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Dynamique des représentations sociales de l'agriculture et de la ruralité dans un contexte territorial du vieillissement de la population : Le cas du « Projet Nô-Life » de la Ville de Toyota au Japon

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par Kenjiro Muramatsu
Université de Liège - DEA Interuniversitaire en Développement, Environnement et Sociétés 2006
  

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Chapitre I : Evolution urbaine et rurale dans la Ville de Toyota après 1945

Introduction

Quel est le facteur historique de temps long de la politique municipale de la Ville de Toyota qui, pour construire le Projet Nô-Life, a problématisé ensemble le vieillissement de la population en majorité salariale, le manque de main-d'oeuvre agricole et le délabrement des terrains agricoles ? Et quelle était la place de la question d'Ikigai dans l'histoire de la Ville de Toyota après 1945 ? Ce présent chapitre vise une recontextualisation historique de ces questions croisées ayant engendré le Projet Nô-Life.

Comme notre présente étude porte principalement sur les facteurs et le processus du développement du Projet Nô-Life démarré en 2004, notre approche doit inévitablement se baser sur l'observation directe ou indirecte de faits sur l'instant ou la courte durée qui touchent ce projet. Mais ceci risque d'ignorer une durée beaucoup plus longue dans laquelle s'inscrit la dynamique du présent que nous pouvons observer directement.

C'est pourquoi Garnier et Sauvé avertissent, dans la conclusion de leur article, que « le processus de transformation des représentations et des pratiques est éminemment complexe et demeure un vaste champs d'investigation35 » Selon eux, il n'y aurait pas d' « influence directe » entre les pratiques et les représentations « qui aboutissent à des transformations »36. Et c'est le « contexte » qui « pourrait intervenir » comme « élément intermédiaire » entre ces deux éléments37.

Dans ce présent chapitre, notre tentative consistera donc à une recontextualisation historique de notre objet de recherche, visant à éclairer l'ancrage socio-historique des représentations et des pratiques qui sont en question dans le processus du Projet Nô-Life, sur un temps plus long que la portée de notre « étude des acteurs du Projet » que nous présenterons dans les deux chapitres suivants.

Nous délimitons l'unité spatio-temporelle de notre examen au territoire de la ville de Toyota dans la période de 1945 à 1975. C'est-à-dire, l'évolution de cette ville pendant une trentaine d'années après la deuxième guerre mondiale. En effet, c'est après 1945 que les agents institutionnels principaux du Projet Nô-Life tels que la municipalité, la coopérative agricole, se sont entièrement décomposés et recomposés, et que la vie de la population locale fut presque entièrement réorganisée au travers du passage du régime national de la guerre d'avant 1945 à celui de la démocratie pacifique (après 1945) instaurée sous l'occupation américaine (1945-195 1).

L'objectif de notre examen ici n'est pas de décrire trente ans d'histoire urbaine et rurale de la Ville de Toyota après 1945, mais de resituer le contexte du Projet Nô-Life marqué par les trois thématiques évoquées plus haut (vieillissement de la population générale ; manque de main-d'oeuvre agricole ; délabrement des terrains agricoles), dans une longue durée de la réalité sociale et locale de la Ville de Toyota.

Ce chapitre sera composé des quatre parties suivantes : 1 Industrialisation : naissance et développement de

l' « Automobile Toyota » ; 2 Urbanisation : naissance et développement de la « Ville de Toyota » ; 3 Evolution agricole et rurale dans la Ville de Toyota ; 4 Réflexions.

Nous nous baserons sur la lecture des ouvrages collectifs intitulés « Histoire de la Ville de Toyota (toyota

35 Garnier et Sauvé, 1998 : 73.

36 Ibid.

37 Ibid.

shishi) » publiées successivement de 1976 à 1987 par la Ville de Toyota, pour toutes les parties descriptives38.

Périodisation en trois décennies après 1945

Dans le tome 4 de ces ouvrages collectifs publié en 1977 qui concerne la période contemporaine, la description de l'histoire se base sur une périodisation en trois décennies suivantes : 1945-1954 (les années 20 de Shôwa) ; 1955-1964 (les années 30 de Shôwa) ; 1965-1974 (les années 40 de Shôwa).

Selon l'explication donnée par les membres du comité de rédaction dans la postface de ce tome, les auteurs essaient, par cette périodisation, de mettre l'accent sur les « caractéristiques de l'époque de chaque décennie39 ». De là, ils essaient de mettre en évidence les caractéristiques « totales (sôgô-teki) » de chacune de ces époques, en se concentrant sur les « choses qui se mettent en parallèle avec chaque époque »40. Et ceci, à la différence de la manière dont sont souvent éditées les histoires des collectivités territoriales japonaises (shi-chô-son shi), lesquelles découpent verticalement l'histoire moderne et contemporaine en différents domaines tels que l'administration, l'agriculture, l'industrie, le commerce, l'éducation41.

Citons un paragraphe de cette postface, qui exprime l'esprit de la rédaction de ce tome portant sur « trente ans de turbulence42 » de la Ville de Toyota :

« Nous ne nous satisfaisons pas d'une histoire de la ville qui n'a que pour objectif d'enregistrer le changement et de le suivre de manière statistique. Si on n'y trouve pas d'expressions de la vie et Ikigai des citoyens, cette histoire sera insignifiante. Nous voulons aborder l'action et la conscience des citoyens concernant le changement du nom de la Ville, les fusions des villages et les mouvements ouvriers etc. Ceci également sur le devenir des paysans ecrasés par l'urbanisation, les instituteurs s'étant efforcés, avec des changements de courants de pensée pour l'éducation, à s'occuper des enfants et des élèves dont l'augmentation du nombre était brutal. Autrement dit, nous avons voulu toucher les efforts et les sentiments des citoyens qui ont subi chacun les distorsions depuis l'époque d'après la défaite de la grande guerre, marquée par la confusion, l'angoisse et la difficulté, jusqu'à nos jours de prospérité sous la Haute croissance. Nous avons également pensé à laisser comme archives de la Ville les états réels de chaque époque. Cependant, nous ne pouvons pas effacer les affaires, les résistances et les critiques en decrivant l'histoire de la ville, comme si celle-ci s'était déroulée sans aucun problème et inconvénient. Il serait également inacceptable que l'on decrive les oppositions et les concurrences entre les fermes et les usines, la terre agricole et l'habitat urbain, uniquement de manière à raconter la gloire des gens qui l'ont emporté dans ces confrontations. Le problème est dans quelle mesure celles-ci ont été exprimées dans cette histoire. Sur ce point, nous devrons attendre l'appréciation des lecteurs. »

Dans cette explication, nous pouvons aisément apercevoir à quel point les préoccupations des auteurs ainsi que l'histoire de la Ville de Toyota après 1945 sont marquées par les turbulences suite à l'industrialisation automobile et les drames qui l'ont suivie dans la « vie des citoyens ».

L'existence de la ville de Toyota est d'abord marquée - à la fois réellement et symboliquement - par son nom

38 Cette série d'ouvrages collectifs est éditée en dix tomes : le premier porte sur la nature, la période primitive, l'antiquité, le moyen âge ; le second sur la période pré-moderne (kinsei) ; le troisième sur la période moderne (kindai : 1868-1945, de l'ère Meiji à la fin de la grande guerre) ; le quatrième sur la période contemporaine (gendai : 1945-aujourd'hui) ; le cinquième sur le folklore ; les tomes 6-10 constituent l'ensemble des annexes présentant respectivement les données concernant chacun des cinq premiers tomes. Ces ouvrages sont édités par la Commission de l'éducation de la Ville de Toyota (Toyota-shi Kyôiku Iinkai) ainsi que le Comité spécial de rédaction de l'histoire de la Ville de Toyota (Toyota-shi-shi Hensan Senmon Iinkai). Chacun des cinq premiers tomes est rédigé par une dizaine de rédacteurs couvrant différentes disciplines (histoire, géographie, politique, économie, sociologie, folklore, administration, éducation etc). Chaque rédacteur est chargé d'un ou plusieurs chapitres. En général, les auteurs mobilisés pour la rédation sont, soit des instituteurs d'écoles primaires ou de collèges ou de lycées situés dans la Ville de Toyota, soit des professeurs d'université présents dans la région.

39 Matsui, Itô et Miyakawa, 1977 : 881

40 Ibid.

41 Ibid.

42 Ibid. : 882.

emprunté depuis 1959 à celui d'une célèbre société constructrice d'automobiles japonaise qui s'est implantée dans les années 30 dans le territoire de cette ville, et y a constitué une concentration industrielle dominante. En fait, avant l'implantation et le développement de l'industrie automobile à la fin des années 30, cette ville était un petit bourg rural qui avant 1959 s'appelait « Koromo ». Au Japon, cette ville de taille moyenne constitue un exemple typique des villes généralement appelées, avec une connotation ironique, par sa forte dépendance à une seule industrie, sous le nom de « bourg fortifié par l'entreprise (kigyô jôka-machi) ».

Dans les deux premières parties, nous allons esquisser des aspects généraux de l'histoire de l'industrialisation et de l'urbanisation de cette ville d'avant 1945 à 1975. Ensuite, dans la troisième partie, nous décrirons l'évolution du monde agricole et rural dans la même période.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld