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Quelle stratégie numérique pour les éditeurs de livres ?

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par Patricia Gendrey
Institut Léonard de Vinci - MBA marketing et commerce sur internet 2011
  

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Section 1. Les freins a lever pour l'émergence d'une

économie numérique

Ils sont de plusieurs ordres : juridiques, techniques et économiques

Sous-section 1. Les enjeux juridiques

43 « Les tablettes ont trouvé un public en 2010, selon GfK », 01.net, 27 janvier 2011

Si le droit de la propriété intellectuelle est relativement bien adapté à l'économie du livre papier, il l'est beaucoup moins à celui du livre numérique. Nous ne soulignerons pas ici les incongruités qui imposent de citer dans les contrats d'édition des dispositions qui ne peuvent s'appliquer aux contenus numériques, comme le tirage par exemple.

Il s'agit d'abord des difficultés soulevées lors de la conversion de la majeure partie des livres, c'est-à-dire globalement à compter de 1995, voire des années 2000 pour les moins prévoyants. En effet, les contrats antérieurs ne prévoyaient pas la cession des droits numériques. Pour pouvoir diffuser des contenus sous la forme digitale, les éditeurs doivent donc régulariser les contrats en établissant un avenant avec chacune des personnes intervenues dans le livre : écrivain, illustrateur, photographes. Cela fait du monde donc et c'est une entreprise titanesque pour les sociétés d'édition disposant d'un fonds important.

Autre problème, celui des oeuvres orphelines, c'est-à-dire les livres dont on ne parvient pas à retrouver les ayants-droits et qui ne sont pas encore entrés dans le domaine public. Dans ce cas, l'éditeur doit-il renoncer à publier sur support numérique ? Le pragmatisme justifierait d'éditer et de consigner la part des droits revenant aux auteurs. Mais alors, si le livre

numérique devient un succès, les ayants droits se feront alors connaître et pourront demander à obtenir en plus des droits d'auteur des dommages et intérêts dont le montant pourrait être préjudiciable à la rentabilité du titre.

Tous ces freins militent pour une remise à plat du droit d'auteur. Il conviendrait par ailleurs d'intégrer l'ouverture d'un débat sur l'entrée des oeuvres dans le domaine public, passé depuis quelques années en France de 50 à 70 ans à compter de la mort de l'auteur. Ainsi, il n'est possible d'éditer librement à ce jour que les oeuvres d'auteurs décédés avant 1941. Ces contenus pourraient pourtant venir enrichir de nouvelles créations éditoriales et permettraient à des pures players de limiter les coûts de production des oeuvres aujourd'hui très élevés. Des voix s'élèvent de plus en plus nombreuses, s'inquiétant des effets de l'extension de la durée de protection des oeuvres, en particulier, la faible incitation à la création et l'attribution de rentes44. En réaction à ce phénomène, un mouvement en faveur du libre s'est constitué, avec pour porte parole, Lawrence Lessig45, juriste américain qui a lancé la licence Creative Commons destinée à mettre les oeuvres à disposition d'une communauté. Celles-ci pouvait être modifiées et rediffusées librement, chaque contributeur abandonnant ses droits exclusifs au profit du suivant. Ces dispositions présentent un intérêt tout particulier pour les ouvrages collaboratifs qui se développent aujourd'hui. Il n'est alors nul besoin d'autorisation pour corriger le livre ou le compléter.

Pourtant, dans le cas d'une oeuvre collective, le choix pour l'éditeur de se placer sous le régime des Creative Commons plutôt que sous celui du code n'est pas forcément plus avantageux. Pour bien comprendre le raisonnement, il convient d'abord de définir ce qu'est une oeuvre collective. Au titre de l'article L. 113-2 al 3 du Code de la propriété intellectuelle: « Est dite collective l'oeuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui

44 L'économie de la culture, Françoise Benhamou, Edition la découverte, collection repères, février 2010

45 Lawrence Lessig, The future of ideas, Random House, New York, 2001

l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé ». Ainsi, un dictionnaire, une encyclopédie ou tout contenu mêlant le travail de plusieurs auteurs de façon telle qu'il est difficile de savoir quelle est la contribution réelle, sont placés sous ce régime. Les effets sont définis par l'article L. 113-5 qui stipule que << L'oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. ». Le législateur ajoute dans le dernier alinéa que : << Cette personne est investie des droits de l'auteur. ». Ainsi, dans cette hypothèse, c'est bien l'éditeur qui est titulaire des droits d'auteur et non pas les contributeurs. Ce qui revient à dire qu'il peut disposer de l'oeuvre, comme il le souhaite, sans avoir à solliciter d'autorisations pour en modifier le contenu.

Les enjeux juridiques étant importants, c'est d'abord la question des oeuvres orphelines qui a été mise à l'honneur tant au niveau européen que français. En Europe, le << Comité des sages », groupe de réflexion sur la numérisation du patrimoine culturel européen, a remis un rapport46 traçant le cadre réglementaire et financier de ce que devrait

être le programme commun des 27 Etats de l'Union Européenne et appelle à l'adoption, aussi vite que possible, d'un texte européen réglementant les oeuvres orphelines.

En France, un accord-cadre sur la numérisation et l'exploitation des oeuvres indisponibles du XXe siècle, signé le 9 février 2011 entre le ministère de la culture, la Bibliothèque nationale de France, le Syndicat national de l'édition et la société des gens de lettres, marque une première avancée dans la prise en compte de la répercussion des évolutions technologiques par le droit. Ce texte va permettre, après adaptation du code de la propriété intellectuelle, une véritable adaptation des droits d'auteur à l'ère du numérique. Les ouvrages encore dans le domaine privé et non exploités entreront sous un régime de gestion collective qui permettra, selon les propres mots du ministre de la culture, de garantir d'une part, le respect des droits patrimoniaux et moraux, d'autre part, la rémunération équitable des ayants droit47.

Dernier point important, celui de l'extension de la TVA au taux réduit aux livres numériques, soit le passage d'un taux de 19,6 % à 5,5 %. L'enjeu est de taille puisqu'il permettrait de réduire le prix du livre, en s'approchant plus sensiblement de celui souhaité par les lecteurs. Bien que cette disposition figure dans l'article 25 de la loi de finances 2011, elle ne s'appliquera théoriquement qu'à compter du 1er janvier 2012. Il est à rappeler que ce vote du parlement a été fait en infraction aux dispositions de la directive 2006/112/CE relative à la taxe sur la valeur ajoutée qui prévoit que c'est le taux normal qui s'applique en matière de livre numérique. Pour que ce texte entre en vigueur, l'État français va devoir mener un travail de lobbying important dans les couloirs de Bruxelles et arracher à ses partenaires un vote à l'unanimité. La mise en oeuvre du taux de TVA au taux réduit n'est donc pas gagnée. En

46 The New Renaissance, Report of the « Comité des sages », Elisabeth Niggemann, Jacques de Decker, Maurice Lévy, Bruxelles, 10 janvier 2011 http://www.livreshebdo.fr/cache/upload/pdf/Rapport%20final%20- %20complet.pdf

47 Discours d'ouverture du ministre de la culture prononcé à l'occasion de la signature de l'accord-cadre sur la numérisation et l'exploitation d'oeuvres indisponibles du XXe siècle le 9 février 2011

outre, cette polémique concerne le livre homothétique, ouvrage reflet du livre papier et non pas le livre enrichi- le livre pluriel contenant à la fois du texte, du son et de la vidéo-. Ce livre application, pourtant aujourd'hui extrêmement cher à développer, gagnerait, plus que le modèle ancien, à obtenir un coup de pouce afin de soutenir des nouvelles formes de création.

Sous-section 2 : les enjeux techniques Paragraphe 1. Les DRM

Les DRM (Digital Rights Management) sont de plus en plus critiqués. Charles Kermarec, propriétaire de la librairie Dialogues à Brest, a déclaré qu'il n'accepterait plus de fichiers protégés, la circulation des livres étant rendues trop complexe et compliquée générant un SAV important. Il souligne ainsi, avec beaucoup de bon sens: «A quoi, à qui ça sert les DRM si ça emmerde les honnêtes gens et que ça ne gêne pas les voleurs? Jouez ce jeu-là messieurs les fournisseurs, mes amis, si ça vous chante. Mais sans ma complicité.». En bref, cela ne fait que des mécontents. En effet, contrairement, à l'achat d'un livre physique, le propriétaire de contenus numériques ne peut en disposer librement, le prêter ou le donner, par exemple.

Pour rassurer les éditeurs et les inciter à diffuser des livres numériques sans protection, plusieurs arguments pourraient être avancés :

- Les DRM accroissent tout d'abord le coût de revient du numérique, puisqu'il est de l'ordre de 3% ;

- Il est très facile pour les pirates de supprimer les DRM. De nombreux tutoriels présents sur internet enseignent aux cyberpirates l'art et la manière de contourner la contrainte ;

- L'une des raisons du piratage serait l'absence d'offre légale de livre numérique. Ainsi,

le livre de Michel Houellebecq a-t-il été massivement piraté, jusqu'à sa mise à disposition sous forme digitale ;

- Le piratage sera limité si les contenus numériques sont proposés à un prix bien inférieur au livre numérique, comme tend à le démontrer une étude conduite par GfK ;

- C'est une incongruité absolue puisqu'il porte obstacle à la portabilité des contenus qui ne peuvent être transférés aisément d'un appareil nomade à un autre.

Pour résoudre cette question qui ne peut l'être que par l'expérimentation, les éditeurs devraient procéder à des tests, en formant deux groupes de livres. Le premier constitué de contenus protégés par DRM et l'autre sans protection.

Le watermarking, c'est-à-dire un système de tatouage numérique du livre, pourrait constituer une bonne alternative.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault