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Intégration des marchés céréaliers dans l'UEMOA. Une analyse par les prix

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par Salissou MALAM SOULEY
Ecole nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée - Ingénieur statisticien économiste 2007
  

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3. REVUE DE LA LITTERATURE

Cette revue de littérature est consacrée d'abord aux études empiriques traitant des problèmes spécifiques des échanges céréaliers (I) tout en mettant un accent particulier sur celles qui concernent les pays de l'UEMOA. Ce qui nous permettra ensuite d'identifier et de présenter les principales méthodes d'estimation utilisées dans le cadre de ces travaux.(II).

3.1. Survol des travaux empiriques

La littérature empirique au sujet de l'intégration des marchés en général et celle des marchés céréaliers en particulier est assez dense. Le problème est abordé sous plusieurs approches allant des tests de corrélations simples aux modèles à seuil en passant par les modèles de gravité et la théorie de la co-intégration.12(*).

Ainsi, des recherches récentes au sujet de l'incidence des effets frontières et du degré d'intégration ou de fragmentation des économies ont utilisé des modèles de gravité. Elles ont débouché sur des résultats empiriques fort concluants. Dans leur quasi-totalité, ces travaux établissent que les frontières exercent des effets négatifs sur les liens économiques internationaux. Un vaste ensemble de facteurs pourrait expliquer ces résultats dont notamment l'utilisation des monnaies différentes, les coûts des transactions transfrontalières et les barrières commerciales (réglementaires ou non).

En 1995, s'intéressant aux échanges des provinces canadiennes avec les Etats américains, McCallum a obtenu des résultats qui ont étonné beaucoup d'autres chercheurs. Il a abouti à la conclusion que les échanges entre les provinces canadiennes sont 22 fois plus étroits que les échanges entre ces mêmes provinces et les Etats Américains. En réponse aux critiques sur la non prise en compte des effets de la taille (P.I.B et population) et de l'éloignement, il a donné l'exemple célèbre de l'Etat de Californie (Etats-Unis) et de la province de Colombie-Britannique (Canada). Selon lui, bien que ces deux régions soient à peu près équidistantes d'Ontario (une autre province canadienne) et que la Californie ait une population et un PIB d'environ dix fois supérieurs à ceux de la Colombie-Britannique, Ontario entretient avec cette dernière des échanges dont l'intensité est plus de deux fois supérieure à celle des échanges qu'il entretient avec la Californie. Toutefois, selon la Revue de la Banque du Canada (Printemps, 2005), des travaux plus récents prenant en compte, d'une part, les effets de la taille et de l'éloignement des localités et, d'autre part, l'accord de libre-échange entre les provinces canadiennes et les Etats-Unis (ALE), ont abouti à des résultats moins prononcés. Toujours s'agissant des échanges commerciaux entre ces mêmes régions, Engel et Rogers (1996) ont étudié l'intégration des marchés de quatorze catégories des biens et services à partir des données mensuelles sur l'indice des prix à la consommation couvrant la période 1978-1994. Ils ont mis en évidence que les prix des villes canadiennes évoluent de façon quasiment indépendante de ceux des Etats américains. Ce qui fait dire à certains auteurs que le processus de mondialisation n'est pas si accéléré qu'on le croit.

Il convient de souligner, avec les travaux de Helliwell (1998) employant une version multilatérale des modèles de gravité, que les incidences des effets frontières s'accroissent quand on introduit des pays sous-développés dans l'étude. De ce fait, certains pensent que les accords de libre-échange entre pays développés et les pays en voie de développement à l'image de l'ALENA13(*) ne sont qu'une forme de l'échange inégal. Guèye (2006) en évoque quelques-unes des raisons en ces termes : « l'impact du commerce international sur les petits producteurs africains a été dramatique au cours des 10 dernières années. Les problèmes découlent en grande partie de la violation des règles du commerce par les pays européens et les Etats-Unis dont les subventions accordées à leurs producteurs rendent les produits agricoles africains non compétitifs ».

En ce qui concerne les pays de l'UEMOA, des études récentes utilisant des techniques des séries temporelles insistent sur le rôle majeur des coûts des transactions comme freins au développement du commerce intra-régional.. Ces coûts se situent principalement à deux niveaux. Ils sont, en premier lieu, imputables à une facture de transport très élevée à cause notamment de l'insuffisance et du mauvais état des infrastructures routières, de l'envolée des coûts du carburant et de l'éloignement des marchés. En second lieu, les "intermédiaires non fonctionnels" qui, selon Honfoga et al. (2005), se caractérisent par des prélèvements illicites en nature et en espèces aux multiples postes sur les trajets et l'immobilisation prolongée des véhicules due aux contrôles excessifs et lents surtout aux frontières, sont aussi évoqués. Dans le contexte ivoirien par exemple, Zéhia et al. (1997) et Aka (2001) ont même souligné que la part des coûts des transactions due aux intermédiaires non fonctionnels est énorme. Ils sont, par exemple, en moyenne de 30,4 FCFA par kilomètre sur les quelque1400 kilomètres qui séparent Abidjan et Niamey (Honfoga et al., 2005).. Ces mêmes auteurs ont constaté que dans le cas des pays de la SADAOC14(*), les études empiriques accusent souvent à tort les coûts de transport. Pour eux, l'importance des coûts tient, d'une part, à un manque de transparence des marchés qui conduit à des comportements opportunistes et, d'autre part, aux intermédiaires non fonctionnels qui occasionnent indûment de faux frais, gonflant les coûts de commercialisation et corrélativement les prix à la consommation. L'évolution de la part de coûts de transport dans les coûts de commercialisation des céréales dans la SADAOC, est reportée dans le tableau ci-dessus.

Tableau n°2 : Part moyenne de transport (%) dans les coûts de commercialisation des céréales dans la SADAOC de 1995 à 2000.

Produits

Burkina

Mali

Ghana

Togo

SADAOC (Côte d'Ivoire exclue)

Riz

42,3

19,6

23,3

11,2

24,1

Maïs

54,4

17,6

18,8

36,5

31,8

Mil

58,8

18,4

32

5,5

28,7

Sorgho

64,2

20,6

 

14,8

33,2

Céréales

54,9

19,1

24,7

17

29,5

Source :Honfoga et al. (2005), p.14.

On constate, à partir de ce tableau, les coûts de transport ne prennent pas en général la plus large part des coûts de transaction des céréales. Cela peut aussi être imputable à la détention des céréales sèches par certains commerçants à des fins spéculatives plutôt qu'arbitragistes. L'efficacité des systèmes d'information sur les marchés (SIM) a cependant été signalée notamment pour le cas du Burkina. Ce qui pourrait dissuader certains commerçants de profiter de l'asymétrie de l'information existant entre eux et les consommateurs pour adopter des comportements opportunistes notamment en exigeant des marges commerciales excessives tout en se drapant derrière les coûts de transport.

L'importance de différents coûts (transports ou faux frais) est telle que certains arbitrages inter-marchés ne sont pas possibles En effet, si les coûts des transactions excèdent le différentiel des prix entre les marchés, les échanges sont du coup bloqués car les commerçants ne gagneraient rien à opérer. Néanmoins, certains auteurs mentionnent que depuis la libéralisation des marchés céréaliers dans les pays membres du CILSS (Comité permanent Inter-États de Lutte contre la Sécheresse au Sahel) et des échanges dans les pays de l'UEMOA et de la CEDEAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest), les opérateurs privés du secteur céréalier ont réussi à accroître les échanges dans ces sous-ensembles. Le rapport final du CILSS (2002) a indiqué des résultats importants en termes d'interconnexion des marchés céréaliers entre le Burkina, le Mali et le Niger. Ce dernier, qui d'ordinaire importe des céréales pour couvrir ses besoins alimentaires y compris pendant les années de bonne production vivrière, pourrait ainsi facilement s'approvisionner au Mali ou au Burkina. Selon ce même rapport, il existe un marché céréalier régional qui se construit progressivement et qui va bien au-delà de la logique pays déficitaires-pays excédentaires.

Une étude réalisée par la direction générale des affaires économiques du Bénin a révélé que la mise en place du TEC a entraîné une amplification des échanges du pays avec ses pairs de l'UEMOA. Les importations béninoises en provenance des autres pays de l'union sont passées de 40,3 milliards de FCFA en 1999 (un an avant la reforme) à 49,6 milliards en 2000 puis à 59,9 milliards en 2001 avec des taux d'accroissement annuels respectifs de 23% et 21%. Les exportations ont cependant connu une baisse assez considérable. Elles sont passées de 7541,1 millions de FCFA en 1999 à 7184,2 millions en 2000. Ces résultats ne font qu'entériner ceux obtenus par Adegbid et al. (2003) en se servant des modèles vectoriels à correction d'erreurs pour analyser l'échange céréalier. Ces résultats vont également de pair avec les recommandations de Lutz (1994) dans son étude sur le fonctionnement du marché du maïs au Bénin.

Dans une étude portant sur l'impact de l'offre locale de produits vivriers sur les prix dans l'UEMOA, Diallo (2003) a quant à lui observé que le secteur vivrier de la sous-région est cloisonné en deux compartiments.. Le premier englobe les marchés des pays sahéliens. Dans ce compartiment, tout choc affectant ce sous-secteur risque de dévier l'inflation de son sentier de long terme. Composé des pays côtiers, le second compartiment présente une caractéristique inverse. Les échanges entre ces deux compartiments sont cependant possibles du fait que les prix des produits vivriers sont relativement plus élevés dans les pays sahéliens que dans les pays côtiers.

Dans certains pays, c'est plutôt les déficits céréaliers chroniques et la faiblesse de revenus ruraux qui sont la cause première de la faiblesse des échanges céréaliers en favorisant les cultures destinées à l'autoconsommation. Par exemple au Niger, pendant la décennie 1992-2001, sur les 10 campagnes agricoles, 7 ont été déficitaires (Aboubacar, 2003) alors que, selon le document de la stratégie de la lutte contre la pauvreté (DSRP), 63% de la population vivent en deçà du seuil de la pauvreté.

Constatant certaines limites des modèles linéaires, Catherine et al. (2005) ont utilisé un modèle à effets de seuil pour étudier l'impact de la dévaluation du FCFA de 1994 sur le commerce du bétail au Burkina. Ces auteurs ont abouti à la conclusion que cet ajustement monétaire a conduit à une réduction des coûts des transactions et corrélativement à une amélioration du niveau d'intégration des marchés.

Grosso modo, le commerce céréalier dans les pays de l'UEMOA a fait l'objet d'une littérature empirique assez abondante. De ce bref aperçu, il ressort que plusieurs facteurs, les uns activant ou amortissant les autres, jouent un rôle déterminant dans l'intégration ou la fragmentation des marchés. L'importance des coûts de transactions et des intermédiaires non fonctionnels a été particulièrement soulignée.. Celle-ci tient principalement à la faiblesse des infrastructures routières, du système d'information sur les prix et au non respect des règles communes. Dans la section suivante, nous nous proposons de passer en revue les principales méthodes d'estimation qui ont été utilisées dans l'élaboration de ces travaux

* 12 Nous reviendrons sur la signification de ces types de modèles dans la section suivante.

* 13 L'ALENA ou Accord de libre-échange nord-américain est un traité créant une zone de libre-échange entre trois pays de l'Amérique du nord : le Mexique, les Etats-Unis et le Canada. Il est entré en vigueur le 1er janvier 1994. Il s'agit d'un prolongement de l'ALE.

* 14 La SADAOC signifie Sécurité Alimentaire Des Etats de l'Afrique de l'Ouest Centrale. C'est une communauté qui regroupe les 5 pays suivants: le Mali, le Burkina, le Ghana, la Côte d'Ivoire et le Togo.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand