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Pastoralisme et organisation de l'espace au Niger oriental: cas de la communauté Toubou Téda de la commune de Tesker

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par Kabirou SOULEY
Université Abdou Moumouni de Niamey - Diplôme d'études approfondies en géographie 2005
  

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Conclusion sur les marques :

Les marques Teda désignent dans l'ensemble, soit un espace habité par les premiers ancêtres et/ou soit le nom de l'ancêtre fondateur du clan. Dans tous les cas, les descendants de ces clans se réclament propriétaire de leur espace d'origine, mieux, ils s'identifient à travers ce dernier. Les marques font soit référence à un espace (montagne, oasis), soit aux outils de guerre utilisés (Mouzouri, Yogoye,...), à l'empreinte des animaux vivant dans l'espace d'origine (Wossaï, Aretourkoune,...).

Les dattiers plantés par les anciens dans ces espaces appartiennent par conséquent tous aux descendants du clan.

Les marques Teda étendent leur espace d'influence depuis leurs espaces d'origine jusqu'à l'emplacement actuel de la communauté Teda et aux communautés voisines (Cf. : Carte N°5 : Espace d'influence des marques Teda). C'est à travers les conflits et leur règlement que les différents traits constituant une marque révèlent leur importance.

Carte N°5 : Espace d'influence des marques

Remarque : Plus on s'éloigne du centre des cercles plus l'influence diminue. La couleur rouge indique l'espace actuel des Toubou Teda.

Source : Enquête terrain 2005

II.3. La mobilité

Dans la région, l'élevage est axé sur la mobilité des hommes et des animaux. Cette

mobilité a deux formes essentielles : la transhumance et le nomadisme.

La terminologie concernant les groupes d'éleveurs « nomades », « transhumants » varie d'un auteur à un autre. Le nomadisme est caractérisé par « une mobilité des éleveurs, sans point d'attache fixe et suivant un itinéraire régulier ou variable d'une année à l'autre » (Cherrou, 2002). D'après Maiga (1997), le nomadisme est à la fois un système économique pratiqué pour tirer profit d'un milieu défavorable et aussi un genre de vie adapté à ce milieu.

Quant à la transhumance, Gild (1963) la définit comme « un mouvement pendulaire accompagnant le déplacement du front pluvieux et amenant les groupes d'éleveurs dans le nord et dans le sud». Ainsi, la transhumance correspond à la mobilité saisonnière des familles pastorales et de leur cheptel. Elle est induite par l'alternance des saisons déterminant la variation des ressources naturelles dans des zones devenant complémentaires.

D'après Winter (1998) : « Moins les ressources sont abondantes ou plus elles sont susceptibles de fluctuer pour des raisons extérieures plus leur usage devra faire appel à la « mobilité » (et plus les « territoires » où elles sont exploitées devront être étendus). La mobilité est donc une stratégie permettant de tirer le maximum de profit de la rareté de ces ressources ou du fait qu'elles sont incertaines dans l'espace d'une année ou d'une année sur l'autre. Le besoin de mobilité s'accroît donc en parallèle avec la rareté ou l'incertitude, tandis que l'immobilité risque d'engendrer la catastrophe. »

Dans le cadre de ce travail, nous préférerons le terme de « transhumance » à celui de « nomadisme » car les mouvements s'effectuent selon un calendrier fort semblable d'année en année : descente au sud en saison des pluies, une remonté vers les nord pendant la saison sèche et froide. D'après Mangeot et Marty (1992), les nomades ont « des terrains de parcours bien délimités en saison humide aussi bien qu'en saison sèche, et chaque année les ramènent, presque à époque fixe au même endroit. » Les pasteurs ont un « terroir d'attache » qui peut être défini selon toujours Mangeot et Marty (1992), comme « Un terroir aux fonctions essentiellement pastorales dont se

réclament une ou plusieurs communautés pastorales et qui est composé de ressources clés pour la conduite des troupeaux (pâturages aériens ou herbacés, terres salées, mares...) » Les terroirs d'attache permettent une relative sécurité fourragère et un accès à l'eau en saison sèche (Hammel, 2000). La notion « d'attache » fait moins référence à la propriété, qu'à des droits d'usages prioritaires. Le terroir d'attache chez les pasteurs Toubou Teda signifie le puits de saison sèche et l'aire de pâturage qui est circonscrite au puits. Les animaux restent très attachés à ce lieu surtout pendant la saison sèche et chaude. C'est aussi un espace sentimental pour tous les pasteurs propriétaires du puits.

Cependant, l'aire de production ne se limite pas à ce territoire, la mobilité reste indispensable. Les modalités des transhumances traditionnelles pratiquées par les éleveurs répondent à deux impératifs majeurs et indissociables : la recherche du pâturage et de l'eau. Notre objectif n'est pas de décrire les systèmes d'élevage mais de comprendre l'organisation traditionnelle de l'espace pastoral. Le schéma ci dessous illustre la réaction de la population pastorale en fonction de la disponibilité des ressources

Figure N°2 : Réactions des populations pastorales en fonction des disponibilités des ressources

Sédentarisation

Exode

Disparition des ressources (décapitalisation)

Déclin

Insuffisance temporaire des ressources

Transhumance Emigration temporaire

Ressources
Suffisantes
Eau- pâturages

Populations
pastorales

Source : enquête terrain 2005

II.3.1. La conduite des animaux

Considéré comme une trilogie l'homme, l'animal et le milieu, le pastoralisme s'inscrit sur plusieurs registres de l'activité sociale. En effet, l'appréciation permanente de la végétation du pâturage par les pasteurs Toubou Teda, le rapport de l'homme à l'animal, les rapports sociaux sous-jacents à l'utilisation du parcours, constituent des facettes diverses, mais interdépendantes du même phénomène, en l'occurrence, le pastoralisme. La carte N° 6 explique la conduite des animaux pour le pâturage.

Carte N°6 : Transhumance Toubou Teda

Tahoua ZinderTASKER Tillaberi

Dosso Maradi

0 50 100

TIDJIRA

Agadez

Diffa

Kilomètres

WORROU KALTOUMA

KIT KIT

DAOUBELLY

ANICHATCHOUWOU

ABORAK (FORAGE)

KARAGOU

LEGENDE

RIDJIA SIDDI

BOULOUM

FORAMI

4 Campement de base

KASSATCHIA

TASKER

kENDELBOUZOU

Kolo Kolo

BAÏKOUBOUTEDA

Tougounoussa

KOLOKOLO

Ecét

TOUGOUNOUSSA

Téhi

ECHETCHOULOUM

Tigma Sofo

TEHI

TIGUIMAIsh SOFO

DJOCKO ISHMA

DIBIDE

Transhumance saison sèche et froide

Transhumance saison de pluie

Autres Campements

chef lieu de Tesker

Limite de Tesker

DAOUNGA

KANKEDI

OLOW

RIDJIA DJOUGNOU

BORNO

KANKEDI EHMERGAN

TORORONGA

BOULAKAW

FINI-FINI

TERMIT MAI RIDJIA

TERMIT YALLANGA

DOUGOULE

N'GUELDJABO

YOUGOUM

EYIDINGA

KATCHATCHA

TERMIT DOLE

OROMI

II.3.1.1. La mobiité en saison des pluies

Pendant la saison des pluies, dès que les premières pluies tombent plus au sud (environ 40 km), les dromadaires ont tendance à déserter le puits de saison sèche. En effet, les dromadaires sont attirés par l'odeur d'herbes vertes qui commencent à germer qu'ils sentent ainsi de très loin. Cette période est une période très difficile pour les pasteurs partant à la recherche permanente de leurs animaux.

Ce moment particulier se nomme « Garigaré ». C'est, en effet, une période intermédiaire entre le départ en transhumance et la tombée des pluies aux puits de saison sèche, c'est la période ou la vigilance des éleveurs est à son point le plus fort. « Garigaré » annonce le départ en transhumance ou « Wanna Gnélé ». Avant le départ proprement dit, les pasteurs Toubou Teda cherchent des informations sur les zones qui possèdent plus de pâturage. Ils se renseignent le plus souvent auprès des voyageurs ou dépêchent spécialement des éclaireurs pour vérifier l'état du pâturage.

Le sens de l'observation des moindres détails et perturbations du milieu permet aux éleveurs Teda d'être à l'affût de tout changement au niveau du milieu naturel. Les évolutions de végétation, en terme de phénologie des espèces, de leur qualité, de la composition floristique ou de l'apport en masse fourragère, des écoulements des points d'eau, de l'existence des mares ; ceci est d'autant plus important que l'irrégularité est une constante dans notre zone d'étude. Mais, l'intérêt de cette attention particulière que portent les Toubou Teda à l'espace pastoral s'exprime grandement dans l'observation permanente du comportement des plantes. Ce point est abordé plus en détail dans la partie suivante « Appréciation du pâturage ».

Une fois en possession de ces informations et l'approvisionnement en vivre des bergers fait, le départ vers les zones de pâturages du sud commence. Seule une partie de la famille fait le déplacement : les vieux, les femmes, les enfants de moins de sept ans, les petits ruminants et une partie des chamelles laitières sont laissés au niveau du campement.

A l'inverse, de nombreuses communautés se déplacent en groupe. Ici, chaque propriétaire choisit sa date de départ et son itinéraire. Il n'y a pas d'itinéraire précis pour l'ensemble des éleveurs, l'essentiel est de rejoindre la localité où le pâturage est le meilleur tout en s'assurant que le pâturage du trajet et l'accessibilité à l'eau est tout autant propice et suffisant pour l'alimentation du troupeau. Cette évaluation est propre à chaque éleveur qui connaît son troupeau et ses besoins. La distance à parcourir varie en fonction de la zone pourvue en herbes, elle est en moyenne de 40 km. Les lieux fréquentés par les Toubous Teda de la zone sont : Kité-Kité, Dahoubelli, Karagou, Indouna, Tilitilo, Tilotiloyi Rouanga, Rouangayi, Bouloum, Worrou, Worrey, Ranamoutte (cf carte N°6). Cet espace d'accueil ou zone de repli est peuplé par différentes communautés notamment les Peuls et les Toubou Azza. Ces zones de pâturage sont partagés avec deux communautés autochtones, les Arabes et plus rarement les Touarègues. L'accès au pâturage est libre mais l'abreuvement des animaux nécessite en amont l'accord de la communauté « propriétaire du puits ». L'abreuvement n'est généralement pas refusé sauf dans le cas des puits privés, comme le cas de Maï Kolli, Rigia Djoga et N'wallalo (puits ciments). L'accès à ces puits par les transhumants se fait sous la surveillance du propriétaire, moyennant une certaine somme d'argent (100 FCFA par tête de gros bétail) ou un jeune animal. Il est intéressant de remarquer que le puits de N'wallalo est notamment « un puits boutique » (équipé de commerce appartenant au propriétaire du puits). Ainsi dans le cas d'achat au niveau de ces commerces, les éleveurs obtiennent une réduction du prix de l'eau par tête.

L'abreuvement peut aussi se faire au niveau des mares naturelles telles Togoyinga (Bouloum) et Felfel (Karagou) et beaucoup d'autres mares formées dans les dépressions inter-dunaires argileuses. Les espèces herbacées appétées sont (appellation Toubou Teda) : Nougou (Cenchrus biflorus), Tagour (Alysicarpus SPP), Nicé (Stigagrostic plumosa), Ondoulé (Sporobolus spicatus), Diguère (Cenchrus prieurii), Kanguedou(Citrullus colocynthis), Markou (Indigofera coluta)...

La pratique du pâturage autour de ces puits de replis dépend de plusieurs paramètres. En effet, les dromadaires peuvent pâturer toute la nuit si l'espace n'abrite uniquement que des Toubou Teda. Cela suppose que la sécurité est garantie. Par contre si plusieurs communautés cohabitent, les animaux sont conduits, à la tombée du jour, sur les dunes pour y passer la nuit sous la surveillance des bergers. Cette stratégie peut être appliquée, notamment, dans le cas ou du fait de l'humidité excessive des vallées, celles-ci sont investies de mouches piquantes, poussant alors les bergers à éloigner le troupeau de ces endroits insalubres la nuit. Les transhumants exploitent les herbacées jusqu'à leur maturité complète. Cette période coïncide avec l'excès des mouches piquantes qui devient de plus en plus insupportables pour les dromadaires. Ils ont, de ce fait, tendance à abandonner la zone et à remonter progressivement vers le nord où l'herbe demeure encore jeune. C'est dans ce mouvement progressif que les transhumants atteignent le puits de saison sèche. La durée de cette transhumance varie selon l'année, allant de deux à trois mois dans le cas où la saison des pluies s'est bien installée. Au puits de saison sèche, « Damour », les éleveurs restent pendant un mois ou plus, le temps de se préparer pour le départ en transhumance de saison sèche et froide en direction du nord. Ce départ est notamment motivé par l'assèchement de l'herbe verte (paille) autour du campement.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore