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La loi spéciale de lutte contre le terrorisme du 2 novembre 2001

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par Huynh To Uyen Julie Nguyen
INALCO - Maitrise LLCE de Japonais 2004
  

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Huynh To Uyen Julie NGUYEN

La loi spéciale de lutte contre le terrorisme

du 2 novembre 2001

Mémoire pour l'obtention de la

Maîtrise de langue et civilisation japonaises

Préparé sous la direction de

Monsieur le professeur Eric SEIZELET

Et de Monsieur Pascal GRIOLET, Maître de Conférence

INALCO

Département de langue et civilisation japonaises

Septembre 2004


INTRODUCTION
Le choc des attentats du 11 septembre

L

e 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont été frappés de plein fouet par une série d'attentats suicides simultanés ciblant principalement les villes de New York et de Washington. Ces agressions terroristes ont été ressenties comme un électrochoc par toute la communauté internationale car, au-delà des milliers de victimes innocentes qui y ont perdu la vie, elles ont démontré avec brutalité que la citadelle américaine réputée inviolée était, elle aussi, vulnérable.

Il n'est pas question ici de retracer les causes et raisons qui ont conduit à ces attaques, ni de faire le compte rendu de leur mise en oeuvre. Pléthore d'ouvrages y a déjà été consacré1(*). Soulignons seulement que l'onde de choc provoquée par ces attentats marquait l'entrée dans une nouvelle ère des rapports de force entre nations. Certains auteurs, comme André Kaspi, historien et spécialiste des relations internationales, parlent même d'une nouvelle ère des relations internationales. Désormais, les plus grandes puissances, non seulement sur le plan militaire mais également dans les domaines économique et financier, doivent composer avec cette forme de menace « exogène » et incontrôlable. La répartition des forces avait déjà été ébranlée et recomposée après la fin de la guerre froide et l'effondrement de l'Union soviétique entre 1989 et 1991. Le rapport de force avait basculé de facto en faveur des Etats-Unis en tant que première puissance militaire mondiale. Ils se sont érigés en « gendarme du monde » pour lequel cette agression sur son propre sol était un défi sans équivoque. Désormais, le rôle des Etats-Unis en tant que tel prenait une autre dimension. Les Américains devaient confirmer aux yeux du monde la légitimité de leur position au sommet de la hiérarchie des grandes puissances en engageant des représailles à l'échelle mondiale. Les implications pour les alliés des Etats-Unis étaient d'importance puisque par l'effet d'un autre « jeu de dominos » ils devaient également, dans le sillage des Etats-Unis, confirmer leur position dans ce système de rapport des forces. Le Japon, moins que n'importe quel autre allié des Américains, n'échappait pas à la règle.

De prime abord, la situation du Japon pourrait sembler aisée, dans la mesure où il est un fidèle allié des Etats-Unis, lié par un traité d'alliance militaire solide. Pourtant, l'engagement des Japonais dans le nouveau conflit qui s'annonçait soulevait de nombreuses difficultés induites par un système de défense aliénant. Pour mieux appréhender ces difficultés, revenons sur les circonstances du réarmement japonais.

Les Forces d'autodéfense ont été créées en 1954 dans le cadre d'un effort de remilitarisation du Japon mené sous l'impulsion des Etats-Unis. Dans le contexte de la guerre froide, la constante de la politique américaine vis-à-vis du Japon dès le début des années 50 était de le pousser à se réarmer. La question devenait d'autant plus pressante quand en 1949 la Chine est devenue communiste et surtout quand en 1950 a éclaté la guerre de Corée. Pour les Américains, la lutte contre l'expansion du communisme sur ce nouveau front asiatique s'annonçait difficile à mener si leur poste avancé dans la zone, dont le Japon représentait l'élément fondamental, n'était pas militarisé. Aussi, le Japon a-t-il été fortement encouragé à prendre des mesures de remilitarisation afin de permettre aux Etats-Unis de faire l'économie d'une présence trop coûteuse en Asie-Pacifique.

Le Japon a été tout d'abord réticent, notamment les partis de gauche et l'opinion publique qui étaient fortement attachés au pacifisme institutionnalisé par l'article 9 de la Constitution de 1946 relatif à la renonciation de la guerre 2(*). Originellement, la mission des Forces d'autodéfense japonaises était essentiellement d'assurer la protection des bases américaines installées au Japon et la défense du territoire national. Cependant, au fur et à mesure que progressait la guerre froide en Extrême-Orient et le réarmement du Japon, leurs activités se sont étendues. Ainsi, en 1963, le plan MITSUYA élaboré en secret avait pour objectif la prise de mesures communes entre les Etats-Unis et le Japon (sous commandement américain) pour faire face à une situation de crise en Corée. Cependant, les Etats-Unis n'avaient alors pas encore formulé le souhait de mobiliser les Forces d'autodéfense directement dans les combats. Les premières études d'une réelle participation des Forces d'autodéfense dans des opérations conjointes nippo-américaines ont été mises en oeuvre à l'occasion de la définition en 1978 des directives sur la coopération nippo-américaine en matière de défense, les premières guidelines. Ainsi, les manoeuvres conjointes impliquant les forces terrestres d'autodéfense et les forces maritimes d'autodéfense prenaient de plus en plus d'importance.

Lorsqu'en 1989 la guerre froide a pris fin, le Japon aurait dû entrer dans un processus de désarmement, mais la guerre du Golfe, qui a éclaté en 1991, a ouvert une nouvelle phase dans la politique de défense des Etats-Unis. Le Japon a vu alors sa position de base arrière de l'armée américaine se confirmer. Dans ce contexte, l'Initiative Nye3(*), énoncée en 1993, précisait les modalités du maintien des forces américaines au Japon et la déclaration conjointe nippo-américaine d'avril 1996 sur les questions de sécurité réévaluait les accords de sécurité. Les nouvelles guidelines, édictées en 1997, fixaient enfin les modalités de la concrétisation de ce dispositif, dont fait partie la loi sur les situations de crise en zones périphériques votée en août 1999. En matière de politique de défense et de sécurité, le Japon a toujours dû subir le joug américain et ce depuis le traité de San Francisco. Même si à l'époque de la guerre de Corée les Etats-Unis ont regretté d'avoir imposer une constitution pacifiste au Japon lui interdisant de posséder une armée, il n'en reste pas moins que ce cadre constitutionnel contraignant a permis aux Américains de tirer à leurs profits les futures évolutions de la politique de défense japonaise. En effet, ces dispositions leur ont permis de maintenir leurs bases avancées dans le Pacifique grâce à un allié japonais fidèle et docile. Le Japon a pourtant nourri des velléités d'émancipation mais elles ont été difficiles à concrétiser.

Les Forces d'autodéfense sont néanmoins aujourd'hui une véritable armée de métier qui compte 240 000 hommes et qui dispose d'un budget comparable à celui de la France. Elles sont la septième force militaire du monde, mais ses activités sont strictement limitées à la défense.

Dans les premiers jours qui ont suivi les attentats du 11 septembre, le Japon s'est interrogé pour savoir quel genre de soutien il pourrait concrètement apporter aux Etats-Unis. Le Président Bush, dans les premières heures qui ont suivi les attentats, déclarait déjà qu'il allait engager une riposte à l'envergure de la tragédie. Or, pour le Japon, apporter son soutien et son assistance à une campagne de représailles en Afghanistan, pays où se cacherait le commanditaire des attentats, posaient de nombreux problèmes. En effet, le cas de figure d'une telle opération n'entrait pas dans le cadre de sa législation en matière de défense.

Pour saisir les enjeux que posaient les questions du soutien et de la contribution du Japon aux opérations américaines en réponse aux événements du 11 septembre, il convient tout d'abord d'analyser la réaction du Japon au lendemain de ces attaques terroristes (1ère Partie, Chap. 1) et l'état de la politique extérieure et de la politique de défense du Japon (1ère Partie, Chap. 2) avant d'aborder la situation du Japon vis-à-vis de la lutte contre le terrorisme (1ère Partie, Chap. 3).

L'analyse des conditions de l'élaboration du projet de loi spéciale de lutte contre le terrorisme nous permet de comprendre comment et pourquoi le Premier ministre japonais s'est dirigé vers cette solution pour consolider la politique de contribution du Japon (2ème Partie, Chap. 1). Ce projet de loi, qui met en place un double dispositif de mesures en réponse aux attentats du 11 septembre (2ème Partie, Chap. 2), a été délibéré lors de la session extraordinaire de la Diète d'octobre 2001 et soumis au vote des parlementaires qui l'ont adopté malgré de nombreuses difficultés et oppositions (2ème Partie, Chap. 3).

La loi spéciale de lutte contre le terrorisme a ainsi été promulguée le 2 novembre 2001, date à laquelle elle a été également mise en application. De prime abord, cette nouvelle loi apparaissait davantage comme la justification légale de mesures anticipées (3ème Partie, Chap. 1). Mais s'arrêter à cette analyse serait négliger les raisons profondes pour lesquelles le Premier ministre Koizumi a pris la responsabilité de faire voter cette loi dont la portée va bien au-delà de la seule lutte contre le terrorisme. Cette loi, en effet, représente un progrès essentiel dans la définition de la politique de défense et de sécurité du Japon en permettant notamment d'envoyer pour la première fois les Forces d'autodéfense à l'étranger en dehors du cadre de la participation aux opérations de maintien de la paix de l'ONU (3ème Partie, Chap. 2).

Malgré le manque de recul historique, la documentation pour analyser ce sujet n'a pas manqué. La nature des événements, au contraire, a galvanisé les commentateurs, journaux, spécialistes et hommes politiques. Dans un premier temps cependant, les commentaires et analyses se sont focalisés sur le phénomène terroriste, mais très rapidement les enjeux vis-à-vis de la politique de défense et de sécurité du Japon ont orienté les écrits vers des études plus approfondies sur la loi à proprement parler.

L'outil de recherche que représente Internet s'est également révélé très précieux pour recueillir des documents bruts comme le texte loi ou des communiqués du Premier ministre et du gouvernement. Les sites officiels des institutions japonaises sont pour cela excellemment conçus et faciles d'accès. Malheureusement les inconvénients d'un archivage trop rapide des informations sur certains sites, en particulier les sites de journaux, limitent les recherches par cet intermédiaire.

Le caractère audacieux et inédit de certaines mesures mises en place par la loi spéciale de lutte contre le terrorisme a néanmoins suscité un discours majoritairement critique inspiré par le fait que cette loi se heurtait à l'article 9 de la Constitution et à de nombreuses dispositions de la législation déjà existante sur les activités des Forces d'autodéfense. Le journal Asahi shinbun en est un excellent baromètre. En fait, mis à part les commentaires du Premier ministre et de son entourage direct et les analyses des commentateurs étrangers, rares sont les écrits qui soulignent les avancées qu'apporte la loi spéciale de lutte contre le terrorisme dans la définition de la politique de défense du Japon.

Les principales sources de ce devoir proviennent donc des articles de revues spécialisées, en particulier des revues d'analyse politique et juridique, et des articles du journal Asahi shinbun.

1ÈRE PARTIE
Le contexte avant le vote de la loi du 2 novembre 2001 :
Les questions du soutien et de la contribution du Japon

CHAPITRE 1

LA REACTION DU JAPON AU LENDEMAIN

* 1 Citons notamment l'ouvrage de Gérard Chaliand qui dans sa nouvelle édition augmentée consacre l'introduction aux attentats du 11 septembre 2001 : CHALIAND Gérard, Les Stratégies du terrorisme, Paris, Desclée de Brouwer, 1999 (Nouvelle édition augmentée, 2002), pp. I-XI.

* 2 « Le peuple japonais, aspirant sincèrement à une paix internationale fondée sur la justice et l'ordre, renonce à jamais à la guerre en tant qu'exercice de la puissance de l'Etat, et à la menace ou à l'usage de la force comme moyen de règlement des conflits internationaux.

« Pour atteindre le but fixé à l'alinéa précédent, il ne sera jamais maintenu d'armées terrestres, navales, aériennes ou autres forces militaires. Le droit de belligérance de l'Etat ne sera pas reconnu. », dans Etude du droit japonais, Paris, Société de législation comparée, 1989, pp. 362-370. Traduction de MINAMINO Shigeru sur la base de la « Traduction française recommandée par le Ministère des Affaires étrangères du Japon »

* 3 Accord de coopération stratégique nippo-américaine dans le cadre de la guerre de Formose (94-95) et portant sur l'évolution de l'état des relations entre les Etats-Unis et le Japon.

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