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Régulation et dispositifs de la gouvernance

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par Ali El Ouardi
Université Mohamed V - Master management du développement social 2010
  

Disponible en mode multipage

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Université Mohammed v

Faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales - AGDAL - Rabat

MASTER : Management du développement social

Matière : Libéralisation, Régularisation du développement Social (S2)

Régulation et dispositifs de la gouvernance

Exposé sous le Thème :

Réalisé Par :

Ø Nabil ait sghir

Ø Ali EL OUARDI

Ø Hatim BENAYAD

Ø Hamid EL BERGUI

Ø Abdelhamid NAJAH

Encadré par :

Mr Meslouhi

ANNEE UNIVERSITAIRE : 2010-2011

PROMOTION : 2010-2012

PLAN

Introduction

I.L' Analyse des systèmes de régulation et de gouvernance comme conditions institutionnelles de la mise en oeuvre du développement durable

11. Le rôle de l'analyse des systèmes de régulation et de gouvernance dans l'appropriation du développement durable

12. L'analyse de la gouvernance et des systèmes de régulation aquacoles

II. L'apport de l'analyse des représentations

21. Le rôle des représentations dans l'appropriation du développement durable

22. L'analyse des représentations dans le cas des systèmes aquacoles

23. Les contraintes à l'appropriation du développement durable

24. L'intégration dans les dispositifs de gouvernance territoriale

III. La gouvernance comme régulation

IV. La gouvernance comme approche intégrant coordination et régulation, à l'échelle des secteurs et des territoires

V. Normes, régulation, gouvernance et responsabilité sociale des organisations.

VI. Gouvernance et responsabilité sociale des entreprises

VII. associations du commerce équitable favorisent elles une régulation sociale ou libérale ?

VIII. mites de la régulation privée par les entreprises et les associations

Conclusion

Bibliographie

Introduction

La gouvernance est définie comme le processus qui permet aux acteurs de contextualité le système de régulation et par-là de rendre actionnable la notion de Développement Durable.

La notion moderne de gouvernance est apparue dans le sillage de la mondialisation de l'économie : elle représentait de nouveaux types d'organisation au sein des entreprises. Puis elle est passée du côté des institutions pour définir des dispositifs de régulation de l'action collective.

La gouvernance est définie au niveau européen comme « type of regulation typical of the cooperative state, where state and non state actors participate in mixed public/private policy networks ». Il s'agit aussi de promouvoir des normes communautaires acceptables par des systèmes politiques différents au moyen de procédures non contraignantes.

La gouvernance se réfère au dispositif institutionnel et comportemental régissant les relations entre les dirigeants d'une entreprise - plus largement, d'une organisation - et les parties concernées par le devenir de la dite organisation, en premier lieu celles qui détiennent des « droits légitimes » sur celle-ci, à savoir les actionnaires. Même formulée si généralement et dans le but d'éclairer notre analyse, une telle définition appelle des précisions.

D'abord, la gouvernance est focalisée sur une catégorie d'acteurs de toute organisation: les dirigeants de cette organisation, catégorie réduite parfois à une personne, le plus souvent représentée par un petit groupe fortement hiérarchisé autour du leader, quelquefois exprimée par un réseau semi-hiérarchisé et aux contours mal définis. Quelles que soient les difficultés pour la définir exactement et la circonscrire, c'est cette catégorie d'acteurs dirigeants qui polarise l'attention dans un système de gouvernance.

Ensuite, la problématique de la gouvernance est aussi celle du rôle et du contrôle des mandataires sociaux au sein des personnes morales. Les dirigeants d'une organisation finalisée - société commerciale, établissement public, ... - s'expriment et agissent au nom de cette organisation : a ce titre ils peuvent acheter, vendre, embaucher, licencier etc. Ils disposent pour cela des moyens financiers, matériels, humains qui peuvent être considérables voire démesurés. Les questions relatives à leur nomination comme mandataires sociaux, aux conditions d'exercice de leurs mandats sont, par là, légitimes et font de la gouvernance des entreprises un point essentiel des systèmes de management de ces dernières.

Enfin, le système de gouvernance comprend divers éléments constitutifs que l'on peut, en simplifiant, regrouper en trois séries de composantes : des structures, des procédures et des comportements. On parle d'ailleurs de paradigme SPC et ces trois séries de composantes et leurs interactions définissent les systèmes de gouvernance, leurs modes de fonctionnement et de régulation.

La gouvernance est venue cristalliser un besoin de renouveler les relations entre la société civile et les pouvoirs de décision, quels qu'ils soient.

Au-delà du droit et de la gouvernance, dans le monde numérique, les démocraties devront arbitrer constamment entre deux modèles : une économie close par des régulations enchevêtrées et une économie ouverte par des mécanismes de coordination. Les véritables choix politiques s'inscriront au coeur des dispositifs techno-juridiques qui les actionnent.

I.L' Analyse des systèmes de régulation et de gouvernance comme conditions institutionnelles de la mise en oeuvre du développement durable

11. Le rôle de l'analyse des systèmes de régulation et de gouvernance dans l'appropriation du développement durable

La nature du développement durable, comme système de valeur implique un processus de changement qui doit être progressive. S'agissant « d'une vision des choses et du monde sa traduction en principes opératoires ne va jamais de soi » et implique une évolution « chemin faisant grâce à un nombre infini de petites modifications, sur les marges du système dans une logique de percolation ». Cette progressivité de la mise en oeuvre doit s'accompagner d'un processus de traduction au sens de la sociologique de la traduction qui suppose d'établir des correspondances entre des réalités distinctes en vue de construire des objectifs, de sens communs selon une démarche ou posture de réflexivité des acteurs quant aux principes de justification de leurs actions.

Dès 1996, Lafferty souligne la nécessite de passer d'abord par la traduction de contraintes et d'objectifs globaux dans des actions et des politiques sectorielles et locales, dans un langage et une forme qui soit appropriable par les acteurs en fonction des besoins généraux de la société et non pas d'une institution ou d'un acteur particulier.

La notion de familiarité renvoie en effet à un processus d'apprentissage de proche en proche par la création de mondes hybrides tel que le préconise par Thévenot (1994).

La mise en oeuvre du développement durable doit donc être pensée comme un processus d'hybridation bricolé et de construction progressive de proche en proche de divers domaines qui se renforcent mutuellement et qui interpellent les acteurs dans leurs rôles de citoyens, de parties prenantes, d'usagers de ressources renouvelables, de consommateurs, de travailleurs, d'habitants...

Dès lors que le développement durable est assimilé à une méta règle ou méta norme, son institutionnalisation implique, alors selon Aoki (2006), un processus spécifique car les méta règles qui organisent les règles sont plus difficile à faire évoluer.

Ces dispositifs sont dits cognitifs car ils résument du savoir, en particulier des savoirs tacites encore qualifié de knowledge. A ce titre ils facilitent la capacité d'action individuelle et la convergence des comportements. Par ailleurs ces dispositifs sont collectifs au sens où il s'agit d'un cadre collectif de comportement qui est un savoir procédure constitué collectivement par accumulation d'expériences et communiqué en tant que connaissance commune pour la société pour laquelle il constitue un bien collectif.

La mise en place du développement durable doit s'appuyer sur une définition collective des objectifs poursuivis, ce qui suppose une déclinaison commune des principes généraux en fonction des enjeux spécifiques de l'échelle d'intervention où les actions doivent être mises en oeuvre.

Dès lors le développement durable est nécessairement lié à la gouvernance des territoires qu'il contribue ainsi à faire évoluer vers un renforcement des conditions de participation et d'ouverture qui sont consubstantielles aux principes du développement durable. La prise en compte du développement durable conduit à redéfinir les conditions et les méthodes à la fois en matière d'aide à la décision et d'évaluation

Il apparaît ainsi que le processus d'appropriation du nouveau référentiel qui est introduit par le développement durable est un processus complexe qui suppose plusieurs phases relatives à l'information, l'appropriation et l'institutionnalisation. Il implique une adaptation des procédures, des dispositifs, des systèmes d'information et des mécanismes d'apprentissage institutionnel des acteurs qui passe par des procédures sociologiques de traduction

L'analyse de ces processus nécessite d'appréhender les conditions de formation et d'information de ces acteurs (capital humain), leur intégration dans les réseaux sociaux (capital social) et les formes de prescription et d'influence des cadres normatifs et principes généraux générés par les outils et directives réglementaires et plus généralement par l'influence de la communauté épistémique. Il convient donc d'élaborer une grille d'analyse et d'évaluation institutionnelle des politiques publiques qui permette de rendre compte dans une logique systémique du rôle et de la situation de ces différents facteurs. Dan cet esprit, la figure 1 propose une représentation structurelle des systèmes de régulation à partir desquels les processus de gouvernance peuvent être étudiés. Elle insiste sur l'articulation entre les éléments et conduit à définir trois composantes : le système de décision, le ou les dispositif(s) de mise en oeuvre et le système d'information.

Cette grille d'analyse met l'accent sur les conditions de mise en oeuvre des mesures de régulation, notamment la nature, la légitimité et l'efficacité des institutions qui sont à l'origine ou qui sont chargées de l'application. Les travaux menés sur l'évaluation des politiques publiques dans les années quatre vingt dix ont révélé le fait que les conditions d'élaboration et d'application d'une politique ou d'une mesure sont déterminantes de son efficacité et de son impact. Une mesure de gestion n'est pas efficace dans l'absolu. Son efficacité dépend de son adaptation aux conditions locales mais aussi du montage institutionnel qui la porte.

Dès lors la participation à ces processus et l'ouverture des dispositifs institutionnels où sont définies et gérées ces politiques qui sont au coeur de la problématique de la gouvernance deviennent des questions centrales et conduit à s'intéresser aux comportements des groupes d'acteurs, à leur histoire, à la façon dont ils se mobilisent, à leurs capacités d'apprentissage organisationnel et institutionnel, aux proximités et familiarités avec les objets et référentiels.

Figure 1 Présentation structurelle des systèmes de régulation

Représentation

Système de normes de référence

Système de décision

Réseaux sociaux (capital social des acteurs, légitimité et influence....)

Règles de fonctionnement

(Procédure de vote...)

Cadre institutionnel et outils réglementaires

Types d'acteurs et de participation (niveau d'organisation des acteurs)

Dispositif et outils de gestion de l'information

(Observateurs ou autres dispositifs...permettant la prise de décision et le suivi)

Dispositifs de régulation

Institutions chargés de la mise en oeuvre

Articulation des mesures techniques

Dispositif de contrôle

Savoir faire et information privée des acteurs

Organismes de recherche

Ce type d'approche permet de tenir compte du rôle des réseaux, structurés ou non, d'acteurs localisés sur un territoire donné qui participent directement ou indirectement, de manière légitime ou pas à la gestion du secteur aquacole. Pour ce faire, la grille d'analyse privilégie l'étude :

§ de la morphologie du système acteurs : il s'agit d'identifier les acteurs constitutifs et comment ils sont insérés d'une part dans le système de décision (construit la règle) et dans les dispositif de régulation (applique et contrôle) ; la légitimité de ces d'acteurs étant déterminante pour l'application des mesures ;

§ des interactions entre les dynamiques d'acteurs et celles des informations. Les interactions entre les acteurs s'organisent au travers d'accords, de règles et plus généralement de dispositifs institutionnels et les échanges d'information (générale, technique, stratégique) sont pour partie structurés par ces dispositifs, qu'ils contribuent aussi pour partie à structurer.

Les représentations sociales que nous étudierons plus précisément par la suite ont une influence centrale au sein des systèmes de régulation, elles peuvent agir comme des filtres à deux niveaux : dans la construction et dans l'application des dispositifs de régulation. Cette action dépend du type de gouvernance qui est mise en place.

En effet, le développement durable requiert la mise en place de structures de gouvernance basées sur la participation des acteurs à la prise de décision et à la mise en place des actions. Il implique un nouveau partenariat politique associant un ensemble d'acteurs privés aux côtés des unités décisionnelles publiques.

Cependant à partir des référentiels globaux de développement durable, les acteurs privés ou publics développent leur propre discours sur cette notion avec des compréhensions différentes de la hiérarchie des objectifs, des modes de mise en oeuvre et des solutions à envisager. La participation plus ou moins active des acteurs dans les processus de décision donne une place importante aux représentations sociales dans la mesure où la décision prise sera la traduction des référentiels globaux issus de la convergence des représentations sociales des participants (appréciation des contraintes, des risques, des enjeux....).

D'autre part, l'application des décisions prises au niveau national ou local fait l'objet d'un second filtre par les représentations. Celle-ci dépend aussi de la structure de gouvernance qui a été mise en place en amont c'est à dire dans le processus de décision. En effet, le fait que les acteurs qui doivent appliquer les mesures (instituant et institué) ne soient pas impliqués dans le processus de prise de décision est une source de conflit au niveau de la mise en oeuvre : il peut en effet y avoir à ce moment un écart entre le contenu de la mesure de gestion et l'application de celle-ci. D'où, l'importance du choix des interlocuteurs participant à la prise de décision, il faut que chacun soit représentatif, dans l'arène, des représentations communes à la catégorie d'acteurs qu'ils représentent.

12. L'analyse de la gouvernance et des systèmes de régulation aquacoles

Les systèmes de régulation aquacoles sont constitués par : le système de décision, le ou les dispositif(s) de mise en oeuvre et le système d'information,

Les systèmes de régulation aquacoles sont superposés ou imbriqués avec d'autres systèmes de régulation issus de secteurs proches ou qui peuvent être plus globaux.

Le système de régulation aquacole est imbriqué à celui de la pêche, de l'agriculture, des aires marines protégées,...et au système de régulation national voir international avec des dimensions plus ou moins formelles selon les terrains d'étude.

L'analyse des systèmes de régulation aquacole a porté en premier lieu sur les référentiels existant dans le domaine de l'aquaculture durable, c'est-à-dire le système de prescription qui introduit le processus de déconstruction. Une grille a été établie de façon à appréhender dans quelle mesure ces référentiels étaient en accord avec les principes du développement durable. Cette évaluation a été effectuée de façon qualitative à dire d'expert à partir de huit critères (domaines pris en compte et objet, origine institutionnelle, type de démarche, mode d'action et de participation des acteurs, échelle d'application) renseignés selon trois modalités ordinales.

La recherche et les ONG y jouent un rôle de création et de relais d'information, de dénonciation des problèmes non traités et de mise en agenda. Il s'agit de dispositifs collectifs au sens où ils constituent un cadre collectif de comportement qui correspond à un savoir constitué collectivement et de manière procédurale c'est-à-dire par accumulation d'expériences et communiqué en tant que connaissance commune pour la société pour laquelle il constitue un bien collectif.

Les données collectées lors des enquêtes nous ont permis d'élaborer une typologie des dispositifs de régulation à partir d'Analyses de Correspondance Multiples (ACM) successives (cf. tableau 1).

Tableau 1 : Caractérisation des systèmes aquacoles en fonction des modes de régulation

Système non régulé (logique libérale)

Systèmes peu régulés et de

façon informelle

Systèmes peu régulés et de

façon formelle

Régulation formelle forte

1. Pas d'adhésion à des

organisations

coopératives ou

professionnelles

2. Pas de contraintes

formelles et informelles

3. Pas de contrôle

1. Pas de contraintes

formelles

2. Contrôles peu fréquents

3. Faibles contraintes

informelles

4. Pas d'adhésion à des

organisations coopératives ou

professionnelles

1. Adhésion moyenne à des

associations professionnelles

et coopératives

2. Contraintes formelles

faibles ou moyenne

3. Contrôles peu fréquents

4. Pas de contraintes

informelles

1. Fortes contraintes

formelles

2. Forte adhésion à des

organisations coopératives

ou professionnelles

3. Contrôles réguliers

Les quatre types de système de régulation se différencient selon l'importance des systèmes de régulation associée à une implication de plus en plus forte des dispositifs formels ainsi que conjointement du niveau d'organisation professionnelle du secteur par des institutions formelles qui apparaît ainsi lier au poids des régulations formelles. Notons que l'analyse est réalisée ici indépendant des échelles géographiques auxquelles ces dispositifs correspondent.

L'implication des acteurs à la mise en place du développement durable va dépendre en grande partie de l'adéquation entre les normes ou injonctions en la représentation que les acteurs se font du bien fondé des mesures et de leurs capacités à les mettre en oeuvre.

II. L'apport de l'analyse des représentations

21. Le rôle des représentations dans l'appropriation du développement durable

La vitesse à laquelle des nouvelles réglementations vont être appliquées et surtout constituer un nouveau référentiel ne dépend pas seulement de leur « justesse » ou de leur légitimité mais aussi de la façon dont les différents acteurs vont se les représenter à la fois comme guide d'action et comme référence.

Ces comportements dépendent à la fois de la situation des agents mais surtout des représentations qu'ils se font de la réglementation et de leur place dans la nouvelle situation. D'où la nécessite pour comprendre la vitesse d'acceptation et de mise en place du Développement Durable, d'étudier les représentations que les acteurs se font du Développement Durable et de son application. Nous faisons l'hypothèse que l'analyse des représentations nous permettra d'explorer les relations et les tensions au sein du système de régulation et les conditions d'adaptation de la gouvernance aux nouveaux enjeux du développement durable. A priori, ces relations et tensions s'expriment à tous les niveaux, elles sont multiples et d'origines variées et complexes. L'hypothèse issue de notre expérience et des observations de terrain est que la mise en place du

Développement Durable, comme nouveau référentiel de gouvernance locale, suppose un changement des représentations et des pratiques des acteurs à propos de leur métier et de leur place, ce qui nécessite des changements organisationnels et l'élaboration collective d'une définition du développement durable ainsi que d'une stratégie quant aux modalités de son appropriation et de son intégration dans les pratiques.

Les représentations sont définies comme « des formes de connaissance, socialement élaborées et partagées, ayant une visée pratique et concourrant à la construction d'une réalité commune à un ensemble social » (Jodelet, 1989). Il s'agit d'une forme de savoir pratique de sens commun qui permet aux acteurs d'agir en fonction de la vision qu'ils se font du monde. Elles sont constituées d'opinions, d'informations, de croyances, d'images... c'est-à- dire un assemblage de références sémantiques et cognitives activées dans un contexte, selon les finalités et les intérêts des acteurs sociaux qui s'en servent pour communiquer, comprendre, et maîtriser l'environnement. Les représentations sociales, élaborées par des individus, sont partagées par des groupes plus ou moins vastes pour lesquelles elles assurent une cohésion identitaire collective. Elles constituent des systèmes de compréhension et d'interprétation de l'environnement social et d'évaluation des comportements qui définit des modèles d'action de référence.

On s'intéresse en particulier ici à la façon dont le développement durable peut permettre de faire évoluer l'inscription territoriale et sociale du secteur aquacole dans les territoires qu'il exploite. Ce processus d'appropriation local et territorial du développement durable nécessite des dispositifs spécifiques de traduction, d'intéressement et d'enrôlement des acteurs qui conduisent à rechercher des cohérences entre leurs logiques et leurs temporalités. Il s'agit comme l'énonce Jodelet (1989) « de faire du neuf avec de l'ancien », c'est-à-dire que le processus d'évolution des représentations nécessaire à cette convergence entre les acteurs suppose d'abord une phase de déconstruction préalable. La figure suivante résume ainsi le processus en quatre grandes étapes qui génèrent des questions de recherche spécifiques à chacune des étapes.

Ce cadre d'approche permet d'étudier précisément les facteurs déterminants du processus d'appropriation du développement durable au travers de cinq entrées complémentaires :

1.- Les spécificité de l'objet : ce n'est pas la nature de l'objet qui en fait un objet de représentation mais plutôt son statut social. Ainsi dans notre cas l'aquaculture et le développement durable sont des objets de représentation car ils font l'objet de controverses, de luttes de pouvoir et d'un travail de redéfinition...

2.- Les caractéristiques du groupe : il faut en étudier la composition, le mode de fonctionnement collectif et de communication car les représentations sociales sont des connaissances produites collectivement et contextualisées.

3.- L'absence d'orthodoxie : ce n'est pas un individu mais le collectif qui fabrique la représentation par un processus complexe qui est constitué des controverses, de conflits...

4.- Les enjeux : quels sont les enjeux identitaire et de cohésion associés à l'aquaculture et au développement durable de ce secteur et des territoires où il est implanté ?

5.- La dynamique sociale (interne et externe) : quelles sont les interactions avec les autres groupes ? Et comment sont structurés les réseaux sociaux ?

22. L'analyse des représentations dans le cas des systèmes aquacoles

Accéder aux représentations n'est pas aisé car il s'agit de comprendre le « modèle d'action » des acteurs et non le « modèle de justification » qu'ils ont tendance à énoncer de premier abord dans les entretiens. Pour l'analyse des systèmes aquacoles, des enquêtes spécifiques ont donc été mises en oeuvre en vue de répondre à deux objectifs :

§ Une visée descriptive dans le but de rendre compte des représentations que les acteurs se font du développement durable et de la façon dont celui-ci peut être traduit dans les systèmes de production,

Ce cadre d'approche permet d'étudier précisément les facteurs déterminants du processus d'appropriation du développement durable au travers de cinq entrées complémentaires :

1.- Les spécificité de l'objet : ce n'est pas la nature de l'objet qui en fait un objet de représentation mais plutôt son statut social. Ainsi dans notre cas l'aquaculture et le développement durable sont des objets de représentation car ils font l'objet de controverses, de luttes de pouvoir et d'un travail de redéfinition...

2.- Les caractéristiques du groupe : il faut en étudier la composition, le mode de fonctionnement collectif et de communication car les représentations sociales sont des connaissances produites collectivement et contextualisées.

3.- L'absence d'orthodoxie : ce n'est pas un individu mais le collectif qui fabrique la représentation par un processus complexe qui est constitué des controverses, de conflits...

4.- Les enjeux : quels sont les enjeux identitaire et de cohésion associés à l'aquaculture et au développement durable de ce secteur et des territoires où il est implanté ?

5.- La dynamique sociale (interne et externe) : quelles sont les interactions avec les autres groupes ? Et comment sont structurés les réseaux sociaux ?

23. Les contraintes à l'appropriation du développement durable

Les résultats des enquêtes témoignent d'une diversité de point de vue des aquaculteurs : ils n'ont pas de représentation commune de ce qu'est leur métier.

Cette situation peut résulter d'un individualisme culturel et historique et/ou du caractère géographiquement dispersé de l'activité, et/ou encore du manque de structuration professionnelle... Ces différences de représentation s'accentuent lorsqu'on compare les réponses des professionnels avec celles des autres acteurs.

Cet écart est classique et recouvre la distinction faite par Carroll entre les parties prenantes qualifiées de primaires ou contractuelles (acteurs en relation directe et contractuellement définie dans une conception partenariale explicite), et celles dites secondaires ou diffuses qui associent l'ensemble des acteurs constituant l'environnement au sens large de l'entreprise avec un partenariat implicite, voire dans certains cas conflictuel. Cette question des liens plus ou moins « lâches » entre acteurs recouvre la problématique de l'encastrement et du partage des représentations et des informations dans un contexte où l'élargissement des parties prenantes conduit à une multiplication des valeurs et des représentations en présence.

Les différences de représentation entre acteurs introduisent des divergences dans les dispositifs (forums, arènes, institutions...) de coordination visant à définir les modalités de l'institutionnalisation décentralisée du développement durable. Du fait du rôle des représentations dans les processus de décision, leur convergence ou articulation constitue un atout pour la coordination des acteurs. Dans le cas de l'aquaculture, les acteurs se situent dans des arènes plutôt conflictuelles (Méditerranée, Bretagne) ou plutôt de cohésion (Indonésie, Cameroun, Philippines).

Ces distinctions recoupent une partition entre pays en voie de développement et pays développés qui correspond aussi à des degrés différents d'importance des systèmes de régulation formels et des conflits entre usages au sein des territoires aquacoles. Dans le premier cas les visions des acteurs s'opposent entre une activité polluante et une activité contribuant au maintien de la qualité des paysages ou jouant un rôle de sentinelle. Bien entendu comme on l'a souligné ces perceptions sont fonctions du statut des parties prenantes.

Les premiers voient l'activité comme une activité polluante provoquant des conflits d'usage (ressources et espaces) et les autres la voient comme participant à la qualité des paysages et de l'eau (sentinelle). Cependant, il existe une représentation commune partagée quant au fait que l'aquaculture a un rôle social fort en termes de sécurisation alimentaire et de cohésion sociale.

Au total l'analyse de ces résultats témoigne de l'absence de vision commune et/ou d'un manque de structuration professionnelle des producteurs alors que ces deux facteurs, par ailleurs fortement interactifs, constituent d'après notre hypothèse des conditions déterminantes pour l'appropriation du développement durable.

Le manque de structuration du secteur (organisations administratives et professionnelles, syndicats, ...) constitue une contrainte en termes de transparence du secteur c'est à dire que l'information est souvent incomplète et peu partagée.

D'un point de vue dynamique la participation des acteurs à ces arènes peut conduire à faire évoluer leurs représentations individuelles, lorsqu'elles ne sont pas fortement conflictuelles et créer un processus progressif de rapprochement de proche en proche favorable à la convergence des représentations individuelles par rapport à une représentation médiane collectivement construite. La formation et l'apport d'information peuvent aussi contribuer aux processus d'apprentissage collectif et permettre d'établir un diagnostic partagé sur un problème d'intérêt global.

24. L'intégration dans les dispositifs de gouvernance territoriale

Le développement durable de l'aquaculture doit aussi être appréhendé à l'échelle des territoires où elle est implantée dans une approche de gestion intégrée à l'échelle des écosystèmes intégrant l'ensemble des usages et activités présents.

Cette échelle locale territoriale est en effet le niveau le plus opérationnel pour la mise en oeuvre du développement durable. Ainsi tandis que Theys évoque la notion de double dividende du local,

C'est en effet à l'échelle locale que l'on peut le mieux étudier les interactions sectorielles et les impacts entre nature et société et les synergies et articulation entre les mesures des diverses politiques publiques existantes, notamment les incitations économiques et les législations en faveur de la protection des espèces et de leurs habitats, des ressources en eau...

Concernant le littoral on prône ainsi depuis le sommet de Rio la mise en oeuvre d'un Gestion Intégrée des Zone Côtières qui vise à appliquer les principes du développement durable au littoral. Ces politiques de GIZC se développent quelles que soient les zones et les pays, notamment en Europe à travers une recommandation du parlement et du conseil (UE, 2002) et en France avec un programme expérimental par la DIACT (DATAR, 2004).

A travers l'analyse de ces dispositifs de gestion intégrée du territoire, il est possible d'étudier les efforts d'application du développement durable au niveau local. L'existence et la forme que prennent ces dispositifs sont le reflet de la traduction de la gouvernance à un niveau local. Ce sont des arènes de transmission de l'information, de négociation ou de concertation, et de réflexion commune sur l'aménagement intégré d'un territoire. Selon leur type et les modalités de leur application, ces structures, qui sont plus ou moins institutionnalisées et formalisées impliquent plus ou moins largement les parties prenantes. Elles concrétisent les changements institutionnels qu'implique le développement durable et nécessitent l'apprentissage de nouvelles formes d'actions collectives par les acteurs, notamment par la mise en place de forums pour organiser la concertation autour de cette planification territoriale.

Cette nouvelle logique d'intégration territoriale conduit progressivement l'aquaculture, à passer d'une logique sectorielle, voire de filière, à une logique de gestion intégrée et territorialisée. Il s'agit alors d'étudier les modes d'intégration de l'aquaculture dans ces dispositifs ou plus généralement les conditions de dialogues territorial de l'activité avec les autres activités et usages.

La réglementation européenne en matière de gestion intégrée est pour l'instant plus une prescription qu'une réalité. En France les professionnels sont actuellement trop éclatés géographiquement pour peser dans ces arènes locales et leur image auprès du public et des institutions locales en matière d'environnement est souvent, et pas à juste titre, très dégradée. Cette situation d'éclatement géographique est quant à elle pour partie le résultat des contraintes tenant à l'obligation des études d'impacts environnementaux dans le cadre des procédures «Installation Classée Pour l'Environnement (ICPE)» qui limitent les extension ou les nouvelles implantation dans un contexte de très forte pression urbaine et touristique.

L'organisation professionnelle et le dialogue avec les institutions reste national et très sectoriel dans le cas de la France et les voies de représentation des professionnels à l'échelle locale restent à inventer. Enfin le cas des Philippines est la représentation des contextes où les systèmes de régulations sont peu développés et/ou encore informels. Le secteur est important et pourrait potentiellement peser dans l'aménagement territorial, mais les contours et les dispositifs du dialogue territorial qui pourrait porter ces politiques d'aménagement territorial sont inexistants. Chacune de ces situations illustrent à sa façon le besoin d'agir conjointement à la fois sur les dispositifs de gouvernance locale et sur les niveaux et formes d'organisation professionnelle de façon à intervenir dans ces dispositifs.

III. La gouvernance comme régulation

1. De la gouvernance- coordination à la gouvernance régulation


·Les mécanismes de coordination (marché, hiérarchie, État, communauté, association et réseau) occupent des places variables

-Dans le temps, régulation plutôt concurrentielle au XIXe siècle, puis régulation dite monopoliste au XXe, puis libéralisation des marchés

-Dans l'espace, économie libérale de marché (pays anglo-saxons) et économie coordonnée de marché (Europe continentale)- voir typologie des États providences et des modèles de développement.


·L'importance, le rôle et la combinaison des divers mécanismes de coordination sont en grande partie favorisés voire déterminés par le cadre institutionnel ou encore ce que nous appelons la gouvernance régulation

2. Définition de la gouvernance régulation


·La gouvernance comme régulation comprend « l'ensemble des modalités institutionnelles réagissant les interactions d'acteurs dont les activités contribuent à la réalisation d'objectifs relevant de l'IG » .


·Ces modalités institutionnelles relativement rigides comprennent des lois, des structures, des règles administratives, des normes institutionnelles, mais également les mécanismes et procédures présidant à leur production


·Ces modalités assurent la régularité du système productif et celle du système de l'État-providence en définissant les grandes missions et en assurant principalement la répartition :

1. du pouvoir des parties prenantes (y compris leur reconnaissance)

2. des ressources (y compris les grands paramètres des services)


·Diversité des formes de gouvernance régulation: hiérarchique bureaucratique, marché, communautariste et partenariat.

Quelques types de gouvernance comme régulation

 

Hiérarchique bureaucratique

Néolibéral

Partenarial

Gouvernance

Hiérarchique (étatique)

Compétitive marchande

Partenariale distribuée

Intérêt général

Biens publics (BP) définis par Etat

Agrégation de biens privés

BP incluant les biens collectifs

Etat

interventionniste

Minimal

Facilitateur

Marché

Régulé

Autorégulation-m

Reconnu

Société civile (Association)

Résiduelle (Tutélaire)

Compassion+philanthropie (sous traitante)

Pleine reconnaissance (partenariat)

Elaboration des politiques

Administration publique et experte

Influence des réseaux et lobbys

Partenariat et + ou - co-construction

Mise en oeuvre des politiques

Administration publique- propriété publique

Contrats, concurrence, régulation incitative place au privé, NPO

Coproduction, régulation de la qualité, des prix, quasi marché, PPP

Administration Publique

Traditionnelle (type webernien)

New Public Management

Vers New public value

3. Modalités actuelles de changement institutionnel ...


·Conversion des institutions existantes (changement interne apparemment périphériques), nouveaux objectifs et nouveaux contenus


·Sédimentation : superposition de nouveaux arrangements mais sans destructions des anciens dans un même champ, on contourne ce que l'on ne peut changer, l'ensemble apparemment inchangé, le neuf entre en concurrence avec l'ancien (ex. système public de retraite au Canada)


·Recomposition: établissement de relations nouvelles entre institutions existantes et souvent nouvelle, complémentarité ou hiérarchie (basculement dans l'ordre)


·Conversion, sédimentation et recomposition peuvent se conjuguer pour renforcer leur effet de transformation, des changements mineurs peuvent conduire à des changements plus importants qu'on aurait refusé (apparente continuité)


·Veille stratégique et vigilance politique, y compris pour les petits changements institutionnels

IV. La gouvernance comme approche intégrant coordination et régulation, à l'échelle des secteurs et des territoires

Ø Notion de régime de gouvernance


·Un régime de gouvernance réunit

1. Les divers acteurs impliqués dans la réalisation de l'intérêt général (privé, public, économie sociale), d'où la question de la gouvernance (combinatoire)

2. Les mécanismes pour l'élaboration des politiques

-Moniste: technocratie et structure corporatisme

-Pluraliste: réseaux et partenariat

3. L'instrument de mise en oeuvre de politiques publiques

-Instruments qui contraignent (règles)

-Instruments qui incitent (financières ou autres)

-Instruments qui informent (convaincre)

 

Acteur (s)

Elaboration des politiques

Mise en oeuvre des politiques

Régime gouvernance publique

publique

technocratie

Administration publique et propriété publique

Régime gouvernance corporatiste

Publique (non lucrative)

corporatisme

Régulation tutélaire, tierce partie

Régime gouvernance concurrentielle

Publique (non lucrative)

Réseaux de politiques publiques

Contrats, appels d'offre régulation incitative

Régime gouvernance partenariale

Publique (non lucrative)

Partenariat institutionnalisé (parties concernées)

Gouvernance distribuée, autonomie régulation des prix et produits qualité

Ø Régime de gouvernance territoriale


·Éléments d'un régime territorial de gouvernance

-Les acteurs reconnus et engagés (publics, ÉS, privé)

-Les organisations mises en places

-Les formes institutionnelles


·Approche intégrée du développement territorial

-rendre compte des relations de pouvoir, des modes d'élaboration de l'accord local, des coalitions et des formes de démocratie (I) --régulation

-appréhender les dimensions des modalités de l'action publique territorialisée, la confiance entre acteurs, la définition des problèmes publiques, l'articulation économie, social, culture (O) -- coordination

Territoire

Régime de gouvernance

Territoire d'agglomération

(ressources génériques)

(proximité géographique)

Régime de gouvernance concurrentiel

Repose sur le marché et la concurrence, faible interaction

coprésence+faible interaction

Territoire d'agglomération

(ressources spécifiques)

(proximité géographique+proximité organisationnelle)

Régime de gouvernance public

Repose sur l'administration publique et l'intervention de l'Etat, accumulation de connaissance dans un domaine donné

coprésence+faible interaction

Territoire de spécification

(ressources spécifiques et grande capacité d'innovation)

(proximité géographique+ proximité organisationnelle+proximité institutionnelle)

Régime de gouvernance partenarial

Repose sur le partenariat entre acteurs privés, publics et société civile (et mise aussi sur l'économie plurielle et les ressources spécifiques

Capacité d'innovation+adaptation

V. Normes, régulation, gouvernance et responsabilité sociale des organisations.

Dans de nombreux domaines relatifs aux marchés et aux organisations, on constate l'émergence, au niveau national et international, de systèmes de régulation hybride associant une diversité d'acteurs et articulant ce qui relève de l'obligation et ce qui résulte de l'action volontaire. Cela est notable en matière d'information comptable et financière, de gouvernance et de responsabilité sociale des organisations.

Sans remettre totalement en cause cette évolution, la crise financière et économique de 2008 et 2009 a montré dans le domaine de la normalisation comptable internationale les limites de la gouvernance de l'IASB, régulateur mondial privé sans contrôle politique ultime. Par ailleurs l'évaluation à la juste valeur des instruments financiers, prévue par la norme IAS 39, a été considérée, notamment par les banquiers comme un facteur aggravant de la crise financière.

Celle-ci renouvelle les problématiques de recherche sur l'évaluation des actifs selon les caractéristiques des modèles économiques des activités, notamment dans le secteur bancaire, (juste valeur vs coût amorti) et  sur la prise en compte dans les états financiers des risques ou phénomènes extrêmes.

Tout en intégrant ces problématiques, le CRC poursuivra ses travaux sur la régulation comptable selon une triple perspective : l'étude des organismes de normalisation, notamment l'IASB, dans le but de mieux comprendre le mode et les déterminants de la prise de décision ; l'impact économique, juridique, social et politique du processus de convergence internationale sur les systèmes nationaux de normalisation comptable, l'analyse des normes internationales tant du point de vue conceptuel que de leur conséquences économiques. Dans cette perspective on engagera une recherche sur la question de la pertinence de l'approche par le bilan, sous-jacente aux normes IFRS, par rapport à celle du bilan pour répondre aux besoins et attentes des utilisateurs et mesurer la performance de l'entité.

Dans les domaines de la gouvernance et de la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE), le CRC approfondira l'analyse critique de la vision actionnariat en développant dans une perspective pluridisciplinaire ( économie, droit, gestion) les conditions et les modes d'une régulation de l'entreprise comme entité vs communauté d'actionnaire. Enfin, il engagera des travaux sur le rôle et les limites de la normalisation de l'information comptable en matière de régulation de la RSE ainsi que sur le jeu des différents acteurs participant à cette régulation. Il poursuivra ses travaux  sur l'impact de la RSE sur les performances économiques et financières des entreprises.

Les recherches menées par le CRC sur la gouvernance et la  RSE peuvent éclairer  sous des angles différents mais complémentaires la constitution et les effets du système de régulation en émergence. Elles peuvent également apporter une contribution à l'étude de la notion et de l'évaluation de la performance globale ainsi que du management par la valeur substantielle, intégrant dans une certaine mesure les intérêts des différentes parties prenantes, par opposition au management par la valeur financière pour les actionnaires.

VI. Gouvernance et responsabilité sociale des entreprises

Les recherches menées sur ce thème ont en commun une conception partenariale de la gouvernance pour traiter des sujets tels que ceux de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), de la performance sociale, et de l'investissement socialement responsable (ISR).

La performance sociétale est analysée sous l'angle de son construit. Les enjeux stratégiques de la mesure de cette performance sont évalués selon les différentes méthodologies de recherche développées (Déjean et Gond 2004).

L'analyse de ce construit est par ailleurs resituée au regard de la diversité des systèmes économiques et des caractéristiques des différents systèmes capitalistes (Igalens, Déjean et El Akremi, 2008).

Les recherches portant sur l'étude de la construction sociale du marché de l'ISR en France s'intéressent à l'émergence de ce marché, sa construction progressive (Déjean, 2005 ; Déjean, 2006 a et b), son entrée dans le monde de la finance (Chambost et Benchemam, 2009) ainsi qu'à la question de la caractérisation des fonds ISR (Déjean, 2008).

L'analyse critique du modèle de la gouvernance actionnariale s'opère au travers de recherches afférentes à la régulation de l'entreprise comme entité, croisant les concepts et instruments issus de l'économie, du droit et de la gestion (Biondi et Suzuki, 2007), et confrontant les fondements de ce modèle avec le fonctionnement des marchés financiers (Biondi et Chambost, 2008)

VII. associations du commerce équitable favorisent elles une régulation sociale ou libérale ?

Un droit international du travail existe, mais on peut observer néanmoins de nombreuses infractions dans ce secteur (OIT, 2002). C'est pourquoi, on peut considérer que l'Etat de droit au plan international reste encore très peu développé, en comparaison de celui des pays les plus industrialisés.

Dans cette logique, la création de l'Etat de droit, au plan international, permettrait ensuite la mise en oeuvre d'une «politique de type providentiel», au sein des organisations internationales publiques.

L'historien et sociologue Charles Tilly (1986) ont cherché à montrer comment les mouvements sociaux se sont politisés graduellement dans l'histoire. C'est, notamment, le résultat de mobilisations qui permet, en s'appuyant sur la loi, d'obtenir des avancées auxquelles l'usage du contrat de travail n'avait pas permis d'accéder. Cela correspond à la construction progressive du droit social.

En France, les grands conflits du travail (Accords de Matignon, négociations de Grenelle) font plus spécialement appel à l'Etat, pour parvenir à une solution. Ils sont «inséparables de la construction de l'Etat social,» souligne Erik Neveu (2000) dans sa théorie des mouvements sociaux.

Gramsci définit la société civile comme «l'ensemble des organismes vulgairement appelés privés... et qui correspondent à la fonction d'hégémonie que le groupe dominant exerce sur l'ensemble de la société». Dans ce sens, le secteur privé n'est pas confiné au champ économique, ni à la vie familiale, mais à l'ensemble des rapports sociaux.

Selon Santa Ana (1999), la société civile devient ainsi le lieu où une classe sociale (ou une alliance de classes) construit son hégémonie. Ainsi, à l'intérieur de la société civile, les classes populaires luttent contre certains médias, associations de représentants d'entreprises ou autres groupes de pression afin de réorienter la direction idéologique et politique hégémonique, par une action contre hégémonique de la société civile.

L'hégémonie se définit comme un «processus de direction politique et idéologique reposant sur une alliance de classe» (Buci-Glucksmann, 1999 : 533-535).

Certaines ONG, militant pour le respect des normes sociales et de relations commerciales équitables, mènent une action «contre hégémonique» selon l'expression du néo-gramscien Robert Cox (1996). Elles cherchent à réguler l'orientation politique et idéologique hégémonique de la société en transformant notamment les valeurs et les normes, afin de fonder une nouvelle forme de régulation des relations industrielles, du plan local au plan international.

VIII. mites de la régulation privée par les entreprises et les associations

Pour les néolibéraux, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) consiste-t-elle simplement à donner des repères éthiques aux acteurs du marché, afin de ne pas laisser croître l'intervention et les règles des pouvoirs publics ? Pour les partisans de la "social-démocratie", notamment, serait-ce plutôt la mise en oeuvre de moyens d'actions, de repères plus précis ou de nouvelles instances de régulation publique visant un développement de l'économie respectueuse de la dimension sociale et de l'éthique ? La RSE véhicule une vision très normative de l'économie, dans la mesure où elle suppose que les entreprises ont un devoir de responsabilité morale. Or, pour les partisans les plus radicaux de l'Etat libéral tel Milton Friedman, l'entreprise ne devrait être responsable que devant ses actionnaires. Pour certains libéraux plus modérés, la mise en oeuvre de certaines règles sociales est un minimum nécessaire à la pérennité à long terme du système capitaliste.

La notion de responsabilité sociale d'entreprise (l'éthique d'entreprise) se fonde sur l'hypothèse que la dynamique interne, la régulation par les acteurs privés, si elle est suffisamment développée, peut supplanter la dynamique externe, la régulation publique (le respect des valeurs et des normes par la loi) (Capron, 2000). Les partisans de l'Etat social, de la régulation à dominante publique n'adhérent pas à cette approche. Ils estiment que, bien que la RSE puisse être bénéfique, il paraît très insuffisant de laisser, à la seule responsabilité des entreprises, la résolution des problèmes sociaux. En effet, il est indispensable, selon eux, qu'un acteur indépendant et disposant de la capacité de sanction puissent en limiter les infractions.

Dans cette perspective, l'idée d'une RSE peut s'avérer néfaste, dans la mesure où elle véhicule l'idée qu'une autorégulation des acteurs économiques privés est possible, dans le domaine des droits sociaux. Or, nous verrons par la suite que les tentatives actuelles d'autorégulation, via les codes de conduite, dans le domaine des normes fondamentales du travail, s'avèrent relativement inopérantes.

Les ONG, qui s'intéressent à la question éthique et équitable, l'envisagent en développant en priorité la régulation des normes sociales par le public, en la démocratisant. A travers les différents instruments de contrôle citoyen de l'économie qui sont qualifiés aussi d'instruments d'éthique, les ONG entendent mettre en oeuvre concrètement ce qui reste un idéal ou des discours volontairement vagues, sur la régulation des normes sociales, au plan international notamment. Mais, dans la mesure où les codes de conduite et labels relèvent d'une régulation par les acteurs privés, les ONG qui les utilisent pourraient échouer et participer finalement à une orientation opposée à leur but initial.

Conclusion

L'analyse des conditions et modalités de l'appropriation du développement durable dans le cas de l'aquaculture montre l'importance des apprentissages sociotechniques et organisationnels.

La gouvernance apparaît ainsi intrinsèquement liée au développement durable dont elle constitue en quelque sorte le 4ième pilier. Diverses modalités, démarches et procédures facilitatrices de ce mécanisme de traduction du développement durable peuvent être envisagées.

Ces démarches doivent être portées par des collectifs d'acteurs à l'échelle des territoires en s'appuyant sur des référentiels généraux. On retrouve là le caractère non fractal du développement durable évoqué par Godard (1997) et Godard et Hubert (2002) qui proscrit toute démarche homothétique, centralisée et autoritaire d'application de principes généraux.

Les spécificités du processus d'apprentissage que nous avons évoquées supposent des interactions entre les actions descendantes de diffusion prescriptives des référentiels avec des actions ascendantes d'appropriation à travers son intégration progressive dans divers projets.

En étudiant les représentations des aquaculteurs à propos du développement durable et de ses conséquences au niveau de leur système de production nous avons voulu comprendre le processus de contextualisation des règlements et en particulier les dispositifs de gouvernance du développement durable.

Il s'agit de veiller au caractère collectif du processus de gouvernance, notamment sur le fait que les dispositifs favorisent l'équité et la représentativité des acteurs de façon à ce que la définition collective des principes de développement soit l'expression de la construction «d'un bien commun issu d'un idéal porté par les acteurs du territoire », et ceci malgré l'existence d'importants différentiels de poids et de représentation entre les acteurs.

Le développement Durable devrait se transformer dans une sorte de « mythe organisationnel » pour le secteur aquacole mais sous condition d'une organisation collective et de la construction d'une vision commune de ce que doit être le métier d'aquaculteur. Sans cela la gouvernance locale ne restera qu'un voeu pieux.

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