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à‰tude des facteurs de dégradation de la forêt communautaire de Kandia dans le département de Vélingara et stratégie de gestion.

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par Moussa Mamadou BALDE
Gaston Berger de Saint-Louis (Sénégal) - Master 2 2012
  

Disponible en mode multipage

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    ANNEE ACADEMIQUE

    201/2013

    0

    UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT LOUIS
    UFR DE LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
    SECTION DE GEOGRAPHIE
    Parcours : Écosystèmes et Environnement

    Études des facteurs de dégradation de la forêt communautaire de Kandia dans le département de Vélingara et stratégies de gestion

    Mémoire de Master 2

    Présenté par : Sous la direction de

    M. Moussa Mamadou BALDE M. Boubou Aldiouma SY

    Maitre de conférences

    1

    Dédicace

    Je dédie ce modeste et premier travail universitaire à :

    A ma mère Khady MBALLO

    A mon père Mamadou BALDE

    A ma chère épouse Ramatoulaye plus connue sous le nom de Diouldé BALDE

    A tous mes frères et soeurs : Demba BALDE, Ibrahima BALDE, Maodo BALDE, Maimouna BALDE, Awa BALDE, Salimatou BALDE

    A toute ma famille ainsi que mes amis et camarades qui m'ont apporté leur soutien dans cette entreprise difficile.

    2

    Remerciements

    Tout d'abord, je tiens à exprimer toute ma gratitude au professeur Boubou Aldiouma Sy qui a bien voulu accepter de diriger ce travail d'étude et de recherche. Il a toujours été disponible pour les étudiants de la section de géographie. C'est aussi un homme très dynamique, ambitieux, modeste et pragmatique. C'est ce qui fait de lui un modèle pour les jeunes chercheurs que nous aspirons à devenir.

    Je n'oublie pas également monsieur Abou SY qui nous a été d'un précieux appui en termes de conseils et d'orientation dans ce travail depuis le mémoire de master1

    Je voudrai remercier ici certaines personnes qui me tiennent à coeur et qui ont contribué à la réalisation de ce document

    A Monsieur Ibra LO qui a financé ma descente sur le terrain

    A Monsieur Souleymane Dia qui a accepté de me recueillir des données au niveau de la direction de la météorologie nationale

    A Monsieur Pape Ali CISSE, sans son appui, mes traitements cartographiques seraient difficiles.

    A Monsieur Aliou CISSE pour la documentation et les conseils prodigués

    A Monsieur Amar DIAW pour son soutien moral et intellectuel ainsi qu'à Modou Mbaye

    3

    Sommaire

    Introduction générale

    ...8

    Première partie : Cadre théorique, opératoire et méthodologique

    .12

    Chapitre 1 : Le Cadre théorique

    ..14

    Chapitre 2 : Le Cadre opératoire 20

    Chapitre 3 : Le Cadre méthodologique 26

    Deuxième partie : Analyse des facteurs de dégradation du couvert végétal et des stratégies de

    gestion

    ..35

    Chapitre 4 : Les facteurs physiques

    37

    Conclusion partielle

    57

    Chapitre 5 : Les facteurs anthropiques, principale cause de la dégradation

    .58

    Chapitre 6 : Les actions menées au nom de la gestion de la dégradation du massif

    forestier

    .83

    Conclusion générale

    98

    Bibliographie

    101

    4

    Avant-propos

    La dégradation des ressources naturelles est l'un des défis majeur pour l'avenir de la planète. Dans cette dynamique globale de régression des ressources, les formations forestières de la communauté rurale de Kandia située dans le département de Vélingara sont particulièrement exposées. La surexploitation des ressources et la péjoration des conditions climatiques sont souvent citées comme étant les principaux facteurs responsables de cette dégradation.

    Ainsi, la forêt de Kandia entourée par des villages polarisant un poids démographique important connait un état de dégradation avancé. C'est ce constat alarmant qui justifie l'intérêt porté à la question de la dégradation du couvert végétal dans cette partie de la C.R de Kandia dans le cadre de ce mémoire de master 2. L'objectif est d'analyser les principaux facteurs qui sont à l'origine du recul du couvert végétal et d'examiner les différentes actions mises en oeuvre pour gérer ce processus de dégradation à travers une démarche méthodologique. Enfin, il s'agira de poser quelques pistes de réflexion en se basant sur des travaux déjà réalisés dans le cadre de la gestion des ressources naturelles. C'est ce qui constitue l'essentiel de ce travail mené dans la forêt communautaire de Kandia en collaboration des autorités locales et des populations.

    5

    Liste des sigles et acronymes

    A.N.A.M.S : Agence Nationale de la Météorologie du Sénégal

    CILSS : Comité Inter-Etats de Lutte Contre la Sécheresse au Sahel

    C.R: Communauté Rurale ou Conseil Rural

    C.S.E: Centre de Suivi Écologique

    D.E.F.C.C.S : Direction des Eaux, Forêts, Chasse et la conservation des sols

    D.R.P.F : Direction recherche et production forestière

    G.C.R.N : Gestion communautaire des ressources naturelles

    I.S.R.A : Institut sénégalais de recherche agronomique

    L.S.H : Lettres et Sciences Humaines

    M.E.P.N : Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature

    O.M.M : Organisation Météorologique Mondiale

    PADERBA : Projet d'appui au développement rural du bassin de l'Anambé

    P.A.E.R : Plan d'Action Environnementale Régional

    P.E.R.A.C.O.D : Programme de promotion des énergies renouvelables, de l'électrification

    rurale et de l'approvisionnement en combustibles domestiques

    P.L.D: Plan Local de Développement.

    PROGEDE : Programme de Gestion Durable et Participative des Énergies Traditionnelles et

    de Substitution.

    SODAGRI : Société de Développement Agricole SODEFITEX : Société de Développement des Fibres Textiles

    U.C.A.D: Université Cheikh Anta Diop de Dakar U.F.R : Unité de Formation et de Recherche

    U.G.B: Université Gaston Berger de Saint-Louis.

    6

    Introduction générale

    7

    Contexte

    Les questions environnementales constituent l'un des défis majeurs en ce début de 21e siècle. En effet, face à une croissance démographique importante, à une dégradation des ressources et à des conflits qui semblent eux-mêmes se multiplier, l'enjeu d'une gestion durable des terres et des ressources naturelles est l'objet de préoccupations croissantes (Lavigne, 2001).Plusieurs études ont fait état d'un processus de dégradation avancée des ressources naturelles, entrainant une fragilisation des écosystèmes (Rochette1989, Sow 1990, Di Méo 1998). Selon le rapport sur l'état de l'environnement au Sénégal (MEPN, 2005) « l'observation de l'état des ressources naturelles du Sénégal montre une situation critique qui résulte de la dégradation des terres de façon générale qui affecte 65% de la superficie du pays. Cette dégradation définie parfois une baisse temporaire ou permanente de la productivité des terres, est un processus complexe dont les manifestations se confondent facilement aux causes ».

    En effet l'essentiel de l'énergie consommée au Sénégal provient de l'exploitation des ressources ligneuses (54%), les produits pétroliers (40%) et les autres sources d'énergie occupent une place limitée (rapport du Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature 2004). Une autre étude faite par Enda Pronat Environnement et développement du tiers monde en 2000 faisait état d'une consommation annuelle de combustibles ligneux de l'ordre de 3,5millions de m3 d'équivalent rondin (environ 1,3millions de tonnes équivalent pétrole).Ce chiffre représente approximativement 94% de l'énergie domestique consommée par les ménages et 54% de la consommation nationale d'énergie. Or selon la même source, le potentiel ligneux accessible n'est que de 3,1millions de m3. Il en résulte un déficit important de l'ordre de 0,4 millions de m3 qui risque de s'aggraver si le rythme actuel d'exploitation de ces ressources est maintenu. Selon des indications de la DRPF/ISRA en 2002 (cité par CISSE A., 2008), le rythme de déboisement annuel au Sénégal pour l'utilisation du bois de combustibles est deux fois plus élevé que la reforestation. Il en résulte alors des impacts considérables sur les systèmes de production agricole et pastorale. Cette exploitation est exacerbée de plus en plus par une croissance démographique soutenue entrainant une forte pression sur les ressources forestières. Ajoutons que le document sur la Politique forestière du Sénégal, se basant sur une étude prospective du secteur forestier à l'horizon 2020 estime que prés de 8 millions de m3 de bois sont prélevés annuellement sur les formations ligneuses du pays pour la fourniture de combustibles domestiques. En outre, cette étude révèle une nette prépondérance du bois de feu (64,5%) dans l'énergie globale consommée au niveau national

    8

    contre 11,5% pour l'électricité et 24% pour les combustibles dérivés du pétrole. Cette prépondérance du bois et du charbon de bois au niveau de l'énergie primaire donne une juste mesure de l'importance des actions anthropiques dans l'exploitation des ressources forestières.

    En fait, la transformation du bois en charbon de bois pour l'approvisionnement des centres urbains avec les techniques de carbonisation utilisant la meule traditionnelle au détriment de la meule casamançaise, accentue la dégradation des ressources forestières. En effet, il faut 5,5 kg de bois en moyenne pour fabriquer un kg de charbon de bois d'où un rendement énergétique faible. Les principaux consommateurs sont les ménages dont l'approvisionnement en énergie dépend encore à 90% des combustibles ligneux.

    Il faut dire que les ressources forestières constituent une des sources principales d'approvisionnement des populations aussi bien qu'en produits alimentaires qu'en ressources énergétiques. Cependant, depuis quelques décennies, elles sont confrontées à une surexploitation mais aussi à une dégradation continue du fait de plusieurs facteurs (Politique forestière du Sénégal, 2005).

    D'après le même document, la dégradation des ressources naturelles et l'acuité du phénomène de désertification contribuent à l'appauvrissement des populations aussi bien en milieu rural qu'en milieu urbain. Et face à cette situation, ces dernières ont développé des stratégies de survie qui les poussent à surexploiter les ressources forestières de leurs localités

    Ainsi, la région de Kolda, caractérisée par une abondance relative de ressources végétales est devenue l'une des principales productrices du pays en charbon de bois. Cette forte pression sur les ressources est à l'origine d'une dégradation avancée du couvert végétal.

    Notons que les produits forestiers constituent un enjeu économique de taille en ce sens que, traditionnellement utilisés pour la satisfaction des besoins alimentaires, ils ont acquis aujourd'hui une valeur marchande considérable et constituent une source de revenus non négligeable pour les populations. Ainsi donc, leur gestion demeure un enjeu de taille du fait de la diversité des acteurs mais aussi du fait de la dégradation continue des conditions climatiques, à l'échelle mondiale.

    Dans le cadre d'un espace limité avec des ressources fragiles soumises à une exploitation intense, les effets sur les milieux naturels et sur les écosystèmes forestiers deviennent de plus en plus perceptibles. C'est ce qui se passe dans la forêt communautaire de Kandia située dans

    9

    le département de Vélingara, où l'on assiste à un phénomène de dégradation du couvert végétal.

    10

    Figure 1 : Croquis de localisation du secteur étudié

    11

    La communauté rurale de Kandia fait administrativement partie de l'arrondissement de Saré Coly Sallé, département de Vélingara, région de Kolda. Elle est limitée à l'est par la C.R de Némataba, à l'ouest par celle de Fafacourour, département de Médina Yoro Foula, au nord par la république de la Gambie et au sud par la C.R de Kandiaye (figure 1 : croquis de localisation). La superficie de la communauté rurale de Kandia est de 436.5 km2. Elle occupe 30.55% de la superficie totale de l'arrondissement de Saré Coly Sallé qui est de 1405 km2.La C.R de Kandia compte 75 villages dont 74 reconnus administrativement. Elle a une population totale de 22 582 habitants, soit une densité de 52.7 hbts/Km2.

    La population est très mal répartie dans l'espace car on remarque certaines zones très denses comme le centre de la C.R avec un nombre important de villages et des zones très peu peuplées comme le Sud-est. La composition ethnique fait état de 65% de Peuls, 25% de Sarakolés, 9% de Mandingues et les ethnies minoritaires (Soninkés et Wolof) sont de l'ordre de 1%.

    La situation religieuse quant à elle fait remarquer une nette majorité musulmane (une presque totalité) qui se manifeste par le nombre de mosquées (06) et l'inexistence de chapelles (plan local de développement de Kandia, août 2011).

    12

    Première partie : Cadre théorique, opératoire et méthodologique

    13

    Cette partie est constituée de trois chapitres. Il s'agit de poser les bases théoriques, opératoires et méthodologiques qui constitueront le fil conducteur de cette recherche. Ainsi le premier chapitre est consacré à la problématique générale de la recherche ainsi que tous les éléments qui l'accompagnent. Dans le deuxième chapitre, on retrouve la définition des concepts utilisé ainsi que le schéma d'analyse conceptuelle. Enfin le troisième fait l'économie des différentes étapes qui ont conduit ce travail.

    14

    Chapitre 1 : Le Cadre théorique

    Ce chapitre met en exergue les fondements théoriques de ce travail d'étude et de recherche : la problématique, les questions de recherche, l'intérêt et la justification de cette recherche entre autres.

    1. Problème général de recherche

    La dynamique de régression des ressources forestières dans la communauté rurale de Kandia s'inscrit dans le contexte global de la dégradation des ressources naturelles observée depuis le début de la sécheresse des années 1970 dans les pays du Sahel. S'il est vrai que l'écosystème casamançais n'appartient pas au domaine sahélien, il n'en demeure pas moins que les processus observés dans les paysages végétaux de cette zone sont identiques à ceux observés au Sahel. Dés lors, ce phénomène de recul du couvert végétal dans cette partie de la C.R de Kandia suscite un certain nombre d'interrogations qui sous tendent cette réflexion pour une compréhension de cette dynamique.

    Cette étude met en avant l'importance des écosystèmes et de l'environnement en relations avec les systèmes de production des sociétés humaines. Elle permettra d'apporter de nouvelles connaissances sur le phénomène de dégradation du couvert végétal dans cette partie de la communauté rurale de Kandia.

    2. Problématique

    Les ressources naturelles sont caractérisées par un état de dégradation avancé à l'échelle de la planète. Et souvent, les activités anthropiques sont considérées comme étant la principale cause de cette régression. Ainsi, la région de Kolda, particulièrement dotée en ressources forestières n'échappe pas à cette situation.

    En effet selon le PAER1 de Kolda (2007), les importants flux migratoires observés dans la région depuis quelques années sont à l'origine d'une forte pression sur les ressources naturelles. D'après le Plan d'action pour l'aménagement forestier et l'approvisionnement durable en énergie domestique2 (2012), la zone écologique de la haute Casamance qui correspond à la région de Kolda participe à hauteur de 40% à la demande énergétique nationale avec un chiffre d'affaire estimé à près de 20 milliards de francs pour la filière charbon de bois.

    1 Plan d'action environnemental régional élaboré par le conseil régional de Kolda. Ce document constitue le cadre de référence des interventions environnementales au niveau de la région.

    2 Plan d'action pour l'aménagement forestier et l'approvisionnement durable en énergie domestique élaboré en fin 2012 par le conseil régional pour une gestion plus rationnelle des ressources forestières de la région.

    15

    A cela, il faut ajouter les effets d'un système de production extensif de plus en plus mécanisé et plus agressif vis-à-vis de la nature. Les auteurs du PAER de Kolda estiment que cette pression qui se traduit en termes de défrichements abusifs et de dégradation des ressources édaphiques représente une menace pour la viabilité et une durabilité des systèmes de production.

    Par ailleurs, les formes traditionnelles adoptées par les populations rurales, notamment la culture sur brûlis et le défrichement par feu sont des pratiques dangereuses pour la sauvegarde des écosystèmes. Hamed Sow (1990) parle de crise des systèmes de production traditionnels : « pour faire face à la croissance démographique et à la demande urbaine, les techniques de production traditionnelles auraient dû être améliorées, l'agriculture et l'élevage intensifiés afin d'augmenter leur productivité. Au lieu de cette mutation, la réponse de la société a été une surexploitation des ressources naturelles : les défrichements ont été intensifiés, les temps de jachères réduits, les surpâturages accélérés, les feux de brousse mal contrôlés ».

    Or dans la communauté rurale de Kandia ce sont justement ces pratiques qui dominent dans les modes de mise en valeur des terres. En plus, l'élevage qui repose sur un système extensif et la transhumance, exerce plus de pression sur l'environnement que le système moderne intensif.

    La forêt communautaire de Kandia est un espace où plusieurs acteurs entrent en compétition avec ce qu'on pourrait appeler la loi du « premier venu, premier servi ». En effet, il existe une multitude d'acteurs qui gravitent autour de ce massif pour des raisons diverses mais qui trouvent un dénominateur commun : l'usage des ressources forestières. Plusieurs éléments concourent à cet état de fait. En fait, tout d'abord cette zone polarise les villages les plus peuplés (43% de la population)3 de la C.R de Kandia. Ce qui expose davantage le couvert végétal à une surexploitation dans le cadre de la satisfaction des besoins des populations rurales, fortement dépendantes des ressources forestières. Ensuite, le fait que cette partie de la C.R de Kandia partage une frontière avec la Gambie est à l'origine d'une exploitation frauduleuse du bois d'oeuvre et du bois énergie. Globalement, il existe un ensemble de dynamiques qui sont en rapport direct ou indirect avec la dégradation de la forêt communautaire de Kandia.

    D'ailleurs Lake A. (1982, cité par Thiaw,1998) estimait que la réduction de la biomasse ligneuse peut apparaitre comme l'une des plus graves péjorations des milieux naturels et du cadre des activités rurales si l'on considère l'importance des arbres et arbustes pour l'équilibre

    3 D'après les chiffres récents du Plan d'Occupation et d'affectation des sols (POAS) de juin 2012

    16

    des milieux, pour les économies rurales et surtout par le fait que, contrairement à la biomasse herbacée annuelle, qu'il s'agit d'un capital dont le développement ou la reconstitution s'inscrivent largement dans le temps et les diverses contraintes des conditions socio-économiques.

    3. Questions de recherche

    Il s'agit ici de s'interroger sur les grands axes qui vont orienter cette réflexion à savoir : -Quels sont les facteurs qui sont à l'origine de la dégradation du couvert végétal de la forêt communautaire de Kandia ?

    -Quelles sont les manifestations du processus de régression des ressources forestières ? -Quelle est la pertinence des différentes actions menées jusque-là pour inverser cette dynamique ?

    4. Intérêt et justification de la recherche

    Ce travail d'étude et de recherche présente un intérêt scientifique et social.

    Si la dégradation des ressources forestière du Sénégal est soulignée par plusieurs auteurs, il faut noter que la plupart de ces études ont été menées dans un cadre spatial très vaste (échelle nationale) qui ne permet pas toujours d'appréhender tous les éléments qui accompagnent l'exploitation forestière (Thiaw S., 1998).Pourtant, la dynamique de recul des forêts selon ses relations avec les systèmes traditionnels d'utilisation des « espaces naturels » et les impacts de leurs succession sur les ressources ligneuses peuvent être analysés de façon précise à une échelle spatiale réduite. C'est ce qui justifie le choix de travailler à l'échelle d'une communauté rurale et plus particulièrement dans une zone où la demande devient de plus en plus pressante.

    Ainsi l'état de la recherche sur la question montre que plusieurs auteurs se sont intéressés au processus de dégradation des ressources naturelles. Par exemple, Thiaw S. (1998) aborde le thème de l'exploitation des ressources forestières à travers la filière du charbon de bois dans la communauté rurale de Maka Koli Bantang (département de Tambacounda). KANDE M. A. (2007) a consacré son mémoire de maitrise à étudier le contexte et les conséquences de l'exploitation forestière dans la C.R de Mampatim (arrondissement de Dabo).Dans cette étude, l'auteur analyse les incidences d'une exploitation des ressources forestières surtout orientée vers la commercialisation du charbon de bois sur un site d'accueil qui subit les impacts écologiques de cette activité. Quant à CISSE A. (2008), son travail est consacré à l'analyse de la dégradation des paysages végétaux dans le massif forestier de Théwal situé dans le département de Vélingara. Il examine également les stratégies mises en oeuvre par le

    17

    PROGEDE et le service des Eaux et forêts du même département avant de proposer un plan de gestion durable de ce massif forestier. Une autre étude menée par une équipe de chercheurs de l'UCAD : péjoration climatique et dégradation des formations forestières en Haute-

    Casamance est très intéressante car elle analyse le lien entre la péjoration climatique et la dégradation des formations forestières en Haute-Casamance plus particulièrement dans les zones classées de Guimara au nord et Kayangua au sud du département de Vélingara.

    Les auteurs utilisent des données climatiques recueillies au niveau des stations de Kolda et de Vélingara durant la période 1951-2000.Ainsi il s'agit des précipitations, des températures, de l'évapotranspiration pour arriver à une conclusion selon laquelle la « péjoration des conditions climatiques en Haute-Casamance a pour effet, la fragilisation quasi générale de la couverture végétale ».Mais selon cette même étude, les facteurs climatiques ne sont pas les seuls responsables de la dégradation de la couverture végétale en Haute-Casamance, les actions anthropiques ont aussi un « impact certain ».

    Cependant, la question de la dégradation des ressources naturelles dans la communauté rurale de Kandia n'a pas fait l'objet d'investigations. Seul le plan local de développement (PLD) élaboré en 2011 fait état d'un « manque de contrôle » qui fait que les ressources sont pillées sans aucun avantage ni pour la population ni pour la C.R. Il n'existe pratiquement pas d'études sur la question et pourtant le phénomène de recul du couvert végétal ne semble pas s'estomper.

    Il faut également noter que c'est un espace qui présente plusieurs enjeux et fait l'objet de convoitises car il abrite l'essentiel des ressources végétales de la communauté rurale de Kandia.

    En effet, la communauté rurale de Kandia jouit d'une situation favorable à des échanges avec la Gambie notamment à travers les marchés hebdomadaires situés de part et d'autre de la frontière. Néanmoins, cette position géographique peut constituer également un inconvénient dans la mesure où elle permet le développement d'activité frauduleuse comme l'exploitation clandestine des ligneux. D'ailleurs ce phénomène concerne toute la partie nord de la Casamance.

    Plusieurs activités se sont développées dans cette partie de la communauté rurale créant ainsi des dynamiques importantes des populations. Par exemple, pendant la saison sèche, les éleveurs transhumants gambiens pratiquent l'émondage en traversant la C.R de Kandia pour aller vers le bassin de l'Anambé à la recherche de pâturages et de points d'eau.

    18

    Cette étude permettra donc de sensibiliser les populations locales ainsi que les autorités locales sur la dynamique de dégradation du couvert végétal observée maintenant depuis plusieurs années.

    Ce travail se veut une modeste contribution à la connaissance du phénomène de dégradation du couvert végétal dans la forêt communautaire de Kandia. Puisse-t-il permettre d'attirer l'attention des pouvoirs publics ainsi que des différents acteurs sur les conséquences de cette dynamique de recul du couvert végétal. Cependant il est nécessaire de procéder à une délimitation du champ d'investigation de cette étude pour mieux cerner les contours de ce travail.

    5. Délimitation du champ d'investigation

    Cette étude prendra en compte l'ensemble des dynamiques socio-économiques qui se développent autour de cet espace en relation avec les autres sous-espaces environnants. De façon générale, notre analyse prendra en compte l'ensemble de l'étendue de la communauté rurale de Kandia. Cependant il est à souligner que nous nous focaliserons particulièrement sur la forêt communautaire. Cette démarche permettra de comprendre le fonctionnement de ce milieu.

    Dans cette étude, le début des années 1970 constitue la date repère car elle coïncide avec le début de la sécheresse observée au Sahel. Et depuis lors, on assiste à une dynamique de régression des ressources naturelles dans la plupart des pays sahéliens. Tout ceci s'inscrit dans une logique d'interdépendance entre espace et sociétés. Nous allons dans cette perspective définir les objectifs de ce travail d'étude et de recherche.

    6. Objectifs de la recherche

    L'objectif général visé à travers ce travail est de contribuer à mieux cerner la dynamique de dégradation du massif forestier de cette partie de la C.R de Kandia au plan scientifique. Au plan social, c'est aider les décideurs à améliorer leur décision en leur fournissant des informations sur lesquelles ils pourront s'appuyer.

    En plus de cet objectif général, il s'agira de manière plus précise :

    -d'identifier les facteurs qui sont les causes de la dégradation de cette formation végétale -d'analyser les conséquences écologiques et socio-économiques de ce phénomène

    - de s'interroger sur la pertinence des différentes actions/stratégies de gestion de ce massif forestier mené pour inverser le processus. Cependant, l'atteinte de ces objectifs déclinés repose sur des hypothèses.

    19

    7. Hypothèses

    Pour atteindre les objectifs fixés, ce travail repose sur deux hypothèses principales : Hypothèse 1 : Les facteurs physiques et anthropiques sont à l'origine de la dégradation du

    couvert végétal dans la forêt communautaire de Kandia.

    Hypothèse 2 : Des actions/stratégies ont été menées pour gérer la dégradation du couvert végétal de cette forêt communautaire.

    Après avoir posé le cadre théorique, il convient à présent de s'intéresser au cadre opératoire.

    20

    Chapitre 2 : Le Cadre opératoire

    Ce chapitre définit les concepts clefs structurant ce travail, élabore le modèle d'analyse conceptuelle et présente le choix des variables et des indicateurs.

    1. Définition des concepts clés

    · Dégradation

    Selon Yves Lacoste (2003), le concept de « dégradation » vient d'un terme religieux signifiant que l'on est privé d'un « grade ». D'après lui, en géographie, le mot s'applique à la détérioration d'un sol qui perd de sa fertilité sous l'effet de l'érosion ou du lessivage. Ici, il s'agit donc de l'érosion hydrique causée par le ruissellement qui emporte tous éléments utiles aux plantes. Mais Roger Brunet (sous la direction, 2006) estime que la dégradation « s'applique à un certain stade de l'évolution des sols. Ce terme désigne également la transformation subie par certains caractères ou constituants du sol. »

    On peut donc dire que le terme de dégradation renvoie dans son premier sens au processus de détérioration des sols. Toutefois, on peut appliquer ce concept de dégradation à d'autres domaines. Ici, il s'agit du couvert végétal. Dés lors, ce terme est associé à cette notion de perte : perte d'une valeur, d'une qualité ou d'une richesse. Concernant le couvert végétal, la dégradation peut être comprise dans le sens de fléchissement d'une ressource en l'occurrence la végétation, dans cette étude.

    Dans ce cas, la dégradation est perçue comme une détérioration, une régression, au plan quantitatif et qualitatif de la ressource végétale. Il s'agit d'une perte de qualité et une diminution de la quantité des ressources naturelles disponibles qui sont le plus souvent dues à plusieurs facteurs qui sont d'ordre physique et anthropique. Le concept traduit une altération, une modification du couvert végétal rendue possible par une vulnérabilité persistante des conditions climatiques.

    La dégradation traduit une réduction de la surface de la forêt ainsi qu'une baisse de la qualité et de la quantité de la végétation. Nous entendons par dégradation du couvert végétal dans cette étude, la détérioration progressive aussi bien sur le plan qualitatif que quantitatif de l'ensemble des éléments qui constitue le couvert végétal. Mais qu'est-ce que le couvert végétal ?

    · 21

    Couvert végétal

    Roger Brunet (sous la dir, 2009) défini le couvert végétal comme étant « l'ensemble des frondaisons dont le sommet, est la canopée qui donne un abri sous lequel on peut se tenir ; la canopée étant identifié comme l'écran formé par la partie supérieure de la végétation tropicale. Par contre, Pierre Georges et F. Verger (sous la direction, 2006) définissent le couvert végétal comme « l'ensemble des plantes-toutes strates confondues-qui couvrent le sol ». A partir des ces définitions, on remarque qu'il ya une distinction qui est faite entre ces auteurs. D'un coté, on peut dire que Roger Brunet ne considère comme « couvert végétal » que l'ensemble du feuillage constitué par des arbres qui sont suffisamment longs pour avoir un abri sous lequel l'on peut se tenir. Dés lors, il y'a deux éléments qui constituent le couvert végétal dans ce cas : il faut non seulement qu'il y'ait de la canopée (écran supérieure de la végétation tropicale) mais aussi cette canopée doit être suffisamment importante pour avoir un abri sous lequel on peut se tenir.

    D'un autre coté, Pierre Georges et F. Verger estiment que c'est l'ensemble des plantes qui couvrent le sol sans distinction de strates. Cette définition est plus englobant car elle intègre toutes les plantes qui poussent en un lieu donné et ne cherche pas à faire une classification entre arbres et arbustes ou en termes de la hauteur de ces derniers.

    Toutefois, dans le cadre de ce travail, nous ajouterons un autre élément très important sinon essentiel c'est-à-dire la densité des arbres sur l'espace en question pour aboutir à la notion de forêt. En ce qui concerne cette étude il s'agit d'une forêt communautaire. Dés lors, ces deux définitions peuvent être complémentaires dans la mesure où l'on prendra en compte la densité des arbres mais également les différentes strates. Ainsi cette distinction en termes de strates peut aboutir à parler de : forêt dense, forêt claire, savane arborée ou boisée et savane arbustive. En outre, le couvert végétal se distingue par la diversité biologique de ses essences. Dans le cadre de ce travail la définition retenue est celle qui considère le couvert végétal comme l'ensemble des éléments constitutifs de la végétation (arbres, arbustes, tapis herbacé). Il est essentiellement formé d'une forêt claire et d'une savane boisée dans la communauté rurale de Kandia. Dés lors, on peut aussi s'intéresser à la gestion durable de cet espace.

    · Gestion (durable)

    Selon Grawitz (2000) le terme de gestion vient du latin « gerere » qui signifie conduire, exécuter. C'est l'ensemble des moyens mis en oeuvre pour gérer une entreprise.

    La gestion renvoie à deux opérations : organisation et contrôle. Il s'agit de la gestion dans le sens que lui donnent les sciences économiques. Elle est d'ailleurs érigée en une science des décisions stratégiques dans les organisations. Elle est considérée comme la science qui permet

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    de déterminer la meilleure combinaison pour réaliser les meilleurs rendements, la plus grande productivité des moyens matériels et de la ressource humaine dans les organisations. C'est ainsi que le concept de gestion est étendue à plusieurs domaines de l'activité d'entreprise.

    En outre, le concept de gestion a fini par être étendue au domaine des ressources naturelles. Dans ce cas il s'agit d'une action qui vise la valorisation dynamique des ressources naturelles pour satisfaire le développement humain et économique et non pour de simple besoin de protection. Cette orientation actuelle de la gestion des ressources naturelles est appelée conservation-développement par opposition à l'orientation de protection-conservation qui a longtemps prévalu dans ce domaine.

    Dans le cadre des ressources naturelles, le concept de gestion englobe deux enjeux fondamentaux :

    - garantir la durabilité des ressources c'est-à-dire gérer dans le long terme humain sans dégrader la base des ressources;

    -préserver la diversité biologique c'est-à-dire gérer sans compromettre la richesse génétique de la faune et de la flore. On parle ainsi de gestion durable des ressources naturelles et plus particulièrement ici des ressources forestières.

    La gestion qui nous intéresse dans cette étude est celle d'un écosystème qui a subi les pressions anthropiques et la péjoration des conditions climatiques. Elle désigne donc l'ensemble des combinaisons mises en oeuvre pour lutter contre le processus de dégradation du couvert végétal dans cette partie de la communauté rurale de Kandia. En clair, il s'agira de voir comment satisfaire les besoins des usagers sans pour autant compromettre la base de la ressource. Telle est la compréhension que l'on doit avoir du concept de gestion dans ce travail.

    2. Opérationnalisation des concepts utilisés

    Dans cette étape, il s'agit de rendre opérationnel les concepts de dégradation, de couvert végétal et de gestion.

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    Tableau 1 : Variables et indicateurs des concepts

    Concepts

    Dimensions

    Indicateurs

    Dégradation du couvert

    végétal

    - Naturelle

    - Evolution des

    données climatiques

    (Pmm, T°C...)

     

    - Activités

    anthropiques

    (agriculture, élevage,
    exploitation forestière...)

    Gestion durable des

    ressources naturelles
    (forestières)

    - Humaine

    - Économique

    - Socio-

    organisationnelle

    - Environnementale

    - Technologique

    - Taux de prélèvement

    - Amélioration des
    conditions de vie des populations

     

    Ce tableau résume les concepts clefs qui structurent cette étude. Ainsi, le phénomène de dégradation du couvert végétal repose sur deux dimensions ou facteurs : naturels et anthropiques. Les facteurs naturels de dégradation du couvert végétal sont relatifs aux conditions climatiques qui ont été fortement éprouvées par les sécheresses des années 1970 et 1980.L'indicateur qui permettra de mesurer la variation de ce paramètre est les données climatiques telles que les précipitations, l'évaporation, l'humidité relative entre autres.

    En ce qui concerne la dimension anthropique de la dégradation du couvert végétal, elle relève plutôt des activités des populations locales : agriculture, élevage, exploitation clandestine de bois d'oeuvre, bois énergie, etc.

    L'ampleur des activités permettra de se faire une idée sur le rythme de dégradation du massif forestier.

    La gestion des ressources naturelles quant à elle, englobe les différentes dimensions du développement durable. Ces dimensions sont d'ordre humain, environnemental, socio organisationnel, technologique et économique. La gestion durable des ressources naturelles vise une meilleure prise en compte des différentes dimensions citées pour un respect des capacités de régénération des ressources tout en satisfaisant les besoins vitaux de l'homme.

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    Mais, il faut dire que le schéma d'analyse conceptuelle illustre le mieux le processus de dégradation du couvert végétal.

    3. Schéma d'analyse conceptuelle

     
     

    Facteurs anthropiques -Exploitation forestière

    -Activités agropastorales, feux de brousse...

    Facteurs physiques -déficits pluviométriques

    -érosions (éolienne/hydrique

     
     

    Dégradation du

    Couvert végétal

    Stratégies de gestion de la forêt

    Conseil rural de Kandia

    Populations locales

    Acteurs

    Service des eaux et forêts de Vélingara

    Figure 2 : Schéma d'analyse du processus de dégradation du couvert végétal dans la forêt communautaire de Kandia

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    Ce schéma met en exergue les différents facteurs qui sont à l'origine de la dégradation de la forêt communautaire de Kandia. Ainsi on peut identifier les relations qui existent entre les différentes hypothèses posées un peu plus. On voit que la dynamique de régression dans ce massif forestier est causée par deux facteurs : physiques et anthropiques.

    Les facteurs d'ordre physiques sont liés d'une part au déficit pluviométrique observé depuis le début de la sécheresse des années 1970. D'autre part, les agents d'érosion (eau, vent) sont en partie responsables de ce processus de dégradation. Quant aux causes anthropiques, elles proviennent principalement de l'activité agropastorale, de l'exploitation forestière et des feux de brousse qui sont très récurrentes en saison sèche.

    La combinaison de ces éléments entraine une dégradation du couvert végétal qui, à son tour est responsable de la réduction de la strate arbustive et herbacée, l'appauvrissement des sols par l'effet de l'érosion et finalement de la baisse des rendements. Cependant il est intéressant de remarquer qu'il y'a une solution au problème, c'est-à-dire une gestion durable des ressources naturelles prenant en compte à la fois l'enjeu de durabilité et de diversité biologique de l'écosystème en question mais également la satisfaction des besoins vitaux des populations. Cette gestion durable devrait impliquer l'ensemble des parties prenantes pour une prise en charge effective et efficace du phénomène. Toutefois, il s'agira de présenter dans ce travail les différentes actions menées jusque-là pour inverser la situation de dégradation du couvert végétal. Mais pour cela, une méthodologie est nécessaire.

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    Chapitre 3 : Le Cadre méthodologique

    La méthodologie adoptée peut être divisée en trois étapes: la recherche documentaire, le travail de terrain et enfin l'analyse et le traitement des données recueillies.

    1. La recherche documentaire

    C'est la première étape de ce travail qui a conduit à consulter différentes sources documentaires sur la question. De prime abord, il faut souligner qu'il existe de nombreuses publications en ce qui concerne la dégradation des ressources naturelles et les stratégies mises en oeuvre pour lutter contre le phénomène. C'est dans ce vaste champ que s'inscrit la question de la dégradation des ressources forestières dans la Communauté rurale de Kandia.

    Traitant la question de la dégradation des ressources naturelles dans un ouvrage collectif intitulé « Le Sahel en lutte contre la désertification : leçons d'expériences (CILSS, 1989), René M. Rochette fait la distinction entre la sécheresse et la désertification. Selon lui, la première notion est « une insuffisance de pluie par rapport à une quantité moyenne qui, en un lieu déterminé, permet habituellement le fonctionnement normal de l'écosystème et, en particulier la croissance normale des êtres vivants ; la seconde est une dégradation sans cesse élargie et aggravée du capital écologique, c'est-à-dire une diminution de la quantité et de la capacité productive des ressources en eau, sol, végétation et faune que les hommes exploitent pour vivre ». Pour ce même auteur cette dégradation est causée soit par la sécheresse, soit par l'action de l'homme ou le plus souvent les deux en même temps. Dans le cas du Sahel, la sécheresse a joué un rôle important dans cette dégradation.

    Guy DI Méo dans le chapitre Quelles énergies domestiques pour les populations urbaines d'Afrique-Noire ? in Énergie populaire dans le tiers monde ENDA (Environnement Afrique n° 20-21-22 Vol V.4 Vol VI, 1-2 1998) analyse le rôle du bois et de ses dérivés énergétiques dans la consommation des ménages sénégalais. Il met en lumière les dangers que cette exploitation représente pour les écosystèmes forestiers à travers les ponctions effectuées en vue de la récupération du bois de feu ou du charbon de bois en rapport avec l'augmentation de la population. Selon cet auteur, les besoins de Dakar en charbon durant cette période entrainaient la destruction annuelle de 15.000ha de forêt soudano-guinéenne dans l'Est et le Sud du pays. Donc on remarque ici que les activités anthropiques représentent un facteur non négligeable dans le recul du couvert végétal. En outre Michel Petit (1990) dans son ouvrage intitulé Géographie physique tropicale : approche aux études du milieu aborde également la question de l'introduction de l'homme dans les écosystèmes naturels ; autrement dit, le problème de la charge anthropique sur les milieux naturels. Selon lui, une telle « étude ne

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    peut mettre en oeuvre une méthodologie spécifique puisque le chercheur doit s'attacher à débrouiller un écheveau complexe d'interrelations ; seule une étude systémique permettra d'apprécier le sens de l'évolution du milieu. » Mais au-delà de cette approche, il identifie les causes majeures de la dégradation des forêts parmi lesquelles on peut citer le manque de terres, les feux de brousse, le surpâturage, l'exploitation forestière entre autres... Dans ce même ordre d'idées, l'auteur souligne que dans certains cas les forêts sont attaquées depuis leur marges mais aussi de l'intérieur par l'agriculture itinérante et pour l'exploitation du bois. A titre d'exemple, « les savanes enclavées du Mayombe congolais ont livré une industrie humaine d'environ 5000 ans. Mais, si la culture sur brulis n'a longtemps été responsable que des traumatismes temporaires, le raccourcissement, et surtout la suppression de la jachère engagent une évolution irréversible. Derrière l'agriculture, l'érosion ne laisse que les racines du profil pédologique et l'aire, dés lors vouée à la pâture extensive, est définitivement ruinée ». Toutefois, Michèle Petit montre que l'homme peut également être un restaurateur de la nature grâce aux aménagements qu'il réalise ».

    Par ailleurs, Dupriez Hugues et Philipe de Leener (1990) analysent les mécanismes du ruissellement ainsi que de l'érosion hydrique. Ils mettent en évidence l'importance de l'eau pour la matière vivante animale, humaine et végétale surtout dans les milieux arides. En effet, vu sous l'angle des productions végétales et animales, l'eau apparait comme un facteur limitant important. La présence de l'eau dépend des climats qui sont incontrôlables et lorsqu'elle est présente, ses comportements naturels tendent constamment à modifier l'ordre de la terre et de la végétation, parfois même de façon catastrophique. Ceci permet d'avoir une idée sur les conséquences néfastes que peut entrainer une sécheresse sur la végétation. On apprend aussi dans cet ouvrage que « certaines espèces végétales percevant les rigueurs de l'économie en eau, sont capables de stocker celle-ci lorsqu'elle est disponible dans leurs tiges, leurs feuilles ou leurs fruits, afin de prolonger leur propre existence aussi longtemps que la chaleur torride le leur permet ».

    Quant à Hamed Sow dans son ouvrage Le bois-énergie au Sahel : environnement et développement (1990), il identifie deux causes de la déforestation au Sahel. Tout d'abord, il affirme que la déforestation peut être causée par des facteurs climatiques (sécheresse, ensablement) contre lesquels peu de choses ne pouvaient être entreprises pour le moment. Mais selon lui, ce sont les hommes du Sahel qui sont eux-mêmes souvent à la base de la disparition de leur patrimoine forestier. Les causes de la déforestation diffèrent selon que l'on est en milieu rural ou urbain. Par exemple « en milieu rural, le phénomène trouve son origine

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    dans la crise des systèmes de production traditionnels. Crise, en ce sens que ces systèmes n'ont pas pu s'adapter à l'évolution de la société. Pour faire face à la croissance démographique et à la demande urbaine, leurs techniques de production traditionnelles auraient du être améliorées, l'agriculture et l'élevage intensifiés afin d'augmenter leur productivité. Au lieu de cette mutation, la réponse de la société a été une surexploitation de ses ressources naturelles : les défrichements ont été intensifiés, les temps de jachère réduits, les surpâturages accélérés, les feux de brousse mal contrôlés : 8 ».

    Au total, la lecture de ces différents ouvrages a permis de se faire une idée des causes principales de la dégradation des ressources forestières. On peut résumer les causes en deux facteurs majeurs qui sont d'ordre physique (sécheresse et érosions) et d'ordre anthropique (agriculture, feux de brousse, exploitation forestière...). Il faut souligner que d'autres auteurs se sont intéressé à la question mais en insistant sur les stratégies de lutte contre le phénomène de dégradation des ressources naturelles. A ce titre, Frédéric Bourdier dans un chapitre nommé : la Nature apprivoisée : « symbolisme et savoir technique chez les populations nord-est cambodgien, 1998 » in Rossi G. (sous la direction), Gestion des ressources et dynamiques locales au sud montre comment certains groupes ethniques du Cambodge tirant principalement leurs ressources des produits de la forêt et de la mise en culture provisoire de parcelles défrichées sont parvenus à sauvegarder leur cadre de vie. En effet, « ces sociétés ont su au cours des siècles d'expériences, maitrisé leur environnement en parvenant à cultiver ce qui est nécessaire pour leur survie tout en puisant ce dont elles avaient besoin dans leur écosystème physique, et en reconnaissant les limites de ce qui était possible, et pensable d'extraire du milieu naturel ». C'est un exemple qui peut servir de modèle dans le cadre d'une stratégie de gestion durable des ressources naturelles.

    Mais il faut mentionner aussi qu'il y'a un certain nombre de documents qui abordent la question au niveau national. Par exemple, en ce qui concerne le rapport du Ministère de l'environnement et de la protection de la Nature (2005) intitulé : l'état de l'environnement au Sénégal, il identifie les différents facteurs qui sont à l'origine de la dégradation des terres. Parmi ces derniers, il y'a la poussée démographique qui a entrainé une « extension des terres de cultures et une pression accrue sur les ressources forestières avec la forte demande en charbon des villes ». En plus de cela, l'érosion éolienne et hydrique fragilisent la « couche arable contribuant ainsi à la dégradation de la structure du sol ».

    En plus, le document, la Politique Forestière du Sénégal (2005) fait un historique des différentes politiques menées dans le sous-secteur forestier depuis les indépendances en

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    identifiant les causes majeures de dégradation. On note, outre l'absence d'inventaires nationaux du potentiel forestier, les tendances suivantes : réduction des superficies boisées, baisse de la richesse floristique, réduction de densité et changement de structure de la végétation, baisse des productions forestières non ligneuses, forte variation de la production des pâturages (p.7). Pour inverser cette tendance, ce document énonce les grands axes d'intervention dans ce domaine d'ici à 2025. Parmi les grands axes stratégiques, on peut citer : l'aménagement et la gestion rationnelle des ressources forestières et fauniques, le renforcement des capacités des collectivités locales et des organisations communautaires de base (OCB), le renforcement des capacités du service forestier, le développement de la foresterie privée ainsi la foresterie urbaine et péri-urbaine.

    Par ailleurs, la question de la dégradation des ressources forestières a bénéficié de la curiosité de jeunes chercheurs. Il s'agit entre autres du mémoire de maitrise de S.Thiaw, 1998 qui a pour titre : Exploitation forestière et suivi des ressources ligneuses dans la Communauté rurale de Maka-Kolibantang ou du travail de M. A. Kandé en 2007 portant sur : Contexte et conséquences de l'exploitation forestière dans la Communauté rurale de Mampatim (arrondissement de Dabo).Tous ces travaux se sont focalisé sur l'évolution de la filière de charbon du bois au Sénégal avant de se spécifier sur les réalités de chaque zone étudiée.

    Ainsi la lecture des différents documents a permis de faire l'état de la recherche sur la question de la dégradation des ressources naturelles au Sénégal et plus particulièrement sur la dégradation du couvert végétal.

    De façon plus proche de notre zone d'étude, le Plan d'action environnemental de la région de Kolda élaboré pour la période 2007-2009 ainsi que l'étude de Aliou Cissé en 2008 dans le cadre de son mémoire de master1 sur la dégradation des paysages végétaux et gestion durable des ressources naturelles : exemple du massif forestier de Thiéwal dans la communauté rurale de Sinthiang Koundara (département de Vélingara) ont montré l'état de l'environnement ainsi que les principaux facteurs de sa dégradation dans la région de Kolda de manière générale et dans la C.R de Sinthiang Koundara.

    Une autre étude menée par une équipe de chercheurs de l'UCAD : péjoration climatique et dégradation des formations forestières en Haute- Casamance est très intéressante car elle analyse le lien entre la péjoration climatique et la dégradation des formations forestières en Haute-Casamance plus particulièrement dans les zones classées de Guimara au nord et Kayangua au sud du département de Vélingara. Les auteurs utilisent des données climatiques recueillies au niveau des stations de Kolda et de Vélingara durant la période 1951-2000.Ainsi il s'agit des précipitations, des températures, de l'évapotranspiration pour arriver à une

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    conclusion selon laquelle la « péjoration des conditions climatiques en Haute-Casamance a pour effet, la fragilisation quasi générale de la couverture végétale ».Mais selon cette même étude, les facteurs climatiques ne sont pas les seuls responsables de la dégradation de la couverture végétale en Haute-Casamance, les actions anthropiques ont aussi un « impact certain ». Donc ce modèle d'analyse développé dans le cadre de la dégradation des ressources végétales est parfaitement adaptable à notre zone d'étude pour identifier les différents éléments climatiques qui sont imputables à ce phénomène.

    Dans l'ensemble, on remarque que plusieurs auteurs se sont intéressés à la dégradation des ressources naturelles ainsi que les stratégies mises en oeuvre pour sa lutte. D'ailleurs, il y'a certains documents qui tentent de faire le bilan des différentes stratégies et approches de gestions des ressources naturelles menées depuis ces dernières années en Afrique avec l'appui des bailleurs de fonds.

    Ainsi on peut se référer à Roe D., Nelson F. et Sandbrook C. (sous la dir.), 2009. La gestion communautaire des ressources naturelles en Afrique : impacts, expériences et orientations futures, rapport publié par l'institution international pour l'environnement et le développement financé par le gouvernement français. C'est un document très riche qui traite la question de la gestion des ressources naturelles à l'échelle du continent africain en s'appuyant sur les nombreux travaux disponibles sur la question depuis ces 20 dernières années. La synthèse panafricaine présentée (impacts, expériences et orientations futures) de la GCRN met en relief la gamme diverse des formes de participation communautaire à la gestion des ressources naturelles qui ont fait leur apparition aux quatre coins du continent au cours des vingt dernières années. On découvre également à travers ce rapport que la GCRN « signifie des choses différentes pour différents acteurs à différents endroits de l'Afrique sub-saharienne ». On note une diversité des définitions concernant la GCRN selon les pays et les acteurs impliqués. Par exemple, dans la plupart des pays en Afrique de l'Ouest et Centrale, la GCRN est interprétée par les autorités gouvernementales, les bailleurs, les agences donatrices et les ONG comme un partage des bénéfices ou un travail de proximité entre les parcs nationaux et les communautés adjacentes. Cette forme de travail de proximité et de partage des bénéfices est aussi une caractéristique de certaines approches de gestion des aires protégées dans les pays d'Afrique de l'Est. En Afrique australe, la définition la plus claire qui puisse être donnée de la GCRN est en termes de la délégation des droits à prendre des décisions de gestion et à accaparer les bénéfices, en ce qui concerne les ressources situées sur les terres communales.

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    Un autre élément est que les diverses formes de GCRN et leurs nombreuses adaptations au niveau local ont beaucoup diversifié les approches de gouvernances des ressources naturelles en Afrique subsaharienne. En outre, la GCRN a enregistré des résultats intéressants au plan écologique, économique et institutionnel.

    Toutefois, il semble que les pays anglophones ont une longueur d'avance sur les pays francophones. On remarque également que c'est l'approche GT (gestion des terroirs) qui a dominé dans les anciennes colonies françaises. Néanmoins, malgré ces résultats nationaux notables, il subsiste des défis importants pour la GCRN. Globalement, il reste relativement peu de cas où les communautés obtiennent l'autorité formelle sur les terres et les ressources naturelles qui s'y trouvent. Le contrôle centralisé des ressources naturelles persiste malgré le changement observé partout dans la rhétorique sur la gestion des terres et des ressources. Dans certains cas, les tendances indiquent plutôt une consolidation centrale du droit à utiliser et distribuer les ressources précieuses comme la faune et le bois.

    Toujours selon le même rapport, les conflits entre les groupes locaux et d'autres acteurs plus puissants, y compris les agences publiques et les investisseurs du secteur privé, sont encore répandus dans l'ensemble du continent et connaissent, souvent, une intensification. Il y a de puissants facteurs économiques et politiques qui incitent les élites politiques et les bureaucraties centrales à consolider leur contrôle sur les ressources naturelles. Il faut signaler aussi que des conflits supplémentaires découlent des différences relatives aux objectifs prioritaires de la gestion, tels qu'ils sont perçus - l'échelle la plus appropriée à laquelle mener la gestion d'un point de vue écologique correspond rarement à l'échelle la plus appropriée d'un point de vue social ou économique.

    Afin d'aborder ces défis mentionnés (mais en réalité plus nombreux dans le document) et des modèles plus résilients et plus durables de GCRN dans ces contextes africains divers et variables, le rapport met en relief un certains nombre de conclusions basées sur les expériences de GCRN. L'une des conclusions de ce rapport est que l'on ne parviendra à favoriser le développement de communautés rurales prospères, qui assurent une gestion durable de leurs terres et ressources naturelles que lorsque la GCRN donnera la priorité aux intérêts, au rôle des individus et aux capacités locaux.

    Dans l'ensemble, le document est très intéressant car l'expérience de GCRN offre des enseignements utiles pour les processus futurs de réforme agraire, en plus de fournir des modèles décentralisés d'utilisation des ressources naturelles qui sont pertinents dans le contexte de l'adaptation aux changements climatiques, de la lutte contre la désertification et de la conservation de la biodiversité. Toutefois même, s'il nous a permis d'avoir une idée

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    générale des différentes approches menées dans le cadre de la gestion des ressources naturelles, il est important de noter que les exemples développés ne concernent pas directement le Sénégal et encore moins notre zone d'étude. L'échelle que les auteurs ont utilisée est très grande pour une analyse plus fine de la question au Sénégal.

    Dans cette même lancée, Philippe Lavigne Delville (2001) réalise un rapport commandité par l'agence française de développement intitulé : Quelle gouvernance pour les ressources naturelles ? La gestion des ressources renouvelables dans le contexte de la décentralisation en Afrique de l'ouest. Cette étude fait un « état des connaissances et des débats à partir des différentes publications sur la gestion des ressources renouvelables et d'analyse socio-anthropologique sur les modes effectifs d'accès et de contrôle des ressources en Afrique de l'ouest, sur la question foncière et sur les enjeux de la décentralisation administrative ».

    Notons enfin que le Plan d'action forestier pour l'aménagement Forestier l'approvisionnement durable en énergie domestique de la région de Kolda aborde la question dans le sens de faire un inventaire du potentiel forestier régional existant et de procéder ensuite à aménagement de ces massifs avec l'appui des bailleurs de fonds. C'est dans ce cadre d'ailleurs qu'une expérience a été menée avec la communauté rurale de Dioulacolon où ce sont les populations locales qui ont désormais pris les devants dans la filière d'exploitation du charbon de bois.4

    Il faut dire qu'il existe un nombre important de publications sur la question et d'ailleurs très intéressantes. Ceci témoigne de l'enjeu de ce thème dans un contexte où l'environnement est de plus en plus pris en compte dans le cadre du développement durable. Mais, l'ensemble de ces documents ne nous a pas permis d'avoir un aperçu sur l'état de la dégradation des ressources forestières dans la C.R de Kandia. Les ouvrages lus traitent la question de façon générale Il n'ya pas une documentation fournie par rapport à notre zone d'étude. Les analyses faites sur le sujet abordent la question dans un cadre spatial soit très vaste (échelle africaine ou nationale), soit dans une zone géographique qui ne concerne pas directement notre terrain d'étude. D'où l'intérêt de faire une analyse du processus de dégradation à une échelle plus réduite (notre zone d'étude) pour mieux saisir tous les mécanismes du phénomène.

    4Il s'agit d'un projet financé par le PERACOD et qui met les populations locales au coeur du dispositif d'exploitation et de gestion des recettes issues de la vente du charbon de bois. Pour plus de détails, voir plan le d'aménagement forestier de Dioulacolon, département de Kolda.

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    2. Les enquêtes de terrain

    Cette étape constitue la deuxième phase de ce travail. Elle a été l'occasion de faire des enquêtes auprès des populations riveraines du massif forestier en question. L'objectif était de disposer des informations supplémentaires sur la question et de procéder à l'observation directe du terrain d'étude pour avoir une idée plus précise de la dynamique du phénomène, notamment en prenant des photos.

    En outre, cette étape a permis de vérifier et surtout de valider les informations obtenues à travers les S.I.G (images satellites). En effet, les systèmes d'informations géographiques constituent un outil très intéressant pour mesurer l'évolution d'un phénomène dans le temps. Car ils permettent de faire des comparaisons avec des images prises à des dates différentes. Au total, les activités de terrain ont permis de parcourir la forêt communautaire de Kandia, de s'entretenir avec les autorités locales, le service des eaux et forêts de Vélingara ainsi que de mener des enquêtes auprès des populations sur la question de la dégradation du couvert végétal dans cette zone. Ainsi les données collectées sont de nature quantitative et qualitative. Les données quantitatives concernent essentiellement la pluviométrie, la température, l'évapotranspiration, et l'humidité relative. Elles sont été recueillies à la station de Vélingara qui couvre notre zone d'étude. Quant aux données qualitatives, elles découlent des entretiens et enquêtes sur la question.

    Tableau 2 : Techniques et outils de collecte des informations sur le terrain

    Techniques

    Outils

    Types de données collectées

    Observation

    Grille d'observation

    Qualitative

    Entretien

    Guide d'entretien

    Qualitative

    Questionnement

    Questionnaire

    Qualitative/Quantitative

     

    Ce tableau résume des techniques et outils utilisés dans la collecte de l'information et la nature de celle-ci. Après ces deux étapes, nous procédé à un traitement des différentes données recueillies.

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    3. Traitement et analyse des données collectées

    C'est la dernière étape avant la présentation des résultats. Ainsi les différentes données collectées ont fait l'objet de plusieurs traitements : statistique, graphique et cartographique. Ces traitements ont permis d'élaborer des séries statistiques et ensuite des graphiques pour illustrer l'évolution des paramètres climatiques. Ceci donne une meilleure représentation des données quantitatives.

    En plus, les logiciels de cartographie ont servi à l'élaboration de cartes pour une comparaison de la superficie de la forêt à des périodes différentes. Ce qui permet de dégager la dynamique en cours et ainsi de confirmer ou d'infirmer les hypothèses de départ.

    Par ailleurs, cette étape a permis de confronter et de croiser les informations collectées durant la phase documentaire et celles du terrain à travers une analyse critique. Cette démarche a pour avantage de donner plus de pertinence et de crédibilité aux résultats qui seront obtenus et même une discussion de ces derniers, et donc de mettre en évidence les limites éventuelles de ce travail.

    C'est ainsi donc que ce résume notre méthodologie pour cette recherche qui a conduit à présenter les résultats qui vont suivre. Dés lors, pour vérifier nos hypothèses posées un peu plus haut, nous avons pris le soin d'organiser cette seconde partie en chapitres distincts.

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    Deuxième partie : Analyse des facteurs de dégradation du couvert végétal et des stratégies de gestion

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    Cette partie présente les résultats obtenus. Il s'agit d'un diagnostic des facteurs de dégradation du couvert végétal avec les chapitres 4 et 5. Le chapitre 6 analyse les actions menées par les différentes parties prenantes pour inverser la dynamique de régression observée.

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    Chapitre 4: Les facteurs physiques

    L'étude des facteurs physiques constitue un élément important dans la compréhension de la dynamique d'évolution du milieu qui héberge les ressources naturelles. Dans ce chapitre, il sera question en premier lieu de jeter un regard sur le milieu physique avant de se consacrer à l'identification des principaux déterminants physiques (la climatologie et les agents d'érosion) qui influencent le processus de recul du couvert végétal dans la communauté rurale de Kandia.

    Donc, il ne s'agira pas de faire une monographie du milieu, mais plutôt d'utiliser les éléments physiques pour expliquer en partie la dégradation du couvert végétal. En outre, il faut noter que l'analyse est tout d'abord inscrite à l'échelle régionale.

    1. Morphopédologie et paysages végétaux

    La région de Kolda où se trouve notre zone d'étude, forme un plateau incisé par un réseau assez dense de vallées. En Moyenne Casamance, les plateaux sont surmontés d'une cuirasse faiblement ferralitique sur des grés argileux et des marnes du tertiaire.

    En Haute Casamance (qui inclut le département de Vélingara), les plateaux à cuirasses ferrugineuses sont parcourus de dépressions où le matériau gravillonnaire s'est amoncelé. Dans les vallées, les alluvions fluviales quaternaires se sont entassées sur les grés argileux du tertiaire supérieur (PAER, 2007). La situation géomorphologique laisse apparaitre un relief général plat à l'instar du Sénégal.

    Ainsi, la Communauté rurale de Kandia, dans son ensemble se caractérise par un relief plat à l'image du département de Vélingara. On remarque quelques petites élévations peu importantes par endroit. A part ces exceptions, il n'y a pas de plateaux (PLD de Kandia, 2011).

    En ce qui concerne la pédologie, elle revêt un intérêt particulier pour le couvert végétal.

    Dés lors, pour mieux comprendre le processus de formation des sols dans la communauté rurale de Kandia, nous analysons la pédologie à l'échelle de la région.

    L'étude morphopédologique de la région de Kolda relève trois unités de reliefs : les plateaux, les versants et les bas-fonds.

    La majeure partie de la région est en effet constituée de plateaux de grés issus des formations du secondaire et du tertiaire. Chaque niveau du relief correspond à un type de sol :

    - les plateaux sont constitués de sols ferrugineux tropicaux plus ou moins lessivés généralement localisés dans le département de Vélingara et de sols ferrugineux

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    tropicaux lessivés, légèrement ferralitiques surtout dans les départements de Kolda et de Médina Yoro Foula.

    - les versants ou dépressions de plateaux ainsi que les bas-fonds sont constitués de sols hydromorphes et de limons argileux-sableux. Ils sont particulièrement localisés dans le bassin de l'Anambé et autour des cours d'eau

    A l'échelle de la communauté de Kandia, ces sont les types de sols qui dominent :

    - sols Deck plus important dans la Communauté Rurale ;

    - sols lessivés non ferrugineux Deck- Dior ;

    - sols Dior moins importants ;

    - les bas fonds ;

    - sols caillouteux au nord de la Communauté Rurale.

    Ces différents types de sols abritent une végétation composée de plusieurs strates :

    - la forêt galerie se localise le long des cours d'eau. Elle se rencontre au nord de la C.R dans les localités comme Médina Djambéré, au centre (Kaminakor Djidéré et Saré

    Boulel) et au sud sur une bande étroite qui va de Thiével Bessel à Dialakégny. Ce type de forêt occupe la plus petite superficie occupée par la végétation.

    - la forêt dense se situe au sud ouest de la communauté rurale de Kandia à la frontière avec la C.R de Mampatim qui est très pourvue en ressources ligneuses.

    - la forêt claire est répartie de manière clairsemée dans la communauté de Kandia. Elle est la strate qui domine dans le centre-est avec une superficie de plusieurs hectares. En outre, on retrouve cette formation au nord-est, au centre et à l'est de la communauté rurale.

    - la savane arborée ou boisée est la strate qui occupe l'essentiel des ressources forestières présentes dans la zone. Cependant, il y'a aussi une savane arbustive qui occupe un espace marginal. D'ailleurs la carte des ressources naturelles (carte 2) présente la répartition des différentes strates forestières ainsi que les autres types d'occupation du sol dans la communauté rurale. Elle permet d'avoir une vue d'ensemble plus détaillée.

    39

    Source : Plan local de développement de la C.R de Kandia, 2011

    Au total, la communauté rurale est dotée d'un potentiel de ressources forestières non négligeable caractérisées plusieurs strates. La composition floristique regorge une diversité d'espèces. Toutefois, il faut dire que la forêt communautaire de Kandia est essentiellement constituée d'une forêt claire et d'une savane arborée.

    Les principales espèces rencontrées dans la communauté rurale de Kandia sont : Acacia ataxacantha, Anonna senegalensis, Bombax costatum, Cassia siberiana, Combretum glutinosum, Cordyla pinnata, Dicrostachis glometara, Hexalobus monopetalus, Terminalia macroptera, Ziziphus mauritania entre autres (PROGEDE, 2006).5

    5 Il s'agit d'une étude menée par le PROGEDE, pourtant leur responsable régional de Kolda dit qu'ils ne sont pas intervenus dans cette zone. Mais la source du document est belle et bien le PROGEDE

    40

    Par ailleurs, les données tirées du plan d'occupation et d'affectation des sols élaboré en juin 2012 permettent d'avoir plus de précision par rapport à la superficie occupée par chaque type d'occupation du sol.

    Graphique 1 : Pourcentage des différents types d'occupation du sol dans la C.R de Kandia

    14,5

    3,2

    0,1 7,7

    17,1

    0,3

    0,2 0,5

    4,9

    0,2

    1,6

    49,8

    Cultures pluviales et jachères

    Cultures irriguées

    Riziculture pluviale

    Forèt claire

    Foret galerie dégradée

    Savane boisée

    Savane arborée

    Savane arbustive/arborée

    Savane arbustive

    Prairie marécageuse

    Eaux

    Habitat

    Source : d'après les données du POAS de Kandia, 2012

    On remarque dans ce graphique que les cultures pluviales et les jachères occupent prés de la moitié de la superficie de la communauté rurale de Kandia soit 49.8% et correspond 21875,81ha. Cette situation montre la prédominance de l'agriculture et sa dépendance par rapport à la pluviométrie.

    En ce qui concerne les différentes strates forestières, elles sont inégalement réparties dans l'espace communautaire.

    Une analyse du graphique permet de classer les différentes strates de forêt en trois catégories par rapport à la superficie occupée. Tout d'abord, il y'a les strates qui occupent plus de 10% de la superficie de la communauté rurale. On retrouve dans cette catégorie la savane boisée avec 17.1% et la savane arborée qui totalise 14.5%. Ensuite, on a une deuxième catégorie qui représente moins de 10% de la superficie de la C.R. Les strates qui figurent dans cette classification sont la savane arbustive et la forêt claire avec respectivement 7.7% et 4.9%.

    41

    Enfin, il y'a les strates qui regroupent moins de 1% de la superficie de l'espace communautaire représentées par la forêt galerie dégradée que l'on retrouve le long des cours d'eau avec 0.3% et la savane arbustive/arborée occupant 0.1%.

    Globalement telle est la répartition spatiale des différentes strates forestières dans la communauté rurale.

    2. Le climat

    Le climat est l'un des composants qui permet d'expliquer la dynamique du milieu naturel. Il exerce une forte influence sur le type de végétation, la biomasse et les types de sols. Selon Escourrou G. (1980 cité par Cissé A., 2008), l'explication du climat d'un lieu nécessite de s'intéresser à des échelles plus vastes avant de prendre en compte certains facteurs locaux. Dans la communauté rurale de Kandia, les éléments du climat sont à l'image de ceux qui s'observent au niveau de la région de Kolda.

    C'est ainsi que le climat est de type soudanien, avec deux saisons contrastées : la saison sèche de novembre à mai et la saison des pluies de juin à octobre. De novembre à janvier, la région est balayée par l'alizé continental communément appelé harmattan, qui est un vent chaud et sec. De mai à juillet, l'anticyclone saharien se mue en dépression. Ceci permet l'irruption à partir de juin de l'alizé maritime issu de l'anticyclone de Sainte-Hélène dans l'hémisphère sud. Ce vent chaud et humide souffle sur la région jusqu'en octobre novembre.

    Il est communément appelé mousson. La mousson, humide de son long parcours océanique, est responsable des pluies continues d'Août et de Septembre. D'une manière générale, la pluviosité augmente d'est en ouest et du nord au Sud (PAER, 2007). Les températures relativement élevées tournent autour d'une moyenne de 28°, avec de fortes amplitudes thermiques. Les températures sont très fortes et s'accompagnent d'une évapotranspiration importante. Mais intéressons- nous aux différents éléments du climat durant ces dernières années pour avoir une idée de son évolution et ainsi tenter de comprendre ses impacts sur le couvert végétal.

    2.1 La pluviométrie

    La pluviométrie est considérée comme un facteur essentiel qui permet aux paysages végétaux non seulement de se développer mais aussi d'être dans les conditions optimales de régénération pour satisfaire les besoins de l'homme. L'eau est à la base de la vie sur terre : «Sans elle, rien ne pousse. Sans elle, la vie n'est pas possible pour une raison précise : c'est avec l'eau que les autres éléments de la terre s'associent pour constituer la matière vivante

    42

    végétale, animale et humaine. »6 Ces mots montrent le rôle indispensable de l'eau dans la vie humaine mais également celle des végétaux. Les précipitations sont d'une importance capitale pour la végétation car ce sont elles, qui différencient les milieux biogéographiques ; sans eau, il n'ya pas de végétation. La baisse de la pluviométrie entraine une fragilisation du couvert végétal qui devient progressivement plus mince et plus clairsemé dans les milieux arides. On parle d'aridification du milieu.

    Ainsi l'analyse des données pluviométriques recueillies à la station de Vélingara qui couvre notre zone d'étude montre une répartition qui est irrégulière dans le temps. Dés lors, il semble intéressant de voir le comportement de cette série dans le temps.

    Graphique 2 : Evolution des précipitations à la station de Vélingara de 1995 à 2010

    1400

    1300

    1200

    1100

    1000

    900

    800

    700

    600

    500

    1995199619971998199920002001200220032004200520062007200820092010

    Années

    P(mm)

    Source : d'après les données de l'A.N.A.M.S

    L'analyse de la figure 2 montre que l'évolution de la pluviométrie entre 1995 et 2010 à la station de Vélingara alterne des périodes de déficits et d'excédents par rapport à la moyenne de la série. Ainsi on observe 7 années (1995, 1997, 2000, 2001,2002 ,2006 et 2007) qui sont déficitaires. On note également que durant cette même période, certaines années ont enregistrées des totaux pluviométriques qui dépassent les 1000mm. C'est le cas en1999, 2003, 2004,2009 et 2010. Cette situation confirme le caractère irrégulier des précipitations dans le temps et dans l'espace. La moyenne de la série est de 896.5mm. Cependant elle cache

    6 Dupriez H. et Leener Ph., 1990. Les chemins de l'eau : ruissellement, irrigation, drainage (manuel tropical), L'harmattan, 380p.

    43

    des disparités importantes avec des extrêmes qui varient de 609.2mm en 2001 à 1316.1mm en 1999.Donc on remarque une baisse notable de la pluviométrie après l'année record de 1999.

    La comparaison de ces chiffres par rapport à la moyenne fait apparaitre un excédent de 46,8% (écart moyen relatif) pour la même année et un déficit hydrique de l'ordre de 31,07% en 2001. Cette fluctuation des pluies dans la zone n'est pas sans conséquences pour le couvert végétal. En effet selon Dupriez Hugues et Leener Philipe (1990) « Les plantes ne réagissent pas en fonction de normes ou de moyennes de pluies annuelles ou mensuelles, mais bien en fonction des quantités d'eau disponibles au jour le jour dans le sol raciné. » Or ces quantités disponibles sont mal réparties à travers les années et particulièrement durant l'hivernage. Dans le massif forestier de la C.R de Kandia, l'essentiel des pluies se concentre durant les mois de juillet, d'août et de septembre. L'étude de l'évolution des cumuls pluviométriques enregistrés durant ces mois peut nous éclairer davantage sur le caractère irrégulier de cet élément du climat.

    Graphique 3 : Comparaison des courbes d'évolution des précipitations durant les mois de juillet, d'août et de septembre.

    400

    700

    600

    500

    300

    200

    100

    0

    1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010

    JUILLET AOUT SEPTEMBRE

    Source : d'après les données de l'A.N.A.M.S

    Ce graphique représente l'évolution de la pluviométrie durant les mois les plus arrosés de l'année : la courbe du mois de juillet est en bleu ; celle d'août en rouge et le mois de septembre en vert clair.

    44

    L'observation des courbes permet de constater une évolution très variable de la pluviométrie pendant les mois de juillet, d'aout et de septembre durant cette période. En effet, on remarque des pics qui correspondent à des maximums de précipitations pour le mois d'août. Il s'agit de des années 1996, 1999, 2003 et 2009 avec respectivement 570mm ; 574mm ; 459mm et 479mm. On note que la quantité record de pluie tombée (574mm) correspond à l'année 1999 où l'on a assisté au maximum de précipitations dans la zone avec un total estimée à 1316mm. Il existe donc une corrélation entre les quantités de pluies tombées au mois d'août et le cumul pluviométrique annuel. D'ailleurs c'est durant ce mois que les quantités de pluies les importantes sont enregistrées pour la période 1995-2010. Cette situation s'explique par le fait que cette période correspond au milieu de l'hivernage. Toutefois, on note qu'en termes de moyennes enregistrées pour la période c'est-à-dire 19952010 c'est le mois de juillet qui est le plus arrosé avec une moyenne de 373mm, août 324mm et septembre 215mm. On remarque une baisse des précipitations annonçant le retrait progressif du front intertropical (FIT) responsable de la pluviométrie.

    Au total une étude approfondie des différentes courbes montre des variations parfois importantes au cours des années. On retrouve une alternance des périodes d'excédents pluviométriques et de déficits.

    On retiendra en ce qui concerne les différentes courbes : pour le mois d'août, la tendance est à la baisse des quantités de pluies observées. Il y'a un raccourcissement de la période des précipitations qui se concentrent vers la 2eme quinzaine du mois. Quant aux mois de juillet et de septembre, on constate une tendance stable sinon légèrement à la hausse des précipitations. Cette situation peut s'expliquer par le fait que le mois de juillet est souvent considéré comme un mois très pluvieux ainsi que celui de septembre sans une longue période de repos ou d'accalmie de la pluie. Par contre pour le mois d'août, on constate chaque année une période d'arrêt des précipitations qui ne reprennent que vers la fin du mois. Globalement, il faut dire que ces différentes observations dépendent des caractéristiques pluviométriques de chaque année.

    Ainsi, ce phénomène de déficit hydrique d'une année à l'autre oblige les végétaux à développer des stratégies d'adaptation face ces conditions hostiles du milieu. C'est ce qui fait qu'on observe en saison sèche un stress de la végétation dans la forêt communautaire de Kandia. Ce qui conduit à une perte des feuilles pour la majorité des arbres durant les mois les plus secs de l'année. Les photos suivantes illustrent bien le phénomène de perte des feuilles observé dans le massif forestier. En effet, il s'agit d'une végétation caducifoliée.

    Photo1 : Feuilles d'arbres sèches Photo2 : Phénomène de stress végétal

    45

     

    Clichés : Baldé M. M., juin 2013

     
     

    Ces deux photos ont été prises durant le mois de juin dans la forêt communautaire de Kandia. On observe sur la première des feuilles d'arbres sèches qui jonchent le sol à cause du manque d'eau. La deuxième montre un stress végétal des arbres qui sont dépourvus de leurs feuilles. Pourtant, les premières pluies étaient déjà enregistrées. Mais cela n'a pas encore changé l'état de la végétation. Il faut que noter la saison sèche est une période très longue et chaude éprouvant ainsi durement la végétation.

    Concernant le manque d'eau pour la végétation, DIAW A. T. (sous la direction)7 note que « La végétation souffre énormément de ce déficit pluviométrique très accusé qui correspond, en réalité, à des changements très visibles dans l'aspect, la composition et la biologie des formations forestières qui font ressortir un net rapport de causalité» . En outre, Monique Mainguet (1985) identifie un certain nombre de signes de vulnérabilité du couvert végétal observés lors de la sécheresse des années 1970. Cette vulnérabilité s'exprime par :

    - un départ retardé de la feuillaison ;

    - un retard dans l'apparition des fruits ;

    - une chute précoce des feuilles, donc une durée de la période de feuillaison réduite pour certaines espèces ;

    - une diminution du pourcentage et de la période de floraison ;

    - une réduction du poids de matière sèche, de la production foliaire en particulier pour les arbres les plus jeunes entre autres.

    Ceci montre l'importance de l'eau pour la végétation c'est-à-dire sa disponibilité en quantité suffisante pour le maintien normal des organismes vivants. Dans ce même ordre d'idées, selon les auteurs de l'étude sur la péjoration climatique et la dégradation des formations forestières en Haute- Casamance « Ce déficit hydrique profond et prolongé amplifie les effets de

    7 DIAW A. T. non daté (sous la dir.). Péjoration Climatique et dégradation des formations forestières en Haute Casamance (Sénégal) ,40p.

    46

    l'évaporation, aggrave le déficit de la vapeur d'eau dans l'atmosphère et accroît la transpiration des végétaux surtout en saison sèche. Cette situation est en partie à l'origine de la réduction de la floraison, de la feuillaison et de la fructification ». Par ailleurs, d'après Demangeot (1992 cité par A. Cissé, 2008), les formations forestières ne peuvent exister que lorsque les conditions climatiques fournissent un minimum de précipitations et de vents pas violents, par conséquent, si ce minimum n'est pas atteint, l'écosystème se dégrade. Ceci conforte l'idée selon laquelle le déficit pluviométrique est en partie responsable de la dégradation de la forêt communautaire de Kandia. Mais l'évaporation a également sa part de responsabilité dans ce processus.

    2.2 L'évaporation

    L'évapotranspiration désigne le phénomène de transfert de l'eau de l'espace souterrain à l'espace aérien (Dupriez et Leener, 1990). Elle peut aussi être définie comme une déperdition biologique et physique du sol et des végétaux en va peur, en gros du monde vivant. Autrement dit, c'est l'ensemble des pertes d'eau subies par les sols et les végétaux. Dans cette étude, il s'agit des pertes d'eau subies par le couvert végétal. C'est un phénomène fortement influencé par la température. Le phénomène évaporatoire est très important dans la communauté rurale de Kandia à cause des fortes températures durant surtout la saison sèche. Cette situation ne joue pas en faveur de la végétation car celle-ci est soumise à une adaptation qui nécessite de développer des stratégies face à la sévérité des conditions climatiques de la zone. La tropicalité est très accentuée puisque la région ne bénéficie pas de l'influence de l'alizé maritime pour adoucir les températures. Les moyennes annuelles dépassent les 300mm à la station de Vélingara (voir graphique 4).

    47

    Graphique 4 : Courbe d'évolution de l'évaporation à la station de Vélingara de 1995 à 2007

    390

    380

    370

    360

    350

    340

    330

    1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

    Evaporation(mm)

    Source : d'après les données de l'A.N.A.M.S

    L'analyse des données de l'évaporation à la station de Vélingara montre une évolution qui est à l'image de celle des précipitations. On observe des années de forte évaporation et d'autres qui le sont moins. La moyenne de la série est de 368mm. Si on compare ce chiffre au reste de la série, on se rend compte que le minimum de l'évaporation commence avec 341mm qui correspond à l'année 2003 où la pluviométrie a atteint un total de 1150mm. Quant au maximum de l'évaporation, c'est en 1995 qu'il a été enregistré à la station de Vélingara et pourtant on constate que cette année est déficitaire en termes de précipitations estimées à

    769mm. Dés lors on est tenté de s'interroger sur les facteurs qui influencent l'évaporation.

    En effet, il s'agit essentiellement de la température enregistrée durant l'année surtout en saison sèche et la quantité totale d'eau tombée. Donc plus la température est élevée, plus la demande évaporatoire est forte d'une part et plus le volume de pluies est important, moins la quantité d'eau restituée à la nature est importante, d'autre part. On estime que l'évaporation restitue plus de 60% de l'eau de pluie à l'atmosphère pendant les années à excédent pluviométrique et jusqu'à 100% durant les années déficitaires. C'est ce qui explique que les années au cours desquelles la pluviométrie est excédentaire, il y'a une évaporation moins

    48

    importante. La compréhension du phénomène nécessite de prendre en compte la température et les précipitations enregistrées. Ainsi dans le massif forestier de la C.R de Kandia, le phénomène varie d'une année à l'autre en fonction de ces paramètres. Mais analysons l'évaporation durant les mois les plus chauds de l'année pour voir l'évolution qui en résultera.

    Graphique 4 : Evolution de l'évaporation bac moyenne mensuelle durant les mois de mars, d'avril et de mai pour la période 95-2007 à la station de Vélingara

    19

    17

    15

    13

    11

    9

    1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

    Mars Avril Mai

    Source : d'après les données de l'A.N.A.M.S

    Le graphique indique l'évolution des moyennes mensuelles de l'évaporation des mois les plus chauds de l'année. Ainsi, on remarque plusieurs points d'intersection entre les différentes courbes qui indiquent les mêmes quantités d'évaporation enregistrées au cours des années. A titre d'exemple, on peut noter qu'en 1995 l'on a enregistré durant les mois de mars et de mai les mêmes quantités d'eau évaporée. C'est aussi ce qui s'est passé en 1997 concernant les mois d'avril et mai. En outre, le minimum de l'évaporation s'est déroulé au courant du mois de mai où l'air commence à devenir humide sous l'effet de la mousson, vent responsable de la pluie.

    Par contre, le pic de l'évaporation à la station de Vélingara correspond au mois d'avril 2002 où l'on a enregistré une moyenne mensuelle de 17mm. D'ailleurs, il faut dire que ce mois est celui où le phénomène évaporatoire est le plus fort avec une moyenne qui tourne autour de 13.38 alors que les mois de mars et mai enregistrent respectivement 11.38 et 11.61 durant la même période. Cette situation s'explique par le fait que le mois d'avril est le mois le plus

    49

    chaud avec les fortes températures qui dépassent parfois 40°c. En fait, le mois d'avril se trouve au milieu de la saison sèche avec ces fortes températures alors que le mois de mars correspond à une période relativement fraiche et en ce qui concerne, le mois de mai, c'est le début progressif de l'installation de l'hivernage.

    Au total à l'instar des autres éléments du climat dans le département de Vélingara, l'évolution de l'évaporation durant les mois de mars, avril et mai reste caractérisée par une variation dans le temps. C'est un phénomène qui reste tributaire de la température. D'ailleurs c'est ce qui va nous permettre d'intégrer la température dans les analyses.

    2.3 La température

    L'évolution et la distribution des températures sur le territoire sénégalais résultent de la conjonction de trois facteurs (Atlas national du Sénégal, 1977). Il s'agit :

    - du facteur cosmique ou mouvement zénithal du soleil qui détermine généralement l'évolution des températures en l'absence d'autres éléments.

    - les facteurs météorologiques qui interviennent par les caractères thermiques propres aux masses d'air, la nébulosité et les pluies qui réduisent l'insolation et abaissent les températures.

    - Et enfin les facteurs géographiques et tout particulièrement la continentalité, c'est-à-dire essentiellement l'éloignement par rapport à la mer qui a pour conséquence principale l'accroissement des températures et des amplitudes thermiques.

    Dans la forêt communautaire de Kandia, c'est surtout le troisième facteur qui imprime un caractère déterminant des températures. En effet, la position géographique de la zone est fortement soumise à la continentalité car se trouvant à l'intérieur des terres, loin des influences de l'alizé maritime. On distingue ainsi deux grands régimes thermiques :

    - Des températures relativement basses de juillet à février où les minimax peuvent descendre jusqu'à 16°C au mois de janvier et février.

    - Les moments de forte chaleur concernent la période mars- juin où les maximaux enregistrés dépassent les 40°C avec des amplitudes journalières supérieures à 10°C. A présent, nous aller jeter un regard sur l'évolution annuelle des températures à la station de Vélingara pour voir les incidences négatives que cela peut engendrer pour la végétation au niveau de notre zone d'étude notamment par le biais de l'évapotranspiration.

    50

    Graphique 5 : Evolution de la température annuelle de 1995 à 2011 à la station de Vélingara

    31

    30

    29

    28

    27

    26

    25

    24

    1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008

    T°C 2 Moy. mobile sur pér. (T°C)

    Source : d'après les données de l'A.N.A.M.S

    Ce graphique représente l'évolution des moyennes annuelles de la température au niveau de la station de référence de Vélingara. Il s'agit de la moyenne des 12 mois de chaque année de 1995 à 2011. Cette moyenne cache cependant des réalités thermiques plus élevées. On constate que les températures représentées ici ne dépassent pas les 31°C durant cette période. Mais dans la réalité, les maximas mensuels se situent au-delà des 40°C pour les mois de mars, avril et mai qui correspondent généralement à un ensoleillement très remarquable.

    L'analyse de la courbe d'évolution permet d'affirmer que les températures au niveau de la station en question suivent un rythme irrégulier au fil des années. Ce fait est mis en évidence par la courbe sur les moyennes mobiles pondérées sur deux périodes. Elle définit la tendance de moyennes mobiles pour voir le comportement de la variable étudiée.

    L'examen du graphique montre une fluctuation des températures moyennes annuelles qui témoigne d'une irrégularité des précipitations dans le temps. Dans l'ensemble, les températures se situent en dessous de 30°C. La moyenne qui est de 26,7°C traduit une zone relativement chaude. On remarque une évolution en « dents de scie » de la série. Par exemple, on voit que l'année 1995 qui est déficitaire en termes de pluviométrie a une moyenne de température de 29,8°C. Par contre la température la plus basse de la série est enregistrée en 2004 où, il a plut 1027,3mm. La conclusion qui mérite d'être tirée est que la pluviométrie a une influence sur la température d'un lieu donné. Il y'a une évolution parallèle entre les deux variables ; c'est-à-dire dans le même sens. La température est fonction des précipitations dans

    51

    le temps et dans l'espace. Toutefois, ici, les périodes de déficits pluviométriques correspondent à de fortes températures et inversement les excédents de précipitations à celles des basses températures. Le caractère de haut et de bas des températures durant la série s'explique par l'alternance d'années de déficits et d'excédents des pluies. Ainsi on peut diviser la courbe en deux tendances : les années de basses températures (2004, 2005 et 2011 avec respectivement 25,83 25 et 26,47°C) et les années de forte chaleur pour le reste car la valeur des températures est largement au dessus de la moyenne de la série.

    Il faut noter que les températures élevées ont des impacts négatifs sur le couvert végétal car elles augmentent l'évapotranspiration qui est une donnée fondamentale en ce qui concerne le besoin en eau des plantes. La combinaison de ces deux facteurs dans le massif forestier imprime un caractère dégradant des ressources forestières en ce qu'ils constituent un frein à l'épanouissement des végétaux.

    2.4 L'humidité relative

    L'humidité relative exprime le pourcentage de vapeur d'eau contenu dans l'air et la capacité d'absorption de ce dernier à une température donnée. Elle varie en fonction de la température et constitue un indicateur de la saturation de l'air. Dans la forêt communautaire de Kandia, l'humidité relative se caractérise par une forte oscillation entre la saison sèche et celle des pluies. Elle est plus forte durant le maximum des précipitations qui se déroulent au mois d'août et de septembre. Cette période coïncide à une saturation de l'air en vapeur d'eau accompagnée de températures relativement basses. Le vent qui domine est la mousson venue du sud. Par contre, le minimum de l'humidité se déroule pendant les périodes de forte chaleur durant la saison sèche où la demande évaporatoire est très importante dans la zone à cause de l'ensoleillement. Cette situation est caractéristique des zones tropicales qui sont marquées par de fortes températures durant presque toute l'année. Nous allons voir l'évolution de cette variable durant les années passées.

    52

    Graphique 6 : Evolution de l'humidité relative en pourcentage à la station de Vélingara de 1995 à 2010

    Humidité relative en %

    40

    70

    60

    50

    30

    20

    10

    0

    Années

    Source : d'après les données de l'A.N.A.M.S

    Au cours de ces années, l'humidité relative à la station de Vélingara se particularise par une variation peu importante en comparaison avec celle de la température. On remarque que les écarts annuels sont relativement faibles dans l'ensemble et qu'il y'a aussi des valeurs qui se répètent dans le temps. Par exemple nous avons un taux de 57% en 2007 et 2008 d'une part, et de 62% en 1995,1996, 2003 et en 2010 d'autre part. Toutefois, deux années se dégagent du reste avec deux minimas en 2000 et 2009 dont les valeurs sont respectivement de 48 et 45%. On a donc une évolution de l'humidité relative qui ne reflète pas celle des précipitations. C'est ce qui nous permet de prendre en compte le rôle de la température et de la vitesse du vent pour mieux cerner ce paramètre.

    L'analyse de cette évolution montre que la situation est à la baisse de 2005 jusqu'en 2010 où i l y'a eu une légère hausse du taux d'humidité. Ainsi la diminution du pourcentage de vapeur d'eau contenu dans l'air rend celui-ci plus chaud et sec augmentant de ce fait le taux d'évapotranspiration du couvert végétal.

    Au total les taux d'humidité enregistrés au cours de ces années dépassent les 50% de vapeur (moyenne de 57%) contenue dans l'air. Cependant, les écarts journaliers peuvent être très importants à cause de l'ensoleillement diurne.

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    La station de Vélingara est soumise à des conditions climatiques qui sont fluctuantes au fil

    des années rendant ainsi les ressources naturelles plus vulnérables et plus particulièrement les paysages végétaux. On peut parler de péjoration des conditions climatiques qui rend plus vulnérable le couvert végétal notamment en le fragilisant. Mais les agents d'érosion sont également peuvent avoir des effets néfastes pour la végétation.

    3. Le rôle des agents d'érosion dans le processus de dégradation du couvert végétal Parmi les agents dotés d'un pouvoir érosif, il y'a le vent et l'eau, qui dans certaines conditions

    constituent des facteurs compétents dans la mobilisation des particules de matières organiques utiles au sol.

    3.1 Le vent

    Le vent est l'expression du déplacement de l'air à la surface de la terre. Ainsi il est le principal élément déterminant de l'érosion éolienne. Le pouvoir érosif du vent est défini par l'O.M.M (2005)8, comme « cette propriété du vent qui détermine sa capacité à entraîner et déplacer un sol dénudé et sec en bon état d'ameublissement. » En effet l'érosion éolienne est rendue possible lorsque la vitesse du vent au niveau du sol atteint la limite nécessaire pour entrainer les particules de sable. Ce déplacement est fonction de la taille des particules et de la vitesse du vent. Dans la forêt communautaire de Kandia, il y'a deux vents dominants. L'alizé continental ou l'harmattan, qui souffle de novembre à mai (durant la saison sèche) : vent chaud de direction est et s'accompagne de fortes amplitudes thermiques. La forte évaporation observée durant la saison sèche est en grande partie liée à la présence de ce vent. En plus, la mousson qui vient de l'équateur apportant les précipitations d'hivernage n'apparait qu'à partir du mois de juin. Elle atteint son apogée durant les mois d'août et de septembre. Ce vent vient du sud.

    Si la vitesse du fluide est déterminante dans le déplacement des grains de sable, il convient de noter que la végétation constitue un obstacle non négligeable dans la dynamique de lutte contre cette forme d'érosion. Le pouvoir érosif du vent est surtout possible quand c'est sur un sol nu, dépourvu de toute strate herbacée. Les photos 3 et 4 illustrent le phénomène dans notre zone d'étude.

    8 OMM : Organisation météorologique mondiale, 2005.Le climat et la dégradation des sols n° 989, 34p.

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    Photo3 : sol nu dans le village de Doubirou Photo 4 : champ exposé à l'érosion éolienne, clichés BALDE M. M., 2012

    Ces photos illustrent la vulnérabilité des champs de culture à l'érosion éolienne. Ici, on est à 1km du village de Doubirou. On remarque l'absence de couverture herbacée sur le sol ainsi que les arbres ; une sorte de « désert ». L'érosion éolienne peut facilement emporter les particules fines du sol et les matières organiques.

    Toutefois, en ce qui concerne le massif forestier de Kandia, le sol est protégé pour une bonne partie par une strate herbacée qui empêche le vent de jouer un rôle prépondérant d'agent érosif. Le phénomène est plus accusé dans les terres de culture où il n'y'a pas une couverture végétale importante. Ce qui l'expose à l'érosion éolienne surtout les tourbillons de saison sèche qui sont très fréquentes dans la zone. A part ces espaces, le vent ne présente pas un véritable potentiel érosif susceptible de jouer un rôle déterminant dans le processus de dégradation du massif forestier. C'est un domaine subguinéen où la densité des arbres permet de casser la force du vent. Ce fait relativise le pouvoir d'érosion éolienne. Au total, la dynamique d'érosion mécanique ne peut pas être considérée comme un facteur clef de la dégradation de la végétation dans cette partie de la C.R de Kandia. On peut également invoquer la part de l'érosion hydrique.

    3.2. L'eau, source potentielle d'érosion

    Si l'érosion est définie comme étant le déplacement des composants du sol à la surface de la terre sous l'action de l'eau ou de l'air en mouvement, celle dite « hydrique » résulte des mouvements de l'eau à la surface du sol. En effet, l'eau en mouvement est dotée d'une certaine énergie cinétique qui lui permet de bousculer les différents composants du sol et de les entrainer plus ou moins loin. Selon Dupriez et Leener (1990), l'étude de l'érosion hydrique commence par l'observation de tous les endroits où l'eau se déplace en contact avec le sol. Ils distinguent trois mouvements essentiels dans l'érosion hydrique :

    - le splash, qui est le choc provoqué par les gouttes de pluie sur le sol ;

    - le ruissellement, déplacement de l'eau à la surface du sol ;

    - l'infiltration qui est le mouvement de l'eau à l'intérieur du sol.

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    Mais selon l'O.M.M (2005), le déplacement et l'éclaboussement des particules de sol par les gouttes de pluie ne sont que la première étape du processus, qui se poursuit par l'enlèvement des particules et une érosion supplémentaire provoquée par l'écoulement des eaux. Toutefois, sans ruissellement, l'érosion provoquée par les précipitations reste négligeable.

    Par ailleurs, la quantité de particules susceptibles d'être mobilisée par les eaux de ruissellement est fonction de l'ampleur de la pluie.

    L'érosion hydrique est un phénomène qui dépend également de la pente du terrain (relief) qui peut accentuer le ruissellement augmentant ainsi l'ampleur des dommages subis par le sol. Dans la forêt communautaire de Kandia, l'érosion hydrique est renforcée par la présence d'un réseau hydrographique constitué par des cours d'eau temporaire qui servent d'abreuvoirs pour le bétail. Ces eaux de surfaces sont les lieux de dépôt des différents matériaux emportés.

    Photo 5 : Cours d'eau temporaire servant à l'abreuvement du bétail

    Cliché : BALDE, M. M., 2013

    Ce cours d'eau est l'un des composants principal du réseau hydrographique de la zone Nord de la communauté rurale de Kandia ; son nom est Bantanguel. Il reçoit les eaux de ruissellement de plusieurs petites mares qui lui sont connectées. Ici, on est au mois d'avril, en saison sèche. Après l'arrêt des pluies, l'eau reste jusqu'en fin janvier. Ce qui permet aux villages environnants d'abreuver leurs troupeaux.

    Un examen plus approfondi des conditions écologiques du massif forestier de la zone d'étude permet d'affirmer que ces dernières ne militent pas en faveur d'un processus érosif pouvant atteindre des proportions préoccupantes. En effet, cela se justifie par le fait que c'est un milieu qui est plat, dans son ensemble et la couverture du sol par la strate herbacée est assez importante pour résister au phénomène de splash. Ces deux éléments jouent un rôle limitant dans la dégradation du sol par l'eau.

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    Néanmoins, il apparait que ce sont les zones agricoles qui subissent les effets du phénomène d'érosion car ce sont des espaces qui sont nus sans aucune couverture herbacée leur permettant de résister à l'attaque. Il s'agit des champs qui sont le plus souvent situés entre les lieux d'habitation (villages) et la limite de la forêt. Ils sont les plus exposés aux deux agents d'altération. Dés les premières pluies, le phénomène est perceptible à travers le ruissellement. C'est ainsi que se manifeste l'érosion hydrique globalement participant à l'appauvrissement des sols et donc à la dégradation du couvert végétal puisque le sol constitue le support de ce dernier.

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    Conclusion partielle

    Le chapitre a cerné les caractéristiques physiques générales du milieu d'étude, qui se particularise par un relief plat avec des sols Deck joor et Joor. L'analyse de l'évolution des données climatiques de 1995 à 2010 montre une diminution et une irrégularité des précipitations dans le temps et dans l'espace. Cette variation n'est pas sans conséquences pour le couvert végétal surtout lorsqu'on se retrouve à un raccourcissement de la durée de l'hivernage. En plus les fortes températures entrainent une évapotranspiration très importante qui contraint les végétaux à développer des stratégies pour s'adapter aux nouvelles conditions.

    Les agents d'érosion : l'eau et le vent combinés à ces éléments du climat expliquent en partie le processus de recul du couvert végétal. D'ailleurs on peut faire une comparaison intéressante entre ce qui se passe dans la communauté rurale de Kandia et la description faite par E. le Floch (1992)9 concernant les régions arides et semi-arides. Selon lui, ces dernières sont caractérisées par la rareté et une forte variabilité dans le temps et dans l'espace des précipitations, par l'intensité de l'évaporation et par la précarité des ressources en eau. Dans ces zones, souvent prédisposées à l'apparition des phénomènes érosifs, la surexploitation des systèmes écologiques naturels fragiles conduit à des changements irréversibles et à une dégradation des systèmes de production. Cependant, l'homme à travers ses différentes activités est considéré comme étant le principal responsable de cette situation qui lui menace car c'est sur le milieu physique qu'il tire ses besoins vitaux.

    9 Il s'agit de l'ouvrage dirigé par E. le Floch, 1992. L'aridité : une contrainte au développement .Caractérisation, réponses biologiques, stratégies des sociétés, Paris, ORSTOM, 597p.

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    Chapitre 5 : Les facteurs anthropiques, principale cause de la dégradation de la forêt communautaire de Kandia

    Ce chapitre traitera de l'introduction de l'homme dans les écosystèmes naturels. On abordera ainsi la charge anthropique sur les milieux naturels à travers ses différentes activités qui ont des incidences négatives sur les ressources naturelles comme la végétation. En effet, dans le cadre de satisfaction de ses besoins, l'homme expose les ressources mises à sa disposition par la nature à une dégradation, voire à un épuisement.

    1. L'activité agricole, fondement de l'économie locale

    Au Sénégal, l'agriculture occupe une part importante de la population active car on estime qu'elle utilise plus de 70% de la main d'oeuvre nationale même si elle représente un faible pourcentage dans la formation du PIB. A l'instar de ce qui se passe au niveau national, la communauté rurale de Kandia est composée en grande majorité d'agriculteurs. C'est la première activité de la zone qui nourrit l'ensemble de la population. D'ailleurs, la région de Kolda regorge un potentiel agricole très important. Cet état de fait lui confère la vocation d'une région agricole au sens large du terme.

    1.1. Caractéristiques générales de l'agriculture

    La Communauté rurale de Kandia dispose de terres cultivables (PLD, 2011). Ces derniers font l'objet de plusieurs spéculations par les populations. En outre, il faut noter qu'une partie du bassin de l'Anambé est incluse dans la communauté rurale de Kandia.

    L'agriculture constitue la première activité dans la CR. Elle est de type pluvial et extensif. Les principales spéculations sont cultivées dans les champs de brousse, sur le plateau et dans les vallées.

    C'est une activité qui est surtout de type traditionnel et se pratique à l'échelle de la famille. Le matériel utilisé pour l'agriculture est toujours rudimentaire. Il est à traction animale dans la plupart des cas. C'est elle qui assure les principales ressources alimentaires et financières.

    Les principales cultures pratiquées sont :

    - le mil, le sorgho, le maïs et le riz comme culture vivrière ;

    - l'arachide, le coton pour les cultures de rente.

    Ces cultures bénéficient de l'apport d'intrants pour l'amélioration de la production. Il s'agit des semences, de l'engrais et de produits phytosanitaires. Mais il faut signaler au passage que beaucoup de ces produits sont détournés par les populations qui préfèrent les revendre en

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    Gambie pour satisfaire leurs besoins alimentaires. En plus, la C.R de Kandia est dotée en agents agricoles comme ceux de l'ANCAR, la SODEFITEX et la SODAGRI dans le but d'appuyer les producteurs (PLD, 2011).

    Par ailleurs il y'a une cohabitation entre agriculture et élevage. Ce qui permet aux familles disposant d'un cheptel d'utiliser la matière organique de ces animaux pour augmenter la fertilité des sols. Mais au-delà de cette description de l'activité agricole, il est important d'analyser l'évolution de la population en rapport avec les superficies cultivées pour se faire une idée plus précise du rôle dégradant du secteur pour la végétation.

    1.2. Lien entre agriculture et dégradation du couvert végétal

    Si l'agriculture est la première activité qui fournit aux populations les ressources alimentaires et financières dans la communauté rurale de Kandia, il n'en demeure pas moins qu'elle reste un facteur de dégradation de l'environnement. En effet, le lien entre croissance démographique et dégradation du couvert végétal a été souligné par de nombreux chercheurs. Le rapport sur l'état de l'environnement au Sénégal (2005) souligne que « la pression humaine se traduit principalement par des pratiques culturales ou pastorales inadaptées ».Pour le plan d'action environnemental régional (PAER, 2007) cette pression se traduit en termes de défrichements abusifs et de dégradation des sols. Ce qui représente une menace pour la viabilité des systèmes de production.

    Ainsi dans la Communauté rurale de Kandia, on observe ce type de pratiques agricoles. Il y'a une croissance démographique importante qui entraine une extension des champs à travers les défrichements. Le rapport du ministère de l'environnement et de la protection de la nature (MEPN) de 2005 estime que cette expansion agricole est due par les faibles performances de l'agriculture, la dégradation des sols et la nécessité de nourrir une population de plus en plus pauvre et à forte croissance démographique. D'ailleurs la population de la C.R de Kandia est passée de 18.111 habitants en 2004 à 22.582 habitants (PLD de Kandia, 2011). Les villages les plus peuplées se trouvent au nord de la C.R et entourent la forêt communautaire. La zone de Doubirou regroupe 43% de la population rurale de Kandia avec un taux d'occupation des sols de 70% (POAS de Kandia, 2012).

    Cette situation constitue un facteur potentielle de défrichement et donc de déforestation. D'ailleurs ce qui est étonnant, c'est que dans le cadre de l'élaboration du POAS, la zone où se trouve la forêt communautaire de Kandia est classée en ZAPA (zone agropastorale à priorité agricole) et en ZAPE (zone agropastorale à priorité élevage). On remarque donc une contradiction flagrante entre la perception des populations et la volonté des autorités locales.

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    En effet on peut s'interroger sur l'avenir de cette forêt communautaire dés lors qu'elle n'est pas prise en compte dans le plan d'occupation et d'aménagement des sols élaboré avec la participation des populations locales. Mais intéressons-nous aussi à l'organisation sociale de l'agriculture.

    L'organisation de l'agriculture dans la zone permet d'identifier deux types de champs : les champs collectifs et les champs individuels. Les champs collectifs servent à l'alimentation de la famille en général. On y cultive essentiellement du sorgho, du mais ou du mil. Leur superficie varie en fonction de la taille de la famille. Ils sont appelés « maaru »10. Le « Kamagna »11 , quant à lui est le champ individuel. Il permet de satisfaire les besoins financiers par la vente de la récolte. Ici, plus le nombre de personnes de la maison est important, plus les superficies emblavées le sont aussi. L'augmentation de la population se traduit par une déforestation dans le but de trouver des terres à l'ensemble des personnes en âge de pratiquer l'agriculture au sein du ménage. Il y'a alors un phénomène de réduction des superficies cultivables ainsi que les jachères. Pour avoir une idée plus précise sur la question, nous avons mené des enquêtes auprès des populations en 2013 (graphique 7).

    Graphique 7 : Types d'occupation en fonction des personnes interrogées

    Propriétaire

    Héritage

    Cédée par le mari Champ familial Defrichement Héritage+défrichement

    Source : Enquêtes de terrain

    10 Nom qui désigne le champ collectif en milieu peul et sert de nourriture à la famille.

    11 Champ individuel permettant au propriétaire de trouver des ressources financières par la vente de la récolte

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    L'examen du graphique 7 montre les différents types d'acquisition de la terre par les populations. On remarque que 28% des personnes interrogées ont hérité leurs champs de leurs parents. C'est la proportion la plus importante, suivi de ceux qui affirment qu'ils sont les propriétaires de leurs terres, soit 24% de l'effectif total. Il apparait que l'essentiel des femmes interrogées ont obtenu leurs champs par « don du mari ». Ce qui met en lumière la difficulté des femmes à accéder à la terre en dépit de leur droit reconnu par la loi sur le domaine national.

    L'occupation du sol par les deux modes d'acquisition : héritage+ défrichement représente 10%. Ce taux signifie que l'extension des terres de culture pour faire face à la croissance démographique ne connait pas encore des proportions démesurées.

    En effet, pour la plupart des ménages interrogés, il ressort que l'augmentation de la population n'a pas eu comme effet une extension des champs de culture. Les personnes interrogées affirment qu'elles n'ont pas défriché de nouveaux terrains depuis plusieurs années. Selon elles, le fait de demander une autorisation préalable au niveau du conseil rural rend la situation plus compliquée. En effet, depuis l'adoption de la loi 96-07 du 22 mars 1996 portant transfert de compétences aux collectivités locales, on assiste à un renforcement des pouvoirs du conseil rural en matière de gestion domaniale. Désormais, les populations rurales doivent formuler une demande d'affectation adressée au président du conseil rural pour l'obtention d'une autorisation de mise en valeur de la terre. Toutefois, on note qu'il y'a un décalage entre ce que disent les textes de lois et la pratique sur le terrain. En effet, durant les enquêtes menées, certaines personnes ont avoué qu'elles n'étaient pas informées de ces dispositions relatives au foncier et s'adonnent à des défrichements non autorisés (photos 6 et

    7). Photo 6 Photo 7

    Photo 6 : Défrichement à des fins agricoles dans la zone de Doubirou, cliché BALDE M. M., 2013

    On observe à travers ces images une déforestation pour un nouveau champ plus riche. Le bois mort jonche le sol. Les cendres témoignent ici de la pratique de l'agriculture sur brûlis.

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    Ces images montrent qu'en dépit de l'interdiction de défricher à des fins de cultures sans l'autorisation du conseil rural, qu'il existe encore des pratiques qui font fi de cette mesure. Pourtant le chef de la délégation spéciale qui est au sein du conseil rural, nous confiait que les demandes de défrichement concernaient « des régularisations, en général ne dépassent pas 4ha ». En se rendant sur le terrain, on se rend compte que la situation est différente de celle qui est décrite par les autorités locales. Globalement le phénomène de recul du couvert végétal est plus accentué dans la partie Nord du massif forestier. On observe une distance plus importante entre les champs et le village (1,5à 2km) alors que la moyenne autour du massif est de l'ordre du kilomètre. C'est dans ce secteur que l'érosion éolienne est la plus manifeste car c'est un espace « désert ». Ce constat s'explique d'une part par le poids démographique de cette zone et d'autre part, par les moyens dont disposent ces populations en termes de possibilité de mise en valeur des terres.

    En fait, ces villages sont habités par des sarakholés qui disposent des tracteurs et des moyens financiers conséquents pour cultiver des superficies relativement importantes en comparaison avec le reste de la Communauté rurale de Kandia. Ce sont des villages qui ont la chance d'avoir beaucoup d'émigrés et ces derniers à la veille de chaque hivernage envoient à leurs familles de l'argent pour l'achat d'intrants et aussi pour payer les services d'un tracteur. Il s'agit de Doubirou (village le plus peuplé de la C.R), Djida, Lambatara et Médina Mari Cissé.

    Il est intéressant de mentionner que c'est dans ces localités que les ventes frauduleuses d'engrais ont lieu. Cela s'explique par le fait que certaines personnes n'ayant pas de ressources financières suffisantes pour assurer l'alimentation de leur famille en période de soudure, préfèrent détourner ces intrants pour les revendre à ces populations à des prix plus chers.

    Une autre raison est que les villages situés dans cette partie Nord de la communauté rurale de Kandia ne bénéficient pas de l'engrais car la distribution de cet intrant obéit à la condition de cultiver du coton qui est commercialisé par la SODEFITEX. Or ces populations ont pour principales spéculations les cultures vivrières comme le mil, l'arachide, le maïs entre autres ; d'où la nécessité de recourir à l'achat d'engrais pour améliorer la fertilité des sols en dépit de la présence de cheptels bovins importants.

    Par ailleurs, les résultats des enquêtes semblent montrer que la diminution de la durée des jachères est de plus en plus observée au sein des terres de cultures.

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    En somme, l'analyse des informations recueillies sur le terrain aux moyens d'enquêtes et d'entretien dans la C.R. de Kandia permet de confirmer le rôle néfaste de l'agriculture pour le maintien de la végétation en termes de superficie dans un contexte de croissance démographique. D'ailleurs, on assiste à une réduction de la superficie du massif forestier au profit de l'extension des champs de cultures.

    1.3 L'évolution des superficies cultivées entre 1999 et 2005

    Les enquêtes menées auprès des populations riveraines du massif forestier ont certes indiqué une dynamique régressive mais sans pourtant donner des chiffres précis du processus. Toutefois, le recours aux images satellitaires a permis de combler cette lacune. En effet, l'analyse des images du satellite Landsat en 1999 et 2005 permet de se faire une idée plus précise de cette évolution. Il s'agit d'une analyse diachronique qui a aboutit à deux cartes d'occupation du sol dont la comparaison donne des chiffres de la dynamique de régression de la superficie forestière au profit des espaces agricoles.

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    Source : BALDE M. M., 2013 d'après le traitement des images de LANDSAT

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    Un examen minutieux de ces deux cartes fait ressortir l'évolution des superficies agricoles et forestières durant la période 1999-2005. Ainsi sur la carte d'occupation du sol de l'année 1999, on y voit l'espace occupé par les espaces agricoles ainsi que la superficie de la forêt. On remarque que la partie Nord de la zone est celle où dominent les zones réservées à l'activité agricole. Il s'agit des villages comme Médina Maye, Médina Mari et Doubirou. Il y'a une dispersion des champs qui se manifeste par des espaces « déserts ». La couverture végétale est en vert foncé sur la première carte.

    Le Sud-est est également dans une forte pression démographique qui se manifeste ici par l'importance des surfaces agricoles. Bref, les espaces agricoles alternent avec ceux qui sont occupés par le couvert végétal.

    Quant à la carte d'occupation du sol de 2005, on remarque une dynamique régressive de la superficie de la végétation. Par exemple, il y'a eu une disparition d'une partie considérable de la superficie de la végétation au centre du massif. Vers la zone frontalière avec la Gambie, la surface boisée a connu une diminution importante durant cette période.

    L'analyse de ces deux cartes permet de constater que l'évolution de la formation végétale suit une régression en termes de superficie. Même les observations faites sur le terrain confirment cette dynamique et en plus, il y'a une perte de qualité qui est aussi notée. En outre, la cartographie de l'occupation du sol entre ces deux dates s'est faite avec un calcul des superficies de la couverture végétale ainsi que les zones agricoles (tableau 7).

    Tableau 4: Évolution des superficies cultivées et de la végétation (km2) de 1999 à 2005

    Année

    1999

    2005

    Zones agricoles

    30

    44

    Superficie occupée par le massif forestier

    47

    33

     

    Source : d'après le traitement des images de Landsat

    Nous avons ainsi une augmentation des superficies cultivées de 30 à 44, soit 14 en 6 ans. Ce qui illustre le poids de l'agriculture dans cette partie de la communauté rurale de Kandia qui reste la plus peuplée avec 43% de la population. Par contre, durant ce même intervalle de temps, il y'a eu une réduction de la surface de la végétation qui correspond également à 14.

    Dans une analyse plus globale, il faut dire qu'un ensemble de facteurs à la fois agricoles, sociaux, politiques et économiques conditionnent et influencent les défrichements dans la

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    communauté rurale de Kandia. En effet, l'appauvrissement continu des terres a amené les populations locales à poursuivre les défrichements et à la réduction des jachères. La poursuite et la diffusion des terres de cultures attelées a rendu plus difficile l'intégration de l'arbre en augmentant sensiblement la dimension des parcelles de culture surtout pour les « Kamagna », champ individuel dont la récolte est destinée à satisfaire les besoins financiers du propriétaire. Par ailleurs, la réduction des jachères combinées à la faiblesse de la fumure minérale ainsi que l'inaccessibilité de la fumure organique aux personnes n'ayant pas de bétail, ont provoqué une baisse des rendements. Cette baisse de la production de la terre s'est manifestée à son tour par l'accroissement compensatoire des superficies cultivées. On peut retenir que la fertilité des sols diminue au fur et à mesure que le couvert végétal disparait et les expose ainsi au lessivage par les eaux de pluies et à l'ensoleillement. L'image d'un cercle vicieux illustre bien la situation.

    En plus, la culture de l'arachide et du coton qui occupent une place prépondérante dans la zone ont largement contribué à cette expansion des terres agricoles. Ces spéculations sont très exigeantes en espaces et sont accompagnées d'un cadre incitatif important (distribution de semences, outillages, produits phytosanitaires) et d'une politique de mécanisation agricole avec l'introduction d'un outillage moderne (Kandé M. A., 2007).

    La combinaison de ces différents facteurs explique l'augmentation des superficies cultivées dans cette partie de la communauté rurale de Kandia au détriment des ressources forestières qui ont connu un recul de 14km2. Toutefois, notons que cette augmentation des zones agricoles ne concerne que la période 1999-2005. Depuis cette date, on ne sait pas de combien ont augmenté ces superficies. L'absence d'images satellitaires récentes qui couvrent la zone n'a pas permis de faire des estimations afin d'avoir des informations précises sur l'évolution récente du phénomène. De toute façon, le processus de dégradation du couvert végétal s'est fortement amplifié durant ces dernières années avec la pression démographique qui y est présente. Mais qu'en est-il pour l'élevage ?

    2. L'élevage, deuxième moteur de l'économie locale

    Le département de Vélingara est très connu dans sa vocation de développement du secteur primaire.

    Le secteur de l'élevage est donc un de ces domaines qui est en perpétuelle hausse. Il en est de même pour la communauté rurale de Kandia qui pratique un élevage extensif du type sédentaire avec une petite transhumance saisonnière : pendant l'hivernage, on remarque un

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    petit déplacement des éleveurs avec leurs troupeaux vers des zones un peu plus libres afin d'éviter la divagation du bétail vers des zones de culture. En saison sèche, c'est le déplacement vers le bassin de l'Anambé à la recherche de points d'eau et de pâturages.

    L'espèce bovine est la plus développée dans la communauté rurale de Kandia avec plus de 25 000 têtes, suivi des ovins, caprins, chevaux, porcs et volailles. En effet, les petits ruminants sont estimés à l'ordre de 15 000 têtes (PLD de Kandia, 2011).

    La communauté rurale de Kandia est l'une des plus grandes zones d'approvisionnement en viande de la commune de Vélingara ainsi que du lait. Les quantités sont estimées à prés de 2000 litres par jour selon la même source (PLD de Kandia). Mais en ce qui touche la viande, le déficit de contrôle au niveau de la communauté rurale fait que l'on ignore la quantité exacte fournie par jour et par an. Ce phénomène est surtout dû au manque d'agents du service de l'élevage.

    Le type d'élevage pratiqué dans la communauté rurale de Kandia repose sur un système extensif et la transhumance. Les animaux dépendent entièrement de la disponibilité du fourrage dans les parcours naturels et les résidus des cultures dans les champs en saison sèche pour leur alimentation. Ce qui exerce plus de pression sur l'environnement que le système moderne intensif (PAER, 2007). Néanmoins, dans le souci de valoriser le potentiel existant et une volonté de modernisation du domaine, une introduction de l'insémination artificielle a permis de réaliser des progrès vers un élevage intensif. Mais sans trop s'attarder à la description du secteur, on peut s'interroger sur la manière dont l'élevage pourrait jouer un rôle déstabilisateur pour le couvert végétal

    - Comment l'activité pastorale peut-elle contribuer à la dégradation des paysages végétaux ?

    Au Sénégal, les systèmes de productions animales sont basés pour l'essentiel sur un élevage extensif où l'alimentation du cheptel est assurée par le pâturage naturel essentiellement fourni par les forêts classées, les réserves sylvopastorales et les jachères (rapport du MEPN, 2005). C'est ce qui se passe dans la communauté rurale de Kandia. Ainsi, l'activité pastorale peut présenter dans certaines conditions des incidences négatives sur les paysages végétaux plus particulièrement sur certaines espèces comme le venn (pterocarpus erinaceus) qui est très appété par le bétail (Kandé M. A., 2007).

    Selon le même auteur, cet appétit du bétail pour le venn amène les éleveurs à pratiquer l'émondage et l'ébranchage des espèces fourragères durant la saison sèche. En effet, la

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    raréfaction du tapis herbacé fait recourir au fourrage aérien. Un autre fait est que la dégradation des conditions du milieu durant cette période (assèchement de l'herbe) pousse parfois les éleveurs à mettre le feu pour favoriser la repousse d'herbes vertes qui servent de nourriture au bétail. Ainsi la régénération des formations naturelles est retardée par la présence du bétail du fait que les animaux préfèrent les nouvelles pousses que l'herbe ordinaire. Les jeunes arbres constituent alors la « proie préférée » des moutons, chèvres et boeufs.

    La position géographique de la C.R de Kandia fait que le phénomène d'amplification de la dégradation de la végétation par l'élevage s'accentue durant ces dernières années. Il y'a un nombre important de têtes de bétail concentrés sur des parcours pastoraux qui se rétrécissent d'une année à l'autre. Le massif forestier de Kandia est un espace fragile confronté à une augmentation considérable des effectifs des animaux qui y pâturent. La proximité de la Gambie au nord est source de fortes tensions entre éleveurs. En effet durant la saison sèche, de nombreux troupeaux de bétails (ovins, caprins et ovins) transitent dans cette zone pour aller vers l'Anambé où les conditions naturelles sont plus favorables à l'activité pastorale. Outre, les gambiens, on retrouve aussi des éleveurs venus du Fouta (Nord) et de Tamba.

    C'est durant ce passage que les éleveurs effectuent des coupes abusives de certaines espèces d'arbres fourragers pour leur bétail. Cette coupe se traduit par une destruction importante du couvert végétal et des conflits entre populations locales et bergers transhumants. Les lieux de passage de ces troupeaux se remarquent par le nombre impressionnant de branches d'arbres coupées. Ce sont les grands sujets qui font l'objet de ces émondages comme le dianela oliveri qui est très appété par le bétail.

    Photo 8 : Grand sujet coupé par les populations Photo 9: Émondage des grands arbres pour

    l'élevage, clichés BALDE M. M., 2012

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    On voit sur ces images que ce sont les grands arbres qui sont visés même s'ils ne se trouvent pas forcément en pleine brousse. C'est prés du village de Saré Dicory dans un champ au courant du mois d'avril.

    Cependant d'autres bergers abattent les arbres vivants pour mieux permettre aux animaux de brouter directement les feuilles. D'ailleurs, cet état de fait n'est pas sans conséquences entre ces bergers transhumants et les éleveurs locaux. Ces derniers estiment que leurs ressources sont pillées avec la complicité des autorités de la communauté rurale qui donnent l'autorisation aux éleveurs en transit de s'y installer. Il y'a donc naissance de conflits autour des zones de pâturage et des points d'eau entre éleveurs d'une part et d'autre part entre éleveurs et agriculteurs. Le phénomène de transhumance est très répandu dans la zone frontalière avec la Gambie que ce soit en saison sèche ou en hivernage. Durant la saison des pluies, les éleveurs de la Gambie préfèrent venir installer leurs troupeaux avec un nombre de personnes réduits en territoire sénégalais afin de bénéficier des conditions favorables de pâturage jusqu'à la fin de l'hivernage. Cette installation augmente la pression du bétail sur les pâturages et fragilise le milieu récepteur de cet important nombre de têtes de bétail. Ainsi la disponibilité des ressources est fortement éprouvée par l'activité pastorale.

    En définitive, l'activité pastorale dans la communauté de Kandia et plus particulièrement dans la zone Nord de la C.R est un facteur amplificateur de la dégradation des paysages végétaux. Cette partie de la Communauté rurale subit de fortes pressions liées aux pratiques agropastorales. Toutefois, au-delà de ces activités, il y' a également l'exploitation forestière qui exerce des effets négatifs sur l'écosystème.

    3. L'exploitation forestière, phénomène déterminant de la dégradation du couvert végétal dans la communauté rurale de Kandia

    Le code forestier du Sénégal (1998) dans sa partie réglementaire définit l'exploitation forestier en ces termes : « l'exploitation forestière s'entend de la coupe ou de la collecte des produits forestiers, notamment :

    -le bois ;

    -les exsudats, le mil et les huiles ;

    -les fleurs, fruits feuilles, écorces et racines ; -la faune sauvage terrestre, aviaire et aquatique.

    70

    Est également considérée comme exploitation forestière l'utilisation de la forêt à des fins touristiques ou récréatives (article R18) ».

    Pour le service des eaux et forêts, c'est « l'ensemble des opérations permettant la récolte et l'utilisation avantageuse des ressources forestières » (DEFCCS, 1998, p.2).12 C'est donc tout prélèvement de produits naturels d'origine minérale, animale ou végétale sur une formation forestière.

    Ainsi définie, l'exploitation forestière regroupe plusieurs acteurs ayant comme ressource commune la forêt. Pour mieux analyser le secteur, nous distinguerons les coupes liées au bois d'oeuvre, le bois énergie, la pharmacopée entre autres.

    3.1 La coupe de bois d'oeuvre, cause de la disparition de certaines espèces

    La communauté rurale de Kandia est dotée d'un potentiel de ressources ligneuses qui fait l'objet d'une intense exploitation par les populations locales mais aussi par d'autres personnes venues d'ailleurs. L'activité de coupe de bois d'oeuvre est très dynamique dans le département de Vélingara. A cet égard, la communauté rurale de Kandia a longtemps servi d'approvisionnement à la commune de Vélingara. L'espèce la plus convoitée est le venn. Mais aujourd'hui, elle a presque disparu à cause de la forte pression qu'elle subit. Une visite sur le terrain permet d'observer les dégâts écologiques causés par les exploitants du bois d'oeuvre. La pratique a concerné d'abord les formations qui étaient proches de la commune de Vélingara par la coupe des troncs d'arbres. Au fil des années, la filière a connu un regain d'intérêt qui s'est manifesté alors par une intensification des coupes de bois faisant ainsi des dommages écologiques irréparables. Tout ce processus s'est déroulé sous le regard insoucieux des populations qui se contentaient d'observer le phénomène. Pour le service des eaux et forêts, le manque de moyens logistiques et de personnel est une contrainte pour faire face aux différents contrevenants. En outre il apparait dans nos investigations qu'il y'a une fraude importante de la part des acteurs du bois d'oeuvre qui se déroule durant la nuit pour échapper au contrôle des agents des eaux et forêts. Il semble que certains de ces agents seraient corrompus d'après les témoignages recueillis auprès des populations.

    L'exploitation du bois d'oeuvre dans la communauté rurale de Kandia se fait dans deux directions essentielles : vers la commune de Vélingara avec des charretiers qui après avoir coupé les troncs les acheminent pour les revendre aux chefs d'atelier de menuiserie. Ces

    12 Direction eaux, forêts, chasse et conservation des sols, 1998 cité par Fofana B., 2001. Exploitation forestière et suivi de l'évolution des ressources dans le Boundou : état des lieux et perspectives, mémoire de maitrise, UGB, 133p et annexes.

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    menuisiers possèdent des machines pour scier ces troncs et les transforment en meubles. Ces derniers sont soit vendus sur place, soit acheminés vers la capitale, Dakar pour y être vendus. En ce qui concerne la zone frontalière avec la Gambie, ce sont des exploitants étrangers qui sont basés dans les villages frontaliers avec ce pays. Ici, l'espèce la plus menacée est le fromager car le venn a été complètement décimé. Ces exploitants venus de la Gambie disposent de scies électriques qui sont suffisamment efficaces pour venir à bout d'un tronc d'arbre. Les observations sur le terrain permettent de saisir l'ampleur du phénomène dans le massif forestier et constitue un élément déterminant dans le processus de dégradation du couvert végétal.

    Photo 10 : phénomène de coupe des grands arbres Photo 11 : Les exploitants forestiers ciblent les grands arbres qui sont plus rentables, clichés BALDE M. M., 2012

    Ces photos illustrent la coupe des troncs de fromagers qui sont destinés à la menuiserie locale. Après la coupe, les troncs sont transportés par charrette au village. En ce moment, certains troncs sont transformés en planches et d'autres sont vendus en Gambie.

    C'est en réalité une activité très lucrative avec des ramifications de part et d'autre de la frontière sénégalo-gambienne. D'ailleurs les propos du chef de secteur du service des eaux et forêts de Vélingara résument bien la situation : « « Il y'a un réseau d'exploitants forestier basé en Gambie mais évoluant au Sénégal ». Selon toujours ses propos, ce réseau bénéficie de la complicité passive des populations locales car ce sont elles qui hébergent ces étrangers pilleurs de leurs ressources forestières. C'est dans ce contexte qu'il avait adressé un rapport au préfet du département de Vélingara par le même chef de secteur du service des eaux et forêts pour lui alerter des conséquences néfastes que cette exploitation frauduleuse de bois engendre.

    Par ailleurs, les exploitants forestiers sont majoritairement composés de « peuls fouta » qui ont des parents installés dans la C.R. de Kandia et qui opèrent à partir des villages frontaliers avec la Gambie pour accéder à la ressource. C'est une activité bien organisée. En fait la porosité de la frontière en complicité avec certains individus permettent d'entretenir ce trafic

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    de troncs d'arbres. Avec la forte demande, la filière connait une intensification avec les scies électriques qui sont plus rapides pour la coupe. Donc elles font plus de dégâts que la hache traditionnelle. Cette intense exploitation est loin de dissiper les craintes de destruction irréversible de ce massif forestier si la dynamique actuelle continuait.

    En somme, il faut dire que l'exploitation clandestine des ressources forestières est une question qui concerne toute la partie Nord de la Casamance. A ce titre, le journal, le Quotidien daté du vendredi 28 juin 2013 consacrait un large dossier à la question. L'auteur de l'article écrivait que : « les ressources forestières de la Casamance sont exploitées par un vaste réseau de trafiquants de bois composé de sénégalais, de gambiens et de chinois basé à Banjul. Le phénomène a pris de l'ampleur ces dernières années .......le produit issu de la fraude est exporté vers l'Asie. Et la Gambie est la plaque tournante de ce commerce illicite qui compromet l'économie locale (p.4) ».

    Il faut noter que c'est le même phénomène qui est observé dans la communauté rurale de Kandia. Ce sont les espèces les plus préservées qui sont décimées par ces exploitants frauduleux. Ces images prises au mois de juin 2013 illustrent l'ampleur du phénomène.

    Photo 12 : prise en juin 2013 Photo 13 : tronc de venn coupé, clichés (BALDE M. M., 2013)

    Il s'agit des espèces comme le venne, le dimb, cailcédrat et le rônier qui sont les plus recherchées. Ces espèces génèrent une forte valeur ajoutée pour l'artisanat et l'industrie. C'est une exploitation bien organisée.

    En effet, les troncs d'arbres coupés sont transportés en Gambie via les deux marchés hebdomadaires situés à la frontière sénégalo-gambienne. Ces marchés sont Sabi non loin de Bassé et Gambisara, deux villes gambiennes. Ces deux villes servent de point de transit des produits issus de l'exploitation. Par, ailleurs, la localité de Gambisara, frontalière avec la communauté rurale de Kandia, est l'un des plus grands dépôts de bois importé du Sénégal. La position géographique de cette localité lui confère un statut de ville carrefour pour le

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    département de Médina Yoro Foula, où le phénomène d'exploitation clandestine du bois est très développé et la communauté rurale de Kandia. Cette situation fait de ce marché hebdomadaire une destination phare pour ce trafic de bois.

    Photo 20 : Exploitant forestier à Djida,cliché BALDE M. M., 2013

    La photo montre un exploitant forestier à Djida, un village frontalier avec la Gambie. On voit que les arbres coupés sont ensuite transformés en planches pour divers meubles. Ensuite les oeuvres d'art sont vendues en Gambie. Ici on est à quelques kilomètres de Gambisara, marché hebdomadaire très fréquenté les mercredis.

    Notons que l'exploitation clandestine du bois d'oeuvre dans la communauté rurale s'effectue par un ciblage des grands arbres qui sont plus rentables économiquement. L'usage de tronçonneuses cause plus de dégâts écologiques dans la forêt communautaire. Elle aboutit à la disparition des grands arbres ainsi que les espèces ciblées. Ce qui n'est pas sans conséquences pour l'équilibre écologique du milieu surtout quand on sait que ces grands arbres y jouent un rôle fondamental.

    Les enquêtes menées auprès des populations riveraines du massif révèlent que 34% des personnes interrogées pensent que les coupes abusives d'arbres constituent le premier facteur de dégradation du couvert végétal (graphique 8).

    74

    Graphique 8 : Causes principales de la dégradation du couvert végétal en (%) selon les personnes interrogées

    34

    10

    14

    12

    30

    Feux de brousse Emondage (élevage) Bois-énergie

    Coupes abusives

    Défrichement suivi de brulis

    Source : d'après les enquêtes de terrain, 2013

    Comme on le voit, l'exploitation forestière plus précisément, les coupes abusives de bois d'oeuvre sont considérées par les populations locales comme étant la principale cause de la dynamique de régression des ressources forestières. En outre, on remarque que les feux de brousse arrivent en deuxième position. Mais, on note aussi que l'élevage à travers l'émondage (coupe des branches d'arbres) occupe une part non négligeable (14%). Ceci montre le rôle essentiel des coupes de bois dans ce processus de dégradation quel que soit l'usage que l'on en fait.

    Par ailleurs, l'analyse de cette exploitation frauduleuse de bois dans cette partie de la communauté rurale de Kandia présente une double perte pour les habitants. Tout d'abord le caractère frauduleux de la filière constitue un manque à gagner en termes de recettes pour le conseil rural. Ensuite, le pillage des ressources primaires dans un contexte d'accroissement des besoins est une menace pour la stabilité de l'écosystème, support des modes de productions locales. Que se passera t-il pour les populations si les ressources forestières venaient de se terminer comme c'est le cas dans le Nord du pays ? La réponse à cette question mérite d'être cherchée.

    En définitive, l a dégradation du couvert végétal se manifeste dans ce cas à travers une perte de biodiversité (disparition du bois de venn) et une menace de disparition pour le fromager. C'est également une diminution de la densité des paysages végétaux ; donc une perte de quantité qui s'observe. La combinaison de ces éléments prépare le massif à la dynamique de l'érosion. Aussi les coupes pour le bois-énergie ne peuvent pas être négligées dans cette dynamique, elles ont des impacts qui doivent être considérer.

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    3.2 Bois -énergie et pratiques socioculturelles

    « Lutter contre la dégradation des écosystèmes forestiers tout en fournissant aux populations urbaines une énergie abondante et bon marché qu'elles réclament...C'est en ces termes que se pose aujourd'hui la problématique de l'approvisionnement énergétique des villes d'Afrique Noire » (G. D. Méo, 1998)13 . Hamed Sow, (1990) dans Le bois énergie au Sahel environnement et développement nous apprend que le bois constitue la principale source d'énergie de la région, en moyenne plus de 80% de la consommation. Selon lui, la totalité des ménages ruraux utilise le bois pour la cuisson des aliments ainsi qu'une bonne partie des ménages urbains. Les besoins en bois en milieu rural sont généralement satisfaits par l'autocollecte des arbres morts. Les enquêtes de terrain permettent de confirmer ce point de vue car l'ensemble des femmes rencontrées déclarent qu'elles vont directement s'approvisionner dans la forêt. Avec ces deux auteurs, nous évoquons les incidences des coupes de bois de chauffe sur les ressources forestières. En effet, la coupe de bois en milieu rural trouve plus de facilité car la ressource est disponible en grande quantité (même si tendance est à la raréfaction). Certaines populations n'ont pas la culture de cuisiner avec le charbon. Elles sont plus à l'aise avec le bois mort sur un foyer à trois pierres. C'est la raison pour laquelle les femmes pratiquent la coupe du bois mort pour la cuisson des aliments dans la communauté rurale de Kandia. Toutefois selon des spécialistes, la cuisson des aliments avec le charbon est plus économique que les foyers à trois pierres.

    Le bois-énergie participe pour une bonne part à la déforestation de l'écosystème forestier à cause de l'augmentation des besoins.

    En milieu peul, ce sont les femmes qui se chargent elles-mêmes de la collecte du bois de chauffe. Cette collecte consiste à couper les arbres morts et les rassembler en fagots. Ce qui ne constitue pas un grand risque pour la dégradation du couvert végétal. Mais, les femmes au-delà de la collecte du bois mort, s'adonnent à la coupe du bois vert, c'est-à-dire les arbres vivants. Ce sont les arbustes qui sont les plus concernés. Pourtant, ces jeunes individus constituent le potentiel qui va assurer la régénération naturelle du massif. Les femmes interrogées justifient la coupe des arbres vivants par le fait qu'ils sont plus combustibles durant l'hivernage. En fait, l'approche de la saison des pluies est un prétexte pour couper et rassembler des quantités massives de bois qui est destiné à la cuisson des aliments.

    13 Méo G. D., 1998. Quelles énergies domestiques pour les populations urbaines d'Afrique Noire ? In Énergie populaire dans le Tiers monde Enda (Environnement Africain n° 20-21-22, Vol v. 4, vol VI, 1-2, 405p.

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    Photo 14 : coupe du bois vert destiné à la cuisine Photo 15 : Après être coupé, le bois est rassemblé et rangé et même ramené au village, clichés BALDE M. M., 2012

    Sur la photo 14, on voit le paysage désolant des arbustes qui font l'objet de destruction de la part des femmes de ménage. Ensuite, le bois est rassemblé et séché au soleil pour après être ramené au village pour la cuisine.

    Ce phénomène est amplifié p ar les gambiens qui s'approvisionnent également en bois de chauffe dans cette forêt. D'après les enquêtes faites auprès des villages situés prés de la frontière comme Doubirou, le volume que représentent ces prélèvements serait de plusieurs charrettes par jour. C'est une exploitation frauduleuse de bois-énergie qui se fait en complicité avec les populations de ces villages. Par ailleurs, la coupe du bois à des fins de cuisson est l'oeuvre des hommes en milieu Sarakolé. Ici les femmes n'interviennent pas dans le processus d'exploitation. Elles attendent que les maris apportent le bois de chauffe nécessaire pour la cuisine. Dans l'accomplissement de cette collecte de bois, les « Sarakolés » utilisent des tracteurs qui ont une plus grande capacité de stockage de bois. Ce qui fait que les ressources forestières disponibles sont soumises à une surexploitation. Globalement, on observe une régression des superficies boisées avec un éloignement de ces espaces par rapport aux villages et une raréfaction des arbres morts. En effet, il y'a une crise complexe au centre de laquelle se trouve l'arbre en tant que « facteur de production » (protection des champs contre l'érosion pluviale et éolienne, reconstitution de la fertilité des sols...) et comme produit énergétique, sans oublier ses autres usages nutritionnels (fruits parfois, aliments pour le bétail) et médicinaux (Sow H., 1990).

    La communauté rurale n'est pas encore ouverte à l'exploitation du charbon car les quotas alloués à la région de Kolda en la matière concernent pour le moment la C.R de Sinthiang Koundara dans l'est du département de Vélingara. Mais il y'a déjà des signes qui laissent penser que la filière charbon de bois ne tardera pas à s'installer dans la zone. Dés lors on peut se demander si l'ouverture probable de cette communauté rurale à l'exploitation du charbon

    de bois ne serait pas une activité qui risquerait d'aggraver davantage le processus de

    77

    dégradation du couvert végétal dans cet écosystème fragile. L'avenir nous édifiera sur cette question. En attendant, intéressons nous aux impacts des feux de brousse sur les paysages végétaux.

    3.3. Les feux de brousse

    Les feux de brousse constituent un fléau au Sénégal comme dans les autres pays du Sahel. Ils sont reconnus comme une des sources principales de dégradation des ressources forestières (Decleire, 1999). 14 D'après lui, différentes études basées sur le suivi des placettes permanentes ont permis de constater que les zones affectées par les feux de brousse de façon répétée se caractérisent par :

    - une diminution progressive de la diversité des essences représentées et des potentialités de régénération des essences plus sensibles au feu

    - des dégâts de feu plus important sur les arbres de petits diamètres

    - une plus grande diminution du stock de bois vivant et du stock de bois mort sur pied dans les forêts les plus dégradées

    - une plus grande proportion d'arbres morts sur pied dans les savanes arborées moins dégradées.

    Toutefois, Michel Petit (1990) nous apprend que les feux de brousse ou d'herbe sont l'objet de controverses et possèdent une double fonction :

    - débarrasser le sol du feutrage que constitue l'accumulation sur place de matière sèche qui ralentit ou élimine les jeunes pousses ;

    - nettoyer le sol des animaux nuisibles.

    Mais il note que le vrai problème se trouve dans les excès car le feu est indispensable. Car au-delà des effets directs causés par les feux, leur répétition est à l'origine d'une évolution régressive des superficies boisées. Cette évolution se traduit par un dégagement de chaleur qui accroit la vitesse de minéralisation de la matière organique qui perd ainsi son rôle stabilisateur : « la destruction des agrégats organo-minéraux, qui favorisent l'infiltration, rend les sols battants. De la même façon, la chaleur entraine un durcissement superficiel qui s'oppose à la pénétration des eaux lors des premières averses. Ce qui fait qu'on observe un accroissement du coefficient de ruissellement pernicieux en saison des pluies ».

    14 Il s'agit d'une étude menée par Yanek Decleire en novembre 1999 pour l'ONG allemande GTZ sur le développement de la gestion des feux de brousse au Sénégal

    78

    Ainsi à travers ces deux auteurs, il ressort que les feux de brousse présentent des effets dangereux pour le couvert végétal. On peut même dire que les feux de brousse constituent un indicateur de désertification dans la mesure où il s'attaque principalement à la biomasse végétale et les arbustes. En effet, l'ampleur du feu est souvent fonction de l'importance de la biomasse végétale. Le Centre de Suivi Écologique (1999)15 estime que dans les zones de grand incendie, la quantité de biomasse mesurée à l'hectare dépasse les six tonnes par endroits. C'est ce qui explique que la majorité des incendies repérés au Sénégal sont localisés dans la partie Sud et Sud-est du pays. Selon ce même document, la densité de la végétation dans la partie sud du territoire peut justifier la fréquence et le caractère violent des incendies qui surviennent parfois lors des préparations agricoles. Toutefois, selon le rapport du MEPN de 2005, en zone soudanienne, l'impact de ces feux sur la strate herbacée est moindre. En effet, des études faites sur les effets des feux de brousse dans la communauté rurale de Bandafassi, en savane soudanienne, montrent qu'en dépit de la destruction de la couverture herbacée, la végétation se reconstitue quelle que soit la période de mise à feu (Diatta, 1998 cité par le même rapport).

    D'après les observations de terrain, on peut dire que le massif forestier de Kandia présente des conditions écologiques favorables à l'émergence d'incendies violents. Cette partie de la communauté rurale de Kandia n'échappe pas à cette situation. Elle est soumise à des feux de brousse répétées et particulièrement violents. A ce titre, selon les enquêtes de terrain, les feux de brousse apparaissent comme la deuxième cause de dégradation du massif forestier (voir graphique 8). D'ailleurs, certains villages sont souvent victimes de ces incendies. Notons au passage que c'est durant les mois de janvier et de février que le pic des feux de brousse qui ravagent des centaines de milliers d'hectares de terres propices à l'agriculture est atteint (ibid.).

    Photo 16 : Photo 17 :

    15 Il s'agit d'une étude menée par Y. Decleire en 1999 sur le développement de la gestion des feux de brousse au Sénégal et qui a cité le Centre de Suivi Écologique.

    79

    On voit ici que la couvert végétale est détruite ainsi le tapis herbacé par les flammes qui ont tout balayé sur leur passage dans la forêt communautaire, cliché BALDE M. M., 2012. Pourtant, beaucoup d'efforts de reboisement avaient été accomplis par les populations riveraines appuyés par le service des eaux et forêts de Vélingara.

    Mais on peut s'interroger sur les causes de ces feux ?

    Il existe une littérature assez importante sur les feux de brousse. On retiendra que l'analyse des causes de feux renvoie toujours à la présence d'activités humaines. Les feux de brousse sont très liés à certaines formes de mobilité qui relèvent des activités humaines, à travers des modes de vie, de mise en valeur de l'espace ou d'appropriation des biens et des ressources naturelles. Cette observation est corroborée par l'importance relative des zones brûlées dans les parties du Sénégal les plus concernées par ces stratégies de mobilité (Ferlo, Sud-est et frontières) et leur faible ampleur dans le quart occidental où la sédentarisation est plus marquée. 16

    Ajoutons que parmi les modes d'appropriation des ressources, la récolte du miel est souvent citée comme étant une des causes principales des feux de brousse dans la C.R de Kandia. Mais il y'a aussi les exploitants forestiers qui sont responsables de ces incendies. Ce qu'on remarque dans la zone, c'est que ces derniers passent la journée dans la forêt à couper des troncs d'arbres. Et le plus souvent, ils profitent pour faire du thé en allumant du feu. Parfois, ce feu allumé est laissé pendant plusieurs jours sans être éteint. D'où l'apparition d'incendies incontrôlés. En outre, la mobilité des personnes autour des marchés hebdomadaires (loumas) et la dispersion subséquente qui y suit sont considérées comme un risque potentiel d'incendie.

    Or la communauté rurale de Kandia entretient des relations très dynamiques avec la Gambie.

    Ces relations sont fondées sur des échanges commerciaux rendus possibles grâce à l'existence de deux marchés hebdomadaires en territoire gambien mais accessibles aux sénégalais. Cette situation peut être un élément qui participe à la recrudescence des feux dans la forêt communautaire de Kandia. Ceci est renforcé par le fait que lors de notre première visite de terrain au moins de décembre, le phénomène des feux de brousse n'était pas encore perceptible. Mais nous avons été surpris de constater lors du second séjour de terrain que les flammes avaient emporté tout sur leur passage alors que cette zone était pourtant à l'abri des

    16 Centre de Suivi Écologique cité par Y. Decleire en 1999

    80

    feux depuis plus de 4 ans. Ce qui a anéantit tous les efforts qui avaient été menés par le service des eaux et forêts de Vélingara, les autorités communautaires et les populations environnantes. L'objectif était de sauvegarder cet écosystème en incitant les populations à effectuer des campagnes de reboisement et à entretenir les espèces reboisées par l'établissement de pare-feux. La violence de l'incendie a tout détruit. C'est toute la particularité des feux de brousse qui ont le pouvoir de détruire des années d'efforts en quelques minutes au détriment de tous ceux qui tiraient leur subsistance de cet espace. Dés lors, les feux de brousse dans la communauté rurale de Kandia doivent faire l'objet d'une attention particulière de la part des populations pour sauvegarder les efforts consenties dans le cadre de la préservation de l'environnement et des ressources naturelles.

    3.4. Les autres formes d'exploitation des ressources forestières

    En dehors des différents usages faits des ressources provenant de la forêt qui sont mentionnés un peu plus haut, il existe d'autres utilités que les populations rurales en général tirent de ce milieu. Essentiellement, il s'agit des usages liés au bois de service, à la pharmacopée et à la cueillette.

    La forêt communautaire de Kandia a un potentiel de bois qui offre une diversité de services aux populations rurales. Ainsi, après la période des récoltes, certains paysans s'adonnent à la construction d'enclos pour leur bétail (chèvres et moutons). D'autres préfèrent clôturer leur maison et/ou d'autres espaces pour des activités de maraichage. Le bois de service est composé d'une coupe d'arbres morts pour les jardins de maraichage et parfois de troncs d'arbres vivants pour les clôtures des maisons.

    Photo18 : clôture à Doubirou Photo19 : Des clôtures faites avec les troncs d'arbres.

    clichés BALDE M. M., juin 2013.

    81

    Notons que le type de bois dépendant du choix de la personne. Il faut signaler qu'il ya un phénomène de coupes de troncs de calcédrat destinés à la charpente des bâtiments. Selon le président de la délégation spéciale de la C.R de Kandia, les demandes d'autorisation concernant ce type d'usage sont de plus en plus fréquentes. Ce qui montre la dynamique de constructions de maisons entamée par les émigrés dans la communauté rurale de Kandia.

    L'usage grandissant du bois de service est une pratique courante qui a une part, minime soit-elle dans le processus de déforestation de la forêt communautaire de Kandia.

    Pour la pharmacopée, les populations rurales font recours souvent aux feuilles d'arbres, les racines et les écorces qui servent à guérir certaines maladies. Par exemple durant nos enquêtes de terrain, certaines personnes nous ont affirmé que la médecine traditionnelle est encore bien implantée dans la zone. Elle permet aux populations de recourir à certaines plantes pour des besoins en santé. Néanmoins, en dépit des avantages qu'elle offre dans ce domaine, elle constitue une source de disparition progressive des essences utilisées. Le fait d'agresser l'arbre en coupant les écorces la rend plus vulnérable. En ce qui concerne les racines, ce sont eux qui permettent à la plante de tirer l'essentiel de sa nourriture dans le sol. Si ces dernières font l'oeuvre de coupes par les populations, c'est tout simplement la vie de la plante qui est menacée. Malheureusement, ces pratiques sont courantes dans la zone.

    Par ailleurs, la cueillette est une activité pratiquée par les populations des villages proches du massif forestier. Toutefois, il est difficile d'avoir des données sur les quantités de fruits tirées chaque année. Cependant, le potentiel existant en la matière est considérable.

    Conclusion partielle

    Les activités de l'homme dans le but de satisfaire ses besoins vitaux et parfois même exagérés sont à l'origine d'un processus de dégradation du couvert végétal dans la forêt communautaire de Kandia. Un ensemble de facteurs à la fois agricoles, sociaux, politiques et économiques conditionnent et influencent la dégradation du couvert végétal dans la communauté rurale de Kandia. Mais si l'homme est un prédateur, il est aussi restaurateur du milieu naturel à travers les aménagements qu'il effectue. Dés lors nous allons nous intéresser aux différentes stratégies de gestion mises en oeuvre dans la forêt communautaire de Kandia.

    82

    Chapitre 6 : Les différentes actions menées au nom de la gestion du massif forestier

    Dans ce chapitre, se pose la question de la gestion de la dégradation constatée du couvert végétal par les différents facteurs évoqués un peu plus haut. Il s'agit de faire un état des lieux des différentes actions menées dans ce cadre, de s'interroger sur leurs pertinence et limites. Enfin, on tentera de faire une synthèse des expériences menées dans le cadre de la gestion des ressources naturelles dans l'objectif de proposer un modèle applicable ou adaptable à cette espace.

    On peut dés lors, affirmer que processus de dégradation du couvert végétal observé depuis plusieurs années dans la forêt communautaire de Kandia a fait l'objet de plusieurs initiatives ayant comme dénominateur commun la volonté de maitriser le phénomène de fléchissement des ressources forestières. Ainsi, plusieurs acteurs sont au centre de ces différentes actions menées dans le cadre de la gestion de la dégradation.

    1. Les acteurs de la gestion de la dégradation du couvert végétal

    Nous retrouvons trois acteurs essentiels dans la perspective de gestion de la dégradation des ressources naturelles dans la C.R de Kandia.

    1.1. Le conseil rural

    La loi 96-07 du 22 mars1996 a transféré d'importantes compétences aux collectivités locales parmi lesquelles figurent l'environnement et la gestion des ressources naturelles.

    La décentralisation, perçue comme un moyen de transfert d'autorité et de responsabilité des fonctions et des compétences du pouvoir central aux collectivités locales, vise, outre le renforcement de la démocratie, à donner davantage de pouvoir de décision à celles-ci pour les affaires qui touchent directement la vie de leurs citoyens. Cependant, en matière de gestion des ressources naturelles, il y'a une définition précise des pouvoirs et des compétences qui sont transférées aux collectivités locales. Ces compétences sont liées à la gestion des ressources forestières du Domaine National comprises dans le périmètre de la communauté rurale. Selon le code forestier du Sénégal (1998) « L'exercice des compétences que l'État a transférées sur les forêts et terres à vocation forestière du domaine national aux collectivités, ainsi que les obligations qui en découlent pour celles-ci, sont précisés, pour chaque collectivité locale, dans un plan d'aménagement forestier approuvé par le Représentant de l'État (article L.7) ». Autrement dit que les terres du domaine national se trouvant dans le

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    périmètre d'une communauté rurale doivent faire l'objet d'un aménagement préalable avant toute action de gestion de la part de celle-ci.

    1.2. L'administration forestière

    Dans le cadre de transfert de la gestion de l'environnement et des ressources naturelles aux collectivités locales, la mission des agents des eaux et forêts se résume à un appui technique, à une protection et une surveillance des ressources. Ainsi, en dépit, de la décentralisation de la gestion des ressources naturelles aux collectivités locales, l'administration forestière reste une partie prenante dans la gestion de ressources forestières. D'ailleurs, toutes les tâches techniques comme la délivrance des titres d'exploitation, le contrôle de la production ainsi que les saisies et sanctions sur les contrevenants restent confiés à l'administration forestière. Celle-ci conservera donc le contrôle des recettes de l'exploitation même si une partie de celle-ci sera cédée à la collectivité locale qui aura réalisé des aménagements dans les formations forestières relevant de sa compétence.

    1.3. Les populations locales

    Les populations locales sont désormais intégrées dans la gestion des ressources naturelles dans le cadre de la décentralisation par les autorités au niveau des conseils ruraux. C'est l'approche participative qui est de plus en plus mise en exergue par les pouvoirs publics. La gestion participative des ressources naturelles procède d'une approche par l'intermédiaire de laquelle les populations influencent la vision et les outils de gestion d'une ressource naturelle qu'elles considèrent comme partie intégrante de leur patrimoine. Elle postule la responsabilisation des acteurs locaux dans l'élaboration, la mise en oeuvre et le suivi-évaluation des stratégies de gestion et d'aménagement de la ressource, d'une part, et la reconnaissance des savoirs et savoir faire locaux comme outils pertinents de gestion durable, d'autre part. En outre, les populations sont celles qui sont les plus concernées car elles sont en contact permanent avec les ressources. Par conséquent, elles sont à même de mieux gérer les ressources de leur terroir.

    1.4 Les structures d'appui au développement : Projets et ONG

    Quelques organisations et programmes interviennent dans la communauté rurale de Kandia. Elles sont entre autres : CRS, CLCOP, TOSTAN, World Vision, UNICEF, Medicos del mundo et interviennent dans la micro finance, la commercialisation des produits forestiers, l'encadrement des organisations paysannes, le maraîchage entre autres.

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    L'objectif principal de ces organisations est de conduire le développement de la CR dans un secteur bien déterminé.

    Notons aussi l'implication indirecte de la sous- préfecture et du service technique comme le CADL (Centre d'appui au développement local).

    2. Aperçu global des différentes actions menées au nom de la gestion des ressources forestières dans la C.R de Kandia

    2.1. Contexte et état des lieux

    Les différentes investigations menées sur le sujet ont permis d'identifier plusieurs approches dans la gestion de la dégradation de la forêt communautaire. On peut même dire que l'aménagement de cette forêt est une réponse au phénomène de dégradation des ressources forestières observé à l'échelle de la communauté rurale de Kandia. En effet, l'idée de créer une forêt communautaire dans la C.R de Kandia remonte à 2005. L'objectif était de constituer une réserve forestière pour la communauté rurale en faisant des reboisements et en entretenant les espèces.

    Au départ, toutes les parties prenantes (conseil rural, les agents des eaux et forêts, populations locales) s'étaient impliquées dans la mise en oeuvre du projet. Cette mobilisation des différents acteurs avait permis de noter des améliorations dans la préservation de ce massif forestier contre les agressions anthropiques. En fait, dans cet espace, toute coupe de bois ainsi que le pâturage des animaux étaient interdits. Toutefois, cet engouement n'a duré que les deux premières années qui ont suivi l'aménagement de cette forêt avant que les pressions anthropiques ne reprennent le dessus. Mais, il semble intéressant de jeter un regard sur les différentes stratégies qui se succédé dans le cadre de la gestion des ressources naturelles.

    2.2 Rappel historique de l'émergence d'une gestion décentralisée des ressources

    D'emblée, il faut dire que depuis fort longtemps, les ressources naturelles ont fait l'objet d'une gestion centralisée de la part des États. En effet, face à l'irrationalité supposée des ruraux, l'Etat - colonial puis indépendant - a voulu s'approprier les ressources naturelles pour

    en garantir une gestion « rationnelle » (Delville, 2001 ). Selon lui, dans bien des cas,
    l'argument de « rationalité » qui légitime l'intervention publique s'avère le plus souvent fondé sur une caricature des pratiques paysannes et sur des intérêts corporatistes plus que sur une analyse rigoureuse des pratiques locales.

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    Toutefois, cette approche verticale longtemps prônée par les dirigeants politiques a montré ses limites. Car elle n'a pas permis d'inverser la dynamique de régression des ressources naturelles. C'est fort de cet échec dans le domaine de la gestion des ressources naturelles et de l'environnement et de sa volonté de promouvoir une gestion de proximité que l'Etat du Sénégal a responsabilisé les collectivités locales dans plusieurs domaines. Ainsi, la réforme de 1996 constitue un changement d'approche dans le cadre de la décentralisation au Sénégal. Le transfert de l'environnement et de la gestion des ressources naturelles de l'État vers les collectivités locales est un tournant historique et une rupture dans les modes de gouvernance. Désormais, on parle d'implication des populations locales par la participation de ces dernières à la prise de décision.

    En fait, il faut noter que la décentralisation fait des collectivités locales le principal centre de prise des décisions relatives à la gestion des ressources naturelles en donnant des perspectives réelles de développement de l'entreprenariat rural privé. Les collectivités Locales sont le lieu de mise en oeuvre d'approches communautaires. La prise en compte des valeurs locales et de leur savoir faire est inévitable dans la conception, l'élaboration et la vulgarisation de technologies de gestion des ressources naturelles (PFS, 2005).

    2.3 Analyse des différentes actions menées dans le cadre de la gestion des ressources forestières

    La gestion participative des ressources naturelles à la mode à travers la décentralisation n'a pas été en reste dans la Communauté rurale de Kandia. En effet le cadre de la gestion des ressources forestières, on peut dire les populations riveraines de la forêt communautaire de Kandia ont été impliquées par le service forestier et encouragées par les autorités locales.

    En fait, (mais en réalité, il ne l'est pas) après le supposé aménagement de ce massif par le service des eaux et forêt de Vélingara, les populations locales devaient assurer le rôle de protection et d'entretien des plantes reboisées. Pour cela, une stratégie incitative fut adoptée pour mieux les motiver à remplir efficacement cette mission. Il s'agissait concrètement de fournir aux populations des vivres de soudures pendant l'hivernage. Des campagnes de reboisement étaient alors organisées par les villages environnants, regroupés en une association inter-villageoise durant l'hivernage. Le service des eaux et forêts fournissait un appui en pépinières ainsi que le matériel nécessaire aux opérations de reboisement. En retour, les personnes qui participaient à ces travaux bénéficiaient d'un appui en vivres de soudure. La distribution de ces vivres était faite en fonction du poids démographique de chaque village. Cette méthode avait fait que les populations s'intéressaient à la préservation de cette forêt.

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    Car elles trouvaient leurs intérêts dans la distribution des vivres de soudure (riz, huiles, niébé...). Il faut noter que pendant la saison sèche, le travail des populations riveraines du massif consistait à établir des pare-feux pour prévenir les incendies. D'après monsieur Séne, le chef de secteur du service des eaux et forêts de Vélingara, le but visé était d'accompagner ces populations dans la gestion de leur environnement en les encourageant à mener des actions allant dans le sens de surveiller les coupes et les feux de brousse. D'ailleurs, ce sont ces personnes qui sont les principales bénéficiaires des ressources dont dispose cet espace. S'il y'a une menace de disparition de ces ressources, elles sont les premiers concernées.

    Par ailleurs, rappelons que le processus de décentralisation qui donne compétence de gestion de l'environnement aux collectivités locales est une forme de responsabilisation de celles-ci. Par conséquent, la gestion de cette forêt communautaire relève du conseil rural de Kandia. A ce niveau, une commission composée d'une dizaine de personnes est chargée de surveiller le massif contre l'exploitation clandestine et frauduleuse du bois. Mais, selon les populations riveraines que nous avons pu interrogées, ces agents communautaires ne font que très rarement des descentes sur le terrain et seraient corrompus par les contrevenants. Malheureusement durant notre séjour de terrain, nous n'avons pas pu les rencontrer pour vérifier ces propos. Quoiqu'il en soit, la dégradation des paysages végétaux n'est plus à démontrer. Il suffit de se rendre sur les lieux pour le constater.

    L'examen des différentes stratégies menées dans le cadre de la gestion de la dégradation du couvert végétal montre qu'il y'a parfois des difficultés de coordination entre le conseil rural et le service des eaux et forêts de Vélingara. Les premiers affirment que les agents des eaux et forêts ne remplissent pas leur rôle de surveillance des ressources forestières contre l'exploitation frauduleuse tandis que les seconds pensent que la responsabilité incombe au conseil rural. Sans trop nous attarder à ces divergences d'opinion, notons simplement que la gestion des ressources naturelles dans le département de Vélingara n'est pas aisée pour l'administration forestière.

    En effet, ce département partage près de 200 kilomètres de frontières avec trois pays de la sous région : Gambie, Guinée Bissau et Guinée Conakry. Cette position géographique pose de véritables défis dans la surveillance de l'ensemble de cet espace. La porosité des frontières fait qu'il est difficile, voire impossible de contrôler les différents flux de personnes et de biens qui se déroulent entre ces pays.

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    En outre, l'administration forestière dans le département de Vélingara est confrontée à un manque de personnel et de moyens logistiques. A cet effet, le chef de secteur du service des eaux et forêts de Vélingara nous informait que la dernière dotation en matériels remonte à l'année 2007. Ce qui illustre les conditions difficiles de travail des agents chargés de la surveillance et de la protection des ressources forestières dans cette partie du Sénégal.

    Toutefois, en dépit de ces difficultés rencontrées, l'administration forestière dans le département de Vélingara effectue un travail remarquable. A titre illustratif, en 2009-2010, 60 millions de francs de recettes contentieuses ont été versés au trésor public de Vélingara. Selon l'article 30 de la loi n°96 -07 du 22mars 1996 portant transfert de compétences aux régions, communes et communautés rurales et de l'article R 65 du décret n°98-164 du 20 février 1998 portant application de la loi n°98-03 du 08 janvier 1998 portant code forestier, le conseil rural perçoit les 7/10 du montant des amendes dont les infractions ont été constatées dans les forêts de la communauté rurale en dehors du domaine forestier de l'État. Ainsi, ce sont 70% de cette somme qui ont été reversées dans les caisses des collectivités locales du département de Vélingara, soit 42 millions de francs. Cette performance montre le dynamisme des agents des eaux et forêts. Ceci témoigne de la volonté de lutter contre l'exploitation illégale des ressources forestières de la part du service en question.

    En ce qui concerne la communauté rurale de Kandia, il y'a encore des efforts à faire. Si la plupart des conseils ruraux disposent de budgets dérisoires, limitant ainsi sévèrement leur capacité d'entreprendre les actions les plus fondamentales liées à l'exercice des compétences qui leur sont transférées (Écho des Collectivités Locales n°3, 2002 cité par Déthié S. Ndiaye et ali.)17, celui de Kandia n'a pas défini tout de même une stratégie claire allant dans ce sens. A part les quelques actions de sensibilisation des populations, il se contentait jusqu'à une date récente, de dénoncer une exploitation frauduleuse des ressources de son territoire et la passivité des populations locales face au phénomène.

    Enfin les populations quant à elles, ont adopté de manière générale, une stratégie qui a consisté à s'organiser en association inter-villageoise de surveillance de la forêt contre les exploitants clandestins. Mais, cette association inter villageoise n'est pas arrivée à des résultats satisfaisants.

    17 Déthié S. Ndiaye et ali. ? Gouvernance locales et gestion décentralisée des ressources naturelles au Sénégal, 8p.

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    En effet, après quelques années de travail, la plupart des membres se sont retirés. Ils invoquent le fait de voir que l'administration forestière relâche les personnes prises en flagrant délit dans le massif par ces mêmes populations. En fait, elles ne comprennent pas pourquoi les contrevenants ne sont pas punis. Selon ces populations, il y'aurait une corruption de certains agents chargés de patrouiller dans la zone. Notons que pour le village de Doubirou, des résultats intéressant ont été obtenus car les populations ont réussi à interdire aux charretiers gambiens de traverser leur village pour la coupe de bois de chauffe. Mais à part cette exception, l'attitude de la population de manière générale se résume soit à un refus d'accueillir dans leurs villages des exploitants forestiers ainsi que les éleveurs venus de la Gambie, soit à l'accueil favorable de ceux-ci.

    Si les populations locales ne sont pas déterminantes dans la régression des ressources ligneuses, elles n'ont pas entrepris d'actions significatives de restauration et de protection de ces ressources, pourtant vitales pour leur survie. Même les actions de sensibilisations menées par le conseil rural et l'administration forestière n'ont pas permis à ces dernières de prendre conscience des défis qui se posent pour la sauvegarde de cet écosystème.

    Mais au-delà de cette analyse qui essaie de comprendre l'attitude des acteurs pris individuellement, notons que l'élaboration du plan d'occupation et d'affectation des sols marque un tournant dans la prise en charge de la question.

    En effet, face à la dégradation continue de l'environnement et des ressources naturelles, le Conseil rural de Kandia appuyé par ses partenaires a décidé de mettre en place un POAS pour mieux gérer l'espace communautaire. Il faut dire que le POAS est devenu un outil pertinent, de plus en plus incontournable dans la gestion durable des ressources naturelles à l'échelle communautaire. Les dispositions qui y sont prises de manière consensuelle par les populations concernent principalement le domaine agricole, le domaine pastoral, domaine forestier, le domaine de la pêche et le dispositif organisationnel.

    Ainsi donc, le Plan d'Occupation et d'Affectation des Sols est « la traduction des règles issues de la Convention Locale mais appliquées à l'espace ». Il tire alors sa légitimité de la démarche participative et inclusive de la Collectivité Locale (POAS de Kandia, 2012.

    On comprend dés lors la bonne volonté des autorités locales de faire face à la dégradation des ressources naturelles et particulièrement à l'exploitation frauduleuse du bois dans la Communauté rurale. Cette nouvelle démarche s'articule autour de règles qui sont établies dans le cadre d'une convention locale, résultat d'un processus participatif et inclusif de tous

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    les acteurs. Ainsi, le POAS propose un ensemble de règles qui permettent de réguler l'usage des ressources de même que de prévenir des conflits sociaux.

    L'application de cette convention par les populations locales devrait en principe améliorer la gestion des ressources naturelles et permettre par la même occasion aux autorités locales de mieux prendre en charge les questions relatives à l'environnement. Ces règles indiquent la conduite à adopter dans l'utilisation de l'espace et des ressources. Le non respect de ces règles entraine des sanctions en fonction de la gravité de la faute.

    Notons tout de même que ces sanctions ont une portée contraignante pour l'usager et ne comportent pas un volet de réparation. Par exemple, ce sont des amendes qui sont imposées aux personnes pris en flagrant délit. Mais Philipe Lavigne (2001), nous rappelle que des règles efficaces ne peuvent reposer sur la seule coercition : « même en supposant que les personnes concernées ne s'y dérobent pas, constater les infractions, juger, faire appliquer les sanctions est très coûteux. Les règles seront d'autant mieux respectées que les acteurs s'y conforment spontanément et que l'application de sanctions reste exceptionnelle. On peut compter sur la bonne volonté, sur l'adhésion idéologique à des règles communes, sur le poids de la tradition, mais rien de tout ça ne suffit (p.9) ».En fait, selon lui, les acteurs ne respecteront les règles s'ils ont un intérêt objectif à jouer le jeu collectif, même si cela a un coût à court terme. Ce sera le cas si les règles sont légitimes et réalistes, s'il y a des avantages objectifs à les respecter.

    Des interrogations se posent alors quant au respect par les populations locales des règles issues du POAS. Car on peut dire qu'il n'y a vraiment pas une forte adhésion idéologique pour reprendre l'expression de Delville. L'analyse de la situation permet de craindre un échec par rapport à l'application de la convention locale. Nous y reviendrons plus tard. Signalons seulement que l'approbation du POAS par le sous-préfet de Kounkané date de juin 2012, période assez courte pour évaluer ses impacts dans le cadre de la gestion des ressources naturelles. D'ailleurs, il est prévu une période test de 2 ans pour l'application du POAS.

    Au total, ces sont les différentes actions qui ont été menées pour faire face à la dégradation des ressources forestières dans la communauté rurale de Kandia. Mais interrogeons nous sur la portée de ces différentes initiatives pour essayer de ressortir les limites éventuelles.

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    2.4 Les limites des différentes actions entreprises dans la gestion de la dégradation du couvert végétal

    Le contexte de décentralisation au Sénégal peut être considéré comme une opportunité pour les collectivités locales de promouvoir une gestion durable et participative des ressources naturelles à l'échelle locale. Pourtant, l'évaluation de la décentralisation dans le domaine de la gestion des ressources naturelles et de l'environnement a montré que les collectivités locales ont des limites certaines pour assumer, de manière satisfaisante, leur rôle (PFS, 2005). Ces limites s'articulent autour des points suivants :

    - manque de précision dans la formulation de certaines dispositions se traduisant par de multiples interprétations sur les prérogatives des élus en matière foncière et forestière par exemple ;

    - faible engagement de la part des élus dans la prise en charge effective de la gestion de ressources forestières ;

    - insuffisance de la coordination, de l'harmonisation et de l'intégration des interventions des différents acteurs, et notamment des structures d'appui au développement forestier ;

    - insuffisance de l'expertise au sein des CL malgré les arrangements permis par les conventions pour mettre à leur disposition une assistance technique disponible au niveau des services déconcentrés ;

    - insuffisances des moyens financiers et logistiques pour faire face à leurs responsabilités dans les domaines transférés.

    Ainsi donc, ces différentes limites énumérées par ce document mettent en évidence les difficultés que les collectivités locales éprouvent pour faire face à leurs responsabilités. C'est ce qui fait qu'on note également des insuffisances en ce qui concerne la Communauté rurale de Kandia concernant la gestion des ressources naturelles et l'environnement.

    En effet, il existe un manque de coordination entre le conseil rural et l'administration forestière. Ce qui ne contribue pas à une efficacité dans les interventions en vue de contrecarrer les exploitants frauduleux du bois d'oeuvre dans la partie Nord de la C.R. Le manque de moyens financiers et de personnels qualifiés qui caractérisent la plupart des communes rurales constitue un handicap à l'accomplissement des missions confiées au conseil rural.

    En outre le choix des personnes chargées de surveiller les coupes de troncs d'arbres ainsi que d'autres formes d'exploitation dans la forêt communautaire de Kandia obéit souvent à

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    l'appartenance d'un parti politique. Cette démarche ne privilégie pas les personnes motivées et capables de remplir la tâche. On note que la plupart de ces individus choisis habitent dans des villages éloignés de la forêt. Ce qui ne leur permet pas toujours de s'imprégner de ce qui se passe dans le massif forestier alors que le choix d'autres personnes habitants des villages alentours, aurait pu être plus pertinent.

    En plus, l'attitude des populations locales ne favorise pas une gestion participative et responsable de la dégradation de la forêt. Le fait d'observer le « pillage » des ressources par des personnes venues d'ailleurs sans poser des actes responsables peut être assimilable à de la complicité passive. Ce sont les limites qui accompagnent les différentes actions menées dans la gestion de la dégradation de la forêt communautaire de Kandia.

    Toutefois, revenons sur le POAS qui certes, peut être un bon outil de gestion des ressources naturelles mais requiert une acceptation et une implication effective des populations locales. On peut dire qu'en dépit de l'implication des populations dans le processus d'élaboration de ces règles qu'il y'a des difficultés pour changer le comportement des usagers des ressources. Il ne suffit pas de réunir des personnes et leur demander leur vision par rapport à la gestion de leur espace communautaire pour que ces règles soient appliquées. Ce ne sont pas les populations qui se sont levées un bon jour pour prendre en charge la question de la dégradation des ressources naturelles, mais plutôt le conseil rural. Il ne s'agit donc pas ici de communautés locales qui montrent leur prise de conscience et leur capacité à trouver des arrangements institutionnels endogènes en faveur d'une gestion collective et plus durable des ressources naturelles (Etienne Verhaegen : 178).18 A tire illustratif, les observations de terrain pour le moment n'indiquent pas de changement sur de l'état de dégradation des ressources naturelles. Les entretiens effectués auprès de certaines personnes montrent que les populations n'ont pas encore intégrées cette nouvelle convention dans leur conduite quotidienne. Certainement, il faudra patienter un certain temps pour faire une évaluation de l'impact du POAS dans les objectifs qui lui sont assignés. Mais en attendant, essayons de poser quelques pistes de réflexion pour un modèle de gestion des ressources au niveau local.

    18 Il s'agit d'une contribution intitulé : Pouvoir local et gestion des ressources naturelles au Burkina Faso in Sociétés rurales et environnement. Gestion des ressources dynamiques locales au sud sous la dir. de G. Rossi, Ph. L. Delville et Didier Narbeburu.

    92

    3. Quelle perspective de gestion des ressources forestières dans le cadre du

    développement durable ?

    Tout d'abord rappelons que les ressources naturelles renouvelables (ressources aquatiques, ligneuses, halieutiques, cynégétiques, pastorales, produits forestiers non ligneux, etc.) se caractérisent par le fait qu'elles sont prélevées mais non produites. Dès lors, l'homme n'a que peu de moyens de peser sur les volumes disponibles, qui découlent essentiellement de la productivité de l'écosystème en question (sauf de façon indirecte, par protection). Une exploitation durable passe essentiellement donc par le contrôle des prélèvements, qui doivent rester inférieurs à la productivité de l'écosystème. D'où les débats sur la façon de contrôler ce taux de prélèvement, d'autant que, le « stock » étant limité, les ressources sont de type « soustractif » : tout ce qui est prélevé par un individu ne pourra pas l'être par un autre, d'où une concurrence entre usagers potentiels (Ph. L. Delville)19.

    On peut essayer de s'appuyer sur des expériences de gestion menées ailleurs pour poser quelques pistes de réflexion. Au demeurant, précisons qu'on ne prétend pas jouer le rôle de consultant mais plutôt d'apporter une réflexion sérieuse sur la question car c'est un des défis qui se posent aux décideurs. Notons qu'il existe une diversité des formes de participation communautaire à la gestion des ressources naturelles qui ont fait leur apparition aux quatre coins du continent au cours des vingt dernières années (Roe D., Nelson F. et Sandbrook C. (sous la dir.), 2009 .

    Cependant, dans le cadre d'identifier des pistes de solution pour une gestion durable des ressources forestières, on peut en premier lieu se référer aux différents projets et programme menés à l'échelle de la région de Kolda. Il s'agit particulièrement du Plan d'action pour l'aménagement forestier et l'approvisionnement durable en combustibles domestique élaboré par le conseil régional de Kolda pour la période 2013-2017.Ce plan est adossé à la Nouvelle politique forestière du Sénégal, évoquée un peu plus haut et au Plan d'action environnemental régional (PAER) qui sont des outils importants, des cadres stratégiques pour une gestion durable des ressources forestières de la région. Les objectifs visés à travers ce document sont entre autres :

    ~ l'aménagement des formations naturelles classées et de terroir pour asseoir durablement leur gestion et leur valorisation avec comme actions phares un inventaire et une description des peuplements afin de connaître les ressources forestières disponibles et les potentialités de régénération car comme le note la PFS (2005)

    19 Delville Ph. L., 2001.Quelle gouvernance des ressources renouvelables ? La gestion des ressources naturelles dans le contexte de la décentralisation en Afrique de l'ouest

    93

    l'évaluation de l'état actuel des ressources forestières se heurtent à l'absence d'inventaires nationaux du potentiel.

    · Promouvoir l'utilisation de la meule Casamance pour une meilleure valorisation du bois ;

    · Renforcer la lutte contre les feux de brousse et l'exploitation clandestine du bois.

    Dans ce contexte, la communauté rurale de Kandia pourrait bénéficier l'appui de ce projet pour non seulement aménager ce massif et procéder à l'inventaire des peuplements végétaux. Ceci permettrait une meilleure satisfaction des besoins des populations en garantissant leur approvisionnement durable en combustible ligneux. Il appartiendra à la collectivité locale de Kandia de travailler dans ce sens avec ses partenaires pour arriver à cet objectif.

    Dans ce même ordre d'idées, il faut dire que la région de Kolda a eu la chance de bénéficier un certain nombre d'expériences intéressantes dans la gestion des ressources forestières avec l'appui de ses partenaires. Certaines communautés rurales comme celle de Dioulacolon située dans le département de Kolda constitue un bon exemple. En fait, cette C.R est arrivé à mettre en place un dispositif de gestion des ses ressources forestières avec l'appui du PERACOD20. C'est un projet qui concerne la filière charbon de bois où les populations locales ont réussit à prendre en charge toutes les activités (de la coupe à la vente). C'est un cas très intéressant qu'on peut adapter à la C.R de Kandia.

    En effet, la particularité de l'expérience menée à Dioulacolon est que les populations locales sont au coeur du dispositif de gestion de la filière. Elles se sont organisées en Comité villageois de gestion et en association et/ou GIE (groupement d'intérêt économique). Le tout est coordonné par un comité inter villageois (CIV). Précisons que c'est sur la base d'un contrat de gestion que le conseil rural de Dioulacolon a confié la gestion de la forêt au CIV ; c'est-à- dire qu'il est responsable de la mise en oeuvre du Plan d'aménagement et de gestion de la forêt. C'est donc le CIV qui est habilité à se faire délivrer au niveau du service forestier, les titres d'exploitation dans le cadre de la mise en oeuvre du plan de gestion. De même, c'est le CIV qui est habilité à délivrer les constats de production qui sont un préalable pour l'obtention des titres d'exploitation. Cependant la mise en oeuvre des filières mentionnées dans le plan d'aménagement est assurée par les GIE.

    20 PERACOD : Programme de Promotion des Énergies Renouvelables, de l'Électrification rurale et de l'Approvisionnement en Combustibles Domestiques financé par la coopération allemande

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    Donc, on le voit bien ce sont des mécanismes qui responsabilisent l'ensemble des parties prenantes. Ce qui laisse de place à aucune association d'exploitants extérieure de la Communauté rurale. Mais notons que si cette expérience à réussi, c'est que les populations locales y trouvent leurs intérêts et qu'elles ont été impliqué depuis le début du processus. D'ailleurs la clé de répartition des fonds issus de la vente du charbon s'établit comme suit : 80% sont destinés aux producteurs locaux, 10% au Comité inter villageois (CIV) pour financer l'exécution du plan d'aménagement à l'échelle du bloc (lutte contre les feux de brousse, reboisement, mise en défens, entretien des pare feux, régénération et 10% au conseil rural pour participation au budget du conseil rural. On remarque que cette exemple contribue non seulement à une meilleure gestion des ressources forestières mais aussi à améliorer le niveau de vie des populations notamment par les revenus tirés de cette filière.

    Certes, la communauté rurale de Kandia n'est pas encore ouverte à la filière du charbon de bois. Néanmoins cet exemple d'implication des populations locales dans un processus tel que celui-ci peut être très intéressant. Car il a de fortes chances de parvenir à une implication effective des populations locales dans la gestion des ressources de leur terroir. C'est donc un modèle qu'on peut s'inspirer et l'adapter en fonction du contexte local qui est celui de l'exploitation clandestine des ressources forestières. On pourrait appuyer les populations à valoriser les ressources forestières non ligneuses comme la filière anacarde et par la même occasion les inciter à faire des reboisements. La clé de leur implication est de faire en sorte qu'elles prennent conscience du phénomène de dégradation de leur milieu ou qu'elles éprouvent un réel intérêt à le faire. D'ailleurs, c'est dans ces conditions qu'est apparue ce que V. Etienne (1998) appelle « une expérience spontané, endogène de construction institutionnelle pour la protection de la couverture ligneuse » au Burkina Faso. Essayons de voir l'originalité de cette démarche.

    En effet, il s'agit d'un comité inter villageois de gestion d'une brousse constitué par 6 villages. Ce comité a été en fait, initié par un villageois autochtone qui n'est ni un chef de village, ni un chef de terres mais qui avait travaillé en Cote d'ivoire. Certainement son expérience acquis durant son séjour a beaucoup pesé dans le cadre de cette initiative. En outre, la particularité de ce comité est qu'il s'est constitué en dehors de toute aide financière et fonctionnait jusque-là sans ressources financière extérieure. C'est une réponse endogène des populations face à « une dégradation importante de la brousse et devant l'incapacité des autorités de réglementer ce types de problèmes, que les autochtones Nuni, les migrants Mossi et gourmanché, et les éleveurs peul se sont accordés à la fois sur un ensemble de règles de

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    gestion de la brousse, sur les sanctions à prendre en cas de non respect du règlement, ainsi que sur la manière de faire respecter la loi (p.180) ».

    Il est important de retenir ici que ce sont les populations qui ont pris conscience du phénomène de dégradation de leur milieu de vie pour se mettre d'accord sur un ensemble de règles de gestion ; une convention locale. C'est toute la portée de ce cas car ce ne sont pas des personnes venues d'ailleurs qui leur ont donné cette de prise conscience. En plus, les initiateurs du projet n'ont aucun pouvoir ou influence au niveau local. C'est après un diagnostic et une autocritique de leurs pratiques que les habitants de ces villageois ont estimé nécessaire qu'il fallait agir sans chercher un appui extérieur. Dés lors, « l'argumentaire selon lesquelles seules les populations locales peuvent avoir un intérêt à préserver une ressource à long terme, et qu'elles ne peuvent le faire que si elles y ont un intérêt objectif, que si elles ont un droit exclusif sur la ressource, ainsi qu'une capacité à définir et faire appliquer des règles d'accès et d'exploitation semble incontestable » (Delville, 2001 : 24).

    Une autre originalité de cette expérience locale de gestion de la brousse réside dans le fait que les règles établies ne sont pas uniquement coercitives ; elles comportent également un volet de réparation de la faute commise. Par exemple, dans le cadre de la coupe du bois, toute personne pris en flagrant délit va non seulement planter un arbre et l'entretenir mais aussi payer une somme prévue par le règlement. Enfin pour donner plus de crédibilité à cette convention, les responsables ont sollicité l'approbation du préfet qui sert de dernier recours en cas de refus d'un individu de se plier aux règles établies. C'est donc un exemple très intéressant de gestion de ressources par les populations locales.

    Dans le cas du POAS de la Communauté rurale, il faut dire qu'il y'a certes des règles qui sont établies mais elles relèvent plus d'une vision technicienne plutôt que celle des populations. Aussi, ce n'est pas une initiative des populations locales mais plutôt du conseil rural. Même pour l'application, les mesures sont plutôt coercitives. Or il ne suffit pas d'imposer ce type de règles pour avoir l'adhésion des populations. Cela d'ailleurs peut entrainer un effet contraire à l'objectif recherché. Par ailleurs, le POAS, n'indique pas les mécanismes qui feront respecter les règles. Donc il faudrait encore que le conseil rural se donne les moyens de faire respecter cette convention au niveau local.

    Au total, ces quelques exemples de gestion des ressources naturelles dans lesquelles les populations locales sont impliquées constituent des cas qui peuvent servir de point de départ pour asseoir une gestion durable des ressources naturelles dans la Communauté rurale de Kandia.

    96

    Conclusion partielle

    Devant le processus de recul du couvert végétal de la forêt communautaire de Kandia, plusieurs actions visant à inverser la tendance ont été menées par les différentes parties concernées. La gestion des ressources naturelles en générale et celles forestières en particulier s'inscrit dans une logique de décentralisation qui vise l'implication de toutes les parties prenantes. Mais, l'analyse des différentes stratégies menées dans ce cadre, montre des insuffisances liées au manque de coordination des actions d'une part, et à la limite des moyens disponibles d'autre part. En dépit de l'élaboration d'un plan d'occupation et d'affectation des sols par le conseil rural de Kandia, il faut dire que le processus n'est pas encore inversé. D'où la nécessité de mener une réflexion dans la perspective d'une gestion efficiente et durable de cet écosystème. En prélude à cette réflexion, un certain nombre d'expériences de gestion des ressources naturelles menées en Afrique, et même au niveau de la région de Kolda pourraient servir de point de départ.

    97

    Conclusion générale

    98

    Au terme de ce travail mené dans le cadre du mémoire de master II, on peut tirer quelques enseignements utiles. Tout d'abord, la dégradation progressive des conditions climatiques a des incidences négatives sur la couverture végétale. En effet, l'évolution des conditions climatiques de 1995 à 2010 montre une variation spatio-temporelle dans le département de Vélingara. En réalité, on assiste depuis plusieurs années à une péjoration des conditions climatiques qui se traduit par une fragilisation de la couverture végétale. Cette fragilisation est perceptible à travers le stress hydrique des plantes, l'augmentation de la mortalité, l'installation difficile de la régénération, la destruction progressive du tapis herbacé et l'augmentation de la pression sur les arbres sur pied. Les facteurs climatiques ont donc une réelle emprise sur le développement des formations forestières mais ils ne sont pas les seuls responsables de la dégradation du couvert végétal dans la forêt communautaire de Kandia. Les actions anthropiques ont un impact déterminant dans ce processus.

    L'augmentation des superficies emblavées, la commercialisation de produits forestiers comme le bois d'oeuvre, les coupes abusives pour le bois de chauffe sont autant d'éléments qui ont conduit à la rupture de l'équilibre entre les prélèvements et le renouvellement des ressources. La compétition exercée par les différents usagers à travers des pratiques inadaptées comme la loi du « premier venu, premier servi » a laissé la porte ouverte à la dégradation. A ce titre, la croissance démographique a entrainé une augmentation des zones agricoles de 14kilomètres carrés entre 1999 et 2005.Dans la même période, la superficie de la formation forestière a connu une réduction de 14km2. Mais ces chiffres ne rendent pas compte de l'ampleur du phénomène actuellement. Depuis 2005, la pression a considérablement augmenté et les besoins sont devenus plus nombreux.

    Ainsi, face à cette situation, il est apparu plus que nécessaire pour les autorités de la communauté rurale en collaboration avec le service des eaux et forêts de Vélingara, de mener des actions de sensibilisation des populations et de surveillance des ressources. Plusieurs initiatives ont vu le jour avec les parties concernées. Parmi ces actions phares, on peut mentionner l'élaboration du plan d'occupation et d'affectation des sols (POAS) par le conseil rural en juin 2012. Ce qui illustre certes, la volonté politique des autorités locales. Cependant, les populations locales, acteurs majeures tardent encore à jouer pleinement leur rôle. C'est certainement ce qui explique le statu quo dans lequel la forêt communautaire de Kandia est plongée.

    99

    Dans une perspective de gestion durable des ressources naturelles au niveau local, il existe un certain nombre de publications scientifiques qui peuvent constituer le soubassement de toute réflexion allant dans ce sens.

    Au total, on peut retenir que la dégradation de la forêt communautaire de Kandia s'inscrit dans un processus global qui caractérise actuellement l'état des ressources naturelles. Du moins, c'est la vision qui domine dans les modes de pensée dans les pays en voie de développement. Mais, cette vision n'est-elle pas le résultat d'une construction que l'Occident qui a voulu nous imposer ? Georges Rossi nous invite à s'interroger sur un certain nombre d'idées reçues : « Faute de comprendre les autres logiques d'organisation du paysage, nos conceptions de l'organisation de l'espace ne sont-elles pas inadaptées et susceptibles d'être l'une des causes de l'échec de projets de développement ? Quelles sont les conceptions, les visions, de la nature et des sociétés tropicales qui sous-tendent implicitement les modes de gestion que l'Occident impose ? Au-delà, ces approches correspondent-elles à une réalité objective ou sont-elles marquées par notre propre histoire et notre culture ? »

    Dés lors, ces quelques interrogations posent la question de la construction des discours et du savoir scientifique. Cela nous amène alors à parler de la portée de ce travail de recherche ; tant il est vrai qu'il existe une grande rhétorique sur la dégradation de l'environnement dont nous n'avons pas échappé à son influence. En termes plus claire, il faut reconnaitre qu'en dépit de l'objectivité que nous avons essayé de faire preuve tout au long de ce travail, qu'il ne saurait être entièrement dépourvu d'une part de subjectivité. C'est la caractéristique de toute oeuvre humaine.

    100

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    Wébographie

    1-www.landsat.usgs

    2-www.minfinances.sn/pauvkd01.html

    103

    Table des matières

    Dédicace 1

    Remerciements . ..2

    Sommaire 3

    Avant-propos .4

    Liste des sigles et acronymes ..5

    Introduction générale 6

    Première partie : Cadre théorique, opératoire et méthodologique ....12

    Chapitre 1 : Le Cadre théorique .14

    1. Problème général de recherche 14

    2. Problématique 14

    3. Questions de recherche ...16

    4. Intérêt et justification de la recherche 16

    5. Délimitation du champ d'investigation 18

    6. Objectifs de la recherche 18

    Hypothèses 19

    Chapitre 2 : Le Cadre opératoire 20

    1. Définition des concepts ...20

    2. Opérationnalisation des concepts 22

    3. Schéma d'analyse conceptuelle 24

    Chapitre 3 : Le Cadre méthodologique 26

    1. La recherche documentaire 26

    2. Les enquêtes de terrain 33

    104

    3. Traitement et analyse des données collectées .34

    Deuxième partie : Analyse des facteurs de dégradation du couvert végétal et des stratégies de

    gestion ..35

    Chapitre 4 : Les facteurs physiques 37

    1. Morphopédologie et paysages végétaux 37

    2. Le climat 41

    2.1 La pluviométrie ....41

    2.2 L'évaporation ...46

    2.3 La température ....49

    2.4 L'humidité relative .51

    3. Le rôle des agents d'érosion 53

    3.1 Le vent .53

    3.2 L'eau, source potentielle d'érosion 54

    Conclusion partielle ..57

    Chapitre 5 : Les facteurs anthropiques, principale cause de la dégradation 58

    1. L'activité agricole, fondement de l'économie locale 58

    1.1 Caractéristiques générales de l'agriculture 58

    1.2 Lien entre agriculture et dégradation du couvert végétal .59

    1.3 L'évolution des superficies cultivées entre 1999 et 2005 63

    2. L'élevage, deuxième moteur de l'économie locale 66

    3. L'exploitation forestière, phénomène déterminant de la dégradation du couvert végétal dans

    la C.R de Kandia 69

    3.1 La coupe de bois d'oeuvre, la cause principale de la disparition de certaines espèces....70

    3.2 Bois-énergie et pratiques socioculturelles 75

    105

    3.3 Les feux de brousse

    ..77

    3.4 Les autres formes d'exploitation des ressources forestières

    80

    Conclusion partielle

    81

    Chapitre 6 : Les actions menées au nom de la gestion de la dégradation du massif

    forestier

    .82

    1. Les acteurs

    82

    1.1 Le conseil rural

    82

    1.2 L'administration forestière

    ...83

    1.3 Les populations locales

    83

    1.4 Les Structures d'appui au développement

    .83

    2. Aperçu des différentes actions menées

    .84

    2.1 Contexte et état des lieux

    84

    2.2 Rappel historique de l'émergence d'une gestion décentralisée des ressources

    naturelles ..84

    2.3 Analyse des différentes actions menée dans le cadre de la gestion des ressources

    forestières 85

    2.4 Les limites des actions entreprises 90

    3. Quelle perspective de gestion des ressources forestières dans le cadre du développement

    durable ?

    92

    Conclusion partielle

    96

    Conclusion générale

    ..97

    Bibliographie

    ..100

    Table des matières

    .103

    Liste des illustrations

    ..106

    106

    Liste des illustrations

    - Figures

    Figure 1 : Croquis de localisation du secteur étudié

    Figure 2 : Schéma d'analyse conceptuelle

    Figure 3 ; Carte des ressources naturelles de la C.R de Kandia

    Figure 4 Carte de l'occupation du sol en 1999

    Figure 5 : Carte de l'occupation en 2005

    - Graphiques

    Graphique 1 : Pourcentage des différents types d'occupation du sol de la C.R de Kandia

    Graphique 2 : Évolution interannuelle de la pluviométrie

    Graphique 3 : Comparaison des courbes d'évolution de la pluviométrie durant les mois de juillet, d'août et de septembre

    Graphique 4 : Évolution des moyennes annuelles de l'évaporation

    Graphique 5 : Evolution de l'évaporation (moyenne mensuelle) durant les mois de mars, d'avril et de mai

    Graphique 6 : Évolution de la température moyenne annuelle

    Graphique 7 : Évolution de l'humidité relative en pourcentage Graphique 8 : Types d'occupation en fonction des personnes interrogées

    Graphique 9 : Causes principales de dégradation du couvert végétal d'après les personnes interrogées

    - Photos

    Photo 1 : Feuilles d'arbres sèches

    Photo 2 : phénomène de stress végétal

    Photo 3 : sol nu dans le village de Doubirou

    Photo 4 : champ exposé à l'érosion éolienne

    Photo 5 : Cours d'eau temporaire

    Photo 6 : Défrichement à des fins agricoles dans la zone de Doubirou

    Photo 7 : Champ défriché

    107

    Photo 8 : Grand sujet coupé pour l'élevage

    Photo 9 : Coupe de troncs d'arbres

    Photo 10 : Tronc d'arbre destiné à la menuiserie locale

    Photo 11 : Les exploitants forestiers ciblent les grands arbres

    Photo 12 : Grand arbre ciblé pour la coupe

    Photo 13 : exploitation illégale du bois d'oeuvre

    Photo 14 : coupe du bois vert destiné à la cuisine

    Photo 15 : le bois est rassemblé

    Photo 16 : Feu de brousse a

    Photo 17 : Feu de brousse b

    Photo 18 : clôture à Doubirou

    Photo 19 : clôture faite à partir de troncs d'arbres

    Photo 20 : exploitant forestier à Djida

    - Tableaux

    Tableau 1 : Variables et indicateurs des concepts

    Tableau 2 : Collecte des données dans les différents lieux de documentation Tableau 3 : Techniques et outils de collecte des informations sur le terrain

    Tableau 4 : Évolution des superficies cultivées et de la végétation de 1999 à 2005

    108

    Annexes

    109

    Ardente Nationale de la Météorologie du Sénégal

    VELINIGARA Humidité moyenne mensuelle minimale en %

    Arnëe

    Janv

    Févr

    Mars

    Avr

    Mai

    Juin

    Juif

    Août

    Sept

    Oct

    Nov

    Déc

    1995

    13

    17

    25

    20

    21

    40

    60

    68

    70

    54

    29

    31

    11996

    19

    18

    24

    22

    25

    36

    52

    63

    66

    57

    30

    18

    1997

    16

    9

    11

    22

    33

    50

    56

    63

    66

    55

    36

    17

    1998

    13

    17

    11

    15

    19

    34

    56

    69

    70

    55

    29

    18

    1999

    13

    6

    11

    16

    20

    40

    58

    67

    66

    61

    33

    20

    2000

    15

    11

    13

    15

    21

    42

    59

    69

    68

    59

    31

    19

    2001

    13

    9

    11

    20

    21

    34

    52

    63

    65

    59

    29

    19

    2002

    19

    17

    11

    22

    25

    40

    55

    69

    62

    58

    26

    20

    2003

    16

    12

    12

    14

    22

    39

    57

    59

    68

    59

    38

    21

    2004

    16

    17

    11.

    15

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    56

    25

    20

    2005

    13

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    13 !

    20

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    34

    52

    59

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    23

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    2006

    14

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    14

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    56

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    2007

    12

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    12

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    65

    65

    50

    23

    16

    2008

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    14

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    63

    57

    33

    20

    2009

    15

    16

    15

    15

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    67

    58

    34

    19

    2010

    12

    15

    12

    18

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    62

    67

    64

    57

    30

    22

    295

    1996 1997 _998 1199 2009 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2003 2909 2010

    VELINGARA : Humidité moyenne menseuiie maximale en %

    Janv

    Févr

    Mars

    Avr

    Mai

    Juin

    Jail

    Août

    Sept

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    éc
    D71

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    57

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    88

    92

    94

    96

    94

    94

    62

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    52

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    72

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    92

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    93

    93

    73

    €1

    50

    42

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    L'exploitation du bois d'oeuvre est un facteur clé dans la disparition des grands arbres. Les arbres vivants coupés et sciés sur place. Ici on est à l'ouest du massif.

    Clichés : BALDE M. M. , 2013

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    Le phénomène d'exploitation clandestine du bois a pris des proportions très inquiétantes pour l'avenir de ce massif. Clichés : BALDE M. M., 2013

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    Le bois énergie est aussi un facteur de dégradation dans la mesure où l'on coupe les arbres vivants. Clichés : BALDE M. M., 2013






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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984