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La compétence suisse selon l'art. 264m al. 1 cp et le rôle de l'entraide internationale en matière pénale dans ce contexte

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par Annalena Hellmüller
Université de Fribourg - Master en droit 2014
  

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2.1.3 Survol historique

Le concept de la compétence universelle ne date pas de l'époque moderne. Henzelin voit un lien avec l'idée d'un droit naturel, développé déjà par Aristote, qui existerait indépendamment d'une procédure d'adoption et qui découlerait de la nature même et qui serait inné à l'être humain tout en prévalant indépendamment de sa volonté13. Cet auteur cite Cicéron : « Le droit est donc fondé par nature et non par institution. Violer le droit, c'est agir contre nature, abjurer la loi universelle ». Selon Grotius (1583-1645), considéré comme un des fondateurs de l'école de droit naturel moderne14, certaines infractions produisent des effets non seulement dans l'Etat où elles sont commises mais lèsent la communauté internationale dans son ensemble. Par conséquent, chaque Etat devrait pouvoir les réprimer, quel que soit le lieu de commission15. Cette conception repose sur l'idée que certains crimes s'attaquent aux valeurs fondamentales de notre société et à la sécurité de l'humanité dans son ensemble. L'auteur est ainsi considéré comme une sorte de hostis humani generis (« ennemi de toute l'humanité ») et chaque Etat aurait un intérêt propre à le réprimer16.

La première expérience d'un tribunal détenant une compétence universelle était celle du procès de Nuremberg à la suite de la deuxième guerre mondiale. Il a ensuite fallu attendre la fin de la guerre froide pour voir naître le TIPY (février 1993) et le TPIR (novembre 1994).

La compétence universelle nationale a également vu le jour à la même époque. En 1993, la Belgique a fait figure de pionnière en étant le premier Etat à adopter une loi fondant sa compétence universelle en ce qui concerne les crimes de guerre, loi qui a été élargie pour inclure le génocide en 1999. La compétence universelle pratiquée ainsi par la Belgique, ne posait aucune condition territoriale ; la loi n'exigeait même pas que la personne accusée soit présente sur le territoire du pays lors de l'ouverture de la procédure et n'accordait aucun poids à l'immunité

10 http://www.restorativejustice.org.

11 OFJ (2005), p. 14.

12 OFJ (2005), p. 37.

13 HENZELIN (2001), p. 82.

14 IDEM, p. 92.

15 HENZELIN (2001), p. 97.

16 KOLB (2012), p. 254.

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politique17. Cette conception du principe de l'universalité s'approche à sa forme la plus absolue. L'Espagne connaissait également une compétence universelle semblable, ce qui a notamment permis au juge Baltasar Garzòn de lancer un mandat d'arrêt international contre Augusto Pinochet en 199818.

Même si la conception large de la compétence universelle n'a jamais fait l'unanimité et a souvent été vivement contestée19, elle a souffert de revers encore plus conséquents depuis le début du millénaire. Sous pressions américaines, et pour éviter des incidences diplomatiques, la Belgique a dû modifier sa loi en 2003, afin de soumettre l'application du principe de l'universalité à la condition de la présence sur territoire belge20. L'Espagne est également revenue en arrière en 2009 ; la compétence du juge espagnol est dorénavant subordonnée à la présence du coupable présumé sur territoire espagnol. Cette tendance a récemment été confirmée suite à une proposition de loi qui restreindrait cette compétence encore davantage si elle est acceptée (voir infra 3.4).

Aujourd'hui, on conçoit généralement la compétence universelle sous une forme quelque peu atténuée. Elle peut prendre les contours d'une « compétence de remplacement » selon l'art. 7 al. 2 let. a, lorsque la demande d'extradition est rejetée pour d'autres raisons que la nature de l'infraction (également appelé « compétence de représentation »)21. Cela peut être le cas lors l'Etat requérant risque de faire subir des traitements inhumains à la personne extradée ou si, au contraire, il n'a manifestement pas l'intention de la poursuivre (cf. art. 55 EIMP)22. Dans sa forme la plus pure, le principe de l'universalité reste conditionnel ; son application est au moins subordonnée à la présence territoriale de l'accusé23.

S'il semble prévaloir aujourd'hui une conception de l'universalité nationale moins absolue que celle appliquée jadis en Belgique, les institutions internationales et nationales tendent simultanément à favoriser une universalité assez flexible pour permettre une lutte efficace contre l'impunité. La législation suisse s'est adaptée à cet objectif et on s'approche aujourd'hui d'un système correspondant à l'idéal défendu par les organisations qui oeuvrent contre l'impunité. La pratique même du principe de l'universalité dans sa forme la plus « raisonnable » semble cependant être très généralement acceptée, même si les cas concrets ont suscité moins d'attention que ceux relevant de la juridiction des tribunaux internationaux24.

Malgré cette évolution, certaines voix s'élèvent aujourd'hui pour remettre en cause le principe même de l'universalité. En effet, il n'est pas forcément naturel d'accorder la compétence pénale à la juridiction d'un Etat à des milliers de kilomètres du lieu des faits. Nous étudierons davantage le fondement de ces critiques un peu plus loin.

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