WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Protection sociale et croissance économique au Cameroun

( Télécharger le fichier original )
par Jean Colbert Awomo Ndongo
Université de Yaoundé II-Cameroun - D.E.A en Sciences Economiques 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CONCLUSION

Au terme de cette évaluation empirique des effets de la protection sociale sur la croissance, l'utilisation de dépenses de sécurité sociale comme proxies de la protection sociale a permis de relever un impact négatif et significatif des dépenses de sécurité sociale sur la croissance. Mais le caractère atypique des économies de l'Afrique subsaharienne a conduit à une certaine prudence dans l'interprétation de ces résultats car l'économie informelle y occupe une place primordiale. Cette incidence négative semblerait s'expliquer par les effets de la fiscalité et de la corruption qui sont néfastes à la croissance. Car les prélèvements sociaux sont la cause de l'alourdissement de la fiscalité.

85

CONCLUSION DEUXIEME PARTIE

En fin de compte, d'après la littérature théorique et empirique, lorsqu'il s'agit du lien entre protection sociale et croissance les économistes sont partagés sur la question de savoir si la protection sociale constitue une entrave ou si elle contribue à la croissance. Ainsi, selon certains, elle découragerait l'épargne et l'investissement, serait néfaste à l'emploi et son financement grèverait la compétitivité du territoire. Pourtant, d'autres réfutent ces arguments et insistent sur l'apport de la protection sociale à la croissance par, entre autres, le soutien à la demande, l'enrichissement du capital humain et l'incitation à la prise de risque. En outre, on constate que les pays, qui ont aujourd'hui un niveau de protection sociale élevé, bénéficient également de manière globale une croissance économique supérieure à la moyenne mondiale (Enjoras, 1999).

Une évaluation des effets de la protection sociale sur la croissance à l'aide des données de l'économie camerounaise a permis de constater que les dépenses de protection sociale sembleraient exercer une incidence négative et significative sur la croissance au Cameroun. Les estimations des séries chronologiques ont été effectuées sur la période 1975 à 2006 à l'aide du logiciel EVIEWS. Toutefois, il ressort de ces résultats que le caractère atypique de l'économie camerounaise et surtout les effets des détournements des derniers publics peuvent justifier cette incidence négative des dépenses de sécurité sociale sur la croissance.

CONCLUSION GENERALE ET RECOMMANDATIONS DE POLITIQUE ECONOMIQUE

86

Au terme de cette étude, il ressort que la protection sociale influe sur la croissance via la productivité du travail dans un plan microéconomique. Ainsi, la protection sociale a une incidence positive sur la productivité des travailleurs. Ceci a été prouvé théoriquement à travers une mise en exergue d'une part, de la théorie du salaire d'efficience car, la théorie du salaire d'efficience est sans doute aujourd'hui parmi les théories sur lesquelles les économistes du travail se penchent le plus. Cette théorie a permis d'établir une relation croissante entre le salaire d'un individu et sa productivité, et partant le niveau de couverture sociale que bénéficie un travailleur dans la firme et l'intensité du travail qu'il peut fournir. Les auteurs comme Leibenstein (1974), Mirless (1975) et Stiglitz (1976) ont mis l'accent sur le fait que, dans les pays peu développés où la malnutrition domine, les performances des individus dépendent directement de leur salaire exprimé en biens de consommation. D'autre part, la théorie du capital humain selon laquelle, la protection sociale améliore l'état de santé des individus et de surcroît leur productivité. Car la santé a été présentée comme un élément du capital humain au même titre que l'éducation. Les auteurs tels que Grossman(1972, 1998 ), Piateki et Ulmann (1996), Ulmann (1999) et Majnoni d'Intignano et Ulmann (2001) ont démontré que la santé avait un effet positif sur la productivité du travail car elle permettait de réduire le manque à gagner dû à l'absence au travail pour cause de la maladie.

Le régime camerounais de protection sociale mis en place en 1956, actuellement géré par la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale, qui s'adresse aux seuls travailleurs salariés relevant du code du travail et aux membres de leurs familles. Il comporte trois branches qui servent des prestations diverses aux demandeurs qui remplissent les conditions pour en bénéficier : la branche des prestations familiales, la branche des pensions et la branche des risques professionnels. Les prestations de ces branches sont complétées par celle de l'action sanitaire et sociale. S'agissant du financement de ces branches, il est assuré par : les cotisations des employeurs pour les branches de prestations familiales et des risques professionnels, les cotisations des employeurs et des travailleurs pour la branche des pensions ; un prélèvement sur les cotisations des trois branches et les participations des usagers pour l'action sanitaire et sociale.

S'agissant de la prise en charge des malades, on peut estimer que 4 à 5% seulement de la population camerounaise dispose, actuellement, d'une forme de protection contre le risque

87

maladie. Il faut y ajouter un pourcentage difficile à chiffrer, mais de l'ordre de 15%, qui dispose d'une couverture très partielle du risque grâce aux caisses de secours mises en place dans le cadre des associations ou tontines traditionnelles (Eppée Kotto, 2004). Les assurances privées ont connu beaucoup d'échecs et présentent une rentabilité limitée.

Toutefois il faut noter que le système camerounais de protection sociale est basée sur la solidarité et présente des signes d'inadaptation car la limitation de la couverture de sécurité sociale aux travailleurs salariés qui représentent à peine 10% de la population, les populations exerçant dans le secteur informel, le secteur rural vivant encore dans l'exclusion. De plus, la stagnation du niveau des prestations servies qui n'ont pas été revalorisées pour tenir compte de la hausse du coût de la vie.

L'évolution de la protection sociale et de la productivité du travail au Cameroun a permis de constater que la productivité du travail est élevée dans le secteur formel et faible dans le secteur informel qui pourtant regorge une plus grande partie des emplois. Ainsi la productivité dans l'ensemble s'est avérée faible. Ceci est dû au fait que les travailleurs du secteur formel, peu nombreux jouissent d'une bonne couverture sociale tandis que ceux du secteur informel, majoritaire n'en bénéficient presque pas. De même, une étude statistique de la corrélation entre les prestations sociales reçues et la productivité de la main d'oeuvre a permis de montrer qu'il existe une forte liaison entre la productivité d'un individu et son niveau de couverture sociale car le calcul du coefficient de corrélation et de la covariance entre les deux variables a donné des résultats satisfaisants. Avec un coefficient de corrélation proche de l'unité et une variance élevée et positive. Ainsi l'hypothèse H1 selon laquelle une

hausse de la couverture sociale entraîne une augmentation de la productivité du travail été testée.

Les diagnostics macroéconomiques des effets de la protection sociale sur la croissance ont permis de montrer que d'une part, la protection sociale pourrait avoir une incidence négative sur la croissance. Car le financement des systèmes de protection sociale entraîne un alourdissement de la fiscalité qui a des effets sur l'attractivité des investissements et la compétitivité d'une économie, puis la hausse des salaires des travailleurs peu qualifiés induite par la générosité des systèmes de protection sociale entraîne une hausse du chômage de cette catégorie de travailleurs. De plus, si les régimes de prestations sociales découragent les individus de travailler, l'offre de travail dans l'économie diminue, ce qui réduit le niveau de la production et dans certains cas, de l'investissement et, de ce fait, de la croissance.

La protection sociale n'est pas sans effets sur la croissance économique (Ahmad, Dreze et Sen, 1991) : elle peut la favoriser en encourageant la prise de risques, en permettant

88

d'adopter des technologies plus productives et en prenant en compte la problématique hommes-femmes, mais elle peut aussi la freiner en éliminant le risque et en incitant les individus à modifier leur comportement. La fourniture par l'Etat d'un soutien aux systèmes de protection sociale est donc un instrument important du développement économique, qui force parfois à choisir entre l'efficacité à court terme et l'efficience à long terme. L'absence d'instruments appropriés de protection sociale expose encore plus les pays à des chocs externes qui peuvent interrompre leur croissance. Comme on a récemment pu le constater, c'est peut-être à cause des conflits sociaux latents et des carences des institutions ayant pour mission de gérer les conflits (y compris l'insuffisance des filets de sécurité sociale) que tant de pays voient leur économie s'effondrer depuis le milieu des années 70 (Rodrik, 1999). Par ailleurs, la protection sociale peut être considérée comme un soutien à la demande, un enrichissement du capital humain, une réponse au « dilemme des générations » et un facilitateur des ajustements structurels.

Il ressort de la présente étude qu'un accroissement des dépenses de protection sociale diminue la croissance. Ces résultats ont été obtenus en appliquant les méthodes statistiques et économétriques issues des études précédentes à des données qui pourraient être considérées comme de bonne qualité, notamment les données les plus fiables qui soient disponibles sur le Cameroun au sujet non seulement de la sécurité sociale, mais également de l'investissement privé, du PIB réel, du taux brut de scolarisation du primaire et du secondaire. Les estimations indiquent une incidence négative des dépenses de sécurité sociale sur la croissance. Ce qui est contraire avec les résultats microéconomiques trouvés à la première patrie de cette étude qui montraient un effet positif des prestations sociales sur la productivité du travail. Pourtant d'après les études effectuées sur le lien productivité-croissance (Artus et Cette, 2004 ; Nayman et al, 2004 ; Belorgey et al, 2005) la productivité du travail est une variable pertinente et positive de la croissance. Donc un accroissement de la productivité de travail entraîne une augmentation de la croissance. Ainsi, la protection sociale qui a une incidence positive sur la productivité du travail devrait avoir une incidence positive sur la croissance. Cependant, les résultats trouvés dans la deuxième partie de cette étude conduisent à penser à une certaine différenciation des dépenses de sécurité sociale et privilégier celles qui soutiennent l'emploi dont une augmentation aura tendance à accroire la croissance, telle que le recommandent Arjona et al. (2002).

Les débats quant aux effets de la protection sociale sur la croissance doivent certes être pris en compte, mais il n'est pas question de contester la légitimité de l'existence de la protection sociale au Cameroun. Cette dernière relève d'un choix, celui opéré par l'Etat de

89

viser le bien-être des citoyens. Pour l'essentiel, il s'agit aujourd'hui de porter le débat sur les modalités de sa mise en oeuvre, et de s'interroger sur la manière de faire évoluer les systèmes de protection sociale pour les adapter au nouveau modèle de développement socio-économique en vigueur, tout en continuant de viser l'amélioration du bien-être des citoyens camerounais.

En somme de toutes ces conclusions, quelques modestes recommandations de politique économique s'avèrent nécessaires :

1) Il est important d'étendre la protection sociale à tous les travailleurs ceci permettra non seulement aux travailleurs d'être en bonne santé, mais également d'être plus productifs.

2) Une reforme en profondeur du système actuel de sécurité sociale est donc appropriée c'est-à-dire une extension effective de la sécurité sociale au secteur informel qui regorge un grand nombre d'emplois et aux agriculteurs du monde rural. Dans le but d'accroire les capacités productives dans cette partie de l'économie d'une part, et soutenir en retour la croissance d'autre part.

90

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand