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Elaboration d'une méthode d'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'aire marine protégée de Joal-Fadiouth au Sénégal

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par Marie Balland
Université de Liège - Master en sciences et gestion de l'environnement 2009
  

Disponible en mode multipage

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    Université de Liège
    Faculté des sciences

     
     
     
     

    Elaboration d'une méthode d'évaluation de

    l'efficacité de la gestion de l'Aire Marine

    Protégée de Joal-Fadiouth au Sénégal

    Bouée délimitant l'AMP de Joal-Fadiouth

    (c) Balland M.

    Marie Balland

    Année académique 2008-2009

    Travail de fin d'études présenté en vue de l'obtention du master en sciences et gestion
    de l'environnement, option gestion et développement durable.

    Promoteur: M. Mormont

    Département des sciences et gestion de l'environnement, Unité de Socio-économie, Environnement et Développement

     

    Cet ouvrage a été imprimé sur du papier certifié FSC Mixed Source

    Remerciements

    Je remercie tout d'abord mon promoteur, Monsieur Mormont, qui m'a soutenue et aiguillée tout au long de ce travail.

    Un grand merci à la Commission Universitaire pour le Développement qui m'a accordé sa confiance en m'octroyant une bourse de voyage pour mon stage au Sénégal.

    Mes remerciements à Claude Sène, mon responsable académique au Sénégal, pour ses conseils et pour m'avoir guidée vers l'AMP de Joal-Fadiouth.

    Bien sûr, je remercie la Direction des Parcs Nationaux parce qu'elle m'a autorisée à réaliser ce stage sur l'AMP de Joal-Fadiouth. Ma reconnaissance va tout particulièrement au Lieutenant Mamadou Cara Diédhiou pour m'avoir accompagnée durant ce stage, ainsi qu'au Lieutenant Amar Fall et à l'adjudant Al Hassane Seck Mané.

    Enfin, toute ma reconnaissance aux membres du comité de gestion de l'AMP et aux habitants de Joal-Fadiouth pour leur accueil chaleureux et pour le temps qu'ils m'ont accordé.

    Et pour terminer, je remercie ma famille, mes proches et plus particulièrement Charly pour leur soutien.

    Résumé

    Le recours aux Aires Marines Protégées (AMPs) pour lutter contre la surexploitation des ressources halieutiques est de plus en plus fréquent. Les AMPs se multiplient à travers le monde mais elles ne pourront atteindre leurs objectifs qu'à condition d'être gérées de manière efficace. Ce n'est que très récemment que des outils ont été développés afin d'aider les gestionnaires d'AMP à évaluer l'efficacité de leur gestion.

    En 2004, au Sénégal, ont été créées 5 AMPs, dont celle de Joal-Fadiouth. Comme la majorité des AMPs à travers le monde, celle-ci ne dispose pas de procédure globale d'évaluation de son efficacité.

    Dans ce travail, nous avons développé, sur base d'indicateurs socio-économiques, écologiques et de gouvernance, une méthode d'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth. Les indicateurs proviennent initialement d'un guide réalisé par l'IUCN et le WWF. Ensuite, un stage sur le terrain m'a permis de collecter des données spécifiques à cette AMP. Suite à l'analyse de ces données, les indicateurs ont été adaptés aux ressources et à la situation de celle-ci.

    Ce travail a abouti à l'élaboration d'une série d'indicateurs de gouvernance qui forme une grille de lecture qui pourrait certainement être également appliquée à d'autres AMPs cogérées. Onze indicateurs biophysiques basés uniquement sur des données qui ont déjà été collectées à l'AMP de Joal-Fadiouth ont également été développés. Concernant les indicateurs socio-économiques, l'analyse n'a ciblé que quelques indicateurs. Nous avons constaté que le questionnaire n'est pas le meilleur moyen de collecter les données liées aux valeurs et préoccupations environnementales des individus ; il serait plus approprié d'effectuer une analyse globale des perceptions qu'ont les individus de leur territoire ou de se référer plutôt à des pratiques.

    III.2.1. Localisation de la commune de Joal-Fadiouth 33

    Table des matières

    Remerciements Résumé

    INTRODUCTION 1

    I ETAT DES LIEUX 3

    I.1. Des Aires Marines Protégées pour contrer la surexploitation des océans 3

    I.2. Historique d'un cadre législatif 4

    I.3. Gestion des AMPs 6

    I.4. Évaluation de l'efficacité de la gestion d'AMP 7

    I.4.1. Intérêt d'effectuer une évaluation de l'efficacité de la gestion 7

    I.4.2. Développement d'outils 8

    I.4.3. Cadre de l'UICN pour l'évaluation de l'efficacité de la gestion des aires

    protégées 9

    I.5. Evaluation de la gestion d'AMP à partir d'indicateurs. 11

    I.5.1. Indicateurs biophysiques 11

    I.5.2. Indicateurs sociaux 12

    I.5.3. Indicateurs économiques 12

    I.5.4. Indicateurs de gouvernance 13

    I.5.5. Niveau de l'évaluation en fonction du type d'indicateur 13

    II. DESCRIPTION DES INDICATEURS DU GUIDE DE L'UICN 14

    II.1. Indicateurs biophysiques 15

    II.2. Indicateurs de gouvernance 20

    II.3. Indicateurs socio-économiques 24

    III. DESCRIPTION DU MILIEU ETUDIE 27

    III.1. Situation de la pêche en Afrique de L'ouest et au Sénégal 27

    III.1.1. Afrique de l'Ouest, une écorégion particulière 27

    III.1.2. Création d'un réseau d'AMP en Afrique de l'Ouest 28

    III.1.3. La pêche artisanale au Sénégal, un secteur en crise 29

    III.1.4. Création d'AMPs au Sénégal 31

    III.2. Description de la commune et de l'AMP de Joal-Fadiouth 32

    III.2.2. Situation socio-économique 33

    III.2.2.1 population 33

    III.2.2.2. Exploitation des ressources halieutiques...................................................34

    III.2.3. Caractéristiques biophysiques 35

    III.2.3.1. Hydrologie marine 35

    III.2.3.2. Flore 35

    III.2.3.3. Faune 36

    III.2.4. L'AMP de Joal-Fadiouth 39

    III.2.4.1. Présentation générale

    III.2.4.2. Historique de la mise en place d'une institution de gestion de l'AMP

    IV. METHODES DE COLLECTE DES DONNEES 43

    IV.1. Recherche de données existantes 44

    IV.2. Entretiens avec les principales parties prenantes 45

    IV.3. Questionnaire destiné aux habitants de Joal-Fadiouth 47

    V. ADAPTATION DES INDICATEURS AU CAS D'ETUDE 52

    V.1. Ajustement du questionnaire 53

    V.2. Evaluation de la gouvernance 59

    V.2.1. Evaluation et adaptation des indicateurs du guide de l'UICN 59

    V.2.2. Indicateurs supplémentaires 78

    V.2.3. Synthèse des indicateurs de gouvernance 83

    V.2.4. Niveau de l'évaluation 85

    V.3. Evaluation des perceptions et des connaissances de la communauté 86

    V.3.1. Analyse des résultats 86

    V.3.2. Synthèse 93

    V.4. Évaluation biophysique 95

    V.4.1. Evaluation et adaptation des indicateurs du guide de l'UICN 95

    V.4.2. Synthèse des indicateurs biophysiques 112

    V.5. Mise en relation avec les objectifs et les indicateurs du plan de gestion 113

    CONCLUSIONS 117

    REFERENCES .122

    Sigles ..125

    1

    INTRODUCTION

    Les côtes sénégalaises sont parmi les plus poissonneuses au monde. La pêche joue un rôle socio-économique primordial dans ce pays. Néanmoins, depuis une cinquantaine d'années, ce secteur est en crise ; on observe une surcapacité de pêche et les ressources halieutiques ne cessent de s'amenuiser.

    Afin de contrer ce phénomène et de protéger l'extraordinaire biodiversité que révèlent ses côtes, le Sénégal a misé sur le développement d'Aires Marines Protégées (AMPs). Joal-Fadiouth fait partie des 5 AMPs qui ont été créées, de manière participative, en 2004.

    Cependant, les AMPs ne pourront atteindre leurs buts ambitieux que si elles sont gérées de manière efficace. Or, ce n'est que très récemment qu'ont été développés des outils pour aider les gestionnaires d'AMP à évaluer l'efficacité de leur gestion. A Joal-Fadiouth, comme dans la majorité des AMPs à travers le monde, aucune procédure globale d'évaluation n'existe ; tout au plus certains paramètres sont mesurés isolement.

    L'objectif de ce travail est de développer, sur base d'indicateurs socio-économiques, écologiques et de gouvernance, une méthode d'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth.

    L'idée est d'adapter les indicateurs du guide réalisé par l'Union International pour la Conservation de la Nature (UICN) et le WWF - "Guide sur les indicateurs naturels et sociaux destinés à évaluer l'efficacité de la gestion des aires marines protégées" (Pomeroy et al. 2006) - de manière à élaborer une méthode d'évaluation spécifique à l'AMP de Joal-Fadiouth. Un stage au niveau de l'AMP de Joal-Fadiouth m'a permis de récolter des données spécifiques à cette AMP. Sur base de l'analyse de ces données, j'ai développé des indicateurs adaptés aux ressources et à la situation de cette AMP ainsi qu'aux possibilités techniques dont disposent les acteurs de terrain pour collecter les données.

    Autrement dit, les données qui sont récoltées et analysées à propos de l'AMP de Joal-Fadiouth permettent une première évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP mais, avant tout, dans le but d'adapter les indicateurs du guide le l'UICN à cette AMP.

    Il s'agit donc d'un objectif méthodologique - mettre au point une méthode d'évaluation adapté à l'AMP de Joal-Fadiouth - et pratique - les indicateurs proposés pourront être

    2

    directement utilisés par les gestionnaires de l'AMP de Joal-Fadiouth pour effectuer un suivi des ressources de l'AMP et évaluer l'efficacité de leur gestion.

    Concrètement, je commencerai par exposer un état de lieu général de la question des AMPs et de l'évaluation de l'efficacité de leur gestion. Ce chapitre sera suivi d'une présentation des indicateurs du guide de l'UICN et d'une description du lieu d'étude qui permettra de situer le contexte socio-économique et biophysique dans lequel a été développée l'AMP de Joal-Fadiouth. La méthode de collecte des données sera explicitée et enfin, sur base de l'analyse des données collectées sur le terrain, des indicateurs seront adaptés à l'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth.

    I ETAT DES LIEUX

    3

    I.1. Des Aires Marines Protégées pour contrer la surexploitation des océans

    Surcapacité de pêche, développement des technologies de prospection et techniques destructives laissent peu de chance aux poissons. Combinée aux effets de la pollution, la surpêche risque de transformer nos océans en désert liquide. Aujourd'hui, la crise est généralisée ; selon les chiffres de la FAO publié en 2005, 75% des ressources marines sont en passe d'être surexploitées et 90% de la biomasse des grands prédateurs a disparu (Guerin et Ody, 2007). La survie des écosystèmes marins est menacée. Les conséquences de cette catastrophe annoncée sont, certes, écologiques mais elles sont aussi économiques et sociales. Les populations côtières voient d'ores et déjà leurs ressources alimentaires et financières s'amenuir.

    Le recours aux aires marines protégées (AMPs) comme outil de gestion des pêcheries est de plus en plus fréquent. En effet, celles-ci constituent des milieux particulièrement propices au renouvellement des ressources halieutiques1.

    Le congrès mondial de la conservation (Montréal, octobre 1996) a défini une AMP de la façon suivante : « Tout espace intertidal2 ou infratidal3 ainsi que ses eaux sus-jacentes, sa flore, sa faune et ses ressources historiques et culturelles que la loi ou d'autres moyens efficaces ont mis en réserve pour protéger en tout ou en partie le milieu ainsi délimité ».

    Les rôles des AMPs sont multiples : protection des espèces et des habitats, conservation de la biodiversité, restauration des stocks de pêche, gestion des conflits entre divers utilisateurs de la ressource (Pomeroy et al., 2006). Les effets des AMPs ne se limitent donc pas à des effets environnementaux et écologiques, les AMPs ont également des effets sociaux et économiques. Ces deux derniers effets ne sont, hélas, pas toujours positifs ; la

    1 Le terme halieutique désigne tout ce qui à trait à l'exploitation des ressources vivantes aquatiques. Les ressources halieutiques représentent les stocks d'espèces aquatiques exploitables.

    2 L'espace intertidal correspond à la zone côtière comprise entre les niveaux des marées les plus hautes et les niveaux des marées les plus basses.

    3 L'espace infratidal correspond à la zone côtière continuellement immergée.

    4

    création d'AMP peut limiter fortement l'accès des populations locales aux ressources, surtout dans leurs premières années de fonctionnement. La grande majorité des AMPs ont été établies avant tout pour des raisons de protection de la biodiversité mais, comme nous le verrons dans le prochain chapitre, on ne peut, aujourd'hui, dans un contexte de développement durable, négliger les répercussions de celles-ci sur les populations côtières.

    I.2. Historique d'un cadre législatif

    La fonction initiale des AMPs était de « mettre sous cloche » une zone d'intérêt biologique ou esthétique. Cette vision des aires protégées est aujourd'hui dépassée.

    La conférence des Nations Unies, à Stockholm en 1972, représente la naissance d'une conscience environnementale et va, pour la première fois, à travers une déclaration, insérer l'environnement dans le droit international. Par la suite, on assiste à une forte expansion des AMPs qui vont inévitablement s'étendre à des zones occupées et utilisées par des populations autochtones. Néanmoins, la prise en compte de l'homme et des aspects socio-économiques dans les politiques de conservation de la biodiversité n'apparaît timidement que dans les années 80, dans le cadre du programme de MAB (Man And Biosphere) de l'UNESCO4. Ce programme encourage la création d'un réseau d'AMPs et met en évidence l'utilisation rationnelle des ressources5. Cette première tentative d'intégrer l'homme comme partie prenante de son environnement annonce déjà l'évolution majeure que va entrainer la conférence de Rio en 1992 (Cazalet, 2004).

    En effet, de la conférence de Rio vont naître plusieurs textes. Nous en retiendrons trois particulièrement : La déclaration sur l'environnement et le développement, L'agenda 21 et La convention de Rio sur la diversité biologique. La première réaffirme l'importance du rapport entre environnement et développement et fait émerger le concept de développement durable qu'il consacre dans son principe 46. L'agenda 21 présente les actions et stratégies qui permettent de concrétiser le développement durable. On y trouve une référence aux AMPs

    4 Une liste des signes et de leur signification est disponible en fin d'ouvrage.

    5 L'utilisation rationnelle des ressources se définit comme une utilisation des ressources au bénéfice de l'humanité d'une manière qui soit compatible avec le maintien des propriétés naturelles des écosystèmes (Cazelet, 2004)

    6 Principe 4 : « Pour parvenir à un développement durable, la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolément. »

    5

    dans le chapitre 15.5g. : « Parmi les mesures in situ, on devrait notamment renforcer les systèmes de zones protégées (zones terrestres, marines ou aquatiques), et préserver, entre autres éléments, les zones dulçaquicoles et autres zones humides vulnérables et les écosystèmes côtiers, tels qu'estuaires, récifs coralliens et mangroves;». Il s'agit néanmoins toujours de conférences, de déclarations d'intention ou de plan d'action qui ne sont donc pas contraignants pour la communauté internationale. La convention de Rio sur la diversité biologique va pallier à cette faiblesse par un engagement contraignant des états signataires. Aujourd'hui, presque tous les états de la planète y ont adhéré dont la plupart des pays d'Afrique. L'article 8 de la convention prévoit la mise en place d'un système d'aires protégées, préconisé pour répondre aux objectifs de sauvegarde des espèces et de leurs habitats et pour la reconstitution d'écosystèmes dégradés. Cette création doit autant que possible s'accompagner d'un mécanisme, éventuellement réglementaire, de gestion du patrimoine biologique à l'intérieur et sur les pourtours des aires protégées. La majorité des états membres, y compris la plupart des états africains, ont réalisés une traduction interne de ces règles. (Cazalet, 2004 ; Doumbè-Billé, 2001)

    D'autres instruments plus spécifiques vont suivre. En 1995, la FAO élabore le code de conduite pour une pêche responsable. Celui-ci tente d'appliquer le concept de durabilité aux activités halieutiques. Ce code ne fait pas directement référence aux AMPs mais certaines recommandations sont directement applicables aux aires protégées. Ainsi, l'article 10.1.2 et 10.1.3 7 appuie la prise en compte et la participation des communautés de pêcheurs dans la gestion des zones côtières (FAO, 1995). En 1995, également, l'UNESCO (programme MAB) élabore un cadre statutaire pour les réserves de biosphères : la stratégie de Séville. Celui-ci prône la démarche systémique et pluridisciplinaire et la reconnaissance des savoirs locaux. Il préconise des partenariats entre communautés locales et autorités responsables. (Cazalet, 2004)

    Enfin, lors du sommet mondial sur le développement durable de 2002, un engagement a été pris sur la création de «zones marines protégées conformes au droit international et

    7 Article 10.1.2 « Eu égard aux multiples utilisations de la zone côtière, les Etats devraient veiller à ce que des représentants du secteur des pêches et des communautés de pêcheurs soient consultés au cours des processus de décision et qu'ils prennent part à d'autres activités en rapport avec la planification de l'aménagement et le développement des zones côtières.» Article 10.1.3 « Les Etats devraient mettre en place, le cas échéant, des cadres institutionnels et juridiques en vue de déterminer les utilisations possibles des ressources côtières et régir l'accès à ces ressources, en tenant compte des droits des communautés côtières de pêcheurs et de leurs pratiques coutumières de manière compatible avec un développement durable.»

    6

    basées sur des informations scientifiques, y compris des réseaux représentatifs, d'ici à 2012 ». (Pomeroy et al, 2006)

    Ces législations servent de base au développement de législations nationales dans les pays en voie de développement. C'est également sur ces instruments que repose l'évolution du concept d'AMP ; d'abord considérées comme des zones qu'on souhaitait isoler complètement des humains, elles se sont ensuite adaptées aux nécessités du développement économique et social pour devenir des lieux d'intégration de la science et de la gestion au bénéfice du développement durable.

    I.3. Gestion des AMPs

    Les AMPs recouvrent moins de 1% de la superficie totale des océans et moins de 10% de celles-ci atteignent leurs buts en matière de gestion (Kelleher et al, 1995 IN Pomeroy, 2006). Aujourd'hui, des engagements sont pris pour la création d'AMPs et leur nombre ne cesse de se multiplier. Cependant, les AMPs ne pourront atteindre leurs buts ambitieux d'utilisation durable des ressources halieutiques, de conservation de la biodiversité et de meilleure qualité de vie pour les populations côtières que si elles sont gérées de manière efficace.

    « Un processus de gestion comprend la planification, la conception, la mise en oeuvre, la surveillance, l'évaluation, la communication et l'adaptation » (Pomeroy, 2006). Lors de la mise en place d'un processus de gestion, il est indispensable de commencer par définir quels sont les buts généraux que l'AMP vise à atteindre. Ceux-ci servent alors de base à l'élaboration d'une série d'objectifs spécifiques, réalistes et mesurables qui permettront de rendre compte des progrès dans l'AMP. L'idéal est que l'établissement des buts et objectifs de l'AMP soit défini de manière participative afin de refléter un équilibre entre les besoins et les souhaits de toutes les parties prenantes8 et de les associer au projet dès le départ. Ensuite, des actions sont menées pour atteindre ces objectifs. On comprend aisément qu'il est nécessaire qu'un processus de suivi et d'évaluation soit inclus dans le processus de gestion afin de vérifier l'efficacité des actions menées, c'est ce que nous verrons dans le chapitre suivant.

    8 "Les parties prenantes sont des individus, des groupes ou des organisations de personnes qui sont intéressées ou affectées (positivement ou négativement) par l'AMP, ou impliqués dans l'AMP d'une quelconque manière "(Pomeroy et al, 2006). Généralement on considère principalement des groupes ou organisations de personnes plutôt que des individus isolés.

    7

    Notons que la gestion des AMPs peut être menée selon trois modes principaux :

    - la gestion centralisée qui implique une faible participation des parties prenantes puisque la gestion est conduite par une administration centrale ;

    - la gestion communautaire ou locale qui au contraire implique une forte participation des parties prenantes et qui donne la responsabilité de la gestion aux communautés locales ;

    - la gestion collaborative ou cogestion qui consiste à répartir la responsabilité et l'autorité entre le gouvernement et les parties prenantes locales. Il faut savoir que lorsque les acteurs locaux sont impliqués dans le processus de gestion, ils ont un sentiment d'appropriation de l'AMP, ce qui garantit leur soutien et la durabilité de la conservation (Pomeroy, 2006).

    I.4. Évaluation de l'efficacité de la gestion d'AMP

    La gestion efficace des AMPs nécessite un retour permanent d'informations. « L'évaluation du processus de gestion consiste à examiner les résultats des actions menées et à apprécier si ces actions produisent les effets escomptés » (Pomeroy, 2006).

    I.4.1. Intérêt d'effectuer une évaluation de l'efficacité de la gestion

    De nombreuses raisons peuvent justifier l'entrée dans un processus d'évaluation de l'efficacité de la gestion d'une AMP. L'évaluation doit avant tout être considérée comme un outil pour aider les gestionnaires dans leur travail.

    Dans la pratique, les résultats d'évaluation ont trois issues principales :

    - Aider les gestionnaires à améliorer leurs performances. C'est ce que l'on appelle la gestion adaptative. Elle est basée sur un processus cyclique, qui « permet aux informations concernant le passé de nourrir et d'améliorer la façon dont la gestion est pratiquée par la suite » (Hockings et al., 2008). Il s'agit donc d'un système d'apprentissage par lequel les résultats des suivis et évaluations sont mobilisés pour la révision régulière des plans de gestion.

    - Rendre des rapports, communiquer des résultats. Une gestion responsable et transparente induit une plus grande confiance et un plus grand soutien de la part des

    8

    autres parties prenantes et de la communauté locale mais aussi des supérieurs, du gouvernement et des bailleurs de fond.

    - Et/ou améliorer l'allocation des ressources, c'est-à-dire la manière dont les ressources sont affectées. Les ressources matérielles, financières et humaines qui sont consacrées aux aires protégées sont très souvent insuffisantes. Dans cette situation, il est primordial de pouvoir justifier toutes demandes de ressources supplémentaires.

    Le processus d'évaluation en lui-même peut également apporter certains avantages ; il permet souvent d'améliorer la communication et la coopération entre les gestionnaires et les autres parties prenantes. Il permet également aux gestionnaires d'aborder leurs problèmes sous un nouvel angle (Hockings et al., 2008).

    Notons qu'il est important de communiquer clairement les avantages et les objectifs de l'évaluation auprès des parties prenantes afin d'éviter que celle-ci ne soit perçue comme un contrôle avec sanction potentielle.

    I.4.2. Développement d'outils

    Cela fait moins de 20 ans que des études sont réalisées afin d'évaluer l'efficacité d'aires protégées et de leur gestion. Toutefois, jusqu'à présent, il s'agissait toujours d'études individuelles se basant sur l'expérience et ne s'inscrivant dans aucune structure globale. De plus, les premières évaluations étaient limitées dans leurs champs d'investigation ; elles n'impliquaient guère les parties prenantes et n'essayaient pas d'évaluer les aspects sociaux.

    Ce n'est qu'au XXIème siècle que la situation a évolué lorsque la Commission Mondiale des Aires Protégées de l'UICN a développé un cadre général d'évaluation, publié initialement en 2000 ; celui-ci a par la suite été mis à jour et est paru en 2008 sous une nouvelle version : Évaluation de l'efficacité : Un cadre pour l'évaluation de l'efficacité de la gestion des aires protégées 2ème édition par Hockings M. et al. Nous détaillerons quelque peu le contenu de ce cadre dans le point suivant. A partir de ce cadre, sont nés toute une série de systèmes d'évaluation dont certains dédiés spécifiquement aux AMPs tels que l'« Instrument de suivi de l'efficacité de la gestion des Aires Marines Protégées » rédigé par Francis Staub et Marea E. Hatziolos (2004) ou le « Guide sur les indicateurs naturels et sociaux destinés à évaluer l'efficacité de la gestion des aires marines protégées » de l'UICN (Pomeroy R.S. et al., 2006) qui nous servira de référence tout au long de ce travail. A l'heure actuelle, la majorité des AMPs n'ont pas encore connu d'évaluation de leur efficacité (Hockings et al.,

     

    Fig.2 : niveaux possibles pour l'évaluation de l'efficacité de la gestion des aires protégées (Hockings et al. 2000)

    9

    2008). Le défi aujourd'hui est donc de promouvoir leur utilisation et leur intégration dans les systèmes de gestion des AMPs.

    I.4.3. Cadre de l'UICN pour l'évaluation de l'efficacité de la gestion des aires protégées

    Le cadre de l'UICN pour évaluer l'efficacité de la gestion (Hockings et al. 2008) est basé sur un processus cyclique en six étapes (Contexte, Planification, Intrants, Processus, Extrants et Résultats) tel que représenté à la figure 1. Idéalement, ces six étapes doivent être évaluées si on veut bien comprendre le système de gestion et son efficacité. Elles représentent trois grands thèmes de la

    gestion : Conception/Planification,

    Pertinence/Justesse et Production de résultats (fig.1).

     

    Fig.1 : Cadre d'évaluation de l'efficacité de la gestion des aires protégées (Hockings et al. 2008)

    Ces trois grands thèmes de la gestion peuvent aussi représenter trois niveaux de l'évaluation (fig.2). Ainsi, l' « Instrument de suivi de l'efficacité de la gestion des Aires Marines Protégées » rédigé par Francis Staub et Marea E. Hatziolos en 2004 pour la Banque mondiale concerne surtout le premier niveau d'évaluation alors que le « Guide sur les indicateurs naturels et sociaux destinés à évaluer l'efficacité de la gestion des aires marines protégées » (Pomeroy R.S. et al., 2006) cible plutôt le 3ème niveau.

    10

    L'évaluation de premier niveau se concentre sur l'analyse du contexte (valeurs, menaces, parties prenantes, environnement politique) et de la planification (buts, objectifs, stratégies). Elle se base donc principalement sur des données existantes et sur les opinions des gestionnaires, ce qui demande donc peu d'efforts de collecte des données et ne nécessite qu'un faible investissement en temps et en coût. Finalement, ce type d'évaluation permet de classer les problèmes et d'améliorer les processus de gestion mais il renseigne fort peu sur l'atteinte des objectifs (Staub et Hatziolos 2004).

    L'évaluation de second niveau est, d'après Hockings et al. (2008), la plus facile à mener. Il s'agit d'évaluer l'adéquation du système de gestion : les intrants (ressources en personnel, en temps et en équipement disponibles) et les processus (les pratiques de gestion), ce qui, à nouveau, demande peu d'effort de collecte.

    L'évaluation de troisième niveau évalue les extrants (exécution des activités prévues par le plan de travail) et les résultats (les objectifs à long terme sont-ils atteints ?). L'évaluation des résultats mesure les effets réels du système de gestion, d'où son importance capitale. Même si les autres aspects de la gestion semblent efficaces, une aire protégée qui n'atteint pas ses objectifs échoue. L'évaluation des résultats est donc primordiale. Toutefois, elle requiert généralement un travail important de collecte des données et est souvent difficile et coûteuse.

    Les études qui estiment chacun des six éléments de la figure 1, devraient donner une vision assez complète et convaincante de l'efficacité de la gestion car elles permettent de faire des liens entre les différentes phases du cycle de gestion. Inversement, les études qui n'évaluent que certains éléments du cycle doivent être interprétées avec prudence étant donné qu'elles ne fournissent pas toutes les informations nécessaires à la compréhension de l'entièreté de la dynamique de gestion. Néanmoins, les limites de temps et de moyens justifient souvent de ne se focaliser d'abord que sur certains éléments plus faciles à évaluer ou jugés plus importants.

    11

    I.5. Evaluation de la gestion d'AMP à partir d'indicateurs.

    Un indicateur est "une variable qualitative ou quantitative qui peut être obtenue à partir de mesures sur le terrain ou à partir de modèle et qui est directement liée aux objectifs de gestion ou à une question scientifique » (Claudet, 2006). Un indicateur peut résulter de l'intégration de diverses mesures complexes ou être une simple variable représentant un système plus complexe. Les variables peuvent ensuite être comparées à un point de référence dans le temps ou dans l'espace. Leur principale fonction est de communiquer ; ils sont toujours la simplification d'une réalité complexe. Les indicateurs d'évaluation de l'efficacité de la gestion d'une AMP doivent être, bien entendu, en rapport avec les objectifs de l'AMP.

    Ceux-ci peuvent être classés en quatre catégories : les indicateurs biophysiques, les indicateurs sociaux; les indicateurs économiques et les indicateurs de gouvernance.

    I.5.1. Indicateurs biophysiques

    La mesure d'indicateurs biophysiques permet de caractériser l'état des écosystèmes marins et côtiers et d'évaluer ainsi les bénéfices de l'AMP sur leur évolution. Chaque indicateur biophysique se rapporte à un certain nombre d'objectifs spécifiques et inversement chaque objectif peut être évalué par divers indicateurs (voir. Pomeroy et al., 2006, p57; Pelletier et al., 2005, p24).

    Ces indicateurs peuvent également s'avérer utiles lorsqu'on s'intéresse aux conditions socio-économiques. En effet, si les ressources halieutiques sont préservées voire en augmentation à l'intérieur de l'AMP, cela constitue un capital naturel et une sécurité pour l'avenir des populations côtières. De plus, puisqu'il n'y a pas de frontière dans l'océan les stocks de poissons en augmentation dans l'AMP vont voyager à l'extérieur de l'AMP ; c'est ce que l'on appelle « l'effet réserve ». Pour cette raison il est intéressant d'évaluer les effets de la gestion de l'AMP, d'une part, à l'intérieur de l'AMP et, d'autre part, à l'extérieur de celle-ci.

    Les indicateurs biophysiques et les méthodes de collecte des données sont largement documentées dans la littérature. La majorité des indicateurs biophysiques ont recours à des méthodes de récolte des données rigoureuses et exigeantes en termes de temps et de ressources.

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    Remarquons que le milieu marin fait preuve d'une certaine inertie. Ainsi, les actions ne se répercutent pas directement sur le milieu marin ; c'est pourquoi on considère qu'il faut compter au minimum deux ans avant d'apercevoir les effets biophysiques d'une AMP (Pomeroy et al. 2006).

    I.5.2. Indicateurs sociaux

    Nous venons de voir que les AMPs peuvent avoir des impacts sur les conditions de vie des communautés locales à travers, par exemple, l'augmentation des ressources. Inversement, les facteurs sociaux, économiques, culturels et politiques influencent les performances de l'AMP. Particulièrement, la perception qu'ont les communautés locales de l'AMP affecte leur degré d'appui ou d'opposition et par conséquence, l'efficacité de l'AMP.

    Les effets sociaux des AMPs sont faiblement documentés par rapport aux effets écologiques et économiques. D'après Dominique Pelletier et son équipe (2005), deux principales raisons peuvent expliquer cela ; la première est que les effets sociaux sont souvent assimilés aux effets économiques et la seconde est que ceux-ci sont plus souvent perçus comme des obstacles à la réalisation des objectifs de la gestion des AMPs, que comme de véritables attentes. En fait, la plupart des études sur les aspects sociologiques sont plutôt descriptives et peu d'indicateurs ont déjà été développés.

    I.5.3. Indicateurs économiques

    Les indicateurs économiques sont destinés à mesurer les bénéfices économiques nets de l'AMP. On distingue les effets directement mesurables par les prix du marché (bénéfices du tourisme, bénéfices de la pêche aux alentours et dans l'AMP, coûts et bénéfices de la gestion, etc...) et ceux qui ne peuvent pas être traités sur un marché car ils sont liés par exemple à des services.

    La plupart des indicateurs ont tendance à évaluer les impacts économiques directs uniquement plutôt que la valeur économique globale. En effet, il est plus complexe d'évaluer la valeur économique globale puisqu'il faut pour cela évaluer également les services et la valeur d'usage pour le futur (Pelletier et al. 2005). Les indicateurs d'impacts économiques directs sont parfois eux aussi difficiles à mesurer car les données liées aux revenus peuvent être délicates à obtenir. Dans ce cas, certains indicateurs indirects (mode de vie matériel,

    qualité de la santé humaine) peuvent être utilisés pour obtenir des informations sur les bénéfices économiques de l'AMP. Cependant, il est souvent très difficile de déterminer si ces effets sont liés directement à l'AMP ou au développement général de la région (Pomeroy et al., 2006). Il est donc toujours indispensable de comparer les données de bénéfice et de coût de l'AMP avec un scénario sans AMP (Pelletier et al., 2005).

    I.5.4. Indicateurs de gouvernance

    « La gouvernance des ressources consiste à gérer les utilisateurs et les intentions des utilisateurs par le biais d'un ensemble de droits, de règles et de stratégie et de normes sociales communes » (Pomeroy et al., 2006). La gouvernance des ressources inclus donc des moyens d'application comme le contrôle et les sanctions mais aussi des mesures d'incitation pour favoriser certaines conduites. Ainsi, par définition, une AMP est un outil de gouvernance.

    I.5.5. Niveau de l'évaluation en fonction du type d'indicateur

    Indicateurs écologiques, sociaux et économiques

    Indicateurs de gouvernance

    Les indicateurs biophysiques, sociaux et économiques sont des

    indicateurs « de résultats ». Ils
    permettent une évaluation de troisième niveau axée sur l'atteinte des objectifs. Au contraire, les indicateurs de gouvernance sont dans de nombreux cas, des indicateurs « de planification », « d'intrant » et « de processus » ou parfois également des indicateurs « d'extrants » (fig.3).

    13

    Fig.3 : mise en relation des indicateurs avec le cadre d'évaluation de l'efficacité de la gestion d'aires protégés de Hockings et al. (2008)

    14

    II. DESCRIPTION DES INDICATEURS DU

    GUIDE DE L'UICN

    La Commission mondiale des aires marines protégées de l'UICN et le Fonds mondial pour la nature (WWF) ont lancé ensemble en 2000 un grand projet sur la gestion efficace des AMPs. Leur objectif était de développer un guide reprenant un ensemble d'indicateurs naturels et sociaux destinés à évaluer l'efficacité de la gestion des AMPs. A cette fin, des dizaines de personnes dans le monde entier se sont mises au travail pendant trois ans. Au départ, une étude sur les buts et objectifs des AMPs dans le monde a été menée. Ensuite, des recherches ont été effectuées sur 130 indicateurs pour finalement en retenir 44. Enfin, les 44 indicateurs ont été testés sur des sites pilotes afin d'être améliorés et présentés de manière pratique dans un guide à l'usage des gestionnaires et praticiens.

    Dans un premier temps, j'ai choisi de baser mon travail exclusivement sur ce guide, intitulé : "Comment va votre AMP ? Guide sur les indicateurs naturels et sociaux destinés à évaluer l'efficacité de la gestion des aires marines protégées" (Pomeroy et al. 2006).

    Malheureusement, n'ayant disposé du plan de gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth que durant mon stage, je n'ai pas pu utiliser les objectifs spécifiques de l'AMP de Joal-Fadiouth pour sélectionner des indicateurs tel qu'il est préconisé dans le guide. Cependant, les buts et objectifs auxquels sont associés les indicateurs présentés dans le guide, regroupent des buts et objectifs couramment associés à l'utilisation d'AMP. Nous pouvons donc nous permettre, dans un premier temps, de considérer ces objectifs comme des objectifs de l'AMP de Joal-Fadiouth.

    Je vais présenter dans ce chapitre les indicateurs du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) qui m'ont servi de référence pour préparer mon travail de terrain et sur base desquels j'ai pu ensuite adapter une méthode d'évaluation à l'AMP de Joal-Fadiouth. Chaque indicateur sera présenté de manière succincte. Certains indicateurs qui ont dès le départ été écartés - pour des raisons qui seront expliquées en temps voulu - ne seront pas présentés.

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    II.1. Indicateurs biophysiques

    ? Indic. B1 : Abondance des espèces focales

    Cet indicateur mesure le nombre d'individus de chaque espèce particulière relevé à l'intérieur de l'AMP. C'est l'une des mesures les plus fréquemment utilisée pour évaluer la réussite biologique de l'efficacité de la gestion. Il représente l'état d'une population d'espèces dans un milieu donné à un moment donné.

    La première étape, avant la collecte des données est de dresser une liste des espèces focales9. Ensuite, diverses techniques existent pour mesurer l'abondance d'une population d'espèces focales (L'évaluation du nombre d'individus observé in situ, la télédétection ou l'évaluation des quantités débarquées des espèces focales capturées dans le site concerné).

    Cet indicateur permet ainsi de mesurer si la population des espèces focales s'accroît au fil du temps ou si elle est plus importante à l'intérieur de l'AMP qu'à l'extérieur.

    ? Indic. B2 : Structure des populations d'espèces focales

    La structure de la population représente "la probabilité que des individus de taille et âge différent soient rencontrés au sein d'une espèce focale donnée" (Pomeroy et al., 2006).

    Les données concernant la taille et l'âge peuvent être collectées simultanément aux données pour l'indicateur précédent ; la taille peut être déterminée par une estimation de la longueur in situ ou par mesure directe de la longueur d'individus capturés. On peut fréquemment déterminer l'âge approximatif des individus directement à partir de leur taille ou d'autres caractéristiques physiques.

    Cet indicateur permet d'établir la distribution des individus d'une espèce par taille et/ou par âge. Grâce à ces données, si la taille/ l'âge de première reproduction de l'espèce est connu, il est possible d'évaluer son potentiel reproducteur.

    Une population ne subissant pas ou peu la pression humaine à davantage de chance de comporter un nombre suffisant d'individus en âge de se reproduire. On considère donc que

    9 Une espèce focale est "un organisme ayant de la valeur sur le plan écologique et/ou humain et qui présente un intérêt prioritaire pour la gestion par l'intermédiaire de l'AMP" (Pomeroy et al., 2006). Divers types d'espèces focales sont détaillés dans le guide tels que les espèces cibles (présentant un intérêt en raison de leur utilisation) ou les espèces vedettes (espèces charismatiques ayant une importance sociale et culturelle)

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    dans une AMP efficacement gérée, les individus doivent être répartis entre les différentes classes d'âge. Cependant, beaucoup d'espèces côtières changent de milieu selon leur stade de développement. Dans ce cas, l'absence de reproducteurs n'est pas nécessairement signe d'un mauvais état de la population. Une bonne connaissance de la biologie des espèces évaluées parait donc primordiale.

    La comparaison des distributions de taille à l'intérieur et à l'extérieur de l'AMP peut suggérer un effet de propagation de certaines classes de taille particulière.

    ? Indic. B3 : répartition et complexité de l'habitat

    L'habitat est défini comme "l'espace occupé par un organisme, une population ou une communauté pour y vivre, et caractérisé à la fois par ses propriétés biotiques et physiques" (Pomeroy et al. 2006). La répartition de l'habitat dans un espace donné est représentée par la localisation, la configuration et l'étendue des divers types d'habitats. La complexité de l'habitat représente la diversité des types d'habitat sur l'espace considéré.

    Les organismes sont inféodés à un certain habitat. L'apparition d'une perturbation qui entrainerait un changement de la structure de l'habitat peut avoir un impact sur certaines espèces et modifier l'équilibre écologique.

    La collecte des données nécessite d'effectuer un inventaire complet des habitats de l'AMP - au minimum sur 20 à 30 % de la superficie totale de l'AMP. Il est nécessaire de collecter trois types de données des données sur la composition des habitats (caractéristiques biotiques et abiotiques), l'état des habitats et la répartition physique des habitats.

    Les données recueillies permettront de réaliser une cartographie des habitats. Les changements dans la répartition et la complexité de l'habitat peuvent avoir une origine naturelle ou anthropique. L'estimation de l'étendue des activités humaines mise en relation avec les changements de l'habitat peuvent aider à comprendre l'origine de ces derniers.

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    ? Indic. B4 : composition et structure de la communauté

    La communauté représente "l'ensemble de toutes les populations d'organismes d'une zone géographique donnée, qu'ils soient indigènes ou exotiques"(Pomeroy et al. 2006). La composition de la communauté correspond à la nature de toutes les espèces qui forment cette communauté. La structure de la communauté est définie par l'abondance relative des espèces, leur répartition et la manière dont elles sont organisées.

    Les méthodes de collecte des données sont similaires à celles employées pour les indicateurs B1, B2 et B3. Cependant, celui-ci nécessite de répertorier absolument tous les organismes vivants observés sur le site échantillonné.

    Cet indicateur permet d'acquérir une connaissance approfondie des espèces et de leur organisation, connaissance qui peut être mise à profit afin de mieux cibler les actions de gestion.

    ? Indic B7 : Type, niveau et rentabilité de l'effort de pêche

    Le type d'effort "décrit la nature et le degré de la force d'extraction déployée lors des activités de pêche, à la fois en termes de technologie et de main d'oeuvre qualifiée.".

    Le niveau d'effort "permet de mesurer la quantité des forces de travail (nombre de personnes) et le temps (nombre d'heures/ jours) utilisés lors des activités de pêche."

    L'efficacité ou la rentabilité de l'effort de pêche "est mesurée à travers le nombre (d'individus) ou le poids (biomasse) d'une espèce capturée par unité d'effort (jour ou heure par personne ou équipe de personnes) en fonction de la méthode de pêche et de la technologie utilisées." (Pomeroy et al. 2006)

    L'effort de pêche doit être évalué pour chaque espèce séparément parce qu'il est différent pour chacune. Si on l'évalue de manière globale pour toute une série d'espèces, la raréfaction d'une espèce risque d'être masquée par d'autres espèces qui se portent bien.

    Les données sont récoltées auprès des services de pêche, à travers des enquêtes auprès des pêcheurs et par des observations lors des activités de pêche.

    L'évolution au cours du temps peut être observée. Il est intéressant également de calculer l'efficacité de l'effort de pêche à proximité de l'AMP et dans des zones plus éloignées afin d'évaluer l'effet de propagation.

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    ? Indic. B8 : Qualité de l'eau

    La qualité de l'eau est "une mesure abiotique et biotique (en cas de pollution bactérienne) des paramètres environnementaux ambiants présents dans la colonne d'eau" (Pomeroy et al. 2006). Ces paramètres sont la température, la salinité, la teneur en oxygène, la turbidité, le taux de sédimentation, la charge nutritive et également la concentration en toxines et en certains types de bactéries.

    Il existe des techniques simples de collecte des données pour chaque paramètre. Il est préférable d'évaluer régulièrement les différents paramètres physicochimiques (toutes les semaines ou tous les mois). Notons que la qualité de l'eau à tendance à varier selon les saisons.

    Les divers paramètres physico-chimiques de l'eau sont des facteurs limitant pour les organismes. La qualité de l'eau renseigne donc sur la santé de l'écosystème. Un grand nombre d'activités anthropiques peuvent influencer la qualité de l'eau (déversement dans la mer ou à proximité de déchets, de pétrole ou de substance toxiques, érosion terrestre, etc.). La réduction des activités réputées polluantes devrait donc faire partie des activités du plan de gestion. Cependant, la qualité de l'eau étant influencée par des sources extrêmement variées, l'évolution de cette dernière n'est pas nécessairement attribuable à la gestion de l'AMP. Malgré qu'une relation entre qualité de l'eau et réussite de l'AMP soit délicate à établir, cet indicateur parait important à suivre étant donné son influence sur les objectifs déclarés de l'AMP.

    ? Indic. B9 : Zone présentant des signes de rétablissement

    Cet indicateur mesure la superficie qui a été "restaurée" sur la superficie totale de l'AMP ou les populations d'espèces focales "restaurées".

    L'évaluation de cet indicateur, nécessite d'avoir défini au préalable des objectifs de "rétablissement" sous forme de seuils mesurables. Cet indicateur peut donc être considéré comme une manière d'analyser les autres indicateurs biophysiques. Il s'agit alors d'évaluer si le "seuil de rétablissement" est atteint pour les différents indicateurs.

    Remarquons que la définition du "seuil de rétablissement" est très subjective et peut donc être sujette à des controverses.

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    ? Les indicateurs suivants sont particulièrement complexes à évaluer ; par conséquent il n'y a pas de données disponibles à leur sujet et il n'est pas possible dans le cadre d'un mémoire de les collecter.

    Il s'agit des indicateurs :

    - B5 : succès du recrutement au sein de la communauté pour lequel l'auteur précise: "Cet indicateur figure parmi les indicateurs d'efficacité de la gestion les plus complexes et les plus avancés de ceux présentés dans ce guide. [...] la mesure de cet indicateur ne doit être effectuée que par des individus hautement qualifiés [...]."

    - B6 : Intégrité du réseau trophique pour lequel il est noté : "La collecte des données permettant de mesurer cet indicateur avec précision n'est pas une tâche simple ou facile. [...] l'équipe devra mener des entretiens et organiser des groupes de réflexion avec des spécialistes (chercheurs, pêcheurs, personnel scientifique de l'AMP par exemple) afin de dégager et de caractériser (sur le plan fonctionnel) les divers rôles et niches connus qu'occupent les organismes au sein des différents niveaux trophiques, y compris leurs multiples relations prédateur-proie ainsi que la façon dont ces relations évoluent dans le temps et les raisons de cette évolution."

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    II.2. Indicateurs de gouvernance

    Etant donné le nombre important d'indicateurs proposé par le guide (16 indicateurs), je vais les présenter de manière très succincte. Les méthodes de collecte des données ne seront pas présentées pour chaque indicateur mais de manière générale, elles s'appuient sur des documents tels que le plan de gestion et des questionnaires ou des entretiens avec les parties prenantes. Pour plus d'informations, il est conseillé de se référer au guide (Pomery et al. 2006).

    ? Indic. G.1 : Niveau de conflit sur les ressources

    Cet indicateur permet d'identifier et de caractériser d'éventuels désaccords liés à la gestion ou aux prises de décision à propos de l'AMP.

    Il est intéressant d'évaluer au cours du temps si les conflits ont tendance à diminuer ou à augmenter.

    ? Indic. G2 : Existence d'un organisme de décision et de gestion

    Cet indicateur permet de déterminer s'il existe une institution reconnue qui assure la gestion de l'AMP et qui prend les décisions. Notons qu'une AMP est généralement plus efficace si les décisions et la gestion sont menées par les mêmes organismes (Pomeroy et al. 2006).

    ? Indic. G3 : Existence et adoption d'un plan de gestion

    Le plan de gestion donne une direction aux actions à entreprendre. Il fournit un cadre pour les gestionnaires. L'indicateur G3 permet d'apprécier s'il existe un document reprenant les objectifs de l'AMP ainsi que les structures administratives, les stratégies de gestion, et les procédures de contrôle et d'évaluation et si ce document est applicable. Pour être applicable, le plan de gestion doit être reconnu par l'ensemble des institutions responsables.

    Celui-ci doit être disponible auprès des gestionnaires. Il convient de réaliser un contrôle du son contenu.

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    ? Indic. G4 : Compréhension locale des règles et réglementations de l'AMP

    Cet indicateur évalue si les parties prenantes sont au courant des règles et réglementations et si elles comprennent leur signification. Il est évident que si les règles ne sont pas comprises, elles risquent de ne pas être respectées.

    ? Indic. G5 : Existence et adéquation de la législation habilitante

    Il s'agit de déterminer s'il existe une législation formelle soutenant l'AMP - qui peut se trouver aux niveaux international, national et local - et sa compatibilité avec le plan de gestion de l'AMP.

    ? Indic. G6 : Disponibilité et affectation des ressources administratives de l'AMP

    L'indicateur G6 détermine le degré d'accès aux ressources humaines, matérielles et financières dont dispose l'équipe de direction pour assurer les activités de gestion.

    ? Indic. G7 : Existence et utilisation d'étude et de contributions scientifiques

    Les sciences naturelles sont primordiales pour comprendre des écosystèmes complexes comme ceux inclus dans les AMPs. De même, les sciences sociales sont nécessaires pour identifier et comprendre le réseau des parties prenantes et les problèmes qui peuvent survenir. Pour une gestion optimale, une collaboration entre gestionnaires et scientifiques doit être établie dès les débuts de l'AMP et se poursuivre à toutes les étapes de son développement.

    Cet indicateur permet de définir si des études scientifiques ont été menées et d'évaluer si celles-ci ont pu être mises en valeur et utilisées dans les actions de gestion de l'AMP.

    ? Indic. G8 : Existence et niveau d'activité des organismes communautaires

    Les organismes communautaires peuvent représenter des utilisateurs des ressources ou d'autres parties prenantes de l'AMP. Cet indicateur évalue si des organismes communautaires existent, leur organisation et leur degré d'intervention dans les processus de décision et de gestion.

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    ? Indic. G9 : Degré d'interaction entre les gestionnaires et les parties prenantes

    Celui-ci est défini à travers le nombre de réunions entre les différents acteurs (gestionnaires, personnel, parties prenantes) ainsi que la participation et la prise en compte de l'avis des différents participants aux réunions.

    ? Indic. G10 : Proportion des parties prenantes formées à l'utilisation durable

    Cet indicateur permet de déterminer quelles formations sur l'utilisation durable des ressources ont été données aux parties prenantes, combien sont-elles à avoir participé à chaque type de formation et leur niveau de satisfaction associé.

    ? Indic. G11 : Niveau de formation assuré aux parties prenantes en matière de participation

    Pour participer de manière efficace à la gestion de l'AMP les parties prenantes doivent acquérir certaines connaissances, compétences et comportements adéquats à cette tâche. Cet indicateur mesure l'importance des activités de renforcement des capacités des parties prenantes à participer à la gestion. Il s'agit de déterminer le type de formation et le taux de participation.

    ? Indic. G12 : Niveau de participation des parties prenantes aux processus et activités de gestion et niveau de satisfaction associé

    Cet indicateur évalue le niveau d'implication des parties prenantes dans les prises de décision concernant la gestion de l'AMP ainsi que dans les activités de gestion. Il estime également la satisfaction des parties prenantes quant à leur possibilité de participer à la gestion et leur satisfaction quant à la prise en compte de leurs opinions. (Pomeroy et al., 2006)

    ? Indic. G13 : Niveau d'implication des parties prenantes dans la surveillance, le suivi et l'application

    Celui-ci évalue la participation des parties prenantes aux activités de surveillance de l'application de la réglementation. Hormis les activités formelles de surveillance telles que les

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    patrouilles en mer, les parties prenantes peuvent également de façon informelle pratiquer des activités de surveillance.

    La participation des parties prenantes à ce type d'activité a pour effet de renforcer la conformité de celles-ci parce qu'elles se sentent concrètement investies dans la gestion de l'AMP.

    ? Indic. G14 : Procédures d'application de la réglementation clairement définies

    Cet indicateur renseigne sur l'existence de procédures déterminant la manière d'agir face aux infractions.

    Il est important que les procédures d'application des règles de l'AMP soient définies de manière fixe et formelle pour que le personnel de l'AMP puisse l'appliquer sans ambigüités et que les utilisateurs soient conscients des conséquences d'actes illégaux.

    ? Indic. G15 : Etendue des activités d'application de la réglementation

    Il s'agit de mesurer le nombre de patrouilles de surveillance effectuées ainsi que de réunir des informations comme la durée des patrouilles, le nombre et le type d'infraction observées etc.

    ? Indic. G16 : Degré de diffusion des informations visant à encourager la conformité des parties prenantes

    Cet indicateur détermine quelle quantité d'informations sur les objectifs et avantages de l'AMP ainsi que sur les règles et règlements a été donnée aux parties prenantes. L'efficacité des moyens mis en oeuvre sera également évaluée.

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    II.3. Indicateurs socio-économiques

    Le guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) présente 16 indicateurs socio-économiques différents. Les informations relatives à ces indicateurs sont en grande partie issues d'enquêtes auprès de ménages, de pêcheurs ou d'institutions publiques. Etant donnée la durée relativement courte de mon stage (moins de 2 mois) je savais déjà avant mon départ que je n'aurais pas le temps de mener de larges enquêtes auprès de la population de Joal-Fadiouth. Je ne pouvais réaliser qu'une enquête et le questionnaire ne pouvait pas être trop long et trop disparate pour ne pas importuner les individus interrogés.

    J'avais donc directement choisi de ne tester que certains indicateurs.

    Tout d'abord j'ai laissé de côté les indicateurs qui nécessitent l'utilisation d'un groupe témoin10.

    Ensuite, j'ai décidé de sélectionner uniquement des indicateurs pour lesquels les données peuvent être collectées simultanément, par le biais d'un questionnaire destiné aux habitants de Joal-Fadiouth. Ainsi, j'ai écarté un certain nombre d'indicateurs qui nécessitent de mettre en oeuvre d'autres méthodes de récolte des données11.

    Enfin, j'ai écarté l'indicateur "pourcentage de groupe de parties prenantes occupant des positions de leadership" (S15) car il me semble qu'il serait plus intéressant de le placer parmi les indicateurs de gouvernance.

    Finalement, je vais présenter dans ce chapitre 7 indicateurs socio-économiques pour lesquels les données peuvent être collectées simultanément à travers des enquêtes auprès des habitants de la commune.

    10 C'est le cas des indicateurs "Mode de vie matériel" (S7) et "Qualité de la santé humaine" (S8) et "Infrastructure communautaire et activités commerciales"(S11). Il est en effet difficile de distinguer les effets de l'AMP des effets du développement économique globale de la région sur le mode de vie matériel, la santé et les infrastructures. Il est donc nécessaire de comparer les résultats obtenus avec une communauté voisine aux mêmes caractéristiques mais ne subissant pas les effets de l'AMP.

    11 C'est indicateurs sont les suivants : "Modèles locaux d'utilisation des ressources marines" (S1), "Perception des récoltes des ressources locales" (S5), "Nombre et nature des marchés" (S12), "Niveau de connaissance des parties prenantes sur l'histoire naturelle" (S13) et "Changement des conditions des sites, des caractéristiques et/ou des monuments ancestraux et historiques" (S16).

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    ? Indic. S2 : Jugements de valeur et croyances locales à l'égard des ressources marines

    Cet indicateur évalue la manière dont les valeurs et les croyances concernant les ressources marines influencent les comportements des individus. Il est intéressant de suivre cet indicateur au cours du temps afin de déterminer si l'AMP et les activités à son sujet influencent les valeurs et croyances des individus. De plus, ces informations peuvent permettre aux gestionnaires d'adapter les activités de gestion.

    ? Indic. S3 : Degré de compréhension des conséquences de l'action de l'homme sur les ressources

    Celui-ci évalue la compréhension qu'ont les individus des liens entre des faits humains et leurs répercussions sur les ressources. Cet indicateur permet de déterminer quelle proportion de perception est erronée ou réaliste. Cette connaissance peut permettre d'adapter des programmes éducatifs et ensuite de suivre leurs répercussions sur les conceptions des individus.

    ? Indic. S4 : Perception de la disponibilité des produits de la mer

    Cet indicateur mesure la manière dont les individus perçoivent la disponibilité des produits de la mer sur le marché local. Il nous renseigne sur l'impact qu'a l'AMP sur la sécurité alimentaire des ménages vivant à proximité de celle-ci.

    ? Indic. S6 : Perception de la valeur non marchande et de non usage

    Il s'agit d'évaluer les jugements que portent les individus sur la valeur des ressources côtières qui ne sont pas commercialisées (valeur non marchande) et sur la valeur des ressources pour ceux qui ne les utilisent pas (valeur de non usage). La valeur non marchande comprend les usages directs (se baigner, plonger) et les usages indirects (l'habitat pour les ressources marines, la protection contre les tempêtes) et la valeur de non usage englobe la valeur d'existence, la valeur d'option (possibilité d'utilisation future) et la valeur de transition (ressource disponible pour les générations futures). Les informations recueillies renseignent sur la valeur de l'AMP en termes non monétaires et permettent de comprendre comment évolue dans le temps la valeur donnée à l'AMP par la communauté.

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    ? Indic. S9 : Répartition des revenus des ménages par source

    Cet indicateur détermine quelles sont les principales sources de revenus des ménages. Celui-ci permet d'avoir une meilleure idée du degré de dépendance des ménages locaux à l'égard des ressources côtières et donc des impacts que peut avoir l'AMP sur la communauté. Il est souhaitable qu'au fil du temps les sources de revenus se diversifient et que la communauté soit moins dépendante de l'AMP.

    ? Indic. S10 : Structure professionnelle des ménages

    Cela correspond à établir une liste de l'ensemble des membres du ménage et de la (les) profession(s) de chacun. Comme l'indicateur précédent, il permet d'évaluer la dépendance vis-à-vis des ressources côtières et les changements d'activités au cours du temps.

    ? Indic. S14 : Diffusion des connaissances formelles à la communauté

    Cet indicateur évalue les connaissances qu'ont les membres de la communauté des informations provenant des scientifiques. Il s'agit tout d'abord de dresser une liste des informations scientifiques qui ont été diffusées à la communauté. Ensuite, il convient de demander aux répondants s'ils connaissent ces informations et s'ils peuvent les décrire. Cet indicateur est intéressant car il permet d'améliorer les programmes éducatifs sur l'AMP.

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    III. DESCRIPTION DU MILIEU ETUDIE

    III.1. Situation de la pêche en Afrique de L'ouest et au Sénégal III.1.1. Afrique de l'Ouest, une écorégion particulière

    Les côtes d'Afrique de l'Ouest sont certainement parmi les plus poissonneuses au monde. Six pays se partagent ces 3200 km de côte : la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau, la Guinée et le Cap Vert. Trois types principaux d'écosystème y sont représentés : le sénégalo-mauritanien, le capverdien rocheux insulaire et l'estuarien-mangrovien en Guinée et Guinée Bissau (Stratégie régionale pour les Aires Marines Protégées en Afrique de l'Ouest). En raison de leur similarité sur le plan physique, biologique et socio-économique, on considère que ces écosystèmes forment une "écorégion".

    Toute cette écorégion a la particularité de connaitre des upwellings permanents. Les upwellings sont des remontés d'eau froide profonde qui entrainent une quantité importante de nutriments vers la surface. Ces nutriments, combinés à l'action du soleil, induisent une prolifération importante de phytoplancton qui se trouve à la base de la chaine alimentaire en milieu océanique, ce qui explique la richesse biologique de ces eaux. Ainsi, les populations côtières se sont spécialisées dans la pêche mais aussi dans la transformation et le commerce des ressources halieutiques.

    Une autre caractéristique de cette écorégion est qu'elle se partage de nombreuses espèces de poissons, mammifères marins et oiseaux qui se déplacent le long du littoral. Les pêcheurs eux-mêmes se déplacent largement sur le littoral, d'un pays à l'autre.

    60% des 23 millions d'habitants que comptent les pays de l'écorégion vivent à proximité du littoral. La pêche est une activité cruciale pour l'économie de ces six pays. La production totale est estimée à 400 millions de dollar US (Stratégie régionale pour les Aires Marines Protégées en Afrique de l'Ouest).

    Cependant, la pêche industrielle fait aujourd'hui concurrence aux pêcheurs locaux traditionnels. Les pays de l'écorégion ont en effet vendu une grande quantité de licences de pêche à des pays étrangers, ce qui contribue, certes, aux recettes du pays mais qui exerce une pression supplémentaire sur les ressources halieutiques. A cela, s'ajoutent d'autres pressions

    sur le littoral telles que la coupe de mangrove pour obtenir du bois de chauffe ou pour développer la riziculture, l'érosion côtière due au prélèvement de sable et la pollution par rejet des eaux usées et autres déchets anthropiques dans l'océan. Cette dégradation du littoral et de ses ressources a un impact direct sur les populations côtières qui voient leur principale source de revenus et d'alimentation s'amenuiser.

    III.1.2. Création d'un réseau d'AMP en Afrique de l'Ouest

    La protection des ressources halieutiques est à ce jour une nécessité en Afrique de l'Ouest. Face aux incertitudes scientifiques sur l'état des stocks et aux difficultés de gérer et contrôler la pêche, le recours aux AMPs constitue une assurance qu'une partie des ressources soit à l'abri des exploitations. Un choix judicieux quant à leur localisation - par exemple, au niveau de site de nourrissage et de frayère ou d'autres habitats particuliers et sensibles (récifs coralliens, mangroves, herbiers marins) - en fait des lieux particulièrement propices à la régénération des ressources halieutiques et à la protection de la biodiversité marine et côtière.

    28

    Etant donné les liens étroits qui existent entre les six pays de l'écorégion, une harmonisation des mesures de protection est nécessaire. C'est dans ce contexte qu'à été créé le Programme Régional de Conservation de la Zone Côtière et Marine (PRCM) en Afrique de l'Ouest ainsi que la Stratégie Régionale pour les Aires Marines Protégées en Afrique de l'Ouest (fig.4). Ces deux documents ont été signés en 2003 par l'ensemble des six pays d'Afrique de l'Ouest regroupé en Commission Sous-Régionale des Pêches. L'objectif de cet accord est d'organiser les AMPs en réseaux cohérents. Cette démarche se veut participative et au bénéfice des populations et de la biodiversité.

    Fig.4 : couverture de la Stratégie Régionale pour les AMPs en Afrique de l'Ouest (disponible à l'url: http://www.papaco.org/publication/strategie% 20AMP%20du%20PRCM.pdf)

    29

    Depuis, l'Afrique de l'Ouest a fortement renforcé son réseau d'AMP et compte à ce jour 24 AMPs (Goyet, 2008). 15 de ces AMPs ont créé en avril 2007 le RAMPAO (Réseau régional d'AMP en Afrique de l'Ouest) dans le but d'institutionnaliser et de renforcer la cohérence et la fonctionnalité du réseau des AMPs (Fall, 2008). La liste des 24 AMPs de l'écorégion d'Afrique de l'Ouest est présentée en annexe I.

    La Commission mondiale pour les aires protégées a constaté récemment une absence d'évaluation dans la gestion de la plupart des aires protégées. Suite à ce constat, la Fondation Internationale du Banc d'Arguin, dans le cadre de l'appui à la mise en oeuvre de la Stratégie Régionale des AMPs en Afrique de l'Ouest, a invité, du 23 au 24 avril 2007, des représentants des AMPs des six pays de l'écorégion à participer à un atelier d'échange et de renforcement des capacités sur l'évaluation de l'efficacité de la gestion des AMPs. Le cadre d'évaluation de l'UICN (Hockings et al. 2008) a été présenté aux participants de cet atelier de même que le guide méthodologique de l'UICN (Pomeroy et al. 2006). (RAMPAO, 2007)

    III.1.3. La pêche artisanale au Sénégal, un secteur en crise

    Le Sénégal dispose d'une façade maritime de 700 km et d'une Zone Economique Exclusive d'environ 200 miles marins. Le plateau continental s'étend sur 31 000 km2. La grandeur du plateau continental, la diversité des biotopes (côtes sableuses, rocheuses, zones humides côtières, mangrove, vasières) ainsi que les fréquents upwellings et le climat chaud et ensoleillé favorise le développement d'une grande diversité d'espèces marines. (Centre de suivi écologique, 2005)

    La pêche est une activité extrêmement développée sur les côtes Sénégalaises. Les prises annuelles pour l'année 2000 ont été estimées à 418 764 tonnes dont 88 020 tonnes destinées à l'exportation ce qui représente plus de 30% des recettes d'exportation du pays. La pêche joue donc un rôle socio-économique essentiel; elle contribue à hauteur de 2,5% du PIB national et emploie directement ou indirectement 600 000 personnes soit environ 17% de la population active. De plus, elle est une source de nourriture indispensable puisqu'elle représente 75% de la consommation en protéines animales. La pêche au Sénégal est dominée par le secteur artisanal qui assure 88% des débarquements. (Centre de suivi écologique, 2005)

    Au Sénégal, la pêche artisanale est organisée autour de la famille et se transmet de père en fils. Les pêcheurs artisanaux doivent supporter des coûts importants en termes d'achat

    30

    et d'entretien du matériel (pirogue, filets, moteurs) mais aussi en termes de fonctionnement (carburant, glace). Afin de rentabiliser leurs investissements et de gagner suffisamment pour subvenir au besoin de leur famille, une main d'oeuvre nombreuse, solidaire et bon marché est indispensable. Le recrutement se fait donc en priorité au sein de la famille, les familles nombreuses étant favorisées ; les garçons partent en mer avec le père ou les aînés alors que les filles jouent un rôle indispensable dans la transformation et la commercialisation des produits de la pêche. Ainsi, de génération en génération, le nombre de pêcheurs s'accroît à un rythme aussi rapide que la démographie des communautés concernées.

    Un second phénomène permet d'expliquer l'augmentation effrénée de la capacité de pêche artisanale sénégalaise. Le Sénégal applique le principe de libre accès aux pêcheries, ce qui signifie que l'accès aux ressources halieutiques est entièrement libre. Ce principe explique la présence dans les pêcheries artisanales de pêcheurs occasionnels et de reconvertis provenant d'autres secteurs. Plus particulièrement, les redoutables sécheresses qui ont frappé les deux bandes tropicales de 1968 à 1973 (Sircoulon, 1976) ont conduit de nombreux agriculteurs à abandonner leurs terres pour se tourner vers d'autres activités comme la pêche.

    Ces deux phénomènes, ont entraîné progressivement une surcapacité12 de la pêche artisanale au Sénégal, la surcapacité entraînant elle-même une surexploitation des ressources. Le nombre de pêcheurs étant de plus en plus nombreux et les ressources de moins en moins importantes, la concurrence entre les usagers s'est développée, et certains, faute d'alternative, ont recours à des techniques de pêche non durables telle que la pêche de juvéniles ou l'utilisation de monofilament ce qui ne fait qu'aggraver la situation de crise.

    Enfin, suite à la dévaluation du franc CFA de 1994, la demande extérieure en poissons nobles est devenue encore plus importante que par le passé, ce qui a entrainé une pression encore plus forte sur les ressources halieutiques.

    Il est maintenant clairement établi que les ressources halieutiques du Sénégal ont fortement régressés. Les quantités de poissons à haute valeur commerciale tel que le thiof (mérou, Epinephelus aenus) seraient aujourd'hui cinq fois moins importantes qu'en 1950 (Diouf, 2004). Les quantités débarquées diminuent - une diminution des volumes débarqués de 17,4% a été observée entre 2005 et 2006 - et de nombreux pêcheurs se voient contraints d'abandonner la pêche (Direction des pêches maritimes, 2007).

    12 On dit qu'il y a surcapacité lorsque les moyens matériels déployés ainsi que la force de travail exercée surpassent le potentiel halieutique de la zone ciblée.

    31

    III.1.4. Création d'AMPs au Sénégal

    Jusqu'à présent, les tentatives des services des pêches pour contrer cette crise n'ont pas porté leurs fruits (Diouf, 2004). Il est intéressant de savoir que le secteur de la pêche au Sénégal est un secteur très informel. Le code de la pêche définit des règles concernant la taille des mailles, les tailles minimales de capture autorisée et l'interdiction du monofilament. Pourtant, dans la pratique, ces règles ne sont absolument pas appliquées et aucun contrôle sérieux n'est effectué (Abdou Karim Sall, Communication personnelle). Le recours aux AMPs est alors apparu comme une première solution - qui devra bien sûr être combinée à d'autres mesures de gestion des pêches comme la régulation de l'effort de pêche et des restrictions sur les engins de pêches - pour inverser la tendance et restaurer les ressources halieutiques.

    En 1976, trois AMPs avaient déjà été créées au Sénégal. Il s'agit du Parc National de la Langue de Barbarie, du Parc National des Iles de la Madeleine et du Parc National (et Reserve de Biosphère depuis 1981) du Delta du Saloum. Une quatrième à été créée en 1986, la Reserve Naturelle de Poponguine. Ces quatre Parc Nationaux sont constitués d'une partie terrestre et d'une partie maritime. Elles ont été crées avec pour objectif principal la conservation des milieux et de la biodiversité.

    Dans le cadre du PRCM, un grand nombre d'institutions13 ont pris ensemble l'initiative de créer de nouvelles AMPs au Sénégal. Cette initiative s'est voulue participative, plurisectorielle et pluridisciplinaire. Les choix des zones pour la création des nouvelles AMPs a donc été décidé en collaboration avec des experts et des représentants des différents groupes d'intérêt. Après deux ans de travail, cinq sites ont été retenus sur base de critères écologiques, économiques et sociaux. C'est ainsi que sont nés les AMPs de Saint-Louis, Cayar, Joal-Fadiouth, Abéné et Bamboung (fig.5). La superficie totale ainsi protégée est de 82 500 hectares (WWF, 2003). Le décret présidentiel n° 2004-14-08 du 04 novembre 2004 portant création de ces cinq AMPs va leur donner un statut juridique.

    En termes de gestion, l'objectif est d'aboutir à un système de cogestion, dans lequel les acteurs locaux seraient fortement impliqués dans la gestion, appuyés par des agents représentants de l'Etat. Depuis 2006, la gestion des AMPs au Sénégal relève de la compétence

    13 Les institutions à l'origine de la création de nouvelles AMPs au Sénégal sont: le WWF, la Direction des parcs nationaux, la Direction des pêches, la Direction de la surveillance et de la protection des pêches, le Centre de recherches océanographiques de Dakar-Thiaroye, l'UICN, Wetlands International, la FENAGIE, GAIPES et l'Océanium (Diouf, 2004)

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    du Comité technique interministériel chargé des aires marines protégées qui a été créé par l'arrêté interministériel n° 0016554 du 03/03/2006. Celui-ci est sous la double tutelle du Ministère de l'économie maritime et du Ministère de l'environnement et de la protection de la nature. Le mandat de ce Comité est de faciliter la coordination de la mise en place des AMPs et la définition des procédures de leur gestion concertée. Cependant, dans la pratique, ce Comité n'a jamais vu le jour et la gestion est confiée aux agents de la Direction des Parcs Nationaux (DPN).

    Fig.5 : Situation des AMPs de Saint-Louis, Cayar, Joal-Fadiouth et Abéné au Sénégal (WWF, 2003)

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    III.2. Description de la commune et de l'AMP de Joal-Fadiouth III.2.1. Localisation de la commune de Joal-Fadiouth

    La commune de Joal-Fadiouth se trouve sur la petite côte du Sénégal, dans le département de Mbour, dans la région de Thiès (fig.6). Elle a été créée en 1966 par regroupement de trois localités : l'importante flèche sableuse de Joal, le complexe laguno-insulaire de Fadiouth et Ngazobil (fig.7). Elle s'étend sur une superficie de 5035 ha dont 65% de terres inondées et dispose de 20,7 km de côte.

    Fig.6 : localisation de Joal-Fadiouth au Sénégal (tiré d'une carte disponible à l'url : http://www.leboucheaoreille.net/carnets/carte_s enegal2.jpg)

    Fig.7: image SPOT 2005 des localités de Joal et de Fadiouth (Sène, 2008)

    III.2.2. Situation socio-économique

    III.2.2.1. Population

    D'intenses flux migratoires combinés à une évolution démographique importante ont entrainé une augmentation rapide de la population de Joal-Fadiouth. La population est ainsi passée de 11 170 habitants en 1976 à 19 003 habitants en 1988 (Sène, 2008) pour atteindre en 2003, 33 090 habitants (Architecture et Climat, 2007). Pratiquement 90% de la population vit à Joal (Architecture et Climat, 2007).

    Contrairement à la majorité des Sénégalais qui sont d'origine wolof et de religion musulmane, les habitants de Joal-Fadiouth sont majoritairement d'origine sérère (51% de sérère pour 29% de wolof) et bien que 84% des habitants de la commune soient musulmans, la petite ile de Fadiouth est à 90% chrétienne (enquêtes ménages, juin 2003 IN Architecture et

    34

    Climat, 2007). Cette diversité culturelle en fait une commune riche en traditions et très tolérante.

    (c) Balland M

    Fig.8: activités au quai de pêche de Joal

    III.2.2.2. Exploitation des ressources halieutiques

    Le centre de pêche de Joal est le premier port de pêche artisanale du pays (fig.8). Les mises à terre sont de l'ordre de 150 000 tonnes par an, soit une valeur commerciale estimée tournant autour des 15 milliards de F CFA (23 millions d'euros) (selon les chiffres fournis par le poste de contrôle des pêches maritimes de Joal-Fadiouth). Plus de 30% de la population active de Joal-Fadiouth travaille dans le secteur de la pêche ou ses activités connexes (calculé à partir des données enquêtes ménages, juin 2003 IN Architecture et Climat, 2007).

    Les techniques de pêche piroguière sont très diversifiées : filet dormant de fond ou encerclant, filet tournant, senne de plage, pêche à la ligne ou à la palangre, casier à seiche, etc. La pêche à pied est également pratiquée par les pêcheurs de crevettes utilisant le Killi et pour la cueillette d'huîtres ou le ramassage des arches - ces deux dernières activités sont presque exclusivement féminines.

    Des pêcheurs de toute la région viennent pêcher dans la zone de Joal, réputée pour sa richesse spécifique, sa haute productivité et ses activités de pêche permanentes tout au long de l'année. Cependant, les ressources halieutiques à Joal-Fadiouth, comme partout au Sénégal, s'amenuisent, d'où l'importance de mettre en place des mesures de protection.

    III.2.3. Caractéristiques biophysiques III.2.3.1. Hydrologie marine

    L'année est partagée en deux grandes saisons : la saison froide de janvier à mai caractérisée par des eaux froides venant du nord et de nombreux upwelling et la saison chaude caractérisée par l'arrivée d'eau d'origine tropicale. Des matières organiques sont également apportées des eaux continentales par les bolongs14. (Sène, 2008)

    Le plateau continental est spécialement large face à Joal-Fadiouth et l'eau y est particulièrement calme.

    Il apparait que Joal-Fadiouth bénéficie en effet de toutes les conditions favorables au développement des activités de pêche.

    III.2.3.2. Flore

    III.2.3.2.1. La mangrove

    (c) Balland M.

    Fig.9: Rhizophoracées

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    La mangrove est une formation halophile15 typiquement tropicale. On la trouve dans des zones soumises aux marées telles que des embouchures, lagunes ou estuaires. Les arbres qui constituent ces formations sont communément appelés des palétuviers16.

    La mangrove de Joal-Fadiouth a une superficie d'environ 400 ha (Diouf, 2003). On y trouve principalement trois espèces de "palétuvier": Rhizophora mangle et Rhizophora racemosa de la famille des Rhizophoracées

    14 Les bolongs sont des chenaux caractéristiques des côtes du Sénégal et de la Gambie. Ces cours d'eau sont soumis à la marée et l'eau de mer s'y mêle à l'eau douce. Ils peuvent être de la taille de petits affluents ou pour certains disparaitre temporairement. Ils sont généralement bordés de mangrove.

    15 Qui affectionne les milieux salés.

    16 Palétuvier est le nom vulgaire donné aux différents arbres des régions intertropicales qui ont la caractéristique d'avoir les racines baignées par les eaux de la mer.

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    caractérisée par des racines échasses (fig.9) et Avicennia africana de la famille des Verbénacées caractérisée par des pneumatophores (racines aériennes). On trouve également deux espèces de Combrétacées, Conocarpus erectus et Laguncularia racemosa (le Paletuvier gris). (Sène, 2008)

    Cet écosystème a un rôle prépondérant dans la conservation de la biodiversité et des ressources halieutiques. Il sert de refuge pour de nombreuses espèces d'oiseaux et constitue une nourricière et une zone de frayère pour les jeunes poissons et crevettes. Il abrite également des espèces particulières comme des huîtres, des balanes, des arches, des crabes qui sont consommées et commercialisées par les habitants de Joal-Fadiouth.

    III.2.3.2.2. L'herbier marin

    A Joal-Fadiouth, on trouve un important herbier marin constitué d'algues macrophytes source de nourriture, entre autres pour la tortue verte.

    III.2.3.2.3. Réserve naturelle communautaire de Ngazobil

    Celle-ci couvre une superficie de 439,46 ha. Elle est considérée comme le seul témoin de ce qu'était l'écosystème forestier de la petite côte de Rufstique à la pointe de Sangomar. Une quarantaine de familles de végétaux y sont représentées. (Rapport annuel d'activités 2008 de l'AMP de Joal-Fadiouth)

    III.2.3.3. Faune

    III.2.3.3.1. Ressources halieutiques

    Quatre types de ressources halieutiques sont exploités (Centre de suivi écologique,

    2005) :

    - Les ressources pélagiques hauturières (thon, espadon, voilier) qui transitent par les côtes sénégalaises; leur exploitation est donc saisonnière.

    - Les ressources pélagiques côtières (sardinelles, chinchards, maquereaux) qui jouent un rôle primordial dans l'alimentation des populations à faible revenu. Ces espèces effectuent des migrations saisonnières entre la Mauritanie et les Iles Bissagos.

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    - Les ressources démensales côtières qui sont localisées sur le plateau continental entre 0 et 200 m de profondeur. Elles sont représentées par des crustacés (crevette blanche, langouste, crabe), des céphalopodes (poulpe, seiche, calamar) et des poissons (rouget, dorade, mérou, sole, etc.). Celles-ci possèdent une forte valeur marchande et sont donc principalement destinée à l'exportation. La majorité de ces espèces sont surexploités - en 1996, les prises moyenne étaient de 156 000 t alors que la production d'équilibre est estimée à 130 000 t. (Centre de suivi écologique, 2005)

    - Les ressources démensales profondes qui se situent entre 150 et 1000 m de profondeur. Il s'agit des crevettes gambas, de l'alistado et de poissons tels que le merlu, le requin-chagrin et la langouste rose.

    Le premier inventaire réalisé par le Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye (CRODT) fait état de 31 espèces de poissons, 2 espèces de crustacés (Penaeus notialis et Portunus validus), 1 gastéropode (Cymbium glans), 1 céphalopode (Sepia officinalis hierredda) et 1 hippocampe (Hemiramphus brasiliensis). Cependant celui-ci n'est pas exhaustif puisque l'engin utilisé a une certaine sélectivité (senne de plage de 12 mm de maillage) et que l'inventaire n'a été réalisé qu'à une seule période de l'année. (Sène, 2008)

    L'inventaire des espèces présentes dans les captures effectuées par le poste de contrôle des pêches maritimes de Joal en 2003, récence, quant à lui, 50 espèces. (Sène, 2008)

    III.2.3.3.2. Faune malacologique

    Les arches (Anadara senilis) et les huitres (Crassostrea gasar) sont les principaux mollusques présents et exploités à Joal-Fadiouth. Les arches sont ramassées - principalement par les femmes de Fadiouth - à marée basse sur la lagune ou dans les bolongs. Les huitres vivent accrochées aux racines échasses de Rhizophora.

    III.2.3.3.3. Avifaune

    En raison de son important réseau de mangrove, Joal-Fadiouth présente une très grande diversité d'oiseaux d'eau. Environ 70 espèces différentes ont été recensées par les agents de la DPN (rapports annuels d'activités de l'AMP 2007 et 2008 de Joal-Fadiouth). On y rencontre différentes espèces d'Aigrette, de Bécasseau, de Goéland, de Mouette, de Sterne, de

    38

    Héron, de Cormoran, de Pélican et bien d'autres encore. Parmi celles-ci 22 sont des espèces protégées (voir annexe II).

    III.2.3.3.4. Reptiles

    Parmi les sept espèces de tortues marines, six seraient inventoriées au Sénégal. Cinq de la famille des Cheloniidae : la tortue verte (Chelonia mydas), la tortue caouanne (Caretta caretta), la tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata), la tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea) et la tortue de Kemp (Lepidochelys kempii), et une de la famille des Dermochelyidae : la tortue luth (Dermochelys coriacea).

    Toutes ces espèces sont protégées par diverses conventions (Bonn, Berne, CITES). Elles sont à ce jour en danger d'extinction, la tortue Luth étant en danger critique d'extinction (liste rouge de l'UICN).

    La tortue verte est la plus présente à Joal-Fadiouth car cette espèce principalement herbivore se nourrit de l'herbier marin.

    Depuis 1986, les tortues marines sont protégées au Sénégal, ce qui n'a pas empêché le commerce et la consommation de tortues marines d'être pratique courante à Fadiouth. Ce n'est que dans les années 2000, suite aux campagnes de protection de la tortue marine menées à Joal-Fadiouth par l'UICN et la Fondation Internationale du Banc d'Arguin (FIBA) puis par le WWF, que cette pratique est devenue beaucoup moins fréquente.

    III.2.3.3.5. Mammifères marins

    Le lamantin, espèce en voie de disparition, est fréquemment rencontré dans les eaux de Joal-Fadiouth.

    39

    III.2.4.. L'AMP de Joal-Fadiouth

    III.2.4.1. Présentation générale

    Le site de Joal-Fadiouth dévoile des habitats exceptionnels, et une extraordinaire biodiversité. La nécessité de préserver ces habitats et cette biodiversité pour des raisons écologiques mais également socio-économiques, ont justifié le développement d'une AMP dans cette zone.

    L'AMP de Joal-Fadiouth a été créée par décret présidentiel n°2004-1408 le 04 novembre 2004. D'une superficie de 17 400 ha, elle comprend les dépendances maritimes de la commune, un bras de mer et un important réseau de mangrove. Ses coordonnées géographiques sont présentée figure10.

    AMP de Joal-Fadiouth

    Positions à terre

    Positions en mer

    Longitude

    Latitude

    Longitude

    Latitude

    Début

    16°46'7W

    14°04'5N

    16°51'7W

    14°04'5N

    Fin

    16°52'2W

    14°13'0N

    16°57'2W

    14°13'0N

    Fig.10 : références cartographiés de l'AMP de Joal-Fadiouth (Sène, 2008)

    Elle est divisée en trois zones (selon le règlement intérieur de l'AMP de Joal-Fadiouth) :

    - Le noyau central (fig.11, zone 1) qui part de la plage et s'étend jusqu'à 4,5 km au large et va de la limite Nord à Ngazobil jusqu'à la limite Sud à Diourom Niary Gouy. Cette zone inclut une zone de grossissement et de frayère pour les poissons et deux lieux dénommés, en raison de leur fréquentation, le puits de lamantins et la mare des tortues marines.

    - La zone à usage multiple (fig.11, zone 2) de même largeur que le noyau central et qui démarre à 4,5 km de la côte et s'étend jusqu'à la limite extérieure de l'AMP à 8 km de la côte. Certains types de pêches responsables y sont autorisés.

    - la zone de mangrove et de bolongs (fig.11, zone 3) qui inclut les zones d'ensemencement d'arche et les parcs à huitre. Des activités d'exploitation durable

    des arches et des huitres et des activités éco-touristiques y sont permises.

    Ngazobil

    Joal

    Fadiouth

    3

    1

    2

    Fig.11 : situation de l'AMP de Joal-Fadiouth (Sène, 2008)

    Diourom Niary Gouy

    40

    III.2.4.2. Historique de la mise en place d'une institution de gestion de l'AMP

    Le site de Joal-Fadiouth a été choisi pour la création d'une AMP sur base de critères écologiques mais aussi économiques et sociaux par des experts et des représentants des divers groupes d'intérêt. Dés le départ, le processus de création de cette AMP s'est donc voulu participatif et pluridisciplinaire. Une des conditions à la création d'une AMP à Joal-Fadiouth était que les populations de Joal-Fadiouth soutiennent le projet. Une réunion générale a rassemblé tous les acteurs, qui se sont montrés favorables à la création d'une AMP dans leur commune. Le conseil municipal a donc accepté l'AMP.

    En novembre 2004, l'AMP de Joal-Fadiouth a été reconnue officiellement par arrêté présidentiel, l'objectif fut alors de la rendre fonctionnelle.

    La première étape a été de réunir une équipe de réflexion qui s'est tenue au niveau de la mairie et qui regroupait la mairie, la Direction des Parcs Nationaux (DPN), la Direction des Pêches Maritimes (DPM), la Direction des Eaux et Forêt, le WWF et d'autres ONG impliquées, des délégués de quartier, les chefs religieux, des pêcheurs et toutes autres personnes concernées par la création de l'AMP.

    A partir de cette équipe de réflexion, a été créée une équipe de démarrage de 6 personnes représentant les parties prenantes principales; c'est-à-dire un agent de la DPN, un agent du service local des pêches, un représentant de la mairie, un représentant du WWF et

    41

    deux pêcheurs dont l'actuel président du comité de gestion. Le rôle de cette équipe de démarrage était de préparer le partenariat qui devait aboutir à un système de cogestion. Ainsi, il s'agissait d'identifier les parties prenantes directes et indirectes, de les informer et de les structurer en un organe de gestion.

    Des représentants des différents groupes des parties prenantes ont donc été choisis - chaque organisation de parties prenantes a choisi son représentant - pour constituer l'organe de gestion de l'AMP. Ainsi, le 21 février 2006, a été établi le Comité de gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth composé de 20 membres. Ceux-ci représentent principalement des organisations locales (GIE, organisations professionnelles et autres associations), mais aussi certains services étatiques (mairie, DPN, DPM, service des eaux et forêt) (détail en annexe III). Le Comité de gestion est la principale instance de décision et l'organe exécutif de l'AMP. Toutes les décisions en matière de gestion doivent être discutées et décidées en son sein (voir annexe III pour les mandats précis du comité de gestion). Quatre commissions ont été formées :

    - la commission de surveillance et de gestion des conflits ;

    - la commission de pêche durable, de gestion des ressources naturelles et

    d'aménagement technique et touristique ;

    - la commission de sensibilisation, communication, formation et organisation ;

    - la commission de recherche et de partenariat.

    L'étape suivante a été l'élaboration d'un Plan de travail annuel pour l'année 2006. Une première série d'activités prioritaires a ainsi été décidée par le comité de gestion. Parmi celles-ci figurent le zonage participatif et l'élaboration et la validation du règlement intérieur de l'AMP qui sont deux activités indispensables pour aboutir à une AMP fonctionnelle.

    Le zonage a été effectué par le comité de gestion en collaboration avec le WWF et diverses personnes ressources sur base principalement des connaissances locales des pêcheurs.

    L'élaboration des règles et réglementations s'est également effectuée de manière participative. Les agents de la DPN ont proposé une ébauche de règlement aux membres du comité de gestion qui ont eu le loisir de donner leur avis à ce propos. Ensuite, le conservateur a fait une proposition de réglementation qui a été discutée en réunion élargie du comité de gestion - c'est-à-dire que des personnes ressources supplémentaires étaient présentes. La proposition a été lue et commentée article par article, et des amendements ont été effectués.

    42

    D'autres activités essentielles ont été menées, depuis, par le comité de gestion en collaboration avec les agents de la DPN et le WWF. Dès 2006, l'activité principale fut la communication : rencontres au quai de pêche, émissions radio, éducation environnementale dans les écoles, mise en place de panneaux, surveillance dans l'AMP pour informer de ses limites. Depuis 2007, les agents de la DPN, procèdent également au suivi aviaire tous les mois et au suivi des tortues marines de juillet à janvier. Enfin, depuis 2008, la surveillance est couplée à l'arrestation et la verbalisation des pêcheurs récidivistes.

    Le balisage n'a été réalisé que le 30 janvier 2009. Pour tous les acteurs, cet événement a réellement rendu l'AMP fonctionnelle.

    Néanmoins, jusqu'à présent celle-ci fonctionne sans plan de gestion officiel. Le processus de formulation du plan de gestion a démarré officiellement le 19 avril 2005; le WWF et les partenaires locaux se sont rassemblés au cours d'une assemblée générale. Une équipe de sept personnes (l'ancien conservateur de l'AMP, le président du comité de gestion, un agent du CRODT et 4 représentants du WWF) ont alors travaillé pendant trois ans a l'élaboration d'une première version du plan de gestion qui est sortie en septembre 2008. Celui-ci doit encore être approuvé par tous les membres du comité de gestion et par les agents de la DPN avant d'être officialisé.

    43

    IV. METHODES DE COLLECTE DES DONNEES

    Afin de collecter les données nécessaires à la mise au point d'une méthodologie de suivi de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth, je me suis rendue à Joal-Fadiouth du 20 avril au 10 juin. J'ai effectué mon stage auprès des agents de la Direction des Parcs Nationaux qui m'ont présenté les membres du comité de gestion et m'ont fourni des documents précieux pour mon travail.

    Le travail de collecte des données s'est effectué en trois étapes, sur base de trois méthodes différentes :

    1. La première consistait à rassembler des données existantes provenant de diverses institutions.

    2. La seconde étape concernait la récolte de données qualitatives sur base d'entretiens avec les principales parties prenantes dans la gestion de l'AMP.

    3. Enfin, la troisième étape dans la récolte des données s'est effectuée sur base d'un questionnaire destiné aux habitants de Joal-Fadiouth.

    Chacune des trois méthodes va être détaillée dans ce chapitre.

    44

    IV.1. Recherche de données existantes

    Cette méthodologie a surtout été employée afin d'obtenir des données relatives aux indicateurs biophysiques. En effet, la majorité des indicateurs biophysiques nécessitent des moyens matériels et des compétences techniques trop importants pour pouvoir être mesuré dans le cadre d'un mémoire. J'ai donc rencontré plusieurs institutions et personnes ressources susceptibles de pouvoir me fournir des données biophysiques sur l'AMP.

    Voici la liste des documents obtenus ainsi que l'institution qui me les a gracieusement fournis :

    Institutions consultées

    Documents obtenus

    WWF WAMER (Claude Sène)

    - Plan de gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth

    DPN

    - Rapport d'activités annuel 2007

    - Rapport d'activités annuel 2008

    - Arrêté portant création du comité de gestion

    - Arrêté portant règlement intérieur de l'AMP

    Comité de gestion de l'AMP

    - Court métrage sur l'AMP de Joal-Fadiouth

    Mairie de Joal-Fadiouth

    - Plan directeur d'urbanisme de la commune de

    Joal-Fadiouth, banque de données
    départementales et urbaines

    - Enjeux du tourisme dans la commune de Joal-

    Fadiouth : milieu naturel amphibie (Etienne
    Guirane Dieng, 2006, mémoire de fin d'étude, technicien du tourisme)

    Quai de pêche de Joal-Fadiouth

    - Résultats généraux des mises à terre de 2000 à

    2009 (armement piroguier, répartition mises à terre, transformation artisanale, carburant)

    Parmi ces documents, certaines informations ont également été très utiles pour l'évaluation à travers d'autres indicateurs. En particulier, le plan de gestion a été un outil essentiel pour la réalisation de ce travail.

    45

    IV.2. Entretiens avec les principales parties prenantes

    La méthode utilisée pour cette partie du travail a été la collecte de données qualitatives à travers des entretiens. Il s'agissait de rencontrer individuellement diverses personnes ressources représentant dans la plupart des cas des associations membres du comité de gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth. L'objectif de ces entretiens était d'obtenir des informations concernant les indicateurs de gouvernance présentés dans la section II.2.

    La préparation des sujets à aborder avec les différentes personnes lors des entretiens s'est donc effectuée essentiellement à partir des indicateurs de gouvernances du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006).

    Avant mon stage, j'avais pris soin de préparer une série de questions pour chaque indicateur de gouvernance. Cependant, il s'est avéré plus intéressant de laisser libre cours aux conversations. De ce fait, ce qui correspondait à un questionnaire de plusieurs pages s'est rapidement transformé en guide d'entretien beaucoup plus succinct, ne reprenant que les grands thèmes à aborder avec mes interlocuteurs. C'est ainsi que nous avons pu aborder des sujets que je n'avais pas nécessairement prévu mais qui ont enrichi mon travail.

    Finalement les thèmes repris dans mon guide d'entretien sont les suivants :

    - L'association

    - Ses débuts dans l'AMP (comment, motivations, attentes)

    - Participation (aux réunions, aux activités, à l'élaboration des réglementations)

    - Formation (quand, quoi, satisfaction)

    - Questions par rapport aux commissions (activités, membres, budgets, matériel, projets)

    Commission de surveillance et de gestion des conflits : rendu des infractions, procédures, patrouilles (nombre, temps, parcours, sanctions)

    Commission de pêche durable, de gestion des ressources naturelles, d'aménagement technique et touristique: nouveautés touristiques, changement dans le milieu de la pêche

    Commission de sensibilisation, communication, formation et organisation: formations (nombre, type, par qui, pour qui), informations (quoi, supports, public cible, budjet, information sur le règlement),

    Commission recherche et partenariat: études scientifiques (menées, en cours, responsable, pourquoi, méthodes, résultats

    - Que pensez-vous du transfert de compétence de la DPN vers le ministère de la pêche?

    Voici la liste des personnes rencontrées : Direction des Parcs Nationaux :

    Conservateur de l'AMP

    Lieutenant Amar Fall

    Lieutenant Mamadou Cara Diédhiou

    Adjoint au conservateur

    Comptable

    Adjudant Al Hassane Seck Mané Membres du comité de gestion de l'AMP :

    Consultant au WWF WAMER

    Claude Sène

    Abdou Karim Sall

     

    président du comité de gestion

    membre de l'association des jeunes pêcheurs

    Ibrahima Samb

    responsable de la commission de surveillance de l'AMP

    membre de l'association des jeunes pêcheurs

    Mamadou Lamine Dioh

    responsable de la commission recherche et partenariat

    membre de la commission communication et sensibilisation

    éco-guide

    Léopold Diouf

    vis-président du comité de gestion

    membre de l'interprofessionnelle du quai de pêche

    pêcheur

    El Hadji Faye

    secrétaire général du comité de gestion éco-guide

    Demba Mare

    responsable de la commission gestion des conflits

    président de l'interprofessionnelle de pêche

    Élisabeth Dioh

    trésorière du comité de gestion

    membre de la commission communication et sensibilisation

    trésorière de l'association "Femmes et
    coquillages"

    Pierre Dioh

    2ème adjoint au maire

    Souleye Sabaly

    responsable du poste de contrôle de Joal-Fadiouth

    Autres :

    Iboumbodj Sanè

    Responsable du quai de pêche de Joal, chargé production

    Membre des jeunes pêcheurs

    Pêcheur 1

    46

    Pêcheur 2

    47

    De plus, pour compléter ou confirmer certaines informations reçues durant les entretiens, j'ai rempli l' "instrument de suivi de l'efficacité de la gestion des Aires Marines Protégées" de Francis Staub et Marea E. Hatziolos (2004) avec l'adjoint au conservateur de l'AMP et ensuite avec le président du comité de gestion de l'AMP.

    IV.3. Questionnaire destiné aux habitants de Joal-Fadiouth

    Sur base d'un questionnaire, j'ai interrogé des habitants de Joal-Fadiouth. J'ai tenté de diversifier les lieux de rencontre et le profil des personnes interrogées. À cet effet, j'ai relevé pour chaque individu le lieu de la rencontre, le sexe, la catégorie d'âge et j'ai commencé par leur poser les trois questions suivantes :

    - Depuis combien de temps habitez-vous Joal-Fadiouth ?

    - Dans quelle localité de Joal-Fadiouth habitez-vous? Joal/ Fadiouth/ Ngazobil

    - De combien de personnes se compose votre ménage ?

    - Quel est votre métier ? Qu'exercez-vous comme activité ?

    Ensuite, les questions ont toutes été préparées pour répondre à des indicateurs socio-économiques ou de gouvernance.

    Un premier questionnaire a été préparé avant mon stage à l'AMP de Joal-Fadiouth. Pour chacun des 7 indicateurs socio-économiques sélectionnés dans la section II.3, une série de questions a été rédigée à destination des habitants de Joal-Fadiouth. La récolte des données concernant 2 indicateurs de gouvernance s'effectue également par le biais d'une enquête menée auprès de la population.

    Le guide propose déjà un certain nombre de questions qui peuvent être posées pour répondre à ces 9 indicateurs. Les questions ont donc été soit directement issues du guide, soit légèrement complétées ou modifiées pour les adapter aux connaissances préalables que j'avais de l'AMP de Joal-Fadiouth. Par exemple, une question sur les coraux a simplement été transformée en une question sur la mangrove mais les modifications sont pour l'instant restées superficielles.

    48

    Voici les questions correspondant à chaque indicateur :

    ? Indic. S2 : Jugements de valeur et croyances locales à l'égard des ressources marines

    - Pourquoi la mer et les mangroves sont elles importantes pour vous ?

    - Est-ce que vous connaissez des techniques de pêche qui nuisent à la ressource ?

    Par exemple : pêche à la dynamite ; filet à petites mailles ; filets dérivants - Pourquoi les individus pratiquent-ils ce genre d'activité destructrice ?

    - D'après vous, qu'est ce qui a un impact sur la disponibilité en poisson dans la mer ?

    Le nombre de pêcheurs impact très / assez / peu / pas important

    La volonté de Dieu impact très / assez / peu / pas important

    Les techniques de pêche destructrices impact très / assez / peu / pas important

    - Que pensez-vous des stratégies actuelles de gestion des AMPs?

    - Les stratégies actuelles de gestion des AMPs enrichissent-elles les croyances et traditions culturelles locales?

    - Pouvez me dire si vous êtes tout à fait d'accord/ plutôt d'accord/ d'accord/ neutre/ pas d'accord/ pas du tout d'accord avec les propositions suivantes :

    o Nous devons préserver la terre et la mer sinon elles ne pourront subvenir à nos besoins à l'avenir

    o Nous n'avons pas à nous préoccuper de la mer et des poissons, Dieu les préservera pour nous

    o Nous devrions préserver la mer pour que nos enfants et leurs enfants aient du poisson.

    ? Indic. S3 : Degré de compréhension des conséquences de l'action de l'homme sur les ressources

    - Quels sont selon vous les événements, activités ou changements qui ont eu ou ont un impact sur l'environnement naturel ?

    - Quels changements au niveau de l'environnement naturel imputez-vous à ces menaces ?

    - Comment comparez-vous ces menaces en termes de niveau d'impact ?

    ? Indic. S4 : Perception de la disponibilité des produits de la mer

    - Le mois dernier, pendant combien de jours votre famille n'a pas eu une alimentation en quantité suffisante ? jamais/ une fois par semaine/ deux fois par semaine/ plus de deux fois par semaine/ préciser le nombre de jours

    - Le mois dernier, pendant combien de jours votre famille n'a pas eu de produits de la mer frais locaux en quantités suffisantes en raison de leur indisponibilité ? jamais/ une

    49

    fois par semaine/ deux fois par semaine/ plus de deux fois par semaine/ préciser le nombre de jours

    - L'année dernière, pendant combien de jours votre famille n'a pas eu de produits de la mer frais locaux en quantités suffisantes en raison de leur indisponibilité ? pendant quelle saison ou quel mois ? jamais/ précisez le nombre de jours/ précisez les mois ou la saison

    - Avez-vous noté des changements en matière de disponibilité des produits de la mer depuis la mise en place de l'AMP ?

    - Pensez-vous que l'AMP a un impact sur la disponibilité des produits de la mer frais locaux ? oui : positif ou négatif ? / non, pourquoi?

    ? Indic. S6 : Perceptions de la valeur non marchande et de non usage

    Pouvez me dire si vous désapprouvez (un peu ou fortement), approuvez (un peu ou fortement) ou êtes neutre face à ces déclarations:

    - Si la mangrove n'est pas protégée, nous n'aurons pas de poissons à pêcher (valeur non marchande indirecte).

    - Je voudrais que les générations futures profitent des mangroves (valeur de transmission liée au non usage).

    - La pêche devrait être limitée dans certaines zones même si personne ne pêche dans ces zones simplement pour permettre aux poissons et aux mollusques de se reproduire (valeur d'existence).

    - Nous devrions restreindre le développement dans certaines zones côtières afin que les générations futures puissent bénéficier d'environnements naturels (valeur de transmission).

    - Les herbiers n'ont aucune valeur pour les individus (valeur d'existence).

    ? Indic. S9 : Répartition des revenus des ménages par source

    - Quelles sont les différentes sources de revenus au sein de votre ménage ?

    - Quelle est l'importance relative de chaque source de revenus au sein de votre ménage ? (proportion en pourcentage)

    Si vous étiez déjà à Joal-Fadiouth il y a 5 ans:

    - Est-ce que vos sources de revenus se sont modifiées ces 5 dernières années ?

    - D'après vous pourquoi? Quelles sont les causes ? (concurrence, moins de poissons, moins d'accès, lien avec l'AMP)

    50

    ? Indic. S10 : Structure professionnelle des ménages

    Membre du foyer

    Age

    Sexe

    Niveau d'études

    Activité principale

    Activité secondaire

    Activité tertiaire

    1

     
     
     
     
     
     

    2

     
     
     
     
     
     

    3

     
     
     
     
     
     

    4

     
     
     
     
     
     

    Etc.

     
     
     
     
     
     
     

    ? Indic. S14 : Diffusion des connaissances formelles à la communauté

    Pour chaque information scientifique fournie à la communauté:

    - Connaissez-vous ?

    - Pouvez-vous décrire le type d'information scientifique qui vous a été fournie?

    - Avez-vous confiance en ces informations? Pour quelle raison?

    - De quelle façon ces informations peuvent-elles être améliorées?

    ? Indic. G4 : Compréhension locale des règles et réglementations de l'AMP

    - Connaissez-vous les règles et réglementations pour la gestion de l'AMP ?

    - Pouvez-vous énumérer celles que vous connaissez ?

    - Quelle institution a élaboré et émis chaque règle et réglementation?

    - Trouvez-vous les réglementations claires et simples ?

    o règles très complexes et difficiles à comprendre (1)

    o règles complexes et difficiles à comprendre (2)

    o règles moyennement complexes (3)

    o règles simples et faciles à comprendre (4)

    o règles très simples et faciles à comprendre (5)

    - Pensez-vous que les règles et réglementations sont crédibles et pertinentes ?

    - Pensez-vous que les règles et réglementations sont socialement acceptables ?

    - Quelles règles et réglementations jugez-vous acceptables ou inacceptables ?

    Pourquoi ?

    - Pourquoi les règles et réglementations ont-elles été conçues telles qu'elles sont ?

    51

    ? Indic. G16 : Degré de diffusion des informations visant à encourager la conformité des parties prenantes

    - Des ateliers et cours de formation vous ont-ils été dispensés lors de la planification de l'AMP?

    - Combien et de quels types?

    - Des ateliers et cours de formation vous ont-ils été dispensés lors de la mise en place de l'AMP?

    - Combien et de quels types?

    - Avez-vous été satisfait des ateliers et cours de formation? Oui/Non

    - Pourquoi?

    - Avez-vous été impliqué dans le choix des ateliers et cours de formation?

    - Quels types de diffusion d'informations ont été proposés? - Lesquels estimez-vous les plus efficaces personnellement? - Pourquoi?

    - Les informations reçues ont-elles changé votre comportement en termes de conformité? Oui/Non

    - Comprenez-vous mieux les règles, réglementations et dispositions d'application grâce aux ateliers? Oui/Non

    - Comprenez-vous mieux la finalité de l'AMP grâce aux ateliers? Oui/Non

    - Comprenez-vous mieux les écosystèmes marins et côtiers grâce aux informations qui vous ont été fournies? Oui/Non

    Ce questionnaire est un questionnaire de départ, qui n'est pas encore adapté à l'AMP de Joal-Fadiouth. J'avais prévu de réaliser l'enquête auprès des habitants dans les dernières semaines de mon séjour afin d'avoir l'occasion de modifier le questionnaire en fonction des premières connaissances que j'aurai acquises sur l'AMP et sur les habitants de Joal-Fadiouth. De plus, j'avais conscience que ce questionnaire était trop long et que le vocabulaire utilisé dans les questions de guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) est trop complexe pour des individus dont la langue maternelle n'est pas le français.

    52

    V. ADAPTATION DES INDICATEURS AU CAS

    D'ETUDE

    Je vais procéder à l'évaluation de l'AMP de Joal-Fadiouth sur base des indicateurs du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) présenté dans le chapitre II. Je vais regrouper et analyser toutes les informations que j'ai pu obtenir sur cette AMP concernant chacun des indicateurs. Parallèlement, j'évaluerai la pertinence d'utiliser chaque indicateur pour l'analyse de l'AMP de Joal-Fadiouth et je tenterai, si nécessaire, de proposer une version d'indicateurs plus adaptée aux données et aux conditions particulières de cette AMP.

    Concernant le questionnaire destiné à la population de Joal-Fadiouth, il a été nécessaire de l'ajuster un maximum aux conditions du terrain avant de démarrer l'enquête, sans quoi certaines questions risquaient d'être complètement inadaptées. La première section sera donc consacrée à cette tache.

    53

    V.1. Ajustement du questionnaire

    Après environ un mois passé à Joal-Fadiouth, j'avais déjà reçu beaucoup d'informations sur la gestion de l'AMP. J'avais rencontré plusieurs représentants de parties prenantes et eu l'occasion de discuter de manière informelle avec des membres de la communauté à propos de l'AMP. J'ai également eu l'occasion de tester le questionnaire sur une première habitante de Joal avec qui j'avais sympathisé.

    Le premier constat a concerné la longueur et la complexité du questionnaire. N'oublions pas que le français n'est pas la langue maternelle des habitants de Joal-Fadiouth : leur langue maternelle est le sérère ou le wolof. Ils apprennent le français à l'école - pour autant qu'ils y soient allés - et à la télévision ou la radio. Il a donc été nécessaire de réduire le questionnaire et de simplifier certaines questions.

    Tout d'abord, j'ai rassemblé les indicateurs S2 et S6 qui concernent tous deux les valeurs des individus à propos des ressources côtières.

    Plutôt que de demander aux individus s'ils approuvent les propositions pour l'indicateur S6 (§IV.3.), j'ai posé les trois questions suivantes :

    - Est ce important pour vous de protéger l'environnement à Joal-Fadiouth? Très important/ assez important/ un peu important/ pas important

    - Pour vous, est-ce important de protéger la mer et les mangroves? Très important/ assez important/ un peu important/ pas important

    - Pourquoi est-ce important de protéger la mer et les mangroves?

    Ces questions devraient permettre d'évaluer si la population attache une grande importance à la protection de l'environnement et comment elle justifie la nécessité de protection - les individus interrogés évoqueront-ils des valeurs d'usage, de non usage ou d'existence?

    Par ailleurs, j'ai appris que d'autres problèmes environnementaux tels que les inondations ou la pollution par les ordures ménagères menacent la commune de Joal-Fadiouth. J'ai donc souhaité demander aux habitants de Joal-Fadiouth :

    - Quels sont les principaux problèmes environnementaux à Joal-Fadiouth ? (citez par ordre d'importance)

    54

    J'ai placé cette question avant celle sur la mer et les mangroves pour ne pas influencer la réponse.

    Enfin, j'ai conservé une question de l'indicateur S2 mais j'y ai ajouté un impact naturel qui est "les conditions hydro-climatiques" :

    - D'après vous, qu'est ce qui a un impact sur la disponibilité en poisson dans la mer ?

    Les conditions hydro-climatiques impact très / assez / peu / pas important

    Le nombre de pêcheurs impact très / assez / peu / pas important

    La volonté de Dieu impact très / assez / peu / pas important

    Les techniques de pêche destructrices impact très / assez / peu / pas important

    Finalement, j'ai regroupé ces questions sous un nouvel indicateur relativement proche des indicateurs S2 et S6 et qui devrait nous fournir le même type d'informations.

    ? Ind. Socio-éco. 1. Perception de l'environnement et de la nécessité de le protéger

    5. Est-ce important de protéger l'environnement à Joal-Fadiouth ? très important/ assez important/ un peu important/ pas important

    6. Quels sont les principaux problèmes environnementaux à Joal-Fadiouth ? (par ordre d'importance)

    7. Pour vous, est-ce important de protéger la mer et les mangroves ? très important/ assez important/ un peu important/ pas important

    8. Pourquoi est-ce important ?

    9. D'après vous, qu'est ce qui a un impact sur la disponibilité en poisson dans la mer ?

    Les conditions hydro-climatiques impact très / assez / peu / pas important

    Le nombre de pêcheurs impact très / assez / peu / pas important

    La volonté de Dieu impact très / assez / peu / pas important

    Les techniques de pêche destructrices impact très / assez / peu / pas important

    L'indicateur S3 sera représenté par une seule question.

    ? Ind. Socio-éco. 2 : Degré de compréhension des conséquences de l'action de l'homme sur les ressources

    10. Quels sont les comportements, les activités qui ont eu un impact négatif sur l'environnement ces dernières années ?

    55

    J'ai conservé l'indicateur S4 car il me semble particulièrement intéressant de connaitre l'impression des individus sur la disponibilité des produits de la mer. De plus, afin d'obtenir directement des données sur l'évolution au cours du temps, j'ai demandé aux répondants comment ils perçoivent l'évolution des prix et des espèces de poissons sur le marché ces dernières années (questions 13. et 14. ci-dessous) et à quelle cause ils imputent les changements observés (question 15.). Enfin, il était intéressant de savoir si ceux-ci ont remarqué des changements depuis la mise en place de l'AMP (question 22.). Cette question a été posée après d'autres questions relatives à l'AMP.

    ? Ind. Socio-éco. 3. perception de la disponibilité des produits de la mer

    11. Le mois dernier, est ce qu'il y a des jours où vous n'avez pas pu acheter des produits de la mer parce qu'ils étaient trop cher où indisponible?

    12. Sur une année, y a-t-il des saisons, périodes où les produits de la mer sont plus chers ou indisponibles?

    13. Ces dernières années, le prix du poisson a-t-il tendance à augmenter ou à diminuer?

    14. Ces dernières années, est-ce que les espèces de poissons que l'on trouve sur le marché ont changé?

    15. Quel est selon vous la cause de ces changements ?

    22. Avez-vous remarqué des changements au niveau de la quantité de poissons disponible, du prix, des espèces depuis la mise en place de l'AMP ?

    Pensez-vous que l'AMP à un impact sur la quantité de poissons, les prix, les espèces disponibles? (Positif ou négatif ?)

    Jusqu'à présent, les questions qui ont été formulées concernent les perceptions ou les connaissances des habitants au sujet de l'environnement et des ressources. Puisqu'il fallait réduire fortement la longueur du questionnaire, nous nous sommes limités à ce sujet et n'avons pas maintenu les indicateurs S9 et S10 qui concernent les activités et sources de revenus des ménages. Par contre, nous avons conservé les indicateurs de gouvernance puisque j'ai effectué une analyse de tous les indicateurs de gouvernance du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006).

    L'indicateur social S14 et de gouvernance G16 concernent tous deux la diffusion d'informations aux populations. Le S14 cible les informations scientifiques. Or, étant donné qu'il n'y a presque pas eu d'études scientifiques réalisées sur l'AMP de Joal-Fadiouth, il n'y a pas eu de diffusion d'informations purement scientifiques vers la communauté. L'indicateur G16 cible tout type d'information mais surtout les ateliers et cours de formation. Des ateliers et cours de formation ont été organisés pour les membres du comité de gestion - qui ont été interrogés à ce sujet lors des entretiens - mais pas pour la population de Joal-Fadiouth en général. En bref, il n'était pas très pertinent d'utiliser ces deux indicateurs pour interroger les

    56

    habitants. Par contre, je sais que différents supports d'informations ont été utilisés pour communiquer à la population de Joal-Fadiouth sur l'AMP. Les outils de diffusion d'informations utilisés par le comité de gestion et la DPN sont des panneaux d'informations, des émissions radios et des T-shirts. J'ai donc demandé aux habitants de Joal-Fadiouth s'ils connaissent ces supports d'informations, ce qu'ils en ont retenu et ce qu'ils en pensent. Différentes activités, auxquelles les habitants ont pu participer, ont également été organisées. Il s'agit d'une campagne de replantation de mangrove, de deux campagnes de suivi des tortues et des olympiades environnementales. Ces activités ont été l'occasion de diffuser des informations sur l'AMP et la protection de l'environnement. J'ai également formulé une question à ce sujet (question 29).

    J'ai donc remplacé les indicateurs S14 et G16 par un indicateur "diffusion d'informations dans la communauté".

    ? Indic. G16' : Diffusion d'informations dans la communauté

    23. Avez-vous participé à des séances d'informations, des activités, des ateliers ou des réunions en rapport avec l'AMP ou de manière plus générale avec l'environnement?

    24. Connaissez-vous les panneaux d'informations ? oui / non

    Pouvez-vous décrire le type d'informations qui vous ont été fournies à travers ces panneaux ?

    Est ce que vous les trouvez - Clair et compréhensible ? oui / non / moyennement - Intéressant ? oui / non / moyennement intéressante Comment les panneaux d'informations pourraient ils être améliorés ?

    25. Connaissez-vous les émissions de radios sur l'AMP ? oui / non

    Pouvez-vous décrire le type d'informations qui vous ont été fournies à travers ces émissions radios ?

    Est ce que vous trouvez les émissions de radios sur l'AMP

    - Clair et compréhensible ? oui / non / moyennement

    - Intéressant ? oui / non / moyennement intéressante

    26. Connaissez-vous les T-shirts du WWF ? oui / non Savez-vous ce qu'il est écrit sur ces T-shirts ?

    27. Avez-vous reçu des informations à partir de discussions ou réunions avec des membres du comité de gestion ou le chef de votre quartier ?

    Pouvez-vous décrire le type d'informations qui vous ont été fournies à travers ces discussions? Comprenez-vous mieux les objectifs, la raison d'être de l'AMP suite à ces discussions? Oui / non / un peu

    28. Avez-vous reçu des informations à partir de discussions informelles avec d'autres membres de la communauté?

    29. Avez-vous participé à des activités liées à l'AMP ?

    Replantation de la mangrove, campagne de suivi des tortues marines, olympiade environnementale Pour quelles raisons vous êtes vous impliqué ?

    Comprenez-vous mieux les objectifs, la raison d'être de l'AMP depuis que vous avez participé à ces activités ?

    30. Souhaiteriez-vous recevoir plus d'informations à propos de l'AMP ? Oui / non / un peu

    31. Selon vous quel est le meilleur moyen de diffuser de l'information sur l'AMP et de manière plus générale sur l'environnement et la gestion des ressources naturelles dans la communauté ?

    57

    Cet indicateur est avant tout un indicateur de gouvernance car il évalue l'efficacité des moyens mis en oeuvre pour informer la communauté.

    Nous avons également créé quelques questions plutôt sur les connaissances qu'ont les individus sur l'AMP de manière générale, ce qui compléte l'indicateur précédent. Les connaissances qu'acquièrent les individus dépendent de l'efficacité des moyens de diffusion mais peuvent être considérées comme un indicateur social car elles évaluent l'objectif d'accroitre les connaissances et la compréhension de la communauté en matière de conservation.

    ? Ind. Socio-éco. 4. Connaissances générales sur l'AMP

    16. Savez-vous qu'il y a une Aire Marine Protégée à Joal-Fadiouth? Oui/ non

    17. Savez-vous ce que signifie « Aires Marines Protégées » ? Comment définiriez-vous une AMP ?

    18. Savez-vous depuis quand existe celle de Joal-Fadiouth?

    19. Par qui a-t-elle été mise en place ?

    20. D'après vous pourquoi a-t-elle été mise en place ? et pour qui ?

    21. Connaissez-vous les objectifs de l'AMP?

    Ces questions ont été posées juste avant l'indicateur de gouvernance précédent.

    58

    Enfin, pour l'évaluation de l'indicateur de gouvernance G4, quelques questions ont été retenues

    ? Indic. G4 : Compréhension locale des règles et règlementations de l'AMP

    32. Connaissez-vous les règles et réglementations pour la gestion de l'AMP ? Pouvez-vous énumérer celle que vous connaissez ?

    33. Comment avez-vous reçu des informations à propos des règles et réglementations ?

    34. Trouvez-vous les réglementations claires et simples ?

    35. Savez vous comment et par qui ont été élaborées les règles et réglementations ?

    36. Pensez-vous que les règles et réglementations sont réalistes (possible à appliquer) ? tout à fait / assez /

    peu / pas réaliste

    37. Pensez-vous que les règles et réglementations sont socialement acceptables (acceptables par la population) ? tout à fait / assez / peu / pas acceptable

    Quelles règles et réglementations jugez-vous acceptables ou inacceptables ?

    Pourquoi ?

    La version du questionnaire qui regroupe toutes ces questions, c'est-à-dire tel qu'il a été posé aux habitants de Joal-Fadiouth est présentée en annexe V.

    59

    V.2. Evaluation de la gouvernance

    Les informations concernant la gouvernance de l'AMP proviennent principalement des entretiens mais aussi de certains documents tels que le plan de gestion de l'AMP, le règlement intérieur de l'AMP ou les rapports d'activités de la DPN. Les questionnaires m'ont également permis de collecter des données pour l'évaluation à travers les indicateurs G4 et G16'.

    Par ailleurs, à mon retour du Sénégal, j'ai découvert dans le plan de gestion de l'AMP (Sène, 2008) des activités et des objectifs rattachés à la gouvernance. J'ai également lu un document intitulé "Pour des systèmes irrigués autogérés et durables : façonner les institutions" (Ostrom, 1992) qui m'a inspiré certains principes de durabilité pour les systèmes auto-organisés.

    Les indicateurs que je proposerai à la fin de ce chapitre, seront donc basés sur le guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) et adaptés à l'AMP de Joal-Fadiouth en fonction des informations obtenues sur la gouvernance de cette AMP et des deux documents précédemment cités (Sène, 2008 ; Ostrom, 1992)

    V.2.1. Evaluation et adaptation des indicateurs du guide de l'UICN

    ? Indic. G.1 : Niveau de conflit sur les ressources

    Un travail de fin d'études consacré principalement aux conflits liés à l'AMP de Joal-Fadiouth17 a été réalisé l'année passée. Je ne vais donc pas développer l'analyse de cet indicateur. Il est néanmoins un indicateur très intéressant à suivre dans le temps.

    Dans le même registre, un indicateur évaluant l'existence de mécanismes de résolution des conflits serait intéressant. Il s'agit d'un principe présenté dans le travail d'Ostrom (1992) comme "principe respecté dans tous les systèmes auto-organisés durables". Il indiquerait si les conflits peuvent être pris en compte et traités par une organisation de l'AMP. Il peut arriver que des règles soient ambigües ou puissent être interprétées de différentes manières. Dans ce cas, il est nécessaire de pouvoir discuter et trancher lorsque des différents se produisent.

    17 MAULE Philippe, 2008, Problèmes et voies de solution à la mise en place des aires marines protégées (AMPs), étude de cas de l'AMP de Joal-Fadiouth, Sénégal. Travail de fin d'études en vue de l'obtention du Master en Sciences et Gestion de l'environnement.

    60

    Au niveau du comité de gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth, il existe une commission de surveillance et de gestion des conflits. Le responsable de la gestion des conflits est Demba Mare. Il est également le président de l'interprofessionnelle des pêcheurs du quai de pêche de Joal. Cette place qu'il occupe au quai de pêche depuis 2003 lui confère un certain respect et une légitimité pour intervenir dans les conflits avec les pêcheurs. Il tente de régler les conflits à l'amiable plutôt que d'avoir directement recours au commissariat. Il a constaté une diminution des conflits depuis la création de l'AMP.

    "Maintenant les pêcheurs comprennent (le rôle de l'AMP), il y a moins de conflits. Au début il y en avait beaucoup parce que tout début est difficile. Maintenant il y en a un ou deux par mois" (Demba Mare, responsable de la gestion des conflits à l'AMP, président de l'interprofessionnelle des pêcheurs du quai de pêche Joal).

    Proposition d'indicateur :

    En plus de ces deux indicateurs, il est intéressant d'évaluer la "nature des conflits"; c'est-à-dire le sujet des conflits.

    Ces trois indicateurs peuvent être regroupés sous un indicateur plus général :

    Conflits liés à l'AMP

    - Niveau des conflits

    - Nature des conflits

    - Existence de mécanismes de résolution des conflits

    ? Indic. G2 : Existence d'un organisme de décision et de gestion

    L'AMP de Joal-Fadiouth est régie selon le principe de la cogestion. Les acteurs locaux sont donc les principaux gestionnaires, appuyés par des représentants de l'état

    Le comité de gestion de l'AMP représente les acteurs locaux; il est à la fois l'organe de gestion et la principale instance de décision. Il a été reconnu officiellement par l' "arrêté portant création et statut du comité de gestion de l'Aire Marine Protégée de Joal-Fadiouth". Il est composé de 20 membres représentant différentes parties prenantes de l'AMP. Parmi ceux-ci ont été élus un président, un vice-président, un secrétaire et une trésorière qui forment "le bureau".

    61

    D'après l'article 12 de cet arrêté "Les décisions du Comité de Gestion ne sont appliquées qu'après avis favorable du Conservateur de l'Aire Marine Protégée de Joal-Fadiouth après analyse de conformité aux textes de lois et règlements en vigueur en matière de conservation de la biodiversité. Le bureau exécutif du comité travaille sous la supervision du conservateur de L'AMP." Aucune décision ne peut donc être prise sans que celle-ci n'ait été approuvée par le conservateur de l'AMP. Le conservateur de l'AMP est un agent de la DPN. Il représente donc l'Etat.

    Proposition d'indicateur

    Cet indicateur évalue également si l'organisme de décision et de gestion est reconnu de manière officielle. Cet indicateur pourrait donc être nommé : Existence d'un organisme de décision et de gestion reconnu légalement.

    ? Indic. G3 : Existence et adoption d'un plan de gestion

    Une version provisoire du plan de gestion est sortie en septembre 2008. Il est prévu qu'il soit applicable de 2009 à 2013. Il n'a à ce jour pas encore été approuvé par le conservateur et les membres du comité de gestion.

    Celui-ci comprend :

    - une présentation générale de l'AMP (localisation, statut, limite, gestion, règlement) ;

    - une description détaillée de l'environnement biophysique (climat, géologie,

    hydrologie, espèces) et du contexte socio-économique (démographie, agriculture,

    tourisme, patrimoine) ;

    - une évaluation de la valeur patrimoniale des habitats, des espèces et de la

    biodiversité ;

    - une présentation des objectifs à long terme ;

    - une description des contraintes et des menaces pouvant influencer la gestion ;

    - une description des activités prévues mises en relation avec les objectifs ;

    - un plan de travail précis (période, budget pour chaque activité) ;

    - des indicateurs de suivi des objectifs du plan.

    Le plan de gestion parait très complet sur ces différents sujets. Une description approfondie du contexte a été réalisée ; les valeurs, les menaces, l'environnement socio-économique ont été détaillés. La planification est également très précise : explication de

    62

    chaque objectif, description des activités prévues, plan de travail. Le plan de gestion fournit donc une bonne évaluation de premier niveau tel que définie par Hockings et al. (2008) et explicitée dans l'introduction (I.4.3.).

    Par contre, la partie sur les indicateurs de suivi parait fort succincte. Ces derniers sont présentés à la fin du document sous la forme d'un tableau sans explications supplémentaires (annexe XI).

    Par ailleurs, le plan de gestion donne peu d'informations sur le personnel, les installations et le matériel disponible. Il ne donne pas non plus de procédure d'application des règles et de surveillance.

    Enfin, un grand nombre d'activités ont déjà été réalisées à l'AMP de Joal-Fadiouth. Des formations ont également été dispensées aux membres du comité de gestion. Celles-ci ne sont pas mises en valeur dans le plan de gestion. En effet, il est important de savoir que malgré l'absence de plan de gestion officiel un grand nombre d'activités sont déjà menées sur le terrain. Ces activités sont programmées dans le Plan de travail annuel et principalement soutenues et financées par le WWF. La DPN et le comité de gestion travaillent en suivant trois objectifs18 qui sont :

    - Conserver la biodiversité marine et côtière ;

    - Améliorer le rendement de la pêche ;

    - Augmenter les retombées socio-économiques de la population.

    Les objectifs à long terme définis dans le plan de gestion ne sont pas identiques à ces trois objectifs. Il s'agit de :

    - Conservation des habitats et des espèces ;

    - Développement durable des populations locales ; - Communication et sensibilisation du public ; - Gestion administrative efficace.

    Il me semble qu'il serait peut être intéressant de reprendre comme objectifs généraux dans le plan de gestion les objectifs déjà adoptés par la DPN et le comité de gestion.

    18 Ces objectifs sont repris sur les panneaux d'information réalisés par la DPN et cités par les principaux acteurs locaux.

    63

    ? Indic. G4 : Compréhension locale des règles et réglementations de l'AMP

    Les règles ont été élaborées en collaboration avec les représentants des parties prenantes. On peut donc penser que celles-ci doivent être compréhensibles par tous.

    "Les règles ont été faites par nous, donc bien sur elles sont compréhensibles" (Ibrahima Samb, responsable de la commission de surveillance de l'AMP, représentant de l'association des jeunes pêcheurs)

    Cependant, il faut avant tout que celles-ci soient diffusées à la population. A cet effet, les membres du comité de gestion ont été chargés d'informer l'association qu'ils représentent.

    "Les autres membres de "Femme et coquillage" ne les ont pas lues mais on les a informées. On a fait des rencontres pour les informer que là on pêche pas etc." (Elisabeth Dioh, trésorière du comité de gestion, représentante de l'association "femme et coquillage")

    L'information a également été diffusée lors de manifestation au quai de pêche, lors d'événements culturels et à travers des émissions radios. Les émissions radios ont principalement insisté sur le zonage de l'AMP, les zones interdites à la pêche et la protection des tortues (d'après Pierre Dioh, membre du comité de gestion, 2ème adjoint au maire). De plus, les premières surveillances de l'AMP avaient pour objectif d'informer et de sensibiliser les pêcheurs.

    On peut maintenant se demander si la diffusion a bien été efficace. D'après les réponses au questionnaire réalisé auprès des habitants de Joal-Fadiouth (Annexe V., question 31 à 37), la moitié des personnes que j'ai interrogées connaissaient au moins une règle. L'interdiction de pêcher et de manger la tortue semble la plus connue des règles ; 4 individus sur les 11 interrogés l'ont citée. Cela n'est pas surprenant puisque deux campagnes de protection de la tortue marine ont été menées à Joal-Fadiouth ; l'une par l'UICN et le FIBA entre 2000 et 2002 et l'autre par le WWF en 2006. La connaissance des règles et réglementations par les habitants parait finalement assez faible. Cependant, il n'est certainement pas nécessaire, ni possible, que tout le monde connaisse toutes les règles. Il faudrait peut être d'abord se demander ce que tel ou tel groupe d'utilisateurs doit savoir.

    Enfin, n'oublions pas, que même si la diffusion a été efficace et que les utilisateurs savent les actes qui leur sont interdits, il n'est pas encore garanti qu'ils respectent les règles.

    " Il n'y a jamais eu une loi qui dit aux pêcheurs abandonnez ça et les pêcheurs le font." (Abdou Karim Sall, président du comité de gestion, président de l'association des jeunes pêcheurs)

    64

    Pour cela, il faut que les règles soit légitimes, acceptées et que la raison d'être de chaque règle soit comprise. C'est pour cette raison qu'il est essentiel de faire participer les diverses parties prenantes dès l'élaboration de l'AMP et qu'il est important de communiquer et sensibiliser toute la population lors de la mise en place de l'AMP. Il est nécessaire également d'assurer un certain contrôle pour que les infractions soient sanctionnées. Ces aspects - l'étendue des activités de surveillance et la conformité des parties prenantes - seront évalués à travers l'indicateur G15.

    "L'objectif de la communication est que la population comprenne que nous ne sommes pas là dans le but d'interdire mais que si on interdit certaines choses c'est pour protéger et conserver, pour viser à une exploitation durable, pour eux" (Lieutenant Mamadou Cara Diédhiou, adjoint au conservateur)

    Par ailleurs, nous avons mentionné ci-dessus que l'élaboration des règles s'est effectuée en collaboration avec les représentants des parties prenantes. Il serait donc intéressant de savoir si elles ont été satisfaites de leur participation et si elles sont satisfaites du résultat, c'est à dire des règles et réglementation en vigueur dans l'AMP. Ce sujet sera développé au niveau de l'indicateur G12

    Proposition d'indicateur

    Il apparait que divers éléments conditionnent le fait que les parties prenantes connaissent et comprennent les réglementations. Les aspects liés à la participation des parties prenantes à l'élaboration des règles et les aspects liés à l'étendue des activités de surveillance et à la conformité des parties prenantes seront développés par la suite. Nous pouvons pour l'instant nommer un indicateur "Diffusion, connaissance et compréhension locale des règles et réglementations de l'AMP" qui serait subdivisé en deux "sous indicateurs" :

    - Diffusion des règles et réglementations de l'AMP dans la communauté

    - Connaissance et compréhension locales des règles et règlementations de l'AMP

    65

    ? Indic. G5 : Existence et adéquation de la législation habilitante

    Cinq nouvelles AMPs, dont l'AMP de Joal-Fadiouth, ont été créées par décret n° 20041408 le 04 novembre 2004.

    Le règlement intérieur de l'AMP a été reconnu officiellement par arrêté préfectoral.

    L'article 20 de règlement intérieur précise : "Les infractions au présent règlement intérieur seront poursuivies et réprimées conformément aux textes de Loi et règlement en vigueur (Code de la pêche, Code de la chasse et de la protection de la Nature, Code de l'Environnement, le Code Forestier et le Code des contraventions)". Ainsi, ces différents codes soutiennent le règlement intérieur de l'AMP.

    ? Indic. G6 : Disponibilité et affectation des ressources administratives de l'AMP

    Dans la pratique les AMPs sont toujours sous la tutelle de la DPN. Cinq personnes sont engagées par l'Etat pour la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth : un conservateur de l'AMP, un adjoint au conservateur et un comptable - tous trois agents de la DPN - ainsi qu'un chauffeur et un garde. Pour l'instant, les compétences en termes de gestion des AMPs au Sénégal ne sont pas claires. Un transfert de compétence du ministère de l'environnement au ministère de la pêche vient d'être décidé. En attendant que la situation s'éclaircisse, depuis février 2006, les agents de la DPN se relayent à l'AMP pour s'occuper des affaires courantes.

    Les agents de la DPN reçoivent un budget de fonctionnement. Le budget est réparti en catégories (fourniture de bureau, carburant, entretien du matériel informatique, eau, électricité, téléphone, etc.). Lorsque le budget d'une catégorie est épuisé, il leur faut trouver l'argent ailleurs. Les agents de la DPN estiment que ce budget n'est "vraiment pas suffisant".

    "Quand le budget d'une catégorie est vide, on demande au WWF" (Adjudant Al Hassane Seck Mané, comptable)

    Jusqu'en 2008, les agents de la DPN en service à l'AMP de Joal-Fadiouth ne disposaient pas de locaux. Le service occupait, sous autorisation du préfet de Mbour, un bâtiment loué par l'Etat pour une coopération Coréenne pendant 8 mois. Ensuite, à partir de juin 2007, les agents de la DPN ont occupés ces locaux sans autorisation et ce n'est qu'en mars 2008 que l'Etat a permis effectivement son occupation.

    Un inventaire du matériel est disponible dans le rapport annuel d'activité 2008 de la

    DPN.

    66

    Le comité de gestion est uniquement financé par le WWF. Le secrétaire général reçoit 5000 F CFA (7,5 €) pour organiser les réunions; c'est-à-dire pour téléphoner aux membres du comité de gestion.

    Le WWF subventionne également l'activité de surveillance en mer. Un budget est délivré pour l'achat du carburant et un moteur de 40 cv est mis à la disposition du comité de surveillance. Chaque membre participant à la surveillance reçoit également 1000 F CFA (1,5 €) et une collation par sortie.

    Les autres commissions n'ont aucun budget régulièrement mis à leur disposition. Cependant, lorsqu'elles souhaitent développer une activité particulière, une requête peut être effectuée auprès du WWF qui tentera d'apporter une solution.

    ? Indic. G7 : Existence et utilisation d'études et de contributions scientifiques

    Un état de référence a été effectué par des membres du Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye (CRODT) en novembre 2006. Ils ont effectué une pêche expérimentale à la senne de plage de 12 mm de maillage dans différentes zones de l'AMP. Les espèces capturées ont été répertoriées ainsi que le poids total pour chaque espèce par station. La taille de certaines espèces a également été relevée. Ces données ont contribué à l'élaboration du zonage de l'AMP. Une nouvelle évaluation de ce type a été menée en avril 2009. Ces études pourront permettre de réaliser un suivi des ressources halieutiques et d'observer leur évolution dans le temps.

    Une étude globale de tout l'environnement de Joal-Fadiouth a également été menée par le Laboratoire d'Etude et de Recherche en sciences Géomantiques (LERG). Celle-ci avait pour objectif d'étudier les activités pratiquées à Joal-Fadiouth, les pratiques anciennes, leur évolution, etc.

    Ces deux études seraient les seules qui aient été menées sur l'AMP de Joal-Fadiouth.

    67

    ? Indic. G8 : Existence et niveau d'activité des organismes communautaires

    Dans notre cas, le comité de gestion est principalement composé de représentants d'organismes communautaires. Par le biais de leurs représentants, les organismes communautaires sont donc les principaux décideurs et gestionnaires de l'AMP.

    La question qu'il me semble alors intéressant de se poser est celle de la représentativité des organismes communautaires : toutes les parties prenantes sont-elles représentées par un organisme communautaire lui-même représenté dans le comité de gestion ? Cet indicateur se rapprocherait alors de l'indicateur socio-économique S15 "pourcentage de groupe de parties prenantes occupant des positions de leadership" du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) qui mesure le nombre d'acteurs originaires de groupes de parties prenantes qui sont représentés dans la gestion de l'AMP.

    L'équipe de démarrage était chargée d'identifier les parties prenantes directes et indirectes et de les organiser en un organe de gestion. De plus, comme le signale l'article 17 de l'arrêté portant création du comité de gestion, il est toujours possible par la suite d'intégrer une partie prenante omise ou qui viendrait d'être créée.

    En ce qui concerne les représentants de chaque organisme communautaire, chacun a été choisi par les membres de l'association dont il fait partie.

    Proposition d'indicateur :

    Finalement, on pourrait imaginer un indicateur du type "Existence et représentativité des organismes communautaires"

    ? Indic. G9 : Degré d'interaction entre les gestionnaires et les parties prenantes

    Les réunions du comité de gestion ont lieu tous les mois et les réunions du bureau deux fois par mois. Sauf en cas d'empêchement, tous les membres assistent aux réunions.

    La liberté d'expression semble être assurée aux réunions et les décisions sont prises en commun accord :

    "S'il y a une décision à prendre, le bureau informe tout le monde et chacun dit ce qu'il pense. Si il y a des points sur lesquels on n'est pas tous d'accord, on laisse de côté puis on y revient et on discute jusqu'à être tous d'accord" (El Hadji Faye, secrétaire général de l'AMP, éco-guide)

    68

    "C'est très libre, tout le monde ose donner son avis" (Mamadou lamine Dioh, président de la commission recherche et partenariat, éco-guide)

    ? Indic. G10 : Proportion des parties prenantes formées à l'utilisation durable

    ? Indic. G11 : Niveau de formation assuré aux parties prenantes en matière de participation

    Ces deux indicateurs concernent les formations qui sont assurées aux parties prenantes. Il semblerait que certaines formations ne rentrent pas nécessairement dans une de ces deux catégories, par exemple, les formations assurées aux éco-guides. Je vais donc former un indicateur unique qui reprend toutes les formations assurées aux parties prenantes.

    Jusqu'à présent, le conservateur de l'AMP et les membres du comité de gestion, en partenariat avec les ONGs, ont reçu un certain nombre de formations dans la but de comprendre les mécanismes de fonctionnement et de gestion durable des ressources naturelles. Il s'agit toujours de formations qualifiantes de courte durée.

    Tous les membres du comité de gestion ont eu l'occasion de suivre :

    - Un séminaire sur la communication sociale ;

    - Une formation de 4 jours sur la cogestion en 2007 ;

    - Une visite d'échange de 3 jours à Bamboung ; - Un séminaire sur le suivi des tortues marines.

    Tous semblent satisfaits des formations qu'ils ont reçues.

    "On a beaucoup appris. Le plus intéressant c'était la visite d'échange f...] ça nous a donné des idées, on a appris sur la pratique, le concret" (Mamadou lamine Dioh, président de la commission recherche et partenariat, éco-guide)

    Le président du comité de gestion ainsi que le conservateur de l'AMP ont également suivi les formations suivantes :

    - Une formation sur les AMPs de 21 jours en 2005 ;

    - Une formation sur la décentralisation en 2006 ;

    - Une formation supplémentaire plus importante (22 jours) sur la cogestion, suivie

    également par la trésorière du comité de gestion ;

    - Une formation sur les zones humides en 2008.

    69

    Le président du comité de gestion est tenu, à son retour de formation, de faire une restitution de ce qu'il a appris. Il ramène également des informations sous forme de livre ou de cd.

    « Nous avons profité pleinement de leur formation » (Ibrahima Samb, responsable de la commission de surveillance de l'AMP, représentant de l'association des jeunes pêcheurs)

    Les éco-guides ont également reçu une formation d'un mois organisée par l'UICN.

    Notons que cette liste n'est probablement pas exhaustive, elle est basée uniquement sur les informations reçues lors des entretiens.

    Le plan de gestion prévoit des activités de renforcement des capacités qui sont :

    - Former les acteurs en cogestion des ressources marines et côtières et des AMPs ;

    - Organiser des visites d'échanges pour le partage d'expériences ;

    - Organiser des sessions de formation pour les éco-guides et autres volontaires ;

    - Former les membres du comité de gestion et des agents techniques à la

    surveillance ;

    - Organiser des sessions de formation en éducation environnementale pour les

    formateurs et enseignants.

    On remarque que les trois premières activités prévues par le plan de gestion ont déjà été réalisées.

    Cependant, beaucoup de participants à ces formations, même s'ils en sont satisfaits, pensent qu'elles sont insuffisantes et sont demandeurs de formations supplémentaires.

    "Ce n'est pas suffisant, on aimerait plus de formation, on a demandé au WWF, surtout par rapport à la surveillance" (Léopold Diouf, vis président du comité de gestion, membre du GIE interprofessionnel de pêche)

    "Ce n'est jamais parfait, ca doit être continu" (El Hadji Faye, secrétaire général du comité de gestion)

    Il est très positif de voir que les membres du comité de gestion sont demandeurs de formations; cela signifie qu'ils sont conscients de leurs limites et souhaitent renforcer leurs capacités.

    70

    Proposition d'indicateur

    Au vu de ces informations, il me semblerait opportun de créer un indicateur général "Formations assurées aux parties prenantes" qui regrouperait des indicateurs concernant la réalisation des formations prévues dans le plan de gestion et la satisfaction associée à ces formations :

    - Formation des acteurs en cogestion des ressources marines et côtières et des

    AMPs

    - Visites d'échanges pour le partage d'expériences

    - Sessions de formation pour les éco-guides et autres volontaires

    - Formation des membres du comité de gestion et des agents techniques à la

    surveillance

    - Sessions de formation en éducation environnementale pour les formateurs et

    enseignants

    - Autres formations

    - Niveau de satisfaction associé à ces formations

    - Demande en formations supplémentaires

    ? Indic. G12 : Niveau de participation des parties prenantes aux processus et activités de gestion et niveau de satisfaction associé

    L'AMP de Joal-Fadiouth étant régie selon le principe de la cogestion, la participation des parties prenantes a été très importante, depuis la conception de l'AMP, aussi bien au niveau de la prise de décision que des activités de gestion.

    Comme nous l'avons détaillé dans le chapitre III.2.4.2., tout le processus de mise en place de l'AMP a été participatif. L'implication des parties prenantes dans le processus de mise en place de l'AMP permet d'obtenir, dès le départ, le soutien des acteurs locaux et l'enracinement dans le contexte local.

    J'ai obtenu des informations plus précises quant à la satisfaction des parties prenantes concernant leur participation à l'élaboration des règles et réglementation et leur satisfaction quant au règlement en lui-même. La majorité semble satisfaite de sa participation au processus d'élaboration des règles et réglementations.

    "Tout le monde a dit sa pensée sur tous les articles" (El Hadji Faye, Secrétaire général du comité de gestion)

    71

    Mais tous n'ont pas l'impression d'avoir été entendu.

    "Je pense que je n'ai pas été écouté" (Pierre Dioh, membre du comité de gestion, 2ème adjoint au maire)

    Certains pensent également que quelques règles ne sont finalement pas adaptées et devraient être modifiées. Certaines règles ne seraient pas adéquates et trop contraignantes à appliquer. Par exemple, il est absolument interdit de couper la mangrove. Or les habitants de la commune ont toujours besoin d'un minimum de bois. Les habitants de Fadiouth qui connaissent la mangrove savent maintenir un équilibre. Par exemple, ils ne coupent pas pendant l'hivernage car ils savent qu'il s'agit de la période de croissance la plus importante. Il devrait donc être possible de maintenir un prélèvement rationnel et de conserver un équilibre entre régénération et prélèvement.

    Deux habitants originaires de Fadiouth, ont eu le même type de réflexion à propos de la viande de tortue.

    "On aime trop la viande de tortue, ça nous manque, on devrait nous permettre d'en prélever une partie à un certain moment" (jeune femme originaire de Fadiouth)

    "Il faut protéger mais encore en manger" (jeune homme, Fadiouth)

    Les parties prenantes sont également investies dans la gestion quotidienne. Les commissions de surveillance et de communication sont particulièrement actives dans ces domaines. Toutes les activités de communication ont été menées en collaboration entre la DPN et le comité de gestion, avec le soutien du WWF. En ce qui concerne l'activité de surveillance, l'indicateur suivant (G13) y fait directement référence.

    Le degré d'interaction entre gestionnaires et parties prenantes ainsi que la participation des parties prenantes aux prises de décision ont été discuté à l'indicateur G9.

    Proposition d'indicateur

    Cet indicateur est très large ; la participation des parties prenantes peut se situer à différents niveaux et à différents moments. Pour plus de clarté, il serait donc judicieux de subdiviser cet indicateur et afin d'avoir une vue d'ensemble sur l'implication des parties prenantes, il serait intéressant d'y inclure les indicateurs G8, G9 et G13

    72

    Ce qui nous amènerait à ce type de structure :

    Participation des parties prenantes

    - Existence et représentativité des organismes communautaires

    - Participation des parties prenantes aux activités de conception et de mise en place de l'AMP et niveau de satisfaction associé

    - Participation des parties prenantes aux activités quotidiennes de gestion (dont les activités de surveillance et de suivi)

    - Degré d'interaction entre gestionnaires et parties prenantes

    - Implication des parties prenantes dans les décisions de gestion et niveau de satisfaction associée

    ? Indic. G13 : Niveau d'implication des parties prenantes dans la surveillance, le suivi et l'application

    Les parties prenantes sont très impliquées dans la surveillance de l'AMP. La commission de surveillance est chargée de mener cette activité. Tous les membres du comité de gestion sont susceptibles d'y participer. Des membres de l'association des jeunes pêcheurs prennent régulièrement part à cette activité. L'équipe de surveillance doit bien sûr toujours être accompagnée par un agent assermenté (soit les agents de la DPN, soit des agents du service des pêches).

    Pour le moment, en réalité, ils ne sont que quelques-uns à réellement s'investir dans cette activité (quelques membres de la commission de surveillance et des jeunes pêcheurs).

    Il existe aussi une surveillance plus informelle. Par exemple, El Hadji Faye (secrétaire générale du comité de gestion, éco-guide) va parfois marcher la nuit sur la plage. S'il surprend un pêcheur, il appelle le président du comité de gestion.

    Cet indicateur est maintenant repris ci-dessus, il fait partie de l'indicateur général G12 "participation des parties prenantes".

    73

    ? Indic. G14 : Procédures d'application de la réglementation clairement définies

    L'article 20 du règlement intérieur de l'AMP stipule que "Les infractions au présent règlement intérieur seront poursuivies et réprimées conformément aux textes de Loi et règlement en vigueur (Code de la pêche, Code de la chasse et de la protection de la Nature, Code de l'Environnement, le Code Forestier et le Code des contraventions)." Ce sont donc ces codes qui déterminent la manière d'agir face aux infractions et le montant des amendes. Il n'y a pas de procédures spécifiques à l'AMP.

    Néanmoins, des procédures adaptées à l'AMP sont d'usage. Ibrahima Samb, le président de la commission de surveillance, m'a expliqué la procédure à suivre lorsqu'une pirogue est aperçue dans l'AMP :

    - Lorsqu'on voit une pirogue on se dirige vers celle-ci ;

    - Si on constate une infraction (pêche dans l'AMP) :

    - On demande au capitaine de diriger l'embarcation vers la plage,

    - On prend le nom de la pirogue, le numéro, la couleur et la longueur,

    - On verbalise une fois à terre. Si c'est la première fois que la pirogue est arrêtée, on sensibilise et on le libère. Par contre, si il s'agit d'un cas de récidive, on dresse une amende de 10 000 à 50 000 F CFA (15 à 75 €) - variable en fonction de la bonne volonté des personnes interpellées - et on confisque le poisson ainsi que le filet et le moteur pour une semaine.

    Les amendes et transactions sont versées au trésor public (70%) et les ristournes distribuées aux membres ayant participés à la surveillance (30%).

    Notons qu'il est indispensable que les usagers qui enfreignent les règles encourent des sanctions. La gravité et le contexte de la faute doivent influencer l'importance de la sanction. Ainsi, les récidivistes doivent être plus sévèrement punis. En d'autres termes, les sanctions doivent être différenciées et graduelles. Ce principe est un des principes généraux qui est respecté dans tous les systèmes auto-organisés durables (Ostrom, 1992).

    74

    ? Indic. G15 : Etendue des activités d'application de la réglementation

    Les patrouilles de surveillance ne sont pas régulières. Au début, il y avait pratiquement une patrouille par jour. Maintenant, une à deux patrouilles sont effectuées par semaine. Cependant, durant certaines périodes, davantage de patrouilles seraient nécessaires mais les ressources humaines et matérielles sont insuffisantes.

    "Avant l'hivernage, l'idéal serait d'aller en surveillance tous les jours et toutes les nuits mais l'équipe et le matériel sont trop faibles pour cela." (Ibrahima Samb, responsable de la commission de Surveillance de l'AMP, représentant de l'association des jeunes pêcheurs)

    La durée des patrouilles est variable également, de 2h30 à 7h parfois. Le circuit est variable mais les patrouilleurs ont tendance à privilégier la partie sud qui est plus sollicitée par les pêcheurs.

    Les agents de la DPN relèvent le nombre d'infractions observées lors de chaque patrouille de surveillance. Celles-ci sont disponibles dans les rapports annuels d'activité de la DPN.

    Fig.12 : graphique du nombre de pirogues appréhendées en fonction de temps

    Les données concernant le nombre de pirogues appréhendées en train de pêcher dans la zone interdite sont représentées à la figure 12. On observe que le nombre de pirogues appréhendées se situe généralement entre 0 et 5 par sortie excepté le 2 septembre où il a été étonnamment très élevé (23 pirogues appréhendées). Ce graphique ne nous apporte pas d'informations quant à l'efficacité de la gestion de l'AMP. Tout d'abord parce que les données n'existent, jusqu'à présent, que pour l'année 2008. Or, on peut difficilement comparer des mois différents entre eux puisque l'activité de pêche en elle-même peut varier fortement d'un mois à l'autre (espèces différentes, pêcheurs saisonniers, etc.). Ensuite, pour que les nombres de pirogues appréhendées par sortie soit comparables, il faudrait que les sorties soient de durée comparable ou connaitre la durée des sorties et rapporter le nombre de pirogues appréhendées

    75

    par heure. Enfin, il serait intéressant de connaitre l'origine des pirogues appréhendées (pirogues de pêcheurs locaux ou étrangers) puisqu'il semblerait, d'après les membres de l'équipe de surveillance, que les infractions par les pêcheurs locaux sont de moins en moins fréquentes. Les problèmes viendraint surtout des étrangers qui ne connaissent pas nécessairement l'AMP ou ne la respectent pas. En fait, le nombre de pirogues locales appréhendées nous fournit une information sur la conformité des parties prenantes - les pêcheurs respectent-ils l'AMP? - ce qui est un indicateur d'efficacité de la gestion (efficacité de la sensibilisation et de la surveillance). Par contre, le nombre de pirogues étrangères appréhendées nous renseigne davantage sur les pressions que subissent les ressources.

    Proposition d'indicateur

    Cet indicateur regroupe en réalité trois indicateurs, qui fournissent des informations différentes; l'étendue des activités de contrôle, la conformité des parties prenantes et la pression sur les ressources halieutiques, ce dernier n'étant pas un indicateur de gouvernance.

    Par ailleurs, nous pourrions regrouper cet indicateur avec le précédant sous un indicateur plus général nommé "activités de contrôle et résultats" qui reprendrait les indicateurs suivants :

    - Étendue des activités de surveillance

    - Procédures d'application de la réglementation clairement définies

    - Sanctions différenciées et graduelles

    - Évolution du nombre d'infraction par les pirogues locales

    ? Indic. G16 : Degré de diffusion des informations visant à encourager la conformité des parties prenantes

    L'évaluation des informations qui ont été données aux parties prenantes sur les règles et réglementations fait partie de l'indicateur G4. D'autres activités de communication et de sensibilisation ont été organisées par les membres du comité de gestion et la DPN, avec le soutien du WWF, tel que :

    - des émissions à la radio locale « la côtière » tous les mardis ;

    - des Olympiades environnementales dans 11 écoles de la commune ;

    - des réunions avec les délégués de quartier ;

    - la diffusion de supports comme des T-shirts et des banderoles ;

    - la mise en place de panneaux de signalisation et d'interprétation ;

    76

    - des rencontres au quai de pêche ;

    - le tour des places publiques pour rencontrer les notables.

    La communication a été une activité phare ces premières années car il est indispensable de commencer par informer et sensibiliser la communauté afin qu'elle comprenne la raison d'être de l'AMP et l'importance de la respecter.

    La population a été interrogée sur la connaissance de ces supports d'informations (panneaux d'informations, émissions radios et T-shirt), leur clarté, l'information apportée, etc. ainsi que sur leur éventuelle participation à des réunions ou activités en lien avec l'AMP. Les résultats bruts sont présentés en annexe VI.

    Aucune des 11 personnes interrogées n'a participé à des séances d'informations ou des réunions sur l'AMP. Par contre, certains ont exprimé leur souhait d'y assister.

    "Il faudrait faire des réunions de quartier pour les jeunes, c'est toujours pour les femmes les réunions" (jeune homme, Fadiouth)

    La majorité des individus interrogés connaissent les panneaux d'informations. Tous les trouvent clairs et intéressants même si beaucoup ne peuvent pas se souvenir de ce qui y était indiqué. Quant à la manière de les améliorer, 3 personnes trouvent qu'il n'en faudrait pas plus et 3 pensent qu'on pourrait en mettre plus.

    Les 11 individus interrogés connaissent tous les émissions radios. Certains ne l'écoutent que d'une oreille mais la majorité se souvient de sujets qui y ont été abordés. A nouveau, presque tous les trouvent claires et intéressantes.

    Les T-shirts sont également connus de tous, 3 personnes sur les 11 m'ont dit en prosséder un.

    Enfin, tous ceux qui ont répondu à la question "souhaiteriez-vous recevoir plus d'informations" ont répondu par l'affirmative. Ils citent surtout les réunions comme moyen de diffuser l'information.

    Une autre série de questions a été posée aux individus de la communauté concernant leurs connaissances de l'AMP. Ces informations pourraient également servir à l'évaluation de cet indicateur. Cependant, elles seront présentées en tant qu'indicateur social.

    En bref, les individus interrogés ont connaissance des supports d'informations mis à leur disposition mais ne prêtent pas toujours attention à leur contenu. Il semble que la radio et les réunions soient les meilleurs supports pour informer la population. Cela parait logique

    77

    quant on sait que 40% de la population de Joal-Fadiouth n'a reçu aucune instruction et ne sait, par conséquent, pas lire les panneaux d'information, les T-shirts ou les banderoles. Les émissions radios et les réunions, en wolof, peuvent par contre être entendues et comprises par toute la population.

    L'impact de la communication pourrait être évalué à travers les pratiques des individus. Si la communication a été efficace, les individus devraient adopter des pratiques plus respectueuses de l'environnement. Par exemple, nous pouvons évaluer les impacts des campagnes pour la protection de la tortue marine menée par l'UICN et le FIBA entre 2000 et 2002 et par le WWF en 2006, par l'analyse de données concernant la pêche et le commerce illégal de tortue marine. Des données de ce type sont disponibles dans le plan de gestion (Sène, 2008)

    Période

    Débarquement moyen quotidien des unités de pêche

    Prix de la tortue au débarquement

    Prix du kg de la chair de tortue

    Nombre de

    revendeurs

    Années 60

    Faible

    Très faible

    Très faible

    Quasi-inexistant

    Années 70

    Assez faible

    250 à 1000

    25 à 50

    Une dizaine

    Années 80

    5 à 20

    500 à 1500

    75 à 125

    Assez nombreux

    Années 90

    10 à 40

    3000 à 6000

    200 à 250

    40 à 50

    2000-2004

    5 à 20

    10000 à 15000

    300 à 400

    10

    2005-2006

    2 à 5

    10000 à 15000

    400 à 500

    5

    Fig.13 : évolution de l'importance de la capture de la tortue à Joal-Fadiouth (Sène, 2008)

    On remarque dans le tableau de la figure 13 que les débarquements de tortues marines et le nombre de revendeurs ont augmenté jusque dans les années 90. Ensuite, à partir des années 2000, simultanément à la première campagne pour la protection de la tortue marine, ces valeurs diminuent sérieusement. Il semble donc que cette campagne ait porté ses fruits. Un suivi dans le temps reste important afin de vérifier que ce commerce ne se reconstitue pas. Ce type d'indicateur pourrait également être considéré comme un indicateur social puisqu'il évalue des changements dans les comportements des individus.

    Proposition d'indicateur

    Nous pourrions regrouper toutes les informations qui concernent la communication et développer un indicateur appelé :

    78

    Importance et impact de la communication autour de l'AMP

    - Importance des activités de communication

    - Diffusion des informations dans la communauté

    - Résultats en termes de conformité ou de pratiques des membres de la communauté

    V.2.2. Indicateurs supplémentaires

    Quelques indicateurs supplémentaires, qui n'ont pas été placés parmi les indicateurs définis ci-dessus, paraissent également intéressants à prendre en compte pour compléter cette procédure d'évaluation.

    Tout d'abord, il s'agit d'un principe de durabilité exprimé par Ostrom (1997) qui est "limites clairement définies". En effet, les limites de l'AMP doivent être définies de manière claire et formelle et indiquées physiquement par des écriteaux et des balises sans quoi il est pratiquement impossible d'interdire l'accès à l'AMP. Les limites de l'AMP de Joal-Fadiouth sont définies dans son règlement intérieur et le balisage a été effectué le 30 janvier 2009. Il est considéré comme l'événement qui a rendu réellement l'AMP fonctionnelle.

    Nous avons évalué la participation des parties prenantes à la mise en place des règles et réglementations ainsi que la diffusion de celles-ci dans la communauté et les connaissances de la population à ce sujet. A propos des règles et réglementations, deux aspects me paraissent aussi importants à prendre en compte. Il s'agit de l'existence d'un règlement intérieur de l'AMP reconnu légalement - ce qui est indispensable pour que le règlement puisse être appliqué et les infractions sanctionnées - et l'existence de procédure de révision des règles et réglementation. En ce qui concerne ce dernier point, l'article 19 du règlement intérieur de l'AMP précise que "en cas de besoin, ce présent règlement peut être amendé par le comité de gestion et adapté au contexte de l'AMP." D'après plusieurs membres du comité de gestion, certains points du règlement devraient être révisés. Par exemple, une partie des amendes et transactions perçues lors des surveillances en mer pourraient revenir au comité de gestion, ce qui n'est pas prévu jusqu'à présent.

    79

    Nous avons vu lors de l'analyse par l'indicateur G6 que les membres du comité de gestion sont tous bénévoles et que les commissions ne reçoivent aucun budget de fonctionnement. Lorsqu'une commission a besoin de matériel ou d'argent pour une activité, elle se tourne vers le WWF. Sans le soutien du WWF, le comité de gestion n'aurait absolument rien. Or le WWF ne subventionnera pas indéfiniment l'AMP de Joal-Fadiouth. Il est donc indispensable que le comité de gestion tende vers une autonomie financière. Ainsi, il serait opportun de créer un indicateur pour évaluer le niveau d'autonomie financière. Pour l'instant, aucune activité ne procure de rentrées d'argent au comité de gestion de l'AMP. Le tourisme pourrait être une opportunité de financement pour l'AMP. L'ile de Fadiouth reçoit déjà jusqu'à 20 000 touristes par an. Cependant, la grande majorité arrive en masse en car, visite l'ile de Fadiouth en une demi journée et repart vers les plus grosses stations touristiques comme Saly. Finalement, les retombées économiques pour les habitants de la commune sont insignifiantes. Les faibles bénéficies de ce tourisme reviennent à la cinquantaine d'éco-guides, aux piroguiers et aux marchands artisanaux de Fadiouth. Pourtant, le potentiel touristique de Joal-Fadiouth est énorme. Tout d'abord, il y a l'avantage des plages, de la mer et de l'ensoleillement. On pourrait développer un tourisme lié à la nature et à l'AMP puisque la biodiversité à Joal-Fadiouth est extraordinaire ; on y trouve la mangrove, énormément d'oiseaux, des tortues, des dauphins, des baleines, des requins qui pourraient être découverts sur des circuits pédestres, en pirogue, à cheval, en charrette ou en plongée sous marines. Joal-Fadiouth révèle également un important patrimoine culturel, historique et archéologique (cimetière mixte de Diotio, greniers sur pilotis, village de naissance de Léopold Sedar Senghor, fêtes religieuses, danses folkloriques et nombreuses manifestations culturelles sérères, tournois de lutte traditionnelle). Le développement du tourisme à Joal-Fadiouth nécessitera un renforcement des capacités d'accueil et d'hébergement et des solutions concernant les problèmes d'insalubrité des plages ainsi que les coupures d'eau et d'électricité qui sont pour l'instant des freins au développement de ce secteur. D'ici 2012, un nouvel aéroport sera en service à 1h de Joal-Fadiouth, une opportunité de plus à saisir. Notons, qu'outre le tourisme, d'autres activités plus ciblées pourraient financer le comité de gestion. D'après Mamadou Lamine Dioh (membre du comité de gestion de l'AMP, éco-guide), un excellent moyen de créer un revenu, tout en sensibilisant, serait d'organiser des tournois de lutte car il s'agit du sport favori des pêcheurs.

    (c) Balland M. (c) Balland M.

    (c) Balland M.

    80

    Fig.14 : quelques sites visités par les touristes à Joal-Fadiouth.

    En haut à gauche : greniers à mil, bolongs et mangrove

    En haut à droite : place de Fadiouth avec ses vendeurs d'artisanats

    En bas à gauche : cimetière mixte de Diotio

    En bas à droite : tortue verte observée sur les plages de Joal-Fadiouth (Sène, 2008)

    Dans un autre domaine, lors de la création d'une AMP, il arrive fréquemment que certains utilisateurs ne puissent plus exercer leur activité. Dans le cas de l'AMP de Joal-Fadiouth, les pêcheurs de crevettes au Kili et les pêcheurs à la senne de plage sont les plus défavorisés car il leur est maintenant interdit de pratiquer leur activité19. Si ces utilisateurs n'ont pas la possibilité d'exercer une autre activité, ils se sentiront lésés et n'auront peut être pas d'autre choix que de frauder pour subvenir à leurs besoins. Pour éviter ce type de situation, il est important de prévoir dès le départ avec ces utilisateurs des plans de reconversion. A Joal-Fadiouth, les pêcheurs de Kili ont monté un projet de reconversion qui consiste en la transformation des produits de la mer par des fours. Ils ont reçu du WWF un financement de 3 millions de francs CFA (4580 €). Les senneurs de plage vont également être

    19 Ces deux types de pêche se pratiquent uniquement à partir de la plage, le long de la côte. Cette zone fait maintenant partie de l'AMP et ces types d'activités y sont prohibés.

    financés par le WWF à hauteur de 6 millions de francs CFA (9160 €) dans le but de créer un fonds de crédit révolving qui leur permettra de se lancer dans de nouvelles activités génératrices de revenus.

    Le plan de gestion 2009-2013 de l'AMP de Joal-Fadiouth prévoit une série d'activités associées à chaque objectif spécifique. Nous pourrions donc évaluer le taux d'exécution des activités prévues dans le plan de gestion. Par exemple, voici la liste des activités qui sont associées aux objectifs biophysiques :

    OBJECTIFS A LONG TERME

    OBJECTIFS SPECIFIQUES DU PLAN

    Améliorer les connaissances sur la dynamique des espèces et des habitats

    Préserver les ressources marines et côtières de l'AMP

    Conservation des habitats et des espèces

    ACTIVITES

    Faire une situation de référence complète de l'AMP (inventaires des habitats et des espèces)

    Mettre sur pied un dispositif de suivis écologiques (inventaires et suivis), socio-économiques et de diffusion des données pour l'aide à la décision

    Développer des mécanismes de gouvernance locale des pêcheries

    Organiser et assurer la surveillance permanente de l'AMP

    Effectuer le balisage complet de l'AMP

    Mettre en place une signalisation (pancartage) de l'AMP

    Organiser des campagnes de reboisement et d'entretien de la mangrove

    Protéger et/ou restaurer les habitats et espèces clés de l'AMP (mangrove, zone d'alimentation et de ponte de la tortue...)

    Appuyer/renforcer les initiatives de repos biologique de la faune malacologique (arches et huîtres)

    Développer un programme de protection et de suivi des tortues marines

    81

    L'exécution des ces activités pourrait être mesurée sur une échelle du type :

    0 = activité pas encore démarrée

    1 = activité en phase de démarrage

    2 = activité partiellement accomplie

    3 = activité accomplie mais des lacunes persistent

    4 = activité pleinement accomplie

    82

    Ainsi, à partir des informations que j'ai obtenues, j'ai évalué le taux d'exécution de ces activités de la manière suivante :

    ACTIVITES

    TAUX

    D'EXECUTION

    Faire une situation de référence complète de l'AMP (inventaires des habitats et des espèces)

    2/4

    Mettre sur pied un dispositif de suivis écologiques (inventaires et suivis), socio- économiques et de diffusion des données pour l'aide à la décision

    0/4

    Développer des mécanismes de gouvernance locale des pêcheries

    2/4

    Organiser et assurer la surveillance permanente de l'AMP

    2/4

    Effectuer le balisage complet de l'AMP

    3/4

    Mettre en place une signalisation (pancartage) de l'AMP

    4/4

    Organiser des campagnes de reboisement et d'entretien de la mangrove

    4/4

    Appuyer/renforcer les initiatives de repos biologique de la faune malacologique (arches et huîtres)

    4/4

    Développer un programme de protection et de suivi des tortues marines

    4/4

    Une évaluation détaillée justifiant les taux d'exécution assignés à chaque activité est disponible en annexe IV.

    Si nous additionnons les taux d'exécution obtenus pour chaque activité, nous obtenons un total de 25/36, donc un taux d'exécution de 70%. Les activités liées aux objectifs biophysiques prévues dans le plan de gestion ont été accomplies à 70% alors que le plan de gestion lui-même n'a pas encore été adopté. On constate, avec beaucoup de satisfaction, que le comité de gestion, la DPN et le WWF n'attendent pas un plan de gestion formel pour agir ensemble pour la conservation des habitats et des espèces.

    Enfin, il serait propice de terminer par un indicateur évaluant l'existence de procédure d'évaluation et de suivi. A ce jour, la majorité des AMPs ne disposent pas de procédure d'évaluation de leur gestion car, comme nous l'avons vu dans l'introduction, ce procédé est assez nouveau. Néanmoins, même si aucune procédure générale d'évaluation n'existe à l'AMP de Joal-Fadiouth, un suivi de certains paramètres (paramètres physicochimiques de l'eau, effectif piroguier et tonnage débarqué) et de certaines ressources (ressources halieutiques, oiseaux d'eau, tortues marines et mangrove) est déjà initié - ce qui me permettra d'adapter à ces données des indicateurs biophysiques au point V.4.

    83

    V.2.3. Synthèse des indicateurs de gouvernance

    Du travail d'analyse des données et d'adaptation des indicateurs réalisé ci-dessus, il ressort 23 indicateurs de gouvernance. Parmi ceux-ci, certains sont déjà subdivisés en "sous-indicateurs". Afin de rendre cette importante série d'indicateurs plus claire, je vais poursuivre le classement à deux niveaux ; c'est-à-dire regrouper certains indicateurs sous des indicateurs plus généraux. Je vais également essayer de les classer dans un ordre relativement logique.

    Voici finalement une série d'indicateurs de gouvernance qui devrait permettre une évaluation approfondie de la gouvernance de l'AMP de Joal-Fadiouth :

    Ind. Gouv. 1. Participation des parties prenantes

    1.1 Existence et représentativité des organismes communautaires

    1.2 Participation des parties prenantes aux activités de conception et de

    mise en place de l'AMP et niveau de satisfaction associé

    1.3 Participation des parties prenantes aux activités quotidiennes de gestion
    (dont les activités de surveillance et de suivi)

    1.4 Degré d'interaction entre gestionnaires et parties prenantes

    1.5 Implication des parties prenantes dans les décisions de gestion et niveau

    de satisfaction associé

    Ind. Gouv. 2. Cadre légal, documents officiels

    2.1 Existence d'un organisme de décision et de gestion reconnu légalement

    2.2 Existence d'un règlement intérieur de l'AMP reconnu légalement

    2.3 Existence et adéquation de la législation habilitante

    2.4 Existence et adoption d'un plan de gestion

    2.5 Limites clairement définies

    Ind. Gouv. 3. Existence de procédure de révision des règles et réglementation

    Ind. Gouv. 4. Diffusion, connaissance et compréhension locale des règles et

    réglementations de l'AMP

    4.1 Diffusion des règles et réglementations dans la communauté

    4.2 Connaissance et compréhension locales des règles et règlementations de

    l'AMP

    Ind. Gouv. 5. Importance et impact de la communication autour de l'AMP

    5.1 Importance des activités de communication

    84

    5.2 Diffusion des informations dans la communauté

    5.3 Résultats en termes de conformité ou de pratiques des membres de la

    communauté

    Ind. Gouv. 6. Activités de contrôle

    6.1 Étendues des activités de surveillance

    6.2 Procédures d'application de la réglementation clairement définies

    6.3 Sanctions différenciées et graduelles

    6.4 Évolution du nombre d'infraction par les pirogues locales

    Ind. Gouv. 7. Formations assurées aux parties prenantes.

    7.1 Formation des acteurs en cogestion des ressources marines et côtières et

    des AMPs

    7.2 Visites d'échanges pour le partage d'expériences

    7.3 Sessions de formation pour les éco-guides et autres volontaires

    7.4 Formation des membres du comité de gestion et des agents techniques à

    la surveillance

    7.5 Sessions de formation en éducation environnementale pour les
    formateurs et enseignants

    7.6 Autres formations

    7.7 Niveau de satisfaction associé à ces formations

    7.8 Demande en formations supplémentaires

    Ind. Gouv. 8. Conflits liés à l'AMP

    8.1 Niveau des conflits

    8.2 Nature des conflits

    8.3 Existence de mécanismes de résolution des conflits

    Ind. Gouv. 9. Mise en place de plans de reconversion

    Ind. Gouv. 10. Disponibilité et affectation des ressources administratives de l'AMP

    Ind. Gouv. 11. Niveau d'autonomie financière

    Ind. Gouv. 12. Existence et utilisation d'études et de contributions scientifiques

    Ind. Gouv. 13. Taux d'exécution des activités prévues dans le plan de gestion

    Ind. Gouv. 14. Existence de procédures d'évaluation et de suivi

    V.2.4. Niveau de l'évaluation

    85

    Nous avons vu dans l'introduction (section I.5.5.) que les indicateurs de gouvernance peuvent être des indicateurs de planification, d'intrants, de processus ou d'extrants. La grande majorité20 des indicateurs décrits ci-dessus sont des indicateurs de processus - qui évaluent les pratiques de gestion.

    Les indicateurs regroupés sous l'indicateur général Ind. Gouv. 1. qui évaluent la participation des parties prenantes peuvent également être considérés comme des indicateurs de processus. Cependant, les indicateurs 1.1 et 1.2 évaluent plutôt la manière dont s'est mise en place l'institution de gestion et non l'efficacité de la gestion en elle-même. En ce sens, ils sortent un peu du cadre d'évaluation de l'UICN qui évalue exclusivement la gestion. La participation des parties prenantes représente l'appréciation d'une condition à la gestion participative.

    L'indicateur Ind. Gouv. 10. qui évalue les ressources administratives de l'AMP est un indicateur d'intrant.

    Les indicateurs qui font partie de l'indicateur général Ind. Gouv. 2. "cadre légal, document officiel" sont des indicateurs d'extrants de la phase de mise en place de l'AMP et de l'institution de gestion - à l'exception du 2.3 qui est plutôt un indicateur de contexte-planification.

    Enfin, l'indicateur Ind. Gouv. 13. est clairement un indicateur d'extrants.

    20 C'est le cas des indicateurs Ind. Gouv.3., Ind. Gouv.4., Ind. Gouv.5., Ind. Gouv.6., Ind. Gouv.7., Ind. Gouv.8., Ind. Gouv.9., Ind. Gouv.11., Ind. Gouv.12. et Ind. Gouv.14.

    86

    V.3. Evaluation des perceptions et des connaissances de la communauté

    Etant donné le peu de temps dont je disposais sur le terrain, j'ai réduit de manière drastique l'évaluation socio-économique. A travers mon questionnaire, j'ai choisi de ne cibler que l'aspect perception et connaissance de la communauté concernant l'AMP.

    Le temps qui m'était imparti et les conditions de terrain ne m'ont pas permis d'interroger un échantillon de personnes suffisant pour prétendre à des résultats représentatifs de toute la communauté (11 habitants ont été interrogés). Cependant, ces résultats permettent d'avoir un premier aperçu de différents opinions d'habitants de la commune, ce qui devrait nous aider à évaluer la pertinence du questionnaire.

    J'ai surtout interrogé des personnes en français. Cependant, certains habitants ne parlent pas ou peu le français. Avec l'aide d'un habitant qui a joué le rôle d'interprète, j'ai pu interroger une personne en wolof.

    Dans cette section, nous allons donc analyser les réponses aux différentes questions et apprécier la pertinence du questionnaire pour une évaluation selon les 4 indicateurs socio-économiques. Le questionnaire est disponible en annexe V et les données brutes se trouvent en annexe VI.

    V.3.1. Analyse des résultats

    ? Profils des personnes interrogées

    6 hommes et 5 femmes ont été interrogés à Joal-Fadiouth. La plupart sont nés dans cette commune (7 personnes sur 11) ou y résident au moins depuis 7 ans. Etant donné que pratiquement neuf dixièmes des habitants habitent la localité de Joal, j'ai en grande majorité interrogé des habitants de Joal ; sur 11 personnes interrogées, 9 vivent à Joal et 2 à Fadiouth. Les lieux de rencontre ainsi que les activités des personnes rencontrées sont assez diversifiés (voir annexe VI).

    87

    ? Ind. Socio-éco. 1. Perception de l'environnement et de la nécessité de le protéger

    Pour presque toutes les personnes interrogées il est très important de protéger l'environnement à Joal-Fadiouth.

    Le principal problème environnemental à Joal-Fadiouth est, d'après la majorité des répondants, le problème des déchets (cité par 6 individus sur les 11). Les termes suivants sont employés pour parler du problème d'ordure : "envahissement par les déchets", "il n'y a pas de poubelles", "la plage est sale", "la mer est comme une poubelle". Il est vrai que les ordures sont omniprésentes dans le paysage de la commune. Le problème le plus visible serait donc le plus important ou du moins le premier auquel pensent de nombreuses personnes. La mer et les mangroves sont vaguement évoquées par deux personnes mais sans précision. Je suis surprise de constater qu'aucun habitant n'a évoqué le problème de la surpêche.

    En ce qui concerne la question sur l'importance des mangroves et de la mer, absolument tous les répondants ont répondu qu'il est très important de protéger la mer et les mangroves. Diverses raisons ont été invoquées, souvent en lien avec "les poissons". Nous pouvons tenter d'associer chaque réponse à une valeur (cfr §II.3 indic. S6)

    Pourquoi est-ce important de protéger la mer et les mangroves?

    Valeur associée

    Parce qu'on y trouve des poissons, tortues, huitres. Si tu n'as pas les moyens tu peux te servir dedans

    Valeur d'usage direct

    Pour les poissons

    Valeur d'usage indirect (ou/et d'existence) ?

    Pour les poissons, parce qu'elle purifie l'air

    Valeur d'usage indirect (ou/et d'existence) ?

    Parce que nous en profitons

    Valeur d'usage direct

    On y plante les palétuviers

    ?

    La nature doit être protégée parce qu'on profite tous quand le poisson se reproduit

    Valeur d'usage indirect

    Parce que c'est un lieu de repos pour les poissons, faut les laisser en paix

    Valeur d'existence

    Parce que c'est notre principale richesse

    Valeur d'option ?

    Pour les tortues, les poissons

    Valeur d'usage indirect ou/et d'existence ?

    Parce que les huitres diminuent

    Valeur d'usage indirect (ou/et d'existence)?

    Les poissons se reproduisent dans la mangrove

    Valeur d'usage indirect ou/et d'existence?

     
     

    88

    On constate qu'il n'est pas aisé, sur base de ces courtes réponses, de situer la valeur sous jacente. Etant donné l'importance des ressources marines dans l'alimentation, je pense qu'il est évident que les valeurs d'usage direct et indirect prédominent. Cependant, il serait intéressant de pouvoir évaluer la valeur de non usage isolément. Des valeurs culturelles sont certainement associées à la mangrove. Des discussions plus approfondies sur le sujet pourraient certainement permettre de mieux cerner la perception qu'ont les individus de la mer et de la mangrove.

    Les questions 5 et 7 qui débutent par "Est-ce important de protéger..." paraissent trop "suggestives". Il en est de même pour les affirmations des indicateurs S2 et S6 du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) que l'on demande aux répondants d'approuver ou de désapprouver (§IV.3.). Il est commode en effet d'approuver une proposition du type " Nous devrions préserver la mer pour que nos enfants et leurs enfants aient du poisson. " ou d'affirmer que "oui, il est important de protéger l'environnement". Par contre, dans la pratique, beaucoup n'appliquent pas ces idées. Il faudrait plutôt évaluer les valeurs des individus par rapport à leurs actions. Par exemple, afin de savoir si les individus sont prêts à s'impliquer dans la protection de l'environnement, il suffirait de leur proposer de participer au nettoyage de la plage un tel jour. S'ils y participent, cela signifie qu'ils sont réellement prêts à s'impliquer.

    Enfin, concernant la dernière question pour cette partie (question 9), on peut constater que les personnes interrogées considèrent pour la plupart que les techniques de pêche destructives et le nombre de pêcheurs ont un impact très important sur la disponibilité des poissons dans la mer. A propos des conditions climatiques les avis divergent et pour ce qui est de la volonté de Dieu, une seule personne pense que c'est très important et l'une préfère ne pas se prononcer. Les répondants sont donc conscients de l'impact important que peuvent avoir les actions humaines sur la disponibilité des ressources halieutiques.

    89

    ? Ind. Socio-éco. 2. Degré de compréhension des conséquences de l'action de l'homme sur les ressources

    J'ai constaté, lors de l'analyse, que la question 10 "Quels sont les comportements, les activités qui ont eu un impact négatif sur l'environnement ces dernières années?" et la question 6 "Quels sont les principaux problèmes environnementaux à Joal-Fadiouth?" analysée ci-dessus sont finalement très similaires. Pourtant, comme nous allons le voir, les réponses sont tout à fait différentes.

    Il n'y a que l'augmentation de la population qui a été citée - par des personnes différentes - une fois en réponse à la question 6 et deux fois à la 10. Les autres réponses sont toutes différentes. Parmi les activités citées par les répondants pour la question 10, la pêche revient 4 fois alors qu'elle n'a pas été citée une seule fois comme problème environnemental à la question 6. De même, la coupe de bois est citée par 3 individus comme activité ayant eu un impact négatif sur l'environnement alors que le déboisement n'a pas été cité comme problème environnemental. Par contre, plus personne n'a évoqué le problème des déchets à la question 10. Ceci peut être simplement dû au fait qu'ils venaient d'en parler justement 2 questions auparavant.

    Si "le déboisement" et "la (sur)pêche" n'ont pas été répondu à la question 6, il est probable que soit dû à une différence d'interprétation ; les répondants ont peut être interprété la question autrement que comme nous l'envisagions. Le concept de "problèmes environnementaux" n'est peut être pas très clair. Il est possible d'interpréter la question 6 de la manière suivante : "Qu'est ce qui pose problème dans mon environnement, ce qui m'entoure T". Les déchets sont donc, ainsi, évidement, les premiers évoqués. Certaines réponses sont également un peu hors contexte tel que "protéger la mangrove" et "les tortues, les petites espèces" ce qui montre que finalement cette question n'est peut être pas assez clair. La question 10 parait plus claire : "qu'est ce que l'homme fait qui est mauvais pour l'environnement" ; il ne parait pas y avoir d'autres façons de l'interpréter. Pourtant 2 réponses sont également complètement hors sujet : "il y aurait besoin de renforcer la digue" et "il est difficile de trouver un terrain". Il ne faut pas oublier que le français n'est pas la langue maternelle des habitants de Joal-Fadiouth. Certains mots de vocabulaire peuvent donc ne pas être compris par tous, particulièrement des mots tels que "environnement".

    En bref, ceci nous montre que deux questions qui donnent l'impression de déclencher les mêmes réponses peuvent être interprétées très différemment l'une de l'autre par l'individu questionné. La manière de poser la question est donc extrêmement importante.

    90

    ? Ind. Socio-éco. 3 : Perception de la disponibilité des produits de la mer

    La majorité des répondants n'ont pas pu acheter des produits de la mer certains jours du mois précédent car ils étaient trop chers ou indisponibles. D'après 8 des 11 personnes interrogées, il y a moins de poissons pendant l'hivernage. Seule une personne pense qu'il y en a plus durant l'hivernage mais qu'ils se conservent moins car on ne sait pas les sécher.

    En ce qui concerne le prix du poisson, la majorité (8 individus sur les 11) trouve qu'il augmente, une personne le trouve stable et l'une répond simplement : "c'est toujours trop cher".

    Les répondants sont unanimes; les espèces de poissons que l'on trouve sur le marché varient. Presque tous trouvent qu'on ne voit plus certaines espèces ou que certaines deviennent rares.

    Ces changements seraient dus à la surexploitation ou raréfaction (4 personnes sur 11), à l'augmentation des pêcheurs et des besoins (2 personnes sur 11) ou à un trop grand nombre d'intermédiaires dans le marché (1 personnes sur 11).

    En bref, de manière globale, les personnes interrogées perçoivent une raréfaction de certaines espèces et une augmentation des prix.

    Lorsqu'un peu plus loin dans le questionnaire, on leur demande s'ils observent des changements depuis la mise en place de l'AMP, 4 disent remarquer un retour de certaines espèces de poissons et/ou une augmentation des quantités et 4 n'ont pas perçu de changement. Il est surprenant, à première vue, de constater que ceux qui disent observer le retour de certaines espèces et/ou une augmentation des quantités sont ceux qui disaient, précédemment, qu'il y a moins d'espèces qu'avant et/ou que le prix augmente.

    En réalité, la question des effets de l'AMP sur les ressources halieutiques semble jusqu'à présent très peu claire. Les pêcheurs que j'ai interrogés à ce sujet m'ont tous affirmé que des espèces de poissons rares étaient revenues et que les stocks augmentaient. Cependant, j'ai eu une discussion avec un Français qui vit à Joal depuis 7ans pour écrire des guides éco-touristiques sur la région. Celui-ci m'a dit avoir rencontré des pêcheurs d'un grand âge à qui il a également demandé s'ils percevaient des effets liés à l'AMP, mais ceux-ci disent ne pas percevoir d'effet. J'ai également discuté avec des agents du service des pêches du poste de contrôle de Joal-Fadiouth. D'après ces derniers, les espèces pêchées à Joal sont toujours les mêmes, ce sont les quantités qui varient : certaines espèces augmentent alors que d'autres continuent de diminuer. En fait, les agents m'ont expliqué que certaines espèces nobles qui

    91

    étaient devenue rares réapparaissent comme le thiof parce qu'il pond dans l'estuaire donc au niveau de l'AMP. Par contre les effets de l'AMP ne se font pas ressentir sur les espèces migratrices et qui sont menacées au niveau mondial.

    "C'est tout à fait le début mais les premiers effets de l'AMP se font sentir. f...] Par contre, on observe peu d'effet par exemple sur les sardinelles ou la Carpe blanche car ce sont des espèces en constant déplacement " (Iboumbodj Sanè, responsable du quai de pêche de Joal, chargé production)

    Ainsi, même si certaines espèces réapparaissent progressivement à Joal-Fadiouth, les débarquements totaux y sont toujours en diminution (voir indicateur B7 ci-après). Ce constat nous rappelle l'importance de mettre en oeuvre des réseaux d'AMP et des stratégies mondiales de conservation des mers et océans.

    Finalement, les perceptions d'habitants qui paraissaient surprenantes à première vue ne sont pas nécessairement contradictoires. Il est tous à fait possible qu'ils remarquent un retour timide de certaines espèces mais, qu'à côté de cela, de manière globale, ils observent que la pêche n'est pas vraiment meilleure, que certaines espèces continuent de se faire de plus en plus rares et que les prix restent élevés. De même, les vieux pêcheurs qui ont une vision peut être plus globale et sur de plus long laps de temps observent surtout que les ressources halieutiques ne cessent de diminuer alors que d'autres pêcheurs qui ont une moins longue expérience et des références plus récentes, se réjouissent peut être plus rapidement du retour progressif de quelques espèces.

    92

    ? Ind. Socio-éco. 4 : Connaissances générales sur l'AMP

    La première question était de demander aux personnes interrogées de définir à leur manière une AMP. 9 personnes sur les 11 ont répondu à cette question. Il est intéressant de constater que les définitions données sont directement associées à la fonction de protection et de préservation de l'AMP. Tous associent donc bien l'AMP à un outil de protection.

    "Pour protéger les eaux et préserver nos ressources" (étudiante, Fadiouth)

    Nous constatons également que la majorité inclut dans leur définition l'idée de protection d'un milieu et de ses ressources.

    "Service chargé de protéger la mer et tout ce qui se trouve dedans" (gendarme, Joal)

    "La mangrove, le bras de mer, le rivage, protéger où les poissons se reproduisent" (retraité, Joal)

    Par contre, la plupart ne savent pas quand a été créé l'AMP de Joal-Fadiouth, ni par qui elle a été créée.

    En ce qui concerne les raisons pour lesquelles l'AMP a été créée, les cinq personnes qui ont répondu à cette question évoquent l'exploitation excessive des poissons.

    "Parce que les gens attrapaient des poissons trop petits" (homme, Joal)

    À la question suivante ("pour qui a-t-elle été mise en place?"), tous ceux qui y ont répondus, disent "pour la population" ou "pour tous" ou même "pour tout le pays". Ils perçoivent donc bien le bénéfice commun que peut procurer l'AMP.

    Les objectifs de l'AMP ne sont pas connus par la grande majorité des personnes interrogées.

    Finalement, les personnes interrogées semblent avoir compris le concept d'AMP, son rôle et que c'est pour eux que celle-ci a été créée mais ils ne savent pas répondre à des questions plus formelles concernant depuis quand et par qui elle a été créée ou ses objectifs.

    93

    V.3.2. Synthèse

    Suite à l'analyse des réponses aux questions de l'indicateur "Perception de l'environnement et de la nécessité de la protéger", nous avons surtout retenu qu'il est très difficile de saisir les valeurs des individus. Une autre méthode que le questionnaire pourrait être envisagée ; il faudrait passer par des discussions plus profondes et plus longues incompatibles avec le système du questionnaire ou évaluer les valeurs des individus par leurs actions plutôt que par leurs paroles.

    Nous avons remarqué en comparant les réponses aux questions 6 et 10 que la formulation des questions et le choix du vocabulaire employé sont primordiaux. Une attention particulière doit être apportée à cet aspect lors de la rédaction d'un questionnaire. Par ailleurs, ces deux questions nous ont permis de remarquer que les habitants interrogés ont d'autres préoccupations liées à leur "environnement" telles que l'accumulation des déchets ou la surpopulation. Cependant, à travers les questions qui ont été formulées, nous ne disposons pas d'informations supplémentaires sur l'importance accordée à chaque problème, les liens qui sont fait entre eux ou avec d'autres éléments, etc.

    Le questionnaire ne paraît donc pas être le meilleur moyen d'obtenir des informations quant aux valeurs des individus et quant à leurs préoccupations environnementales. De plus, l'aspect culturel qui est fortement lié aux valeurs n'est pas du tout abordé. Il serait intéressant de réaliser une analyse plus globale de la perception qu'ont les habitants de Joal-Fadiouth de leur territoire afin d'avoir une vision plus générale de ce qui importe pour eux et de la place donnée à la nature. La prise en compte de ces aspects dans la gestion, permettra d'adapté les mesures de gestion afin qu'elles ne soient pas en contradiction avec les valeurs et les perceptions des individus mais aussi de mieux cibler les actions de communication.

    Les perceptions qu'ont certains habitants de la disponibilité des produits de la mer concordent assez bien avec l'avis des agents du service des pêches. Ces propos pourraient être vérifiés à partir de données chiffrées. En fait, les perceptions des individus sur la disponibilité des produits de la mer, en plus de nous fournir des informations sur la sécurité alimentaire, peuvent nous donner des pistes de recherche pour confirmer certaines impressions.

    Pour finir, l'indicateur sur les connaissances générales qu'ont les individus de l'AMP nous a permis de remarquer que ce concept d'AMP est assez bien compris et intégré par la population.

    94

    En bref, les questions se rapportant aux deux derniers indicateurs semblent pertinentes pour nous fournir des informations sur les aspects sociaux. Il s'agit des indicateurs :

    Ind. Socio-éco. 3 : Perception de la disponibilité des produits de la mer Ind. Socio-éco. 4 : Connaissances générales sur l'AMP

    Par contre les questions liées aux deux premiers indicateurs sont moins pertinentes et il serait opportun d'évaluer ces deux indicateurs selon une méthode moins stricte et plus globale d'évaluation des perceptions et des pratiques.

    95

    V.4. Évaluation biophysique

    Les données biophysiques n'ont pas été collectées pour répondre aux indicateurs du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) puisqu'elles ont été collectées antérieurement et indépendamment de mon travail. J'ai recherché dans les divers documents obtenus, des données qui se rapprochent de chaque indicateur biophysique. Je vais les présenter et les analyser ci-dessous. Ensuite, je proposerai des indicateurs plus appropriés aux possibilités de suivi de l'AMP de Joal-Fadiouth. Par ailleurs, je formulerai des recommandations pour rendre les données qui sont collectées à Joal-Fadiouth plus adéquates pour développer un suivi à long terme de l'efficacité de la gestion de l'AMP.

    V.4.1. Evaluation et adaptation des indicateurs du guide de l'UICN

    ? Indic. B1 : Abondance des espèces focales

    J'ai obtenu des données d'abondance sur des espèces capturées par pêche expérimentale, sur une espèce particulièrement vulnérable qui est la tortue marine et enfin sur les espèces d'oiseaux d'eau. En plus de concerner des espèces très différentes, ces trois séries de données ont été obtenues par des méthodes distinctes. Je vais donc directement scinder cet indicateur en trois indicateurs, provisoirement nommés: "Abondance des espèces capturées par pêche expérimentale", "Abondance de la tortue marine" et "Abondance des espèces d'oiseaux d'eau".

    - Indic. B1.1 : Abondance des espèces capturées par pêche expérimentale Données disponibles

    Un inventaire des ressources halieutiques a été réalisé par le Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye (CRODT) en novembre 2006 afin de déterminer l'état de référence. Trois stations dans l'AMP ont été échantillonnées par pêche expérimentale : "Ngazobil", "Fadiouth" et "la Côtière". Pour chaque station trois prélèvements ont été effectués, ce qui conduit à trois prélèvements le long de la limite Nord de l'AMP, trois le long de la limite Sud et trois au centre, de la plage vers le large. L'engin qui a été utilisé est une senne de plage de 12 mm de maillage. Les espèces capturées ont été répertoriées ainsi que le

    96

    poids total pour chaque espèce par station. Les résultats sont disponibles dans le plan de gestion de l'AMP (Sène, 2008) et consultables en annexe VII.

    Analyse des données

    36 espèces ont été répertoriées. Parmi celles-ci se trouve 31 espèces de poissons, 2 espèces de crustacés (Penaeus notialis et Portunus validus), 1 gastéropode (Cymbium glans), 1 céphalopode (Sepia officinalis hierredda) et 1 hippocampe (Hemiramphus brasiliensis).

    Les 5 espèces les plus importantes en termes de poids sont Mugil cephalus (19,1 kg au total pour les trois stations), Penaeus notialis (17 kg), Hemiramphus brasiliensis (14,85 kg), Gerres melanopterus (11,8 kg) et Sepia officinalis hierredda (9,8 kg)

    Les captures totales par station sont similaires entre "La Côtière" et "Ngazobil" (36,85 kg et 37,75 kg respectivement) et est un peu plus importante à Fadiouth (44,95 kg). Le nombre d'espèces rencontrées dans chaque station est pratiquement identique : 20 à la "Côtière", 19 à "Fadiouth" et 21 à "Nagazobil". Notons que 9 espèces sont rencontrées dans les trois stations et 6 dans 2 stations. Les 21 espèces restantes ne sont donc rencontrées que dans une seule station.

    Un second inventaire a été effectué en avril 2009. Les résultats ne sont pas encore disponibles mais, puisqu'il a été réalisé en avril et étant données les variations saisonnières, nous ne pourrons pas comparer ces nouvelles données aux résultats précédents.

    Nouvelle proposition d'indicateur

    Deux indicateurs peuvent être imaginés : un indicateur qui évalue l'abondance d'un maximum d'espèces, comme a tenté de le faire l'étude du CRODT21 et un indicateur qui se focalise sur certaines espèces particulières tel que recommandé dans le guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006). Tous deux répondent à des objectifs quelque peu divergents ; je vais les détailler ci-dessous.

    La protection de la biodiversité étant l'un des objectifs principaux de l'AMP de Joal-Fadiouth, il parait intéressant de suivre l'évolution d'un maximum d'espèces différentes. A ce titre, l'indicateur "Composition et structure de la communauté" (indicateur B4, présenté section II.1.) serait très intéressant puisqu'il répertorie tous les êtres vivants sur le site échantillonné mais il nécessite un investissement en temps et en personnel très important. Il

    21 Il ne s'agit bien sûr pas d'un inventaire exhaustif des ressources halieutiques de l'AMP puisque, d'une part, la méthode de prise n'est pas adaptée à la capture de toutes les espèces présentes dans l'AMP et d'autre part, certaines espèces ne sont présentes que durant certaines périodes de l'année.

    97

    parait donc opportun de retenir un indicateur tel que "abondance et biodiversité des espèces halieutiques" qui allie mesure de l'abondance et de la biodiversité sans toutefois nécessiter une évaluation de la composition de toute la communauté. Les données pourront alors être collectées par pêche expérimentale comme l'a effectué le CRODT.

    Le guide de l'UICN (Pomeroy et al., 2006) recommande d'établir une liste des espèces focales avant de collecter les données. Nous pourrions décider de suivre plus particulièrement des espèces locales qui se reproduisent ou se développent dans l'AMP, ce qui renseignerait plus spécifiquement sur l'efficacité de l'AMP. Un indicateur de ce type serait "abondance d'espèces locales". Les données pour cet indicateur peuvent être soutirées des données collectées pour l'indicateur présenté dans le paragraphe précédent.

    Recommandation pour une méthode de suivi

    Afin de démarrer un suivi des ressources halieutiques, il serait nécessaire de réaliser les mesures chaque année ou tous les deux ans, plus ou moins les mêmes jours de l'année et dans des conditions hydro-climatiques similaires. Les lieux de collecte ainsi que la technique utilisée devront être rigoureusement identiques (filet de même maille, de même longueur, même durée de mise à l'eau des filets, etc.). Il est recommandé de réaliser au minimum une mesure durant la saison sèche et une durant la saison des pluies car certaines espèces migratrices ne sont présentes que durant une partie de l'année.

    Le suivi des ressources halieutiques permettra de surveiller l'apparition ou la disparition de certaines espèces ainsi que l'évolution dans le temps des quantités totales prélevées, des quantités pour chaque espèce et de l'abondance relative des espèces. On pourra en effet se demander si certaines espèces se développent plus ou moins que d'autre et porter une attention particulière aux espèces locales dont l'évolution dépend plus de l'efficacité de l'AMP et moins de facteurs extérieurs contrairement aux espèces migratrices.

    Il serait aussi intéressant d'effectuer les mêmes prélèvements dans les eaux voisines de l'AMP. Cela permettrait de mettre en évidence un éventuel effet réserve, ce qui correspond à un bénéfice direct pour les pêcheurs et assurerait leur soutien à l'AMP. Par ailleurs, puisque les 3 stations semblent assez différentes du point de vue des espèces capturées, il pourrait être intéressant de réaliser un inventaire des habitats dans ces mêmes stations. On pourrait ainsi peut être corréler les espèces rencontrées avec des habitats particuliers.

    98

    ? Indic B1.2 : Abondance de la tortue marine Données disponibles

    Lors de la campagne de suivi des tortues marines de 2007, 12 nids ont été découverts : 9 à Finio et 3 à Ngazobil. Sur ces 12 nids, 5 ont été submergés pas de grandes marées et un détruit par un varan du nil. 7 nids ont donc éclos et 517 petits ont été lâchés à la mer.

    Lors de la seconde campagne, en 2008, aucun nid n'a été découvert. Il n'y aurait pas eu de remontés de tortues cette année là, les tortues marines ne se reproduisant pas chaque année.

    Nouvelle proposition d'indicateur

    La plage de Joal étant une zone de ponte pour les tortues marines, le relevé du nombre de nids parait être la méthode la plus appropriée pour un suivi régulier de l'évolution de la population des tortues marines dans l'AMP. De plus, cette campagne allie suivi des tortues et protection des pontes. L'indicateur à retenir serait donc "Nombre de nids et de naissances de tortues marines".

    ? Indic B1.3 : Abondance des espèces d'oiseaux d'eau Données disponibles

    Tous les mois, un recensement des oiseaux d'eau est effectué par les agents de la DPN ; les oiseaux sont identifiés et comptés. Ces données sont disponibles dans les rapports d'activités de la DPN (DPN, 2007 et 2008).

    Un tableau recensant les différentes espèces d'oiseaux d'eau présentes dans l'AMP en 2007-2008 est présenté en annexe VIII.

    Analyse des données

    La faune aviaire de l'AMP de Joal-Fadiouth est très riche : 59 espèces d'oiseaux d'eau ont été recensées en 2007 et 61 en 2008, avec un total pour les deux années de 69 espèces différentes. Une observation plus détaillée du tableau (voir annexe VIII.), nous apprend que 8 espèces qui étaient présentes en 2007 ne l'étaient plus en 2008 mais, que, à l'inverse, 10 espèces absentes en 2007 ont été observées en 2008. Pourtant, le suivi aviaire n'a pas été effectué les 4 derniers mois de cette deuxième année, ce qui peut expliquer l'absence de certaines espèces tel que les Milans dans le relevé de cette année. En effet, le Milan noir et le

    99

    Milan royal, en 2007, n'ont été observés qu'au mois de novembre. Finalement, il semble que la diversité aviaire a plutôt tendance à augmenter dans l'AMP de Joal-Fadiouth.

    Fig.15 : graphique du nombre d'oiseaux d'eau relevé lors des suivis mensuels de 2007 et 2008.

    En ce qui concerne l'abondance de l'avifaune, étant donné le nombre élevé d'espèces d'oiseaux d'eau différentes recensées, nous nous contenterons d'examiner le nombre total d'individus, toutes espèces confondues, relevé lors de chaque mission de suivi (fig.15). Le suivi n'ayant pas été réalisé de septembre à décembre 2008, nous devrons nous contenter de comparer le 8 premiers mois de l'année. On remarque que le nombre d'individus observés en 2008 est plus important qu'en 2007 pour chaque mois, excepté le mois de juillet. Sur ces 8 mois, le nombre total d'individus observés est de 29 015 en 2007 contre 57 192 en 2008. Le nombre total d'oiseaux d'eau a donc presque doublé en un an. Cette extraordinaire augmentation a été remarquée par certains habitants de Joal-Fadiouth. Ceux-ci l'imputent à une augmentation de la quantité de poissons dans l'AMP. Les oiseaux d'eau se nourrissant d'espèces aquatiques, cette hypothèse est tout à fait envisageable. Cependant, nous ne disposons pas encore de données qui permettraient de démontrer une augmentation de l'abondance des espèces aquatiques dans l'AMP. Par ailleurs, cette augmentation est peut être due simplement à une diminution des activités susceptibles de déranger les oiseaux puisque le règlement intérieur de l'AMP les interdit formellement22. La gestion de l'AMP apparait donc très efficace pour la protection et le développement des oiseaux d'eau.

    22 Le règlement intérieur de l'AMP stipule qu'"il est formellement interdit de mener toute activité de nature à perturber les équilibres écologiques des écosystèmes ou qui dérangent gravement la faune aquatique et aviaire." (article 3) ; celui-ci précise également qu'"il est formellement interdit de piéger, de capturer et de vendre les oiseaux d'eau et autres oiseaux protégés par les textes en vigueur dans l'emprise de l'AMP" (article 6) et que "sont rigoureusement interdits le ramassage, la collecte, la destruction d'oeufs de tortues marines et des oiseaux et de leur nid" (article 8)

    100

    Nouvelle proposition d'indicateur

    La technique de collecte des données qui est utilisée par les agents de la DPN est le comptage des individus observés, in situ, le long d'un parcours prédéfini. Toutes les espèces d'oiseaux d'eau ont été répertoriées. Les données permettent donc une analyse de l'abondance et de la diversité des oiseaux d'eau telle que nous l'avons réalisée ci-dessus. Il est également possible de suivre l'évolution de l'abondance de chaque espèce individuellement. Ces données pourraient être regroupées sous un indicateur "Composition et abondance des oiseaux d'eau".

    Recommandation pour une méthode de suivi

    La méthode de suivi parait tout à fait appropriée et révèle déjà des résultats très encourageants.

    Notons que parmi ces espèces un bon nombre sont des espèces protégées, une attention particulière devrait être portée à leur évolution.

    101

    ? Indic. B2 : Structure des populations d'espèces focales Données disponibles

    Durant la campagne du CRODT de 2006, la longueur totale (LT) à également été relevée pour les individus de certaines espèces. Les graphiques de distribution des fréquences de taille sont présentés pour deux espèces de chaque station aux figures 16, 17 et 18.

    LT adulte = 55 cm

    Demi-bec brésilien

    20

    15

    10

    5

    0

    20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40

    Hemiramphus brasiliensis

    Longueur totale (cm)

    Médiane = 29 cm

    LT adulte = 50cm

    Thiekem

    15

    10

    5

    0

    10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20

    Galeoides decadactylus

    Longueur totale (cm)

    Médiane = 13 cm

    Fig.16 : distribution des fréquences de taille de Hemiramphus brasiliensis et de Galeoides decadactylus à la station "Ngazobil" (Sène, 2008)

    LT = Longueur Totale

    Mugil cephalus

    LT adulte = 60 cm

    15

    10

    5

    0

    10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

    Mulet à grosse tête

    Longueur totale (cm)

    Médiane = 19 cm

    Longueur totale (cm)

    Médiane = 17 cm

    10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

    8

    Tilapia

    Carpe

    LT adulte = 26 cm

    6

    4

    2

    0

    102

    Fig.17 : distribution des fréquences de taille de Tilapia et de Mugil cephalus à la station "la Côtière" (Sène, 2008)

    LT = Longueur Totale

    Longueur totale (cm)

    Médiane = 12 cm

    Pomadasys jubelini

    Dorade grise

    LT adulte = 60 cm

    5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20

    15

    10

    5

    0

    Mulet à grosse tête

    Mugil cephalus

    LT adulte = 60 cm

    Longueur totale (cm)

    Médiane = 15 cm

    5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25

    20

    15

    10

    5

    0

    Fig.18 : distribution des fréquences de taille de Pomadasys jubelini et de Mugil cephalus à la station "Fadiouth" (Sène, 2008)

    LT = Longueur Totale

    103

    Analyse des données

    Les distributions des fréquences de taille obtenues comparées à la LT adulte montrent, pour chaque espèce, que les individus capturés sont de très petite taille. Par exemple, les Galeoides decadactylus adultes ont une LT de 50 cm alors que la médiane calculée pour les LT des individus capturés est de 13 cm. Il en est de même pour les 8 espèces ; la médiane obtenue est toujours largement inférieure à la LT adulte.

    Cette distribution des fréquences de taille traduit le caractère juvénile des individus de ces espèces à l'intérieur de l'AMP. Ceci montre que l'AMP de Joal-Fadiouth est un lieu de développement pour les juvéniles de plusieurs espèces et probablement un lieu de frayère. Cependant, plusieurs raisons peuvent expliquer l'absence totale d'adulte : soit nous ne sommes pas en période de ponte et ceux-ci ont migré vers d'autres zones, soit l'exploitation par l'homme ne laisse le temps qu'à très peu d'entre eux d'atteindre l'âge adulte.

    Proposition d'indicateur

    Les données disponibles correspondent à l'indicateur B2. Nous pouvons le maintenir comme indicateur de suivi de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth.

    Recommandation pour une méthode de suivi

    La méthode de suivi semble appropriée. Toutefois, on peut se demander comment ont été choisies les espèces pour lesquelles les tailles ont été mesurées. Il serait intéressant de se focaliser sur certaines espèces cibles ou particulièrement vulnérables.

    Des connaissances approfondies sur le mode de vie de ces espèces devraient permettre une meilleure interprétation des résultats. Par ailleurs, l'évolution de la répartition des individus par classe de taille au cours du temps permettra d'observer d'éventuels changements dans la structure des populations et d'estimer le taux de croissance de la population.

    ? Indic. B3 : Répartition et complexité de l'habitat Données disponibles

    Une étude réalisée par Diouf en 2003 a permis d'obtenir des données de superficie de mangrove sur base de photos aériennes de 1954, 1978 et 1997. Ces données figurent dans le plan de gestion 2009-2013 de l'AMP.

    104

    Trois zones majeures, représentées à la figure 3, ont été déterminées par Diouf (2003) :

    - Une zone centrale B (appelée mangrove des cimetières) représentant la zone des amas coquillers de Diotio, Facao et Fassanda ;

    - Une zone A (mangrove de Joal) située au Nord de la piste de Fadial ;

    - Une zone C (mangrove de Fadiouth) au Sud du Chenal de Diotio.

    Fig.19 : Zonation par secteur de la mangrove de la lagune de Joal-Fadiouth (Diouf, 2003)

    Les superficies de mangrove de ces différentes zones sont représentées figure 20.

    Fig.20 : Histogramme des estimations des superficies de mangrove par zone pour les années 1954, 1978 et 1997 (Diouf, 2003)

    105

    Analyse des données

    La zone C est visiblement la plus importante en termes de surface (fig.19). On remarque, sur le graphique de la figure 20, que la superficie totale a diminué entre 1954 et 1997 ; elle est passée de 424,72 hectares à 403,26 hectares. Deux causes peuvent être imputées à cette diminution de surface : les variabilités climatiques - plus particulièrement les périodes de grande sécheresse - et l'impact anthropique à travers l'exploitation du bois. La zone B, contrairement au zone A et C, a une superficie plus importante en 1997 (54,18 ha) qu'en 1954 (51,49 ha). Si la zone B est mieux conservée que les autres zones, cela est probablement dû à des considérations culturelles (mangrove des cimetières). Néanmoins, on remarque également une diminution de la superficie de la mangrove dans la zone B entre 1978 et 1997.

    Proposition d'indicateur

    La mangrove constitue un habitat particulier propice au développement de nombreuses espèces aquatiques. Elle est, en effet, considérée comme une zone de frayère et de nourrissage primordiale pour de nombreuses espèces de poissons et de mollusques ; d'où l'importance de suivre son évolution.

    Les données recueillies correspondent donc à la répartition d'un habitat, la mangrove. L'indicateur B3 suggère de caractériser tous les types d'habitats rencontrés dans l'AMP ou du moins une grande proportion. En attendant qu'un tel travail puisse être réalisé au niveau de l'AMP de Joal-Fadiouth, le suivi d'un habitat essentiel tel que la mangrove est primordial. Ainsi nous pourrions retenir un indicateur du type : "répartition de la mangrove".

    Recommandation pour une méthode de suivi

    Des données plus récentes sur les superficies de mangrove permettraient d'évaluer l'impact des mesures de protection (AMP, campagnes de reboisement) sur son évolution. D'après une étude de Dièye (2007) la mangrove réapparaitrait progressivement en bordure des bolongs entre 1988 et 2005. Ces observations devraient être confirmées par des données chiffrées.

    106

    ? Indic. B4 : Composition et structure de la communauté

    L'évaluation de cet indicateur est particulièrement fastidieuse puisqu'elle nécessite l'observation de tous les êtres vivants du site échantillonné. Des données de ce type n'ont encore jamais été recueillies pour l'AMP de Joal-Fadiouth. Cependant, un relevé de tous les végétaux présents dans la réserve communautaire de Ngazobil a été effectué. Notons que la réserve communautaire de Ngazobil ne fait juridiquement pas partie de l'AMP de Joal-Fadiouth mais elle se situe juste à limite de celle-ci et elle est représentée dans le comité de gestion de l'AMP.

    Données disponibles

    Une synthèse des végétaux de Ngazobil se trouve dans le rapport annuel d'activité 2008 de la DPN, il est repris en annexe IX.

    Analyse des données

    97 espèces différentes, répartie sur 40 familles, ont été répertoriées dans la réserve communautaire de Ngazobil. La diversité végétale est donc extrêmement importante en ce lieu.

    Proposition d'indicateur

    La conservation de la biodiversité étant un objectif phare de l'AMP, le suivi de la diversité végétale semble tout à fait approprié. On pourrait ainsi nommer un indicateur "Composition végétale de la réserve communautaire de Ngazobil". Ces informations pourraient éventuellement être complétées par une évaluation de l'abondance relative.

    Recommandation pour une méthode de suivi

    Un relevé de ce type effectué tous les ans à tous les trois ans permettrait de surveiller la disparition ou l'apparition d'espèces. Une attention particulière devra être apportée à l'apparition de nouvelles espèces car elles sont susceptibles d'avoir un effet négatif sur la flore endémique particulièrement s'il s'agit d'espèces invasives.

    Avec, en plus, des informations sur l'abondance relative, il serait possible de surveiller l'évolution relative de chaque espèce et de prévenir une éventuelle prolifération excessive ou raréfaction de certaines espèces.

    107

    ? Indic B7 : Type, niveau et rentabilité de l'effort de pêche Données disponibles

    Au poste de contrôle du quai de pêche de Joal-Fadiouth, j'ai pu obtenir les "résultats généraux des mises à terre" des années 2000 à 2008. Ces résultats comprennent des données sur l'armement piroguier (pirogues locales/étrangères), les mises à terre (tonnage débarqué, valeur commerciale estimée, consommation locale), la transformation artisanale et le carburant consommé. Un tableau récapitulatif des données pour chaque année se trouve en annexe X.

    Analyse des données

    A

    B

    C

     

    Fig.21 : évolution des "résultats généraux des mises à terre" de 2000 à 2008

    A : graphique du tonnage débarqué par année (avec courbe de tendance en rouge)

    B : graphique de l'effectif piroguier moyen par année

    C : graphique du tonnage capturé par pirogue

     

    Le tonnage total débarqué oscille autour des 150 000 tonnes par an (fig.21A). De manière globale, il a tendance à diminuer au cours du temps. Depuis 2000, la valeur la plus faible enregistrée est celle de l'année 2008 avec un tonnage de 131 657 tonnes alors que la plus importante est de 172 210 tonnes en 2001.

    108

    En ce qui concerne l'effectif piroguier (fig.21B), il a fortement augmenté entre 2001 et 2003 ; il est passé de 498 à 774 pirogues. Ensuite, celui-ci diminue jusqu'en 2005 pour atteindre 575 pirogues. Les 3 années qui suivent, le nombre de pirogues reste stable, au alentour des 600.

    On pourrait s'attendre à une augmentation des captures lorsque l'effectif piroguier augmente entre 2001 et 2003. Or, particulièrement en 2002 mais également en 2003 les captures sont inférieures à celle de 2001. L'augmentation du nombre de pêcheurs n'entraine pas une augmentation globale des captures, ce qui signifierait que le niveau maximum d'exploitation des ressources est globalement atteint dans les années 2000.

    Le graphique C (fig.21) semble confirmer cette hypothèse. Nous remarquons une chute des captures par pirogue entre 2001 et 2002 lorsque l'effectif piroguier commence à grimper. Cette observation semble traduire un problème de surcapacité de pêche, ce qui confirmerait que le niveau maximum d'exploitation soit atteint en 2001.

    La diminution de l'effectif piroguier entre 2003 et 2005 est probablement due à la diminution importante des captures par pirogue observée en 2002, elle-même due, comme nous venons de le voir, à l'augmentation du nombre de pirogue entre 2001 et 2003.

    Ces 4 dernières années, les valeurs observées sur les 4 graphiques sont relativement plus stables mais en 2008 l'effectif piroguier est toujours supérieur à celui de 2000 alors que le tonnage débarqué est le plus faible jamais observé depuis 2000.

    En bref, il semble que le niveau maximum d'exploitation soit largement atteint. Malgré la présence de l'AMP de Joal-Fadiouth, aucun signe flagrant d'amélioration n'est visible sur ces graphiques. Si les quantités totales débarquées continuent de diminuer alors que l'effectif piroguier reste stable, cela signifiera que le niveau maximum d'exploitation est globalement bel et bien dépassé et que les ressources s'épuisent progressivement.

    Notons, néanmoins, qu'il s'agit d'un constat global et qu'il est possible que certaines espèces soient tout de même en augmentation mais masquées par de fortes diminutions des stocks d'autres espèces. Comme nous l'avons discuté au niveau de l'indicateur Socio-éco. 3 (§V.3), l'AMP peut difficilement avoir beaucoup d'impacts sur les espèces migratrices et surexploitées ailleurs dans le monde. Ainsi, si on veut évaluer l'effet de l'AMP spécifiquement, il serait plus pertinent d'évaluer l'évolution des quantités de certaines espèces locales et qui se reproduisent ou se développent dans l'AMP.

    109

    Proposition d'indicateur

    Les données disponibles ne permettent pas une évaluation aussi poussée que ce que recommande l'indicateur du Guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006). Nous ne disposons pas de données sur les technologies et sur le temps consacré à la pêche et encore moins pour chaque espèce séparément. L'analyse combinée du tonnage débarqué total et de l'effectif piroguier peut déjà fournir un bon aperçu de la situation globale de la pêche. A partir des données disponibles au poste de contrôle du quai de pêche de Joal-Fadiouth, on peut imaginer un indicateur simple et précis du type : "Analyse globale du tonnage débarqué et de l'effectif piroguier". Au poste de contrôle, il existe aussi des données de tonnage débarqué par espèce par mois. Afin d'évaluer plus spécifiquement l'efficacité de l'AMP, on pourrait utiliser les données concernant certaines espèces locales et analyser l'évolution des quantités débarquées de ces espèces par année. Cet indicateur s'appellerait '"Evolution des tonnages débarqués des espèces locales".

    Recommandation pour une méthode de suivi

    La collecte des données nécessaires à l'évaluation de cet indicateur est effectuée systématiquement tous les mois par les agents du service des pêches de Joal, ce qui est très positif. Un traitement des données similaire à celui effectué ci-dessus devrait également être effectué chaque année.

    ? Indic. B8 : Qualité de l'eau Données disponibles

    Divers paramètres physico-chimiques ont été mesurés à l'occasion de l'état de référence de novembre 2006 par le CRODT. Il s'agit de la température, la salinité, l'oxygène dissous, le pH, la chlorophylle totale et la turbidité. Les résultats sont repris dans le plan de gestion 2009-2013 de l'AMP de Joal-Fadiouth (Sène, 2008).

    Analyse des données

    - Température (°C)

    Les températures mesurées sont d'environ 30°C avec une légère diminution en fonction de la profondeur. Les eaux sont chaudes, ce qui est caractéristique du mois de novembre (début de la période de transition vers la saison froide).

    - Salinité (g/l de Na Cl - %o)

    110

    Le taux de salinité varie entre 34 et 35 %o. Les eaux de surface sont moins salées au niveau de la côte qu'au large.

    - Oxygène dissous (% de saturation)

    Les valeurs en oxygène dissous sont en moyenne de 65% et décroissent de la surface vers le fond

    - Chlorophylle totale (ug/l)

    La quantité de chlorophylle totale moyenne est de 8 ug/l, les concentrations les plus élevée étant observée au fond (9ug/l). Ces valeurs sont élevées pour la saison (Sène, 2008).

    - pH

    Le pH est situé entre 8 et 8,5 mais aucune tendance n'est observée sur le plan vertical ou horizontal

    - Turbidité (ppm)

    La turbidité décroit vers le large et en profondeur. Les valeurs se situées entre 6 et 7 ppm, ce qui est assez faible.

    Proposition d'indicateur

    Toute variation inhabituelle d'un paramètre physico-chimique est susceptible de constituer un facteur limitant des processus biologiques des êtres vivants. Des variations dans la qualité de l'eau peuvent donc entrainer la disparition ou l'apparition d'espèces dans la zone étudiée. Il est donc important de suivre l'évolution des paramètres physico-chimiques de l'eau mais aussi de mesurer la charge nutritive, la densité de toxines ou de bactéries à travers un indicateur tel que "la qualité de l'eau".

    Recommandation pour une méthode de suivi

    Les paramètres physico-chimiques de l'eau varient en fonction de la période de l'année, d'où l'importance d'effectuer des relevés à des périodes fixes de l'année et plusieurs fois par an. Il serait intéressant également de mesurer plusieurs fois par an la charge nutritive, la densité en toxines et en bactéries - ces deux dernières pouvant permettre de déceler une pollution anthropique à proximité de l'AMP.

    Ces données pourraient être facilement récoltées plusieurs fois par an car elles ne nécessitent pas d'investissement important en temps et en personnel. Cependant, un investissement important en matériel devra être réalisé au départ.

    111

    ? Indic. B9 : Zones présentant des signes de rétablissement Données disponibles

    Cet indicateur nécessite d'avoir préalablement défini des "seuils de rétablissement". Le plan de gestion définit, en lien avec des objectifs, des cibles. Les cibles qui concernent la conservation des habitats et des espèces pourraient être assimilées à des seuils de rétablissement. Notons néanmoins que les cibles pourront être révisées avec le plan de gestion, il s'agit donc plutôt de seuil provisoire à viser pour se rapprocher d'un "état de rétablissement".

    Ces cibles sont (Sène, 2008) :

    1) L'augmentation de la biodiversité spécifique et de la biomasse des espèces marines de 20 à 30 % de la situation de référence

    2) Le reboisement de 10 à 20 % de la superficie de mangrove

    3) L'augmentation du recrutement des tortues marines de 10 à 20%

    Analyse des données

    Ces seuils devraient aider à l'analyse des résultats de certains indicateurs. Ainsi, on pourra évaluer l'indicateur "Abondance et biodiversité des espèces halieutiques" en considérant que l'objectif de conservation des espèces marines sera atteint lorsqu'on recensera 20 à 30% d'espèces en plus et une biomasse également supérieur de 20 à 30%. De même en ce qui concerne l'indicateur "Répartition de la mangrove" (objectifs de reboisement de 10 à 20%) et "Nombre de nids et de naissances de tortues marines" (objectif d'augmentation du nombre de nid de 10 à 20%).

    Proposition d'indicateur et recommandation pour une méthode de suivi

    L'indicateur "Zones présentant des signes de rétablissement" est un outil intéressant pour analyser d'autres indicateurs mais il faudra garder à l'esprit qu'il s'agit de seuils très subjectifs et susceptibles d'être modifiés en fonction, par exemple, de nouvelles données scientifiques.

    112

    V.4.2. Synthèse des indicateurs biophysiques

    Ind. Biophys. 1. Abondance et biodiversité des espèces halieutiques

    Ind. Biophys. 2. Abondance des espèces halieutiques locales

    Ind. Biophys. 3. Nombre de nids et de naissances de tortues marines

    Ind. Biophys. 4. Composition et abondance des oiseaux d'eau

    Ind. Biophys. 5. Structure des populations d'espèces focales (taille)

    Ind. Biophys. 6. Répartition de la mangrove

    Ind. Biophys. 7. Composition végétale de la réserve communautaire de Ngazobil

    Ind. Biophys. 8. Analyse combinée globale du tonnage débarqué et de l'effectif

    piroguier

    Ind. Biophys. 9. Evolution des tonnages débarqués des espèces locales

    Ind. Biophys. 10. Qualité de l'eau

    Ind. Biophys. 11. Zones présentant des signes de rétablissement

    V.5. Mise en relation avec les objectifs et les indicateurs du plan de gestion

    Au départ, lorsque je préparais mon travail de terrain, je ne connaissais pas les objectifs de l'AMP de Joal-Fadiouth. J'ai donc récolté un maximum d'informations en me basant sur ceux qui sont "couramment associés à l'utilisation d'une AMP" (Pomeroy et al.2006) et sur les indicateurs qui y correspondent. Par contre, lors de mon séjour sur place, j'ai découvert que les gestionnaires de l'AMP travaillent en suivant trois objectifs généraux et j'ai également eu accès au plan de gestion provisoire de l'AMP qui détermine des objectifs spécifiques.

    Voici les objectifs qui sont repris dans le plan de gestion provisoire 2009-2013 de l'AMP de Joal-Fadiouth (Sène, 2008) :

    Objectifs à long terme

    Objectifs du plan

    1.1. Améliorer les connaissances sur la dynamique des espèces et des habitats

    1. Conservation des habitats et des espèces

    1.2. Préserver les ressources marines et côtières de l'AMP

    1.3. Protéger et/ou restaurer les habitats et espèces clés de l'AMP (mangrove, zone d'alimentation et de ponte de la tortue...)

    2. Développement durable des populations locales

    2.1. Améliorer les conditions de vie des populations locales

    2.2. Promouvoir des mécanismes de financement durable de la gestion de l'AMP et le développement local

    3. Communication et sensibilisation du public

    3.1. Promouvoir des comportements responsables favorables à la gestion durable de l'AMP et des ressources marines et côtières associées

    4. Gestion administrative efficace

    113

    4.1. Renforcer les capacités des acteurs impliqués dans la gestion de l'AMP

    4.2. Assurer une meilleure gestion administrative de l'AMP

    114

    ainsi que les trois objectifs généraux qui guident le travail des gestionnaires sur le terrain :

    a) Conserver la biodiversité marine et côtière

    b) Améliorer le rendement de la pêche

    c) Augmenter les retombées socio-économiques de la population

    J'ai donc veillé à ce que les indicateurs développés ci-dessus répondent à ces objectifs. Puisqu'ils sont assez classiques et généraux, toutes les données dont je disposais se sont avérées utiles pour créer des indicateurs adaptées à l'AMP de Joal-Fadiouth et à ses objectifs.

    Les indicateurs de gouvernance représentent les conditions nécessaires au développement d'une gestion participative efficace de l'AMP. On peut considérer la série d'indicateurs de gouvernance qui a été établie dans ce travail comme une grille de lecture pour l'évaluation de la gouvernance de l'AMP de Joal-Fadiouth. Ils répondent de manière plus ou moins directe aux objectifs 4.1, 4.2, 3.1 et 2.2. Cependant, étant donné que le gouvernement sénégalais, comme les populations, ont souhaité dès le départ appliquer le principe de la gestion participative, je pense qu'un objectif pourrait être ajouté au plan de gestion afin d'insister sur cet aspect. Nous pourrions nommer celui-ci : "Participation et représentation efficaces des parties prenantes"(objectif 5)

    Les indicateurs socio-économiques que j'ai développés ciblent l'évaluation des perceptions et des connaissances de la communauté et ne représentent donc qu'une partie des possibilités en termes d'évaluation socio-économiques. D'autres indicateurs pourraient être utilisés par exemple pour évaluer le niveau de satisfaction des visiteurs, l'impact sur les coutumes et traditions ou la dépendance de la population vis-à-vis des ressources côtières. Pour l'instant, les indicateurs qui ont été développés répondent aux objectifs 2.1, 3.1, c et b.

    Enfin, les indicateurs biophysiques ont été adaptées à des données qui existaient déjà. Des indicateurs plus performants existent et pourraient certainement permettre une évaluation plus précise et plus poussée de la situation écologique de l'AMP mais ces indicateurs nécessitent des compétences et des moyens importants. Les indicateurs proposés ici ont l'avantage d'être directement applicables pour une évaluation des bénéfices biophysiques de l'AMP. Ils correspondent aux objectifs 1.1, 1.2, 1.3, a et b.

    Les correspondances entre les différents indicateurs et les objectifs de l'AMP sont présentées dans un tableau récapitulatif à la figure 22.

    115

    Par ailleurs, quelques indicateurs sont proposés dans le plan de gestion de l'AMP (annexe XI.). Tous sont représentés dans ce travail à l'exception de l'indicateur "évolution des revenus des populations locales". Il s'agit d'un d'indicateur socio-économique qui se rapproche très fort des indicateurs S7, S8 et S11 sur le mode de vie, la santé et les infrastructures (Pomeroy et al. 2006). Je n'ai pas évalué ces indicateurs car ils nécessitent l'utilisation d'un groupe témoin pour distinguer l'effet du développement économique global de l'effet de l'AMP. Ils ne sont pas pour autant des indicateurs moins intéressants mais comme je l'ai explique dans la description des indicateurs (§II.3), je ne disposais pas de suffisamment de temps pour tester tous les indicateurs socio-économiques.

    Indicateur

    Objectifs

    Ind. Gouv. 1.

    Participation des parties prenantes

    5.

    Ind. Gouv. 2.

    Cadre légal, documents officiels

    4.2

    Ind. Gouv. 3.

    Existence de procédure de révision des règles et réglementation

    4.2

    Ind. Gouv. 4.

    Diffusion, connaissance et compréhension locale des règles et réglementations de l'AMP

    3.1

    Ind. Gouv. 5.

    Importance et impact de la communication autour de l'AMP

    3.1

    Ind. Gouv. 6.

    Activités de contrôle

    3.1, 4.2

    Ind. Gouv. 7.

    Formations assurées aux parties prenantes.

    4.1

    Ind. Gouv. 8.

    Conflits liés à l'AMP

    4.2

    Ind. Gouv. 9.

    Plans de reconversion

    2.2

    Ind. Gouv. 10.

    Disponibilité et affectation des ressources administratives de l'AMP

    4.2

    Ind. Gouv. 11.

    Niveau d'autonomie financière

    2.2

    Ind. Gouv. 12.

    Existence et utilisation d'études et de contributions scientifiques

    4.1

    116

    Ind. Gouv. 13.

     

    Taux d'exécution des activités prévues dans le plan de gestion

    4.2

    Ind. Gouv. 14.

    Existence de procédures d'évaluation et de suivi

    4.2

    Ind. Socio-éco. 1.

    Perception de l'environnement et de la nécessité de le protéger

    3.1

    Ind. Socio-éco. 2

    Degré de compréhension des conséquences de l'action de l'homme sur les ressources

    3.1

    Ind. Socio-éco. 3

    Perception de la disponibilité des produits de la mer

    2.1, b

    Ind. Socio-éco. 4

    Connaissances générales sur l'AMP

    3.1

    Ind. Biophys. 1.

    Abondance et biodiversité des espèces halieutiques

    1.2, 1.1, a, b

    Ind. Biophys. 2.

    Abondance des espèces halieutiques locales

    1.3, 1.2, 1.1, b

    Ind. Biophys. 3.

    Nombre de nids et de naissances de tortues marines

    1.3

    Ind. Biophys. 4.

    Composition et abondance des oiseaux d'eau

    1.1, 1.2, 1.3, a

    Ind. Biophys. 5.

    Structure des populations d'espèces focales (taille)

    1.2, 1.1, (1.3), b

    Ind. Biophys. 6.

    Répartition de la mangrove

    1.3

    Ind. Biophys. 7.

    Composition végétale de la réserve communautaire de Ngazobil

    1.1, 1.2, 1.3, a

    Ind. Biophys. 8.

    Analyse combinée globale du tonnage débarqué et de l'effectif piroguier

    1.2, b

    Ind. Biophys. 9.

    Evolution des tonnages débarqués des espèces locales

    1.2, 1.1, 1.3, b

    Ind. Biophys. 10.

    Qualité de l'eau

    1.1, 1.3

    Ind. Biophys. 11.

    Zones présentant des signes de rétablissement

    1.3, 1.2

    Fig.22 : tableau récapitulatif des correspondances entre les différents indicateurs et les objectifs de l'AMP

    117

    CONCLUSIONS

    L'objectif de ce travail était de développer une méthode d'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth adaptée aux ressources et à la situation de cette AMP mais aussi aux possibilités techniques dont disposent les acteurs de terrain pour collecter les données. Pour répondre à cet objectif pratique, d'une part, j'ai souhaité explorer un maximum d'indicateurs aussi bien sur les aspects de la gouvernance que sur les aspects biophysiques et autant que possible sur les aspects socio-économiques. Les analyses des différents indicateurs ainsi que de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth sont donc très succinctes mais suffisantes pour développer des indicateurs adaptés à un suivi dans cette AMP particulière. D'autre part, j'ai privilégié des indicateurs simples qui nécessitent des investissements limités en matériel et en temps.

    L'évaluation des aspects liés à la gouvernance a abouti au développement d'une série d'indicateurs adaptés à l'AMP de Joal-Fadiouth. Ceux-ci forment une grille de lecture qui permet d'évaluer tous les aspects de la gouvernance de cette AMP : participation des parties prenantes, communication, formation, cadre légal, activités de contrôle, etc. L'évaluation de la gouvernance demande peu d'effort de collecte des données - quelques entretiens avec des acteurs clés et les documents principaux de l'AMP sont généralement suffisants. Cette partie de mon travail se révèle d'ailleurs être la plus complète tant du point de vue des indicateurs qui ont été développés que de l'évaluation de l'efficacité de la gestion en elle-même.

    En ce qui concerne les indicateurs socio-économiques, l'analyse n'est que fort partielle étant donné les importants investissements en temps nécessaires pour collecter ces données. Elle a été limitée à des indicateurs de perception et de connaissance. Les données ont été collectées par le biais d'un questionnaire. L'analyse des réponses nous a permis de vérifier la pertinence des questions. Les questions se rapportant à deux des indicateurs se sont révélées pertinentes pour fournir des informations sur les aspects sociaux. Par contre, la méthode du questionnaire ne s'est pas révélée des plus adéquate pour collecter des données concernant les valeurs et préoccupations environnementales des individus. Il serait plus approprié d'effectuer une analyse globale des perceptions qu'ont les individus de leur territoire ou de se référer plutôt à des pratiques.

    De ce travail, ressortent également 11 indicateurs biophysiques. Les indicateurs biophysiques demandent un travail de collecte des données souvent difficile et coûteux. Pour

    118

    cette raison, je n'ai développé que des indicateurs qui se basent sur des données qui ont déjà été collectées à l'AMP de Joal-Fadiouth. Ainsi, les méthodes de collecte des données sont déjà connues sur le terrain. Les indicateurs biophysiques proposés dans ce travail permettront aux gestionnaires d'exploiter ces données pour évaluer l'efficacité de l'AMP de Joal-Fadiouth.

    Les résultats de la gestion, c'est-à-dire les effets biophysiques et socio-économiques, ne se manifestent généralement que progressivement, après plusieurs années de gestion. Par contre, l'évaluation de la gouvernance qui est plutôt une évaluation de second niveau sur le cadre d'évaluation de Hockings et al. (2008), fournit plus rapidement des informations pouvant être mobilisées pour réviser les pratiques de gestion. Par ailleurs, les résultats de la gestion sont fortement dépendants de l'efficacité des processus de gestion et autres aspects de la gouvernance. Il est donc fortement recommandé d'évaluer la gouvernance avant ou parallèlement à l'évaluation biophysique ou socio-économique. Toutefois, une AMP qui réussit sur le plan de la gouvernance mais ne fournit pas de résultats échoue puisqu'elle n'atteint pas ces objectifs.

    Bien que la visée principale de ce travail fût d'évaluer et d'adapter des indicateurs, une première brève évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth a été menée simultanément et quelques résultats intéressants méritent d'être retenus. L'évaluation de la gouvernance a fourni des résultats très satisfaisants en termes de participation. Les parties prenantes semblent avoir été investies dès le départ dans tout le processus de mise en oeuvre et de gestion quotidienne de l'AMP. Des documents officiels donnent un statut à l'AMP et à son comité de gestion. Seul le plan de gestion n'a pas encore été ratifié, ce qui n'empêche pas les acteurs de terrain de travailler en suivant leurs propres objectifs. La communication a été une activité très importante ces premières années. Les campagnes pour la protection des tortues marines semblent avoir été très efficaces comme le montrent les résultats concernant la pêche et le commerce illégal de ces espèces qui ont sérieusement diminué depuis les campagnes. Diverses formations ont été dispensées aux gestionnaires et parties prenantes. Ceux-ci en sont satisfaits mais en souhaiteraient davantage, signe de leur investissement dans la gestion de l'AMP. La principale faiblesse de l'AMP de Joal-Fadiouth est le manque de moyens et de financements, ce qui à un impact négatif sur le développement d'activités aussi importantes que la surveillance. Puisqu'il semble que l'état sénégalais ne soit pas disposé à investir davantage dans les AMPs, il est crucial de développer localement des activités génératrices de revenus pour le comité de gestion comme, par exemple, l'écotourisme. Un second point faible

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    concerne le peu d'études scientifiques qui sont réalisées sur les ressources de l'AMP. Le suivi ne concerne que certains paramètres isolés et aucun processus global d'évaluation n'existe.

    Concernant les résultats de l'évaluation socio-économique, nous avons remarqué que les individus interrogés ont assez bien intégrés le concept d'AMP. Cependant, uniquement 11 personnes ont été interrogées, ce qui est insuffisant pour représenter toute la population. La question des effets de l'AMP sur les ressources halieutiques a donné lieu, à première vue, à des résultats assez contradictoires mais qui, en y regardant de plus près, sont peut être le reflet de la réalité de l'effet de l'AMP sur les ressources : un effet très variable d'une espèce à l'autre.

    Pour la majorité des indicateurs biophysiques, les données ne permettent pas encore de tirer de conclusions quant à l'efficacité de l'AMP. En effet, tous les indicateurs biophysiques ne peuvent être évalués que par rapport à un état de référence ou du moins par rapport à des données antérieures car c'est l'évolution au cours du temps de la variable mesurée qui peut fournir une information sur l'efficacité de l'AMP. Ainsi, les indicateurs qui ont été développés à partir d'un seul relevé de données comme c'est le cas des indicateurs basés sur les données de l'état de référence du CRODT (Ind. Biophys. 1., 5. et 10.) ne permettent pas de tirer de conclusion quant à l'efficacité de la gestion. De même, l'indicateur "répartition de la mangrove" pour lequel nous disposons uniquement de données antérieurs à la création de l'AMP ne nous renseigne évidement pas encore sur d'éventuels effets de la gestion de l'AMP. Néanmoins, lors de la prochaine collecte de données, nous disposerons de valeur de référence pour effectuer une première évaluation. Pour certains indicateurs, les données disponibles ont tout de même déjà permis de réaliser une première évaluation. Ainsi, l'analyse des données de la DPN de 2007 et 2008 sur le suivi aviaire montre que la quantité d'oiseaux d'eau a sérieusement augmenté en seulement une année. L'AMP a donc apparemment un effet positif sur le nombre d'oiseaux d'eau fréquentant cette zone. L'analyse combinée du tonnage débarqué et de l'effectif piroguier au quai de pêche de Joal entre 2000 et 2008, fournit des résultats moins réjouissants ; le niveau d'exploitation serait globalement largement atteint. Même si certains stocks d'espèces locales se reconstitueraient grâce à l'AMP - ce qui reste à vérifier - globalement, les ressources halieutiques s'épuisent, ce qui n'est finalement pas surprenant étant donné que beaucoup de ressources migrent et sont surexploitées ailleurs dans le monde. Ces résultats nous rappellent que même si l'AMP peut avoir localement un effet très positif sur la protection des espèces marines et côtières, la majorité d'entre elles circulent, et donc leur pérennité dépend aussi de nombreux facteurs extérieurs. Une coordination des mesures de gestion à grande échelle est donc indispensable.

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    Les indicateurs d'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth développés dans ce travail ne couvrent pas tous les domaines de l'évaluation telle que définie par le cadre de l'UICN (Hockings et al.2008). Le contexte et la planification sont en partie évalués dans le plan de gestion de l'AMP mais ce niveau de l'évaluation n'a pas été envisagé dans ce travail. Les indicateurs de gouvernance qui ont été mis au point permettent une évaluation assez complète des intrants, des processus et des extrants. Les indicateurs biophysiques et socio-économiques évaluent exclusivement les résultats, c'est-à-dire l'atteinte des objectifs de l'AMP. Les indicateurs biophysiques qui ont été développés permettent une évaluation de nombreux aspects des objectifs biophysiques. Cependant, ils sont limités par le fait qu'ils ont été développés uniquement à partir de données qui ont déjà été collectées. D'autres indicateurs biophysiques pourraient certainement compléter ceux qui ont été développés mais ils ne seraient utiles qu'à condition d'avoir ensuite, sur le terrain, les possibilités de collecter les données. Il serait surtout nécessaire d'approfondir l'aspect socio-économique : tester d'autres indicateurs et d'autres types de questionnaires.

    Une évaluation plus approfondie de l'efficacité de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth pourrait être menée sur base des indicateurs développés dans ce travail et éventuellement d'indicateurs supplémentaires. Des liens entre les indicateurs de gouvernance, biophysiques et socio-économiques pourraient être établis. Les résultats de l'évaluation devraient ensuite permettre d'adapter les pratiques de gestion pour améliorer l'efficacité de l'AMP (gestion adaptative).

    Il serait très intéressant de regrouper les indicateurs sous forme d'un guide spécifique à l'AMP de Joal-Fadiouth. Celui-ci reprendrait une explication de chaque indicateur, de ses faiblesses et de ses points forts et des méthodes précises de récolte des données. Ce guide, à l'usage des gestionnaires de l'AMP de Joal-Fadiouth, faciliterait la transmission des conclusions de ce travail à ces derniers.

    En dehors du cas précis de l'AMP de Joal-Fadiouth, ce travail fournit également des perspectives intéressantes. Les indicateurs biophysiques développés dans ce travail sont assez spécifiques à l'AMP de Joal-Fadiouth mais le même principe pourrait être appliqué pour développer des indicateurs de suivi adaptés à une autre AMP : sur base d'indicateurs "universelles", rechercher des données qui sont déjà collectées sur le terrain et adapter ensuite les indicateurs. Les observations méthodologiques concernant l'évaluation des valeurs et préoccupations environnementales des individus sont tout à fait généralisables. Enfin, la grille

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    de lecture formée par l'ensemble des indicateurs de gouvernance est applicable quasiment telle quel à toute AMP régie selon le principe de la cogestion.

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    Sigles

    AMP = Aire Marine Protégée

    CRODT = Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye

    DPM = Direction des Pêches Maritimes (sous la tutelle du Ministère de l'Economie Maritime et des Transport Maritimes Internationaux de la République Sénégal)

    DPN = Direction des Parcs Nationaux (sous la tutelle de Ministère de l'Environnement de la Protection de la Nature des Bassins de Rétention et des Lacs Artificiels de la République du Sénégal)

    FAO = Food and Agriculture Organization of United Nations. En français, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture

    F CFA = Unité monétaire de la Communauté financière africaine (1€ = 656 Franc CFA)

    FIBA = Fondation Internationale du Banc d'Arguin

    MAB = Man And Biosphere. En Français, programme "homme et biosphère" de l'UNESCO

    PRCM = Programme Régional de Conservation de la Zone Côtière et Marine

    RAMPAO = Réseau régional d'AMP en Afrique de l'Ouest

    UICN = Union International pour la Conservation de la Nature

    UNESCO = United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization

    WWF = World Wildlife Fund. En français, Fonds mondial pour la nature

    WWF WARMER = WWF West African Marine Ecoregion.

    Indic. B, Indic. G et Indic. S font référence aux indicateurs Biophysiques, de Gouvernance et Socio-économiques du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006)

    Ind. Biophys., Ind. Gouv. et Ind. Socio-éco. font référence aux indicateurs Biophysiques, de Gouvernance et Socio-économiques adaptés à l'AMP de Joal-Fadiouth, établis dans ce travail






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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon