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Pouvoir d'investigation et de contrôle parlementaire. Le développement des commissions d'enquête et des missions d'information à  l'Assemblée Nationale sous la Ve République

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par Sophie Léron
Ecole des hautes études en sciences sociales - Master 2 mention études politiques sous la direction de Pierre Rosanvallon 2005
  

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2) Un Parlement à l'écoute

Ainsi, l'enquête parlementaire se révèle en grande majorité comme un moyen pour
les parlementaires d'effectuer un contrôle objectif sur une situation donnée mais

109 La commission d'enquête « sur l'utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en corse » créée le 3 mars 1998 et terminée le 3 septembre 1998 et la commission d'enquête « sur le fonctionnement des forces de sécurité en Corse » créée le 19 mai 1999 et terminée le 10 novembre 1999.

110 Créée le 4 mars 1999 et terminée le 6 juillet 1999.

111 Créée le 9 décembre 1998 et terminée le 26 mai 1999.

112 Créée le 13 janvier 1998 et terminée le 2 juillet 1998.

aussi comme un outil permettant de donner des signes à l'opinion publique. L'enjeu est important pour les députés qui peuvent avoir le souci, par ce biais, de revaloriser leur fonction parlementaire de représentation. Car, si, selon l'étude « Démocratie 2000113 >>, les citoyens trouvent à 72%114 que la démocratie fonctionne bien en France, s'ils sont une courte majorité à avoir « confiance dans l'Assemblée nationale >>115, ceux qui considèrent que « les hommes politiques se préoccupent de ce que pensent les gens comme eux >> ne sont plus que 24%. On peut néanmoins considérer que la confiance dans l'institution qu'est l'Assemblée nationale n'est pas totalement distincte de celle des individus qui la composent et que le terme d' « homme politique >> est trop large pour connaître le rapport spécifique aux parlementaires, il n'en reste pas moins un réel sentiment des personnes interrogées, de ne pas être entendues et, par conséquent, mal représentées. Les parlementaires, conscients de la difficulté de la tâche, se saisissent des instruments à leur disposition pour tenter de réhabiliter leur rôle. Comme le résume Elisabeth Vallet, « les commissions d'enquête parlementaires maintiennent un difficile équilibre entre l'institution qu'elles représentent, l'esprit qu'elles incarnent, le rôle que la société civile en attend >>116.

113 La démocratie à l'épreuve. Une nouvelle approche de l'opinion des Français, sous la direction de Gérard Grunberg, Nonna Mayer, Paul M. Sniderman, Presses de Sciences Po, 2002, p.119.

114 7% ont répondu « Très bien » et 65% « Plutôt bien »

115 7% ont répondu « Très confiance » et 47% « Plutôt confiance »

116 Elisabeth Vallet, Les commissions d'enquête parlementaire sous la Ve République, Revue française de droit constitutionnel, 54, 2003, p.251.

Une constante peut être relevée dans le mode de travail des commissions d'enquête et des missions d'information : le nombre substantiel d'auditions organisées quel que soit le sujet. A titre d'exemple, le rapport de la mission d'information sur la fin de vie117 comprend 299 pages de conclusions dans son tome 1 et 922 pages de compte- rendu des 74 auditions qu'elle a organisées dans son tome 2. Les missions d'information sur les OGM et celle sur les signes religieux à l'école ont chacune organisé plus d'une centaine d'auditions. Les commissions d'enquête ont également recours à de nombreuses auditions, 51 pour la commission d'enquête sur la gestion des entreprises publiques en 2003, 72 pour celle sur la sûreté des installations industrielles en 2001 ou encore 68 pour la commission d'enquête sur les prisons en 2000. Sans aller aussi loin que la procédure d'enquête britannique qui ouvre ses procédures d'enquête « par une étape préliminaire qui n'existe pas en France: un appel formel à témoignage118 », le Parlement se veut ainsi à l'écoute de ceux qui, d'une façon ou d'une autre sont concernés par un sujet, ministres, fonctionnaires, universitaire, experts, mais aussi représentants syndicaux et associatifs.

Le développement de mouvements associatifs visant à poursuivre un but spécifique
ou à défendre une cause particulière amène à ce que se soient développés de

117 Rapport n°1708, << Respecter la vie, Accepter la mort >>.

118 Hélène Bilger Street, Le contrôle parlementaire en France et en Grande Bretagne, étude comparée des procédures de contrôle de la chambre des communes et de l'Assemblée nationale, Thèse, Paris I, décembre 2000, p.323.

Il est néanmoins à noter qu'en dehors des commissions d'enquête, la mission d'information sur la question du port des signes religieux à l'école a, par exemple, organisé un forum d'expression sur le site internet de l'Assemblée nationale qui << a recueilli en 6 semaines plus de 2200 messages >> et qu'elle a par ailleurs reçu << de nombreux courriers et contributions écrites >>, introduction de Jean-Louis Debré, Président de la mission, rapport n°1275.

nouveaux organes désormais quasi-incontournables dans les procédures de concertation. Le fonctionnement du DAL, de la Confédération paysanne, de Greenpeace ou encore d'ATTAC, pour prendre les plus connus, vise à focaliser leurs actions sur des objectifs bien précis afin d'établir une pression sur le pouvoir. Que ce soit en lançant une alerte sur un sujet déterminé ou en organisant une constante vigilance, un suivi attentif des évolutions d'un sujet déterminé, ces groupes structurés ont un réel pouvoir d'interpellation. Dans de nombreux domaines, ces nouvelles formes d'engagement se développent : << SOS papa» pour les pères qui revendiquent le droit à élever leur enfant, << Ni putes ni soumises » amenées à défendre les jeunes filles de banlieue, association << Recours » pour la défense des rapatriés... Ces associations se veulent représentatives d'une certaine catégorie d'individus et se présentent comme ayant une réelle expertise sur les thèmes dont elles se saisissent. Elles sont la manifestation concrète d'une réalité plus globale : un engagement citoyen qui se développe vers des formes plus protestataires. Comme le souligne Pierre Bréchon, << on va moins voter parce qu'on n'en saisit pas toujours l'intérêt, mais on se fait volontiers davantage entendre sur des problèmes ponctuels, qu'il s'agisse de grandes causes (par exemple les valeurs de la démocratie à sauvegarder contre l'extrême droite raciste) ou de corporatismes catégoriels119 ». Ayant, de fait, une certaine capacité de mobilisation (signature de pétitions, organisation de manifestation atypiques en direction des médias) ces organisations

font désormais partie du paysage démocratique même si leur réelle représentativité reste très inégale. Les députés l'ont bien compris. S'il ne s'agit pas, pour eux, d'en faire des interlocuteurs référents, l'écoute de leur point de vue et la prise en compte, au moins formelle, de leurs revendications est désormais incontournable. Ainsi, par exemple, les membres de la commission d'enquête sur << la situation dans les prisons françaises >> ont-ils été amenés à auditionner le 23 mars 2000 un représentant du << comité européen pour la prévention de la torture >>, le 4 mai 2000 la présidente d'Act-Up Paris, et le 11 mai 2000 les responsables de l'Association des familles en lutte contre l'insécurité et les décès en détention (FLIDD)120. La mission sur les << enjeux des essais et de l'utilisation des organismes génétiquement modifiés>> a été amenée à auditionner le 24 novembre 2004, outre le secrétaire national de la << Confédération paysanne >>, Monsieur Olivier Keller, son cofondateur, José Bové, ainsi que le président du << Réseau Semences Paysannes 121>>. Si les auditions des associations représentent, in fine, qu'une petite partie des auditions par rapport à celles des experts ou syndicalistes, elles reflètent la préoccupation des parlementaires visant à circonscrire un sujet et << mettre autour d'une table>> toutes les parties concernées. Si les auditions sont la plupart du temps individuelles, certaines missions

120 La liste complète des auditions de cette commission d'enquête figure dans le tome II du rapport n°2521, déposé le 28 juin 2000.

121 Rapport n°2254, tome 2, déposé le 13 avril 2005.

optent pour l'organisation de tables rondes thématiques122, qui, parfois sont contradictoire afin de permettre au débat d'avoir lieu123.

Le renouveau du contrôle parlementaire par le biais des commissions d'enquête et des missions d'information permet ainsi une intervention plus large des citoyens dans la sphère publique et se situe ainsi dans le cadre d'une nouvelle forme de gouvernement représentatif émergent, caractérisé selon Bernard Manin par « l'apparition d'un nouveau protagoniste de la délibération publique, l'électeur flottant et informé, et d'un nouveau forum de cette délibération, les médias124 ».

122 La mission d'information sur « la sécurité du transport aérien de voyageurs » a ainsi organisé 9 séances d'auditions individuelles ou conjointe et 9 tables rondes thématiques regroupant chacune une dizaine de personnes. Rapport, n°1717, Tome II, déposé le 7 juillet 2004.

123 La mission d'information sur les OGM a ainsi organisé à la suite de nombreuses auditions, cinq tables rondes contradictoires les 2, 8, 9, 15 et 17 février 2005.

124 Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif, Champs-Flammarion, 1996, p.299.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore