messages de félicitations et de soutien pour une telle initiative n'ont pas manqué. A vrai dire Les Ateliers de l'Avenir ont constitué une bonne opportunité pour nombre d'Aixois soit de s'exprimer en détail soit sur des problèmes simples, concrets, vécus au quotidien, soit de développer longuement leur vision d'Aix-en-Provence et les grandes orientations générales pour lesquelles la ville devra opter à l'avenir.

Sur les 2453 réponses reçues, la majorité ont été des envois par mails. Le nombre de courriers doit tourner autour des 800 et c'est parmi ces 800 réponses que se trouvent les doléances exprimées le plus en détail. Les collaborateurs de Bruno Genzana chargés du suivi du courrier ont constaté qu'un bon tiers se contentait d'adresser les plus vives félicitations à l'auteur de la consultation ainsi qu'à son équipe, sans ajouter de demandes ou revendications particulières. De nombreuses autres personnes ont également félicité Bruno Genzana avant de porter son attention sur tel ou tel point : le retour est donc très nettement positif dans la mesure où cette consultation a été vue d'un oeil très largement favorable auprès de la population.

La lecture des adresses des personnes avec lesquelles les collaborateurs de Bruno Genzana ont eu affaire indique que ce sont avant tout les quartiers périphériques qui ont répondu, avec beaucoup de demandes dans certains endroits plutôt défavorisés. La plupart des gens qui s'expriment n'hésite d'ailleurs pas à évoquer leur parcours professionnel, leur date d'implantation sur Aix, voire leur niveau de vie, ce qui permet de mieux les identifier, au vu également du quartier où ils habitent. Ce sont d'ailleurs globalement les personnes peu aisées qui félicitent le plus Bruno Genzana dans sa démarche, tandis que c'est dans les quartiers les plus huppés qu'on émet le plus de doutes sur les retours qu'apportera cette consultation. C'est ainsi qu'un habitant du quartier Mazarin se pose ouvertement la question : «que ferez-vous de nos réponses ? allez-vous les mettre à la poubelle ?», sans oublier de protester contre cette campagne de communication qu'il imaginait orchestrée par la mairie et donc aux frais du contribuable. Certaines craintes ont également été exprimées, comme celle d'une droite divisée lors des prochaines municipales, mais au final ces réserves ne font réellement pas le poids comparé aux nombres de courriers de félicitations.

On peut remarquer également que les points abordés par les Aixois consultés et priorités dégagées dépendent pas mal du quartier dans lequel ils vivent, de leur niveau social, du fait qu'ils sont implantés depuis longtemps ou fraîchement arrivés. C'est ainsi que les problèmes de logement sont très largement soulevés avant tout par les habitants de logements sociaux, que ce soit pour l'évoquer de façon générale, ou pour décrire leur situation particulière : une dizaine de courriers émanant d'habitants du lotissement de la Croix Verte, situé au Jas de Bouffan, a ainsi fait part à Bruno Genzana de l'extrême état de dégradation de l'immeuble, avec tous les problèmes que cela pose en termes de sécurité et de salubrité. Une copie de la pétition faite à la Logirem52(*) pour demander des mesures d'urgence a été fournie avec les lettres de réponse, qui sont loin d'être un cas isolé...

En revanche la question de la culture a été largement abordée soit par des étudiants, soit des retraités habitant des quartiers aisés : la vision de la culture n'est pas la même chez les uns et les autres. Alors que les étudiants réclament généralement une offre culturelle plus diversifiée et plus ouverte sur des formes d'enrichissement moins traditionnelles, les retraités peuvent se mettre à faire un certain plaidoyer pour une culture plus traditionnelle. Plusieurs d'entre eux, ainsi que d'aisés commençants du quartier Mazarin, ont ainsi vivement critiqué l'enthousiasme de la Ville d'Aix pour le Ballet Preljocaj, célèbre compagnie de danse moderne, décrite dans la brochure de consultation de Bruno Genzana comme une «grande manifestation de dimension internationale de notre ville», avec le Festival d'Art Lyrique. La politique théâtrale de M. Bluzet, directeur du Théâtre du Jeu de Paume, n'a également pas été épargnée par bons nombres d'Aixois de longue date et très enclins à dénoncer une certaine «décadence» culturelle dans laquelle risquerait de tomber leur ville.

Une preuve de la réelle attente à laquelle Les Ateliers de l'Avenir ont pu constituer une sorte de réponse, c'est le fait que souvent les Aixois ayant répondu estiment ne plus se faire beaucoup d'illusions sur l'attention accordée aux gens par les politiques53(*), mais ils jouent tout de même le jeu de la consultation parce qu'ils espèrent encore. D'autres se sont également d'avoir adressé des courriers répétés à Mme le Maire, restés sans réponse, et s'adressent ainsi à M. Genzana en dernier recours. Il faut d'ailleurs remarquer qu'alors que la très grande majorité des Aixois consultés n'ont pas encore reçu de réponse de la part de Bruno Genzana, le travail de suivi des Ateliers de l'Avenir n'étant pas encore complètement terminé, plusieurs ont été ceux qui ayant vu Bruno Genzana à diverses occasions n'ont pas manqué de lui demander une réponse rapide, si bien que celui-ci s'est exécuté en envoyant quelques réponses de manière anticipée.

Les Ateliers de l'Avenir de Bruno Genzana constituent donc un exemple révélateur du besoin d'écoute et de participation que peuvent éprouver les habitants d'une ville, et que ce besoin peut constituer également pour les politiques une opportunité d'acquérir une certaine notoriété ainsi que de la crédibilité électorale. Cependant la question reste de savoir si sur le fond ce type de consultation peut être réellement efficace pour résoudre les problèmes d'une ville telle qu'Aix-en-Provence et, comme l'a si souvent dit Bruno Genzana lui-même, «élaborer une vision d'avenir, une ambition à la hauteur de notre ville» : Les Ateliers de l'Avenir ont indéniablement constitué une vraie richesse et offrent certaines perspectives à ses initiateurs, mais tout projet de ce genre contient immanquablement aussi des limites...

II Richesses et ambiguïtés

d'une telle initiative

Dans sa brochure bilan de la consultation, Bruno Genzana ne tarissait pas d'éloges sur la qualité des réponses envoyées : «le résultat obtenu dépasse nos espérances à la fois par le nombre de questionnaires reçus et surtout par la qualité des réponses formulées.» Cependant la question mérite d'être discutée : il serait difficile d'affirmer que toutes les réponses ont réellement été «à la hauteur des ambitions pour notre ville». Il s'agit plus souvent de problèmes concrets, pratiques, voire de demandes on ne peut plus personnelles, que de contributions donnant des perspectives de projet d'avenir, même s'il est aussi indéniable qu'il y en a eues...

La question essentielle étant de savoir quels retours concrets cette consultation pourra avoir, que ce soit dans la vie des Aixois de tous les jours ou en ce qui concerne des projets pour la ville à plus long terme, avant d'y répondre, il est nécessaire de tenir compte de trois paramètres54(*) : comme nous l'avons déjà évoqué, la qualité des contributions citoyennes, mais également l'attention réelle accordée par l'initiateur de la consultation à ces réponses. Il faut d'ailleurs noter qu'au vu de la campagne d'affichage et des moyens employés pour réaliser cette consultation, l'envergure de ce projet a naturellement rendu ceux qui y ont répondu assez exigeants, ne désirant pas que la montagne n'accouche que d'une souris...

Le troisième critère reste celui du respect de l'intérêt général : en effet quand bien même le politique serait sincèrement désireux d'aider ses concitoyens et d'accéder aux demandes qui lui sont faites, doit-il pour autant le faire systématiquement ? Il ne faut pas oublier non plus que, sans nier le succès des Ateliers de l'Avenir en termes de retours, les Aixois consultés ne peuvent pour autant être confondus avec les Aixois tout court, qui restent bien plus nombreux. Une initiative comme celle-ci peut donc constituer un formidable appui pour mener à bien plusieurs projets ayant suscité l'adhésion d'une grande partie des citoyens, pour résoudre certains problèmes et situations particulières d'un tel ou d'un tel, mais ne peut non plus constituer une Bible à laquelle l'homme politique devrait se conformer sans discuter. Si les moindres desiderata de tous les Aixois s'étant exprimés devaient être exaucés, autant dire que les finances de la ville seraient asséchées... Mais cela les citoyens le savent, et ils attendent de voir si le politique fera mine de tout exaucer sans vraiment le faire, ou s'ils auront en face d'eux un dirigeant responsable qui leur parlera comme à des citoyens responsables...

1) Des contributions citoyennes

inégalement exploitables

Difficile de résumer le fourmillement d'idées, de propositions, de réclamations, de protestations, de compliments, de critiques, de propos très pertinents, et d'autres sans intérêt, que Bruno Genzana et son équipe ont eu à traiter. Cette diversité est cependant synonyme d'une certaine réussite dans la mesure où c'est la population aixoise dans toutes ses composantes qui s'est exprimée, et non sa seule élite...

A force de lire sans cesse les mêmes revendications qui reviennent (sécurité, propreté, transports), on peut se demander si les collaborateurs de Bruno Genzana chargés de lire chaque lettre attentivement n'ont pas trouvé la tâche quelque peu rébarbative. Le projet d'ambition à la hauteur de notre ville semble bien loin lorsque l'ont lit certaines contributions, à croire que toute une partie de la population aixoise ne possède aucune imagination et soit obsédée par des problématiques bien terre-à-terre.

Cependant d'un autre côté les réponses intéressantes n'ont pas non plus manqué, et il faut bien avouer que l'ensemble des contributions est à l'image des Aixois : l'extrême exigence qu'ils éprouvent à l'égard de leur ville, dont ils tiennent tous à l'image et à la réputation, s'y est nettement manifestée. De toute façon toutes les problématiques faisant référence à la proximité, la vie quotidienne, doivent désormais attirer la grande attention des politiques, qui ne sont plus dans le même rapport avec les citoyens qu'il y a une trentaine d'années : comme l'a écrit Bruno Genzana lui-même, «les méthodes employées dans les années 70 à 80 ne sont plus adaptées pour résoudre efficacement les enjeux les plus importants55(*)

a) Une ambition pas toujours à la hauteur

Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'une très large proportion d'Aixois consulté, avant de songer à l'avenir, a préféré d'abord évoquer le présent. Ce présent pour Aix quel est-il ? La ville est jugée sale, les transports en commun peu efficaces, les parkings trop chers, les axes de circulation pas assez adaptés, les équipements de toutes sortes pas assez nombreux, les manifestations culturelles trop chères : bref nombreux sont ceux qui se sont contentés d'exprimer des demandes visant à améliorer leur confort personnel.

Difficile de décrire à quel point le manque de propreté a dû être une obsession, exprimée dans environ la moitié des courriers. Obsession dans le sens où l'on ne se contente pas de réclamer plus de propreté, mais l'on énumère toute une série de mesures estimées être «de bon sens», en indiquant qu'il s'agit d'une priorité absolue. La propreté des parcs naturels du centre ville a fait souvent l'objet d'inventaires précis : un courrier a notamment recensé tout ce qui pouvait laisser à désirer au Parc Rambot, réclamant un gardien, la fermeture du portail, la fermeture du parc la nuit, le respect de l'interdiction de marcher sur les pelouses, l'interdiction des chiens, la suppression des tags, etc... A croire que la personne s'étant exprimée ainsi, n'ayant que le Parc Rambot en tête, y pvivait jour et nuit. Des commentaires similaires ont également été rédigés en ce qui concerne le Parc Jourdan...

D'autres contributions semblaient mieux parties pour relever le défi «d'une ambition à la hauteur de notre ville», notamment une où son auteur se revendiquant aixois de longue date, attaché à l'art de vivre cultivé dans cette ville, regrettait un certain nombre de «manquements inadmissibles». Sauf que ces manquements sont pour lui un nombre insuffisant de bancs sur le Cours Mirabeau, la nécessité d'une seconde piscine municipale, les trottoirs de certaines rues trop étroits, et l'absence de toilettes publiques et gratuites. Sans pour autant nier tout intérêt à ce genre de demandes, inutile de préciser que le défi n'a pas été relevé...

Un autre problème est que beaucoup de contributeurs ont pris Bruno Genzana pour un homme à tout faire, à moins qu'il fussent déjà totalement persuadés qu'ils s'adressaient au futur maire d'Aix, et que donc celui-ci pourrait tout pour eux. En effet certaines demandes ne relèvent pas du tout d'un projet global d'avenir pour Aix, mais plutôt de l'octroi d'une faveur personnelle. Il y a eu ainsi quelques cas de personnes se contentant pour tout commentaire de préciser dans quel quartier elles habitaient et qu'il fallait à cet endroit là modifier telle ligne de bus ou en créer une, pour que le bus puisse passer à proximité de chez eux. D'autres demandes sont allées beaucoup plus loin, avec le cas singulier d'une vieille dame ayant fourni à Bruno Genzana le dossier intégral d'une affaire judiciaire la concernant, étant en conflit ouvert avec le syndic de son immeuble : bien qu'élu aixois, Bruno Genzana n'est pourtant pas avocat...

Enfin d'autres contributions, elles, n'ont pas été avares de projets, mais les exigences sont telles qu'on pourrait demander si Bruno Genzana n'est pas confondu avec le Père Noël. La création d'une rocade nord-est, d'un grand stade, d'une nouvelle piscine, d'une grande bibliothèque dans chaque quartier et village, du tramway, d'un RER Aix-Marseille sont tous des projets intéressants, mais la réclamation de la réalisation de chacun d'entre eux dans les meilleurs délais serait totalement illusoire. Cela n'empêche pas certains habitants de réclamer l'ensemble de ces équipements, mais pour leur quartier : ainsi un habitant de Purycard se plaint que son village soit d'après lui délaissé par les pouvoirs municipaux, et demande ainsi toute une série d'équipements, ignorant sans doute soit que pour la plupart d'entre eux leur réalisation avait déjà été décidée, soit que pour les autres ses exigences n'étaient pas particulièrement pertinentes. Il est en effet curieux de demander un complexe sportif d'envergure à Purycard, alors que le Country Club est juste à côté...

Il y a même des cas où l'ignorance peut être plus que frappante : une dizaine de courriers a ainsi notablement regretté l'impossibilité d'accès aux piétons à l'intérieur du petit parc aménagé dans le nouveau quartier de Sextius-Mirabeau, faisant face à la Rotonde, parc devant lequel trône la statue de Paul Cézanne. Pourtant la SEMEPA, maître d'ouvrage du projet, n'a cessé de préciser que les piétons pourraient circuler librement dans le parc une fois que les plantes et végétaux auraient pris, et cela est même indiqué par un panneau parfaitement visible à l'entrée. Toujours en ce qui concerne Sextius-Mirabeau, nombreux sont ceux qui se plaignent de la chaleur écrasante de ce quartier, du fait du manque d'ombre, à croire qu'ils n'ont pas vu tous les arbres et arbustes divers qui y ont été plantés mais qui naturellement mettront des années avant de produire une ombre suffisante...

Cependant d'autres contributions ont été de qualité, et si cette consultation se voulait certes porteuse d'une «vision d'avenir», elle aspirait aussi à résoudre les problèmes quotidiens, concrets des Aixois, qui ont d'ailleurs placé la rubrique Vivre Aix au quotidien en tête des priorités... La vision d'avenir est présente mais a pour corollaire que l'on songe également à gérer une ville au présent : Aristote dans Les politiques préférait disserter sur les cités grecques déjà existantes, au lieu de faire comme son maître Platon dans La République et de décrire une «cité idéale», qui n'est qu'une utopie, une vue de l'esprit. Bruno Genzana partageait également cette volonté d'ancrage sur le réel, principe dont il a tenté de faire avec cette consultation un atout politique : les réponses reçues l'ont ainsi largement encouragé...

b) Un avenir teinté de présent

D'autres réponses ont été, elles, de réelle qualité. Plusieurs cas de lettres proposant de réels projets, notamment sur le plan culturel, sont à relever. Une étudiante propose la tenue d'ateliers d'écriture, un habitant du Tholonet des activités d'information et de sensibilisation sur les ressources en eau, un autre s'exprime au sujet de l'information des enfants en astronomie... Plus globalement, les collaborateurs de Bruno Genzana ont relevé d'intéressantes contributions en matière de culture, souvent écrites par des étudiants ou des enseignants, proposant des suggestions pour favoriser la sensibilisation des enfants et des jeunes Aixois à la culture, au civisme et les intégrer pleinement à l'avenir de leur ville... Les demandes concernant les enfants et les jeunes ont d'ailleurs été en nombre relativement élevé, ce qui est tout de même un signe de préoccupation pour l'avenir d'Aix.

Il y a également certaines demandes récurrentes (une bonne cinquantaine) au sujet d'un outil indispensable à toute ville pour développer une «vision d'avenir» : un Plan Local d'Urbanisme (PLU) digne de ce nom, dont la ville n'est toujours pas dotée à ce jour. Pourtant, au vu de la crise du logement qui couve à Aix-en-Provence depuis des années, avec plus de 3000 demandes, Bruno Genzana est aujourd'hui convaincu que le PLU serait le seul outil qui permettrait d'engager véritablement une réflexion débouchant sur un règlement de l'urbanisme répondant aux défis auxquels la Ville d'Aix est aujourd'hui confrontée. L'avenir est donc présent dans les esprits, nombreux sont ceux qui souhaitent une vision, une direction claires, notamment dans ce domaine ultra sensible qu'est l'urbanisme et que seul un PLU pourra donner.

Il ne faut pas oublier non plus les contributions des trente Grands Témoins56(*) qui, chacun dans leur domaine, ont participé pleinement à l'élévation du débat, notamment lors de la réunion du 21 mars. Mme le Bâtonnier s'est exprimée sur le maintien de la Cour d'Appel à Aix, aujourd'hui menacé, un ancien président de l'Université Paul Cézanne sur la fusion des trois Universités d'Aix-Marseille, le président de la fédération des CIQ d'Aix sur la concertation entre élus et associations, des perspectives ont donc été tracées : ayant également produit chacun une contribution écrite, ces Grands Témoins ont joué ainsi le rôle d'une valeur ajoutée dans l'élaboration de ce fameux projet d'avenir, sans pour autant occulter la volonté de «dialogue direct» avec la population. Cependant opposer frontalement basses préoccupations et perspectives de haute volée serait par trop caricaturer les choses. En effet la diversité des réponses reçues a contribué à ce que la consultation produise des résultats à l'image de la ville d'Aix-en-Provence. Or, loin d'être cette ville idyllique tant vantée auprès des touristes, Aix connaît un certain nombre de problèmes qui ne concernent pas seulement son avenir, mais aussi son présent immédiat.

La dégradation de nombreux logements sociaux a, comme nous l'avions signalé avec l'exemple de la Croix Verte, été évoquée à plusieurs reprises dans les réponses reçues. Il s'agit dans ces cas-là de situations de détresse qui effectivement ne favorisent guère la réflexion à long terme : l'équipe des Ateliers de l'Avenir, après avoir entendu les récits de plusieurs situations insoutenables de la part d'habitants reçus par Bruno Genzana dans le cadre de ses permanences à Encagnane ou dans les quartiers nord, était d'ailleurs profondément convaincue que la détresse de ceux qui se sont exprimés au cours de la consultation sur ce sujet devait être équivalente à celle de ceux reçus par Bruno Genzana.

Quant à la question de la propreté, elle aussi figure parmi les problèmes immédiats, étant donné la réputation touristique et culturelle d'Aix-en-Provence. En tant qu'adjoint au tourisme, Bruno Genzana n'a jamais caché que les commentaires laissés par les gens sur le Livre d'Or de l'Office du Tourisme critiquent parfois sévèrement la ville, jugée manquant de propreté, avec un esprit civique à géométrie variable. Les Ateliers de l'Avenir n'ont donc pas échappé à une limite typique de ce genre d'exercice : toutes les contributions des Aixois n'ont pas été de qualité, ce qui paraissait inévitable. Pour autant Bruno Genzana et son équipe en étaient parfaitement conscients, et une connaissance accrue des demandes et états d'âme des Aixois ne manquait pas non plus d'intérêt : dans cette optique l'objectif a été atteint, tout courrier méritait que l'on y portât attention dans la mesure où ils incarnaient le vécu d'un très grand nombre d'habitants.

2) Le suivi de la consultation

Ce n'est pas tout de fournir des questionnaires et de demander aux Aixois de cocher des cases et de s'exprimer : ceux qui ont joué le jeu l'ont évidemment fait en espérant avoir un retour, que leur contribution ait été utile. Et même d'un point de vue stratégique, le gain de notoriété serait bien mince si l'homme politique ne s'impliquait pas personnellement dans cette démarche de proximité : nombre de citoyens ont fait l'effort de répondre et de contribuer à l'élaboration d'un projet, au politique de faire l'effort de prendre véritablement toutes ces demandes en compte.

Comme nous l'avons déjà évoqué, Les Ateliers de l'Avenir ont répondu à une réelle demande de la part des citoyens, au point qu'une partie de ces derniers ont réclamé une réponse rapide à leurs demandes. Plus que le succès de la consultation en lui-même, c'est lors de son suivi que le gain de popularité se joue : les Aixois consultés étaient très clairs dans leurs courriers, «on veut des résultats !!» Toute opération de proximité pilotée par un élu est ainsi à double tranchant : si celle-ci ne débouche sur rien et que la population estime avoir été instrumentalisée, c'est la fin des ambitions pour notre élu. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'au vu des moyens utilisés, de la minutie avec laquelle les brochures de consultations ont été réalisées et de la communication déployée à grande échelle, c'est qu'avec Les Ateliers de l'Avenir, Bruno Genzana avait et a toujours la pression...

Les Ateliers de l'Avenir ont en fait donné lieu à deux types de suivi. Il y a eu d'abord un suivi global, propre à toute consultation, dont le but était de dégager les mesures prioritaires souhaitées par les Aixois, afin de pouvoir élaborer ce fameux «projet d'avenir» par la suite. Cependant Bruno Genzana et son équipe n'ont pas souhaité s'arrêter là : après cette première étape ayant abouti à la réunion publique du 21 mars, un suivi individualisé de tous les Aixois ayant apporté une contribution a été mis en place à part d'avril 2007, et n'est toujours pas véritablement terminé aujourd'hui...

a) Le suivi général

Chaque contributeur devant cocher les thèmes prioritaires pour la prochaine municipalité, et à l'intérieur de ces thèmes les mesures à privilégier, un long travail de recensement des 2453 réponses (elles ont donc été minutieusement comptées) a été effectué par des sympathisants bénévoles, afin de dégager les thèmes et mesures majoritairement plébiscités. Les trois rubriques prioritaires ont été ainsi Vivre Aix au quotidien, panel de mesures touchant aussi bien la propreté que les transports ou la circulation, puis à quasi égalité : Vivre Aix en sécurité, ce qui constitua pour Bruno Genzana une relative surprise, et Vivre Aix en logement, ce qui là en revanche était on ne peut plus attendu au vu de la crise du logement qui touche Aix-en-Provence.

On peut constater que les préoccupations quotidiennes et l'urgence de certaines situations présentes (en matière de logement) ont quelque peu pris le pas sur les grandes perspectives d'avenir (Aix en développement et Aix en capitale n'arrivent qu'en 7e et 8e positions). Mais ce constat est à nuancer si l'on observe les mesures retenues concernant les trois domaines arrivés en tête : ont été réclamés des actions éducatives auprès des jeunes, la révision du PLU, plus d'accès à la propriété, donc des mesures nécessitant une visée à long terme...

L'équipe des Ateliers de l'Avenir s'est toutefois gardée de tirer des conclusions définitives sur les préférences des Aixois : en effet si certains domaines n'ont pas été particulièrement cités, ce n'est pas forcément parce qu'aux yeux des Aixois il ne s'agit pas d'une priorité, mais cela peut être aussi parce que les habitants s'estiment globalement satisfaits de l'offre de la ville en la matière. Le cas de Vivre Aix en culture pourrait tout à fait être concerné, au vu de la place que prend la culture dans l'ensemble des contributions écrites des Aixois consultés...

Le point d'orgue de ce suivi général a été la réunion publique du 21 mars 2007 au Centre des Congrès. En raison de perturbations liées à une grève de La Poste, nombreux ont été ceux qui ont reçu leur courrier d'invitation trop tard, c'est pourquoi le monde a moins été au rendez-vous le 21 mars que le 15 septembre 2006. Pourtant il y avait là plus de matière : neuf tables rondes se sont succédées (une par thème, avec une durée en fonction de l'importance que les Aixois consultés leur avaient accordée), mêlant Bruno Genzana et son équipe avec divers intervenants et Grands Témoins, chacun dans leur domaine concerné, pour des discussions à bâtons rompus. Il est d'ailleurs intéressant de relever que certains de ces intervenants n'ont pas hésité à affirmer d'emblée leurs convictions politiques de gauche, comme Mme Souad Hammal, Présidente de l'Association «Eve lève toi» : la volonté affichée de Bruno Genzana était de dialoguer sans langue de bois et en toute franchise, avec des personnalités représentatives, et donc toutes tendances politiques confondues...

Animée par Xavier Guillon, un professionnel des études d'opinion, ancien Directeur de Département BVA, cette soirée a donc marqué une première étape du suivi des Ateliers de l'Avenir : les grandes lignes et priorités ont été tracées, les Grands Témoins ont chacun proposé des éléments de développement de la politique municipale dans leur domaine concerné. L'attente était d'ailleurs très vive sur deux sujets sensibles : le maintien de la Cour d'Appel et plus globalement de la vocation juridique d'Aix-en-Provence, ainsi que sa vocation universitaire avec le projet de fusion des universités. Cette restitution des résultats de la consultation montrait donc la volonté de Bruno Genzana et son équipe de sympathisants de poursuivre cette démarche de proximité, mais en réalité il s'agissait d'aller beaucoup plus loin. A partir d'avril 2007, avec le recrutement d'un stagiaire, Bruno Genzana s'est attelé à répondre individuellement et de la façon la plus détaillée possible à chaque Aixois ayant rendu une contribution écrite...

b) Le suivi personnalisé

Sur les 2453 réponses reçues, quelques centaines ne se contentaient pas de cocher dans des cases les priorités pour Aix, mais leurs auteurs ont également employé leur plume pour exprimer des demandes ou revendications particulières... Le but était donc de montrer que Bruno Genzana avait personnellement lu chaque lettre et avait bien pris acte de l'ensemble des remarques qui lui étaient adressées.

Les réponses des Aixois ont ainsi été classées essentiellement en quatre catégories : celles ne comportant aucun message particulier, celles se contentant d'adresser de simples félicitations, celles comportant un message plus substantiel, enfin celles comportant de véritables lettres de plusieurs pages sur des sujets très approfondis... Tous les Aixois ayant mentionné leur adresse sur leurs coupons de réponse devraient ainsi recevoir prochainement une lettre de Bruno Genzana leur rappelant les enseignements que la soirée du 21 mars a permis de tirer, avec la brochure bilan de la consultation fournie. La lettre de Bruno Genzana sera plus ou moins détaillée en fonction de ce que les personnes consultées avaient elles-mêmes écrit...

Il s'est agi en réalité d'un travail assez colossal qui n'est pas encore totalement terminé aujourd'hui, c'est pourquoi la grande majorité des courriers n'a pas encore été expédiée, à part pour les personnes l'ayant demandé explicitement, Bruno Genzana ayant opté pour un envoi groupé. Le stagiaire en charge du suivi n'a en fait pas seulement écrit des lettres sous la supervision de Bruno Genzana : répondre aux Aixois nécessitait de sa part une maîtrise des problématiques politiques aixoises essentielles dans l'ensemble des domaines, très variés, traités par la consultation. Il a fallu aussi dans de nombreux cas identifier le quartier d'habitation de la personne afin de mieux comprendre certaines de ses demandes éventuelles : cela a autant donné lieu à un travail de recherche qu'à un travail d'écriture.

En réalité, pour quelque peu simplifier les choses, un modèle générique a été élaboré en concertation avec Bruno Genzana pour que celui-ci soit envoyé aux Aixois n'ayant pas écrit de commentaires particuliers. Ce modèle a été par la suite adapté en fonction des contributions écrites reçues : l'objectif était et est encore que le moindre message, même quelques mots, donne lieu à une réponses personnalisée. Pour les contributions bien plus détaillées, le stagiaire les a classées en diverses rubriques (logement, sécurité, propreté, culture), pour une meilleure efficacité dans son travail.

Répondre à toutes ces contributions a nécessité un véritable travail de documentation au préalable, ainsi que plusieurs prises de contact avec les personnes susceptible de donner des renseignements selon les domaines concernés. C'était la plupart du temps Bruno Genzana lui-même qui orientait son stagiaire auprès de telle ou telle personne : ainsi rendez-vous fut pris avec le directeur adjoint de l'Habitat et Politique de la Ville près la Communauté du Pays d'Aix, au sujet des très nombreuses plaintes suscitées par la dégradation de certains logements sociaux, avec Jean-Pierre Bouvet pour aborder certains problèmes de voirie et les espaces naturels... La SEMEPA fut également contactée pour obtenir un panel précis sur la tarification des parkings dans l'ensemble de la ville : c'est avec sérieux et crédibilité que l'équipe de Bruno Genzana s'est efforcée d'apporter des réponses aux Aixois, prenant le temps de s'assurer au préalable de sa connaissance des dossiers abordés.

D'ailleurs le suivi individualisé des Ateliers de l'Avenir demandait également de la part du stagiaire une certaine présence sur le terrain : loin d'être enfermé dans son bureau à écrire des lettres, il a au contraire suivi Bruno Genzana dans bon nombre de déplacements et de visites, notamment lorsque c'était en rapport avec des problématiques à traiter dans les lettres. Il a ainsi assisté aux travaux de la Commission de l'Habitat et de la Politique de la Ville de la Communauté du Pays d'Aix, été aux côtés de Bruno Genzana lorsque celui-ci assurait des permanences à Encagnane et les quartiers nord, assisté à certaines représentations du Festival d'Art Lyrique : c'est toute la vie d'un élu au quotidien qu'il était nécessaire de connaître pour pouvoir être mieux à même d'écrire en son nom et d'évoquer l'avenir d'Aix-en-Provence.

Loin de se désintéresser du suivi individualisé des Ateliers de l'Avenir, Bruno Genzana ne manquait pas non plus lorsqu'il était disponible de donner le plus d'éléments de réponse possible à ses collaborateurs. L'implication personnelle de Bruno Genzana n'était certes pas absolue dans la mesure où un certain lien de confiance l'unissait avec son stagiaire qui était le principal responsable de ce suivi. Il est cependant certain que les lettres qui ont été envoyées et celles qui le seront, signées de la main de Bruno Genzana, auront toutes été lues et amendées par lui-même. Bruno Genzana est réputé dans le milieu des collaborateurs et secrétaires d'élus pour son perfectionnisme et sa minutie : très soucieux de son image et de ce qui est dit ou réalisé en son nom, il s'implique personnellement dans chacune de ses activités, d'où la difficulté parfois de concilier travail d'élu, activités purement politiques et militantes, et travail privé, que Bruno Genzana continue d'exercer, «pour garder un pied dans la réalité».

Enfin en fonction des situations, le suivi personnalisé des contributeurs aux Ateliers de l'Avenir ne se limitera pas à leur envoyer une lettre. C'est surtout dans le domaine de l'habitat que des suites plus approfondies seront données : certains habitants de logements sociaux ayant décrit avec force l'état de dégradation de leur immeuble ont déjà été contactés en vue d'une visite, d'autres le seront fin septembre ou début octobre : Bruno Genzana tenait à montrer toute son implication au service des Aixois, et en effet rien de mieux qu'une visite sur place pour à la fois mieux se rendre compte des problèmes quotidiens des gens, mais aussi pour effectuer une excellente opération de communication, alors que l'annonce de sa candidature aux municipales devrait désormais intervenir dans les semaines qui viennent...

3) A la recherche de l'intérêt général

Les Aixois ayant joué le jeu des Ateliers de l'Avenir verront ainsi bientôt que leurs contributions n'ont pas été mises au placard mais qu'au contraire elles serviront de base pour élaborer le projet municipal de Bruno Genzana et son équipe. Sans doute cette opération a-t-elle largement servi Bruno Genzana lui-même, qui a ainsi acquis une certaine notoriété. Sans doute cette opération servira-t-elle ainsi un certain nombre de citoyens aixois, ayant trouvé en Bruno Genzana un interlocuteur disponible prêt à les aider dans leurs problèmes quotidiens. Mais une question assez fondamentale, au coeur du débat sur la démocratie participative, reste néanmoins ouverte : où est l'intérêt général dans tout ça ? Est-ce utile pour notre démocratie qu'un homme politique mobilise tant d'énergies financières et humaines, avec quelque part l'idée en tête de se faire élire ? Et les demandes diverses exprimées par les citoyens doivent-elles systématiquement prises en considération, au risque que la démocratie ne devienne plus que pure démagogie ? Beaucoup de demandes d'Aixois consultés revêtent en effet un caractère très personnel et frisent le clientélisme.

L'ambiguïté de ce type de démarche tient aussi dans le fait qu'il s'agit avant tout d'un pari : lancés en dehors de tout appui constitutionnel, Les Ateliers de l'Avenir constituent désormais la rampe de lancement de la candidature de Bruno Genzana aux prochaines municipales. Un projet d'avenir pour Aix a certes pu être en partie élaboré, mais la réalisation concrète de ce projet ne pourra se faire que si Bruno Genzana est élu maire d'Aix-en-Provence : or une fois élu, qu'est-ce qui l'obligera vraiment à tenir parole ? La crédibilité des Ateliers de l'Avenir ne peut être aujourd'hui jugée que sur des intentions, et non sur des actions. Cependant cela n'a pas empêché Bruno Genzana et son équipe de définir une certaine ligne de conduite, devant montrer qu'agissant pour l'intérêt général de la ville, le politique ne peut et ne doit pas tout promettre, se devant de maintenir un cap éthique...

a) Le danger du clientélisme et de la démagogie

Nous l'avons vu, Bruno Genzana tient à se montrer en homme de proximité en recevant les habitants des quartiers difficiles. Il est ainsi intervenu dans divers dossiers de demandes d'attribution de logements et jouit d'une bonne réputation auprès de ses administrés du canton Aix Centre, dont il a été réélu conseiller général avec 55 % des voix au second tour : plusieurs Aixois lui sont ainsi redevables à titre personnel de services rendus. Or la limite est parfois floue entre l'action de proximité au service des citoyens et le clientélisme, terme que Bruno Genzana cependant récuse complètement : «je ne demande jamais aux gens de montrer leur carte électorale avant de les aider». Certes, mais Bruno Genzana possède aussi l'art de dire la vérité aux gens en situation de détresse : «Vous comprenez bien que je n'ai pas de baguette magique. Cela ne vous a pas échappé, je ne suis pas le maire d'Aix.» Il est absolument vrai qu'à l'heure actuelle Bruno Genzana à l'heure actuelle ne dispose que peu de moyens pour intervenir en faveur de tous ses solliciteurs : pour plaider en faveur d'un dossier de demande de logement, Bruno Genzana doit attendre que celui-ci passe en commission, dont il est membre, or c'est Jean Chorro, le Premier Adjoint, fidèle de Mme le Maire, qui maîtrise l'ordre du jour. Si Bruno Genzana est élu maire d'Aix, ses permanences à Encagnane auront effectivement toute une autre portée concrète pour ceux qui y feront le déplacement. La simple vérité constitue parfois le meilleur argument, qui plus est éthiquement irréprochable, pour demander aux gens de voter pour soi...

Cette ambivalence est bien présente dans plusieurs demandes adressées à Bruno Genzana par les Aixois dans le cadre des Ateliers de l'Avenir : certaines personnes demandent le prolongement ou la création d'une ligne de bus à proximité de chez elles, la construction d'une piscine dans leur quartier, et les collaborateurs de Bruno Genzana sont même tombés sur le cas d'une habitante de Célony qui travaillant sur Marseille, réclame un service de Proxibus, ainsi qu'une mutation pour travailler à la municipalité d'Aix, s'estimant scandalisée du fait que l'on embauchait avant tout des personnes passant les concours, au mépris de la citoyenne aixoise qu'elle était !!! La dernière précision en bas de la lettre «Je ne voterai pas pour Mme le Maire», est lourde de sens. Un cas tel que celui-ci reste isolé mais pose tout de même la question du jusqu'où un homme politique peut-il aller pour satisfaire les besoins parfois on ne peut plus personnels des administrés...

Bruno Genzana n'aura en réalité les moyens véritables de mettre en oeuvre ce «grand projet d'avenir pour Aix, une ambition à la hauteur de notre ville» que s'il parvient à remporter les prochaines municipales. Le risque semble donc évident qu'à la moindre exigence figurant dans les courriers des Ateliers de l'Avenir, il ne s'empresse d'y répondre positivement, pour gagner en popularité. De plus les Aixois ayant répondu à la consultation émettent souvent des demandes contradictoires : les cas les plus frappants concernent la sécurité, sujet sur lequel beaucoup de retraités notamment réclament une augmentation des effectifs de la police municipale et l'usage généralisé de caméras de vidéosurveillance, alors qu'en revanche les étudiants dénoncent le «tout répressif». Il y a eu également le cas des repas BIO et sans OGM devant être servis aux enfants dans les cantines : il s'agissait d'une proposition de Bruno Genzana figurant sur la brochure de consultation, reprise par une majorité d'Aixois consultés, mais certains «écolo-sceptiques» se sont également empressés de dénoncer le coût qu'aurait une telle mesure, d'autant plus qu'ils soutenaient ouvertement les OGM. Bruno Genzana estimait mal venu de contredire frontalement les gens en leur répondant : toute la difficulté réside dans la nécessité de prendre une position claire et de la défendre sans pour autant dire ouvertement au destinataire qu'il a explicitement tort. Contrairement à Ségolène Royal, un sourire de Bruno Genzana face à ses contradicteurs ne serait pas suffisant pour leur ôter tout regard critique. A l'heure où les Aixois attendent la réalisation de la plupart des promesses de la campagne 2001 de Mme le Maire (transports gratuits), il serait pourtant malvenu de surenchérir dans la démagogie : c'est pourquoi pour lever le plus d'ambiguïtés possibles, Bruno Genzana et son équipe se sont fixés plusieurs limites à ne pas franchir au cours de cette opération de consultation...

b) Le cadre éthique des Ateliers de l'Avenir

La posture de Bruno Genzana vis-à-vis de la municipalité actuelle a toujours été claire : comme il l'a exprimé dans l'éditorial de la brochure de consultation, Bruno Genzana assume parfaitement son appartenance à la majorité sortante, à la différence d'un de Peretti, mais estime qu'un nouveau souffle doit être donné à la ville d'Aix. Cette attitude similaire à celle de Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle sera tenue tout au long de la campagne municipale qui s'annonce. Les réponses adressées aux Aixois consultés doivent donc offrir un regard équilibré sur l'action de la municipalité actuelle.

Face à certaines critiques émanant des Aixois consultés, une partie du bilan et des réalisations de la municipalité actuelles ont ainsi été défendues, comme l'aménagement du nouveau quartier Sextius Mirabeau, la construction du Grand Théâtre de Provence, les programmes de réhabilitation des façades du centre ville, les aménagements routiers et réfections réalisées, notamment du côté de Purycard. Les réponses personnalisées ne donnent lieu à aucune désinformation : à ceux qui se plaignent d'une insuffisante pénalisation de toutes sortes d'incivilités, il leur est répondu que le conseil municipal vient tout juste de prendre un arrêté de verbalisation de tout un panel d'incivilités, allant du non ramassage des déjections canines à la pose d'affiches sur les troncs d'arbres.

En revanche Bruno Genzana n'hésite pas non plus en fonction des cas à pointer les insuffisances de la politique municipale actuelle sur de nombreux autres sujets, lorsque ceux-ci sont abordés par les contributeurs. Sur les services de nettoyage, le PLU, l'absence de pistes cyclables, la fusion des Universités Aix-Marseille, Bruno Genzana fait valoir sa différence avec Mme le Maire et ses fidèles : les prises de position de notre 5e adjoint ne sont donc pas dictées par une stratégie ou un calcul politique, mais par ce qu'il estime être juste ou non pour la ville, ce qui est encore la meilleure façon d'avoir une ligne de conduite crédible, surtout dans la position particulière où se trouve Bruno Genzana, membre de la majorité sortante, mais en rupture avec Mme le Maire.

Il faut également préciser que Bruno Genzana n'hésite pas dans ses réponses à dévoiler ses intentions concernant la Mairie d'Aix en toute transparence, évoquant clairement le projet municipal qu'il ne va pas tarder à proposer aux Aixois. Pas d'omission ni d'hypocrisie inutiles : à partir du moment où Mme le Maire a refusé de s'impliquer dans Les Ateliers de l'Avenir, alors qu'elle y était invitée, la candidature propre de Bruno Genzana aux prochaines municipales est inévitable dans la mesure où sinon tous les enseignements tirés lors de la consultation resteraient lettre morte...

Il n'en reste pas moins que toute cette initiative, pour qu'elle aboutisse, tient du pari : à Bruno Genzana et son équipe d'être suffisamment convaincants, cette fois-ci devant tous les Aixois, et pas seulement les Aixois consultés, pour que ces derniers leur accordent leur confiance. C'est seulement à l'issue d'un éventuel mandat de maire de Bruno Genzana que toutes les ambiguïtés de sa démarche pourront être levées ou confirmées : ayant toujours fait passer son projet pour Aix avant sa propre personne, ce n'est que sur la mise en oeuvre concrète de ce projet qu'il pourra être jugé, et que l'on pourra donc déterminer si une initiative comme Les Ateliers de l'Avenir aura vraiment servi la démocratie locale... En attendant, comme l'avait affirmé Stéphane Salord, la future liste conduite par Bruno Genzana aura un défi à relever : celui de passer pour des guides, capables de se situer dans une perspective constructive, et non pour des dissidents aventuriers...

CONCLUSION

« La politique et la stratégie de la guerre ne sont qu'une perpétuelle concurrence entre le bon sens et l'erreur » disait le Général de Gaulle. En excellent Général et en fin politique, le Général de Gaulle connaissait plus que quiconque la particularité du monde politique. Ceux qui en font partie savent qu'ils sont jaugés, jugés, examinés en permanence. Ainsi la moindre faiblesse peut être fatale et pour ceux qui ont de véritables idées pour leurs concitoyens, le chemin est long avant de parvenir au mandat qui leur permettra de les mettre en place.

Bruno Genzana est aujourd'hui à la croisée des chemins : il aurait pu déjà annoncer sa candidature officiellement aux prochaines municipales. Cependant il préfère encore attendre le moment propice, ne voulant pas se contenter d'un simple effet d'annonce, mais coupler sa déclaration de candidature avec le développement d'un véritable projet pour Aix-en-Provence, projet élaboré à partir des réflexions suscitées au sein des Ateliers de l'Avenir.

Cette «Grande Consultation de tous les Aixois», certes non dénuée d'arrière-pensées électorales, s'était vue assigner un double objectif : tracer une perspective pour Aix dans les années à venir, et être au plus près des problèmes et aspirations des Aixois. Ces deux objectifs ont été pour le moment partiellement rempli, et le seront peut-être totalement en fonction des résultats des prochaines élections municipales. Les Ateliers de l'Avenir ayant constitué un véritable tremplin en faveur de la candidature de Bruno Genzana, l'avenir dira s'il s'était agi d'un tremplin en faveur d'une ambition strictement personnelle comme celle de bon nombre de politiciens aixois, ou si ce tremplin aura permis l'expression d'une ambition politique au service d'une ville et de ses citoyens. Cette consultation a déjà cependant au moins le mérite d'avoir lancé et favorisé le débat et l'expression citoyennes, et d'avoir ainsi largement contribué à une pré campagne municipale déjà fort animée, en attendant que la véritable campagne commence...

Les Ateliers de l'Avenir illustrent également le fait qu'en France la démocratie participative, non encore consacrée dans nos institutions, s'est déjà fortement imposée dans les esprits. Il s'agit pour le moment d'une consultation lancée par un élu à titre personnel et non au nom de la collectivité publique à laquelle il appartient. Cependant nul doute qu'en cas de réussite de cet élu aux prochaines élections, cette même collectivité pourrait très bien lancer de telles initiatives de participation, cette fois d'une façon plus institutionnelle. L'air du temps incite à la concertation, les décisions publiques ne sont plus tellement prises par un homme seul dans son bureau, mais par un groupe réuni en assemblée ou autour d'une table : la gouvernance a pris de nouvelles formes, et comme se plaisait à dire Bruno Genzana, les méthodes des années 70 ne sont plus adaptées.

Ce mouvement de démocratie participative s'inscrit d'ailleurs dans un cadre plus global d'un certain réveil, d'une prise de conscience du citoyen, sans doute provoquée dans un premier temps par l'arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielles de 2002, mais aussi par l'enthousiasme et l'intérêt qu'a indéniablement suscités la campagne présidentielle de 2007 auprès des Français, enthousiasme surprenant au vu de la façon dont avait été perçue la précédente.

Le rapport de Jean-Pierre Bel, président du groupe socialiste au Sénat, Pour une nouvelle République, propositions de réformes des institutions à Ségolène Royal, remis à Ségolène Royal le 8 février 2007, évoquait vote obligatoire, service civique, référendum d'initiative populaire, usage généralisé du référendum avec l'art. 11 droit de vote des étrangers aux élections locales, prise en compte des bulletins blancs : telles sont les questions auxquelles la Commission Balladur chargée de la réforme des institutions devra répondre à son tour. L'initiative de Bruno Genzana, relativement inédite et visionnaire aujourd'hui, sera peut-être caduque d'ici très peu de temps, tant la vie politique actuelle semble s'être accélérée depuis la dernière élection présidentielle. Ce n'est pas seulement vers l'émergence de la démocratie participative en France que le XXIe siècle nous conduit, c'est tout simplement vers une nouvelle forme de citoyenneté...

ANNEXES

L'IDÉE DE DÉMOCRATIE PARTICIPATIVE :

ENJEUX, IMPENSES ET QUESTIONS RECURRENTES

CONFÉRENCES DE LA CHAIRE MCD - NOVEMBRE 2004

Chaire de Recherche du Canada en Mondialisation, Citoyenneté et Démocratie

http://www.chaire-mcd.ca/

Par Loïc Blondiaux

Professeur des universités à l'IEP de Lille CERAPS/Lille II

Conférence prononcée à l'Université du Québec à Montréal le jeudi le 11 novembre 2004.

(à paraître in Marie Hélène Bacqué et Yves Sintomer (dirs.), Démocratie participative et gestion de proximité, Paris, La découverte, 2004.)

Réfléchir aux évolutions de la démocratie participative locale dans un pays comme la France oblige à faire un constat : celui du décalage entre l'importance des enjeux soulevés par la question de la participation, le consensus dont fait l'objet cette idée aujourd'hui et la pauvreté des concepts, des cadres théoriques et des moyens dont les acteurs disposent pour penser cette réalité nouvelle. Après avoir confronté ces deux réalités, j'ouvrirai dans un troisième et dernier temps la réflexion sur un certain de nombre de questions, auxquelles sont confrontées aujourd'hui toutes les expériences de

démocratie participative et qu'il convient pour les acteurs de résoudre au préalable, d'un point de vue théorique comme d'un point de vue pratique, s'ils souhaitent donner un sens à cet idéal de démocratie participative locale, aujourd'hui et maintenant, dans nos démocraties modernes.

L'importance des enjeux liés à la participation démocratique

Nous nous situons en premier lieu dans un double contexte, politique et législatif, extrêmement favorable en apparence à l'idée de participation démocratique.

Un contexte politique et législatif favorable

Au plan politique, le consensus est fort autour de l'idée d'une démocratisation de la sphère publique locale. L'intérêt suscité par l'expérience de Porto Alegre sur le budget participatif, devenu la référence politique d'une grande partie de la gauche mondiale, la prolifération des dispositifs de participation ou la résurgence du référendum local semble en attester. Mais nous montrerons qu'il s'agit d'un consensus de façade, derrière lequel les ambiguïtés demeurent nombreuses. Les contenus placés derrière cette idée de participation varie très fortement selon les interlocuteurs. Au plan législatif, le contexte s'est considérablement renouvelé au cours de ces quinze dernières années.

Deux séquences législatives peuvent être distinguées :

- Le début des années quatre-vingt-dix a vu surgir une série de textes emblématiques qui ont posé le principe de la consultation, de l'information et de la concertation avec les habitants. La Loi d'Orientation sur la Ville en 1991 a posé en principe la nécessité d'une concertation préalable pour toute action ou opération de politique de la ville modifiant substantiellement les conditions de vie des habitants du quartier Si l'on sait les espoirs qu'a pu faire surgir la politique de la ville en cette matière, on sait aussi les difficultés rencontrées et l'échec de leur traduction en actes. Deuxième texte emblématique : la Loi sur l'administration territoriale de février 1992 qui elle aussi reconnaît le droit des habitants de la commune à être informés et consultés. Cette loi accouchera cependant d'une souris juridique, les dispositions qu'elle porte en matière de participation restant extrêmement timides (possibilité de créer des commissions extra municipales, référendum consultatif...). La Loi Barnier du 2 février 1995 enfin, qui invente le « débat public » à la française se présente comme le troisième texte emblématique de cette première période, en obligeant à la concertation pour tous les grands projets

ayant des incidences sur l'environnement4. La caractéristique principale de cette première vague législative elle de se situer presque exclusivement au niveau des principes. Elle ne prévoit guère d'obligation formelle, sauf en matière de débat public. Le contenu réel de ce « droit » à la participation et à l'information reste indéniablement obscur.

- Depuis la fin des années quatre-vingt dix, nous assistons à l`introduction, en droit positif, de mesures un peu plus contraignantes. Trois autres textes peuvent servir ici de jalons. La loi Voynet pour l'Aménagement du territoire et le développement durable de juin 1999 introduit les conseils de développement dans le cadre de la mise en place des pays et auprès des agglomérations. Ces conseils de développement auxquels participent des membres de la « société civile » ont vocation notamment à être associés à l'élaboration des chartes de Pays. La loi sur la solidarité et le renouvellement urbain, de décembre 2000 prévoit quant à elle une concertation obligatoire dans le cadre de l'élaboration des plans locaux d'urbanisme. La loi Vaillant du 27 février 2002 enfin, traite notamment des conseils de quartier et du débat public. Elle oblige à la création de tels conseils dans les villes de plus de 80 000 habitants et donne à la Commission nationale du débat public le statut d'autorité administrative indépendante.

L'ensemble de cette législation va dans le sens d'un renouvellement des formes de la démocratie contemporaine, qu'illustre également la multiplication des dispositifs de concertation qui se mettent en place aujourd'hui dans les collectivités locales ou tendent à accompagner de manière de plus en plus systématique les grands projets d'aménagement.

Les formes contemporaines de la participation : un bref inventaire

Des dispositifs variés mettent aujourd'hui à l'épreuve cet impératif de concertation ou de délibération. Trois familles de procédures peuvent être ici distinguées.

- La participation des habitants aux affaires locales se matérialise sous la forme d'assemblées ou de conseils qui empruntent aux formes les plus traditionnelles de la démocratie locale. Il en va ainsi des conseils de quartier, qui s'inscrivent dans des traditions plus anciennes. Aux Etats-Unis, les town

meetings, forme qui remonte au XVIIIè siècle, ont subsisté jusque de nos jours, notamment en Nouvelle Angleterre. Les neigborhood councils ou assemblées de voisinage constituent une réalité encore vivace dans de nombreuses villes américaines. En Europe, les conseils de quartier s'inscrivent dans une tradition plus récente. C'est au cours de la seconde moitié des années soixante que les « comités de quartier » se sont multipliés notamment en France et en Italie.

Cette première époque, qui n'a malheureusement pas encore trouvé ses historiens contraste cependant fortement avec les expériences actuelles de conseils de quartier. Là où, dans les années soixante, la démocratie participative, portée par les mobilisations associatives, résultait d'un mouvement « ascendant » ou « bottom-up » à l'exemple des Groupes d'Action Municipale, les années quatre-vingt dix sont marquées par un mouvement « descendant » ou « top-down » : ce sont les autorités municipales qui sont à l'origine de la quasi-totalité des expériences, qu'elles initient et contrôlent. Il en va de même pour les différentes formules d'ateliers urbains : la plupart des ateliers urbains d'aujourd'hui n'ont plus grand chose à voir avec les ateliers populaires d'urbanisme éclos dans les années soixante-dix et liés aux luttes urbaines.

De ces formes classiques peuvent être rapprochées aujourd'hui les multiples déclinaisons qui tentent d'associer toute ou partie de la population d'une municipalité à la discussion des affaires locales : conseils municipaux d'enfants ou de jeunes ; conseils de résidents étrangers ; conseils de sage ; comités consultatifs d'association ; commissions extra-municipales, conseils municipaux interactifs, forums de discussion internet.... Il convient de mettre à part le budget participatif, tel qu'il se pratique notamment à Porto Alegre, le seul aujourd'hui à articuler efficacement la discussion qui s'effectue au sein d'assemblées populaires avec la décision politique, en l'occurrence les choix budgétaires.

- De ces formules d'association des habitants aux affaires locales se distinguent les dispositifs de consultation accompagnant un projet d'aménagement ou la création d'une infrastructure susceptible de menacer l'environnement. L'enquête publique, même réformée par la loi Bouchardeau en 1983, n'est que l'une des modalités d'une telle concertation, la plus embryonnaire et la plus critiquable. La multiplication, au cours de ces dernières années, des conflits ouverts autour de projets d'aménagement, qu'ils soient locaux ou transversaux (Lignes THT, TGV, Autoroutes...), a conduit les autorités politiques à généraliser le recours au « débat public » comme mode d'anticipation ou de régulation des conflits. Mieux encore : à l'instar de certaines expériences québécoises, comme celle du BAPE (Bureau d'Audience Publique sur l'Environnement), la législation française autour du débat public ouvre de nouveaux champs à ce type de participation. La Commission nationale du débat public, aux moyens renforcés par la Loi du 27 février 2002, tente aujourd'hui de fixer les cadres de référence d'une telle démarche. A minima, une « obligation d'informer et de débattre » se met progressivement en place en ces domaines. A maxima, ce sont les conditions d'élaboration et d'adoption des projets qui pourraient être affectés par ces procédures de concertation.

- Depuis quelques années sont apparues enfin des constructions démocratiques plus originales, pour la plupart issues directement ou indirectement des sciences sociales, à l'instar des Jurys de citoyens, issus d'une innovation allemande née dans les années soixante-dix et mis au point par le sociologue Paul Dienel, de la conférence de consensus née au Danemark et introduite timidement en France ou du sondage délibératif. Ces dispositifs relèvent d'une démarche commune et procèdent d'une même intention: associer le temps d'une consultation se déroulant sur quelques jours un groupe de citoyens ordinaires, tirés au sort et/ou volontaires, à l'élaboration d'un choix collectif portant sur un projet précis (jurys de citoyens), d'ampleur locale ou nationale (jurys de citoyen, conférence de consensus) ou une question largement débattue au plan national (conférence de consensus, sondage délibératif). Ce groupe de citoyens (d'une dizaine dans le cas du jury de citoyens à plusieurs centaines dans le cas du sondage délibératif) a charge de produire un jugement éclairé, susceptible d'enrichir le point de vue de l'autorité en charge. Ces dispositifs ont démontré, notamment en relation avec des controverses sociotechniques, que la perspective d'une démocratisation des choix scientifiques commençait à devenir crédible.

Ces trois grandes familles de dispositifs diffèrent sous de nombreux aspects, qu'il s'agisse des publics adressés, des formes de représentativité mise en oeuvre ou du lien avec les autorités. La principale ligne de partage tient à leur degré de formalisation et d'institutionnalisation. Il semble essentiel de ce point de vue de distinguer les dispositifs ad hoc, liés à une opération donnée (débat public, concertation) ou à une controverse particulière (jurys de citoyens, sondage délibératif, conférence de consensus), de dispositifs qui cherchent au contraire à institutionnaliser la participation ou la délibération en relation avec un territoire (conseils de quartier, conseils de développement...) un service public ou un ensemble d'équipements (commissions locales de l'eau ou des services publics...). Dans le premier cas, il s'agit le plus souvent de prévenir et d'organiser un conflit présent ou latent. Dans le second cas, la perspective est tout autre et la question posée est la suivante : comment assurer la participation des citoyens sur le long terme, dans la durée et hors de toute perspective d'action ? Tout change ainsi selon que le dispositif s'inscrit ou non dans le cadre d'un conflit, au point qu'il faille peut-être s'interroger sur le sens de formes démocratiques qui chercheraient à pérenniser la participation sans relation avec un projet, une controverse ou un conflit particulier.

Mais ces procédures partagent un certain nombre de traits en commun, qui autorisent leur rapprochement : tous ces dispositifs ont d'abord pour enjeu d'assurer une forme de participation des citoyens ordinaires à la discussion d'enjeux collectifs. Ils se présentent comme un moyen d'ouvrir la représentation et de transgresser les frontières classiques de la démocratie représentative. Ils visent également, on l'a dit, à produire du jugement public au travers de la discussion collective et de la rencontre entre acteurs d'origines différentes. Ce sont bien en ce sens des « forums hybrides» (Callon) où se rencontrent des acteurs très différenciés : citoyens, élus, experts. Seule change la manière dont cette discussion est organisée, son caractère plus ou moins public et contraint. Tous ces dispositifs ont ensuite un caractère consultatif. Ils ne sont jamais en prise directe avec la décision démocratique, à l'exception, mais dans certaines limites, du budget participatif de Porto-Alegre ou des « enveloppes de quartier » dont certaines municipalités dotent parfois leurs structures de participation locale.

Il est à noter enfin que les concepts auxquels font référence ces procédures (ceux de participation, de débat, de discussion, de concertation, de proximité...) ont pour particularité d'être flous, ambivalents et de pourtant faire l'objet d'une très forte valorisation symbolique. La « rhétorique participative », repose sur un investissement fort de ces vocables et une inflation qualificative soutenue. Cette rhétorique de la participation, largement pratiquée par les élus, contraste le plus souvent avec les moyens réels qui sont mis à la disposition de ces structures ne serait -ce qu'au niveau municipal. Sans moyens matériels ni possibilité d'action juridique, souvent confiés à des médiateurs contractuels ou à des emplois jeunes, relevant de délégations dévalorisées au sein des conseils municipaux, sans véritable poids politique les instances participatives de font figure d'institutions pauvres dans les structures politiques municipales.

Un tel paradoxe mérite à tout le moins d'être creusé. Les conséquences potentilles de ce renouvellement des formes démocratiques sont pourtant considérables. A travers la généralisation de ce type de procédures, il est possible de faire l'hypothèse selon laquelle s'amorce un changement substantiel dans la conception de la légitimité qui prévaut dans nos sociétés politiques. La légitimité d'une mesure ne dépendrait plus seulement de la nature de l'autorité qui la prend mais de la manière dont elle est prise, de la procédure dans laquelle elle s'inscrit23. Toute décision semble devoir aujourd'hui avoir fait l'objet d'une concertation préalable, d'une délibération incluant l'ensemble des acteurs concernés par la décision. C'est également notre conception même de l'intérêt général qui pourrait être en jeu derrière ce mouvement en faveur de la participation. En faisant droit à différentes conceptions de l'utilité collective, on retire par la même aux élus et à l'Etat, adossés sur leur système d'expertise, le monopole de la définition de l'intérêt général.

Dans le cadre français, tout particulièrement, cette évolution implique une transformation des attitudes et des procédures qui ne peut qu'avoir des répercussions importantes sur l'ensemble des acteurs concernés par l'action publique.. Les experts, à commencer par les services techniques des municipalités, ont l'obligation aujourd'hui de se justifier, d'argumenter à nouveaux frais, de se confronter aux habitants et d'intégrer dans leurs choix des craintes jugées autrefois « irrationnelles ». Au regard des habitants, ceux ci sont l'objet d'une « injonction participative » qui contraste pour le moins avec le rôle presque exclusivement passif qui leur a été dévolu depuis plus de deux siècles dans nos systèmes politiques où une stricte division du travail politique entre gouvernants et gouvernés a toujours été respectée. La plupart de ces dispositifs ont l'ambition au contraire de faire participer les habitants à la définition des enjeux, à la préparation des solutions voire même à l'évaluation des décisions. C'est enfin notre conception du rôle de l'élu qui pourrait à terme changer : peut-il se contenter d'être un chef d'orchestre, un animateur de procédures de débat public, ou reste-t-il pleinement maître de la décision ? Lui aussi se trouve contraint de changer ses manières de faire, d'argumenter, s'exposer au risque de la confrontation dans un processus de justification et de confrontation qui est désormais public et ne se limite plus seulement à l'élection.

Les limites de la réflexion sur la démocratie participative en France

Dans un deuxième temps je voudrais montrer que les moyens conceptuels et intellectuels dont nous disposons pour penser ce renouvellement des formes démocratiques ne sont pas à la hauteur de l'enjeu. Il y a une vraie pauvreté de réflexions sur ces questions.

Un impensé conceptuel

Nous ne disposons aujourd'hui en France que de deux concepts pour qualifier es expériences démocratiques ceux de Démocratie représentative et de Démocratie participative. Il est intéressant de souligner au passage que, sauf exceptions, semble avoir été quasiment abandonnée en France la référence à l'autogestion ou à la démocratie directe, à la différence de ce qui peut se jouer autour de cette notion de démocratie participative, en Amérique latine par exemple25. De manière significative, la notion d'empowerment est également restée jusqu'ici non traduite26. Le problème avec le couple de notions à notre disposition, c'est que si nous savions bien ce qu'est la démocratie représentative et ce qu'en sont les principaux caractères, nul ne sait véritablement ce que recouvre la notion de «démocratie participative ». A quoi s'agit-il de faire participer les citoyens ? A la décision, à la discussion ou à une opération de communication mise sur pied par des autorités ? Certains élus ou maître d'ouvrages ont vu ainsi l'opportunité de communiquer sur la démocratie.

Les premiers éléments de cette réflexion ont été avancés dans un numéro spécial des Cahiers du DSU, consacré aux « Formes légales et initiatives locales de participation. Entre logiques d'efficacité et construction de la démocratie locale », certains retiennent l'idée d` « événementiel démocratique » pour reprendre les termes entendus récemment de la bouche d'un consultant. S'il existe aujourd'hui un « fétichisme de la proximité » dans le discours politique français, la rhétorique de la participation n'a rien à lui envier. Nombreux sont les acteurs qui communient au long de colloques, de séminaires et de discours autour de ce mot fétiche qu'est la participation. Bien peu la pratiquent réellement. A ce vocable se réfèrent des initiatives trop différentes pour que le terme ne finisse pas par être purement et simplement galvaudé.

En France, les acteurs de la participation se reposent parfois sur une échelle issue de la sociologie des organisations anglo-saxonne des années soixante et qui distingue quatre échelons de la participation selon le degré d'implication des habitants : l'information, la consultation, la concertation et la co-décision. Mais cette échelle n'est pas des plus stables conceptuellement. Les catégories en sont floues et ne possèdent aucune valeur juridique ou normative. Cette échelle n'a pas fait non plus l'objet d'un travail de conceptualisation politique véritable, qui permettrait de dégager clairement les critères d'une bonne concertation ou d'une véritable co-décision, par exemple.

C'est la raison pour laquelle il convient peut-être de s'intéresser à l'émergence depuis une dizaine d'années dans la philosophie politique anglo-saxonne d'une nouvelle catégorie, celle de « démocratie délibérative », développée notamment à partir des réflexions de deux philosophes politiques parmi les plus importants du XXè siècle : Jürgen Habermas et John Rawls. Sans reprendre en détail les attendus de cette notion, les théoriciens de la démocratie délibérative s'entendent a minima sur trois principes :

- Un principe d'argumentation : le débat démocratique doit consister avant tout en un échange de raisons. C'est la force du meilleur argument qui doit prévaloir. L'argumentation qui prévaut dans le forum est ici opposée, comme chez Elster, à la négociation qui opère sur le marché. Il convient dès lors d'organiser des procédures qui permettront de faire surgir les meilleurs arguments et permettront de s'éloigner d'une conception exclusivement agrégative de la légitimité.

- Un principe d'inclusion : la discussion doit être ouverte au plus grand nombre, et dans l'idéal à tous ceux qui sont susceptibles d'être affectés par la décision. C'est ce critère qui distingue la délibération démocratique d'autres formes de délibération (ce qui en particulier dans un pays comme la France où la notion de délibération est traditionnellement associée aux assemblées représentatives ou aux jurys rend l'association de ces deux termes problématique). Il faut rechercher dans la mesure du possible les conditions d'une discussion égalitaire, libre, non violente et ouverte.

- Un principe de publicité ou de transparence, qui distingue cette délibération d'autres formes de délibération moins démocratiques et ouvertes. Cette approche de la délibération a pour elle le mérite de définir clairement ce que pourrait être un horizon régulateur des pratiques dans les démocraties existantes. A la différence de l'idée de « démocratie participative », il ne s'agit plus de laisser croire aux habitants qu'on les fait participer à la décision au risque de produire de la frustration et du cynisme.

Un impensé procédural

Nous sommes également confrontés en France à une absence de consolidation des expériences de participation et de concertation, laquelle se traduit par une forte variabilité et instabilité des procédures. Le législateur reste en effet le plus souvent silencieux sur le contenu formel de la participation. Qu'il prévoit la mise en place d'une concertation (loi SRU), de conseils de développement (loi Voynet) ou de conseils de quartier (loi Vaillant), rien n'est dit explicitement de la manière dont il convient d'organiser ces procédures. Seul le juge pourrait avoir son mot à dire pour définir, a posteriori, ce à quoi correspond une bonne « concertation ».

Dans le domaine environnemental la France vient cependant de ratifier en septembre 2002 la Convention internationale d'Aarhus (1998) sur « l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement », laquelle pourra servir désormais de base légale aux actions juridiques.

Certains textes, en provenance du gouvernement (à l'instar de la Charte de la concertation rédigée sous l'égide du ministère de l'environnement en 1996) ou portés par des associations comme l'ADELS ou le Carnaq ont tenté ces dernières années de codifier les pratiques de concertation, sans réelle prise cependant sur les pratiques33. Faute d'une structuration intellectuelle ou politique véritable de ce mouvement en faveur de la participation, c'est donc aujourd'hui aux acteurs de terrain de définir les bonnes pratiques, en l'absence de cadre légal précis. Ce sont les adjoints à la démocratie locale, les chefs de projet et autres agents de développement, voire quelquefois les cabinets de consultants positionnés dans ce domaine, qui construisent au jour le jour les savoirs et définissent les règles pragmatiques de la concertation. Il pourrait être intéressant d'étudier la manière dont aujourd'hui certaines grandes entreprises nationales se forment aujourd'hui aux procédures de concertation et spécialisent certains de leurs agents, participant elles aussi à processus collectif d'élaboration de normes. Bien peu de municipalités se sont dotés, comme à Paris ou à Poitiers, d'un observatoire de la démocratie locale, capable de produire de la réflexivité sur les expériences, d'aider à la l'évaluation des dispositifs et au cumul des savoirs. Cette absence de consolidation des savoirs emporte deux conséquences. En premier lieu, les acteurs de terrain sont le plus souvent démunis face aux problèmes récurrents que soulèvent la mise en oeuvre de dispositifs de participation. Ils sont tous confrontés aux mêmes problèmes de représentativité, de légitimité et d'articulation sur les sphères de décision, sans avoir les ressources politiques suffisantes pour les surmonter. Dans les innombrables colloques qui ont la participation pour thème, ce sont toujours les mêmes questions qui ressurgissent, sans espoir véritable de réponse.

L'exigence de points de repère n'a jamais été aussi grande de la part des acteurs. En second lieu, un même « label » procédural peut recouvrir des réalités très différentes. Certaines municipalités prétendent ainsi mettre en place des « budgets participatifs » en se contentant d'attribuer à leurs conseils de quartier de maigres enveloppes d'investissement tout juste susceptibles d'acheter un banc, un feu tricolore ou quelques jardinières. On nomme également « conseil de quartier » des choses infiniment différentes selon les endroits : certaines municipalités mettent en place des instances composées d'élus et de sympathisants de la mairie et qui délibèrent à huis clos, d'autres organisent des shows à grand spectacle confrontant le maire aux habitants, d'autres enfin délèguent entièrement à une poignée de citoyens le soin d'organiser et d'animer ces dispositifs, les abandonnant souvent à leur triste sort. Cette variabilité est d'autant plus forte qu'un même dispositif peut évoluer dans le temps et se modifier substantiellement, à l'image des conseils de quartier.

La réflexion sur la démocratie participative en France en est, on l'aura compris, à ses balbutiements. A travers cet inventaire sommaire des avancées et des manques de la réflexion nous avons voulu pointer ce qui nous apparaît comme un déficit de conceptualisation chez ses acteurs mêmes. Sans préjuger le moins du monde des évolutions à venir de cette dynamique de participation, nous avons voulu montrer à quel point la volonté politique et la réflexion sur les procédures restaient en retrait des promesses ouvertes par ce renouvellement des formes démocratiques. Il ne revient évidemment nullement à l'observateur critique que nous sommes de dire ce que cette démocratie nouvelle devrait être. L'objectif de cette contribution était de mettre au clair certains des enjeux que de tels processus recouvrent.

* 1 La façon de communiquer qu'avait Jean-Pierre Raffarin, en apparaissant comme un homme de terroir sympathique, charismatique du fait de son absence de charisme, défenseur de la «France d'en bas» et adepte d'une « nouvelle gouvernance », même si cela ne l'a pas empêché de sombrer dans les sondages lorsque des réformes difficiles ont dû être menées par son gouvernement, a tout de même fait école dans la classe politique...

* 2 Depuis la loi constitutionnelle n°2003-276 du 28 mars 2003, art. 1er.

* 3 La proposition très controversée de Ségolène Royal des «Jurys citoyens» a encore récemment provoqué bien des remous...

* 4 Le capital nom est constitué des éléments qui font la notoriété d'un homme politique, mais encore faut-il que celle-ci soit bonne : c'est là que le capital réputation entre en jeu...

* 1 Ex : en Mars 2002 sur l'adhésion à l'ONU qui a obtenu 55% de « oui »

* 5 Le terme populiste signifiait plutôt «progressiste» avec un forte connotation sociale. Il n'avait pas du tout la connotation négative d'aujourd'hui...

* 6 Littéralement le « rappel » : un référendum d'initiative populaire est organisé pour décider de la destitution d'un gouverneur par exemple...

* 7 Source Canal Ipsos, http://www.ipsos.fr/canalipsos/articles/1190.asp

* 8 Litt. « opération mains propres », très vaste opération judiciaire en Italie lancée en 1992 contre la corruption du monde politique italien ayant entraîné une recomposition totale du paysage politique transalpin.

* 9 Raymond Carré de Malberg, Contribution à la théorie générale de l'Etat, rééd. CNRS, 1962.

* 10 Art. 3 : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. »

* 11 « Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux Assemblées, publiées au Journal Officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.

* 12 « L'initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République sur proposition du Premier Ministre et aux membres du Parlement. Le projet ou la proposition de révision doit être voté par les deux assemblées en termes identiques. La révision est définitive après avoir été approuvée par référendum. » (alinéas 1 et 2)

* 13 Art. 89 alinéa 3 : « Toutefois, le projet de révision n'est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement convoqué en Congrès ; dans ce cas, le projet de révision n'est approuvé que s'il réunit la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés. Le bureau du Congrès est celui de l'Assemblée Nationale. »

* 14 « Dans les communes de 80 000 habitants et plus, le conseil municipal fixe le périmètre de chacun des quartiers constituant la commune. Chacun d'eux est doté d'un conseil de quartier dont le conseil municipal fixe la dénomination, la composition et les modalités de fonctionnement. Les conseils de quartier peuvent être consultés par le maire et peuvent lui faire des propositions sur toute question concernant le quartier ou la ville. Le maire peut les associer à l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'évaluation des actions intéressant le quartier, en particulier celles menées au titre de la politique de la ville. Le conseil municipal peut affecter aux conseils de quartier un local et leur allouer chaque année des crédits pour leur fonctionnement. Les communes dont la population est comprise entre 20 000 et 79 999 habitants peuvent appliquer les présentes dispositions.» Art. 1

* 15 « La loi fixe les conditions dans lesquelles les électeurs de chaque collectivité territoriale peuvent, par l'exercice du droit de pétition, demander l'inscription à l'ordre du jour de l'assemblée délibérante de cette collectivité d'une question relevant de sa compétence. Dans les conditions prévues par la loi organique, les projets de délibération ou d'acte relevant de la compétence d'une collectivité territoriale peuvent, à son initiative, être soumis, par la voie du référendum, à la décision des électeurs de cette collectivité. » (alinéas 1 et 2)

* 16 Art. 72-1 alinéa 3 de la Constitution : « Lorsqu'il est envisagé de créer une collectivité territoriale dotée d'un statut particulier ou de modifier son organisation, il peut être décidé par la loi de consulter les électeurs inscrits dans les collectivités intéressées. La modification des limites des collectivités territoriales peut également donner lieu à la consultation des électeurs dans les conditions prévues par la loi.»

* 17 Art. 72-4 alinéa 1 : « Aucun changement, pour tout ou partie des collectivités mentionnées à l'art. 72-3 ne peut intervenir sans que le consentement des électeurs de la collectivité ait été préalablement recueilli... »

* 18 Cette citation ainsi que les suivantes sont extraites des propos de Ségolène Royal tenus au cours d'une interview pour 20 minutes, le 26 octobre 2006.

* 19 Cf. son article sur la démocratie participative en annexe

* 20 Propos des deux politologues ainsi que ceux de Didier Maus rapportés par Les Echos, dans l'article « Ségolène Royal : les jurys citoyens », en date du 13 avril 2007.

* 21 André Laurens, Le métier politique, Alain Moreau, 1980

* 22 Avec un territoire s'étendant sur près de 186 km2, Aix arrive au 11e rang sur l'ensemble des communes métropolitaines en terme de superficie, la commune de Paris n'ayant une étendue que de près de 100 km2...

* 23 Bruno Genzana est d'ailleurs le président du groupe UMP-UDF au Conseil Général des Bouches-du-Rhône, dirigé par une majorité de gauche. Il est également vice-président de la Communauté du Pays d'Aix, délégué à l'Habitat et la Politique de la Ville.

* 24 Descartes lui-même décriait la cité médiévale désordonnée dans son Discours de la Méthode : « ces anciennes cités, qui, n'ayant été au commencement que des bourgades, sont devenues, par succession de temps, de grandes villes, sont ordinairement si mal compassées, au prix de ces places régulières qu'un ingénieur trace à sa fantaisie dans une plaine, qu'encore que, considérant leurs édifices chacun à part, on y trouve souvent autant ou plus d'art qu'en ceux des autres ; toutefois, à voir comme ils sont arrangés, ici un grand, là un petit, et comme ils rendent les rues courbées et inégales, on dirait que c'est plutôt la fortune, que la volonté de quelques hommes usant de raison, qui les a ainsi disposés. »

* 25 L'écrivain local Armand Lunel (1892-1977), ami de Darius Milhaud, célèbre la rationalité du tracé et l'harmonie des proportions dans son roman La Belle à la Fontaine, qui a le quartier Mazarin pour cadre : «Sur le plan d'Aix, notre quartier est ce quadrilatère délimité par les quatre artères du cours Mirabeau, de la rue d'Italie, de l'avenue Victor Hugo et du cours du Roi René. Toutes les rues y sont tirées au cordeau, composant ainsi d'admirables perspectives, surpassées entre toutes par celle qui, de la fontaine des Quatre Dauphins, s'ouvre sur le porche de l'église Saint-Jean. Nulle part mieux qu'ici n'est affirmé, dans l'art de bâtir, le sens des proportions.» Descartes aurait certainement apprécié...

* 26 Il n'y a aucun lien de parenté entre Charles de Peretti et Jean-Pierre de Peretti della Rocca

* 27 La commune d'Aix-en-Provence est couvertes par deux circonscriptions électorales des Bouches-du-Rhône : la XIe qui comprend entre autres le canton Aix Sud-Ouest, et la XIVe qui comprend les cantons Aix Centre et Aix Nord-Est, ainsi que ceux de Trets et de Peyrolles.

* 28 François-Xavier de Peretti est le fils de Charles de Peretti.

* 29 Tout ça officiellement parce que Medvedowsky aurait renoncé au recours devant le Conseil d'Etat visant l'annulation de l'élection municipale de 2001, que Picheral avait perdu de très peu contre Maryse Joissains alors qu'il était donné favori... Recours qui s'il avait été maintenu aurait vu le duo Picheral-Medvedowsky être défendu par l'avocat... Maître Michel Pezet !!!

* 30 Dans une déclaration donnée à La Provence le 14 septembre.

* 31 Le député RPR sortant de la XIVe circonscription Jean-Bernard Raymond s'est vu rafler à l'époque l'investiture de l'UMP par Maryse Joissains, qui a pris Bruno Genzana pour suppléant. Jean-Bernard Raymond a alors obtenu l'investiture de l'UDF et s'est représenté avec François-Xavier de Peretti comme candidat suppléant, ce qui constitua le prétexte qui manquait à Mme le Maire pour lui retirer ses délégations, sachant que les rapports entre eux s'étaient très rapidement dégradés...

* 32 Numéro 2 sur la liste conduite par Maryse Joissains en 2001 (tandis que Bruno Genzana figurait sur celle de Jean Chorro), Stéphane Salord est actuellement 2e adjoint au maire, chargé du développement économique, de l'emploi et de la vie culturelle.

* 33 Maire d'Aix et Présidente de la Communauté d'agglomération du Pays d'Aix (CPA), Maryse Joissains a deux directeurs de cabinet : son mari Alain à la Ville, et sa fille Sophie à la CPA. Le bruit court même qu'en cas de réélection en 2008, Maryse Joissains envisagerait de quitter son fauteuil de Maire en cours de mandat pour le laisser à sa fille... dès l'été 2006, à l'occasion d'un déjeuner avec jc gaudin elle demandait officiellement à jc gaudin de réserver la 2e place sur sa liste sénatoriale (élections fin sept 2008) à sa fille sophie

* 34 Certains quartiers d'Aix-en-Provence éloignés du centre et en discontinuité urbaine avec celui-ci sont appelés villages et revendiquent une identité particulière au sein de la commune d'Aix-en-Provence, ayant pour la plupart un adjoint spécial faisant office de «maire» : c'est le cas pour Luynes, Les Milles et Purycard notamment...

* 35 D'après Stéphane Salord, au moins 30% des électeurs aixois lors des municipales de 2008 seront des gens qui ne l'étaient pas lors de celle de 2001...

* 36Les Aixois attendent toujours la gratuité des transports, que la Tour Rouge soit repeinte, ou le fameux bouton pour les personnes âgées qui leur permettait d'avertir immédiatement la police en cas d'agression !!!

* 37 Dans les deux bureaux de votes situés à l'Hôtel de Ville donc au coeur du vieux centre historique, Ségolène Royal a recueilli environ 60% des suffrages au second tour de la dernière élection présidentielle. C'est ainsi qu'en privé Bruno Genzana a baptisé le vieux centre médiéval «Boboland».

* 38 Ami de Bruno Genzana, conseiller général Aix Nord-Est, conseiller municipal et vice-président de la Communauté du Pays d'Aix, Jean-Pierre Bouvet toutefois ne devrait pas s'engager lors des prochaines municipales, ayant choisi de privilégier sa réélection en tant que conseiller général...

* 39 Cf article sur le lancement des Ateliers de l'Avenir en annexe.

* 40 Cf la reproduction de ce document en annexe

* 41 Cette citation et les suivantes sont extraites de propos tenus au cours d'un entretien avec Bruno Genzana le 12 septembre 2007

* 42 http://www.aixconsult2008.com

* 43 Un tout petit échantillon de ces remerciements est visible à la dernière page de la brochure de bilan des Ateliers de l'Avenir, distribuée au Centre des Congrès et figurant en annexe.

* 1Cf article dans La Provence sur le début de la consultation

* 44 Editorial de Bruno Genzana figurant en première page de la brochure de consultation

* 45 Interview dans La Provence du 16 avril 2007, jointe en annexe. A noter cependant que Bruno Genzana se garde bien de dire «que Maryse Joissains conserve la ville», la formule choisie est révélatrice.

* 46 Bruno Genzana a aujourd'hui 48 ans, Stéphane Salord 38, tandis que Maryse Joissains en a 65, son fidèle 1er adjoint Jean Chorro étant loin également d'être de toute première jeunesse...

* 47 Cf le tract de soutien à Nicolas Sarkozy où l'on voit se dernier ce promener dans un parc avec Bruno Genzana.

* 48 «Je vous adresse tout d'abord mes félicitations pour la création de ces Ateliers de l'Avenir - Aix 2008 qui constitueront un bel exemple de démocratie directe que nos concitoyens appellent de leurs voeux. Ils seront en outre un support sérieux pour concrétiser et transformer en projets les attentes des Aixoises et des Aixois. Connaissant votre énergie et votre conviction, je ne doute pas que cette initiative sera une réussite. Je regrette d'autant plus un emploi du temps déjà arrêté qui ne me permettra pas d'être à vos côtés pour ce lancement. Je vous prie de bien vouloir excuser publiquement mon absence et faire part de tout mon soutien aux personnalités et sympathisants présents ce soir-là.» Si Jean-Claude Gaudin va même jusqu'à s'excuser de ne pas avoir été présent, tout en vantant les qualités personnelles de Bruno Genzana, il s'agit bien d'un encouragement à aller encore plus loin, de la part de celui qui pourtant, en tant que président de la commission d'investiture de l'UMP, va l'accorder d'ici peu à Maryse Joissains...

* 49 Entretien avec Bruno Genzana du 12 septembre 2007

* 50 http://castronovo.canalblog.com/

* 51 http://cyril-dimeo.over-blog.com, Cyril Di Meo, benjamin du conseil municipal, sera le candidat Verts à la Mairie d'Aix-en-Provence en 2008

* 52 Le bailleur

* 53 Un Aixois de longue date a notamment écrit : «Je ne me fais aucune illusion sur les suites concrètes pouvant être données par les hommes politiques  aux consultations ou promesses électorales.» Et ce n'est pas un cas isolé.

* 54 En fait pour Les Ateliers de l'Avenir il en existe un quatrième, qui ne peut cependant être examiné à l'heure actuelle : les Aixois auront d'autant plus de chance de voir leurs demandes satisfaites, ou du moins d'avoir un retour, si Bruno Genzana est élu maire d'Aix !!! Réponse en mars 2008...

* 55 Editorial de la Brochure de consultation

* 56 Liste des Grands témoins disponible en annexe






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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery