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Koutougou,un terroir Temberma enclavé dans la Kéran

( Télécharger le fichier original )
par Tchoou Adong NOYOULEWA
Université de Lomé - Maà®trise de géographie rurale 2005
  

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3.2.3- Les contraintes économiques

La vie économique de KOUTOUGOU se résume à l'activité agricole. C'est donc les retombées de l'isolement sur ce domaine que nous essayons de présenter selon les centres d'intérêts qui suivent :

3.2.3.1- Un coût de production agricole élevé

Le coût de production est la somme des dépenses effectuées toute l'année pour produire une denrée. Dans le domaine agricole, il est le fait de plusieurs paramètres.

3.2.3.1.1- La main d'oeuvre

Plus élevée à KOUTOUGOU que dans les autres localités avoisinantes, la main d'oeuvre s'exprime à travers le salaire que l'on perçoit contre la réalisation d'un travail champêtre. C'est en quelque sorte le prix de vente de la force de travail. La disparité dont il est question se perçoit mieux à travers le tableau 9 comparatif des taux d'exécution de certaines opérations.

Tableau 9 : Tableau comparatif des taux d'exécution de certaines opérations agricoles
selon la localité

 
 

Koutougou

 

Tchitchira

 

Massédena

 

Nadoba

Manuelle

Attelée

Manuelle

Attelée

Manuelle

Attelée

Manuelle

Attelée

Buttage (F/1butte)

 

100

 

-

 

75

 

-

 

60

 

-

 

25

 

-

Labour
(F/Ha)

36

000

40

000

32

000

24

000

32

000

36

000

20

000

28

000

Sarclage
(F/Ha)

16

000

20

000

12

000

12

000

12

000

16

000

8

000

9

000

Source : D'après les résultats de nos travaux.

Il se dégage du tableau 8 un constat clair : les prix d'exécution des opérations agricoles sont plus élevés à KOUTOUGOU que partout ailleurs dans la zone. Entre Koutougou et Nadoba, un terroir Temberma à 5 km au nord, les prix varient même jusqu'à concurrence de 44% que ce soit pour le labour ou pour le sarclage alors que les deux localités sont à distance égales de Kantè. Seulement la facilité d'accès de Nadoba favorise la venue des

métayers venant de la région des savanes ou encore des élèves de Kantè qui y viennent soit en vacance ou durant les week-end pour s'adonner au métayage. La main d'oeuvre revient ainsi moins chère pour les autres opérations agricoles notamment le buttage dont le prix est à 75% plus élevé à KOUTOUGOU par rapport à Nadoba.

Quant au village de Tchitchira dans la préfecture de Doufelgou, les prix des opérations réalisées par la traction animale sont particulièrement bas (24 000 F pour le labour contre 40 000 F à KOUTOUGOU) du fait que c'est le site qui abrite le projet des jeunes ruraux qui y ont été installés par le gouvernement avec une paire de boeufs pour chacun afin d'exploiter la vallée de la Kéran.

Il est donc évident qu'à KOUTOUGOU, les prix des opérations agricoles sont très élevés. On comprend davantage pourquoi d'ailleurs la proportion de ceux qui ont recours au salariat agricole dans leurs exploitations y est très faible. L'enclavement empêchant la venue d'actifs extérieurs au terroir, la pénurie de la main d'oeuvre explique la flambée de ses prix. Seulement, le coût de production n'est pas que du ressort du coût de la main d'oeuvre. Les prix des intrants y participent largement.

3.2.3.1.2- Le prix des intrants

Au Togo, les prix des intrants sont fixés par le gouvernement puisque les Directions Régionales de l'Agriculture, de l'Elevage et de la Pêche sont habiletées à les convoyer jusque dans les fermes les plus reculées. Mais cette réalité est loin d'être effective dans le cas de KOUTOUGOU. En effet, les habitants de ce canton doivent chaque année aller chercher euxmêmes leurs intrants à Niamtougou ou à Kantè. Selon le lieu, les prix de revient de ces produits indispensables à la production agricole varient comme l'indique le tableau 10.

Tableau 10 : Prix de revient des intrants vivriers selon le lieu de provenance par sac de 50 kg

 

Prix national

KANTE (97 km)

NIAMTOUGOU (72km)

NPK

7

750 F

12

000 F

9

000 F

UREE

7

750 F

12

000 F

9

000 F

Source : D'apres les résultats de nos travaux.

Selon le tableau 9, les prix croissent de 54,83% et 16,12% selon que les intrants proviennent de Kantè ou de Niamtougou. Mais il se fait qu'appartenant à la préfecture de la Kéran, il est plus facile aux paysans de KOUTOUGOU d'en disposer à Kantè qu'à Niamtougou

sauf dans le cas des intrants coton car la SOTOCO rattache la zone ATC de Koutougou à la coordination Binah-Doufelgou dont Niamtougou est le siège.

En définitive, les paysans de la zone d'investigation paient plus cher les intrants vivriers que les autres paysans du Togo, simplement à cause du fait que les véhicules ne peuvent accéder facilement à la localité. Après leur achat, les paysans font transporter les intrants jusqu'aux bords de la Binah soit à environ 15 kilomètres de Koutougou. Là, chacun s'organise pour assurer le reste du trajet soit par charrettes grâce à la traction animale, soit par moto ou dans la plupart des cas par tête d'homme. C'est pourquoi nous devons préciser que les prix évoqués plus hauts sont ceux évalués jusqu'à mi-chemin c'est-à-dire jusqu'aux bords de la Binah et pour avoir une idée exacte, il faut y ajouter le transport sur les quinze kilomètres restants. Les intrants coton ne souffrent pas du même problème puisque leur mise en place a lieu en saison sèche. Seulement, les paysans n'évaluent pas souvent leurs propres efforts. C'est aussi le cas pour les outils de travail qui leur reviennent plus chers que dans d'autres localités de la région sans qu'ils n'y prêtent attention.

3.2.3.1.2- Le coût des outils de travail

C'est l'une des données que les paysans ignorent souvent dans l'évaluation de leurs revenus. Les outils utilisés dans les champs à KOUTOUGOU proviennent du Bénin plus précisément de Takonta. Et pourtant, avec le travail de forge prépondérant dans le pays Kabyè surtout à Tcharè (POYODA M., 2001), les outils coûtent de moins en moins chers dans toute la région de la Kara surtout en ce qui concerne les houes et les dabas. Par ailleurs, ces instruments provenant du Bénin sont d'une qualité inférieure à ceux fabriqués au Togo. C'est ce que prouve leur durée d'utilisation telle que nous l'ont relaté les paysans. Cette situation paraît clairement dans le tableau 10 ci-dessous présentant les outils, leurs prix selon les lieux d'achat puis leur durée d'utilisation moyenne.

Tableau 11 : Outils de travail : Prix et durée d'utilisation des outils de travail selon le lieu d'achat

 

TAKONTA (Bénin)

NIAMTOUGOU

KANTE

Prix

Durée

Prix

Durée

Prix

Durée

Houe

500 F

1 an

250 F

2 ans

300 F

2 ans

Daba

4500 F

2 ans

2200 F

3 ans

2500 F

3 ans

Coupe-coupe

2500 F

1 an

2000 F

1 an

2000 F

1 an

Hache

500 F

+ de 5 ans

300 F

+ de 5 ans

300 F

+ de 5ans

Il est donc évident que les instruments de travail reviennent plus chers et durent moins quand ils sont achetés au Bénin. Mais dans la réalité, les habitants de KOUTOUGOU n'ont pas véritablement le choix. Ils sont contraints par l'enclavement de leur localité à acheter plus cher et en plus sur un marché extraterritorial, ce qui constitue une fuite de capitaux importants et un manque à gagner pour l'économie togolaise. Cette variation du prix couplée de la mauvaise qualité des outils qui leur sont proposés peut comme dans le cas de la daba prendre des proportions importantes (plus de 50% de réduction sur les marchés togolais).

Dans l'ensemble, les coûts de production se révèlent très élevés pour les paysans de notre zone d'étude à cause de l'enclavement de celui-ci. Qu'en est-il alors des prix de vente ?

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