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Elaboration d'une méthode d'évaluation de l'efficacité de la gestion de l'aire marine protégée de Joal-Fadiouth au Sénégal

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par Marie Balland
Université de Liège - Master en sciences et gestion de l'environnement 2009
  

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V.4. Évaluation biophysique

Les données biophysiques n'ont pas été collectées pour répondre aux indicateurs du guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006) puisqu'elles ont été collectées antérieurement et indépendamment de mon travail. J'ai recherché dans les divers documents obtenus, des données qui se rapprochent de chaque indicateur biophysique. Je vais les présenter et les analyser ci-dessous. Ensuite, je proposerai des indicateurs plus appropriés aux possibilités de suivi de l'AMP de Joal-Fadiouth. Par ailleurs, je formulerai des recommandations pour rendre les données qui sont collectées à Joal-Fadiouth plus adéquates pour développer un suivi à long terme de l'efficacité de la gestion de l'AMP.

V.4.1. Evaluation et adaptation des indicateurs du guide de l'UICN

? Indic. B1 : Abondance des espèces focales

J'ai obtenu des données d'abondance sur des espèces capturées par pêche expérimentale, sur une espèce particulièrement vulnérable qui est la tortue marine et enfin sur les espèces d'oiseaux d'eau. En plus de concerner des espèces très différentes, ces trois séries de données ont été obtenues par des méthodes distinctes. Je vais donc directement scinder cet indicateur en trois indicateurs, provisoirement nommés: "Abondance des espèces capturées par pêche expérimentale", "Abondance de la tortue marine" et "Abondance des espèces d'oiseaux d'eau".

- Indic. B1.1 : Abondance des espèces capturées par pêche expérimentale Données disponibles

Un inventaire des ressources halieutiques a été réalisé par le Centre de Recherches Océanographiques de Dakar-Thiaroye (CRODT) en novembre 2006 afin de déterminer l'état de référence. Trois stations dans l'AMP ont été échantillonnées par pêche expérimentale : "Ngazobil", "Fadiouth" et "la Côtière". Pour chaque station trois prélèvements ont été effectués, ce qui conduit à trois prélèvements le long de la limite Nord de l'AMP, trois le long de la limite Sud et trois au centre, de la plage vers le large. L'engin qui a été utilisé est une senne de plage de 12 mm de maillage. Les espèces capturées ont été répertoriées ainsi que le

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poids total pour chaque espèce par station. Les résultats sont disponibles dans le plan de gestion de l'AMP (Sène, 2008) et consultables en annexe VII.

Analyse des données

36 espèces ont été répertoriées. Parmi celles-ci se trouve 31 espèces de poissons, 2 espèces de crustacés (Penaeus notialis et Portunus validus), 1 gastéropode (Cymbium glans), 1 céphalopode (Sepia officinalis hierredda) et 1 hippocampe (Hemiramphus brasiliensis).

Les 5 espèces les plus importantes en termes de poids sont Mugil cephalus (19,1 kg au total pour les trois stations), Penaeus notialis (17 kg), Hemiramphus brasiliensis (14,85 kg), Gerres melanopterus (11,8 kg) et Sepia officinalis hierredda (9,8 kg)

Les captures totales par station sont similaires entre "La Côtière" et "Ngazobil" (36,85 kg et 37,75 kg respectivement) et est un peu plus importante à Fadiouth (44,95 kg). Le nombre d'espèces rencontrées dans chaque station est pratiquement identique : 20 à la "Côtière", 19 à "Fadiouth" et 21 à "Nagazobil". Notons que 9 espèces sont rencontrées dans les trois stations et 6 dans 2 stations. Les 21 espèces restantes ne sont donc rencontrées que dans une seule station.

Un second inventaire a été effectué en avril 2009. Les résultats ne sont pas encore disponibles mais, puisqu'il a été réalisé en avril et étant données les variations saisonnières, nous ne pourrons pas comparer ces nouvelles données aux résultats précédents.

Nouvelle proposition d'indicateur

Deux indicateurs peuvent être imaginés : un indicateur qui évalue l'abondance d'un maximum d'espèces, comme a tenté de le faire l'étude du CRODT21 et un indicateur qui se focalise sur certaines espèces particulières tel que recommandé dans le guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006). Tous deux répondent à des objectifs quelque peu divergents ; je vais les détailler ci-dessous.

La protection de la biodiversité étant l'un des objectifs principaux de l'AMP de Joal-Fadiouth, il parait intéressant de suivre l'évolution d'un maximum d'espèces différentes. A ce titre, l'indicateur "Composition et structure de la communauté" (indicateur B4, présenté section II.1.) serait très intéressant puisqu'il répertorie tous les êtres vivants sur le site échantillonné mais il nécessite un investissement en temps et en personnel très important. Il

21 Il ne s'agit bien sûr pas d'un inventaire exhaustif des ressources halieutiques de l'AMP puisque, d'une part, la méthode de prise n'est pas adaptée à la capture de toutes les espèces présentes dans l'AMP et d'autre part, certaines espèces ne sont présentes que durant certaines périodes de l'année.

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parait donc opportun de retenir un indicateur tel que "abondance et biodiversité des espèces halieutiques" qui allie mesure de l'abondance et de la biodiversité sans toutefois nécessiter une évaluation de la composition de toute la communauté. Les données pourront alors être collectées par pêche expérimentale comme l'a effectué le CRODT.

Le guide de l'UICN (Pomeroy et al., 2006) recommande d'établir une liste des espèces focales avant de collecter les données. Nous pourrions décider de suivre plus particulièrement des espèces locales qui se reproduisent ou se développent dans l'AMP, ce qui renseignerait plus spécifiquement sur l'efficacité de l'AMP. Un indicateur de ce type serait "abondance d'espèces locales". Les données pour cet indicateur peuvent être soutirées des données collectées pour l'indicateur présenté dans le paragraphe précédent.

Recommandation pour une méthode de suivi

Afin de démarrer un suivi des ressources halieutiques, il serait nécessaire de réaliser les mesures chaque année ou tous les deux ans, plus ou moins les mêmes jours de l'année et dans des conditions hydro-climatiques similaires. Les lieux de collecte ainsi que la technique utilisée devront être rigoureusement identiques (filet de même maille, de même longueur, même durée de mise à l'eau des filets, etc.). Il est recommandé de réaliser au minimum une mesure durant la saison sèche et une durant la saison des pluies car certaines espèces migratrices ne sont présentes que durant une partie de l'année.

Le suivi des ressources halieutiques permettra de surveiller l'apparition ou la disparition de certaines espèces ainsi que l'évolution dans le temps des quantités totales prélevées, des quantités pour chaque espèce et de l'abondance relative des espèces. On pourra en effet se demander si certaines espèces se développent plus ou moins que d'autre et porter une attention particulière aux espèces locales dont l'évolution dépend plus de l'efficacité de l'AMP et moins de facteurs extérieurs contrairement aux espèces migratrices.

Il serait aussi intéressant d'effectuer les mêmes prélèvements dans les eaux voisines de l'AMP. Cela permettrait de mettre en évidence un éventuel effet réserve, ce qui correspond à un bénéfice direct pour les pêcheurs et assurerait leur soutien à l'AMP. Par ailleurs, puisque les 3 stations semblent assez différentes du point de vue des espèces capturées, il pourrait être intéressant de réaliser un inventaire des habitats dans ces mêmes stations. On pourrait ainsi peut être corréler les espèces rencontrées avec des habitats particuliers.

98

? Indic B1.2 : Abondance de la tortue marine Données disponibles

Lors de la campagne de suivi des tortues marines de 2007, 12 nids ont été découverts : 9 à Finio et 3 à Ngazobil. Sur ces 12 nids, 5 ont été submergés pas de grandes marées et un détruit par un varan du nil. 7 nids ont donc éclos et 517 petits ont été lâchés à la mer.

Lors de la seconde campagne, en 2008, aucun nid n'a été découvert. Il n'y aurait pas eu de remontés de tortues cette année là, les tortues marines ne se reproduisant pas chaque année.

Nouvelle proposition d'indicateur

La plage de Joal étant une zone de ponte pour les tortues marines, le relevé du nombre de nids parait être la méthode la plus appropriée pour un suivi régulier de l'évolution de la population des tortues marines dans l'AMP. De plus, cette campagne allie suivi des tortues et protection des pontes. L'indicateur à retenir serait donc "Nombre de nids et de naissances de tortues marines".

? Indic B1.3 : Abondance des espèces d'oiseaux d'eau Données disponibles

Tous les mois, un recensement des oiseaux d'eau est effectué par les agents de la DPN ; les oiseaux sont identifiés et comptés. Ces données sont disponibles dans les rapports d'activités de la DPN (DPN, 2007 et 2008).

Un tableau recensant les différentes espèces d'oiseaux d'eau présentes dans l'AMP en 2007-2008 est présenté en annexe VIII.

Analyse des données

La faune aviaire de l'AMP de Joal-Fadiouth est très riche : 59 espèces d'oiseaux d'eau ont été recensées en 2007 et 61 en 2008, avec un total pour les deux années de 69 espèces différentes. Une observation plus détaillée du tableau (voir annexe VIII.), nous apprend que 8 espèces qui étaient présentes en 2007 ne l'étaient plus en 2008 mais, que, à l'inverse, 10 espèces absentes en 2007 ont été observées en 2008. Pourtant, le suivi aviaire n'a pas été effectué les 4 derniers mois de cette deuxième année, ce qui peut expliquer l'absence de certaines espèces tel que les Milans dans le relevé de cette année. En effet, le Milan noir et le

99

Milan royal, en 2007, n'ont été observés qu'au mois de novembre. Finalement, il semble que la diversité aviaire a plutôt tendance à augmenter dans l'AMP de Joal-Fadiouth.

Fig.15 : graphique du nombre d'oiseaux d'eau relevé lors des suivis mensuels de 2007 et 2008.

En ce qui concerne l'abondance de l'avifaune, étant donné le nombre élevé d'espèces d'oiseaux d'eau différentes recensées, nous nous contenterons d'examiner le nombre total d'individus, toutes espèces confondues, relevé lors de chaque mission de suivi (fig.15). Le suivi n'ayant pas été réalisé de septembre à décembre 2008, nous devrons nous contenter de comparer le 8 premiers mois de l'année. On remarque que le nombre d'individus observés en 2008 est plus important qu'en 2007 pour chaque mois, excepté le mois de juillet. Sur ces 8 mois, le nombre total d'individus observés est de 29 015 en 2007 contre 57 192 en 2008. Le nombre total d'oiseaux d'eau a donc presque doublé en un an. Cette extraordinaire augmentation a été remarquée par certains habitants de Joal-Fadiouth. Ceux-ci l'imputent à une augmentation de la quantité de poissons dans l'AMP. Les oiseaux d'eau se nourrissant d'espèces aquatiques, cette hypothèse est tout à fait envisageable. Cependant, nous ne disposons pas encore de données qui permettraient de démontrer une augmentation de l'abondance des espèces aquatiques dans l'AMP. Par ailleurs, cette augmentation est peut être due simplement à une diminution des activités susceptibles de déranger les oiseaux puisque le règlement intérieur de l'AMP les interdit formellement22. La gestion de l'AMP apparait donc très efficace pour la protection et le développement des oiseaux d'eau.

22 Le règlement intérieur de l'AMP stipule qu'"il est formellement interdit de mener toute activité de nature à perturber les équilibres écologiques des écosystèmes ou qui dérangent gravement la faune aquatique et aviaire." (article 3) ; celui-ci précise également qu'"il est formellement interdit de piéger, de capturer et de vendre les oiseaux d'eau et autres oiseaux protégés par les textes en vigueur dans l'emprise de l'AMP" (article 6) et que "sont rigoureusement interdits le ramassage, la collecte, la destruction d'oeufs de tortues marines et des oiseaux et de leur nid" (article 8)

100

Nouvelle proposition d'indicateur

La technique de collecte des données qui est utilisée par les agents de la DPN est le comptage des individus observés, in situ, le long d'un parcours prédéfini. Toutes les espèces d'oiseaux d'eau ont été répertoriées. Les données permettent donc une analyse de l'abondance et de la diversité des oiseaux d'eau telle que nous l'avons réalisée ci-dessus. Il est également possible de suivre l'évolution de l'abondance de chaque espèce individuellement. Ces données pourraient être regroupées sous un indicateur "Composition et abondance des oiseaux d'eau".

Recommandation pour une méthode de suivi

La méthode de suivi parait tout à fait appropriée et révèle déjà des résultats très encourageants.

Notons que parmi ces espèces un bon nombre sont des espèces protégées, une attention particulière devrait être portée à leur évolution.

101

? Indic. B2 : Structure des populations d'espèces focales Données disponibles

Durant la campagne du CRODT de 2006, la longueur totale (LT) à également été relevée pour les individus de certaines espèces. Les graphiques de distribution des fréquences de taille sont présentés pour deux espèces de chaque station aux figures 16, 17 et 18.

LT adulte = 55 cm

Demi-bec brésilien

20

15

10

5

0

20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40

Hemiramphus brasiliensis

Longueur totale (cm)

Médiane = 29 cm

LT adulte = 50cm

Thiekem

15

10

5

0

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20

Galeoides decadactylus

Longueur totale (cm)

Médiane = 13 cm

Fig.16 : distribution des fréquences de taille de Hemiramphus brasiliensis et de Galeoides decadactylus à la station "Ngazobil" (Sène, 2008)

LT = Longueur Totale

Mugil cephalus

LT adulte = 60 cm

15

10

5

0

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

Mulet à grosse tête

Longueur totale (cm)

Médiane = 19 cm

Longueur totale (cm)

Médiane = 17 cm

10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30

8

Tilapia

Carpe

LT adulte = 26 cm

6

4

2

0

102

Fig.17 : distribution des fréquences de taille de Tilapia et de Mugil cephalus à la station "la Côtière" (Sène, 2008)

LT = Longueur Totale

Longueur totale (cm)

Médiane = 12 cm

Pomadasys jubelini

Dorade grise

LT adulte = 60 cm

5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20

15

10

5

0

Mulet à grosse tête

Mugil cephalus

LT adulte = 60 cm

Longueur totale (cm)

Médiane = 15 cm

5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25

20

15

10

5

0

Fig.18 : distribution des fréquences de taille de Pomadasys jubelini et de Mugil cephalus à la station "Fadiouth" (Sène, 2008)

LT = Longueur Totale

103

Analyse des données

Les distributions des fréquences de taille obtenues comparées à la LT adulte montrent, pour chaque espèce, que les individus capturés sont de très petite taille. Par exemple, les Galeoides decadactylus adultes ont une LT de 50 cm alors que la médiane calculée pour les LT des individus capturés est de 13 cm. Il en est de même pour les 8 espèces ; la médiane obtenue est toujours largement inférieure à la LT adulte.

Cette distribution des fréquences de taille traduit le caractère juvénile des individus de ces espèces à l'intérieur de l'AMP. Ceci montre que l'AMP de Joal-Fadiouth est un lieu de développement pour les juvéniles de plusieurs espèces et probablement un lieu de frayère. Cependant, plusieurs raisons peuvent expliquer l'absence totale d'adulte : soit nous ne sommes pas en période de ponte et ceux-ci ont migré vers d'autres zones, soit l'exploitation par l'homme ne laisse le temps qu'à très peu d'entre eux d'atteindre l'âge adulte.

Proposition d'indicateur

Les données disponibles correspondent à l'indicateur B2. Nous pouvons le maintenir comme indicateur de suivi de la gestion de l'AMP de Joal-Fadiouth.

Recommandation pour une méthode de suivi

La méthode de suivi semble appropriée. Toutefois, on peut se demander comment ont été choisies les espèces pour lesquelles les tailles ont été mesurées. Il serait intéressant de se focaliser sur certaines espèces cibles ou particulièrement vulnérables.

Des connaissances approfondies sur le mode de vie de ces espèces devraient permettre une meilleure interprétation des résultats. Par ailleurs, l'évolution de la répartition des individus par classe de taille au cours du temps permettra d'observer d'éventuels changements dans la structure des populations et d'estimer le taux de croissance de la population.

? Indic. B3 : Répartition et complexité de l'habitat Données disponibles

Une étude réalisée par Diouf en 2003 a permis d'obtenir des données de superficie de mangrove sur base de photos aériennes de 1954, 1978 et 1997. Ces données figurent dans le plan de gestion 2009-2013 de l'AMP.

104

Trois zones majeures, représentées à la figure 3, ont été déterminées par Diouf (2003) :

- Une zone centrale B (appelée mangrove des cimetières) représentant la zone des amas coquillers de Diotio, Facao et Fassanda ;

- Une zone A (mangrove de Joal) située au Nord de la piste de Fadial ;

- Une zone C (mangrove de Fadiouth) au Sud du Chenal de Diotio.

Fig.19 : Zonation par secteur de la mangrove de la lagune de Joal-Fadiouth (Diouf, 2003)

Les superficies de mangrove de ces différentes zones sont représentées figure 20.

Fig.20 : Histogramme des estimations des superficies de mangrove par zone pour les années 1954, 1978 et 1997 (Diouf, 2003)

105

Analyse des données

La zone C est visiblement la plus importante en termes de surface (fig.19). On remarque, sur le graphique de la figure 20, que la superficie totale a diminué entre 1954 et 1997 ; elle est passée de 424,72 hectares à 403,26 hectares. Deux causes peuvent être imputées à cette diminution de surface : les variabilités climatiques - plus particulièrement les périodes de grande sécheresse - et l'impact anthropique à travers l'exploitation du bois. La zone B, contrairement au zone A et C, a une superficie plus importante en 1997 (54,18 ha) qu'en 1954 (51,49 ha). Si la zone B est mieux conservée que les autres zones, cela est probablement dû à des considérations culturelles (mangrove des cimetières). Néanmoins, on remarque également une diminution de la superficie de la mangrove dans la zone B entre 1978 et 1997.

Proposition d'indicateur

La mangrove constitue un habitat particulier propice au développement de nombreuses espèces aquatiques. Elle est, en effet, considérée comme une zone de frayère et de nourrissage primordiale pour de nombreuses espèces de poissons et de mollusques ; d'où l'importance de suivre son évolution.

Les données recueillies correspondent donc à la répartition d'un habitat, la mangrove. L'indicateur B3 suggère de caractériser tous les types d'habitats rencontrés dans l'AMP ou du moins une grande proportion. En attendant qu'un tel travail puisse être réalisé au niveau de l'AMP de Joal-Fadiouth, le suivi d'un habitat essentiel tel que la mangrove est primordial. Ainsi nous pourrions retenir un indicateur du type : "répartition de la mangrove".

Recommandation pour une méthode de suivi

Des données plus récentes sur les superficies de mangrove permettraient d'évaluer l'impact des mesures de protection (AMP, campagnes de reboisement) sur son évolution. D'après une étude de Dièye (2007) la mangrove réapparaitrait progressivement en bordure des bolongs entre 1988 et 2005. Ces observations devraient être confirmées par des données chiffrées.

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? Indic. B4 : Composition et structure de la communauté

L'évaluation de cet indicateur est particulièrement fastidieuse puisqu'elle nécessite l'observation de tous les êtres vivants du site échantillonné. Des données de ce type n'ont encore jamais été recueillies pour l'AMP de Joal-Fadiouth. Cependant, un relevé de tous les végétaux présents dans la réserve communautaire de Ngazobil a été effectué. Notons que la réserve communautaire de Ngazobil ne fait juridiquement pas partie de l'AMP de Joal-Fadiouth mais elle se situe juste à limite de celle-ci et elle est représentée dans le comité de gestion de l'AMP.

Données disponibles

Une synthèse des végétaux de Ngazobil se trouve dans le rapport annuel d'activité 2008 de la DPN, il est repris en annexe IX.

Analyse des données

97 espèces différentes, répartie sur 40 familles, ont été répertoriées dans la réserve communautaire de Ngazobil. La diversité végétale est donc extrêmement importante en ce lieu.

Proposition d'indicateur

La conservation de la biodiversité étant un objectif phare de l'AMP, le suivi de la diversité végétale semble tout à fait approprié. On pourrait ainsi nommer un indicateur "Composition végétale de la réserve communautaire de Ngazobil". Ces informations pourraient éventuellement être complétées par une évaluation de l'abondance relative.

Recommandation pour une méthode de suivi

Un relevé de ce type effectué tous les ans à tous les trois ans permettrait de surveiller la disparition ou l'apparition d'espèces. Une attention particulière devra être apportée à l'apparition de nouvelles espèces car elles sont susceptibles d'avoir un effet négatif sur la flore endémique particulièrement s'il s'agit d'espèces invasives.

Avec, en plus, des informations sur l'abondance relative, il serait possible de surveiller l'évolution relative de chaque espèce et de prévenir une éventuelle prolifération excessive ou raréfaction de certaines espèces.

107

? Indic B7 : Type, niveau et rentabilité de l'effort de pêche Données disponibles

Au poste de contrôle du quai de pêche de Joal-Fadiouth, j'ai pu obtenir les "résultats généraux des mises à terre" des années 2000 à 2008. Ces résultats comprennent des données sur l'armement piroguier (pirogues locales/étrangères), les mises à terre (tonnage débarqué, valeur commerciale estimée, consommation locale), la transformation artisanale et le carburant consommé. Un tableau récapitulatif des données pour chaque année se trouve en annexe X.

Analyse des données

A

B

C

 

Fig.21 : évolution des "résultats généraux des mises à terre" de 2000 à 2008

A : graphique du tonnage débarqué par année (avec courbe de tendance en rouge)

B : graphique de l'effectif piroguier moyen par année

C : graphique du tonnage capturé par pirogue

 

Le tonnage total débarqué oscille autour des 150 000 tonnes par an (fig.21A). De manière globale, il a tendance à diminuer au cours du temps. Depuis 2000, la valeur la plus faible enregistrée est celle de l'année 2008 avec un tonnage de 131 657 tonnes alors que la plus importante est de 172 210 tonnes en 2001.

108

En ce qui concerne l'effectif piroguier (fig.21B), il a fortement augmenté entre 2001 et 2003 ; il est passé de 498 à 774 pirogues. Ensuite, celui-ci diminue jusqu'en 2005 pour atteindre 575 pirogues. Les 3 années qui suivent, le nombre de pirogues reste stable, au alentour des 600.

On pourrait s'attendre à une augmentation des captures lorsque l'effectif piroguier augmente entre 2001 et 2003. Or, particulièrement en 2002 mais également en 2003 les captures sont inférieures à celle de 2001. L'augmentation du nombre de pêcheurs n'entraine pas une augmentation globale des captures, ce qui signifierait que le niveau maximum d'exploitation des ressources est globalement atteint dans les années 2000.

Le graphique C (fig.21) semble confirmer cette hypothèse. Nous remarquons une chute des captures par pirogue entre 2001 et 2002 lorsque l'effectif piroguier commence à grimper. Cette observation semble traduire un problème de surcapacité de pêche, ce qui confirmerait que le niveau maximum d'exploitation soit atteint en 2001.

La diminution de l'effectif piroguier entre 2003 et 2005 est probablement due à la diminution importante des captures par pirogue observée en 2002, elle-même due, comme nous venons de le voir, à l'augmentation du nombre de pirogue entre 2001 et 2003.

Ces 4 dernières années, les valeurs observées sur les 4 graphiques sont relativement plus stables mais en 2008 l'effectif piroguier est toujours supérieur à celui de 2000 alors que le tonnage débarqué est le plus faible jamais observé depuis 2000.

En bref, il semble que le niveau maximum d'exploitation soit largement atteint. Malgré la présence de l'AMP de Joal-Fadiouth, aucun signe flagrant d'amélioration n'est visible sur ces graphiques. Si les quantités totales débarquées continuent de diminuer alors que l'effectif piroguier reste stable, cela signifiera que le niveau maximum d'exploitation est globalement bel et bien dépassé et que les ressources s'épuisent progressivement.

Notons, néanmoins, qu'il s'agit d'un constat global et qu'il est possible que certaines espèces soient tout de même en augmentation mais masquées par de fortes diminutions des stocks d'autres espèces. Comme nous l'avons discuté au niveau de l'indicateur Socio-éco. 3 (§V.3), l'AMP peut difficilement avoir beaucoup d'impacts sur les espèces migratrices et surexploitées ailleurs dans le monde. Ainsi, si on veut évaluer l'effet de l'AMP spécifiquement, il serait plus pertinent d'évaluer l'évolution des quantités de certaines espèces locales et qui se reproduisent ou se développent dans l'AMP.

109

Proposition d'indicateur

Les données disponibles ne permettent pas une évaluation aussi poussée que ce que recommande l'indicateur du Guide de l'UICN (Pomeroy et al. 2006). Nous ne disposons pas de données sur les technologies et sur le temps consacré à la pêche et encore moins pour chaque espèce séparément. L'analyse combinée du tonnage débarqué total et de l'effectif piroguier peut déjà fournir un bon aperçu de la situation globale de la pêche. A partir des données disponibles au poste de contrôle du quai de pêche de Joal-Fadiouth, on peut imaginer un indicateur simple et précis du type : "Analyse globale du tonnage débarqué et de l'effectif piroguier". Au poste de contrôle, il existe aussi des données de tonnage débarqué par espèce par mois. Afin d'évaluer plus spécifiquement l'efficacité de l'AMP, on pourrait utiliser les données concernant certaines espèces locales et analyser l'évolution des quantités débarquées de ces espèces par année. Cet indicateur s'appellerait '"Evolution des tonnages débarqués des espèces locales".

Recommandation pour une méthode de suivi

La collecte des données nécessaires à l'évaluation de cet indicateur est effectuée systématiquement tous les mois par les agents du service des pêches de Joal, ce qui est très positif. Un traitement des données similaire à celui effectué ci-dessus devrait également être effectué chaque année.

? Indic. B8 : Qualité de l'eau Données disponibles

Divers paramètres physico-chimiques ont été mesurés à l'occasion de l'état de référence de novembre 2006 par le CRODT. Il s'agit de la température, la salinité, l'oxygène dissous, le pH, la chlorophylle totale et la turbidité. Les résultats sont repris dans le plan de gestion 2009-2013 de l'AMP de Joal-Fadiouth (Sène, 2008).

Analyse des données

- Température (°C)

Les températures mesurées sont d'environ 30°C avec une légère diminution en fonction de la profondeur. Les eaux sont chaudes, ce qui est caractéristique du mois de novembre (début de la période de transition vers la saison froide).

- Salinité (g/l de Na Cl - %o)

110

Le taux de salinité varie entre 34 et 35 %o. Les eaux de surface sont moins salées au niveau de la côte qu'au large.

- Oxygène dissous (% de saturation)

Les valeurs en oxygène dissous sont en moyenne de 65% et décroissent de la surface vers le fond

- Chlorophylle totale (ug/l)

La quantité de chlorophylle totale moyenne est de 8 ug/l, les concentrations les plus élevée étant observée au fond (9ug/l). Ces valeurs sont élevées pour la saison (Sène, 2008).

- pH

Le pH est situé entre 8 et 8,5 mais aucune tendance n'est observée sur le plan vertical ou horizontal

- Turbidité (ppm)

La turbidité décroit vers le large et en profondeur. Les valeurs se situées entre 6 et 7 ppm, ce qui est assez faible.

Proposition d'indicateur

Toute variation inhabituelle d'un paramètre physico-chimique est susceptible de constituer un facteur limitant des processus biologiques des êtres vivants. Des variations dans la qualité de l'eau peuvent donc entrainer la disparition ou l'apparition d'espèces dans la zone étudiée. Il est donc important de suivre l'évolution des paramètres physico-chimiques de l'eau mais aussi de mesurer la charge nutritive, la densité de toxines ou de bactéries à travers un indicateur tel que "la qualité de l'eau".

Recommandation pour une méthode de suivi

Les paramètres physico-chimiques de l'eau varient en fonction de la période de l'année, d'où l'importance d'effectuer des relevés à des périodes fixes de l'année et plusieurs fois par an. Il serait intéressant également de mesurer plusieurs fois par an la charge nutritive, la densité en toxines et en bactéries - ces deux dernières pouvant permettre de déceler une pollution anthropique à proximité de l'AMP.

Ces données pourraient être facilement récoltées plusieurs fois par an car elles ne nécessitent pas d'investissement important en temps et en personnel. Cependant, un investissement important en matériel devra être réalisé au départ.

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? Indic. B9 : Zones présentant des signes de rétablissement Données disponibles

Cet indicateur nécessite d'avoir préalablement défini des "seuils de rétablissement". Le plan de gestion définit, en lien avec des objectifs, des cibles. Les cibles qui concernent la conservation des habitats et des espèces pourraient être assimilées à des seuils de rétablissement. Notons néanmoins que les cibles pourront être révisées avec le plan de gestion, il s'agit donc plutôt de seuil provisoire à viser pour se rapprocher d'un "état de rétablissement".

Ces cibles sont (Sène, 2008) :

1) L'augmentation de la biodiversité spécifique et de la biomasse des espèces marines de 20 à 30 % de la situation de référence

2) Le reboisement de 10 à 20 % de la superficie de mangrove

3) L'augmentation du recrutement des tortues marines de 10 à 20%

Analyse des données

Ces seuils devraient aider à l'analyse des résultats de certains indicateurs. Ainsi, on pourra évaluer l'indicateur "Abondance et biodiversité des espèces halieutiques" en considérant que l'objectif de conservation des espèces marines sera atteint lorsqu'on recensera 20 à 30% d'espèces en plus et une biomasse également supérieur de 20 à 30%. De même en ce qui concerne l'indicateur "Répartition de la mangrove" (objectifs de reboisement de 10 à 20%) et "Nombre de nids et de naissances de tortues marines" (objectif d'augmentation du nombre de nid de 10 à 20%).

Proposition d'indicateur et recommandation pour une méthode de suivi

L'indicateur "Zones présentant des signes de rétablissement" est un outil intéressant pour analyser d'autres indicateurs mais il faudra garder à l'esprit qu'il s'agit de seuils très subjectifs et susceptibles d'être modifiés en fonction, par exemple, de nouvelles données scientifiques.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon