Quatrième partie: Discussion et conclusion.
Chapitre 1. Discussion.
Les résultats présentés sont
analysés de façon globale. Chaque phase de
l'expérimentation est venue apporter des renseignements
complémentaires. Cette vision globale permet de déterminer la
nature des facteurs responsables des phénomènes observés.
Nous en déduisons les indicateurs les mieux adaptés selon le type
de situation rencontré.
1.1. Choix des indicateurs de fertilité.
Les sols de la zone d'étude présentent des
caractéristiques qui limitent l'interprétation des données
chimiques et physiques usuelles pour la mesure de la fertilité.
L'expérimentation que nous avons effectuée nous permet
d'établir un lien entre trois facteurs qui conditionnent la conservation
des sols en mileiu tropical sec. Ces trois facteurs sont, l'infiltration de
l'eau, le bilan organique et le développement végétal. Ce
lien est établit par la faune du sol.
1.1.1. Action de la qualité des eaux usées
sur la fertilité physique des sols.
L'évolution de la structure des sols en surface est le
phénomène responsable de la baisse des rendements sur les
parcelles témoins en mars 1993. Il s'accompagne d'une baisse du stock
organique et minéral des sols.
Ce constat n'a pu être corrélé avec une
diminution des rendements sur les parcelles traitées ou sur les zones de
friche. Cette similitude de comportement entre ces deux modes de gestion de la
fertilité peut être expliquée. L'irrigation avec des eaux
usées favorise les mêmes processus de conservation des sols que
ceux qui permettent la régénération naturelle de la
fertilité.
L'indicateur faune des sols est sensible à la
composition des eaux d'irrigation. Il évolue de façon
parallèle sur les parcelles irriguées par des eaux usées
et les zones de friche.
La restauration de la fertilité du milieu
constatée au cours de la deuxième phase nous permet de donner
à la faune des sols un rôle prépondérant dans
l'amélioration de la fertilité physique des sols sans pouvoir en
détailler les mécanismes.
L'expérimentation met en évidence trois impacts
de l'eau sur la fertilité physique des sols. Ces impacts
dépendent de la composition des eaux.
Nous discuterons quels sont les indicateurs les plus
représentatifs de chacune de ces situations en analysant cas par cas les
mesures effectuées.
Premier cas: Formation d'une croûte structurale avec
augmentation du temps d'infiltration corrélée avec une diminution
des effectifs des populations édaphiques.
Un horizon de surface imperméable, lié à
une destructuration du sol, est observé dans les sols irrigués
par les eaux de barrage. La comparaison des résultats d'analyses des
stocks organiques montre une différence entre les témoins et les
traités. Dans le cas de l'essai en milieu contrôlé, les
eaux du réseau présentent le même problème
d'infiltration. Mais la baisse du taux de carbone n'est pas apparente.
En favorisant le développement animal par des mode de
culture ad hoc, nous avons permis une restauration partielle de la
diversité biologique. Nous constatons une amélioration des
conditions hydriques au travers des temps d'infiltration mesurés sur une
année.
Nous en concluons que la protection des sols contre la
formation de microhorizon de surface fait appel à des processus
dynamiques d'origine biologique. En mesurant les effectifs de la faune des sols
on enregistre l'aptitude du sol à reconstituer sa structure
malgré les modifications provoquées par l'eau.
Les techniques culturales privilégient l'action
physique de l'eau (mobilisation des particules et rejaillissement) sur la
structure du sol (Cazenave et Valentin, 1989) en limitant le
développement animal. Cette action est d'autant plus importante que
l'irrigation s'effectue en saison sèche. Nous pensons qu'à moyen
terme, la pratique de l'irrigation avec des eaux usées peut conduire a
une réduction de l'infiltration si les pratiques culturales ne sont pas
modifiées ainsi que nous l'avons proposé.
L'indication obtenue par la mesure des paramètres de la
fertilité chimique a dans ce cas une portée limitée. La
mesure du temps d'infiltration et/ou des effectifs des populations animales est
plus adaptée et permet d'associer l'évolution des rendements
à celle d'indicateurs de fertilité précis.
