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Lire la fin du monde dans le jour de la fin du monde,une femme me cache de Patrick Grainville.

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par Vincent de Paul BISSIEMOU
Université Omar Bongo de Libreville - Maà®trise de lettres 2009
  

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CONCLUSION PARTIELLE

Au terme de cette première partie, nous pouvons retenir que les personnages évoluent dans un univers chaotique.

Nous pensons qu'à travers les indices thématiques que nous avons pu déceler, l'auteur montre avec précision une catastrophe endeuillant plus des 260 familles.

Enfin, Grainville témoin attentif de ces différents bouleversements qui ne cessent de survenir de jours en jours n'a pas hésité une fois de plus à nous interpeller la dessus.

DEUXIEME PARTIE
L'ANALYSE DU DISCOURS

Le discours a ses unités, ses règles, sa "grammaire" : au-delà de la phrase et quoique composé uniquement de phrases, le discours doit être naturellement l'objet d'une seconde linguistique30.

30 Roland Barthes, " Introduction à l'analyse structurale des récits", in Communication 8, 1966, p.3

32

CHAPITRE TROISIEME : LA TRANSMISSION DU MESSAGE NARRATIF

La présente partie, qui s'intéresse à la matérialité superficielle ou apparente du texte narratif englobe deux aspects que sont la narration (l'énonciation) et le signifiant discursif (l'énoncé).

Le projet sémiotique étant la recherche des conditions d'existence de la signification-ici littéraire, c'est-à-dire l'appréhension du sens sous- entendu au système structuré des signes textuels dans le cadre d'une sémiotique littéraire ou textuelle, la prise en compte de la narratologie comme pratique d'investigation permet d'interroger le texte littéraire à partir de ses constituants immédiats.

S'interroger sur la narrativité d'un texte, c'est à la fois chercher à comprendre dune part le mécanisme de production qui le fait naitre et la fonde en tant que discours, et d'autre part les règles de distribution et ses éléments internes.

Ces deux aspects seront envisagés dans les deux sous chapitres qui suivent. Comme toute pratique analytique au sens étymologique de décomposition/restructuration, l'analyse narratologique révèlera sous la calme horizontalité des syntagmes successifs, le système accidenté des choix et des relations paradigmatiques. Si son objet est de bien éclairer les conditions d'existence(de production) du texte, ce n'est donc pas, on le dit souvent, en réduisant le complexe au simple, mais au contraire en

faisant apparaître les complexités cachées qui sont le secret de la simplicité31 .

II.3.1. L'instance narrative

Les faits qui composent l'univers narratif sont divisés en deux niveaux : le premier niveau, extra textuel concerne les relations auteur- lecteur : un second niveau, entre le narrateur et le narrataire. Notre étude concerne l'examen de ces deux niveaux

II.3.2-Le statut du narrateur

Dans son "Discours du récit", Genette nous dit qu'une

Situation narrative, comme tout autre, c'est un ensemble complexe dans lequel l'analyse, ou simplement la description, ne peut distinguer qu'en déchirant un tissu de relations étroites entre l'acte narratif, ses protagonistes, ses déterminations spatio- temporelles, son rapport aux autres situations narratives impliquées dans le même récit, etc.32.

La complexité de la texture du récit n'étant pas susceptible d'être saisie globalement au niveau du discours critique, ce n'est pas par fractionnements et déchirements que l'analyse doit chercher à faire parler le texte. Les principes narratologiques que nous abordons dans le

31 Gérard Genette, Figures III, Paris, Seuil, 1972, p. 165.

32 Ibid., p. 227.

présent chapitre doivent nous amener à interroger directement les différents éléments du dispositif narratif. Comme pour premier élément de ce dispositif, l'instance narrative. Prévenant la confusion qui est souvent faite d'une part entre l'instance narrative et l'instance d'écriture, c'est-à-dire le narrateur et l'auteur, et d'autre part entre le destinataire du récit(ou narrataire) et le lecteur de l'oeuvre, Genette pose clairement que la situation narrative d'un récit de fiction ne se ramène jamais à sa situation d'écriture33. Le narrateur est ainsi un rôle purement fictif qu'il convient de distinguer soigneusement de la personne physique qui assume l'acte concret d'écriture. Mieke Bal l'assimile au "it "anglais34, qui est l'instance la plus impersonnelle de la conjugaison anglaise, ce qui de ce fait le décharge des racines existentielles de la personne humaine à laquelle certains critiques ont quelque fois tendance à l'assimiler35.

Dresser un statut du narrateur, c'est élucider le problème de la "voix" dans le récit, c'est-à-dire répondre à la question "qui parle ? ". Si l'instance narrative ne saurait être assimilée à la personne physique de l'auteur, grammaticalement pourtant, il ne se conçoit de narrateur qu'à la première personne, et Genette affirme à ce propos :

En tant que le narrateur peut en tout instant intervenir
comme tel dans le récit, toute narration est, par
définition, virtuellement faite à la première personne

34

33 Ibid., p. 226.

34 Mieke Bal, Narratologie, Paris, Ed. Klincksieck, 1977, p. 31.

35 Une investigation narratologique d'un récit ne saurait se concevoir sans un repérage préalable de ses instances. La critique traditionnelle, pas trop réductrice, passait directement de l'auteur au personnage, ce qui n'allait pas sans une certaine confusion au niveau de l'interprétation globale de l'oeuvre littéraire : à partir de l'auteur, on essayait d'expliquer le personnage, et vis-versa. Une simplification abusive de la réalité textuelle ou narrative conduisait sans contexte une lecture/interprétation biographique de l'oeuvre littéraire. Celle-ci n'était plus qu'un prétexte qui permettait au critique de retracer l'histoire personnelle de l'auteur. La grande innovation de la narratologie a été de voir dans le fait textuel une hiérarchie de niveaux théoriques identifiable et autonomes.

pour désigner l'un de ces personnages. On distinguera donc ici deux types de récits : l'un à narrateur absent de l'histoire qu'il raconte, et l'autre au narrateur présent comme personnage dans l'histoire qu'il raconte. Je nomme le premier type, pour des raisons évidentes, hétérodiégétiques et le second homodiégétiques36.

Le narrateur est donc nécessairement un "je", c'est-à-dire une première personne, même s'il raconte une histoire à la troisième personne. Le "il" diégétique est justement prise en charge par un "je" narrant ne saurait finalement se confondre, ni avec le personnage fictif impliqué dans le récit, ni avec le "Je" écrivant qui n'est autre que la personne physique et biologique de l'auteur.

Concernant Le jour de la fin du monde, une femme me cache, il ne fait aucun doute que la relation qui lie narrateur et la diégèse est une relation hétérodiégétique, ce qui institue d'emblée un certain rapport de domination/subordination entre eux. Ce type de relation, le plus courant dans la narration littéraire, constitue presque la marque, le masque, de la fiction romanesque, à l'instar du passé simple et du "il" dont parle Barthes dans son Degré zéro de l'écriture37. La relation hétérodiégétique permet en effet au narrateur de poser entre son récit une ligne de démarcation qui l'oblige à présenter les faits dans leur "objectivité". Cette frontière pourtant n'est jamais étanche, imperméable, hermétique. De multiples indices, telles que les métalepses narratives, rendent compte

36 Gérard Genette, op. cit., p. 252.

37 Roland Barthes, "L'écriture du roman", in Le degré zéro de l'écriture, Paris, Seuil, 1953 et 1972 pp.25-32.

de fréquentes interférences et instruisions du narrateur dans le monde clos de l'histoire.

Le narrateur, que nous avons défini comme une instance neutre, est en principe "indépendante" de la personne physique de l'auteur. Cependant, en l'absence d'un narrateur nommément désigné dans le texte narratif, il arrive que la personne de l'auteur remplisse la fonction de narrateur. C'est ce qui justifie l'expression " narrateur-auteur" que nous avons employée jusqu'ici et que nous continuerons à utiliser. Les deux instances sont tellement imbriquées l'une dans l'autre qu'on ne saurait indéfiniment les différencier. Le narrateur peut être tout au plus un intermédiaire entre la personne de l'auteur et le récit.

Le narrateur formant donc un tout invisible, son statut de première personne par conséquent reste fixe. Les problèmes de changement de narrateurs, ou tout simplement de délégation du droit narratif, résultent en réalité du changement de niveaux narratifs.

Si tout narrateur est d'abord intra narratif dans ce sens qu'il est en premier chef concerné par l'acte de narration, la délégation de son droit narratif à l'un des délocuteurs constitue un indice supplémentaire, en plus des métalepses narratives qui dénote sa présence dans le récit.

Le jour de la fin du monde, une femme me cache est un texte à "vision avec"38, c'est-à-dire un récit à focalisation interne où le narrateur (Jérôme) est égal au personnage central. Il sait autant que le personnage est présent comme personnage dans l'histoire qu'il raconte. Jérôme a un statut homodiégétique et est aussi intradiégétique parce qu'il est le personnage principal de Le jour de la fin du monde, une femme me cache.

36

38 Jean Pouillon, Temps et roman distinguait trois types de vision : la vision par derrière, la vision avec est celle où le narrateur sait autant que le personnage.

La cession de la parole à l'un des personnages témoigne d'un changement de niveau, le narrateur intra diégétique [devenant] extra diégétique par rapport au nouveau récit, formé par le discours direct, hypo-diégétique, dont le personnage-sujet devient le narrateur.39

En dépit d'une différence de dénomination chez Genette et Bal40", le changement de narrateur signifie bien passage d'un niveau à l'autre. Comme dans tout texte narratif, la narration dans notre récit est alternativement prise en charge par le narrateur et par les personnages diégétiques. Le premier niveau narratif sera assuré par le narrateur lui- même, et le second niveau, au discours direct, par les personnages. Sur le plan discursif et modal, cela se concrétise par la présence de deux modes narratifs : le récit d'événements et le récit de paroles.

En dehors de ces considérations théoriques, la distinction des deux niveaux narratifs révèle un fort déséquilibre au niveau de notre récit. Le second niveau qui concerne les micro-récits, c'est-à-dire les récits dans un récit, est nettement moins fourni que le premier. Pour en être convaincu, il convient de distinguer soigneusement discours dialogue et micro récit, car tout échange de paroles- entre deux ou plusieurs personnages-ne constitue pas nécessairement un micro récit. Celui-ci doit conter une histoire, ce qui suppose un début et une fin.

39 Mieke Bal, op. cit., p. 35.

40 Pour Genette, " tout événement raconté par un récit est à un niveau diégétique immédiatement supérieur à celui où se situe l'acte producteur de ce récit", sera alors métarécit tout récit dans le récit, et métadiégétique l'univers de ce second récit. (Voir Figure III, P. 238-239). Bal rejette l'utilisation du préfixe "méta-" et préfère celui de "hypo-" : hypo-récit, hypo-diégétique ; concernant les rapports hiérarchiques entre récit et hypo-récit, le terme supérieur de Genette est remplacé par celui de dépendance (Voir Narratologie, p. 35.)

Comme tout récit, le micro-récit doit être quasi autonome- toute proportion gardée et doté d'une armature architecturale propre. Malgré une intense activité communicative, le niveau "méta-diégétique" (ou "hypo-diégétique") reste sous alimenté dans notre récit-objet. Tout se passe comme si les personnages restaient rivés à la réalité immédiate.

Et Romane a commencé son lent récit... Juste avant de me connaître, elle avait un amant sans véritable amour. Une dépendance froide. Elle en était tombée amoureuse, le lui avait avoué. Il avait soudain révélé qu'il avait une autre femme, qu'il l'aimait, qu'il était marié avec elle, qu'il ne voulait pas gâcher sa vie41.

Ce micro-récit est très illustratif en ce sens que nous voyons là Romane qui raconte à Jérôme le malheur qui lui était arrivé. Elle avait, aveuglée par l'amour donné son coeur à quelqu'un qui, lui avait un engagement conjugal : il était marié.

Finalement, Grainville aime peindre des situations plus ou moins contradictoires. Et ce sont ces situations qui sont l'élément catalyseur aux divers agissements des personnages dans ce récit-objet.

38

41 Patrick GRAINVILLE, le jour de la fin du monde, une femme me cache, édition du Seuil, 2001.page 277.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore