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Contribution des nouvelles religions à  la reconstruction du lien social au Rwanda. Cas de l'Evangelical Restoration Church. (1994- 2004 )

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par Jeanette NTAWUHIGIMANA
Université libre de Kigali - Bachelor 2005
  

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2. Délimitation du sujet

La reconstruction du pays après le génocide, autant que la reconstruction du lien social déchiré par ce dernier est, comme nous l'avons dit, un sujet d'actualité. C'est aussi un sujet de recherche qui pourrait intéresser plus d'un domaine de la vie sociale. Mais, il va aussi sans dire que les limites du temps et de moyens qui sont celles d'un mémoire de licence ne nous ont pas permis le loisir d'étendre notre recherche au delà du cas de l'Eglise Evangélique de la Restauration de Butare.

Ensuite, il fallait pour nous de limiter notre travail à l'étude de la contribution de l' « Eglise Evangélique de la Restauration» de Butare à la reconstruction du lien social au Rwanda ; Ce qui nous a évité de nous disperser dans tous les sens au risque de perdre la maîtrise de notre sujet, ce qui risquait de nuire énormément à la réalisation des objectifs et à la vérification de nos hypothèses de recherche.

Dans le temps, le travail se limite à la période d'après le génocide rwandais d'avril 1994 à 2004.Il est évident que nous avons été de temps en temps amenée à faire référence à la période précédente mais c'était souvent dans le souci d'être plus complète, d'apporter plus d'éclairage sur la période qui nous intéressait, de mettre en évidence certains aspects et d'apporter plus de consistance à notre argumentation.

3. Problématique

Le génocide qui a eu lieu au Rwanda en 1994 a, non seulement causé beaucoup de pertes humaines et matérielles, mais il a aussi profondément touché les valeurs morales et culturelles de la société rwandaise, telles la solidarité, la tolérance, le respect mutuel et celui de la vie et de la dignité humaine, la justice, l'honnêteté, la confiance, la conscience nationale, le patriotisme, etc.

Ainsi, on se trouve actuellement en présence d'une société rwandaise complètement déchirée, une société caractérisée par la désunion entre les personnes, par le sentiment de méfiance et, à la limite, par le sentiment de haine et d'intolérance.

Cependant, les efforts fournis depuis la fin de la tragédie par les différents acteurs de la politique de l'unité et de la réconciliation nationale, ou plutôt de la reconstruction du pays en général, afin de trouver les voies de sortie de toutes ces difficultés accumulées pendant ces périodes les plus sombres de l'histoire du pays, donnent l'espoir que le Rwanda est capable de se relever de ce coup dur qui lui a été apporté par ces malheureux événements.

En effet, après ces événements, beaucoup d'institutions publiques et privées sont passées à l'oeuvre, appuyées par la volonté politique du gouvernement rwandais ainsi que par des efforts individuels de la part de beaucoup de Rwandais, ce qui est un bon signe, car c'est même souvent par l'individu que tout doit commencer.

Il est évident que parmi les acteurs de l'unité et réconciliation nationale et de la reconstruction du pays figure en première ligne l'Etat qui, garant de l'unité nationale, de la sécurité et du développement durable du pays, a pour tâche d'élaborer la politique de reconstruction du lien social qui, en toute évidence, est essentiellement basée sur l'éducation populaire et d'assurer la mise en oeuvre de cette politique par ses différentes institutions.

Dans cette lourde tâche, l'Etat est aidé d'abord par les diverses organisations et associations publiques ou privées, locales ou internationales qui, pour leur contribution à la reconstruction sociale, apportent leur concours dans les différents domaines de l'éducation populaire, de justice, de soutien psychosocial aux victimes, d'appui matériel à différentes initiatives, du développement durable, etc. Il s'agit notamment pour les organisations locales et publiques des différentes commissions créées par le gouvernement pour lutter contre l'idéologie du génocide, sensibiliser la population sur l'unité et la réconciliation, gérer les procès du génocide et punir les coupables, apporter l'assistance aux rescapés du génocide et réduire la pauvreté : Commission d'unité et réconciliation, Commission nationale des droits de l'homme, les juridictions gacaca, le Fonds d'assistance aux rescapés du génocide, le Programme national de réduction de la pauvreté, etc. Pour les organisations locales privées, il faut surtout signaler le rôle de toutes les associations des rescapés du génocide : IBUKA, ARG, AERG, AMAERG, AVEGA-AGAHOZO, etc. Au niveau international, il s'agit notamment des différents pays étrangers, des organismes du système de l'ONU et ONG qui assistent le Rwanda dans différents domaines pour sa reconstruction après le génocide et pour son développement durable.

Ensuite, l'Etat est aussi aidé par les différentes confessions religieuses qui sont également des institutions privées dont on a d'ailleurs constaté la prolifération ces dernières années comme nous l'avons signalé dans les paragraphes précédents. Bien que parfois plus discrètes, en comparaison avec les institutions publiques qui ont à leur disposition toute la presse publique pour diffuser leurs activités, il n'en reste pas moins que les Églises rassemblent une grande proportion de la population sur laquelle elles sont susceptibles d'exercer une importante force d'influence par leurs divers enseignements. Et, on n'oubliera pas qu'en plus de ces enseignements, et sans compter les émissions que les différentes Églises font passer à Radio-Rwanda, Radio 10, Radio Flash, etc. certaines confessions possèdent leurs propres organes de presse comme, par exemple, l'Église catholique qui a à sa disposition le journal Kinyamateka qui atteint une grande partie de la population rwandaise jusque dans les fonds des campagnes et la Radio-Maria du diocèse de Kabyayi.

L'expérience du Rwanda a montré que l'influence des Églises a été à bien d'égards et malheureusement ambivalente, et force est de constater que certains responsables et membres de certaines Églises ont été impliqués directement ou indirectement dans les malheureux événements qui ont endeuillé le Rwanda en 1994, en portant ainsi beaucoup de tort aux institutions et aux fidèles qu'ils sont plutôt sensés servir. Cela, ajouté au fait que beaucoup d'Églises ont été transformées pendant les événements en véritables abattoirs par les bourreaux, a terriblement ébranlé la foi de certaines âmes qui n'ont pas su dépasser le mythe de l'évêque ou du prêtre « surhumain » pour comprendre et pouvoir gérer la situation. Ce qui explique peut-être pourquoi les nouvelles Églises qui n'étaient pas au Rwanda pendant le génocide gagnent de plus en plus de fidèles au détriment de celles installées au Rwanda depuis plus d'un siècle.

Ainsi, sans trop risquer de basculer dans une espèce de procès aux Églises, ce qui n'est d'ailleurs ni dans notre intention ni dans nos compétences, nous pouvons dire tout simplement que, dans ce sens, les Églises ont d'une façon ou d'une autre, joué un rôle, bien que presque jamais avoué1(*), à la fois dans le génocide, dans la destruction de la foi qu'elles sont sensées cultiver, dans la décomposition du lien social qui devrait être entretenu en quelques manières par la foi en Dieu.

En effet, dans les pays comme le Rwanda, marqués par une longue tradition religieuse, la foi est un mot chargé d'un sens particulier et la véritable foi peut rendre beaucoup de services à la vie sociale. Par contre, la perte de la foi est susceptible de causer aussi beaucoup de dégâts, et souvent on ne se représente pas assez que là « où la foi en Dieu disparaît, l'ordre moral est lui même compromis2(*) », car « la perte de la foi en Dieu entraîne la perte des principes universels et finalement la destruction de tout ce qui lie les hommes entre eux3(*) », ce qui conduit, à la limite, au « chaos moral et social », car dans ces conditions, « les hommes agissent comme des monstres inhumains dont la puissance redoutable n'est guidée par aucune puissance spirituelle4(*) .»

Mais, si nous nous intéressons aux nouvelles religions dans ce travail, c'est avant tout, comme nous avons eu l'occasion de le dire précédemment, pour mettre en évidence la contribution « positive » de ces religions et notamment celle de l'Eglise Evangélique de la Restauration à la reconstruction du lien social au Rwanda. Car, il est sans aucun doute que si les Églises possèdent une puissance, une force d'influence, bien qu'ayant été destructrice à certains moments, il s'agit d'une force qui peut également être mise au service d'une solution valable au problème social rwandais.

En effet, il est évident que cette solution ne peut que passer par une rééducation morale, une conversion des moeurs et des esprits. Et, ceci dit, nous devons signaler que, à y voir de près, ce ne sont pas souvent les institutions qui sont plus malades que les hommes et qui doivent être guéries, car elles sont souvent basées sur de bons principes, c'est plutôt l'homme chargé de faire respecter ces principes et ces institutions, qui doit être renouvelé, et l'expérience confirme cette vérité : « toute transformation extérieure demeure vaine si elle ne s'accompagne pas , si elle ne jaillit pas d'une transformation intérieure5(*). » Sinon, comme disaient les latins, « Quid leges sine moribus ? » (Que peuvent les lois sans les moeurs ? ). D'après C. Van Gestal, « l'échec profond des mouvements modernes provient de ce que, négligeant de changer l'homme lui-même, ils n'ont pas frappé à la racine du mal6(*). »

Ainsi donc la reconstruction du lien social est non seulement l'affaire des institutions publiques, mais c'est aussi l'affaire des institutions privées y compris les institutions religieuses et surtout l'affaire de chaque Rwandais, en tant que membre d'une société et/ou d'une institution religieuse qui est appelée à changer et qui accepte de revoir ses moeurs, de raffermir sa foi pour bâtir une société basée sur un nouvel ordre social. La prolifération des nouvelles Églises et les changements fréquents d'appartenance religieuse qu'on observe actuellement sont peut-être révélateurs à la fois de la méfiance vis-à-vis de certaines Églises ayant failli à un moment ou à un autre à leur mission et de cette quête de reconstruire et d'appartenir à une société nouvelle en passant par l'Église. Ce qui va nous préoccuper tout au long de notre travail sera de répondre à une série des questions suivantes; Pourquoi les nouvelles religions attirent-elles actuellement beaucoup de Rwandais ? Et, pour le cas de l'Eglise Evangélique de la Restauration qui nous intéresse, pourquoi gagne -t-elle de plus en plus de fidèles ? Qu'est ce qui attire ses fidèles ? Quelle réponse apporte-t-elle à cette préoccupation des Rwandais de reconstruction morale de leur société, de reconstruction du lien social ? Notre travail qui est, comme nous l'avons dit au départ, une modeste contribution aux recherches précédentes sur les problèmes sociaux rwandais se propose de réfléchir sur ces questions, d'évaluer et de mettre particulièrement en évidence le rôle de l'Eglise Evangélique de la Restauration dans tout ce travail de transformation, de conversion, de reconstruction du lien social au Rwanda.

* 1 Sauf dans de rares cas comme celui de l'Église Presbytérienne qui s'est publiquement confessée et repentie en décembre 1996 lors du Synode général de l'Église Presbytérienne au Rwanda ou celui du Conseil Protestant du Rwanda qui a déclaré dans une des conférences que « le génocide constituait un échec non seulement de l'Église du Rwanda, mais aussi de l'Église universelle ». (cf. Gatwa, 2001 :251-252)

* 2VAN GESTAL, C., introduction à l'enseignement social de l'Eglise, Office Général du Livre, Paris,1950, p.11

* 3 Pie XII dans son Encyclique, Ténèbres de la terre cité par C. Van Gestal, op.cit. p.12

* 4 VAN GESTAL, C., Op.cit, p.12

* 5 VAN GESTAL, C., Op.cit, p.13

* 6 VAN GESTAL, C., ibidem

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld