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La réforme des entreprises publiques congolaises: reengineering ou simple mutation juridique. Cas de la Société Congolaise des Postes et Télécommunications (SCPT )

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par Walter- Wally NKUY KIMBUNGU
Université de Kinshasa - Licence 2011
  

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IV.2. Esprit de réfraction

L'analyse Stratégique part d'une constatation de base qu'aucun individu n'accepte d'être traité totalement et uniquement comme l'objet du fonctionnement ou de l'accomplissement des buts d'une organisation. Les conduites des acteurs ne sont plus vues comme la simple résultante, prévisible, stéréotypée et donc reproductible, des déterminants structurels, financiers ou psychologiques. Leurs conduites sont inventées par les acteurs, dans un contexte, construites en vue de certains buts. Si la formulation la plus achevée de cette conception est le fait de Michel Crozier et Erhard Friedberg, précisons qu'ils prennent explicitement appui sur les travaux de deux sociologues américains, March et Simon, à qui l'on doit le concept de "Rationalité Limitée" ainsi qu'une analyse davantage "politique" des organisations. Esquissons ici les grandes lignes de ce raisonnement. « Au lieu de partir d'un agent passif répondant de manière stéréotypée (c'est-à-dire prévisible) aux choix du stimulus qu'on lui impose, l'analyse stratégique postule l'existence d'agents libres ayant leurs propres buts ».39(*)

Ø Libres, car les organisations, quoiqu'étant des "machines à rationaliser", ont des limites;

Ø Leurs buts, parce que les acteurs ont donc la possibilité d'y développer leurs stratégies.

Pour atteindre ces buts, les acteurs vont poursuivre leurs propres stratégies; ils vont utiliser les ressources dont ils disposent de la manière la plus judicieuse compte tenu des contraintes du moment, telles qu'ils les perçoivent, depuis leur position. Leur conduite n'est donc pas entièrement prévisible puisque changeante. L'acteur ajuste constamment sa conduite aux données nouvelles auxquelles il se trouve confronté, dans sa recherche de son intérêt.

Un des questions que l'on se posera ici est précisément celle de savoir pour quelles raisons un acteur, individuel ou collectif, se comporte de telle ou telle manière, même si elle n'apparaît pas « rationnelle » aux yeux des autres.

L'analyse stratégique va de plus reconnaître l'existence de "rationalités multiples". Car il y a autant de "rationalités" que d'acteurs, ou que de groupes d'acteurs. Ainsi, sur la politique de formation, le point de vue du financier, du responsable formation, du chef de service, des travailleurs concernés... ne seront pas les mêmes ! On retiendra donc l'idée que les individus ou les groupes d'individus peuvent poursuivre des buts propres: l'organisation comme totalité est donc traversée par une multiplicité de buts: pouvoir, prestige, autonomie, etc. De plus, chaque rôle, chaque fonction dans l'organisation fait faire aux acteurs l'expérience de certaines contraintes. Pour les différents acteurs, il y a donc là, matière à négocier, concrètement, au jour le jour. Quelle sera la capacité de l'organisation à positiver l'existence de ces rationalités multiples, de ces multiples buts, de ces rationalités militées, entre lesquelles il doit y avoir négociation dans cette réforme? Telle sera la spécificité d'une approche politique de l'organisation. Face à cette multiplicité, qu'en est-il alors de l'unité de l'organisation? En fait, on la caractérisera comme un Système d'Action, l'organisation étant confrontée à un double problème:

Ø Réaliser ses objectifs, formuler ses propres buts;

Ø Appeler ses membres, ses "constituants" à participer à leur réalisation.

Bien entendu, ces acteurs peuvent y mettre les conditions, ils peuvent "négocier" leur participation, plus ou moins implicitement. Toute organisation a donc besoin de la participation de ses membres et cette participation est toujours négociée. Négociation, parce que la réalisation des objectifs des acteurs doit s'accommoder avec les objectifs de l'organisation. Les acteurs ne pourront poursuivre leurs propres objectifs qu'au travers de la poursuite des objectifs de l'organisation. Plus précisément les membres d'une organisation peuvent "refuser" cette participation et cette capacité leur donne du pouvoir dans l'organisation dans la mesure où celle-ci sera affectée par le comportement qu'ils adopteront. Une illustration pédagogiquement commode : la grève du zèle.

Ø on ne refuse pas le travail,

Ø mais on refuse "d'y mettre du sien" et on applique au contraire le règlement à la lettre, ce qui peut aboutir à la paralysie.

Notons que ce qui se passe entre l'individu et l'organisation, se passe aussi entre individus et entre groupes. C'est ici que nous retrouvons le concept de coopération conflictuelle. En cela consiste une vision politique de l'organisation, qui la voit comme un ensemble traversé de tendances et d'orientations diverses. Ce jeu d'équilibre se passe donc à l'intérieur de l'organisation, c'est-à-dire indépendamment des modifications de ses environnements.

D'une certaine manière, l'individu est donc solidaire, inconsciemment, de la survie de l'organisation. Pour le dire autrement: « l'organisation est un construit humain, traversé par des flux, réagissant aux variations de l'environnement ».40(*) Ces ajustements ne sont pas naturels ni prédéterminés: ils sont aussi construits, par les acteurs, au fil des opportunités qui se présentent.

Ces ajustements entre acteurs se font selon un modèle particulier qu'ils ont contribué à construire et qui leur permet de résoudre les problèmes de la vie quotidienne. C'est très précisément ce que les auteurs nomment : le système d'action concret.

Eu égard à cela, mettre en place un reengineering est un énorme défi qui consiste à persuader les personnes travaillant dans une organisation d'accepter la perspective d'un changement capital. C'est une campagne d'éducation et de communication qui dure du début à la fin du reengineering.

Les entreprises qui parviennent le mieux à faire accepter le changement à leurs agents sont celles qui expliquent le plus clairement la nécessité d'une réorganisation. Ce sont celles dont leurs cadres supérieurs réussissent à formuler et à exprimer deux messages clés : voilà où en est aujourd'hui notre entreprise et pourquoi elle ne peut en rester là (le reengineering est donc indispensable à la survie de l'entreprise) ; et voilà ce qu'il faut devenir en tant qu'entreprise (cela donne un but aux salariés).

Pour exprimer et faire connaître ces messages essentiels, l'OCPT devrait utiliser deux documents41(*) :

L'appel à l'action : (case of action) explique pourquoi l'entreprise exige un reengineering. Cet argumentaire persuasif non exagéré doit montrer ce qu'il en coûterait de se contenter de demi-mesures.

La définition de la vision (vision statement) rappelle à l'organisation quels processus doivent effectivement être travaillés (où va-t-on ?). Elle offre aussi un étalon de mesure pour évaluer l'état d'avancement du Reengineering.

Cependant, la non prise en compte, minime soit-elle de tous les acteurs concernés dans ce vaste plan de réforme reste la cause du fossé entre les agents des entreprises et le COPIREP ; voilà un facteur de démotivation, de rejet, voire de frustration, parce que ces agents ne se sentent pas concernés par ce travail. Ce sentiment a conduit même au refus et rejet du projet ; d'où d'incessants settings et des mentions telles que « OCPT ezali ya koteka te... ». Il est important que l'entreprise fasse accepter la perspective d'un changement capital. Les entreprises qui parviennent le mieux à faire accepter le changement à leurs salariés sont celles qui expliquent le plus clairement la nécessité d'une réorganisation et le renforcement des capacités.

* 39 CROZIER, M. et FRIEDBERG, E., L'Acteur et le Système, Les contraintes de l'action collective, Paris, Le Seuil, 1977, p.43.

* 40 Idem, p.45.

* 41 GELINIER, Octave, L'Ethique des Affaires : alte à la dérive, Paris, Dunod, 1991, p.62.

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