Deuxième cas: Diminution du temps d'infiltration non
corrélée avec la présence d'une faune
développée.
Dans l'essai en milieu contrôlé, ce sont les
effluents provenant du premier bassin de lagunage qui illustrent ce cas.
L'amélioration de l'infiltration peut avoir deux causes. La
première est liée à la présence de matières
en suspension dans les eaux. Celles-ci en se déposant à la
surface du sol limitent la réorganisation des particules
minérales en surface. L'eau peut ainsi s'infiltrer dans le sol. La
deuxième cause est une destructuration en profondeur du profil due
à une minéralisation de la matière oragnique. Cette
destructuration conduit à un lessivage des fines ce qui améliore
la porosité de ces sols ferrugineux texture grossière.
L'analyse chimique du sol qui subit ce traitement montre une
rapide diminution des stocks organiques et minéraux. Nous attribuons ce
phénomène à une minéralisation du stock de
matières organiques des sols en condition anaérobie. Cette
minéralisation est rendue possible par la présence de nutriments
dans les eaux. La diminution des stocks organiques met en évidence le
risque d'une destructuration du sol (Feller, 1994). La faible capacité
d'échange mesurée serait liée au lessivage des fines,
à la diminution du taux de substances humiques et à la migration
des éléments nutritifs en profondeur. L'évolution de la
fertilité chimique des sols selon un gradient de profondeur est alors
une indication utile permettant de suivre cette migration.
Dans ce cas, une analyse microstructurale associée
à la mesure de l'évolution de la texture du sol en effectuant
des prélèvement selon un gradient de profondeur à de
faibles intervalles (2 à 5 cm)
auraient été les moyens les mieux adaptés
pour déterminer si les mécanismes responsables de
l'amélioration de l'infiltration sont liés à des processus
de destructuration du sol en profondeur (lessivage des fines).
L'information obtenue par les indicateurs de la
fertilité chimique du sol est efficace, celle obtenue par la mesure des
effectifs des populations animales ou par la mesure du temps d'infiltration est
de portée limitée.
Troisième cas: Diminution du temps d'infiltration
corrélée avec l'augmentation des effectifs des populations
animales.
Les eaux usées (lagunage et lit bactérien)
permettent de distinguer deux phénomènes. Le premier est une
modification de la structure du sol en surface par la formation (essai en
milieu contrôlé) d'une pellicule d'algues qui recouvre le sol. Le
second est une augmentation des effectifs des populations animales. La
formation d'une croûte d'algues protectrices (Metting, 1984) conserve la
structure des sols en surface en empêchant l'action physique de l'eau sur
le sol. L'activité animale maintient la porosité du sol (Casenave
et Valentin, 1989) par l'entretien et la formation des pores. Le sarclage a
pour effet d'interrompre ces processus naturels de protection des sols. Nous
avons observé en mars 1993 les signes évidents d'une mauvaise
alimentation hydrique des plantes (enroulement des feuilles de maïs)
Trois catégories de fonctionnement hydraulique des sols
sont ainsi à distinguer: un écoulement limité voire nul,
lié à la formation d'une surface imperméable (barrage et
eaux du réseau), un écoulement homogène dont la vitesse
dépend uniquement de la texture du sol (premier bassin), et un
écoulement préférentiel lié à
l'activité biologique (lagunage et lit bactérien). Nous
distinguoons deux modes de destructuration du sol qui conduisent à deux
phénomènes opposés. Une destructuration de surface qui
limite l'infiltration et par conséquent empèche à court
terme le lessivage et la lixiviation. Une destructuration à
l'intérieur du profil qui améliore la porosité du sol mais
favorise une baisse de sa fertilité chimique.
La mesure des effectifs des populations animales
apparaît comme un indicateur utile pour mesurer l'impact d'une technique
d'irrigation. Cet indicateur permet de mettre en évidence l'impact de la
composition des eaux sur la fertilité physique des sols.
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